Champagne A. Margaine : Cuvée « spécial club » brut 1999 – 51380 Villers-Marmery

Pourquoi, à l’occasion des fêtes de Noël, ne pas se noyer dans les bulles, afin d’oublier notre triste condition de cardiologue libéral ? La mini-tempête, produite dans la flûte, transforme une dégustation de Champagne en un moment unique, mais toujours répété et festif ! Rappelons schématiquement la vinification du Champagne : _ Pressurage des raisins issus de 3 cépages : un blanc : Chardonnay, deux noirs : Pinot Noir et Pinot Meunier en séparant chaque cuvée. _ Fermentation alcoolique classique. _ Assemblage des différents cépages, crus et ajout pour les cuvées non millésimées, de vins anciens, dits de réserve, pour une homogénéisation de l’appellation. _ Tirage en bouteille avec enrichissement de sucre et de levures qui provoquent une nouvelle fermentation appelée « prise de mousse » nécessitant une bouteille robuste et une solide fermeture, car la pression dans la bouteille est celle qu’un plongeur ressent à 50 mètres sous la mer ! Ce n’est qu’à l’ouverture de la bouteille que sont libérés les 5 litres de gaz carbonique en excès, qui, fuyant la phase liquide, rejoignent l’atmosphère, pour former les fameuses bulles. _ Conservation inclinée et remuage, le plus souvent mécaniquement par gyropalettes, pour faire glisser le dépôt de levures mortes dans le goulot. _ Dégorgement par expulsion des levures du goulot, par congélation du col. _ Remplacement du dépôt expulsé par une liqueur de dosage composée de vin et de sucre déterminant la nature de la cuvée depuis le non dosé jusqu’au doux, comportant plus de 55 g/l de sucre, en passant par le brut, moins de 15 g/l. _ Vieillissement sur lattes variable selon les cuvées de 2 ans pour les Champagnes ordinaires à 10 ans ou plus pour les cuvées de prestige.

Le Champagne est un produit miraculeux élaboré sur une terre nourricière crayeuse qui a, en outre, permis la construction des extraordinaires sous-sols et caves de vieillissement et où la magie des hommes, le moine Dom Pérignon, ou plus probablement les marchands anglais, a imaginé de transmuter des raisins acides et pauvres en sucre, en un vin merveilleux grâce aux bulles qui épanouissent la saveur minérale du raisin et équilibrent l’acidité par la fi nesse de l’effervescence.

Je vous dévoilerai mon producteur préféré que m’avait fait découvrir mon fameux ami, gastroentérologue rémois.

La maison A. Margaine fut fondée en 1920 par Gaston Margaine.

Villers-Marmery, lieu d’exercice de la quatrième génération Margaine, est une enclave dans la Montagne de Reims, terroir du Pinot Noir, où le Chardonnay trouve terre d’excellence, pour exprimer ses caractères vifs et aériens, mais rehaussés par une certaine corpulence.

La mise en place de nouveaux principes de culture, les vendanges manuelles, le pressurage effectué avec soin dans les chais préservent tous les caractères et arômes des cépages.

La cuvée « Spécial Club » 1999, blanc de blanc issu uniquement d’un assemblage de Chardonnay, bénéfi ce d’un vieillissement de 3 années sur lies.

D’emblée, le pétillement or pâle, brillant et scintillant des fines bulles exerce un magnétisme sur l’oeil. La sensation haptique, due au choc du gaz carbonique contre la langue et le palais, est vive, fraîche et désaltérante, caractéristique des bons blancs de blanc.

Les flaveurs de brioche beurrée sont attribuées par certains aux levures, proches du levain des boulangers, introduites pour la prise de mousse, mais signent, tout bonnement, à mon avis, le cépage Chardonnay. Cette cuvée exalte de vives fragrances de pêche blanche, d’acacias, d’agrumes citronnées.

Le Champagne est une merveilleuse boisson apéritive, et surtout un vin de fête, mais cette cuvée A. Margaine, malgré la légèreté du blanc de blanc, possède un gras et une vinosité qui lui permettent de faire merveille pendant tout un repas. Voici quelques propositions pour un repas de rêve… tout naturellement de réveillon : en entrée : huîtres chaudes à la fondue de poireau ou saint-jacques à la crème et au persil ; ensuite : fricassée de cèpes et écrevisses ou turbot sauce champagne. Ce Champagne, grâce à sa vivacité et sa fraîcheur, accompagnera, sans problème, un coulommiers ou notre camembert national qui repoussent habituellement tous les vins. Contrairement aux idées reçues, les Champagnes bruts, de par leur acidité, épousent difficilement les desserts. Troquez- les alors contre un demi-sec.

Cet excellent flacon est proposé à un tarif très intéressant : 20 euros, alors que la cuvée traditionnelle, fort agréable, vous est littéralement offerte pour 13 euros.

Alors, bonnes fêtes pour tous, avec, je vous le souhaite, beaucoup de Champagne !

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération




AC/FA & iPhone : les développeurs suivent l’actualité de la santé

331 – AFibEducator _ La plus récente et la plus esthétique des App – « AFibEducator » – est une application mise à disposition gratuitement par la filiale américaine de sanofi-aventis US. Elle présente un intérêt didactique pour montrer à nos patients avec de superbes animations à quoi correspond l’arythmie complète par fibrillation auriculaire. Au-delà de cela, quelques explications peu nombreuses et un lien bien vers un site plus complet www.AFStat.com dédié à cette pathologie par la filiale US, pour les patients nord américains seulement bien sûr, puisque c’est interdit pour les patients français !

AFibEducator _ Sortie : 19 mars 2010 (mise à jour) _ Version : 1.0.1 _ Editeur : sanofi -aventis US LLC _ Langue : anglais _ Gratuit

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Atrial Fibrillation i-pc _ Plus complète, plus esthétique et plus didactique mais payante 2,99 €, « Atrial Fibrillation i-pc » est très comparable à l’application précédente dans ses objectifs. _ On y retrouve bien sûr le score de CHADS2 mais sans calculateur. En revanche, il y a les algorythmes décisionnels issus des recommandations. _ Attention de ne pas se laissait piéger par le signet BB iTools qui vous attire vers des applications payantes supplémentaires.

Atrial Fibrillation i-pc _ Sortie : 3 mars 2010 _ Version : 1.0 _ Editeur : Börm Bruckmeier Publishing _ Langue : anglais _ Payant : 2,99 euros

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AF guide _ « AF guide » a pour ambition de faire le tour de la question en rappelant les principales recommandations scientifi ques sans pour autant en avoir le label. Un assez bonne aide-mémoire, pour ce qui concerne les indications et posologies des antiarythmiques.

AF guide _ Sortie : octobre 2009 (mise à jour) _ Version : 1.01 _ Editeur : QxMD Software Inc _ Langue : anglais _ Gratuit

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CHADS2 La plus utile des APp et pourtant la plus simple n’est qu’un mémo sur « CHADS2 ». D’utilisation instinctive, elle permet de calculer le score, le risque embolique et d’en déduire la recommandation thérapeutique antiplaquettaire ou anticoagulante avec les objectifs. _ Dommage qu’elle ne rappelle pas en parallèle le score Hemorr2hages.

CHADS2 _ Sortie : juillet 2009 _ Version : 4.0.1 _ Editeur : Chi-Mong- Chow _ Langue : anglais _ Gratuit




Les plaintes contre les cardiologues en 2008 : Rapport du Conseil Médical du Sou Médical-Groupe MACSF

331 – Tendances chiffrées

La sinistralité (nombre de dommages déclarés à l’assureur faisant l’objet ou non de plaintes pour 100 sociétaires) est relativement stable par rapport à 2007 : 1,72 %. Derrière cette apparente stabilité des déclarations, on constate une progression des plaintes formalisées d’emblée par les patients et une diminution des déclarations de prudence faites par les sociétaires (avant plainte).

Le taux de condamnations dans les procédures civiles « au fond » se stabilise à 67 %, avec un montant moyen des indemnisations aux alentours de 203 000 euros par dossier. Devant les CRCI (Commission Régionale de Conciliation et Indemnisation des accidents médicaux), les avis retenant une faute est aux alentours de 33 % (taux stable).

Pour la cardiologie, la sinistralité s’est accélérée en 2008 avec un taux de 3,8 % (soit 75 déclarations pour 3045 cardiologues sociétaires) contre 2,4 % en 2007.

On dénombre 2 plaintes pénales, 8 plaintes devant le conseil de l’Ordre, 27 plaintes civiles (assignations en référé), 11 réclamations amiables et 27 saisines d’une CRCI. Cette fréquence élevée des saisines de CRCI s’explique par le fait que les accidents en cardiologie sont souvent graves et/ou considérés comme des aléas thérapeutiques, ce qui ouvre droit au principe éventuel d’une indemnisation par la solidarité nationale.

Comme dans toutes les spécialités, les plaignants, surtout depuis la création des CRCI, utilisent plusieurs voies de recours pour une même affaire, afin de multiplier les chances de succès de leur plainte.

Analyse des sinistres déclarés en cardiologie

Erreurs diagnostiques (6 dossiers)

Les cas d’erreurs diagnostiques sont souvent la conséquence de la mise en échec des explorations paracliniques (faux négatifs) : – mort subite 3 mois après une épreuve d’effort négative sur des douleurs atypiques (coronaropathie à l’autopsie) ; – arrêt cardiaque sur IDM antérieur chez un homme de 40 ans après passage aux urgences avec 2 ECG et 2 troponines négatives ; – non-diagnostic d’une endocardite sur prothèse mécanique à l’échographie lors d’un bilan de vertige : diagnostic ultérieur sur ciné de valve lors d’une coronarographie ; – non-diagnostic d’une embolie pulmonaire (malgré HBPM) chez un enfant de 13 ans dans un contexte septique au décours d’une appendicectomie.

Critiques de la prise en charge, la surveillance ou le traitement (20 dossiers) : _ Après un diagnostic correctement fait, c’est la gestion même du cardiologue qui peut être critiquée : – reproche de l’absence de réévaluation d’une coronaropathie. Décès en post-opératoire du pontage ; – insuffisance rénale évolutive, puis greffe : absence d’un bilan étiologique lors de la découverte d’une HTA ; – endocardite après soins dentaires : absence de conseil d’antibioprophylaxie sur fuite mitrale (avant les nouvelles recommandations) ; – absence de coronarographie après une épreuve d’effort positive chez diabétique : IDM fibrinolysé quelques semaines après, puis décès dans l’attente d’un pontage ; – récidive ischémique dans l’attente d’un pontage en centre de réadaptation (insuffisance respiratoire) : reproche d’une mauvaise surveillance (pas de visite quotidienne) et de l’absence de transfert en USIC. Décès ; – défaut de surveillance d’une embolie pulmonaire traitée par héparine, récidive embolique fatale.

La gestion des anticoagulants reste un motif récurrent de mise en cause des cardiologues : 2 cas d’hémorragies graves : un hématome périmédullaire avec paraplégie, un hématome sousdural. Les surdosages sont la conséquence d’une surveillance insuffisante ou d’une mauvaise coordination entre les praticiens. On relève également un manque de réactivité des praticiens. La survenue d’un problème inexpliqué chez un patient sous anticoagulant doit inviter à la réalisation systématique d’un dosage de l’INR.

La survenue d’effets indésirables liés à des médicaments a fait l’objet de réclamations : – thrombose de pontage iliaque par thrombopénie immuno-allergique à l’héparine ; – pneumopathie irréversible à l’amiodarone ; – urticaire majeure à la pénicilline (prévention d’osler litigieuse chez patient déjà connu pour une allergie à cet antibiotique).

Accidents liés à des procédures invasives

Cardiologie interventionnelle (12 dossiers)

On note une stabilité des plaintes dans ce secteur, touchant la coronarographie dans 3 cas et l’angioplastie coronaire dans 9 cas.

