Démographie : toujours autant de cardiologues. Le secteur 2 pénalisé par le parcours de soins !

309 – Plusieurs explications peuvent être invoquées à la croissance toujours en cours des effectifs de cardiologues : – d’une part, les départs en retraite massifs des générations de l’immédiat après-guerre (nés entre 1946 et 1949) ne sont attendus qu’à partir de 2010. Pour des raisons de cumul insuffisant d’années de cotisations ASV, les aînés (issus des classes ayant vu le jour avant-guerre) avaient tendance à prolonger la durée d’activité au-delà de 65 ans ; on ne sait encore quelle sera, à ce propos, l’attitude de leurs cadets issus du « baby boom » ; – les flux d’entrées ne faiblissent pas, la cardiologie restant la discipline favorite des lauréats de l’ECN (Examen Classant National).

Une des questions posées à l’observateur – et qui fait l’objet d’un débat actuel dans le cadre de la préparation du prochain Livre Blanc de la cardiologie – porte sur le fait de savoir qui, de la ville ou de l’hôpital, aura le plus à souffrir de la décrue annoncée de la démographie médicale.

Plusieurs considérations doivent être simultanément envisagées : – d’une part l’hôpital est en voie de combler son déficit en PH de cardiologie, notamment en établissements périphériques, par suite de la qualification de diplômés étrangers, sans doute équivalente à deux promotions de cardiologues français ; – le nombre de postes hospitaliers publics s’en trouve diminué d’autant… à moins que les étrangers ne fassent le choix, qui leur est également accessible, du privé au bout de quelques années en secteur public, – la féminisation, dont la lente mais sûre montée en charge semblait devoir « profiter » au secteur public, trouve déjà, et trouvera, sans doute de plus en plus, à s’épanouir en libéral sous des statuts hybrides de collaborateur/remplaçant (voir tableau ci-après).

Si l’on analyse, cette fois, la démographie libérale à travers les secteurs d’exercice, on constate que la part des cardiologues autorisés à pratiquer des honoraires différents reste globalement stable, de l’ordre de 20 % de la spécialité. Toutefois, si les effectifs de titulaires du DP (Droit Permanent à Dépassement) sont en voie d’extinction… rapide (- 13,5 % sur un an), ceux du secteur 2 progressent plus que ceux du secteur 1, respectivement + 2,2 % contre + 1,0 %… Ce qui veut dire que les primo-installations sont plus souvent le fait d’anciens chefs de cliniques que d’anciens internes… Installations évidemment plus tardives et qui expliqueraient l’âge moyen de la première cotisation CARMF aux environs de… 38 ans.

Revenus

Le chapitre des recettes provenant de la pratique libérale au cours de ce même exercice 2005 selon la CNAM recèle une surprise et une confirmation.

Confirmation de la tendance, déjà visible depuis quelques années, selon laquelle les cardiologues affichent moins de revenus en secteur 2 qu’en secteur 1 ([Secteur 1 = toutes activités confondues, y compris les cardiologues interventionnels qui sont quasi exclusivement en secteur 1.)], respectivement 218.500 € contre 229.500 €, soit 11.000 € de différence, ce qui n’est pas mince on en conviendra. Le différentiel a même eu tendance à s’accentuer en 2005, exercice qui aura vu la mise en application du parcours de soins. L’activité des praticiens à honoraires libres a donc chuté cette année quand celle de leurs confrères du secteur 1 progressait de 1,3 %. Ce différentiel de recettes au désavantage des cardiologues du secteur 2, inédit en spécialités, s’explique en fait par une caractéristique spécifique à la cardiologie libérale : l’exercice en secteur 1 de la majorité sinon de l’exhaustivité des cardiologues interventionnels. Le niveau de leurs honoraires, largement au delà de la moyenne de leurs confrères, vient en effet gonfler artificiellement la moyenne des revenus à tarif opposable.

Pour les intéressés, l’impact sur les revenus est évident : l’économie du cabinet sort profondément affectée de cette disposition qui ne risque pas d’être adoucie par les réformes en gestation. Il est donc opportun, pour les lecteurs concernés, de s’intéresser à la (trop) peu connue « option de coordination » qui, à la différence de la défunte « fenêtre conventionnelle », reste ouverte en permanence. Rappelons que sous condition d’un certain quotas de tarifs opposables, elle prévoit la participation proportionnelle des caisses aux cotisations sociales (tableau ci-dessous).

La surprise – relative – vient de l’observation des chiffres du secteur 1, sensé profiter du parcours de soins par le biais d’une disposition conventionnelle connue sous l’acronyme de « DA » (Dépassement Autorisé), à portée de tout médecin recevant l’un de ses patients « hors parcours », c’est-à-dire en accès direct. Ce dispositif avait été inventé pendant la négociation conventionnelle pour servir d’ « espace de liberté » aux spécialistes à qui était fermé l’accès au secteur 2. Les chiffres 2005 attestent que les cardiologues ont fort peu profité de cette opportunité qui leur a été ouverte en 2005. Les revenus issus des dépassements en secteur 1 restent dérisoires (0,6 %), ce qui tend à prouver qu’on ne s’improvise pas « dépasseur ».

Les médecins et singulièrement les cardiologues sont-ils demeurés aussi réservés depuis ? L’expérience tend à prouver que oui, à l’instar d’ailleurs d’autres disciplines qu’on aurait pu croire plus libres comme la dermatologie ou l’endocrinologie…

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