Chenas 2009 Paola et Rémi Benon 71570 La Chapelle-de-Guinchay

L’appellation Chenas cultivée sur 250 hectares, la plus petite des 10 crus du Beaujolais, est située entre Moulin-à-Vent et Juliénas, si bien que ce vin est plutôt classé dans les Beaujolais corsés, puissants et charpentés que dans ceux soyeux et délicats, tels le Fleurie ou le Saint-Amour. Cependant, les méthodes de vinification de la famille Benon procurent à ce vin, une finesse et un velouté assez particuliers et originaux.

Je vous avais révélé, dans Le Cardiologue n° 318, mon vigneron préféré de Morgon, Roger Thévenet, auquel je suis fidèle depuis plus de 25 ans ; dans la même veine, je vous invite à découvrir une production, à laquelle ma belle-famille était attachée depuis plus de 50 ans et que j’ai immédiatement adoptée.

Rémi Benon a dû reprendre en 1982, à l’âge de 16 ans, à la suite du décès précoce et brutal de son père, l’exploitation familiale, pour la maintenir à un haut niveau qualitatif dans les appellations Saint-Amour, Juliénas et Chenas, vers lequel va mon inclination.

Les vignes sises sur Chenas et la Chapelle-de-Guinchay sont cultivées sur un terrain granitique traversé par des filons argileux, de la façon la plus naturelle possible, utilisant le minimum d’herbicides et de produits chimiques. Elles sont plantées serrées, 10 000 pieds/hectares, avec une taille Guyot simple, et enherbées. Un ébourgeonnage sévère est effectué et, si nécessaire, une vendange au vert permettant des rendements faibles pour la région de 40 à 45 hl/ha. Les vendanges sont, comme dans tous les bons domaines de l’appellation, purement manuelles, afin de conserver intacts les raisins, totalement éraflés, avant la mise en cuve.

Une macération à la bourguignonne

Contrairement à la plupart des vignerons du Beaujolais qui pratiquent une macération semi- carbonique, Rémi Benon procède à une macération sur 10 à 12 jours en cuve ouverte, à la bourguignonne, le chapeau protégé par une grille en bois, à une température de 20 °, sans pigeage, le levurage étant naturel. L’élevage est réalisé dans des cuves en acier émaillé, sans aucune utilisation de bois, pendant 9 mois. Le sulfitage est léger, la cuvée 2009, ci-présentée, n’a pas été chaptalisée. Il faut souligner que ce millésime 2009 fût, en Beaujolais, une réussite historique grâce à une météo idéale et un état sanitaire parfait de la vigne.

Ce Chenas 2009, quoiqu’encore un peu jeune et que l’on pourra facilement attendre 4 à 5 ans, est un vin à la robe rubis teintée de grenat gourmand, friand, rond d’une belle longueur. D’emblée, de puissants parfums de pivoine et de violette vous enchantent, escortés en bouche par d’envoûtants arômes de fruits rouges : cerise craquante, framboise, groseille. Les tanins soyeux, intégrés par une acidité parfaite, établissent belle harmonie et parfaite structure.

Ce Chenas, comme les autres crus du Beaujolais, escortera gaillardement charcuteries, cochonnailles, jambons persillés, terrines et rillons. Il s’accordera mieux encore avec un assortiment de tapas et jambons crus, une tarte ou une tourte aux lardons. Certains gastronomes lui réservent tout particulièrement une salade composée d’avocats et tomates-cerise au cumin, une purée de potiron aux oeufs brouillés et ciboulette, une brochette de poulet mariné au paprika. En vieillissant, ce Chenas se complaira avec un pigeon ou un petit gibier à plumes.

La frénésie médiatique planétaire pour le Beaujolais Nouveau étant (heureusement) en train de retomber, il n’est que temps de s’intéresser aux vrais et bons Beaujolais, comme ce Chenas qui, de plus, est proposé à des tarifs d’une douceur angélique.(gallery)




Le délicat passage du public au privé

à l’issue de leur clinicat de deux ans, renouvelable une fois, soit au bout de quatre ans en post internat, un praticien peut s’installer en libéral sans problème. Les dernières statistiques de l’Ordre montrent qu’ils sont peu nombreux à le faire : parmi les nouveaux cardiologues inscrits au tableau ordinal au 1er janvier dernier, moins de 5 % (4,7 % exactement) des nouveaux cardiologues inscrits au tableau de l’Ordre au 1er janvier dernier ont choisi le secteur libéral, 85,30 % ayant opté pour le salariat. Installé lui-même depuis deux ans en libéral (à mi-temps), Benoît Lequeux avance une explication parmi d’autres : « La lourdeur administrative que représentent l’installation et l’exercice en libéral est dissuasif, et nous ne sommes absolument pas formés à cela au cours de nos études. Pour des certains, qui ne sont pas extrêmement motivés, c’est trop lourd. »

Pour autant, il arrive que ceux qui ont choisi le secteur public aspirent à rejoindre le secteur privé au bout d’un certain temps, les conditions d’exercice à l’hôpital n’offrant plus aujourd’hui autant d’attractivité que naguère.

Mais pour ces médecins qui ont passé le concours de praticien hospitalier, le « passage » peut s’avérer difficile. D’autant que la loi HPST a introduit une nouvelle disposition selon laquelle un PH ne peut pas s’installer en secteur privé dans une zone proche de l’établissement public où il exerce durant les deux ans qui suivent son départ de cet établissement.

