Prescriptions hors AMM : un arrêt de la Cour de Cassation qui doit faire réfléchir

357 – Le cadre légal et réglementaire (Cf. numéros 343 et 348 du Cardiologue) _ La prescription hors AMM n’est pas illégale, mais implique un certain nombre d’exigences :

En ce qui concerne le traitement – Absence d’autre molécule disposant d’une AMM et permettant une prise en charge aussi pertinente. – Prescription s’appuyant sur des données scientifiques validées (recommandations, études avec haut niveau de preuves, etc.), afin de justifier la validité de la prescription et l’absence de risque disproportionné pour le malade, ce raisonnement devant être noté dans le dossier. – Intérêt du patient avec rapport bénéfi ce/risque favorable.

Vis-à-vis du patient – Il doit être informé de l’absence d’AMM. Cette obligation d’information a été renforcée par la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades. En cas de conflit médico-légal, le médecin est tenu d’apporter la preuve qu’il a délivré cette information. – Un médicament prescrit hors AMM n’est pas remboursable et l’ordonnance doit le notifier. En cas de non-respect de cette disposition, le médecin peut s’exposer à des sanctions ordinales et être condamné à rembourser à la caisse le coût de sa prescription.

Le litige _ Un rhumatologue a pratiqué en 1988 une injection intradiscale d’Hexatrione en raison de lombalgies. Le traitement a échoué et il devait apparaître des calcifications que le patient a attribuées à ce traitement. Il a mis en cause la responsabilité de son rhumatologue en prétendant que, s’il avait été informé que ce traitement n’était pas conforme aux indications prévues par l’AMM, il l’aurait refusé et aurait choisi la chirurgie.

La Cour d’Appel de Rennes a débouté le patient en considérant « qu’il n’était pas démontré en l’espèce, que mieux informé, M. Y. aurait refusé la technique proposée et préféré la chirurgie, le traitement médical classique ayant échoué et cette technique étant alors sans risque connu et réputée apporter fréquemment un soulagement réel ». _ Cette décision a été cassée par la Cour de Cassation.

Arrêt du 12 juin 2012 de la Cour de Cassation _ « Vu les principes du respect de la dignité de la personne humaine et d’intégrité du corps humain, ensemble l’article 1382 du code civil ; _ Attendu que le non-respect par un médecin du devoir d’information dont il est tenu envers son patient, cause à celui auquel cette information était légalement due un préjudice qu’en vertu du texte susvisé le juge ne peut laisser sans réparation ; _ Attendu que pour rejeter les demandes en dommages intérêts de M. X. à l’encontre de M. Z., médecin rhumatologue, qui lui avait administré en 1988 une injection intra discale d’Hexatrione pour soulager des douleurs lombaires, à laquelle il imputait une calcification ayant rendu nécessaire une intervention chirurgicale, la Cour d’Appel a jugé qu’il n’était pas démontré en l’espèce que, mieux informé, M. X. aurait refusé la technique proposée et préféré la chirurgie, le traitement médical classique ayant échoué et cette technique étant alors sans risque connu et réputée apporter fréquemment un soulagement réel ; _ Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que M. Z. n’établissait pas avoir informé M. X. que le traitement prescrit, quoique pratiqué couramment et sans risque connu, n’était pas conforme aux indications prévues par l’autorisation de mise sur le marché, la Cour d’Appel n’a pas tiré de ses constatations, desquelles il résultait que M. X., ainsi privé de la faculté de donner un consentement éclairé, avait nécessairement subi un préjudice, les conséquences légales qui en découlaient. »

Toutes les spécialités, et notamment la cardiologie, sont désormais à la merci de cette jurisprudence. ■

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Deux exemples courants de prescription hors AMM en cardiologie

HBPM dans la fibrillation auriculaire – Cette indication, en relais des antivitaminiques K, est confirmée dans les recommandations ESC de 2006 et de 2010. – Elle est hors AMM. – Il en est de même de l’héparinate de calcium en sous-cutanée. – La seule héparine ayant l’AMM dans cette situation est la vieille héparine sodique qui est d’utilisation plus contraignante, et nécessite en fait une hospitalisation.