Les accidents de point de ponction deviennent une des sources principales de plaintes et surtout de condamnations des établissements et/ou des praticiens, avec une importance croissante des infections. Alors que la voie d’abord radiale devient la voie privilégiée en France (55 %, selon le groupe de cardiologie interventionnelle de la SFC : GACI), elle n’a fait l’objet que d’une seule plainte. Il s’agit d’un hématome de l’avant-bras après un échec de ponction, entraînant une compression nerveuse et une paralysie invalidante de la main. Les 5 autres dossiers qui concernent la voie fémorale sont toutes des complications infectieuses, d’abcès au point de ponction, s’étendant localement (arthrite de hanche, infection de l’artère fémorale avec ischémie puis embolie distale et finalement amputation de cuisse) ou de façon systémique (septicémie ou endocardite). Dans 3 cas, un système de fermeture percutanée avait été utilisé. Les experts sont désormais très vigilants sur les moyens de prévention mis en oeuvre (rasage proscrit, douches, badigeonnages antiseptiques) et surtout sur la traçabilité de ces mesures.

Plusieurs complications du cathétérisme ou de la procédure d’angioplastie elle-même : – une occlusion de l’artère centrale de la rétine traitée par une fibrinolyse malheureusement inefficace ; – une ischémie médullaire (avec paraparésie) par embolie ? – dissection de la coronaire droite, avec un KT guide AL2 avec extension rétrograde dans l’aorte, opérée 24 heures après, sans séquelle. Bien que considérée comme un aléa thérapeutique, il a été reproché au praticien de ne pas avoir fait immédiatement un scanner et de n’avoir pas transféré le patient en chirurgie cardiaque, occasionnant des angoisses et des souffrances ; – dissection du tronc commun et IVA lors d’une angioplastie complexe de la circonflexe, avec choc cardiogénique réfractaire, malgré une prise en charge adéquate ; – mort subite quelques heures après une angioplastie pour un patient et souhaitant récupérer son certificat d’aptitude au pilotage (ischémie silencieuse). Pas d’explication à l’autopsie.

Rythmologie interventionnelle (14 dossiers)

La tendance amorcée ces dernières années s’accentue cette année avec une forte augmentation de la sinistralité, surtout lors des procédures d’ablations par radiofréquence.

Peu de dossiers concernent la primo-implantation des pacemakers, et ceux répertoriés sont en rapport avec la mise en place d’un triple chambre avec défi brillateur : deux hémothorax. Toutes les autres plaintes sont liées à des reprises (repositionnement de sondes, changement de boîtiers). Il s’agit surtout d’infections (3) de loges ou de sondes avec endocardite. L’ablation d’une sonde s’est compliquée d’une plaie de la veine cave, gérée avec succès grâce à la présence d’un chirurgien thoracique sur place. L’élargissement des indications d’ablations par radiofréquence s’accompagne de l’apparition de complications peu connues. Ainsi, un probable défaut de contact des plaques intermédiaires dorsales (forte pilosité, sudation, perte d’adhérence ?) a provoqué des brûlures cutanées du 3e degré (2 cas), dont une avec greffe cutané. Ce phénomène était aggravé par la nécessité d’augmenter la puissance des tirs. Les praticiens ne semblent pas avoir compris l’origine des douleurs pendant la procédure, qu’ils attribuaient à tort aux sensations classiquement ressenties.

3 dossiers sont en rapport avec une tamponade, dont 2 liés à la ponction trans-septale. Dans un dossier, malgré une réanimation immédiate et drainage chirurgical en urgence, un homme de 60 ans a présenté des séquelles anoxiques cérébrales majeures avec une dépendance totale.

Explorations habituellement « non invasives »

– Décès quelques heures après une scintigraphie myocardique, avec ischémie réversible. – Bris dentaire lors d’une échographie transoesophagienne. – Chute avec fracture humérale lors d’une épreuve d’effort sur tapis roulant.

Conclusions et mesures préventives

2008 est marquée par une augmentation nette de la sinistralité des cardiologues, même si de nombreux dossiers sont la conséquence de l’évolution naturelle d’une maladie grave sous-jacente.

Les infections nosocomiales lors de procédures invasives représentent 10 % des dossiers, dans lesquels les moyens de prévention sont parfois insuffi sants ou leur traçabilité défaillante. Elles sont surtout le fait de procédures itératives (ponctions fémorales, repositionnement de sondes ou changements de boîtiers) et doivent inviter à prendre des précautions supplémentaires de prudence dans ce contexte pour enrayer des condamnations de plus en plus fréquentes.

L’essor de la rythmologie interventionnelle s’accompagne de l’émergence de nouvelles complications (brûlures cutanées) ou de l’augmentation des complications graves (tamponnades lors du trans-septal).




Les relations difficiles de l’ARH Nord-Pas de Calais avec les cardiologues libéraux

331 – En raison de la progression soutenue du nombre d’indications de DAI, le directeur de l’ARH a révisé en novembre 2009 le SROS actuel (SROS 3), et a autorisé de façon anticipée l’agrément à partir de février 2010 de trois nouveaux centres. Cette démarche était louable en termes de santé publique, compte tenu du retard de la région.

Aucun établissement privé n’a pu bénéficier de cette autorisation.

A ce jour, dans la région, cinq centres sont agréés pour l’implantation des DAI, mais il n’y figure aucune structure privée, de sorte qu’aucun rythmologue libéral formé ne peut pratiquer sa technique dans sa clinique.

La rédaction du projet du futur SROS pour la rythmologie interventionnelle, qui fi xera la carte hospitalière jusqu’en 2017, vient d’être présentée. Il n’a pas été tenu compte des propositions des cardiologues libéraux au COTER. Si ce projet était adopté tel quel, il risquerait de facto, pour les sept ans qui viennent, d’interdire pour un certain nombre de rythmologues libéraux la pratique de leur spécialité dans leur établissement, ceci même avant le dépôt des demandes d’agrément.

Des règles équitables

Le Syndicat des Cardiologues n’a pas à porter de jugement de valeur sur les établissements concernés qui devront être évalués sur la qualité de leurs projets, et leur conformation à la réglementation.

Nous demandons par contre que les règles soient équitables, et que certains candidats ne soient pas dans la situation d’être éliminés avant même d’avoir pu concourir. Il y avait jusqu’à présent dans la région, en ce qui concerne la cardiologie interventionnelle en général, une répartition équilibrée public-privé, qui laissait à la population le libre choix. Dans plusieurs bassins de vie, la bonne entente entre cardiologues libéraux et hospitaliers publics, avait permis d’établir des partenariats, notamment pour les astreintes.

Cette politique est-elle remise en cause ?

L’ARS va relayer l’ARH, et le nouveau directeur va offi ciellement prendre très prochainement ses fonctions. C’est de lui, à qui le Syndicat Régional des Cardiologues a adressé ce courrier, que dépend désormais la réponse.

Le champ d’action de l’ARS s’étend également à la médecine ambulatoire. Au-delà de ce problème ponctuel de la rythmologie, qui fait quand même suite en peu de temps à celui des angioplasties coronaires en urgence, la véritable interrogation est la suivante : quelle place l’ARS compte-t-elle donner à la cardiologie libérale dans l’organisation des soins de la région? ■ _ _ _ _ |Monsieur Daniel LENOIR _ Directeur ARS Nord – Pas de Calais

_ _ Monsieur le Directeur _ _ Différents événements de la période récente et actuelle à propos de la rythmologie interventionnelle nous amènent à nous interroger sur la politique des autorités sanitaires régionales vis-à-vis de la cardiologie libérale. _ _ Quelques faits : La révision anticipée, prenant effet en février dernier, de la carte des établissements autorisés à implanter des défi brillateurs automatiques cardiaques implantables (DAI). Tous les établissements où exercent des cardiologues libéraux ont été écartés. Actuellement, aucun rythmologue libéral ne peut pratiquer l’ensemble de sa spécialité dans son établissement. _ _ Le projet de SROS. Ce projet va de facto interdire, ou rendre plus hypothétique, la pratique de la rythmologie interventionnelle dans leur établissement pour les cardiologues libéraux de plusieurs bassins de vie Réunion du CROS du 8 mars dernier. D’après nos informations, le représentant de l’ARH aurait présenté son projet comme étant celui du COTER, sans tenir compte de l’avis différent des membres libéraux de ce COTER (cf. notamment compte-rendu de la réunion du 26 janvier 2009 à propos du bassin de vie du littoral).

_ _ La directrice d’un centre hospitalier a déjà tiré les conséquences de cette politique et considère que les jeux sont faits puisqu’elle vient de faire des propositions d’exercice dans son établissement à un rythmologue interventionnel travaillant dans la clinique voisine. _ _ Nous étions habitués dans la région, en ce qui concerne la cardiologie interventionnelle en général, à un équilibre public-privé, qui avait permis un partenariat constructif entre cardiologues libéraux et hospitaliers dans plusieurs bassins de vie. _ _ Ce changement de politique de l’ARH nous préoccupe au plus haut point. _ _ Actuellement, dans le Nord-Pas de Calais, les libéraux ne représentent plus que 37 % de l’ensemble des cardiologues (Source : document ARH). Cherche-t-on à les inciter à exercer dans des régions plus accueillantes ? _ _ Notre syndicat souhaite connaître votre position sur ce problème, et d’une façon plus générale, sur la place de la cardiologie libérale dans le système de soins régional. _ _ Je reste à votre disposition pour en parler avec vous. _ _ Je vous prie, Monsieur le Directeur, d’agréer mes salutations distinguées. _ _ Dr Vincent Guillot _ _ PJ : Note sur les propositions de notre syndicat sur le projet du SROS de rythmologie interventionnelle. _ _ | _ _ _ _ |Glossaire| |ARH. Agence Régionale de l’Hospitalisation. _ _ _ ARS. Agence Régionale de Santé. L’ARS succède à l’ARH, avec des compétences plus étendues, touchant à la fois l’hospitalisation et les soins de ville. _ _ _ SROS. Schéma Régional d’Organisation Sanitaire. _ _ _ COTER. structure composée de professionnels désignés par l’ARH, consultés pour l’élaboration du projet de SROS. _ _ |




Maîtrise médicalisée : bilan 2005-2009

331 – Alors que le règlement arbitral va entrer en fonction en attendant qu’une nouvelle convention soit négociée, et que la colère s’amplifie chez les médecins libéraux sur fond de guerre tarifaire, retour sur cinq ans de maîtrise médicalisée. Si ce dispositif n’a pas fourni toutes les économies escomptées, il a cependant donné des résultats qui se sont confirmés sur la durée.

 La convention médicale 2005-2010 qui vient de s’achever a marqué une accentuation de la démarche de maîtrise médicalisée entamée en 1993. A partir de 2005, ont été fixés chaque année, par voie d’avenants conventionnels, des objectifs d’économies susceptibles d’être réalisées en s’appuyant sur la diffusion des bonnes pratiques médicales et du bon usage des soins. L’écart par rapport à la tendance d’évolution des dépenses permet d’estimer les économies réalisées. Les thèmes conventionnels de maîtrise médicalisée ont porté principalement ces cinq dernières années sur la prescription de médicaments, antibiotiques, statines, IEC-Sartans, AAP, IPP, notamment, les arrêts de travail, le respect de l’ordonnancier bi-zone pour les ALD, certains examens et analyses, ainsi que sur des engagements dans le domaine de la prévention (cancer du sein, vaccination antigrippale des personnes âgées, diabète…). Et l’incitation à prescrire en génériques s’est poursuivie.

Un marché de dupes

Quel bilan de cette maîtrise médicalisée peut-on tirer pour cette période 2005-2010 ? Comme l’on dit, cela dépend de quel point de vue on se place et de l’idée qu’on s’en fait ! Si l’on s’en tient à la comparaison entre les objectifs annuels de réalisation fixés et les taux d’atteinte de ces objectifs, on constate que les résultats sont toujours en deçà : 73 % en 2006, 61 % en 2007, 68 % en 2008 et 75 % en 2009. D’autant qu’à partir de 2008, l’objectif de réalisation doit être supérieur à 80 % des économies prévues au titre de la maîtrise médicalisée. Partant, pour la tutelle, « le compte n’y est pas », comme l’a dit la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, pour justifier la non-revalorisation des honoraires, du C notamment, dont le passage à 23 euros a pourtant été acté en 2007… Les médecins, eux, dénoncent un marché de dupes. Ils se sont engagés dans la maîtrise médicalisée, et si les objectifs annuels ne sont pas pleinement atteints, sur la durée, l’observation de certaines courbes montre un changement indéniable dans la pratique des médecins.