« Mais le décret d’application n’est toujours pas paru, explique Philippe Burnel, délégué général de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP). Le ministère a donc donné comme instruction d’appliquer la règle commune à tous les fonctionnaires qui souhaitent passer dans le privé : ils doivent passer devant une commission de déontologie qui les autorise ou non à le faire. Dans deux cas récents, la commission a donné un avis favorable au passage dans le secteur privé, mais également un avis défavorable concernant les cliniques que les médecins souhaitaient intégrer, parce qu’elles ont été jugées directement concurrentes avec l’hôpital. Dans les deux cas, les avis étaient justifiés. L’un des médecins, notamment, étant le seul à exercer son activité dans l’établissement public qu’il quittait, son départ signifiait donc la suppression de cette activité à l’hôpital public au profit de la clinique privée. »

Selon Philippe Burnel, ce décret d’application pourrait bien ne jamais voir le jour… « Cela supposerait de préciser, notamment, ce qu’on entend par “établissement concurrent”, et ce n’est pas simple. Le critère de proximité géographique est loin d’être pertinent : deux établissements peuvent être proches et ne pas être concurrents. En fait, je pense que la loi était inutile et qu’il n’y avait pas lieu de faire une exception pour les praticiens de la fonction hospitalière. Le passage devant la commission de déontologie pour tous les fonctionnaires est une bonne chose. » Cependant, la FHP reste très attentive aux avis rendus, et à ce que, composée exclusivement de fonctionnaires – dont des fonctionnaires hospitaliers – cette commission ne statue pas selon une logique uniquement fonction publique… « Ã cet égard, souligne Philippe Burnel, le discours actuel des doyens au sujet des conditions optimales que doivent offrir les cliniques privées aux internes qui peuvent désormais y faire des stages, cache peut-être aussi la crainte qu’ils ont de voir ces internes ne pas revenir dans le secteur public après leur internat, et rester dans le privé… » Selon lui, l’attractivité financière du privé doit être relativisée : « L’idée selon laquelle le privé paye mieux est loin d’être toujours fondée, cela dépend très fortement des spécialités. Si cela est vrai pour la radiologie, par exemple, c’est tout à fait faux pour la pédiatrie où les praticiens hospitaliers gagnent bien mieux leur vie que les libéraux. Beaucoup de jeunes étant attirés par le salariat, l’hôpital n’est pas sans argument. Par ailleurs, la vraie compétition ne concerne pas tant l’aspect financier que les conditions d’exercice, qui se sont dégradées à l’hôpital public. C’est cela le vrai problème. »

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Cour-Cheverny Cuvée François 1er 2004 – Domaine des Huards – Michel Gendrier

Inscrit dans le patrimoine, au même titre que les magnifiques châteaux de Chambord et de Cheverny tout proches, le Romorantin, cépage unique des vins de Cour-Cheverny, mérite indéniablement d’être découvert et apprécié. Grâce à lui, la petite histoire oenologique et la grande histoire de France se rejoignent, lorsque, en 1519, François 1er fit venir de Bourgogne, 80 000 plants d’un cépage probablement issu du croisement d’un pinot avec du gouaix blanc, pour les cultiver autour de sa résidence, le Clos de Beaune, où il projetait de construire un château. Il en avait confié les plans à Léonard de Vinci, alors retraité au Clos Lucé, qui imagina, non seulement un palais grandiose, mais aussi une ville conçue sur l’eau avec un système de canaux et de moulins : une nouvelle Rome. La mort de Léonard de Vinci mit un terme à ce projet, la ville prit néanmoins le nom de Romorantin et François 1er choisit… Chambord, ce dont nul ne se plaindra !

Des vins originaux d’une remarquable personnalité

Le cépage ainsi transplanté, lui aussi baptisé Romorantin, se révéla particulièrement adapté aux terres argilo-silico-calcaires entourant la petite ville de Cour-Cheverny qui obtint, en 1993, une AOC spécifique.

Les vignes sont fragiles, vulnérables au vent, car les brins sont très cassants, les raisins à peau fine éclatent facilement et restent sensibles à la pourriture et à la coulure. Ce cépage blanc très productif, doté d’une acidité naturelle élevée, se récolte en octobre à la fin des vendanges. Il génère des vins originaux d’une remarquable personnalité, le domaine des Huards, dirigé par Jocelyne et Michel Gendrier, représentant l’une des figures emblématiques de ce vin solognot du Loir-et-Cher.

Le domaine mène une viticulture biodynamique n’utilisant aucun produit de synthèse, aucun désherbant, ni substance chimique, les sols sont labourés, les pulvérisations de bouillie bordelaise, de souffre à doses infinitésimales conservent le potentiel naturel des terroirs et la vie microbiologique des sols. Une taille sévère permet des rendements raisonnables (45 à 50 hl/ha) sur une surface de 8 hectares pour le Cour-Cheverny, alors que les lois d’appellation autorisent 60 hl/ha.

La vinification opère un pressurage doux suivi d’un débourbage statique. Seules, les levures indigènes présentes naturellement agissent pour la fermentation entre 18 et 20°, à la fi n de laquelle le soutirage est réalisé. La cuvée François 1er, issue de vieilles vignes de 60 ans d’âge moyen, bénéficie pour deux tiers d’un pressurage direct et pour un tiers d’une macération pelliculaire de 15 heures, puis d’un élevage en cuve inox de 6 mois sur lies fines. Le bois est proscrit.

Une palette aromatique étendue et complexe

La dégustation de ce Cour-Cheverny 2004 cuvée François 1er est, pour le moins, surprenante. La robe est légèrement dorée ; à l’ouverture, il apparaît fermé, rétracté avec des nuances de chèvrefeuille, mais il va très vite s’épanouir, surtout si, comme cela est hautement recommandé, vous le carafez. Au nez apparaissent des flaveurs mentholées, d’herbe sèche, de fleur de pissenlit et de cire d’abeille. En bouche, l’attaque est onctueuse, puis le vin explose avec une forte minéralité et un festival aromatique de beurre doux, d’angélique, de noix verte et de fruits exotiques. L’équilibre entre finesse tactile et puissance, de même que la persistance fraîche, minérale, racée, sont impressionnants.

Décidément, ce vin n’est à nul autre comparable, car, au cours de la dégustation, j’ai de prime abord évoqué un Chardonnay, puis un petit Manseng, pour conclure finalement à un croisement entre Chenin et Riesling ! Ce vin, doté d’une palette aromatique étendue et complexe, permettra des accords mets – vins variés et subtils. Il épousera, avec allégresse, poissons et viandes fumés, coquilles Saint-Jacques, surtout aiguisées par quelques pincées de truffes. Son onctuosité et sa minéralité se marieront voluptueusement avec un brochet au beurre blanc, une poularde sauce Albufera, un veau fermier à la crème. Il ne repoussera pas les fromages à pâte molle : Vacherin d’Abondance, Pont-l’Evêque, reblochon avec une tendresse particulière pour le Brillat-Savarin.

