Numerus Clausus : pourquoi la France va manquer de médecins

349 – Le docteur Daniel Wallach, qui a commencé ses études de médecine en 1965, n’a pas eu lui-même à se frotter à ce Numerus Clausus dont il raconte l’histoire. L’ouvrage, préfacé par Gérard Kouchner, directeur de la publication du Quotidien du Médecin, utilise comme seule source bibliographique ce même journal, né en 1971, la même année que le NC instauré alors pour limiter le nombre des futurs médecins.

A partir de là, le pays, qui formait dans les années 1960 environ 8 000 praticiens par an, a autoritairement décidé d’en abaisser régulièrement le nombre jusqu’à un « plancher » de 3 500 pendant plusieurs années.

L’auteur a choisi de scinder son ouvrage en trois parties

L’essentiel du livre est consacré à l’histoire de ce NC qu’il appelle « la planification de la pénurie médicale » ; on aura vite compris que Daniel Wallach est absolument opposé à cette réforme. Liée à l’origine au nombre de postes d’étudiants hospitaliers et plus précisément au nombre de lits présents dans les hôpitaux universitaires, cette mesure, selon lui, ne pouvait qu’aboutir à un déséquilibre puisque l’indexation d’un besoin croissant de médecins à une quantité décroissante de lits ne peut que « mener dans le mur ».

Aux yeux de l’auteur, ce NC revêt en outre un aspect idéologique (certes nié par les autorités de l’époque qui en faisaient une réforme purement technique) et devient rapidement une faute morale, « empêchant à de très nombreux étudiants d’accéder à une profession et une culture que le plus grand nombre s’accorde à placer en haut de l’échelle des valeurs ».

Daniel Wallach aborde ensuite les effets de la réforme du troisième cycle, mise en place dans les années 1980 dans le but apparent de valoriser la médecine générale. De fait, l’avènement de l’internat qualifiant et la suppression des CES vont avoir pour effet de réduire de façon conséquente le nombre des futurs spécialistes ; réforme d’importance qui modifia radicalement le statut de l’interne, transformant du jour au lendemain un jeune médecin hospitalier en étudiant du troisième cycle ; et cela sans revalorisation effective du médecin généraliste : on se souvient par exemple de l’époque des « Canada dry », terme peu flatteur utilisé par certains pour désigner, à leur vif mécontentement, les étudiants nommés internes sans avoir passé le concours. La troisième partie très intéressante également vise à décrire le pouvoir médical dans les hôpitaux, et les différentes formes de mandarinat. Système féodal pour l’auteur, le mandarinat subsiste, ayant résisté aux différentes tentatives de ministres successifs tels Jack Ralite, Michèle Barzach en passant par Georgina Dufoix (que les cardiologues ont eu à fréquenter et à combattre), et bien d’autres.

En conclusion

Ce livre, fort bien documenté même s’il ne se réfère qu’à une seule source (mais quoi de mieux qu’un quotidien spécialisé pour raconter au jour le jour les événements de la profession), se lit facilement tant le style de l’auteur est précis et incisif ; il pourrait devenir un des ouvrages de référence pour tous ceux, médecins ou non, qui s’intéressent à la démographie médicale et, au-delà, à la politique de santé des quarante dernières années ■

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Le Code de Hammurabi

349 – Christian Ziccarelli – Le contexte historique _ Nous sommes en 1792 avant Jésus Christ, à Babylone, sur les rives d’un bras secondaire de l’Euphrate, Hammurabi le VIe roi de la 1ère dynastie de Babylone monte sur le trône. Il l’occupera pendant un long règne de 43 ans. Incontestablement, il est la figure la plus connue de l’histoire mésopotamienne de la première moitié du IIe millénaire par l’étendue de ses conquêtes et la promulgation de son code. Doué d’un grand sens politique, Hammurabi parvint à unifier sous son sceptre une Mésopotamie profondément divisée et déchirée par des luttes sanglantes depuis près de trois siècles. Il impose non seulement la suprématie de Babylone sur la plupart des cités du Nord de la Basse Mésopotamie, mais il réussit aussi à se dégager de la pressante tutelle de l’empereur d’Elam, en Iran du Sud-Ouest. De simple bourgade, Babylone va devenir au fi l des ans, la ville au centre du monde supplantant ses rivales Ur, Uruk, Nippur, Assur, Mari…

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De Sippar au Louvre… _ La stèle fut érigée, sans toutefois exclure l’hypothèse de sa présence à Babylone, dans une grande ville de Babylonie, peut-être à Sippar, située au nord de la capitale. C’était un centre oraculaire, la cité sainte du dieu soleil, Samas, aussi dieu de la justice. Au milieu du XIIe siècle, Shutruk-Nahhunté Ier, roi d’Ansan et de Suse, souverain du pays d’Elam (Iran), pilla les trésors de l’art mésopotamien et les emporta à Suse, notamment la stèle du Code et l’installa dans une grande cour associée aux temples majeurs. Finalement elle fut redécouverte, en 1901, par la Délégation en Perse à Suse, dirigée par Jacques de Morgan, sur le « Tell de la Citadelle ». « Cet important monument (…) gisait, brisé en trois morceaux, au milieu des décombres de toutes sortes qui remplissaient une petite chambre à douze mètres environ du niveau primitif du Tell. C’est sans doute au moment de la prise de Suse par Assurbanipal (d’Assyrie, en 646 av. J.-C.) qu’il aura été précipité dans cette sorte de cave, les vainqueurs le trouvant trop lourd pour l’emporter à Ninive. La brisure n’était pas volontaire (…) les trois fragments s’agençaient presque parfaitement, sans lacune importante »([ Jacques de Morgan)]. La stèle arriva au Louvre où elle se trouve aujourd’hui, après un passage par Mascate, et un voyage en mer sur le vaisseau Jean-Bart.

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Le texte de loi _ Une longue tradition a précédé le Code d’Hammurabi. Dés l’époque des dynasties archaïques, au milieu du IIIe millénaire av. J.-C., les souverains promulguaient des édits pour régulariser les prix et enrayer l’injustice sociale, notamment le Code d’Ur-Namma(Ur-Namma, a été roi d’Ur de 2112 à 2095 av. J.-C. selon la chronologie moyenne, de 2047 à 2030 selon la chronologie basse. La datation de son règne est très approximative. Il fut l’auteur du plus ancien code juridique connu) celui de Lipit-Istar(Lipit-Ištar est le cinquième roi de la Ire dynastie d’Isin. Son règne est situé vers 1934-1924 av. J.-C.). La stèle est presqu’entièrement couverte d’un texte gravé avec art et disposé de façon archaïsante, une lecture verticale et de droite à gauche. Il manque les sept colonnes inférieures effacées par Sutruk-Nahhunte Ier. Dès le 15 septembre 1902, le père Jean-Vincent Scheil publie sa traduction dans le volume IV des « Mémoires de la Délégation en Perse ». Après un long prologue historique dans lequel le monarque chante son investiture, ses propres louanges, et énumère les oeuvres pieuses accomplies dans les différentes villes du royaume, viennent au moins deux cent quatre-vingts articles de lois. Une phrase au conditionnel annonce un problème de droit ou d’ordre social, elle est suivie d’une réponse au futur, sous forme de sanction pour le fauteur de trouble ou de règlement d’une situation sociale particulière. « Si un notable crève un oeil d’un autre notable, on lui crèvera un oeil, s’il crève un oeil d’un homme du peuple, il pèsera une mine d’argent (500 g) ». Les thèmes sont disposés dans un ordre assez déroutant : punitions pour faux témoignages, vol et recel, lois relatives au travail, à la propriété, au commerce, mariage, divorce, héritage, adoption, statuts des femmes vouées aux temples, châtiment des blessures infligées aux personnes physiques selon la catégorie sociale des individus, problèmes juridiques liés à l’agriculture ; taux des salaires et locations, enfin achat d’esclave en Babylonie, à l’étranger… Un long épilogue invite l’opprimé impliqué dans un procès à se faire lire la stèle « pour qu’il voit son cas, que son coeur se dilate ». Les termes « loi et tribunal » n’existent pas, la justice est publique et se rend aux portes des palais et des temples. Il n’y a pas d’avocat, mais les deux parties doivent fournir des preuves écrites et, à défaut, des témoins. En l’absence de preuve suffisante, on recourt au serment par le dieu, voire à l’ordalie !