Parmi les « succès » de la maîtrise médicalisée, les génériques se taillent une bonne part. De 2002 à 2008, la part des génériques dans les médicaments remboursables est passée de 4 % à 11 %, et pour la seule année 2008, la CNAM estime à environ 200 millions le montant économisé au titre des génériques (100 millions d’euros d’effet lié à la hausse du taux moyen de pénétration entre 2007 et 2008, à répertoire constant et, 100 millions d’euros d’effet lié à l’extension du répertoire). Certes, la France est encore loin derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni où la part des génériques atteint respectivement 20 % et 24 % des médicaments remboursables, et peut encore progresser dans ce domaine. Mais cette source d’économies devrait pourtant trouver ses limites dans deux ou trois ans, comme l’explique l’économiste Claude Le Pen (voir plus bas).

Le bon usage des antibiotiques a lui aussi porté de beaux fruits, donnant des « résultats spectaculaires » entre 2002 et 2008, que ne remet pas en cause une inflexion à la hausse enregistrée début 2009.

 

9 Les premiers de la classe

Trois classes de médicaments concernées par la maîtrise médicalisée touchent plus particulièrement les cardiologues (schémas ci-contre). Après une inflexion très net des volumes en 2005-2006 par rapport à la tendance passée, les statines ont enregistré une reprise de leurs prescriptions en 2007, avec cependant un rythme de croissance plus modéré que dans la période antérieure. « Une reprise dont on doit plutôt se féliciter, estime Jean-François Thébaut. Le tassement observé antérieurement signifiait que des patients qui auraient dû être sous statines ne l’étaient pas. Et aujourd’hui encore, tous les patients qui devraient en avoir, n’en ont pas. Il est donc normal que les volumes ne baissent pas. Si les montants remboursés ont baissé, c’est du fait des génériques, et cette tendance devrait s’accentuer quand le Tahor sera génériqué en 2010-2011. » En 2009, pour une évolution tendancielle estimée à + 11,9 %, l’objectif de croissance était de + 6,5 %, et sera sans doute stabilisé à + 5 %.

Pour les IEC-sartans aussi, l’objectif pour 2009 est largement atteint avec une croissance de + 1,3 %, alors que l’objectif était fixé à + 2 %. « On veut privilégier les IEC génériqués par rapport aux sartans non génériqués, observe Jean-François Thébaut, mais aujourd’hui, certains sartans non génériqués sont moins chers que les IEC, et les sartans sont mieux tolérés par certains patients ». Quant aux AAP, qui a fait l’objet d’un accord de bon usage, après une première inflexion en 2008, ils enregistrent une nette baisse en 2009, avec un objectif + 5 % largement atteint + O %, un taux qui provient de la structure des prescriptions, le nombre de boîtes ne diminuant pas.

Bien sûr, il y a des résultats beaucoup moins bons. Certains domaines d’action n’aboutissent pas à des évolutions importantes, tel, par exemple, le respect des règles de l’ordonnancier bizone pour les patients souffrant d’une affection de longue durée. Ou encore dans le domaine de la prévention. Le taux de participation au dépistage du cancer du sein par mammographie est de 52 %, alors que les autorités de santé publique tablent sur un taux de 80 %. Le taux de vaccination antigrippale chez les personnes âgées plafonne à 67 % sans atteindre les 75 % retenus comme référence par les autorités de santé publique.

2,2 milliards d’économie

Oui, « le compte n’y est pas », mais les résultats de la maîtrise médicalisée de sont pas rien, puisque sur les cinq années de vie de la dernière convention, ce sont tout de même 2,2 milliards d’économies qui ont été réalisés. Et surtout, c’est une culture de la qualité qui s’installe chez les médecins. Un peu trop lentement au goût des pouvoirs publics et au regard du déficit de l’Assurance Maladie qui se creuse, ainsi que le soulignait le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) dans son rapport de septembre 2009 : « L’examen de l’évolution des formes de la maîtrise médicalisée montre l’importance qu’on a accordée à la confiance pour mettre en œuvre cette politique. On a fait le choix d’introduire la bonne pratique médicale en emportant la conviction individuelle des professionnels. C’est clairement l’option choisie notamment pour l’évaluation des pratiques professionnelles ou dans les actions de sensibilisation (on part du principe que le médecin qui connaît sa propre évaluation tend à améliorer sa pratique). La conséquence de ce choix est une extrême lenteur dans les résultats obtenus. Le risque qui s’ensuit est de susciter l’impatience du régulateur et la tentation de politique privilégiant le court terme ».

Sans doute faut-il voir dans l’actuelle intrusion de l’Etat dans le champs conventionnel une manifestation de cette « impatience » à voir la maîtrise médicalisée produire toutes les économies possibles, et vite. Mais outre que la maîtrise médicalisée ne saurait à elle seule combler le déficit structurel de la Sécurité Sociale, cela pourrait en détourner durablement les médecins libéraux, surtout si le compte n’y est jamais, et les revalorisations non plus.

 

Un AcBUS en exemple

Conclus par les partenaires conventionnels, les accords de bon usage de soins ou AcBUS qui vise à limiter la pratique d’un acte – en général très importante – par des critères strictement médicaux. Lors de la dernière réunion des partenaires conventionnels, l’Assurance Maladie a proposé que l’acte le plus fréquent en cardiologie, l’échographie cardiaque, qui croît de 5 % par an, fasse l’objet d’un tel accord, comme en ont conclu un les gastroentérologues en 2006, à la suite d’une recommandation de la HAS, sur la coloscopie après polypectomie, visant à la modération de cette pratique.

La recommandation dite qu’en cas d’exérèse complète, un premier contrôle endoscopique est recommandé à 3 ans, voire à 5 ans en cas d’adénome non avancé, en nombre inférieur à 3 et en l’absence d’antécédent familial de cancer colorectal. En cas d’exérèse incomplète, une nouvelle coloscopie à 3 mois est recommandée (accord professionnel). Une coloscopie n’a donc pas lieu d’être entre le quatrième et le vingt-quatrième mois suivant l’intervention. « Selon l’accord signé, le taux de patients bénéficiant d’une coloscopie dans cet intervalle ne doit pas dépasser 0,5 %, explique Thierry Helbert, président du Syndicat national des médecins spécialistes de l’appareil digestif (SYNMAD). En 2006, ce taux s’élevait à 4,9 % des 70 000 patients concernés. Mais les actions d’information et de formation menées par l’Assurance Maladie et les sociétés savantes ont porté leurs fruits, puisque ce taux a été ramené à 2,5 %. Une amélioration de 50 %, c’est un bon résultat. Il peut sans doute être amélioré, même si l’objectif de 0,5 % ne semble pas tenable. D’ailleurs, le référentiel risquant d’être modifié, ce taux pourrait être revu à la hausse. » 

Concrètement, au moyen d’un code identifiant de cet acte, la Sécurité Sociale vérifie et repère les pratiques déviantes. Les praticiens « hors des clous » reçoivent une lettre de rappel de la recommandation ; ils peuvent être reçus par la CPL qui étudie avec eux les éléments susceptibles d’expliquer les écarts observés, leur rappelle le contenu de l’accord, et conviennent avec eux des modalités d’observation de l’évolution de leur pratique, la sanction n’intervenant que s’ils persistent dans le non-respect de la recommandation de bon usage. 

« Le nombre de coloscopie a diminué, et surtout, elles sont mieux ciblées, commente Thierry Helber. L’AcBUS est un accord intelligent pour autant que le référentiel soit totalement médicalisé et ne réponde pas à des objectifs purement comptables. »

 

 

« La convention est-elle toujours l’outil adéquat ? »

Claude Le Pen
 

L’économiste de la santé regrette que l’étatisation du système de santé vide de sa substance la convention, alors même que les cinq années conventionnelles qui viennent de se clore ont enregistré un relatif ralentissement des dépenses. 

 

Quel regard portez-vous sur la convention 2005-2010 ?

Claude Le Pen : En premier lieu, cette convention 2005-2010 a eu le mérite d’exister et de marquer un certain renouveau conventionnel après les grandes turbulences qui avaient précédé – conventions séparées, règlement conventionnel minimal pour les spécialistes… Ensuite, elle a remis à l’ordre du jour la maîtrise médicalisée, notamment sur les prescriptions, avec une logique selon laquelle les augmentations d’honoraires étaient gagées sur les économies de la prescription. Cette logique d’échange donnant/donnant apportait une certaine nouveauté. Cette logique n’a d’ailleurs pas complètement disparu du paysage avec son déplacement vers le dispositif du CAPI. Enfin, un autre élément nouveau a été important, c’est l’avenant 20 de mars 2007 concernant l’installation et le maintien dans les zones déficitaires. C’est le premier avenant conventionnel à soulever la question de l’installation et de la démographie médicale. Du point de vue économique, l’ensemble de la période 2005-10 a plutôt vu une augmentation assez faible des dépenses de santé, avec des ONDAM plutôt moins dépassés qu’auparavant. La maîtrise des dépenses s’est donc accompagnée d’un relatif ralentissement des dépenses.

 

Les médecins acceptent d’autant moins le non-respect du contrat donnant/donnant…

C. L.P. : Malheureusement, la convention a été durement impactée par la crise économique qui a creusé les déficits comme jamais. Du coût, la logique du donnant/donnant est remise en question parce qu’il n’y a pas d’argent dans les caisses.

 

La prochaine convention pourrait-elle marquer, elle aussi, un renouveau ?

C. L.P. : C’est incertain. En ce qui concerne les sujets essentiels pour la médecine libérale aujourd’hui – honoraires, installation, délégation de tâches, etc. –, les solutions ne sont plus dans la sphère conventionnelle mais en dehors. Le CAPI n’est pas dans la convention, les ARS vont élaborer les SROS ambulatoires qui seront le principal outil pour réguler l’installation, et sur les trois niveaux de rémunération proposés par l’Assurance Maladie, le paiement à la performance, et le forfait ne sont pas non plus dans la convention pour l’instant. Il est dommage que cette construction se voit vidée de sa substance au profit d’une étatisation du système. La convention est un accord de droit privé, de plus en plus sous la surveillance de l’Etat certes, mais quand même, c’est un accord de droit privé entre deux acteurs indépendants. Est-ce toujours l’outil adéquat alors que la CNAM évolue vers une structure de droit public, que la DGOS remplace la DHOS et que les ARS unifient la ville et l’hôpital ? Et la crise conventionnelle avec le recours au règlement arbitral, qui n’est pas une négociation, ne fera qu’accélérer cette évolution. Le paradoxe de la convention 2005-10 est peut-être d’avoir, à la fois, marqué un certain renouveau et le chant du cygne de ce modèle à la française. C’est dommage et préoccupant.

 

Au bilan de la maîtrise médicalisée pour les cinq dernières années, le développement des génériques occupe une place de choix. Ce « succès » peut-il perdurer ?

C. L.P. : En termes de maîtrise des dépenses, oui, les génériques sont plutôt un succès, auquel la cardiologie, qui voit tous ses produits génériqués, a beaucoup contribué avec les statines et les IEC. Mais à qui attribuer ce succès ? Aux médecins, aux pharmaciens, ou aux patients qui ont accepté les génériques ? Ce succès est en tout cas une des raisons pour lesquelles aujourd’hui le poste médicament est celui qui croît le moins, derrière tous les autres. Et cela va continuer un peu avec encore, jusqu’en 2013, quelques très grosses molécules qui vont tomber dans le domaine public. Au-delà, il n’y aura plus que des produits plus petits, en termes de prescription, ou des médicaments de biotechnologie difficilement généricables.  « L’âge d’or » des génériques va s’achever à l’horizon 2013-2014.




UFCV : Enquête sur le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS)

331 – Soixante treize questionnaires ont pu être analysés sur la pratique quotidienne des cardiologues face au SAOS.

Sur la première étape, face au dépistage proprement dit, les cardiologues répondent présents, puisque la recherche en cours de consultation est faite : souvent pour 59 % d’entre eux, de temps en temps pour 38 % ; seuls 2 % ignorent encore son dépistage.