De plus, les tarifs de ce Cour-Cheverny cuvée François 1er sont aussi doux que l’est cet élixir. Grâce soit rendue à ces artisans courageux et doués qui, en pérennisant le cépage Romorantin, le gravent dans la mémoire viticole. ■

|| |Le Château de Cheverny a servi de modèle à Hergé pour le « Château de Moulinsart » du Capitaine Haddock, auquel il avait simplement enlevé les deux ailes extrêmes du vrai Château.|(gallery)




Intégration des DMI aux GHS : la qualité des soins n’y gagne pas

Depuis l’instauration de la T2A, la logique veut que toutes les dépenses soient intégrées dans les Groupes Homogènes de Séjour (GHS). Ce n’est pas encore tout à fait le cas à ce jour. Dans une période transitoire, on avait maintenu certains produits sur la liste des prestations remboursables. C’était le cas de nombre de Dispositifs Médicaux Implantables (DMI) qui continuaient d’être remboursés par l’Assurance Maladie. L’année dernière, les valves cardiaques ont été intégrées dans les GHS, et ce mouvement se poursuit avec l’intégration d’autres DMI, notamment des défibrillateurs et des stimulateurs cardiaques. Quelles vont en être les conséquences pour les équipes médicales, dans le public comme dans le privé ?

Pour Marie-Claude Morice de l’Institut cardiovasculaire Paris-Sud à l’hôpital Jacques-Cartier de Massy, « Tout va dépendre de la quantification des DMI. Si on définit une moyenne de 1,5 ou 1,6 dispositif par patient, on va limiter la qualité de la prise en charge. Il est ainsi évident que si l’on ne rembourse qu’un stent, on n’en posera qu’un, mais que le patient qui en nécessite deux devra revenir pour la pose du second. Cela représente à tout le moins un inconfort pour le patient, voire un risque, et cela n’a, au final, aucun intérêt économique non plus. Mieux vaut prendre le patient en charge en une seule fois quand cela s’impose. L’idéal serait qu’il y ait au moins trois GHS selon la gravité de l’état des patients, dont un pour les patients complexes. Une moyenne n’est pas une bonne chose : c’est trop pour les patients simples, et pas assez pour les patients complexes. Si l’intégration des DMI dans les GHS n’a que des visées économiques, on va aller vers la médiocrité, et c’est inadmissible. »

Chef du département de cardiologie au CHU de Rennes et président du groupe de rythmologie à la Société Française de Cardiologie (SFC), le Pr Philippe Mabo redoute lui aussi les effets délétères d’une intégration des DMI dans les GHS à visée purement économique. « Intégrer les dispositifs médicaux implantables dans les GHS est une façon de faire pression pour limiter les coûts, ce qui n’a rien en soi de répréhensible. Mais cette intégration doit se faire selon une logique médicale et pas seulement comptable, commente ce spécialiste. Or, le ministère entend mettre tous les défibrillateurs dans le même GHS, ce qui revient à y mettre des indications et des patients différents. » Les sociétés savantes, et la Société Française de Cardiologie notamment, ont pourtant émis des recommandations pour cette intégration. « Nous avons recommandé trois GHS différents, explique Philippe Mabo. Un pour les bradycardies, un autre pour les tachycardies ventriculaires et la prévention de la mort subite, qui relève de la pose de dispositifs simples et à double chambre, et enfin, un troisième GHS pour l’insuffisance cardiaque nécessitant des stimulateurs cardiaques et défibrillateurs à triple chambre. Nous nous sommes heurtés à un refus, et nous allons être mis devant le fait accompli. Le prix moyen du GHS va être calculé à partir d’un “case mixt“, calculé sur des données du passé, et qui ne prendra pas en compte ni l’évolution prévisible dans les années à venir des indications, ni le progrès médical. Ce qui ne favorisera pas la qualité de prise en charge des patients, et ce qui pénalisera les centres dont l’expertise est reconnue et qui seront limités dans leur activité. »(gallery)




Côtes du Marmandais Clos Baquey 2006 – Elian Da Ros 47250 Cocumont

Plus tout à fait Bordeaux, pas encore vraiment Sud-Ouest, les Côtes du Marmandais, situées à cheval sur la Garonne, dans le Lot-et-Garonne, produisaient, dans un certain anonymat, des vins essentiellement replantés en cépages rouges Bordelais depuis le grand gel de 1956. Une campagne d’arrachage, provoquée par la mévente, a limité la superficie du vignoble à 1 000 hectares en 2009. Mais vint Elian Da Ros au physique d’acteur de cinéma italien, dont la famille, originaire d’un village de Vénétie, immigrée depuis deux générations, se partageait entre cultures maraîchères, céréalières et élevage, mais ne négligeait pas de vinifier, pour leur usage personnel, quelques arpents. Ainsi, son père Antoine avait complanté des ceps de très vieilles sélections massales de cabernet et merlot.

Dès l’âge de 8 ans, Elian Da Ros frémit d’une passion pour le vin. Après des études au lycée agricole, l’obtention d’un BTS viti-oeno à Montpellier, il fit ses classes après un bref passage chez Didier Dagueneau, pendant plus de cinq ans chez le grand Léonard Humbrecht, figure mythique du vignoble alsacien. De retour au pays en 1997, il reprit les quelques hectares familiaux, pour les agrandir progressivement en englobant les plus beaux terroirs de Cocumont (pas de plaisanterie douteuse, cocut en gascon signifie coucou !), pour atteindre actuellement 21 hectares. Son domaine sur la rive gauche de la Garonne, à quelques encablures des Côtes de Graves, est remarquablement situé sur des terres riches argilocalcaires (pour le Clos Baquey) ou argilograveleuses, bénéficiant de belles conditions climatiques à tendance océanique grâce au vent d’autan qui vient lécher les rives de la Garonne.