Hammurabi devant le dieu Samas _ A la partie supérieure de la stèle figure cette scène sculptée, légitimant la souveraineté d’Hammurabi et les décisions de justice gravées en dessous. Une tiare à quatre rangs de cornes le coiffant, une longue barbe couvrant sa poitrine, une robe à volants, les pieds reposant sur un piédestal, deux rayons lumineux jaillissant derrière ses épaules, permettent d’identifier le personnage assis sur un trône, au dieu solaire Samas. Tout comme le soleil disperse les ténèbres, Samas expose en pleine lumière le mal et l’injustice. Il tient dans sa main un bâton et un cercle, insignes du pouvoir qu’il transmet à Hammurabi, debout devant lui, un bras droit levé en signe de respect et d’écoute. Comme le dieu, le roi porte des bijoux (bracelet, torque) sans doute des talismans de pierres magiques ayant une influence favorable pour contrecarrer les mauvais plans d’un éventuel adversaire. Selon une inscription gravée sur la stèle, nous sommes en présence du propre portait du roi. Le Louvre possède une tête royale en diorite sculptée en ronde de bosse qui pourrait être une autre représentation de ce grand homme d’Etat. ■

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Actes réalisés à deux moments différents d’une même journée : un service rendu bien mal récompensé

Les faits _ Le 6 février 2009 à 15h00, le Dr L., cardiologue examine lors d’une consultation, qui, sera cotée CSC, Monsieur D, âgé de 91 ans. L’ECG, inclus dans cette CSC, est réalisé à 15h11, comme en atteste l’enregistrement automatique de l’heure sur le tracé.

Il apparaît, ce qui n’était pas prévu lors de la prise du rendez-vous qu’un échocardiogramme doit être réalisé rapidement, ceci d’autant plus qu’il s’agit d’un patient très âgé et fragile.

Malheureusement, le planning d’échocardiographie du cabinet est déjà complet pour l’après-midi.

Le Dr L. demande à sa secrétaire de réorganiser rapidement le cahier de rendez-vous., en décalant d’autres patients. Chacun sait que ce n’est pas facile, mais une place sera dégagée un peu plus tard dans l’après-midi.

Monsieur D. quitte le bureau de consultation à 15h30, et le Dr L. le retrouve à 16h00 dans la salle d’échographie.

Il réalise alors l’échocardiogramme qui est codé DZQM006, conformément à la CCAM.

Courriers de la CPAM de C. _ Par un premier courrier du 11 août 2011 (soit deux ans et demi après les faits !), la CPAM réclame au Dr L. le montant de la CSC, soit une somme de 45,73 € qu’elle qualifie d’honoraires « indus », en écrivant que « les honoraires de la consultation ne se cumulent pas avec ceux des actes techniques », seul l’acte le plus important, à savoir l’échocardiogramme pouvant être facturé, ceci en fonction de l’article III-3 des DG de la CCAM.

Le Dr L. informe la caisse qu’il ne s’agit pas d’actes pratiqués dans le même temps, mais dans deux temps différents d’une même journée, et dans des lieux différents, et que par conséquent, l’article III-3 ne s’applique pas.

Par un second courrier, la caisse lui répond qu’elle maintient sa position, en précisant que le médecinconseil a répondu défavorablement car, « considérant les éléments transmis concernant le déroulement des séances, celles-ci ne peuvent être considérées comme discontinues ».

Il y a donc deux conditions pour que deux actes pratiqués à des moments différents d’une même journée puissent être facturés à taux plein : _ ■ les actes doivent être pratiqués pour des raisons médicales ou dans l’intérêt du patient (on voit mal comment il pourrait en être autrement) ; _ ■ il doit y avoir une justification de ces actes dans le dossier du patient (en pratique, dans la lettre au médecin traitant). _ Remarque : il n’est pas imposé de délai minimal entre les deux actes et il suffit qu’ils soient discontinus. Notons au passage que le médecin-conseil parle, à propos des actes, de « séances », ce qui témoigne de sa part d’une mauvaise connaissance des textes en vigueur, car cette notion de « séance » était un terme utilisé dans les anciennes DG de la NGAP, alors que désormais, on doit appliquer les DG de la CCAM, dans lesquelles cette terminologie a disparu. On doit parler maintenant d’actes pratiqués dans le même temps ou dans des temps différents, ce qui est plus clair.

Commentaire _ Il est navrant qu’un médecin-conseil puisse ainsi de façon autoritaire prendre des décisions contraires à la réglementation. Il aurait été en droit, conformément aux DG de la CCAM, de réclamer le courrier médical du Dr L., afin de s’assurer de la justification de la réalisation de l’échocardiogramme le même jour. Il ne l’a pas fait, et il a opposé un refus sans connaître le dossier.

Nous avons fourni au Dr L. qui est un de nos adhérents, les éléments nécessaires à la mise en route d’une procédure de contentieux. ■

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Les recommandations des sociétés savantes : un outil pour défendre ou pour condamner les médecins mis en cause ?

Les années 2000 ont indiscutablement consacré la « médecine basée sur les preuves (evidence based medecine) ». Nous sommes passés d’une médecine empirique, reposant essentiellement sur la confrontation d’expériences de leaders, vers une médecine encadrée par une multitude de recommandations nationales, européennes ou américaines, établies sur l’analyse d’études randomisées, multicentriques.

L’affaire du Mediator, qui a révélé des difficultés dans le renouvellement des AMM et dans le système de pharmacovigilance, puis la décision récente du Conseil d’Etat d’annuler des recommandations du diabète de type 2 de l’HAS en raison d’une insuffisance sur la gestion des conflits d’intérêts des auteurs, ont permis d’ouvrir les yeux sur ce que l’on peut attendre des institutions régulatrices et sur les recommandations dans leur utilisation au quotidien, comme de leur opposabilité en cas de mise en cause d’un médecin.

Les recommandations constituent-elles toujours « la référence » ? _ La réponse est évidemment non. Avec le recul du temps, nous avons pu observer une franche évolution dans le niveau de rigueur méthodologique appliqué dans l’écriture des recommandations. Avant les années 2000, les premières recommandations étaient écrites, en général, par des personnalités reconnues se réunissant deux à trois fois, partageant leurs expériences et leurs avis sur les études plus ou moins importantes, et aboutissaient sur des conseils de ce qu’il fallait ou ne fallait pas faire, mais sans toujours préciser le niveau de preuve. C’était déjà un progrès, à l’époque, sur une médecine de tradition orale où la pensée dominante reposait sur le charisme de quelques patrons qui « faisaient école ».

Aujourd’hui, qu’elles soient américaines ou européennes, les recommandations sont rédigées par des panels assez larges de personnalités reconnues, qui vont débattre, certes de leur expérience, mais qui surtout vont tenter de faire la synthèse des données publiées dans la littérature et chercher un consensus global.

Chaque option diagnostique ou thérapeutique est exprimée avec plus ou moins de force (classe I (bénéfique) à III (nuisible)), mais surtout elle quantifie le niveau de preuve de A à C (larges études randomisées, nombre limité d’études plus ou moins randomisées ou juste consensus d’experts).

Logiquement, ce sont les maladies les plus fréquentes qui font l’objet du maximum d’études et de recommandations, dont il peut être intéressant de confronter les positions européennes à celles américaines. Cela devient parfois un parcours du combattant pour se forger une opinion !

Habitués à une codification extrême de la pratique, les médecins se retrouvent parfois un peu démunis lorsqu’ils ont à traiter une maladie peu répandue ou orpheline. C’est alors que le bon sens doit primer et qu’il faut se tourner vers des référents pour orienter ses choix. Jusqu’à récemment, les médecins avaient le sentiment d’exercer dans un monde sécurisé, rassurés par la notoriété et le rayonnement de tel ou tel laboratoire. L’affaire du Mediator, même si la molécule a très peu été prescrite par les cardiologues, a montré, selon le rapport de l’IGAS, que le renouvellement des AMM par les agences régulatrices du médicament n’a peut-être pas été assez rigoureux.

Au-delà de ce problème, il a également été mis en évidence des lacunes dans le système de pharmacovigilance.

De nombreux médecins ont prescrit parce qu’ils avaient confi ance en leurs institutions. Plus récemment, probablement par une défiance accrue dans les institutions, une association de formation médicale indépendante a demandé le retrait d’une recommandation de la HAS concernant le traitement du diabète de type 2, soulignant que les conflits d’intérêts des auteurs n’avaient pas été évalués. Au terme de presque deux ans de procédure, l’association a obtenu du Conseil d’Etat, l’annulation de la décision de l’HAS en avril 2011.

Une aire nouvelle vient de s’ouvrir, celle d’une exigence de qualité des recommandations des Sociétés Savantes et des autres missions gouvernementales. Aujourd’hui, il ne suffit plus d’être un référent sur un sujet, mais on doit faire toute la lumière sur ses éventuels conflits d’intérêts propres, afin que les recommandations soient écrites en toute transparence pour ceux qui vont les lire et les appliquer.