Les efforts effectués depuis quelques années pour améliorer la connaissance cardiologique face à ce syndrome, fréquemment présent dans leur « patientèle », et source connue d’évolutivité péjorative sur les pathologies cardiovasculaires qu’ils ont à prendre en charge, a donc porté ses fruits.

Une réponse importante dans cette étape de dépistage a été la recherche, via le conjoint, de la présence ou non d’un ronflement dans le cas particulier du syndrome métabolique : il est frappant de constater que 78 % des cardiologues effectuent cette recherche, prouvant leur bonne compréhension de la physiopathologie mise en jeu dans l’élaboration de ce syndrome ou l’obésité abdominale, témoin de l’augmentation de la graisse viscérale (figure 3) est un des signes majeurs du syndrome ; or il a été démontré que l’index d’apnées hypopnées (IAH) caractérisant le SAOS et sa gravité est en relation linéaire non seulement avec l’index de masse corporelle, mais aussi avec la masse graisseuse viscérale déterminée par scanner.

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Dans le dépistage du SAOS, la recherche de « clefs » simples se poursuit : outre la somnolence diurne excessive (SDE) déterminable par le questionnaire d’Epworth, critiquable car non corrélé à l’IAH, ou son évaluation plus rapide par l’interrogatoire déterminant une somnolence légère, moyenne (ne survenant qu’en situation passive), ou sévère (survenant en situation dite « active »), rappelons la recherche d’un tour de cou pathologique (> à 45 cm chez l’homme, > à 42 cm chez la femme), facile à mesurer et qui, lui, est corrélé à l’IAH, le ronflement, et les pauses respiratoires signalés par le conjoint qui sont d’excellents indicateurs de SAOS ; pour terminer une question simple et rapide : celle du délai d’endormissement, lorsqu’il est de quelques minutes… le conjoint vous met rapidement sur la bonne piste !

La suite de l’enquête est intéressante à plusieurs points de vue car elle s’est intéressée à l’estimation « cardiologique » de la prévalence du SAOS dans la population générale ; les réponses montrent : – une surestimation de cette prévalence dans la population masculine : 70 % répondent qu’elle se situe à 8 %, alors qu’elle se situe à 4 %, cette surestimation s’expliquant probablement par le fait que les patients dits « cardiologiques » sont déjà présélectionnés par leur pathologie, sortant du groupe population générale , avec une prévalence du SAOS nettement supérieure la surestimation du SAOS chez la femme est moins grande : 41 % répondent avec justesse 2 %, 41 % donnent l’estimation de 4 %… la bonne nouvelle est que cette pathologie trop longtemps considérée comme exclusivement « masculine » est aujourd’hui bien reconnue par les cardiologues comme concernant également les femmes.

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Pathologies par pathologies, l’enquête s’est penchée sur :

1. L’estimation de la prévalence du SAOS chez l’hypertendu tout venant (figure 1) : seuls 15 % répondent le chiffre de 45 %, la majorité estimant cette prévalence à 20 % ce qui est en dessous de la réalité ; sachant que le groupe des hypertendus est très hétérogène : dans l’HTA résistante 49 % sous estiment fortement cette prévalence à 45 % alors qu’elle atteint 80 % (chiffre reconnu par seulement 8 % des cardiologues interrogés) ; les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) sont donc connues, ce groupe est considéré à juste titre comme ayant une prévalence nettement supérieure aux hypertendus tout venant, mais avec encore une sous-estimation notable ; rappelons à ce sujet le travail récent d’une équipe française qui s’est intéressée à un autre sous-groupe d’hypertendus : ceux qui sont hospitalisés et qui montre une prévalence du SAOS dans ce groupe dépassant les 50 %.

2. La recherche du SAOS en cas d’HTA résistante : la réponse confirme le bon suivi des recommandations de la HAS puisque 98 % des cardiologues interrogés estiment qu’ils faut rechercher un SAOS dans cette situation.

3. La recherche du SAOS en cas d’insuffisance cardiaque : 47 % répondent par l’affirmative ; toute la difficulté actuelle est de positionner correctement cette recherche : – sur une insuffisance cardiaque optimisée en terme de prise en charge (traitement médical aux objectifs, resynchronisation comprise pour certaines insuffisances cardiaques) – avec la limitation due en partie à l’absence de plainte spécifique : l’asthénie majeure étant au premier plan, l’âge avancé de ce groupe de patients et l’absence de preuves irréfutables concernant l’amélioration de la FEVG, preuves attendues par la grande étude en cours SERVE HF effectuée avec une ventilation adaptée aux insuffisants cardiaques, à 2 niveaux de pressions en BIPAP, qui devrait confirmer la preuve du service médical rendu indispensable pour convaincre la communauté cardiologique ; actuellement seule l’amélioration de la qualité de vie est prouvée ce qui est loin d’être négligeable sur la tranche d’âge concernée. Rappelons que la présence d’un SAOS associée à une dilatation de l’oreillette gauche est un facteur de pronostic très péjoratif (figure 5).

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4. La recherche du SAOS en cas de trouble du rythme atrial est effectuée par 59 % des cardiologues de l’enquête, prouvant que l’étude ayant démontré un risque de récidive de FA multiplié par deux en cas de SAOS non traité est connue ; après une réduction de FA , pour réduire le risque de récidive, il faut être sûr de ne pas avoir méconnu un SAOS.

5. La recherche d’un SAOS en cas de dysfonction érectile (DE) n’est effectuée que par 25 % des cardiologues : chacun sait que la DE est le témoin précoce d’une dysfonction endothéliale ; le SAOS est peut-être aussi un marqueur de dysfonction endothéliale ; actuellement des études expérimentales ont montré le lien entre les troubles du sommeil et la DE chez l’animal ; aucune étude chez l’homme, à ma connaissance, n’a établi de lien formel entre les 2 pathologies.

6. La recherche du SAOS en cas de syndrome coronaire aigu (SCA) (fi gure 4) n’est effectuée que par 15 % des cardiologues ce qui est surprenant.

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De nombreuses études ont été publiées sur l’amélioration de la morbimortalité dans ce groupe de patients et ceci à partir d’un SAOS avec un IAH > à 15/h considéré comme un SAOS modéré ; certes les études sont critiquables, effectuées sur de petits effectifs, avec des groupes témoins non strictement superposables, mais la prévalence du SAS de 30 % chez le coronarien tout venant est bien supérieure dans le SCA avec une évolutivité plus rapide de l’athérosclérose lorsqu’au décours d’une angioplastie on laisse un SAOS évoluer avec des épisodes incessants de désaturation nocturne suivis de coups de butoir tensionnels sur une paroi endothéliale en cours de cicatrisation ; la population cardiologique attend avec impatience des études de plus grande envergure sur ce type de population, sachant que la prise en charge de ce facteur de risque évolutif est sûrement une des voies de la recherche actuelle sur l’optimisation de la prise en charge des coronariens.

Le coronarien apnéique est particulier, car souvent non somnolent, en simple surcharge pondérale, avec une histoire coronarienne de poussées évolutives itératives qui doit mettre le cardiologue sur la voie du dépistage du SAOS.

7. La recherche du SAOS en cas de syndrome métabolique est effectué par 82 % des cardiologues, confirmant ce que leur réponse sur le dépistage du ronflement en cas de syndrome métabolique apportait : le lien étroit existant entre le SAOS et le syndrome métabolique en terme de physiopathologie et de complications, avec de nombreux facteurs confondants ; à ce sujet la dernière étude effectuée sur des patients diabétiques de type 2 porteurs d’un SAOS et traités pour leur SAOS comparativement à ceux non traités et montrant une amélioration de l’HbA1c de l’ordre de 1 % va faire réfléchir s’il en était besoin la communauté des endocrinologues comme celle des cardiologues qui connaissent parfaitement le niveau de risque de cette population.

8. Enfi n, la dernière question concernait la recherche d’un SAOS en cas d’accident vasculaire cérébral (AVC) : seuls 34 % effectuent cette recherche, sachant que la prévalence est très variable selon les études mais approche des 50 %, que la présence d’un SAOS est un facteur de mauvais pronostic, qu’enfi n en cas de bilan étiologique négatif sur un AVC, cette recherche aura un intérêt particulier pour prévenir une récidive éventuelle.

Conclusion

Cette enquête ponctuelle effectuée par l’UFCV le 14 décembre 2009 sur le SAOS a l’énorme avantage de confi rmer l’intérêt de la communauté cardiologique pour ce syndrome, sa conviction sur le rôle qu’elle doit jouer dans le dépistage de ce syndrome particulièrement prévalent dans sa salle d’attente, sa compréhension physiopathologique grandissante et la nécessaire collaboration avec les pneumologues qui vont devoir assurer la prise en charge et le suivi de nos patients diagnostiqués comme étant porteurs confi rmés de SAOS, une réfl exion particulière sur le fait que les patients porteurs d’un syndrome métabolique ne sont pas les seuls à être porteurs d’un SAOS, ceci est particulièrement vrai pour les coronariens (figure 2). ■

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Analyse centrée sur les statines : rapport de la HAS sur l’efficacité et l’efficience des hypolipidémiants

331 – Les hypolipidémiants sont restés pendant très longtemps des médicaments évoluant strictement dans le domaine de la lipidologie. En 1994, avec l’étude 4S, les statines sont entrées par la grande porte dans la cardiologie. Depuis cette date, de très nombreux essais thérapeutiques ont été publiés et les indications des statines en pathologie cardiovasculaire se sont élargies. De manière parallèle, les coûts liés à la prescription des statines se sont envolés et l’Assurance Maladie a, en France, créé une série de mesures pour limiter cette croissance. En novembre 2009, la Haute Autorité de Santé a mis en consultation publique un rapport très intéressant sur les hypolipidémiants. Nous allons dans un premier temps en décrire les principales conclusions puis nous discuterons la portée de ce document lorsqu’il sera consulté par l’ensemble des médecins français.

Le rapport de la Haute Autorité de Santé

1. Le cadre général du rapport

Selon les termes mêmes de la HAS, ce rapport est une recommandation en santé publique qui vise à évaluer la place des statines dans le traitement de l’hypercholestérolémie et dans la prévention cardiovasculaire. Ce travail n’est pas une recommandation de bonnes pratiques cliniques. Cependant, le groupe de travail a émis le besoin de faire évoluer la recommandation de mars 2005 sur la prise en charge des lipides.

D’emblée, la HAS a mis la barre très haute dans la mesure où le critère d’efficacité clinique des traitements hypolipidémiants est, selon cette institution, la mortalité toutes causes. Dans un deuxième temps, la HAS a reconnu que l’évaluation du LDL-cholestérol selon les thérapeutiques pouvait être une approche secondaire intéressante. Ce travail a été l’occasion de la mise à plat de toute une série de données disponibles en France.

2. Analyse des données françaises

Les données épidémiologiques françaises, en particulier l’étude MONA LISA, montrent la très grande prévalence de l’hypercholestérolémie. Chez l’adulte, la prévalence de l’hypercholestérolémie a été évaluée à 37 %. Par ailleurs, l’étude de l’évolution de l’hypercholestérolémie en France à travers les différentes enquêtes représentatives a permis de montrer une amélioration de la situation avec une baisse de la prévalence de l’hypercholestérolémie et une baisse du LDL-cholestérol au cours des dix dernières années.

Si la prise en charge est meilleure dans les études les plus récentes, il n’en reste pas moins vrai que les sujets à haut risque restent insuffisamment traités. C’est ce qui a été démontré dans les études REALITY I et II et dans l’étude CEPHEUS. Dans cette dernière étude, 55 % des patients à haut risque ont un LDL-cholestérol supérieur à 1 g/l. En population générale, la situation est pire puisque seuls 27,7 % ont un taux de LDLcholestérol inférieur à 1 g/l.

3. Avis de la commission de la transparence pour les statines

L’analyse des avis émis par la commission de la transparence au sujet des statines montre clairement que la simvastatine et la pravastatine sont très bien évaluées par cette commission. La fl uvastatine, la rosuvastatine et l’atorvastatine ont une autorisation pour réduire l’hypercholestérolémie mais présentent des ASMR moins performantes par rapport à la simvastatine et à la pravastatine. En particulier, l’atorvastatine a une ASMR 1 en rapport avec l’étude CARDS et une ASMR 2 en rapport avec l’étude ASCOT.