Elian Da Ros, traumatisé par le décès de son père d’une leucémie attribuée aux produits phytosanitaires, se convertit immédiatement au bio, certifié Agrocert en 2003, bannissant tout produit chimique remplacé par des composts organiques, et opta pour la biodynamie dès 2002. Il pratique, sur ses vignes, une taille Guyot avec un enherbement naturel un rang sur deux et un ébourgeonnage sévère. Lors des vendanges, les raisins sont totalement égrappés, récoltés manuellement, pressurés pneumatiquement. Chaque cépage est vinifié à part avec pigeage en début de fermentation, puis macération lente avec extraction très douce, la fermentation alcoolique en cuves de ciment dure 10 à 20 jours, l’élevage est réalisé en foudres et barriques de chêne pendant 24 mois pour le Clos Baquey. L’assemblage des différents cépages a lieu avant la mise en bouteille, sans collage, ni filtration. Le sulfitage est réduit au minimum. Elian Da Ros produit différentes cuvées aux noms poétiques : « Chante-Coucou », « Sua sponte », « le vin est une fête », mais sa cuvée vedette est le Clos Baquey provenant d’une seule parcelle de 5 hectares, assemblage de 1/3 de merlot, 1/3 de cabernet franc, 15 % de cabernet sauvignon et 20 % d’abouriou. En effet, il a ressuscité ce cépage rebelle, précoce, très réducteur et sensible à l’oxydation qu’il a su dompter par une macération carbonique. C’est probablement l’abouriou qui procure l’originalité de ses vins rouges grâce à sa robustesse, mais aussi ses touches fl orales et épicées.

Ce Clos Baquey 2006, à l’ouverture, m’est apparu décevant, fermé avec un peu d’acidité volatile, et ce n’est qu’après une longue aération le lendemain que j’ai pu apprécier sa concentration, son opulence et sa richesse. Le verre mire une robe pourpre et noire, légèrement trouble du fait de l’absence de filtration. Le nez dévoile de doux parfums de fruits noirs : cassis, sureau, mûre, puis affluent des arômes spécifiques de Da Ros, et probablement du cépage abouriou : zestes d’orange, cacao, épices et piments doux sur un fond délicatement boisé. La matière dense et suave, avec des tanins fermes, mais bien mûrs, tapisse la bouche dans un ensemble équilibré, où les fruits noirs, la cannelle, la vanille explosent et amènent une finale longue, tendue et prometteuse.

Ce Clos Baquey, par sa richesse et sa complexité, épousera de nombreux plats à base de viande ou de volailles. Il escortera galamment : viandes grillées, brochettes diverses, entrecôte marchand de vin, mais il s’épanouira mieux encore avec des préparations plus complexes : train de côtes accompagné de cèpes, caneton de Challans aux navets, faisan aux raisins, magret de canard en aigre douce sur une poêlée de champignons. Accord presque parfait : le carré de porc au boudin noir de Ducasse.

Afin d’éviter ma déception initiale et l’apprécier à sa haute valeur, il faut impérativement carafer plusieurs heures, voire 24 heures à l’avance, ce Clos Baquey 2006.

La qualité de ce magnifique flacon reflète celles d’un homme fier, passionné, perfectionniste qui réussit ainsi à traduire sa sensibilité et ses vibrations les plus intimes dans son vin. ■(gallery)




La loi HPST en cacherait-elle une autre ?

L’année 2010 a vu la parution de nombreux textes d’application de la loi HPST, parmi lesquels plusieurs concernaient les établissements hospitaliers dans leur nouvelle « gouvernance ». Pour autant, le fonctionnement interne des hôpitaux s’en trouve-t-il transformé ? Pas sûr. Ou du moins pas encore, comme le souligne Francis Fellinger, chef de service de cardiologie à l’hôpital d’Haguenau (Bas- Rhin), et président de la conférence nationale des présidents de CME des centres hospitaliers. « La loi HPST est une loi très complexe, et sa mise en place ne l’est pas moins. » Si la création des agences régionales de santé (ARS) marque, selon lui, « une avancée majeure » dans la réforme de notre système de santé et répond à une demande du monde hospitalier, si leur mise en place « à marche forcée » représente « une gageure », il constate aussi qu’à ce jour « les hospitaliers n’ont pas encore trouvé le point d’équilibre dans leurs relations avec “ces grosses machines administratives” ». Quant à l’organisation interne des établissements, malgré la publication de l’essentiel des textes s’y rapportant, Francis Fellinger constate qu’elle n’a encore guère évolué : « Les directoires sont en place, mais les gens continuent de fonctionner comme avant. Les pôles sont confortés par la loi, mais les relations avec les directions restent inchangées, du moins en l’attente des contrats de pôle à venir ». Quant aux CME, dont beaucoup ont estimé que les textes d’application les concernant réduisaient considérablement le pouvoir des médecins à l’hôpital, Francis Fellinger considère, lui, que « leur positionnement est maintenu », et que leurs présidents ont acquis un statut et un pouvoir « confortés » par la loi HPST. Rien dans les textes n’enlève aux CME un pouvoir qui n’était d’ailleurs pas davantage inscrit dans les précédents textes. De même, on a beaucoup commenté le pouvoir octroyé au directeur d’hôpital, mais il est susceptible d’être destitué tous les mercredis en conseil des ministres ! On observe donc un décalage important entre la réalité des textes et le ressenti des médecins sur le terrain, où un gros effort de pédagogie est à faire.

Mais aux yeux de Francis Fellinger, la « légalisation de la télémédecine avec la sécurité juridique et le financement qui vont en découler, de même celle des coopérations interprofessionnelles, qui vont permettre de déléguer certaines tâches à d’autres professionnels, sont beaucoup plus importantes que les problèmes de gouvernance ». « Particulièrement pour nous, cardiologues, ces deux points de la loi marquent une rupture positive », juge-t-il.

Au total, pour Francis Fellinger, la loi HPST n’est pas « la catastrophe décriée » même si elle pèche par « un excès de complexité et d’ambition ralentissant sa mise en oeuvre ». Et pour ce qui est de la gouvernance, il estime que « c’est l’ordonnance Mattei-Xavier Bertrand qui a vraiment changé les choses », et constate : « En fin de compte, les hôpitaux qui fonctionnent bien sont ceux qui reposent sur le triptyque alliant une stratégie territoriale claire, un travail effectif sur la qualité des soins, et un couple directeur-médecins qui fonctionne. »

Bien différente est l’opinion de Rachel Bocher. Pour la présidente de l’Intersyndicale des praticiens hospitaliers, il n’y a rien à sauver de la loi HPST : « La réforme de la gouvernance n’est pas celle attendue par les professionnels, qui n’ont d’ailleurs pas été consultés, la copie du DPC est entièrement à revoir, les ARS sont des grandes boîtes dans lesquelles les gens se demandent ce qu’ils font et ce qu’ils ont à faire. La loi HPST marque le retour en force de l’État dans le contrôle du système, et cette étatisation met à bas toute notion de responsabilisation des professionnels qui se sentent des pions dans une hiérarchie très pyramidale. Pour autant, d’inspiration très libérale, cette loi met à mal le service public et dessine un hôpital-entreprise loin de tout enjeu de solidarité, et qui laisse de côté aussi bien les patients que les professionnels de santé. Ce n’est pas la grande réforme qui fait entrer l’hôpital dans le XXIe siècle. »