Utilisation hors AMM du clopidogrel – Indication hors AMM : la prévention des thromboses de stent hors SCA. Cette indication ne figure pas au libellé rappelé dans le Vidal. Elle est pourtant solidement documentée, et il est inutile de rappeler dans une revue destinée à des cardiologues que la mauvaise observation de cette indication hors AMM peut avoir des conséquences vitales – Posologie non conforme à l’AMM.Certains centres, s’appuyant sur la littérature, doublent la dose conseillée par l’AMM, soit pendant les premiers jours qui suivent l’implantation de stent, soit en fonction du poids du patient.

Dans ces deux exemples de pratique courante, nous sommes exactement dans la même situation que celle qui a été jugée par la Cour de Cassation : il s’agit de traitements dont l’indication a été validée, mais utilisés hors AMM. En outre, ils peuvent avoir des effets iatrogènes très sérieux, avec de possibles conséquences médico-légales.

Quels sont les cardiologues qui, dans ces circonstances, respectent l’obligation d’information prévue par la législation ? Probablement très peu, voire, plus vraisemblablement, aucun.

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Prescrire hors AMM, même à bon escient n’est pas sans risque si toutes les conditions légales ne sont pas remplies, y compris l’information du patient _ Le dernier numéro de « La Prévention Médicale », dans un article de Stéphanie Tamburini, juriste, conclut ainsi : « En cas d’incident, outre le risque de condamnation civile à des dommages et intérêts si le tribunal considère que la prescription hors AMM n’était pas justifiée ou que le devoir d’information n’a pas été respecté, il existe un risque de condamnation pénale, notamment pour homicide ou blessure involontaire, voire pour mise en danger de la vie d’autrui. _ Enfin, des sanctions disciplinaires peuvent le cas échéant être prononcées en cas de non-respect des obligations envers le patient et envers les caisses. »

Article L. 5121-12-1, II du Code de la santé publique – I – Une spécialité pharmaceutique peut faire l’objet d’une prescription non conforme à son autorisation de mise sur le marché en l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée disposant d’une autorisation de mise sur le marché ou d’une autorisation temporaire d’utilisation, sous réserve : _ 1° que l’indication ou les conditions d’utilisation considérées aient fait l’objet d’une recommandation temporaire d’utilisation établie par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, cette recommandation ne pouvant excéder trois ans ; _ 2° ou que le prescripteur juge indispensable, au regard des données acquises de la science, le recours à cette spécialité pour améliorer ou stabiliser l’état clinique du patient. – II – Les recommandations temporaires d’utilisation mentionnées au I sont mises à disposition des prescripteurs – III – Le prescripteur informe le patient que la prescription de la spécialité pharmaceutique n’est pas conforme à son autorisation de mise sur le marché, de l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée, des risques encourus et des contraintes et des bénéfices susceptibles d’être apportés par le médicament et porte sur l’ordonnance la mention : “Prescription hors autorisation de mise sur le marché”. Il informe le patient sur les conditions de prise en charge, par l’Assurance Maladie, de la spécialité pharmaceutique prescrite. Il motive sa prescription dans le dossier médical du patient.).

L’application de la loi et la pratique médicale (commentaire)

La décision du juge est finalement assez simple : il doit déterminer si la loi, dans toute sa rigueur, mais aussi son abstraction compte tenu des situations rencontrées, a été respectée ou non.