4. Analyse des bases de données nationales françaises

Trois grandes bases de données ont été analysées dans ce rapport, la base EPPM/IMS, la base Thalès/ Cegedim et la base de données de l’Assurance Maladie appelée SNIIR-AM. En 2007, environ 19 millions d’actes de consultation ayant conduit à des prescriptions de statines ont été observés en France. Alors que 7 % des prescriptions de statines étaient réalisées par les cardiologues libéraux, c’est environ 93 % des prescriptions qui sont faites par les médecins généralistes. En initiation de traitement, l’atorvastatine représente 33 % des prescriptions puis vient la rosuvastatine (20 à 25 %), puis la prescription de pravastatine et de simvastatine (environ 18 %). En prévention primaire, ce sont l’atorvastatine et la rosuvastatine qui représentent plus de 55 % des prescriptions. En prévention secondaire, c’est l’atorvastatine qui est la première molécule prescrite. D’après la HAS, les AMM et les avis de la commission de la transparence ne sont pas suivis dans la pratique médicale courante.

5. Méta-analyses des statines en termes de mortalité toutes causes

Dans le cadre de ce rapport de la HAS, c’est probablement la réalisation d’une méta-analyse originale qui constitue la partie la plus importante de ce rapport. Bien qu’une analyse similaire ait été publiée dans le même temps dans le BMJ par Brugts, les spécialistes de la HAS ont réalisé une méta-analyse originale à partir de l’ensemble des études publiées. Les résultats font état d’un risque relatif à 0,90 pour la mortalité totale lorsque l’on prescrit des statines. Le test d’hétérogénéité qui a été réalisé ne permet pas de différencier les statines selon leur efficacité sur la mortalité totale. Dans le même temps, les statines occasionnent une baisse de 15 % de la mortalité cardiovasculaire, de 23 % des événements cardiovasculaires et de 19 % des accidents vasculaires cérébraux. Toutes ces baisses sont significatives. Dans l’interprétation de ce travail, la HAS admet qu’il existe un effet classe sur le critère de mortalité toutes causes et qu’il n’est pas possible de distinguer les différentes statines sur ce critère. Cette méta-analyse est donc un élément très fort du travail qui a été réalisé puisque au moins sur ce point, les experts sont d’accord pour affirmer un effet classe des différentes statines utilisées en pratique quotidienne.

6. Analyse médico-économique du rapport de la HAS

Un travail important a été réalisé pour apprécier les ratios coût/ efficacité des différentes statines. Le coût a été mis en regard de la réduction du LDL-cholestérol selon les statines. De la moins efficace à la plus efficace, on passe de la pravastatine 10 mg génériquée jusqu’à l’atorvastatine 80 mg. On retrouve dans l’analyse de la HAS des données classiques montrant une hétérogénéité des statines sur le LDL-cholestérol et une variation de prix liée à cet effet différent. Des conclusions sont tirées par les experts de ce rapport. Jusqu’à une baisse de 30 % du LDL-cholestérol, c’est la prescription de simvastatine génériquée de 10 mg qui est économiquement la plus pertinente puisqu’elle permet d’assurer une baisse de 27 % du LDL-cholestérol pour un coût annuel par point de baisse de LDL-cholestérol de 3,5 €. Entre 31 et 40 % de baisse du LDL-cholestérol, trois molécules sont compétitives ; il s’agit de la simvastatine génériquée à 20 mg, de la simvastatine génériquée à 40 mg et de la rosuvastatine 5 mg. Entre 41 et 50 % de baisse du LDL-cholestérol, c’est la rosuvastatine 10 mg qui offre le rapport coût/efficacité le plus faible pour 8 € par point de baisse du LDL-cholestérol. L’atorvastatine 40 mg et la rosuvastatine 20 mg permettent d’atteindre des objectifs supérieurs (48 à 49 %) pour un coût également supérieur (de l’ordre de 11 € par point de baisse du LDL-cholestérol). Pour une réduction supérieure à 50 %, c’est l’atorvastatine 80 mg qui présente le meilleur rapport coût/efficacité avec un coût de 10 € annuels par point de baisse du LDL-cholestérol.

7. Synthèse du rapport de la HAS

Dans la partie synthèse du rapport de la HAS, on retrouve les éléments qui ont été cités plus haut ainsi que deux phrases qui auront probablement des conséquences non négligeables. La première assertion a trait à l’effet classe dans le cadre des événements cardiovasculaires. Le rapport indique que les données disponibles semblent indiquer l’absence d’un effet classe sur le critère de la réduction de la survenue d’événements cardiovasculaires. Plus loin, on relève que les experts affirment que le critère biologique de la réduction du LDL-cholestérol a été accepté comme permettant d’appréhender l’efficacité des statines en morbidité cardiovasculaire. Dans une deuxième phrase lourde de conséquences, les experts affirment que le maintien de la prescription de la molécule princeps n’est jamais une stratégie rationnelle sur le plan économique quand sa forme générique existe. Cette dernière phrase est isolée dans la synthèse et n’a pas donné lieu à des commentaires supplémentaires.

Discussion

Le rapport de la HAS était très attendu dans la mesure où on retrouve dans ce rapport l’ensemble des données récentes ainsi qu’une vision critique de la prise en charge des malades. Certaines conclusions sont des avancées thérapeutiques certaines alors que d’autres interprétations sont plus difficiles à accepter. Personne ne remettra en cause le fait que l’hypercholestérolémie est un facteur de risque tellement fréquent qu’une certaine régulation de sa prise en charge doit être discutée. Il est probable que les hypercholestérolémies dans le cadre d’un faible risque cardiovasculaire soient à traiter en priorité avec des mesures hygiénodiététiques. Ceci est probablement une posture de santé publique car les analyses de l’étude JUPITER semblent montrer qu’à partir d’un certain âge, le risque cardiovasculaire est suffisamment grand à long terme pour justifier un traitement par statines. La gestion du bas risque cardiovasculaire est probablement plus un débat de société qu’un débat propre à la cardiologie. Le fait que la plupart des patients à haut risque ne soient pas aux objectifs thérapeutiques recommandés est reconnu comme une vérité dans ce rapport. Ceci autorise donc les cardiologues à intensifi er le traitement hypolipidémiant chez leurs patients dès lors que l’absence d’atteinte des objectifs est constatée. Ceci autorise probablement l’augmentation des doses de statines ou la prescription d’associations thérapeutiques hypolipidémiantes. Par ailleurs, le rapport reconnaît que des élévations majeures du LDL-cholestérol autorisent la prescription de médicaments puissants permettant une baisse conséquente du LDL-cholestérol et favorisant probablement ainsi une meilleure observance à long terme. La mortalité totale a été choisie comme critère d’évaluation principal dans ce rapport. Cette approche est hautement critiquable dans la mesure où on se situe dans le domaine de la prévention cardiovasculaire et non pas dans l’insuffisance cardiaque terminale ou l’insuffisance rénale avancée. Néanmoins, ce critère est objectif et il ne dessert pas les statines puisqu’un effet classe est montré pour ces hypolipidémiants dans cette indication. Néanmoins, il serait franchement malhonnête de ne pas reconnaître le fait que cette mortalité totale est favorablement infl uencée parce que les événements et la mortalité cardiovasculaire baissent dans toutes ces études. Le fait de ne pas être allé jusqu’à cette constatation nous paraît un manque de lucidité.

Le dernier problème est représenté par l’obsession maladive vis-à-vis des génériques. La HAS se trouve ainsi dans une situation intenable où la pravastatine a une ASMR de niveau 1 et où le coût n’est pas en rapport avec la baisse du LDL-cholestérol observée. On en vient donc à écarter cette magnifique molécule de la stratégie médico-économique alors que l’on aimerait la voir en première position. Ceci aurait dû faire réfl échir les experts de la HAS sur la pertinence des génériques dans une approche médico-économique de la gestion des malades. Même si la HAS ne veut pas reconnaître un effet classe pour la morbidité et la mortalité cardiovasculaire, les cardiologues ne sont pas dupes et l’ensemble de la bibliographie plaide en faveur d’un tel effet. Nous parions même que les cardiologues seraient prêts à jouer le jeu si on leur disait d’utiliser les statines les moins chères pour une baisse donnée du LDL-cholestérol. Une des simplifications de ce rapport aurait donc été de dire que le prix du princeps doit s’aligner sur le générique et que le cardiologue ne veut pas voir apparaître des génériques éventuellement plus chers que les molécules princeps. Ce débat vis-à-vis du prix nous dépasse et ce sont les patients qui nous rapportent des histoires invraisemblables sur le prix des génériques dans les pharmacies.

En conclusion

Le rapport de la HAS sur les statines est probablement une avancée importante dans le résumé des connaissances actuelles. Les statines sont des médicaments majeurs, essentiels à la pharmacopée du patient cardiovasculaire. Les indications thérapeutiques étant tellement larges, il est licite de se poser la question de la stratégie médico-économique. Quand on se perd dans une forêt, il faut faire simple, c’est-à-dire sortir une boussole et éteindre le GPS. A la lecture de ce rapport très intéressant, on s’aperçoit que faire simple, c’est vraiment trop compliqué ! ■

Pr Jean Ferrières – Service de cardiologie B et INSERM U558, CHU de Toulouse




Développement Professionnel Continu (DPC) : où va-t-on ?

331 – Chaque maître d’ouvrage, HAS pour l’EPP et trois CNFMC pour la FMC étant très soucieux de leurs prérogatives respectives, la synthèse de ce qui naturellement procède de la même intention « la qualité des soins » était quasi irréalisable.

Les méthodologistes et autres pédagocrates de tout poil glosaient à l’infini sur les concepts d’évaluation des connaissances, des performances, des compétences ou des pratiques aussi bien que sur ceux éculés du savoir, savoir faire, savoir être ou faire savoir, apanages des sciences cognitives.

Autant de débats qui passaient largement au dessus de la tête du médecin moyen, du cardiologue et surtout des patients !

|Loi HPST Article 59| |I – Le chapitre III du titre III du livre Ier de la quatrième partie du code de la santé publique est intitulé : « Développement professionnel continu ». _ Il se substitue à tous les articles concernant la FMC, la FPC et l’EPP. _ « Art. L. 4133-1 – Le développement professionnel continu a pour objectifs : – l’évaluation des pratiques professionnelles, – le perfectionnement des connaissances, – l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, – ainsi que la prise en compte des priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. _ Il constitue une obligation pour les médecins. »|

Le législateur et ceux qui le conseillent ont voulu redonner du sens et du pragmatisme à tout cet édifice chancelant qui n’a jamais été réellement opérationnel depuis la fameuse ordonnance Juppé rendant la FMC obligatoire dès… avril 1996. Heureusement pour nos patients, les médecins n’ont pas attendu les textes réglementaires pour se former et s’évaluer ! Voici ce que schématiquement prévoit le nouveau dispositif (et qui avait été préfiguré dans le rapport établi par l’IGAS en novembre 2008) :

1. Tous les concepts FMC, EPP, accréditation sont globalisés dans une volonté de définir des méthodes mixtes ayant vocation à s’inscrire dans l’exercice quotidien : le développement professionnel continu, qui n’est rien d’autre que le Continuing Professional Development anglo-saxon : évaluation => mise en évidence des déficits => formation => mesure d’impacts. Une nouveauté néanmoins et non des moindres : l’implémentation de la notion d’efficience des coûts dans les objectifs.