Selon elle, le seul résultat tangible de la loi HPST aujourd’hui est « un désinvestissement des professionnels de santé, mais aussi des directeurs, largement désabusés eux aussi, et qui marque le désaveu de la réforme ». « L’hôpital sera un enjeu majeur des élections présidentielles de 2012 », estime Rachel Bocher, qui ne doute pas que, dans cette optique, on s’achemine vers une version 2 de la loi HPST à laquelle travaille la mission sénatoriale Fourcade. Reçue il y a quelques semaines par Xavier Bertrand, la présidente de l’INPH dit avoir rencontré un ministre convaincu du malaise du monde hospitalier et de la nécessité d’y remédier.

Reste à savoir, si V2 de la loi HPST il y a, dans quelles proportions elle reniera la version originale.

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Champagne Roland Sage 1990 – 51530 Chouilly

Roland Sage est décédé il y a deux ans. C’était un ami, aussi ma proposition de célébrer, avec des bulles, les fêtes de fin d’année va être teintée de tristesse.

à la tête d’une petite production à Chouilly, village emblématique de la Côte des Blancs, Roland Sage produisait exclusivement, en millésimé, du grand cru blanc de blanc de Chardonnay.

Il a toujours refusé la publicité, l’inscription dans les guides oenologiques et, en fait, s’occupait peu du côté commercial de son entreprise, car il avait toujours entretenu un vaste réseau d’amitié lui permettant de vendre, sans difficulté, sa belle production, notamment dans le milieu médical. Avouons qu’il était efficacement aidé par son frère Roger, cadre d’un grand laboratoire pharmaceutique, avec lequel nombre de cardiologues maintenant un peu âgés avaient sympathisé, notamment en tant que co-organisateur avec le regretté Roger Wittlin, des dynamiques et exotiques séminaires d’échocardiographie dans les années 1980. Roger Sage ne manquait jamais d’amener à une époque, maintenant malheureusement obsolète, où les relations avec l’industrie pharmaceutique étaient empreintes d’amitié et de convivialité, les flacons de son frère Roland lors de toute réunion médicale…

La recette secrète des Maisons Sage

L’élaboration du Champagne Roland Sage était parfaitement classique avec quelques particularités : outre la grande qualité des raisins des terroirs Grands Crus de la Côte des Blancs, Roland Sage pratiquait un remuage et un dégorgement manuels jusque dans les années 2000, et surtout il utilisait une liqueur de dosage selon une recette secrète des Maisons Sage – Champion permettant un brut faiblement dosé à 10 g/l. En outre, les millésimés vieillissaient plus de quatre ans dans ses belles caves crayeuses.

Roland Sage était un bon vivant, un épicurien dans toute l’acception du terme et je le verrai toujours, lors du mariage de sa nièce, sabrer un nombre incroyable de ses très vieux flacons et, à chaque flûte, nous affirmer d’une lippe gourmande « ça, c’est du vin ! ».

Ce Brut Sage 1990, malgré son âge canonique pour un Champagne, présente une corpulence étonnante et une vigueur primesautière. Les bulles s’égrènent toujours aussi nombreuses et pétillantes que celles d’un jeunot de quelques années. En bouche, déferlent des arômes d’agrumes citronnés, de fleur blanche, de noix fraîche, à peine teintés d’un léger nez d’oxydation, champignon et gibier. Roland Sage a certainement signé avec ce millésime magnifique, l’une de ses plus grandes réussites. Ce splendide flacon, malheureusement le dernier de ma cave, fut dégusté en apéritif lors d’une récente fête familiale, mais je regrette de ne pas lui avoir offert un plat de prestige, tel un turbot au champagne ou un croustillant de bar au foie gras…

Le Champagne Roland Sage a disparu depuis le décès de son propriétaire, mais son neveu, avec lequel il collaborait depuis de nombreuses années, garde sous le label Roland Champion, une qualité très proche, notamment pour les millésimés, de celle que Roland Sage avait atteinte et ses vins sont hautement recommandables.

Par ailleurs, je vous rappelle l’excellent rapport qualité/prix du Margaine Spécial Club (voir Le Cardiologue 327) ou, si vous cherchez le haut de gamme, je vous conseille fortement le Billecart Salmon Brut réserve, élu meilleur Brut du monde par Decanter, qui honorera splendidement toutes vos fêtes. Roland, où que tu sois, nous continuerons à célébrer le culte de l’amitié grâce aux bulles de Champagne en ayant toujours une pensée pour toi… ■

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Établissements hospitaliers privés : les missions de la CME sans aucun moyen !

Deux décrets sont parus au Journal Officiel des 7 et 16 novembre derniers relatifs, pour le premier à « la conférence médicale d’établissement des établissements de santé privés », le second à « la lutte contre les événements indésirables associés aux soins dans les établissements de santé ». Avec un précédent texte en date du 30 août dernier, et qui concernait la « politique du médicament et des dispositifs médicaux stériles » dans lesdits établissements, ils constituent un triptyque fixant le rôle et les missions de la CME. « Nous sommes globalement assez satisfaits de ces textes, et tout particulièrement de celui relatif à la lutte contre les événements indésirables, commente Jean-Luc Baron, président de la Conférence nationale des présidents de CME de l’hospitalisation privée. En effet, la CME est étroitement impliquée dans l’organisation de cette lutte, et pour nous, cela représente une grande avancée, au même titre que le rôle dévolu à la CME en ce qui concerne la politique du médicament dans les établissements.