Pour le médecin, c’est beaucoup plus complexe et il faut entrer dans les détails de notre pratique. _ A quel moment, pour respecter les termes et l’esprit de la loi, faudrait-il annoncer que le clopidogrel proposé après stent hors SCA, serait prescrit hors AMM et non remboursable ? Certainement pas lorsque la décision de stenter est prise, c’est-à-dire pendant la coronarographie. _ Le moment le plus opportun paraît être la consultation où le cardiologue informe son patient qu’il y a une indication de coronarographie et lui fait part, conformément aux dispositions légales, de l’intérêt de l’examen, de son déroulement et des complications éventuelles. _ A ce stade, les orientations thérapeutiques défi nitives ne sont pas encore prises, car les différentes options doivent s’appuyer sur la coronarographie, mais le malade doit en être informé, afi n qu’il puisse prendre sa décision en toute connaissance de cause. _ L’éventualité d’un traitement hors AMM, en cas de stent, est l’un des éléments d’information. _ Pourquoi cela peut-il être difficile pour le cardiologue d’en parler d’emblée ? _ Cette consultation de proposition de coronarographie est souvent en fait aussi une consultation d’annonce de diagnostic d’entrée dans la maladie coronarienne, le cardiologue expliquant en préambule le résultat du test non invasif d’ischémie qu’il vient de réaliser ou recevoir. C’est un moment particulièrement traumatisant pour le patient dont l’existence va être profondément modifiée. _ Le cardiologue aura un discours positif, insistant sur les possibilités thérapeutiques effi caces, mais il devra à cette occasion faire preuve de toutes ses capacités de dialogue et d’empathie. _ Est-il vraiment opportun de polluer cette prise de conscience par des considérations administratives alors que, à ce stade, les préoccupations du patient sont d’ordre existentiel ?

Le guide HAS « Annoncer une mauvaise nouvelle » (Février 2008) nous apporte une réponse : « l’émotion est tellement forte lors de la première annonce que, la plupart du temps, le patient n’entend qu’une petite partie de ce qui est dit. Lors de la consultation où est réalisée la première annonce, tout n’est pas abordé, le patient a besoin de temps. » Il ne faudrait donc pas tout aborder, mais, sur le plan pratique, une fois la décision de coronarographie prise, le processus est engagé et il n’y aura pas d’autre occasion d’évoquer la nécessité éventuelle d’un traitement hors AMM. Ce même guide ajoute : « être attentif aux mots choisis ». Les mots « hors autorisation » qualifiant le traitement que l’on va proposer ont forcément pour un public non informé une connotation négative et, quand on ajoutera que ce traitement ne sera pas remboursable, le patient risque fortement de penser qu’on lui propose une thérapeutique hasardeuse, ceci alors que le cardiologue cherche à le convaincre que l’on va pouvoir le soigner efficacement.

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Conflit d’intérêts pour le cardiologue _ S’il veut prescrire hors AMM un traitement validé en toute sécurité juridique, il suffi t pour le cardiologue de respecter strictement l’information prévue par la loi. En pratique, s’il veut remplir avec humanité son rôle de médecin, c’est beaucoup plus complexe.

Le but de cet article n’est pas de donner des consignes, mais de favoriser la réflexion. Il est certain néanmoins que nous ne pouvons pas nous mettre en situation de risque juridique par compassion pour nos patients en raison de mécanismes administratifs mal adaptés à cause du retard de la réglementation par rapport aux données scientifiques.

C’est là en effet le fond du problème. Les malades doivent être protégés vis-à-vis ce certains traitements insuffisamment étudiés, mais il n’est pas normal que l’on mette sur le même plan des thérapeutiques validées comme celles que nous utilisons en cardiologie.

¬¬C’est un problème sur lequel devrait se pencher les différentes autorités concernées par la santé. ■(gallery)




L’encadrement de l’activité libérale reporté à l’année prochaine

357 – C’est le sentiment d’un grand cafouillage que suscite la comédie en trois actes qui vient de se jouer autour de l’encadrement de l’activité libérale à l’hôpital durant le débat du PLFSS 2013.

Acte 1 _ Les députés adoptent un article (42 bis) présenté par Christian Paul (PS, Nièvre) qui supprime le paiement direct au praticien et prévoit une majoration de la redevance versée à l’établissement en cas de dépassement du seuil fixé par décret.

En outre, le directeur de l’hôpital aurait la possibilité de saisir l’ARS en cas de non-respect des obligations du praticien, et le directeur de l’ARS pourrait retirer l’autorisation d’exercer au dit praticien. Christian Paul voit dans cette article 42 bis la « réponse satisfaisante » au problème des abus de « quelques centaines » de médecins hospitaliers qui ont « un effet très fort sur le moral des PH ». Le gouvernement soutient l’initiative de Christian Paul et la ministre de la Santé, Marisol Touraine, juge « utile de prendre ces premières mesures ».