Quelle place pour les recommandations en cas de procédure contentieuse contre un médecin ? _ Même si la question de l’opposabilité des recommandations fait l’actualité, c’est rarement l’indication ou la technicité d’un acte qui font débat dans les conflits entre patients et médecins. Il est vrai qu’internet a augmenté l’accessibilité des patients à la connaissance médicale, et qu’on voit de plus en plus fréquemment des plaintes s’appuyant sur des documents drainés sur la toile. Mais avant cela, les plaintes sont surtout la conséquence d’une déception, d’une désillusion ou d’une colère d’un patient contre son médecin. Cela a pu débuter simplement par une écoute insuffisante ou une information parcellaire sur un acte proposé. C’est lors de la réalisation d’un risque non expliqué que s’exprime la colère de la victime, alors qu’elle aurait pu être moindre si elle s’y était plus ou moins préparée. A ce sujet, il a été obtenu le principe du « préjudice d’impréparation » en cas de défaut d’information même lorsque l’acte était inévitable.

C’est aussi lorsque le patient, seul dans sa détresse, est face à un médecin au comportement désinvolte pour gérer sa complication, qu’il va développer progressivement une révolte et l’envie de porter plainte contre lui. En ne prenant pas le temps d’expliquer ce qu’il s’est passé au patient, à son entourage ou à son médecin traitant, le médecin à l’origine d’un accident prend le risque que son patient se tourne vers d’autres praticiens ou à la recherche d’information sur internet.

Il est très fréquent de voir des plaintes naître de paroles peu déontologiques de praticiens qui interviennent au décours d’un accident. Ce n’est malheureusement pas la dénonciation des fautes des confrères qui va réduire l’importance du préjudice et des handicaps!

Une fois qu’une procédure contentieuse est lancée, souvent sur la base d’un comportement décevant, il est clair que toute la démarche professionnelle du praticien sera étudiée à la loupe : indication, information, technique, mode de surveillance, gestion de la complication…

Va alors débuter une bataille entre l’expert désigné par les tribunaux, les conseils des patients et les conseils des médecins mis en cause. Tout d’abord, la nature des soins médicaux doit être étudiée à la lumière des données acquises à l’époque des faits. Il n’est donc pas acceptable qu’un médecin puisse être condamné sur une recommandation qui a été rédigée après l’acte litigieux.

Même s’il existait quelques études préliminaires évoquant le bénéfice de tel ou tel traitement, il n’est pas légalement acceptable d’attendre d’un médecin qu’il ait une connaissance aussi fi ne qu’un expert rédigeant une recommandation, ou un expert des tribunaux. En effet, la rédaction d’une recommandation se fait après confrontation de plusieurs experts sur l’analyse de plusieurs publications.

En revanche, un médecin peut avantageusement s’appuyer sur une recommandation publiée après son acte à l’origine d’un sinistre, s’il est en mesure de se justifier sur des études préalables dont il avait une très bonne connaissance à l’époque des faits. Sa défense sera d’autant plus forte qu’il n’existait pas d’alternative thérapeutique. Par ailleurs, il est difficile d’entendre dire que telle ou telle recommandation est plus forte qu’une autre.

L’essentiel du débat juridique sera de prouver que l’acte thérapeutique reposait sur un faisceau d’arguments en faveur de son choix. Si les recommandations offrent un cadre aux médecins, celui-ci n’est pas toujours suffisant, car l’acte médical doit être élaboré en tenant compte du terrain spécifique du patient, de son profil psychologique et de ses contre-indications. A titre d’exemple, est-il raisonnable de mettre une valve mécanique plutôt qu’une valve biologique à un patient certes jeune, mais dont il a été rapporté à plusieurs reprises une observance très médiocre ?

Il peut arriver en expertise médicale que des patients viennent avec leurs recommandations de la Société Française de Cardiologie sous le coude pour argumenter certains choix de chirurgie, avec comme on peut s’y attendre une compréhension parcellaire de la problématique et s’arcboutant sur un critère qu’ils pensent pouvoir appliquer à leur cas.

C’est là où la personnalité et la persuasion de l’expert sont capitales pour réussir à faire comprendre les données du problème. La résolution des conflits ne peut reposer que sur un débat contradictoire entre les parties et arbitré par l’expert, et parfois par une contre-expertise.

Il est bien évident qu’il sera toujours plus facile de se défendre si l’acte proposé était de classe I avec un niveau de preuves A, surtout s’il n’existe pas d’alternative thérapeutique ! La défense en expertise, comme devant le tribunal, devra être acharnée si les critiques ne s’appuient que sur une recommandation isolée et contredite par d’autres recommandations a priori de plus grandes envergures (ESC, ACC, AHA). Lorsqu’on est mis en cause, envisager un recours en dénonciation de conflit d’intérêts d’une recommandation peut, certes, être une voie de défense, mais probablement la moins simple ! Il est désormais certain que l’ensemble des organismes de régulation (HAS, AFSSAPS…) tout comme les Sociétés Savantes vont procéder avec soins dans le choix des membres des comités de travail ainsi qu’à une analyse scrupuleuse des conflits d’intérêt.

En conclusion _ Les recommandations des organismes gouvernementaux, comme celles des Sociétés Savantes ont permis ces dernières années d’apporter une aide au quotidien à l’ensemble des professionnels reposant sur une analyse de la bibliographie et plus de précisions sur le niveau de preuve. Bien entendu, chaque médecin, face à un patient donné, se doit d’orienter ses choix avec discernement, en ayant pris le soin d’informer le patient des objectifs thérapeutiques, mais également des risques potentiels, selon le niveau des connaissances au moment donné. En expertise, c’est sur le pari de l’intelligence et du débat d’idées que pourra être étudiée la responsabilité des médecins. Il sera impératif de s’opposer à toute critique d’expert lorsqu’elle n’est pas étayée par de la littérature opposable à la date de l’accident, surtout lorsque l’on connait la richesse des recommandations en cardiologie !




iPad3 : La chasse est ouverte

349 – Apple est une société extraordinaire. A chaque lancement de produit, la firme à la pomme fait le buzz sur la toile. Pas besoin de plan de communication, pas besoin de campagne publicitaire, les internautes remplacent toutes les agences de publicité. Et si vous n’êtes pas au courant, il y a forcément quelqu’un qui va vous en parler.

En mars 2011 sortait tout juste l’iPad2. Pratiquement un an après, jour pour jour, Apple nous sort une nouvelle version de son produit phare. Alors cet iPad3 ? Vaut-il vraiment la peine qu’on parle de la première tablette de l’ère Tim Cook ([Tim Cook est le successeur de Steve Jobs à la tête d’Apple depuis le mois d’août dernier.)] ou mieux vaut-il jouer les autistes et passer notre chemin ?

Un meilleur rendu _ Tout d’abord l’écran qui, a priori (nous ne parlerons qu’au conditionnel vu que nous n’en sommes qu’au stade des rumeurs, ne fussent-elles bien avancées), aurait une résolution nettement supérieure avec une taille identique à la version 2. Le nouvel écran « Retina Display » passerait d’une résolution de 1 024 x 768 ppp ([ppp : pixels par pouce)] à 2 048 x 1 536 ppp – tout simplement le double – et devrait satisfaire les plus exigeants. On pense aux joueurs, mais pas seulement. Le grand public que nous sommes tous devrait se réjouir d’une haute défi nition pour un meilleur visionnage des fi lms et des programmes de télévision. Sur ce point d’ailleurs, des rumeurs persistantes ont fait leur apparition sur l’Apple TV3. Apple bouclerait ainsi son ultra-projet numérique : achat de musique, achat de vidéos, tout cela dans la plus grande transparence puisque tout est lié via wifi et depuis quelque temps par airplay qui, soit dit en passant, est repris par de grands constructeurs – comme Denon par exemple qui l’a incorporé dans ses amplificateurs home-studio de dernières générations.

Quant aux professionnels, l’iPad devient pour le coup un formidable outil d’imagerie grâce à son « Retina Display ». Les détails deviendront bien plus nets, et chacun pourra apprécier à sa plus juste valeur les images reçues par l’iPad3. Les développeurs vont d’ailleurs retravailler leurs applications en ce sens.

Une meilleure vue _ Concernant le capteur, celui aurait une résolution de 5Mpx ou 8 Mpx selon les rumeurs. En tout cas supérieur à la qualité déplorable de « l’appareil photo » de l’iPad2.