LA CME se vit confier une mission d’évaluation, et l’élaboration de la liste des médicaments et dispositifs médicaux. C’est important, car cela introduit un vrai regard médical sur cette politique. Coresponsables de la politique du médicament dans l’établissement, bien évidemment, les médecins vont devoir apprendre à gérer économiquement les choses ; il en va de la pérennité de l’établissement, qui peut être mise en cause par une mauvaise gestion. » Le décret relatif exclusivement à la conférence médicale d’établissement du secteur privé – et qui concerne le privé à but lucratif comme le privé à but non lucratif – apporte une ombre au tableau. « Un paragraphe a sauté qui concernait l’élaboration par la CME de son règlement intérieur, explique Jean-Luc Baron. Selon la version définitive, elle ne l’élaborera pas, et cela nous contrarie, car c’était une façon pour la CME de s’affirmer face à la direction. » Enfin, Jean-Luc Baron souligne que la question de la rémunération des missions attribuées à la CME reste posée et… sans réponse pour l’instant. « Il faudra bien parler de la valorisation de ces missions, assumées sur le temps médical. Que ce soit au travers de la convention ou des MIGAC, pourquoi pas, il faudra valoriser cette nouvelle gouvernance. Le bénévolat ne peut plus suffire ; il est à la rigueur envisageable tant qu’il s’agit d’expérimenter des nouvelles missions, mais dès lors qu’elles sont inscrites dans la loi, elles doivent être rémunérées. »

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De larges missions

La conférence médicale d’établissement contribue, notamment à « l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins », notamment en ce qui concerne le plan de DPC des personnels. Elle contribue également à l’élaboration de « projets relatifs aux conditions d’accueil et de prise en charge des usagers », ce qui inclut l’évaluation de la prise en charge des patients, « et le cas échéant des urgences et des admissions non programmées », la politique de soins palliatifs, éventuellement, la PDS, et l’organisation du parcours de soins. Enfin, la CME « propose un programme d’actions qui prend en compte les bilans d’analyse des événements indésirables ». Il s’agit de répondre aux recommandations du rapport de certification, et de mettre en oeuvre les engagements fixés par le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens de l’établissement.

Concernant le médicament, la CME élabore la liste des médicaments et dispositifs médicaux stériles dont l’utilisation est préconisée dans l’établissement, préconisations dont elle est également chargée.|(gallery)




Lucia Saint-Emilion 2004 – Michel Bortolussi 33330 Saint-Emilion

Curieusement, ce domaine est quasi inconnu en France, ignoré des grands guides oenologiques, alors qu’il est adulé par les Américains et les Japonais ; c’est d’ailleurs, dans une de mes lectures préférées, le manga « Les gouttes de Dieu » que je l’ai découvert. Michel Bortolussi reconnaît, avec quelque regret, que la quasi-totalité de sa production part à l’étranger.

Michel Bortolussi, propriétaire depuis 1995 du Château Lucie, Saint Emilion basique, dont les récoltes étaient destinées depuis longtemps à la coopérative, comprit rapidement qu’il possédait, en fait, un joyau que son expérience dans le matériel de vinification allait lui permettre de révéler. Il agrandit légèrement son domaine qui atteint maintenant 3 hectares relativement morcelés, mais avec une parcelle de très vieilles vignes complantées en 1901 face à Grand-Pontet. Dès 2001, il eut l’heureuse initiative de s’assurer des conseils de Stéphane Derenoncourt, vigneron génial maintenant à la tête d’une société de « consulting » qui guide et assiste une quarantaine de domaines bordelais.

Indiscutablement, c’est la collaboration de Stéphane Derenoncourt qui a permis à Lucia, puisque c’est ainsi qu’elle avait été rebaptisée, de prendre son envol et devenir certainement l’un des plus grands Bordeaux de la rive droite. Tous les ingrédients ont été réunis pour la réussite : travail forcené dans le vignoble avec culture raisonnée proche du bio, effeuillages et récoltes purement manuelles, vendanges au vert, sélection draconienne sur la table de tri permettant des rendements étonnamment faibles de 20 à 25 hl/ha, macération en cuves de chêne ouverte selon la technique bourguignonne chère à Derenoncourt, pigeage manuel, le moût étant foulé avec les pieds ! L’élevage s’opère en barriques de chêne comportant 60 % de bois neuf pendant 12 à 16 mois, selon le millésime. L’assemblage de Lucia comporte près de 95 % de Merlot avec quelques pincées de vieilles vignes de Cabernet Sauvignon et Malbec.

Ce domaine, pour Parker qui lui accorde d’ailleurs des notes énormes, est classé en « vin de garage » : ce qui irrite fort Michel Bortolussi. Certes, sa production est faible, moins de 10 000 bouteilles/an, mais sa cuverie n’est pas exiguë, le chai est spacieux, moderne, parfaitement équipé, et surtout ses prix sont tout à fait corrects, sans rapport avec ceux des fameux vins de garage, en fait, un des meilleurs rapports qualité/prix du Libournais.

Le Lucia 2004 d’une robe rubis pourpre profond est un vin spectaculaire au fruité flamboyant, au goût explosif, et à la concentration profonde. D’emblée, le nez exhale des arômes intenses de crème de myrtilles, de confitures de mûres sur un fin sillage floral de rose, pivoine, violette. La bouche est grasse, ample à l’attaque exprime une formidable densité tannique enrobée par une chair incomparable. Des flaveurs de torréfaction, de charbon de bois et de prunes accompagnent une caudalie interminable. Ce vin est manifestement apte à une longue garde de 15 ans minimum.

Les Saint-Emilion sympathisent habituellement avec des viandes rouges cuites au barbecue, l’entrecôte bordelaise grillée aux sarments de vigne en étant l’exemple le plus pointu. Mais notre Lucia mérite mieux, car, en vieillissant, elle fera honneur, grâce à sa richesse et son exubérance, à un civet de lièvre, un salmis de palombe ou un pâté de grives. Je crois également que ce vin affectionne les champignons, faites-lui épouser : grenadin de veau aux cèpes, pigeon aux girolles, rôti de veau farci aux truffes. Elle aimera également, en fin de repas, un vieux gouda, un salers ou un laguiole.

Mais voici le bémol : ce vin n’est pas vendu à la propriété, vous pourrez le trouver chez certains cavistes, comme le Cellier de Boenot à Pomerol, et peut-être qu’en insistant, le sympathique Michel Bortolussi pourra vous réserver quelques primeurs…

Pour conclure sur l’opéra Lucia di Lammermoor, j’oserai écrire que ce vin d’une séduction fascinante évoque le baiser sucré et doux amer d’une beauté aux prunelles noires et aux cheveux de jais. ■




Information médicale : la médiocrité des pouvoirs publics

Le constat de ce qui se passe actuellement en France concernant l’information du public sur la qualité de prise en charge dans les établissements hospitaliers est plutôt sévère. Les informations diffusées vers le grand public à l’initiative des pouvoirs publics ? En résumé, les auteurs du rapport constatent qu’elles « sont actuellement très pauvres ». Certes, des indicateurs de processus se développent, mais « il n’existe pas de données sur les résultats ». L’information disponible est « rarement présentée sous forme comparative », la satisfaction des patients n’est pas mesurée « de manière homogène », les données ne sont pas présentées « sous une forme synthétique et agrégée », les informations sont « dispersées sur plusieurs sites », et d’accès difficile d’autant que le principal site, www.parhtage.sante.fr, vient d’être interrompu pour cause d’ARS.