Acte 2 _ Le texte arrive au Sénat où les sénateurs ne l’entendent pas de la même oreille. Sa commission des affaires sociales adopte un amendement supprimant l’article 42 bis voté par les députés. Non que le Sénat majoritairement socialiste ne soit pas en phase avec ses collègues députés, au contraire, explique en substance le rapporteur général Yves Daubigny (PS, Aisne).

Simplement le Sénat trouve assez inopportun de trancher sur le sujet alors qu’on a confi é il y a peu une mission sur le sujet à Dominique Laurent. Inutile aussi alors que les médecins libéraux sont dans la rue d’y faire descendre les hospitaliers, car tous les syndicats de praticiens hospitaliers ont fait savoir qu’ils étaient farouchement opposés à l’amendement voté à l’Assemblé nationale.

Acte 3 _ En ouverture de la discussion du PLFSS au Sénat, Marisol Touraine demande la suppression de l’encadrement renforcé de l’activité libérale à l’hôpital, expliquant que le vote de l’article 42 bis à l’Assemblée a « donné le sentiment que le Parlement voulait se prononcer avant que la commission (Ndlr : dirigée par Dominique Laurent) ne termine ses travaux ». Dans la foulée, les députés de la commission des affaires ont accepté de renoncer à l’article 42 bis. Christian Paul a expliqué la nécessité d’élaborer un « texte législatif de portée plus complète » pour limiter les dépassements d’honoraires des praticiens hospitaliers ayant une activité libérale à l’hôpital. Ainsi, une proposition de loi devrait être déposée « au plus tard avant la fi n du premier semestre 2013 », qui tiendra compte des conclusions de la mission Laurent. Ce timing semble effectivement plus logique… ■

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• La progression réelle du budget hospitalier 2013 selon la FHF _ Alors que l’ONDAM hospitalier a été fi xé à 2,6 % pour 2013, la Fédération Hospitalière de France estime que le taux nécessaire pour reconduire les moyens des hôpitaux l’année prochaine devrait s’établir à 3,07 %, hors mesures nouvelles. La FHF fonde ce taux sur les estimations de l’évolution de chaque groupe de dépenses hospitalières : les dépenses de personnel, qui représentent en moyenne 65 % du budget d’un établissement, celles de médicaments et DM 16 %, celles d’énergie, logistique et assurance 9,7 % et les dépenses du titre IV (taux d’intérêt) 9,3 %. Selon la FHF, chacun de ces postes de dépenses devrait augmenter en 2013 respectivement de 1,79 %, 0,16 %, 0,52 % et 0,61 %. Le taux global de progression pourrait même être un eu plus élevé (3,17 %) en ajoutant 0,1 % sur le titre IV pour les dotations aux provisions pour les Comptes Epargne Temps (CET) pour 2013.

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• Déficit structurel des hôpitaux en 2011 : + 138 millions _ Selon le rapport du ministère de la Santé au Parlement sur le fi nancement des établissements de santé publique, le résultat principal des établissements publics passerait d’un défi cit de 405 millions d’euros en 2010 à un défi cit de 430 millions d’euros en 2011. Tandis qu’on observe une détérioration essentiellement pour les centres hospitaliers de moyenne et grande taille, on note une amélioration pour les CHU, les CHS et les petits CH. Ce résultat comptable intègre les aides allouées au titre du retour à l’équilibre et des restructurations, ce qui vient amoindrir les défi cits, souligne le ministère. Ces aides contractuelles aux hôpitaux publics auraient progressé entre 2010 et 2011 de 359 millions à 463 millions d’euros. « Corrigé de ces aides, indique le rapport du ministère de la Santé, le défi cit structurel se creuserait de 764 millions à 902 millions d’euros », soit une aggravation de 138 millions d’euros.

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• Tarifs hospitaliers gelés en 2013 _ C’est lors de son audition par la commission des affaires sociales du Sénat sur le PLFSS 2013 que Marisol Touraine a expliqué que la mise en réserve des dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM passerait notamment par un gel des tarifs hospitaliers l’année prochaine. La ministre de la Santé n’a pas indiqué si ce gel concernerait tous les tarifs ou une partie seulement, ni s’il s’exercerait pendant toute l’année 2013. En revanche elle a précisé qu’il n’y aurait pas de gel des crédits des MIGAC pour les hôpitaux. La mise en réserve s’élèvera à 545 millions d’euros, soit le même montant qu’en 2012, qui avait été supporté par les établissements pour 415 millions d’euros, par le secteur médicosocial pour 100 Millions et par le FIQCS pour 30 millions d’euros.