Un meilleur coeur _ La puce aura autant de différence entre un iPhone3 qu’un iPhone 4S. Plus de rapidité, plus de performances (ça, on s’en serait douté), le processeur – dénommé pour l’instant AX5 (photo) selon les sources, ou A6 – devrait donner un certain embonpoint à la tablette dans le sens de l’épaisseur, à moins que le processeur ne soit gravé en 28 ou 32 nm au lieu des 45 nm actuels. Il est également possible qu’un processeur quadcore fasse son apparition, comme le souffle la rumeur depuis longtemps.

Une meilleure communication _ L’iPad3 devrait être doté d’une connexion 4G (avec la technologie Long Term Evolution) qui devrait permettre de surfer sur l’Internet haut débit mobile.

Et la 3D ? _ iPhone et iPad devraient intégrer rapidement la technologie 3D en utilisant des capteurs de mouvement et de reconnaissance faciale. Apple semble avoir déposé un brevet en ce sens.

En conclusion _ Certains experts entendaient bien que les tablettes allaient à terme remplacer les ordinateurs portables, et l’iPad 3 ouvre à grand vent cette brèche. Tout faire avec une tablette, tel est le credo des constructeurs aujourd’hui, et d’Apple en particulier. Rendez- vous le 7 mars ! ■

|Les tablettes aujourd’hui| |Quarante millions d’iPad (versions 1 et 2 confondues) ont été vendus dans le monde et ont ainsi généré 25,3 milliards de dollars de chiffre d’affaires.

Samsung, Sony, ou la tablette française Archos entre autres, n’ont pas réussi à convaincre les consommateurs malgré leurs atouts respectifs. Apple a toujours un train d’avance et bénéficie d’une grande notoriété de fabrication et de solution logicielles grâce à ses APPs qui font sa force, tout comme l’iPhone.

La compétition s’annonce malgré tout plus rude avec l’arrivée des tablettes low-cost. Google notamment devrait sortir une tablette à environ 200 dollars avec son système d’exploitation Android (livré dans de nombreux smartphones, il a mis fin à la suprématie de l’iPhone(Aujourd’hui, plus d’un smartphone sur deux vendus aux États-Unis est équipé d’Android)) devrait faire la différence avec ses concurrents. C’est le consommateur qui va y gagner.|




Dispositifs médicaux : Plus de sécurité, oui, moins d’innovation, non

349 – La loi de 2011 sur la sécurité sanitaire renforce le contrôle sur les Dispositifs Médicaux (DM). D’autres évolutions sont annoncées à la suite de l’affaire des prothèses mammaires, notamment la création d’une AMM pour certains produits. Les médecins comme les industriels souhaitent que ces évolutions n’empêchent pas les patients de bénéficier rapidement de dispositifs innovants.

 Parce qu’elle est étroitement liée à l’affaire du Médiator, la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire a surtout été commentée du point de vue du seul domaine de la pharmacie. Mais la « loi Bertrand » ne concerne pas que les médicaments, elle concerne également de vastes domaines des DM. Vaste domaine, puisque l’on recense quelque 4 000 classes de DM représentant environ 800 000 produits, qui vont de la simple compresse au scanner, en passant par le lit médicalisé et les dispositifs implantables, prothèses en tout genre, stents, défibrillateurs et autres prothèses valvulaires cardiaques… Tous ces produits sont classés en fonction de leur niveau de risque (durée d’implantation, délai de détérioration, etc.) dans quatre classes : niveaux 1, 2A, 2B et niveau 3 (le plus haut risque). Pour cette dernière catégorie, depuis 2000, une évaluation clinique est obligatoire, dont l’exigence a été renforcée en 2010.

Pas d’AMM pour les dispositifs médicaux

Mais pour l’ensemble des DM, leur mise à disposition ne passe pas, comme pour le médicament, par une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), mais par l’obtention du marquage CE délivré par des organismes certifiés désignés par les différents Etats. Nantis du marquage CE, les DM passe par l’AFSSAPS – devenue Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) par la loi – qui les évalue du point de vue de la matériovigilance. Il revient ensuite à la Commission Nationale d’Evaluation de DIspositifs Médicaux et des Technologies de Santé (CNEDIMTS) de la Haute Autorité de Santé d’en faire l’évaluation scientifique en vue de leur remboursement. Jusqu’à présent, la HAS n’évaluait pas les DM relevant d’un financement dans les groupes homogènes de séjour. Elle devra le faire à l’avenir conformément à la loi de décembre 2011. La CNEDIMTS devra aussi remettre chaque année au Parlement un rapport d’activité mentionnant notamment les modalités et principes selon lesquels sont mis en œuvre les critères d’évaluation des produits de santé en vue de leur prise en charge par l’Assurance Maladie.

Une publicité soumise à autorisation

Comme la publicité sur les médicaments, la publicité pour les dispositifs médicaux est strictement encadrée par la loi. En particulier, pour les DM « présentant un risque important pour la santé humaine » et dont la liste sera établie par le Ministère de la Santé, la publicité est désormais soumise à une autorisation préalable délivrée par l’ANSM pour une durée de cinq ans renouvelable. Le même dispositif s’applique aux DM de diagnostic in vitro « dont la défaillance est susceptible de causer un risque grave pour la santé ».
La loi de décembre dernier instaure également que l’ANSM puisse faire procéder à un contrôle de conformité des DM aux spécifications techniques requises pour l’inscription sur la liste des produits remboursables. Elle autorise aussi le contrôle par des agents assermentés de l’Assurance Maladie de la conformité des DM aux règles de facturation et de tarification en vigueur.
Enfin, la loi dit que l’ANSM doit remettre au Parlement avant le 30 juin prochain « un rapport dressant le bilan des règles applicables à la sécurité des dispositifs médicaux et présentant des règles susceptibles de l’améliorer ».

Un système de sécurité sanitaire mis sur la sellette

A peine l’affaire du Médiator quittait-elle les feux de l’actualité que l’affaire des prothèses mammaires PIP faisait la Une des médias au début de l’année. Certes, il faut rapidement établir que l’on était ici en présence d’une fraude manifeste de la part d’un fabricant que les scrupules et le souci de la santé des patientes n’étouffent pas, c’est le moins que l’on puisse dire. N’importe, l’opinion publique ne pouvait s’empêcher de se demander comment une telle fraude avait pu perdurer des années et, une fois encore, notre système de sécurité sanitaire était mis sur la sellette.
Un premier rapport de l’AFSSAPS et de la DGS remis au Ministre de la Santé a avancé un certain nombre de recommandations pour renforcer le contrôle des dispositifs médicaux. La première vise un renforcement des inspections par l’AFSSAPS. Mais de nombreux produits étant fabriqués à l’étranger, une coopération entre les agences des différents pays est souhaitable. Renforcer les inspections signifie surtout effectuer des inspections inopinées et régulières, qui ne permettent pas à d’éventuels fraudeurs de cacher leurs méfaits. Un laboratoire européen pourrait être chargé de l’analyse des produits qui seront prélevés lors de ces inspections inopinées. La matériovigilance nécessite elle aussi la coopération entre les différents Etats.

Une volonté de réformer la réglementation

Dans le cadre de la révision de la directive européenne sur les DM, la France propose la mise en place d’une procédure de centralisation de signalements et de traitement des incidents recueillis par chaque autorité nationale ;  les fabricants seraient dans l’obligation de déclarer dans chaque Etat membre des signalements faits par les professionnels de santé.
Dès la remise de ce rapport, Xavier Bertrand a fait part de sa volonté de réformer la réglementation, souhaitant notamment la mise en place d’une AMM pour les DM. Le directeur général de l’AFSSAPS, Dominique Maraninchi, estime que les autorités européennes devraient engager cette réforme, jugeant le système de contrôle par des organismes certificateurs insuffisant. Ils ont été entendus, puisque Guido Rasi, le nouveau directeur de l’Agence européenne du médicament (EMA), s’est prononcé en faveur d’un renforcement de la réglementation européenne sur les DM, jugeant qu’il était urgent «  de prendre pour le matériel médical les mêmes mesures de sécurité que pour les médicaments ».
Chez les professionnels de santé comme chez les industriels du secteur, le renforcement de la sécurité sur les dispositifs médicaux, s’il est accueilli plutôt favorablement, ne va pas sans susciter quelques craintes. La principale est que l’accroissement des contrôles et des évaluations ne soit un frein à l’innovation et ne retarde la mise à disposition de matériels qui, jusqu’à ce jour, ont sauvé plus de vies qu’ils n’en n’ont compromis.

 

Le champ évaluatif de la HAS est élargi

La mission d’évaluation des DM de la HAS est étendue par la loi aux dispositifs de prescription hospitalière.