Selon l’IGAS, « l’émiettement du dispositif de pilotage de la production d’informations » et « la faiblesse d’investissement dans ce domaine » expliquent la médiocrité de la situation. En outre, les auteurs soulignent que l’information sur la qualité a été essentiellement conçue en direction des professionnels de santé, celle des usagers n’étant qu’un « objectif subordonné ». Les usagers reçoivent donc une information inadaptée « qu’il leur est difficile de lire et d’interpréter ». Leurs représentants ne sont guère mieux lotis, car, s’ils reçoivent une information abondante, au sein des diverses instances où ils siègent, ils ne disposent pas non plus d’une information « structurée, synthétique et comparative » qui leur permettrait de promouvoir activement la qualité. Dans ce contexte, le succès remporté par les divers « palmarès » publiés par les médias n’a rien d’étonnant, que, s’appuyant sur les données du PMSI à visée de statistiques de gestion ils « conduisent à des appréciations peu pertinentes ».

Un investissement initial important

Pour les auteurs du rapport, l’information des usagers doit devenir « un objectif en soi ». Indépendamment des « effets bénéfiques » qui en résultent sur les comportements des usagers et des équipes soignantes, c’est la condition sine qua non pour « promouvoir l’autonomie de la personne malade, renforcer la démocratie sanitaire, réduire les inégalités d’accès aux soins ». Dans cette perspective, ils préconisent de « constituer un site unique de référence comportant des informations comparatives ». Pour les représentants des usagers, ils suggèrent qu’ils puissent accéder à des « comptes qualité » structurés selon une architecture fixée au niveau national pour « assurer l’homogénéité de l’information et favoriser les comparaisons », publiés annuellement par les établissements, à l’issue d’une procédure contradictoire auprès des parties prenantes. Ces propositions s’inscrivent, selon leurs auteurs, dans un « projet global orienté vers la promotion d’un usager plus actif », qui nécessite « un investissement initial important » et un effort quotidien pour le faire vivre, et un pilotage unique que les auteurs préconisent de confier à la HAS, qui se verrait donc confier une nouvelle mission : « assurer l’information des usagers sur la qualité des prises en charge ». ■

|Pr Yves Cottin « Tout est à faire ! »| |« J’ai pris connaissance avec grand intérêt de ce rapport de l’IGAS que je trouve très complet et très objectif, sans rien de polémique, même si beaucoup de points forts peuvent donner lieu à discussion. Je trouve notamment très intéressant que les auteurs considèrent que l’usager devra être un consommateur actif. Ils anticipent en cela ce qui s’est passé dans plusieurs pays, notamment aux États-Unis. Cela nécessite que les professionnels organisent et planifient cette évolution. L’information modifie les comportements des patients, mais aussi des professionnels de santé, dont les pratiques médicales changent. Elle est un bon moyen d’améliorer la transparence et la qualité de soins. Les auteurs soulignent qu’il s’agit d’un projet global pour lequel « un investissement initial » s’impose. C’est évident, dans le domaine de l’information sur la qualité, tout est à faire ! »|(gallery)




Sauvignon blanc 2008 Cloudy Bay – Blenheim Nouvelle-Zélande

Ce n’est pas en se refermant dans notre Hexagone cocardier, en méprisant la concurrence des vins du Monde que nous défendrons le mieux nos magnifiques productions ! Effectivement, le Sauvignon Cloudy Bay qui jouit, à l’étranger, d’une énorme notoriété, est un interlocuteur intéressant, car il offre une déclinaison originale et atypique de ce cépage qui trouve ses expressions les plus fabuleuses dans les liquoreux bordelais et dans les blancs secs du Centre Loire : Sancerre et Pouilly-Fumé (voir Le Cardiologue 317).

Découverte et ainsi intitulée par le capitaine James Cook lors de son voyage en 1770, Cloudy Bay est située à l’extrémité orientale de l’île du sud de la Nouvelle-Zélande dans la vallée de Marlborough, où débouche la rivière Wairau. Le vignoble bénéficie d’un climat tempéré, frais, solaire et venté, proche de celui du Nord de la France, en raison de la froide mer australe qui baigne les côtes de la province de Marlborough.

Les longues journées ensoleillées (comment l’éminent navigateur a-t-il pu décrire cette région comme brumeuse ?) alternent avec des nuits froides. Cette phénologie convient à merveille au Sauvignon, Savvy pour les « kiwis », maturation lente du raisin, accumulation de sucre, sans perte de la fraîcheur, complexité aromatique liée à la combinaison des grains, soit exposés au soleil prenant un nez de fruit exotique, soit cachés par l’ombre évoluant vers un goût acidulé et citronné.

Les vignobles, souvent éloignés à l’intérieur des terres, sont cultivés sur des sols d’origine volcanique, argileux et limoneux, mais la winery est installée sur la Wairau Valley.

Les premiers millésimes de Cloudy Bay, élaborés par le fondateur David Hohnen à partir de 1985, témoignèrent d’emblée d’une telle précision et force dans l’expression aromatique du Sauvignon qu’ils ont immédiatement enthousiasmé le marché mondial et que, happés par les oenologues anglo-saxons, ils étaient pratiquement introuvables en France.

Depuis dix ans, LVMH est devenue le principal actionnaire de la winery, si bien que le vin est largement distribué dans l’Hexagone, mais les propriétaires ont eu la sagesse de ne rien changer dans son élaboration en conservant le surdoué vinificateur, Kevin Judd.

Celui-ci reste très discret sur son savoir-faire. Mais nos artistes liguriens seraient surpris, voire choqués, par ses méthodes de vinification : si le raisin bénéficie de soins méticuleux et est récolté à maturité optimale, malheureusement de façon mécanique, cela n’empêche pas un arrosage intensif, des engrais à profusion, quoique peu chimiques, des rendements énormes, plus de 100 hl/ha. La vinification et l’élevage sont réalisés dans des cuves inox avec un strict contrôle de la température. Certaines cuvées (dans certaines années ?) sont élevées en baril avec un peu de Sémillon.