Avenant 8 : les « pigeons » feront-ils le printemps ?

357 – Sans surprise, les troupes de MG France, de la CSMF et du SML ont entériné la signature par leur président respectif de l’avenant 8. Encore que le oui du SML ressemble beaucoup un « oui, mais ».

« Ce texte existe, on ne va pas le renégocier, mais peut-être faut-il s’atteler à un avenant 9 », a déclaré son nouveau président, Roger Rua. La renégociation n’est d’ailleurs pas de saison : l’avenant 8 est paru au Journal Officiel du 7 décembre et est donc ipso facto entré en application.

Ce qui n’entame en rien la détermination des opposants à l’avenant 8.

Du côté du front du refus, Le Bloc et la FMF. Le premier n’a jamais adhéré en quoi que ce soit à l’avenant. Du côté de la FMF, comme toujours, les choses ont été un peu plus hésitantes : après avoir signé le relevé de conclusion en octobre dernier, elle est revenu sur sa décision 24 heures après et a définitivement et massivement (79,3 %) dit « niet » à l’avenant 8 lors de son assemblée générale à Lyon le 1er décembre dernier. « Il y a trop de choses inacceptables dans ce texte, commente son président, Jean-Paul Hamon, à commencer par une juste revalorisation des tarifs opposables correspondant au coût de la pratique ». Ces deux syndicats représentatifs, qui ont participé aux négociations, ont trouvé un renfort de taille via Facebook. Tout comme les coordinations « sauvages » de médecins lors de la grande grève des gardes de 2000-2001, les « médecins pigeons » sont venus, en une nuée grossissante de jour en jour sur le web malmener quelque peu les syndicats médicaux signataires et affi rmer leur opposition farouche à l’avenant 8. Devant le nombre grandissant de « pigeons », ils ont décidé de s’organiser et se sont regroupés au sein de l’Union Française des Médecins Libéraux (UFML), présidée par un généraliste de Haute-Garonne, le Dr Jérôme Marty, ancien cadre de la CSMF dont il a claqué la porte après la signature de la dernière convention instaurant le paiement à la performance, « la plus grande erreur faite par les syndicats médicaux », selon lui.

Malgré les milliers de professionnels de santé libéraux mobilisés le 12 novembre contre l’avenant 8, la messe est dite aujourd’hui. Quant à la proposition de loi Le Roux relative aux réseaux de soins mutualistes, les amendements apportés par le Gouvernement n’ont pas rassuré les professionnels de santé libéraux. A l’appel de la FMF, du Bloc et de l’UFML, ils étaient encore quelques milliers dans les rues de Paris le 2 décembre dernier pour crier leur colère. « Nous ne désarmerons pas, affirme Jean-Paul Hamon, et Marisol Touraine va être confrontée à une opposition constante. Il ne faut pas lui f…tre la paix ! Elle a pensé qu’elle pourrait laisser pourrir la situation en ne discutant qu’avec les internes à propos des déserts médicaux. Avec les médecins, la concertation c’est zéro ! Les amendements au texte sur les réseaux mutualistes ne trompent personne : on sait que la prochaine étape de ces réseaux concernera les médecins. »

« La mobilisation continue et l’urgence concerne trois points : retrait de l’avenant 8, pas de réseaux de soins mutualistes et revalorisation du secteur 1 », confirme Jérôme Marty, sur la même longueur d’onde que le patron de la FMF. A propos, jusqu’à quel point pourrait aller cette similitude de longueur d’onde ? L’UFML pourrait-elle, comme le prétendent certaines rumeurs, rallier la maison fédérale ? « Ca m’arrangerait bien ! s’amuse Jean-Paul Hamon. Mais pour l’instant, nous n’en sommes pas là, même si plusieurs dizaines de membres de l’UFML, dont Jérôme Marty, ont rejoints les rangs de la FMF. » « Ce n’est pas à l’ordre du jour dans l’immédiat, commente Jérôme Marty. Mais il est certain que la position intelligente consisterait à réunir l’UFML, la FMF et Le Bloc pour constituer un grand syndicat. » Pour l’heure, l’UFML se contente de son rôle de « groupe de pression » et se réjouit d’enregistrer un nombre croissant d’adhésions – plus de 1 200 en date du 6 décembre dernier. « Et ça va continuer », affirme son président. ■