 La loi de renforcement de la sécurité sanitaire accroît l’intervention de la Haute Autorité de Santé dans le domaine des dispositifs médicaux. « Jusqu’à présent, le rôle de la Haute Autorité de Santé dans le domaine de dispositifs médicaux est de procéder à leur évaluation scientifique en vue de leur remboursement par l’Assurance Maladie, explique Jean-Michel Dubernard, membre du Collège de la HAS et président de la CNEDIMTS. Il s’agit donc de déterminer le niveau de service médical rendu ou d’amélioration du service médical rendu. La loi de décembre 2011 n’apporte qu’une modification concernant la HAS, mais elle est d’une importance considérable, puisqu’elle lui  confie désormais l’évaluation des dispositifs médicaux relevant d’un financement dans les groupes homogènes de séjour (GHS). » La liste des produits concernés sera établie par les ministres en charge de la santé et de la Sécurité Sociale. L’inscription des produits sur la liste est prononcée pour une durée déterminée et renouvelable. Les établissements de santé qui achèteront ou utiliseront des produits non inscrits sur cette liste seront passibles d’une sanction financière prononcée par l’ARS.

« Jusqu’à présent, ne passaient par la CNEDIMTS que les dispositifs inscrits sur la liste des prescriptions remboursables dite “liste en sus”, précise Catherine Denis, chef du service d’évaluation des dispositifs (SED). Les dispositifs de ville à usage individuel passent également par la HAS, ainsi que les dispositifs jamais évalués liés à un acte, pour lesquels c’est l’UNCAM qui décide du remboursement. Mais nous ne nous occupions pas des DM remboursés dans le cadre de la prescription hospitalière. Nous allons le faire désormais, et c’est un travail énorme qui ne pourra se faire à moyens constants. »

Actuellement, la HAS traite plus de 150 dossiers par an. « En plus de ces 150 dossiers, nous procédons également à la révision de six à huit catégories de dispositifs par an, précise Catherine Denis. Les stents ou les défibrillateurs, par exemple, constituent des catégories qui doivent être révisées tous les cinq ans. »

En dehors de cette extension de son rôle par la loi, la HAS n’est a priori pas concernée par les évolutions annoncées par Xavier Bertrand à la suite de l’affaire des prothèses PIP. Mais Jean-Michel Dubernard voit favorablement le renforcement du système annoncé. « Une révision de la réglementation européenne sur les dispositifs médicaux est prévue en 2012 avec l’ensemble des parties prenantes. Il va y avoir un accroissement des exigences en matière de données cliniques, et ce sera bénéfique pour les patients. Nous aurons des dossiers plus complets qui nous permettront de voir sur quoi les organismes notifiés se sont appuyés pour délivrer le marquage CE. La loi de décembre 2011 et les évolutions à venir vont dans le sens de ce que, en tant que président de la CNEDIMTS, j’ai toujours souhaité. »

C’est dans cet esprit que la HAS a conçu un guide pédagogique pour l’établissement des dossiers de demande à la CNEDIMTS d’inscription d’un produit sur la Liste des Produits et Prestations Remboursables (LPPR), et qu’elle organise chaque année des journées d’information pour les fabricants. « Notre objectif à travers ces journées, explique Catherine Denis, est que leurs dossiers soient de meilleure tenue, du point de vue de la qualité du produit et non pas seulement de son descriptif. »

 

Entretien Philippe Mabo

« Un équilibre est à trouver pour ne pas freiner l’innovation »

Pour Philippe Mabo, cardiologue au CHU de Rennes et président du groupe rythmologie de la FFC, le renforcement de la sécurité sanitaire ne doit pas entraver l’innovation dans le domaine des dispositifs médicaux. 

 

Quelles évolutions peut-on attendre en cardiologie concernant les dispositifs médicaux ?

Philippe Mabo : Tout d’abord, et concernant la cardiologie, je tiens à souligner que la décision récente de la HAS de ne pas étudier le dossier du remboursement de l’acte associé au télésuivi des prothèses avant 2013 donne un coup de frein à cette pratique. Nous sommes actuellement dans une situation paradoxale : les industriels perçoivent un bonus, c’est-à-dire un tarif plus élevé si le télésuivi est associé au DM, mais où le médecin, lui, ne perçoit rien s’il active cette fonction ! Nous l’avions dit, il fallait traiter le dossier de façon globale. On a fait beaucoup de bruit autour de la loi sur la télémédecine, mais lorsqu’il s’agit d’entrer dans le vif du sujet, c’est autre chose. Manifestement, avec la généralisation du télésuivi, les tutelles redoutent d’être confrontées à un problème de coût, et elles ont peur d’ouvrir la boîte de Pandore. Mais la communauté cardiologique est très raisonnable ; elle est prête à accepter un forfait, et les risques de dérapages peuvent être encadrés. Le but du télésuivi n’est pas de faire des économies, mais une amélioration qualitative pour le patient, sans surcoût pour le système de santé.

Sur le plan technologique, les appareils sans sonde qui vont bientôt entrer en évaluation clinique, et les prothèses multifonctions sont parmi les évolutions majeures à venir. Une autre grande évolution sera la neurostimulation dans l’insuffisance cardiaque ou la HTA. Cette technique complémentaire aux médicaments, qui consiste à stimuler le nerf vagal ou spinal pour agir sur la balance vagotonique, n’en est encore qu’à un stade très préliminaire et tout le travail reste à faire, mais cela devrait déboucher dans les années qui viennent.

Comment appréhendez-vous l’impact de la loi de renforcement de la sécurité sanitaire sur les DM ? 

Ph. M. : Le durcissement dans les processus d’évaluation des DM auquel on peut s’attendre va augmenter les coûts pour les industriels et rallonger le délai de développement des produits. On peut donc craindre que cela soit un frein à l’innovation. Avec l’intégration des DM dans les GHS, tout établissement de santé pouvait acheter un produit au prix proposé. Nous avions mis en garde les autorités sur le fait que le marquage CE ne validait qu’une évaluation technologique. La loi de décembre 2011 remet en place un processus d’études cliniques pour les DM inclus dans les GHS  afin d’en valider le SMR ou l’ASMR. Sachant que la durée minimum d’une étude clinique est de trois ans et que le turn-over des DM est de trois ans également, un produit risquera d’être mis à disposition dans sa version V1 au moment même où sa version v2 sera annoncée ! On risque de perdre le temps d’une génération de produit. Aujourd’hui, il faudrait cinq ou six ans d’étude cliniques pour que la resynchronisation cardiaque soit effective… L’augmentation des coûts peut aussi faire redouter un impact sur l’activité de recherche clinique des équipes, les industriels risquant de se montrer plus frileux pour les accompagner dans leurs projets.

Selon vous, la loi risque donc d’avoir des effets plus néfastes que bénéfiques ?

Ph. M. : Non, la loi est potentiellement bénéfique, sous réserve qu’on ne soit pas plus royaliste que le roi, qu’on ne passe pas d’un extrême à l’autre, mais qu’on place le balancier au bon endroit. Il faut éviter d’entraver l’innovation, et de voir les études nous échapper pour aller se faire vers l’Est ou en Chine, dans des pays aux réglementations plus laxistes. n

 

 

Entretien Eric Le Roy

« Le renforcement de la sécurité ne doit pas paralyser nos industries »

Directeur général du SNITEM, Eric Le Roy, met en garde contre une évolution de la réglementation en matière de DM qui retarderait la mise sur le marché de produits innovants et pénaliserait du même coup les patients.  

 

Quelles sont les conséquences de la loi de renforcement de la sécurité sanitaire sur le secteur des dispositifs médicaux ?

Eric Le Roy : Il importe en préambule de souligner l’extrême diversité de ce marché qui va de la compresse au lit médicalisé en passant par les dispositifs implantables. Certains DM sont diffusés à des millions d’exemplaires, d’autres en quantité beaucoup plus limitée. Par exemple, on pose moins d’un millier de prothèses valvulaires percutanées par an en France. A cette diversité des produits répond une diversité de conception et de fabrication faisant appel à des industries et à des métiers très divers également. Les réglementations de 1990, puis de 1998 sont adaptées à cette diversité, et la marquage CE tient compte de ces éléments. Ce marquage spécifique aux DM se fait selon des normes harmonisées spécifiques. Le réseau de référentiels est relativement complet et couvre tous les secteurs.

Concernant la loi de décembre 2011, la « loi Bertrand », il est difficile d’en mesurer l’impact pour nos entreprises avant la parution des décrets d’application. On sait que la loi instaure la création de listes de certains produits pour lesquels il y aura un contrôle de la publicité a priori par l’AFSSAPS. Elle introduit également une évaluation par la HAS des produits inclus dans les GHS. Nous serons vigilants à ce que ces nouvelles règles ne viennent pas bloquer l’arrivée sur le marché et donc la mise à disposition des patients de produits innovants.