La dégustation du Sauvignon Cloudy Bay me procure un vrai plaisir. Les arômes classiques du Sauvignon de Loire : genêt, buis, bourgeon de cassis, voire pipi de chat, sont beaucoup moins prégnants, mais, dans le verre, d’une robe dorée pâle, le vin dévoile d’emblée un nez herbacé de poivron vert et d’asperge et, très vite, explosent des arômes exotiques de litchi, de mangue, d’ananas. La bouche corsée et aromatique conjugue le fruit juteux d’agrumes très citronnés avec de riches saveurs de caramel et d’amandes sous-tendus par une minéralité cristalline et une acidité pointue qui masquent une richesse alcoolique de 13,5°. Ce vin très typé permettra des mariages originaux. Osez-le en apéritif avec des poissons fumés, et notamment du saumon. Dans sa prime jeunesse, sa verdeur relative accompagnera sympathiquement les coquillages et, tout particulièrement, les huîtres. Mais dès qu’il aura acquis un peu de rondeur avec l’âge, il épousera sensuellement les plats marins excités par des saveurs orientales, en particulier citronnelle et coriandre, comme tous les poissons à la mode thaïe. Les gastronomes des antipodes apprécient leur Cloudy Bay avec des filets de bar au fenouil, un tartare de saint-jacques à l’anis, un sauté de thon, riz croquant, une omelette japonaise avec alcool de riz, dashi, sauce soja. Ses saveurs exotiques accueilleront avec délice un clafoutis aux mangues ou aux kiwis (of course !).

Ce flacon, comme la majorité de ceux du Nouveau Monde, est capsulé et son apogée ne dépasse pas deux ou trois ans. N’y a-t-il pas un rapport ?

Mais grâce au Cloudy Bay, la Nouvelle-Zélande nous offre une image beaucoup plus sympathique et agréable que celle des manifestations contre la présence française dans le Pacifique ou de la féroce mêlée des All Blacks. ■(gallery)




Urgences de nuit : le projet francilien qui fait peur

«Un seul bloc devrait être ouvert pendant vingt-quatre heures dans chaque département ». La révélation par Le Parisien début septembre du projet de l’ARS d’Ile-de- France de réduire drastiquement les services chirurgicaux d’urgence la nuit, les week-ends et les jours fériés dans les hôpitaux de la région parisienne (hors les vingt et un établissement de Paris intra-muros) a fait l’effet d’une bombe. Chez les hospitaliers, les réactions ont été immédiates. Non que la nécessité d’une réorganisation ne s’impose à eux, mais le projet francilien semble pour le moins excessif, puisqu’on passerait de six à onze hôpitaux par département assurant actuellement les urgences chirurgicales de nuit à un seul ! Pour la Coordination médicale hospitalière, il s’agit là d’un projet « impensable » et « potentiellement dangereux » pour les malades. La CMH déplore notamment que le projet englobe la période 18h00-minuit « pendant laquelle la vie continue et où les patients arrivent en masse à l’hôpital, et la période après minuit où l’activité est quasi nulle », selon son président François Aubart.

« Nous ne sommes pas là pour répondre à des objectifs de productivité, a répliqué l’Association des Médecins Urgentistes de France, nous sommes présents pour répondre à l’inattendu et à l’imprévisible, pour répondre à ce qui n’est pas programmable. » Et l’AMUF d’ironiser : « Est-il envisageable de supprimer des centres de secours des pompiers au motif qu’il n’y a pas assez de feux la nuit ? » Estimant que la concrétisation d’un tel projet mettrait la sécurité des patients en péril, l’AMUF souligne par ailleurs que cela accroîtrait le travail des SAMU qui devront « répondre en urgence à des demandes de transferts pour déplacer des patients vers l’unique hôpital départemental appelé “tête de pont”, qui sera débordé ».

Le directeur de l’ARS d’Ile-de-France, Claude Evin, a tenté d’apaiser les esprits en expliquant qu’il ne s’agissait que d’un simple « document de travail » et que la concertation était en cours. « Si, effectivement, la concertation conclut au fait que c’est nécessaire de maintenir un service entre 18h30 et minuit, on le maintiendra. Je pense qu’on arrivera à un consensus. »

Un mauvais souvenir pour les cardiologues du Nord

Selon Le Parisien, l’ARS d’Île-de-France n’est pas la seule à réfléchir à une « rationalisation » de la permanence des soins hospitaliers, et des projets analogues seraient à l’étude dans d’autres régions. Où l’on n’a pas attendu la création des ARS pour avoir ce genre de réflexion, les ARH les ayant devancées dans cette démarche. Ainsi, le Dr Vincent Guillot, cardiologue à Lens et président du syndicat des cardiologues libéraux Nord-Picardie, se souvient d’un projet relatif à « l’organisation du réseau des urgences pour la région Nord-Pas-de-Calais » qui, en 2008, faillit aboutir à l’interdiction pure et simple de la pratique en urgence des angioplasties coronaires la nuit (de 18 h à 8 h), le dimanche et les jours fériés dans tous les établissements privés de la région. « Le point commun avec le projet de l’ARS d’Île-de-France c’est qu’il se présentait aussi comme une restructuration du secteur public, explique Vincent Guillot. Concrètement, les établissements privés étaient évincés, il n’y avait plus que les établissements publics autorisés à pratiquer des angioplasties en urgence la nuit, dont certains en pratiquaient très rarement. » C’est la mobilisation de la majorité des cardiologues libéraux de la région, mais aussi de certains cardiologues hospitaliers, la mobilisation des élus locaux, l’action syndicale régionale mais aussi nationale, qui a permis l’abandon du projet, en tout cas pour le volet cardiologie interventionnelle. « Tout n’est pas fini, et il nous faudra rester vigilants puisque l’organisation des urgences d’angioplasties coronaires sera réétudiée ultérieurement », écrivait alors Vincent Guillot dans une lettre à ces confrères cardiologues. Les ARS ont remplacé les ARH, et le vent de restructuration souffle de plus belle : la vigilance s’impose, effectivement. ■(gallery)