Rationalité et décision thérapeutique

357 – Depuis Descartes puis les Lumières, la raison règne en maître incontesté sur nos processus cognitifs. Et il est certain que la force normative de la rationalité a un rôle fondamental par la maîtrise de nos sentiments et de nos tendances irrationnelles. Cependant, il est maintenant acquis que de nombreux facteurs subjectifs sont susceptibles d’influencer notre raisonnement, en particulier en situation d’incertitude ou de risque… ce qui est le propre de notre profession.

Le processus décisionnel repose sur trois opérations : la collecte adaptée d’informations, la formation de croyances rationnelles et le choix de l’action. S’il n’y a, en théorie, qu’une seule façon de faire un choix rationnel, il y a de nombreuses façons de prendre une décision irrationnelle. Jon Elster différencie l’irrationalité «chaude» induite par les émotions, de l’irrationalité «froide» qui regroupe de nombreux mécanismes, qu’il s’agisse de dissonance cognitive (gestion irrationnelle de données contradictoires), de croyances motivées (prendre ses désirs pour des réalités) ainsi que de nombreux biais cognitifs dont le biais de représentativité (effet Diagoras) et le biais de confirmation qui sont parmi les plus prégnants.

La complexité du réel _ En médecine, c’est à la complexité du réel que nous sommes confrontés. Les situations d’incertitude et d’ignorance sont une source importante d’irrationalité car nous supportons mal d’avouer notre ignorance, alors que nous avons besoin de nous former une opinion instantanée et ferme sur n’importe quel sujet. La peur du doute, l’horreur du vide, exposent au risque de rationalisation par excès pour justifier une décision précise, parfois discutable. Ce risque est d’autant plus important dans notre profession qu’il faut pouvoir justifier nos choix devant le patient (devenu usager !?) et… les juges !

Une déformation du traitement des connaissances _ De plus, nous avons tendance devant toute suite d’événements à leur rechercher une cause a posteriori, à leur donner un sens. Cette rationalisation a posteriori et les modélisations approximatives aboutissent à une déformation du traitement de l’information et des connaissances. Il faut bien voir que la médecine basée sur les preuves n’est, en fait, basée que sur les données publiées. Mais ces dernières ne sont pas un reflet de la réalité, comme cela a été montré (surestimation de l’efficacité réelle). Par ailleurs, nous raisonnons le plus souvent à partir de moyennes mais dans la réalité, on est confronté à des situations hétérogènes, dans lesquelles la probabilité d’apparition de valeurs extrêmes est plus élevée, et ces événements extrêmes sont susceptibles d’avoir un effet plus important que la moyenne des autres événements.

De plus en plus de plus de gens pensent à notre place (les « experts », les instances, ) donnant lieu à des soi-disant « consensus » et des « bonnes pratiques » en tout genre, sans parler des « séminaires » et « workshops » Ce « savoir instrumental » ne permet qu’un raisonnement basé sur des données incomplètes, sélectionnées par d’autres, et aboutit à une perte d’autonomie de la réflexion individuelle.

De plus, nous sommes noyés sous les informations de sources multiples et il a été montré qu’un excès d’informations nuit aux décisions. La formation actuelle repose sur l’accumulation de « compétences » et l’exercice de la médecine fi nit par se résumer à l’application formatée de recettes dédiées à une pathologie spécifi que dans des conditions prédéfinies… devenue « production de soins ». En attendant les logiciels d’aide à la décision ! C’est sans dire qu’on a « perdu » le patient, l’être humain qu’on doit soigner… Bien qu’on veuille nous imposer la vision d’une science exacte, la médecine en tant qu’elle s’adresse à des individus est aussi (et surtout) une science humaine exposée aux symptômes du patient et qui ne doit pas s’abandonner à une réduction nominaliste du malade à sa seule maladie. L’empathie et la rigueur sont nos seules armes face à la faute à laquelle on veut nous réduire (faute de plus en plus jugée sur nos capacités à nous soumettre à des normes que sur nos compétences réelles).