2. L’architecture du dispositif reposerait sur quatre piliers :Un Conseil national du DPC (CN-DPC) qui édictera les règles générales et conseillera le ministère : tous les acteurs y sont représentés ; ce sera donc une structure pléthorique consultative, non opérationnelle. – Une Commission Scientifique Indépendante (CSI), composée de représentants des conseils nationaux professionnels de spécialités et proposés par la fédération des spécialités médicales (FSM). Notons au passage la clairvoyance de la cardiologie qui a su anticiper en créant dès avril 2009 un conseil du même nom (www.cnpcardio.org). Les missions de cette CSI seront de préciser les méthodes, éligibles au DPC spécialité par spécialité, avec l’appui de la HAS, et d’évaluer les organismes, les programmes et les actions. – Le contrôle du respect de l’obligation, devenue annuelle et non plus quinquennale, sera effectué par les conseils départementaux de l’Ordre, sans doute par sondages. On ne parle plus d’un système d’information national d’un coût démesuré par rapport à l’objectif. – Un Organisme de Gestion (OG-DPC), composé par l’Etat et l’Assurance Maladie (exit les syndicats signataires !) aura pour mission de financer les programmes et actions prioritaires proposée en réponse à des appel d’offre nationaux (voire régionaux) par les organismes « enregistrés », nous reviendrons sur ce terme. Seuls les programmes prioritaires, définis par le ministère après avis du CN-DPC et des conseils nationaux professionnels, auraient vocation à être financés sans doute de manière forfaitaire sur « la capacité des organismes à réaliser ces programmes ». Mais tous les programmes prioritaires ne pourront pas être financés par cet organisme et surtout la masse considérable de programmes non prioritaires ne sera éligible à aucun financement institutionnel.

|Unanimité contre le dispositif de DPC| |En l’état, les projets de décrets sur le développement professionnel continu font l’objet d’un rejet massif des médecins. _ « Les responsables professionnels libéraux, hospitaliers et salariés, des syndicats ou des associations de formation ou d’évaluation qui composent les CNFMC sont unanimes pour dénoncer la vision réductrice des décrets d’application de la loi HPST sur le DPC ». Les versions des projets de décrets sur le DPC se succèdent sans satisfaire les médecins qui continuent d’y voir une étatisation du DPC entièrement géré par un OGDPC dont la profession est exclue. « Tel qu’il est aujourd’hui, l’organisme gestionnaire du DPC a tous les pouvoirs, le conseil national du DPC n’en a aucun, et la commission scientifique indépendante non plus, malgré les apparences », estime _ Bernard Ortolan, président du CNFMC des médecins libéraux. _ Parallèlement, les CNFMC estiment que la suppression de l’agrément des organismes de formation au profit d’un simple enregistrement, en application de la directive européenne 2006/123 sur les services, ouvre la porte à toutes les dérives possibles. « Au nom de cette directive, on ouvre le champ du DPC à tous les opérateurs quels qu’il soient, s’insurge Bernard Ortolan. On aurait donc d’un côté des thèmes, des méthodes et un financement entièrement décidés par l’Etat, et en parallèle, un dispositif financé par de l’argent privé, libre de tous critères et de toutes contraintes de qualité du fait de la suppression de l’agrément. Ce n’est pas admissible. » Les CNFMC réclament donc qu’ « un organisme enregistré ne puisse être reconnu comme opérateur de DPC que si et seulement s’il bénéficie d’une évaluation positive de la CSI ». Par ailleurs, les CNFMC ont décidé de recourir au service d’un avocat au Conseil d’Etat pour analyser la directive Services et voir si une lecture moins rigide de ce texte est possible.|

Discussion

Qui sont les perdants ? En premier lieu, les syndicats horizontaux et surtout les syndicats signataires qui avaient pour mission de gérer les enveloppes de la contribution conventionnelle au sein de l’organisme de gestion conventionnel (OGC) et du Conseil Paritaire National de la formation professionnelle conventionnelle (CPN-FPC) dont votre serviteur est l’actuel président. Les organismes agréés ne font plus partie directement des instances, alors qu’ils occupaient une place stratégique dans les CNFMC actuels. L’Assurance Maladie est mise sous la tutelle de la toute puissante nouvelle DGOS et risque de se voir court-circuiter en région par les ARS.

En position intermédiaire, la HAS perd son rôle de maître d’ouvrage de l’EPP (qu’elle n’avait d’ailleurs aucune capacité financière à mettre en œuvre). En revanche elle conserve la responsabilité de définir, en concertation avec les conseils professionnels, les méthodes et les modes d’exercice qui permettront aux professionnels de s’engager dans le DPC.

Qui sont les gagnants ? L’Etat qui délègue à la DGOS et à la DSS une grande partie du dispositif. La FMC et l’EPP avait-elle un réel besoin de cette nouvelle tutelle ? Même si la légitimité de l’Etat n’est pas à remettre en doute, très sincèrement, on peut en douter quant on voit la faible capacité opérationnelle et la lourdeur technocratique de certains de ses services. L’Ordre des médecins revient dans ce dispositif aux deux extrémités: la présidence du CN-DPC lui serait confiée ainsi que le contrôle individuel de satisfaction des médecins à ces obligations. Les professionnels, via leurs conseils, représentant toutes les composantes de chaque spécialité et la FSM se voient confier un rôle très important scientifique et pédagogique, mais sans capacité financière.

Je voudrais terminer sur trois considérations actuellement sans réponse, mais qui pour autant paraissent fondamentales pour la réussite de ce nouveau dispositif :

I. Qui va arbitrer l’attribution des financements institutionnels ? A ce jour, les arbitrages sont réalisés paritairement entre les représentants des caisses et des syndicats. Bien sûr les arbitrages sont toujours d’autant plus contestés que les sommes à répartir sont de plus en plus réduites par rapport aux demandes. Demain en l’absence de modification des textes, l’arbitrage serait autoritaire et administratif, pour ne pas dire arbitraire ! C’est dire la suspicion qui va s’emparer de tous les exclus. Il serait impératif de réintroduire une parité professionnelle (syndicats) / Etat-AM dans une structure d’arbitrage à définir..

II Directive Européenne sur les services oblige, les organismes seront enregistrés et non plus agréés ! _ Ce qui signifie que les avis de la CSI ne seront pas opposables. Tous les organismes prétendant répondre aux critères généraux du CN-DPC devront être enregistrés par l’OG DPC. Certes le financement ne sera pas pour autant automatique, mais cela nécessitera de la part des usagers du dispositif une information très précise sur la réalité et la qualité des opérateurs. N’en doutons pas, nous allons revoir fleurir des officines de tous poils promptes à vendre des programmes qui n’auront de labellisé que le nom ! Au mieux ce seront des sous-traitants, certes de qualité, des industries de santé. Au pire des structures commerciales sans exigence scientifique ni pédagogique offrant le service minimum pour permettre aux médecins de satisfaire à leurs obligations au moindre effort, sinon au moindre coût.

III. Enfin the last but not the least : qu’elles vont être les réactions des médecins ? Après vingt années de errements, de modifications réglementaires parfois contradictoires et souvent incompréhensibles, auront- ils une fois encore l’appétence de cette nouvelle obligation ? Nous avons vu la majorité d’entre eux, ces dix dernières années, s’engager avec bonne volonté dans toutes ces procédures nouvelles et complexes. Ainsi plus de 30 % des cardiologues libéraux se sont engagés avec l’UFCV, au moins une fois dans un programme d’EPP. La moyenne d’âge s’élevant, la quantité de travail et la pression administrative augmentant, auront-ils encore la volonté de s’impliquer ? Encore faudra-t-il leur démontrer l’existence d’une relation établie entre l’engagement dans ce nouveau DPC et une amélioration de la qualité des soins et de leurs conditions d’exercice ! ■

| Pr Olivier Goeau-Brissonnière ([Président de la FSM (Fédération des spécialités médicales))] : « A nous de nous approprier le DPC »| | Les CNFMC s’alarment de la disparition de l’agrément des organismes de formation au profit d’un simple enregistrement, en application de la directive européenne 2006/123 sur les services. Quel est votre sentiment ?

Olivier Goeau-Brissonnière : Je partage leur inquiétude sur la disparition de l’agrément. J’ai soulevé le problème auprès du ministère, mais sans parvenir à montrer que cette directive européenne n’était pas applicable.

Ils estiment que l’organisme de gestion du DPC, dont est exclue la profession, a tous les pouvoirs. Est-ce votre avis ?

O. G.-B. : Ce sont les syndicats qui sont exclus de l’OGDPC, mais ils sont dans le dispositif d’une autre façon. Ils entrent dans la composition des conseils nationaux professionnels de spécialité. Le SNSMCV sera présent via son conseil national. Que les syndicats n’aient plus le plus grand rôle, c’est une évidence. Les CNFMC en l’état disparaissent, cela ne signifie pas que leurs responsables n’auront pas des rôles prépondérants dans le futur dispositif. Je ne suis pas sûr que l’OGDPC ait tous les pouvoirs.

Pensez-vous, comme eux, que le rôle de la CSI doit être renforcé ?

O. G.-B. : Dans l’état actuel des choses, la CSI est composée de représentants de tous les conseils nationaux professionnels de spécialité sur une liste proposée par la FSM, et élabore son règlement intérieur. Elle doit pouvoir faire une vraie évaluation des organismes de formation, et il importe que l’organisme de gestion du DPC tienne compte de ses avis, ce qui devra être vérifié. La commission de coordination interprofessionnelle est là pour veiller à ce que l’OGDPC paye selon des règles qui ne bafouent pas la CSI. Et j’ose espérer que la commission de coordination puisse jouer pleinement son rôle. C’est à nous, les médecins, de nous approprier le dispositif. |




COG 2010-2013 : l’Etat et l’UNCAM traquent l’efficience

331 – Le conseil de la CNAM a adopté le 11 mars dernier les orientations pour la Convention d’objectifs et de gestion (COG) 2010-2013 qui doit être conclue entre l’Etat et la CNAM, et qui sont la déclinaison, pour le régime général, des orientations adoptées précédemment par l’UNCAM dans son contrat d’objectifs pluriannuels de gestion du risque passé avec l’Etat, conformément à l’article L. 182-2-1-1 du code de la Sécurité Sociale issu de la loi HPST.

Le document adopté par la CNAM s’articule autour de cinq grands axes : « garantir l’accès aux soins et réduire les inégalités de santé », « aider les assurés à être acteurs de leur santé », « améliorer la qualité de la prise en charge », et « rembourser les soins utiles au juste prix ».

Une meilleure offre de soins

Pour garantir l’accès aux soins, il faut en premier lieu « inciter à une meilleure répartition de l’offre de soins sur le territoire », il faut favoriser l’installation dans le zones « sous-denses », par l’information des étudiants en médecine et le développement de mesures incitatives, et « mettre en oeuvre avec les ARS le contrat santé solidarité et le contrat d’engagement de service public ». Une meilleure répartition des équipements lourds et des établissements de soins de suite et de réadaptation est aussi à l’ordre du jour, ainsi que l’expérimentation de la téléconsultation et du téléexamen dans les zones sous-denses. L’accès aux soins dépend aussi de la régulation des tarifs. Le COG 2010-13 prévoit donc la « mise en oeuvre effective » du protocole signé le 15 octobre 2009 sur le secteur optionnel, la mise en oeuvre des outils de contentieux de lutte contre les dépassements abusifs, et l’information, via le site Ameli Direct, des assurés « sur la qualité des soins et le coût de tous les acteurs, y compris établissements publics et privés ».

Pour aider les assurés à être acteurs de leur santé, le COG prévoit notamment l’extension du programme SOPHIA à l’ensemble du territoire et son expérimentation à d’autres pathologies chroniques (cardiovasculaires, respiratoires, etc.).

Pour aider les professionnels à mieux prendre en charge leurs patients chroniques, le CAPI devrait être généralisé et son champ étendu à l’ensemble des généralistes. « Il pourra être enrichi par de nouveaux indicateurs dans les différents champs, prévention, dépistage et suivi des pathologies chroniques ». Mais, « le même type de contrat pourra être proposé aux autres spécialités médicales et aux autres professionnels de santé ». Le COG préconise aussi d’expérimenter la télésurveillance et le télésuivi des patients, en premier lieu pour les insuffisants cardiaques. Le renforcement du « caractère discriminant de la certification des établissements et des professionnels » pourrait passer, si nécessaire, par des « incitations financières à l’engagement des établissements dans le processus ». A cet égard, l’Assurance Maladie encouragera la publicité auprès des assurés des résultats des établissements et des professionnels de santé en matière de certification.