Vous redoutez l’augmentation des délais du fait de ces évaluations ?

E. L R. : Je ne veux pas partir de l’idée que le temps d’évaluation sera long, et je compte sur l’intelligence des politiques et des organismes de contrôle pour que le délai d’accès aux produits ne soit pas rallongé. La loi est une loi de renforcement de la sécurité, elle ne doit pas être une loi de blocage. Quant à la transparence à toutes les étapes introduite par la loi, elle doit être simple à mettre en place. Il ne faut pas tomber dans une hyperadministration qui pénaliserait les nombreuses PME de notre secteur qui n’auront pas les moyens d’embaucher des personnels spécialisés pour la gérer.

A la suite de l’affaire des prothèses mammaires PIP, le Ministre de la santé, Xavier Bertrand, a annoncé un certain nombre de propositions pour renforcer le contrôle sur le DM, notamment la création d’une AMM comme pour les médicaments. Qu’en pensez-vous ?

E. L R. : L’affaire des prothèses PIP est une affaire de fraude qui relève de la justice. Comment débusquer la fraude ? Il appartient aux agences d’agrément d’agir par des inspections les plus efficientes possible. En France, c’est le rôle régalien de l’AFSSAPS, et je n’ai pas de commentaire particulier à ajouter à ce sujet. Concernant l’hypothèse d’une AMM pour les DM, je tiens à souligner que depuis 1998, la réglementation a évolué au moins cinq fois. Les produits de classe 3 à plus haut niveau de risque, notamment tous les dispositifs implantables, ont toujours fait l’objet d’une évaluation clinique, qui a été renforcée depuis 2000. Une nouvelle évolution de la réglementation est possible, mais il importe qu’elle ne marque pas l’arrêt de nos entreprises. C’est une question de « hauteur de marche » en quelque sorte. Le plus important pour nous est que toute évolution se passe au niveau européen. Oui, la collaboration entre les agences européennes doit être renforcée et des efforts sont à faire pour améliorer la communication entre elles. De même, la matériovigilance doit être renforcée et se faire via un portail européen. Si l’on passe par 27 portails nationaux, on se retrouvera à nouveau un jour ou l’autre avec un problème consécutif à une coordination défaillante. Notre préoccupation majeure est que les patients français ne soient pas pénalisés en matière de DM par rapport aux autres patients européens.




Le problème des CET résolu

349 – L’épineux dossier des quelque 2,1 millions de RTT inscrits dans les Comptes Epargne Temps (CET) des praticiens hospitaliers a trouvé une issue en toute fin d’année. Les hospitaliers auront trois options pour « écluser » leur RTT cumulées au fil des ans : les prendre sous forme de congés, se les faire payer ou les cumuler pour une retraite anticipée. Si la dernière option peut intéresser un grand nombre de praticiens proches de la retraite, la première ne devrait pas avoir un grand succès : c’est précisément faute de pouvoir prendre des congés en raison de leur charge de travail que les hospitaliers ont cumulé tant de RTT… La plupart optera sans doute pour la monétisation de ces jours, dont le coût global est évalué à 600 millions d’euros sur quatre ans.




Six syndicats ont signé un accord cadre

349 – L’année 2010, qui a vu croître le malaise des hospitaliers, s’est finalement achevée par la signature d’un accord cadre sur l’exercice médical à l’hôpital paraphé par cinq organisations syndicales : la Coordination Médicale Hospitalière (CMH), le Syndicat National des Médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des Hôpitaux (SNAM-HP), l’InterSyndicat National des Chefs de Clinique Assistants des Hôpitaux (ISNCCAH), l’Intersyndicale Nationale Autonome Représentative des Internes de Médecine Générale (ISNAR-IMG) et l’Intersyndicat National des Internes des Hôpitaux (ISNIH). Quant à l’Intersyndicat National des Praticiens Hospitaliers (INPH), bien que jugeant l’accord « largement insuffisant », il a également apposé sa signature à la fin janvier. Inspiré du rapport Toupillier paru en septembre dernier, l’accord cadre définit « deux axes structurants » : « identifier, organiser et valoriser les équipes médicales », et « choisir, construire et adapter la carrière médicale du praticien à l’hôpital ».




Livre blanc du CNCH : des comparaisons tarifaires contestées

349 – Avant le Livre Blanc qui devrait voir le jour à l’issue des états généraux de la cardiologie qui se dérouleront au cours de cette année à l’initiative de la FFC et de 25 autres organisations, en vue de l’instauration d’un Plan coeur, le Collège National des Cardiologues des Hôpitaux (CNCH) vient de sortir le sien, qui fait l’état des lieux de la cardiologie hospitalière publique en France.

Presque la moitié (49 %) des séjours cardiologiques et 48 % des séjours en USIC se font dans les établissements du CNCH (403 services répartis dans centres hospitaliers, les établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC) et les hôpitaux militaires). Ce qui en fait le premier acteur de la permanence des soins au plan national.

Le CNCH revendique 32 % des parts de marché dans le domaine de la cardiologie interventionnelle, et le second rang en rythmologie interventionnelle avec 38 % de l’activité de stimulation cardiaque, 21 % des poses de défibrillateurs implantables et 20 % de l’activité d’ablation.

Deux ombres à ce tableau favorable : la baisse de la démographie médicale, et « l’insuffisance tarifaire de certains GHS dans le public par rapport au privé. A cet égard, les chiffres avancés par le CNCH sont contestés par les cardiologues libéraux. « Certaines comparaisons tarifaires de ce Livre Blanc sont difficilement compréhensibles et je ne comprends pas à partir de quelles données elles sont établies, proteste Jacques Berland (clinique Saint-Hilaire à Rouen). Ainsi quand on lit que la pose d’un stent endocoronaire coûte 3 845 euros dans le privé contre 2 543 dans le public. Pour cet acte, le GHS dans le privé est de 1 960,30 euros, auquel s’ajoutent 718 euros pour le forfait radiologie/honoraires médicaux, et 94,50 euros pour l’anesthésiste. On est loin des 3 845 euros avancés. De même, affi rmer que les astreintes sont rémunérées 150 euros dans le privé quand elles le sont à hauteur de 50 euros dans le public, c’est ignorer délibérément qu’elles ne le sont pas du tout dans le privé ! Je ne veux pas polémiquer, mais j’aimerais vraiment savoir d’où sont tirés ces chiffres. C’est très important. Quand les auteurs disent que la réalisation de toutes les angioplasties dans le public permettrait une économie de 60 millions d’euros, on voit aisément le genre de décision que cela peut inspirer aux pouvoirs publics. »




La HAS encourage la simulation en santé

349 – Ce qu’est la simulation en santé, on le devine aisément : il s’agit par « l’utilisation d’un matériel, de la réalité virtuelle ou d’un patient standardisé » de reproduire des situations ou des environnements de soin et d’enseigner ainsi aux praticiens les procédures diagnostiques et thérapeutiques permettant d’y faire face. Cela peut aller de l’apprentissage d’une injection sur un bras artificiel à celle d’un bloc opératoire avec un mannequin où toute une équipe chirurgicale et anesthésiste joue son rôle et réagit à une situation à risque contrôlée par ordinateur. C’est cette forme d’apprentissage que la Haute Autorité de Santé veut promouvoir dans notre pays où elle intéresse beaucoup, mais où elle est « encore à développer ». C’est le constat dressé par Jean-Claude Granry et Marie-Christine Moll du CHU d’Angers, qui viennent de remettre le rapport que leur avait demandé la HAS sur le sujet. Un des obstacles majeurs à son développement est son coût : un mannequin « haute fi délité » capable de reproduire toutes les réactions de l’organisme vaut entre 60 000 € et 70 000 € … C’est pourquoi les auteurs du rapport préconisent des coopérations entre universités, structures de soins et instituts de formation, et sur la mutualisation des ressources pour créer des plates-formes de simulation.

Il faut également élaborer des référentiels de bonnes pratiques, qui font défaut actuellement ; la HAS jouera son rôle en la matière. Selon Jean-François Thébaut, membre du collège de la HAS, « un groupe de travail a été mis en place fin janvier (ndlr : dont fait partie Christian Ziccarelli) pour produire des documents qui devraient pouvoir être validés avant la fin de cette année ». Une fois établie par ces référentiels une standardisation de cette méthode d’apprentissage devrait se développer plus facilement, notamment dans le cadre du Développement Professionnel Continu (DPC). ■




La e-prescription selon les Ordres

349 – CLIO-santé s’est appuyé pour ce faire sur les expériences conduites en Europe et présentées lors de la conférence ministérielle sur la e-santé qui s’est tenue à Budapest en mai l’année dernière. L’ensemble du dispositif repose sur la création d’une banque centrale de données dans laquelle le praticien dépose la prescription de son patient, et dans laquelle le pharmacien va ensuite la chercher pour la délivrer au patient.