En conclusion _ Il est bien sûr indispensable d’avoir des connaissances pratiques… mais un véritable savoir, passé par les filtres de la réflexion et de la remise en cause permanente, est préférable. Plutôt que de chercher à se convaincre soi-même et à convaincre les autres, il est préférable d’affronter ses doutes. Comme l’a montré Karl Popper, il n’y a d’attitude rationnelle que critique.

Il faut se rappeler que le discours peut tout démontrer et qu’il est risqué d’extrapoler car nous évoluons en situation d’indétermination. Il faut laisser de la place à la réflexion, ne pas se soumettre à la dernière publication (nouveauté n’est pas synonyme de progrès), ni céder à la pression du marché ou des (im)patients… et savoir pratiquer une « procrastination raisonnée » quand cela est nécessaire. Ne cherchons pas à être rationnels à tout prix, mais efforçons nous d’être raisonnables. Et, quand il est difficile voire impossible de décider de ce qui est le plus raisonnable, il nous reste encore la possibilité d’éviter ce qui ne l’est pas !

Oubliez la « performance » et la « compétitivité » qu’une gestion managériale de la santé veut nous inculquer sinon, bientôt, nous ne serons plus que des agents effecteurs de « contrats thérapeutiques » qui ne vaudront pas plus que ce que nous coûtons ! ■




Vers un DMP de deuxième génération

357 – Dix ans après son lancement à la légère par Philippe Douste- Blazy, où en est le DMP ? Pas très loin, il faut bien le dire. Surtout si l’on considère les sommes mobilisées pour ce projet. Entre 2005 et 2011, on estime que quelque 200 millions d’euros ont été investis pour un total de 210 000 dossiers numériques créés dans 160 hôpitaux et 4 000 médecins traitants à l’heure actuelle. Encore ces dossiers sont-ils « en réalité, largement théoriques », selon les propos de Marisol Touraine. On est très loin de pronostics annoncés : tandis qu’en janvier 2011 Jean-Yves Robin, le directeur de l’ASIP Santé, situait entre un et deux millions le nombre de DMP ouverts à la fi n de cette même année, en mars dernier, l’agence en rabattait fi xant l’objectif à 300 000 DMP créés à la fi n 2012. Plusieurs rapports très critiques ont tiré le signal d’alarme. Le dernier en date, celui de la Cour des comptes concluait qu’était « urgent et indispensable un ferme redressement dans le pilotage stratégique et la maîtrise des coûts du DMP comme de l’ensemble des dossiers médicaux informatisés qui ont vocation à converger vers lui » (Le Cardiologue n° 355). La ministre de la Santé et des Affaires sociales a donc décidé de reconsidérer le dossier. Pas question de renoncer au projet ni de continuer à y injecter de l’argent sans rien changer. Pas question non plus de mettre en selle la solution du DMP sur clé USB soutenue par certains parlementaires mais radicalement rejetée par les experts et la CNIL. Marisol Touraine a donc opter pour un « DMP de deuxième génération ».

Le constat de l’échec _ Partant du constat que l’échec du projet tient très largement du fait que « les professionnels de santé ne se sont pas appropriés ce dossier médical », le DMP V2 devra donc associer lesdits professionnels pour déterminer l’objectif à atteindre. Sans doute aussi les objectifs devront-ils être plus ciblés. « On peut penser, par exemple, à l’utilité que constituerait ce dossier dans le cadre du parcours de santé pour les personnes âgées ou souffrant d’affections de longue durée », a indiqué la ministre. Mais au préalable au lancement de ce DMP deuxième génération, les députés ont adopté – avec le soutien du gouvernement- un amendement au PLFSS prévoyant que ledit Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport produisant « les résultats d’un audit portant sur le caractère opérationnel du DMP et sa gestion par l’ASIP Santé ». Cet audit sera réalisé d’ici au 31 mars 2013. Le rapport devra formuler « des propositions » quant à l’opportunité de la poursuite du projet. ■