Le bon usage du soin sera intensifié par l’approfondissement des programmes de maîtrise médicalisée et « la création de référentiels sur l’ensemble des soins et/ou parcours de soins » diffusés auprès des professionnels et dont les assurés seront informés. Le développement de la chirurgie ambulatoire pourrait être accéléré par des incitations financières « par rapprochement des tarifs d’hospitalisation complète et de chirurgie ambulatoire », et l’accroissement de la dialyse péritonéale et de la chimiothérapie à domicile est souhaité.

Une rémunération à la performance

Enfin, la création d’une « nouvelle structure de rémunération en lieu et place du paiement à l’acte » est (ré)affirmée : forfaits correspondant à l’engagement des professionnels dans certains domaines (pathologies chroniques, PDS, regroupement…), paiement à l’acte et rémunération à la performance « qui permettrait la généralisation et l’extension du CAPI ». A noter que l’usage des nouvelles technologies de l’information pourrait être intégré dans la rémunération à la performance. Pour la promotion de la pratique collective, le COG prévoit l’évolution du cadre réglementaire et conventionnel « pour permettre de rémunérer non pas des individus mais un groupe de professionnels », et la définition d’un CAPI pour les groupes de généralistes pourrait être une première étape. Un « niveau de rémunération à la performance » est également prévu pour les établissements, ainsi qu’une révision de la tarification actuelle « pour mieux différencier la tarification dépendant de l’activité du financement des contraintes spécifiques de service public ».

Enfin, pour accroître l’efficacité et l’étendu du contrôle, le COG prévoit la création d’un référentiel de risque « assurés » et « professionnels » afin de catégoriser les uns et les autres en fonction de leur comportement en matière d’abus et de fraude. ■




Rocky, marchand de CAPI

331 – CardioNews –  Au bal des hypocrites, Rocky tient évidemment sa place. Mais il convient, en l’espèce, de lui reconnaître que la comparaison avec le système anglais trouve rapidement ses limites dans l’exercice des comparaisons.

1/ Des deux côtés de la Manche, le statut du médicament est très différent. Pendant que notre pays les accepte pratiquement tous sur le marché, doté d’une note de 1 à 5 en fonction de leur « amélioration du service médical rendu » (ASMR) mais elle-même sans rapport avec le prix négocié par l’industriel ; les Britanniques ont sur le sujet une position plus pragmatique : ils adoptent ou rejettent une molécule candidate sur une base purement comptable de coût de l’année de vie gagnée… Partant, les prix des médicaments y sont libres dans le cadre contractuel du PPRS (Pharmaceutical Price Regulation Scheme) qui régule surtout … les profits annuels des laboratoires. Le boycott organisé d’un produit peut, du même fait, rester sans effet sur les profits de l’industriel.

2/ Les médecins, et singulièrement les généralistes, y exercent sous un statut radicalement différent du nôtre. Nul besoin, au Royaume-Uni, d’une convention individuellement signée par des prescripteurs, tous fonctionnaires. Les contrats d’intéressement, assimilable à nos CAPI, sont donc conclus avec des « trusts », regroupements de généralistes et les primes sont fléchées sur le fonctionnement collectif du groupe, sans effet sur les revenus individuels de ses membres déjà confortablement nantis. Ces deux points de contexte étant précisés, reste le problème éthique du CAPI. Celui qui pose, heureusement, débat. Or, contrairement à ce que soutenait Christian Saout à la même tribune selon lequel « 14 000 médecins (signataires du « french CAPI », Ndlr) ne peuvent se tromper en même temps », ceux-là l’ont fait sous la pression « amicale » de DAM venus leur expliquer que c’était là un moyen d’augmenter son revenu sans risque ni grand effort. Et en ce sens, les 14 000 signataires se trompent lourdement – ou, ce qui est plus grave, trompent leurs patients laissés dans l’ignorance de leur propre conflit d’intérêt : « ma prime contre ma liberté individuelle de prescription ». Le problème du CAPI, souligné ici même par le jeune philosophe Paul-Loup Weil-Dubuc, est de ceux qui méritent de mobiliser les avocats sincères de la médecine libérale : le doute ne peut en effet s’insérer dans le colloque singulier. Si le patient est fondé à s’interroger sur la question : « mon médecin me met-il ce médicament pour me soigner moi, ou sa prime de fin d’année »…. alors il y a vraiment quelque chose de pourri au royaume du CAPI.

Le dilemme n’est pas différent de celui qu’ont connu il y a quelques années les pharmaciens, littéralement rétribués pour substituer les princeps par du générique. Du moins les potards avaient-ils l’argument (l’alibi ?) d’y être conviés dans un cadre conventionnel collectif, négocié et signé par leurs syndicats représentatifs, ce qui n’est pas le cas du CAPI. Si, comme il est probable, le CAPI fait son entrée dans la prochaine « boîte à outils » conventionnelle, ce ne pourra donc être qu’à titre collectif. Et sur des objectifs dûment négociés et signés par des syndicats représentatifs. Lesquels étaient (avec l’Ordre) à peu près unanimes à s’opposer au contrat individuel ! Le débat n’est pas clos ; et avec ou sans humour, Rocky aura au moins réussi à l’imposer dans la « feuille de route » et le calendrier des négociateurs. Impensable il y a quelques années encore ! On peut tirer son chapeau à l’artiste !

Jean-Pol Durand




Et si on parlait d’efficience ?

331 – CardioNews – La notion d’« efficience » va-t-elle se substituer à celle de « maîtrise médicalisée » ? C’est ce qu’on peut penser à la lecture de la convention d’objectifs et de gestion du risque 2010-2013 en cours de conclusion entre l’Etat et l’Union des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM). Les Caisses souhaitent, entre autres, développer des outils plus pertinents pour favoriser « le développement de la qualité et de l’efficience », tout un programme. On ne peut qu’être d’accord …sous bénéfice de s’accorder préalablement sur le sens des mots, et notamment celui d’« efficience ». Qu’est-ce donc que l’« efficience » ? Cette notion se définit par le rapport qualité des soins/coût, généralement vu par l’assurance à l’aune de ses seuls remboursements et sur la seule base de leur seuls impact budgétaire global (lire, à ce propos la lettre de l’UFCV-Cidecar de mars 2010). C’est ainsi que l’Assurance Maladie souhaiterait ne plus prendre en charge, dans les prochaines années, que les seuls soins qualifiés par elle d’« efficients », c’est à dire coûtant le moins cher à efficacité présumée semblable (rappelez vous la polémique entre IEC et sartans !).

Mais il y a bien d’autres choses dans le projet de convention d’objectif Etat/UNCAM. Notamment un axe fondateur consistant à (re)mettre les assurés au cœur de leur prise en charge, pour lequel la convention promeut donc quatre leviers d’action à conduire auprès des assurés sociaux : – favoriser leur accès aux soins et réduire les inégalités de santé, – aider les assurés à devenir « acteurs de leur santé », – améliorer la qualité de leur prise en charge – leur rembourser les soins au « juste prix ». Comment être contre ? Comment être contre le fait que l’Assurance Maladie mette le cap sur la qualité et le renforcement de la coordination « des acteurs et des actions », chez un patient doté d’un accompagnement, en utilisant des outils modernes d’échange d’informations et en encourageant enfin la prise en charge « à domicile » ?

La cardiologie libérale serait évidemment hostile si, derrière cette explication technocratique, la même phrase se lisait en filigrane : devenu pivot officiel du processus de soins, le médecin généraliste est préposé du système d’information (DMP) et manageur de l’accompagnement thérapeutique du patient chronique (ETP) et le chef d’orchestre du maintien à domicile.

Mais quelle serait, dans cette hypothèse, la place du spécialiste et singulièrement du cardiologue ? Qui peut lui nier un rôle fondamental dans cette prise en charge multidisciplinaire où son travail mériterait aussi d’être valorisé ?

La dernière version du Livre Blanc de la cardiologie formule en effet des propositions, incitant les cardiologues à se regrouper au sein de « Maisons du cœur et des vaisseaux » pouvant, sur un même site articulé avec d’une part des cabinets de cardiologie de proximité et, d’autre part, avec des médecins généralistes, associer un plateau technique opérationnel et des professionnels paramédicaux spécialement formés.

Ceci suppose qu’un outil informatique devra faire appel à des logiciels communicants dans l’attente du dossier médical personnel universel promis par la puissance publique. Enfin la démarche des cardiologues libéraux postule que les référentiels de bonne pratique devront être portés par le Conseil National Professionnel de Cardiologie, permettant d’intégrer dans la pratique quotidienne des méthodes validant le nouveau Développement Professionnel Continu (DPC).

Les deux démarches – celles de la spécialité et celle des caisses – sont-elles compatibles ?

L’exemple de l’échographie-doppler transthoracique (ETT) est à cet égard intéressant. L’Assurance Maladie veut, sur le sujet, des résultats concrets, rapides, … et évidemment à la baisse. La mise en place de la CCAM technique a en effet permis de souligner la fréquence des actes d’ETT au nombre de 2,6 millions en 2008 et surtout leur augmentation au rythme de 5 % de 2007 à 2008 ; « beaucoup trop » selon l’interprétation coutumière de la CNAM, qui s’affiche illico déterminée à « rationnaliser » l’efficience de cette pratique à travers un AcBUS (Accord de Bon Usage des Soins). Il y manque, à nos yeux l’analyse qualitative régionale des pratiques. C’est le travail que peuvent facilement produire les experts de la représentation professionnelle sur la base du nouveau référentiel de la HAS publié en décembre 2009 avec des indications clarifiées lors du bilan initial et de l’acte de suivi. C’est à cette condition que l’« efficience » de cet acte pourra être garantie dans le cadre d’un AcBUS.

Un autre concept sur lequel les Caisses et la spécialité auront à confronter leur conception de l’efficience est celui des réseaux de santé ville-hôpital, notamment dans la prise en charge des patients insuffisants cardiaques. Structures multidisciplinaires de coordination, facilitant la communication entre les différents acteurs de santé dans l’objectif prioritaire de réduire le nombre et la durée des réhospitalisations, d’améliorer la qualité de vie des patients en privilégiant leur maintien à domicile, ils sont déjà – selon nous – des vecteurs d’efficience. La caisse nous oppose que leur réalité ne couvre pas l’ensemble des patients cardiaques chroniques ; il reste qu’ils pourraient utilement servir de modèle à développer. Ne serait-ce qu’avec la plate-forme téléphonique de suivi éducatif des patients insuffisants cardiaques et coronariens en prévention secondaire que l’UFCV va prochainement mettre en place en Ile de France avant de la décliner en régions.

Il semble donc bien que cette notion d’efficience puisse prétende à devenir le nouveau paradigme de la prise en charge « globale » des patients. Discours légitime en temps de crise mais néanmoins largement insuffisant à nos yeux. D’accord pour en faire un marqueur économique mais pas un indicateur, exclusif et universel, de la qualité du service médical rendu.

Patrick Assyag




Eric Perchicot (Syndicat de Provence) : Gare au salariat en clinique !

331 – CardioNews – Le Cardiologue : Quel événement retenez-vous de l’actualité récente ?

Eric Perchicot : Evidemment la mise en place des ARS (Agences Régionales de Santé). L’encadrement est quand même largement issu des administrations antérieures, ARH notamment qui ne connaissaient rien du monde libéral et n’aspiraient pas à nous connaitre. Gérard Jullien mon prédécesseur, n’avait jamais pu obtenir de rendez-vous avec son directeur. Plus récemment, nous n’avons même pas été conviés à l’élaboration du « SROS Cardio ». Quelques grands patrons marseillais, la FHF ont été concertés, nous non ! Or nous avons beaucoup à y perdre et je crains que les médecins libéraux, dont les cardiologues, ne se retrouvent naturellement désignés au statut de « variable d’ajustement » des grands équilibres, des grands enjeux régionaux. Coincés entre des directeurs d’ARS spontanément peu empathiques et des directeurs de cliniques naturellement prédateurs…

Pourquoi dites-vous cela ?