Le périmètre retenu par CLIO-santé pour le dispositif est vaste, puisqu’il concernerait les prescriptions de médicaments, de dispositifs médicaux, d’actes de soins ou de rééducation, de biologie et de radiologie. « Un ensemble de logiciels » permettent un accès sécurisé (gestion des Cartes de Professionnels de Santé (CPS), carte Vitale ou identifiant national de santé) pour déposer ou retrouver une prescription, mettre à jour son statut d’exécution (totale, partielle ou renouveler), et de communiquer toute anomalie au prescripteur par messagerie sécurisée. Outre cette sécurisation parfaite des transactions, le dispositif suppose également une intégration aux Logiciels d’Aide à la Prescription (LAP) des médecins ou aux Logiciels d’Aide à la Dispensation (LAD) des pharmaciens.

Les sept Ordres préconisent une première « phase pilote » avec les pharmaciens – peut-être aussi les laboratoires de biologie – sur « deux ou trois bassins de population » choisis en fonction de leur dynamisme et de leur degré d’avancement dans la mise en oeuvre des projets nationaux en matière d’e-santé (le DMP, par exemple). Le système pourrait ainsi être testé par une centaine de pharmaciens et de praticiens, sous l’égide d’un comité de pilotage associant l’Agence des systèmes d’information partagés de santé, l’Asip santé, et dans un cadre défini par la délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé, la DSSIS. ■




Une année qui commence mal !

349 – La médecine libérale spécialisée ne semble pas intéresser les candidats à la présidentielle, pourtant notre rôle dans la coordination des soins est indispensable et reconnu par l’ensemble de la population. La cardiologie libérale lors de « l’affaire Médiator » n’a-t-elle pas su très rapidement se mobiliser pour répondre à l’inquiétude et à l’attente des patients ? Comment pouvons-nous accepter les directives des ARS qui, régulièrement, veulent obliger certains d’entre nous à investir l’hôpital public alors que l’établissement privé où ils exercent est reconnu par la qualité de son activité et répond à tous les critères d’autorisation ? Imposer le transfert de la chirurgie cardiaque de la clinique Claude Bernard à Metz à l’hôpital en est le dernier exemple. Nous attendons toujours la réponse du directeur de l’ARS de Lorraine à notre courrier sur les raisons pouvant justifier ce transfert. Cela prouve le peu de considération du monde politique à notre égard, il suffit de relire nos éditos pour constater qu’il ne s’agit malheureusement pas d’un cas isolé.

La loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé pose de nombreuses questions restées sans réponse dans l’attente de la parution des décrets d’application. Elle entraîne de fait une paralysie de tous les financements de l’industrie. Il y va, entre autres, de la survie de la presse médicale. Il est aisé de comprendre l’importance de votre abonnement à notre revue « Le Cardiologue ». Que dire sur le financement des congrès ? Je doute que l’Etat dans la conjoncture actuelle soit en mesure d’en assurer seul leur pérennité. Certes, les décrets sur le DPC sont parus, comment sera-t-il financé dans l’avenir ? C’est toujours la grande inconnue. Si l‘on connaît le mode fonctionnement et les critères pour valider l’obligation de DPC, il reste à finaliser sa mise en place par 14 arrêtés. Seront-ils parus avant l’élection présidentielle, on peut en douter ! Les organismes actuels de FMC/EPP restent opérationnels jusqu’au 30 juin 2013, qu’en sera-t-il au-delà ?

Le Conseil National Professionnel de Cardiologie avait sollicité une rencontre avec le Président et le Directeur de la HAS, rendez-vous remis à une date ultérieure. L’objet de cette réunion était pourtant fondamental pour la prise en charge de nos patients. L’objectif de cette rencontre était d’évaluer l’intérêt d’actes sur le suivi des défibrillateurs et des stimulateurs cardiaques, sur la réalisation du FFR et l’association d’actes d’échocardiographie transthoracique avec un écho doppler veineux des membres inférieurs ou des troncs supra-aortique dans des pathologies ciblées. Parallèlement, nous recevons un courrier nous signifiant que la télésurveillance d’un défibrillateur et d’un stimulateur cardiaque ne faisait pas partie des priorités de la HAS pour 2012 et que ce dossier sera examiné en 2013 ! C’est certainement le meilleur moyen de promouvoir la télémédecine en France… Devant le peu de considération de nos institutions manifestée par ces structures institutionnelles, nous pouvons légitimement nous interroger sur leur volonté de poursuivre toute coopération avec les représentants de la cardiologie.

Le dernier rapport de la Cour des comptes est édifiant, son Président, le socialiste Didier Migaud, préconise une « réduction des tarifs des prestataires de soins », bien entendu les actes techniques sont en ligne de mire. Les donneurs de leçon ne devraient-ils pas être les premiers à montrer l’exemple !




Télétransmission et sanctions : de l’ombre à la lumière

349 – En décembre dernier, les syndicats signataires de la convention ont ratifié six avenants, dont l’un, le n°2, met fin à la longue partie de bras de fer entre l’Assurance Maladie et les médecins libéraux. Sans remonter aux origines, rappelons que la CNAMTS, conformément à l’article 53 de la loi HPST, avait déterminé que les prescripteurs devraient réaliser 75 % de l’ensemble de leurs feuilles de soins par télétransmission, et qu’au-delà, donc, des 25 % de feuilles de soins papier tolérées, une pénalité de 0,50 euro par feuille de soins papier leur serait appliquée. La mesure n’a pas eu le temps de rentrer en vigueur, puisque le Conseil d’Etat a annulé la décision du directeur de l’UNCAM au motif que ni les dispositions du code de la Sécurité Sociale, « ni aucune autre disposition législative ou réglementaire » ne l’habilitait à prendre ces mesures, notamment à fixer un seuil de télétransmission déclenchant la pénalité.

Une modification de la loi par le Parlement a posé qu’en l’absence d’accord conventionnel, le directeur de l’UNCAM pouvait fixer le montant de la pénalité. « Nous avons négocié, explique Michel Chassang, président de la CSMF, et nous avons abouti à un accord. » Sont donc désormais passibles de sanction les médecins qui ne télétransmettent pas « systématiquement », mais il n’y a plus de seuil déclencheur de la pénalité. Quant aux sanctions, ce sont les sanctions conventionnelles classiques – qui vont de l’avertissement à l’exceptionnel déconventionnement – qui seront prononcées par les commissions paritaires conventionnelles, après examen au cas par cas.

« Sur ce dossier, nous sommes passés de la nuit au jour », commente Michel Chassang. L’avenant n° 2 devrait être publié prochainement au Journal Officiel. ■




Territoire : des USIC mal connues

349 – Un groupe de travail de la Société Française de Cardiologie (SFC) a effectué un travail de cartographie des Unités de Soins Intensifs en Cardiologie (USIC). Travail d’autant plus précieux que, aussi étonnant que cela puisse paraître, il n’existe aucun recensement national de ces unités qui ne sont identifiées comme telles qu’au niveau régional. Selon l’enquête de la SFC, 341 USIC existent actuellement en France, soit 100 de plus qu’en 2011, année où un premier recensement avait regroupé dans un annuaire 241 structures. Un écart surprenant ? « Le problème est que personne ne sait exactement combien il y a d’USIC en France aujourd’hui, constate Meyer Elbaz, cardiologue au CHU de Toulouse et président du groupe USIC à la SFC. La raison principale en est le flou des critères qui définissent ces unités. » Créées dans les années 70, les USIC sont régies par un décret de 2002 sur la réanimation et les soins intensifs, et une circulaire de 2003. Selon ces textes, elles devraient, par exemple, comporter au moins six lits, et une permanence médicale d’au moins un médecin. « Dans la réalité, commente Meyer Elbaz, certaines USIC n’ont pas les six lits requis, ou n’ont pas de garde sur place, ou n’ont pas le personnel adéquat. Il est donc impératif de procéder à une enquête exhaustive pour avoir une photographie précise de la réalité des USIC. Cela est absolument nécessaire pour élaborer des recommandations de bonnes pratiques. »