E. P. : Vous avez vu, comme moi, que les cliniques vont disposer sous peu du droit de salarier des médecins. Quand on voit le comportement des jeunes qui arrivent sur le marché du travail aujourd’hui, il y a de quoi être inquiet pour l’avenir de l’exercice libéral, du moins dans les gros établissements et les chaînes. Je fais partie de ces gens qui pensent qu’avec des honoraires largement solvabilisés par de l’argent public, nous n’avons plus de libéraux que le nom. Mais je reste attaché au paiement à l’acte parce que c’est le dernier rempart de notre semi-liberté. A Cavaillon, nous faisons même, pour cette raison, partie du dernier carré des réfractaires au tiers-payant. _ Heureusement que la caisse nous soutient dans cette affaire: elle a récemment publié une lettre dans laquelle elle rappelle que le tiers payant n’est pas dû en cas de 100 %. Ca nous donne un argument vis-à-vis des malades un peu agressifs. Comme les psychanalystes, je crois que le paiement fait partie de la consultation. Mais ce problème du salariat en clinique est gravissime : sans réaction de notre part, le libéralisme aura disparu dans moins d’une génération.

Mais Nicolas Sarkozy a promis de « refonder » les principes de la médecine libérale et de consacrer la dernière partie de son quinquennat à résoudre les difficultés de la médecine de proximité ?

E. P. : La cardiologie libérale relève-t-elle de la médecine de proximité ? Dans certains endroits oui sans doute, dans d’autres non : nous sommes handicapés par nos différences. Revenons à Sarkozy. _ On a compris qu’il fait un virage à droite pour renouer avec son électorat traditionnel, dont le corps médical. Mais étant également hospitalier public, dans mon petit hôpital de Cavaillon, je vois bien que la situation n’y est guère plus enviable ! C’est une restructuration « à la hache » qui s’y déroule avec une pénibilité croissante pour les personnels : aucun patient n’arrive plus chez nous pour une seule pathologie aiguë et, vieillissement aidant, ca ne va pas s’améliorer. L’état des finances de la Sécu n’est, à ce qu’on nous en dit, guère plus brillant. Donc que peut faire Sarkozy dont on a vu par ailleurs qu’il peut mettre un fossé entre ses effets d’annonces et la réalité… Alors « chat échaudé craint l’eau froide ». Permettez-moi de prendre le rôle de Saint-Thomas… Mais je lui souhaite sincèrement bon courage parce que je n’ai pas encore compris à qui il veut faire plaisir de MG-France ou de la CSMF…

On n’a rien dit des CAPI ? Des SEL ? De la démographie ?

E. P. : Ã l’AG, on a eu un vrai débat de fond sur les CAPI. Je fais partie de ceux qui sont persuadés que la forfaitisation est une évidence pour les pouvoirs publics quels qu’ils soient. Car l’inflation des maladies chroniques y pousse et les malades, qui font le yoyo entre la ville et l’hôpital avec des examens en doublons, triplons, … ne seront pas forcément plus mal soignés. Organiser cela va s’avérer très complexe entre l’hôpital, le généraliste, le spécialiste, le paramédical, le pharmacien… _ Ça ne peut être que le travail d’une structure elle-même complexe. Faisant partie d’un groupe de huit, en situation de quasi-monopole sur le sud-Vaucluse, je peux témoigner qu’on ne pratique pas tous le même type d’activité et que donc une part de forfaitisation permet de prétendre à une rémunération plus équitable. Vaste chantier mais j’observe, comme vous, que le sujet figure de manière très explicite dans le contrat en cours de négociation entre les caisses et l’État une rémunération à trois niveaux : forfait, acte, intéressement. _ Les SEL ? Je milite aussi pour que les cardiologues s’inspirent parfois de l’expérience des radiologues. La SEL était, il y a dix/douze ans, le seul véhicule juridique et fiscal avantageux pour les activités requérant de gros investissements. Depuis la réforme de la fiscalité des dividendes, c’est moins évident mais ca reste un support intéressant dès lors qu’on a un projet. Je pense à l’IRM : si l’on veut espérer ne pas la pratiquer sur un matériel appartenant au radiologues ou à la clinique, il faudra bien s’organiser. Et dans mon département par exemple, fédérer les 20-25 cardiologues qui pourront ainsi prétendre à une ou deux demi-journées de disponibilité … La propriété de l’outil de travail est essentielle dans le débat qui nous attend avec les patrons de cliniques. _ La démographie enfin ? Jusqu’à présent, c’était une réalité un peu virtuelle mais aujourd’hui ont voit bien l’hémorragie qui se dessine, en tout cas chez à échéance de 3 ou 4 ans. Elle a déjà cours chez les généralistes. On nous dit que les zones « sur-denses » d’aujourd’hui sont les zones « sous-denses » de demain … Mais enfin je ne vois pas que le Sud n’attire plus de nouveaux retraités. Il faudra donc bien trouver des solutions, là encore dans le regroupement. C’est bien de réfléchir, sur le plan philosophique aux maisons du cœur, mais enfin le temps est venu d’aborder le sujet de la structure juridique à laquelle l’adosser.




La fin des ARH, le début des ARS, à quand l’ANS ?

331 – La nomination récente des directeurs d’Agence Régionale de Santé (ARS) vient donc d’enterrer les agences régionales d’hospitalisation (ARH).

La médecine libérale et notamment la cardiologie libérale ne vont certes pas pleurer les ARH, tant les conflits ont été nombreux dans certaines régions.

Parfois cependant le dialogue s’était finalement établi. Ainsi en Ile-de-France, le Schéma Régional d’Organisation Sanitaire et Social « de troisième génération » (SROSS) avait été accouché, certes dans la douleur, mais était assorti d’une forme de la reconnaissance par les directeurs de l’époque de la spécificité libérale. Tel ne fut hélas pas le cas pour l’élaboration du SROSS suivant avec leur successeur. Les mêmes difficultés ont été constatées par exemple en PACA. Pire, Vincent Guillot rapporte le courroux des rythmologues libéraux du Nord-Pas de Calais dont l’activité vient d’être rayée d’un trait de plume par le SROSS4, comme avait failli l’être, l’année dernière, celle de la cardiologie interventionnelle dans la même région.

Mais le drame de cette ultime décision est qu’elle vient d’être prise alors que le préfigurateur de la dite ARS, et donc à ce titre son futur directeur, était en déjà en place : sommes-nous face à un baroud d’honneur de l’équipe sortante de l’ARH ou bien devant une volonté de continuité entre les deux directeurs ?

Les sujets d’inquiétude ont aussi nombreux que les prérogatives des ARS sont larges : contractualisation avec les acteurs hospitaliers et libéraux, permanence des soins, régulation démographique médicale et hospitalière et même éducation thérapeutique, télémédecine voire développement professionnel continu. Bref la porte à une véritable convention régionale est entrouverte !

Mais n’était-ce pas là précisément la volonté de l’instigateur de cette énième réforme, éminence grise aux manettes de la politique sociale en France depuis près de vingt ans : rappelez-vous l’ordonnance Juppé : c’était déjà Raymond Soubie. Or nous voyons qu’à peine nées, ces nouvelles instances souffrent de trois défauts majeurs : – elles apparaissent comme un véritable instrument de la « casse » de la politique conventionnelle, – elles n’ont pas le pouvoir de « fongibiliser » les enveloppes hospitalières, ambulatoires et médico-sociales. La médecine ambulatoire a toutes les chances de rester la variable d’ajustement des dépenses régionales, – il n’y a pas de gouvernance nationale. Sans réclamer pour autant la création d’une agence nationale, véritable NHS ([National Health Service, administration centrale du système de santé britannique (nationalisé))] à la française, laisser la bride sur le cou des directeurs c’est ouvrir la porte aux initiatives les plus arbitraires et par là même potentiellement inégalitaires à l’échelle du territoire.

A quand donc, une Agence Nationale de Santé en mesure de faire valoir, dès lors que le monde ambulatoire fait partie des responsabilités des directeurs d’ARS, que le moins qu’ils puissent faire serait d’inviter les libéraux et leurs syndicats autour de la table et à défaut de les entendre, d’au moins les écouter.




Louis Comfort Tiffany ou l’art du verre à sa perfection

331 – Christian Ziccarelli – Louis Comfort Tiffany, 1848-1933, fils de Charles Lewis Tiffany (fondateur de la célèbre maison Tiffany & Co. à New-York), se destina d’abord à la peinture. Après quelques années d’études à New-York, il gagne Paris (1868), capitale de l’art occidental et passage obligé pour tout artiste peintre. Il découvre l’orientalisme de Léon-Adolphe-Auguste Belly. Touché par l’exotisme, il se rend au Maroc, en Algérie, en Tunisie et en Egypte (dès juillet 1870). Rentré à New-York, Edward Moore, responsable de la création chez son père, joue un rôle déterminant dans le développement de son goût artistique. « Il l’initie à la philosophie du design, au savoir-faire “nippon” et surtout à l’esprit qui souffle derrière toute création (le mingei), soit le beau dans l’utile, pour rendre l’objet honnête, modeste le moindre ustensile domestique devenant une oeuvre d’art ».

 

Un peintre devenu verrier

Fasciné par la diffusion de la lumière à travers le verre, il voulut expérimenter ce matériau dynamique et s’entoura des meilleurs verriers de l’époque. Dans les premières années du XXe siècle, il existait des objets en verre créés par Tiffany pour toutes les circonstances de la vie quotidienne (vases en verre soufflé, vitraux, lampes et objets décoratifs). Dans chaque chef d’oeuvre se reflète l’amour de la nature (fleurs par milliers, papillons, libellules, anémones de mer, etc.). Ses créations sont influencées par l’art de Byzance et de l’Islam, mais aussi par l’esthétique japonaise, tout en s’affranchissant des liens avec la tradition. Chef du design américain, Tiffany est au coeur de nombreux mouvements artistiques de son époque, de l’Arts & Crafts, jusqu’à l’Art Nouveau et le Symbolisme.

 

Tiffany, le magicien du verre

Sa production de vitraux, à l’ornementation somptueuse, aux effets originaux et spectaculaires de la lumière et des couleurs, le place parmi les plus grands verriers de tous les temps. En créant des verres nouveaux, comme le verre plié, le verre drapé et strié, des fragments de verre en confettis sertis dans la pâte ou en superposant jusqu’à cinq couches de verres différents, il obtient des résultats étonnants.

En 1904, une page se tourne, le nouveau président des Etats-Unis, Théodore Roosevelt ordonne la destruction des aménagements intérieurs de la Maison Blanche réalisés par Louis Comfort Tiffany à la fi n du XIXe siècle. Affi chant un profond mépris pour « les modernes » qui ne sont que des « inventeurs sans formation de procédés artistiques », Louis C. Tiffany meurt oublié et incompris en 1933. _ « Devant un oeuvre de Tiffany le spectateur établit avec la pièce un rapport mystique qui tient non pas à un motif particulier ou à la délicatesse de ses formes, ni à sa valeur marchande, mais au matériau lui même. Malgré la forme solide et inaltérable de l’objet, on peut facilement imaginer la masse fl uide aux teintes changeantes qui s’étire et s’incurve sous l’action des fers du verrier ». Sa plus célèbre création, le verre « favrile », du latin fabrilis (fait à la main), est un verre dans lequel le maître introduit beaucoup de sels métalliques donnant un aspect iridescent à la matière.

La lampe toile d’araignée

La lampe Cobweb (vers 1902) allie une monture en bronze et un abat-jour en verre serti de plomb. Ce dernier a été dessiné par Clara Driscoll, chef de l’atelier féminin de la coupe du verre. Il illustre bien le goût de la créatrice pour les inventions complexes. L’exécution est longue et minutieuse car il faut découper et assembler d’innombrables petits morceaux de verre, créant une mosaïque colorée et chatoyante. Les filets diaphanes des toiles d’araignées et les branches de pommiers en fleurs composent, avec les jonquilles du pied, une évocation poétique du printemps. La prouesse technique de la fabrication de ce modèle en revient à un dénommé Cantrill. La popularité de ses lampes sera telle que la marque Tiffany deviendra un nom générique. Dès 1902, l’entreprise en propose près de trois cents modèles et adopte un mode de production en série. La malléabilité du bronze utilisé pour les pieds de lampe accentuait les formes organiques inspirées du style Art nouveau. ●(gallery)