Une répartition très inégale _ La plupart des USIC (224) sont dans des centres hospitaliers généraux ou apparentés, 90 sont situés dans des cliniques privées, et 29 dans les CHU. Mais leur répartition sur le territoire est très inégale, certains départements parmi les moins peuplés en étant même dépourvus. Ainsi, 15 départements n’ont pas d’USIC, ou en ont une, mais sans garde sur place. En outre, même au sein de régions dans lesquelles l’offre est théoriquement suffi sante, on constate parfois des déséquilibres intrarégionaux. Ainsi en Midi-Pyrénées, où sur les 111 lits d’USIC, 52 sont à Toulouse, et trois départements, l’Ariège, le Lot et le Gers n’ont pas d’unité. « Normalement, aucun territoire ne doit se trouver à plus d’une heure de l’USIC la plus proche, commente Meyer Elbaz. Mais dans la réalité, il en va autrement. »




Les cardiologues sont prêts pour le P4P

349 – Depuis le début de l’année, comme les praticiens de toutes les spécialités qui n’ont pas signifié par écrit à l’Assurance Maladie qu’ils refusaient le système de rémunération à la performance instauré par la dernière convention, les cardiologues sont entrés dans l’ère du P4P à la française. Mais comme tous les spécialistes, à l’exception des spécialistes de médecine générale, ils ne sont concernés que par la partie « organisation du cabinet et qualité de service ». En effet les indicateurs relatifs à « la qualité de la pratique médicale » inscrits dans la convention ne concernent pour l’instant que les généralistes. Cette option conventionnelle « a cependant vocation à s’étendre à toutes les spécialités par avenants afin de prendre en compte la spécificité de pratique des différentes spécialités cliniques et techniques et d’adapter les indicateurs susceptibles d’être retenus ainsi que les modalités de calcul », précise le texte de la convention.

Un projet déjà élaboré dans le Livre blanc de cardiologie _ C’est dans la perspective de cette généralisation du dispositif que les cardiologues se sont mis rapidement au travail pour élaborer des indicateurs pertinents pour leur spécialité. Rien d’étonnant à cela, puisque, dès 2000, le deuxième Livre Blanc de la cardiologie libérale avançait, parmi les dix propositions pour les dix prochaines années, l’idée d’un « secteur conventionnel d’excellence fondé sur la soumission volontaire et régulière de ses membres à une procédure d’évaluation des pratiques », clause obligatoire pour pouvoir accéder à ce secteur autorisant des dépassements d’honoraire.

Huit ans plus tard, dans la troisième édition du Livre Blanc, le SNSMCV persistait dans son projet avec le « secteur Qualité + » dont le contenu reprendrait « les critères traditionnels de la qualité de la pratique » : engagement dans les objectifs de santé publique, engagements d’efficience économique, engagement dans le suivi des malades chroniques, amélioration de l’environnement du cabinet. Autant de critères retenus par le nouveau texte conventionnel à propos de la rémunération à la performance.

Interrogé par Le Cardiologue, Eric Perchicot, chargé du dossier au sein de SNSMCV et de l’UMESPE, pointait la diffi culté d’élaborer « des indicateurs forcément complexes, mais qui devront être simples d’utilisation pour que les médecins s’approprient le dispositif ».

Des indicateurs médicalement utiles et incontestables _ Quelques mois plus tard, et après cinq réunions de travail avec la CNAMTS, un projet est en cours de finalisation qui comporte une dizaine d’indicateurs pour commencer. « Nous avons proposé une trentaine d’indicateurs au départ, explique Eric Perchicot. Mais n’ont pu être retenus que ceux qui étaient exploitables par l’actuelle base de données de l’Assurance Maladie. Ainsi, il n’est pas possible pour l’instant de retenir des indicateurs concernant les actes techniques, comme l’échographie cardiaque, par exemple, puisque l’Assurance Maladie de peut les relier à des diagnostics. »

Une dizaine d’indicateurs ont donc été retenus, qui concernent les pathologies chroniques, la santé publique et l’effi cience (bonnes pratiques de prescription). A ces indicateurs relatifs à la qualité de la pratique médicale s’ajoutent bien sûr les quatre indicateurs relatifs à l’organisation du cabinet. « Le travail reste ouvert, indique Eric Perchicot. Nos interlocuteurs de l’Assurance Maladie ont été à l’écoute de notre préoccupation d’avoir des indicateurs médicalement utiles et incontestables. Et à ce jour, les indicateurs retenus sont des indicateurs de bonnes pratiques contre lesquels nul ne peut honnêtement s’élever. »

Après une ultime réunion de travail, le projet en l’état sera soumis à l’examen de la commission paritaire nationale. « Les syndicats pluricatégoriels ont leur mot à dire, puisque au final, ce sont eux qui signeront l’avenant », précise Eric Perchicot. Une signature qui devrait intervenir avant la fin du moins de mars. ■

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Y aura-t-il un secteur optionnel au printemps ?

348 – CardioNews – Depuis le 22 janvier dernier et en l’absence d’un accord conventionnel, le Gouvernement a jusqu’au 22 mars pour instaurer, par arrêté, une option de coordination renforcée pour les chirurgiens, les gynécologues-obstétriciens et les anesthésistes réanimateurs de secteur 2, conformément à la LFSS 2012. Cette perspective ne satisfaisant personne, il y a donc urgence à trouver une entente sur le secteur optionnel. Deux réunions ont eu lieu les 20 et 27 janvier dernier entre l’Assurance Maladie, l’UNOCAM et les syndicats signataires de la convention, CSMF, SML, FMF et MG France. Du côté de l’Assurance Maladie et des syndicats, les choses ont un peu avancé. La première s’engage à revaloriser le tarif des actes d’obstétrique et de chirurgie des praticiens du secteur 1 et de ceux du secteur 2 s’engageant dans le secteur optionnel. La CSMF et le SML sont prêts à signer et, à défaut d’unanimité au sein de l’UNOCAM, proposent que le nouveau secteur soit “optionnel” pour les organismes complémentaires d’Assurance Maladie: le prendront en charge celles qui le voudront. _ Car c’est bien en effet du côté de l’UNOCAM que les choses se compliquent. Forte de tout son poids, la Mutualité s’oppose toujours au secteur optionnel. Elle a toujours en travers de la gorge le refus que le législateur lui a opposé pour l’expérimentation de remboursement gradué au sein de réseaux de ses soins. En outre, elle n’estime pas le secteur optionnel, en l’état, capable de réguler efficacement le secteur 2, et trouve anormal que l’Assurance Maladie ne rembourse pas à leur juste valeur les actes des trois spécialités concernées. “En réalité, la Mutualité joue la montre, commente Jean-François Rey, président des spécialistes confédérés (UMESPE). Elle attend les pésidentielles et parie sur l’élection de François Hollande.” Une analyse à lequelle on peut souscrire sans trop de risque d’erreur. _ L’avènement du secteur optionnel n’est donc pas encore pour tout de suite. Il faudrait que le président de l’UNOCAM, Fabrice Henry, parvienne à convaincre la Mutualité de signer pour le dispositif en l’état. On n’y croit guère. Ou que Xavier Bertrand passe en force, et instaure par arrêté le secteur optionnel dans les conditions inscrites dans la LFSS, ce qui serait, politiquement parlant, se tirer une balle dans le pied à trois mois des présidentielles.




Un quart des ménages pense qu’il ne pourra plus assumer ses frais de santé

348 – CardioNews – Selon une étude menée en France en mai dernier par Ipsos pour le cabinet Deloitte, un Français sur quatre – et un sur trois parmi les plus modestes – estime qu’il ne pourra pas assumer ses frais de santé dans l’avenir. Un résultat qui laisse songeur, surtout si l’on considère que l’enquête a précédé l’augmentation de la taxe sur les contrats d’assurance, qui devrait se traduire par une augmentation moyenne de 4,7 % des cotisations : en mai 2011, 57 % des Français déclaraient avoir “atteint” (45 %) ou “dépassé” (12 %) leur imite budgétaire concernant leur complémentaire santé… D’ailleurs, cette crainte des Français n’est pas directement corellée à leur niveau de couverture, puisque près de la moitié d’entre eux (47 %) jugent leur couverture santé actuelle “bonne” ou “convenable”.

En revanche, leur inquiétude est inversement proportionnelle à leurs revenus annuels : si seuls 15 % sont inquiets dans la tranche de revenus annuels supérieurs à 36 000 euros, 38 % le sont dans la tranche des moins de 12 000 euros annuels de revenus.

Pour près de deux tiers des ménages, la crise économique a eu un retentissement sur le budget qu’ils consacrent à leur santé, surtout quand leur revenus sont faibles et leur couverture maladie insuffisante. Pour 6 % d’entre eux, l’impact a été “très significatif”, “significatif” pour 19 %, “modéré” pour 41 % et nul pour 35 %). Conséquence de cette répercussion de la crise ? Un quart de Français déclare que son état de santé s’est dégradé l’année précédent l’enquête.




Les syndromes aortiques aigus

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