DM intra-GHS : l’évaluation par la HAS commencerait en 2013

357 – La loi de renforcement de la sécurité sanitaire de 2011 a élargi la mission d’évaluation des dispositifs médicaux de la haute autorité de santé. Auparavant, la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDIMTS), que préside le Pr Jean-Michel Dubernard, n’évaluait que les dispositifs inscrits sur la liste des prescriptions remboursables dite « liste en sus ». Il lui revient dorénavant d’évaluer également les dispositifs médicaux relevant d’un financement dans les Groupes Homogènes de Séjour (GHS), dont la liste doit être établie par les ministres chargés de la santé et de la Sécurité Sociales. Prête à remplir cette nouvelle mission, la HAS attend aujourd’hui les arrêtés qui préciseront les catégories de dispositifs concernés. Pour l’instant, aucun calendrier n’a été fixé par le ministère et, apparemment, leur rédaction est encore aujourd’hui au stade de la réflexion, mais le Pr Dubernard espère leur publication avant la fi n de l’année pour pouvoir démarrer les travaux dès le début de l’année prochaine. Il y a quelques mois (Le Cardiologue n° 349), Catherine Denis, chef du Service d’Evaluation des Dispositifs (SED), ne cachait pas une certaine inquiétude quant à la faisabilité de cette nouvelle mission confi ée à la CNEDIMTS. « C’est un énorme travail qui ne pourra se faire à moyens constants », disait-elle. Pour faire face à cette charge de travail supplémentaire, la HAS a obtenu deux équivalents temps plein en plus des seize dont elle disposait jusqu’à présent. Une surcharge de travail difficile à quantifier car le nombre de dispositifs concernés reste imprécis, certains parlant de 600 000 DM mais l’AP-HP l’estimant à 94 000. Mais même si l’on retient le chiffre le plus bas, le chantier est vaste et, selon le Pr Dubernard, il faudra sans doute que la CNEDIMTS fixe des priorités. Par ailleurs, les industriels auront un délai de quatre ans pour soumettre leurs dossiers d’évaluation à la HAS avant que les hôpitaux ne soient plus autorisés à utiliser des produits non évalués. Cela devrait permettre à la HAS d’étaler ses travaux et, peut-être, d’obtenir encore quelques moyens supplémentaires pour remplir sa mission. ■




Sport sur ordonnance et remboursé

357 – Après l’annonce par le Gouvernement de la mise en oeuvre prochaine d’une politique publique « Sport-Santé-Bien-être », c’est l’Académie nationale de Médecine qui a pris position sur le sujet. Dans un rapport intitulé « Les activités physiques et sportives – La santé – La société » rédigé notamment par deux de ses membres, les Drs Jacques Bazex et Pierre Pène, la vénérable institution fait le point sur les connaissances médicales acquises quant aux bienfaits du sport sur la santé et, a contrario, sur les effets délétères de l’absence de toutes activité physique. Outre-Atlantique, la sédentarité est d’ailleurs qualifiée de « Sedentary Death Syndrome ».

Indispensables dès l’enfance où elles « jouent un rôle essentiel, indispensable et souvent insuffisamment reconnu », les Activités Physiques et Sportives (APS) le sont tout autant à l’âge adulte et pour les personnes âgées. « Des publications de plus en plus nombreuses viennent confirmer que pratiquer des activités physiques et sportives tout au long de la vie augmente l’espérance de vie en bonne santé, retarde la dépendance, et constitue un complément thérapeutique efficace en luttant contre la sédentarité pour de nombreuses affections comme l’obésité et bien d’autres encore, sans oublier la prise en charge des sujets en situation d’handicap », indiquent les auteurs du rapport.

Des bénéfices de prévention et d’économies _ Des études ont confirmé que les APS jouent un rôle positif dans la prévention de l’obésité, du diabète et des maladies cardiovasculaires, mais aussi dans le suivi de certains cancers. D’autres ont mis en valeur les bénéfices économiques qui pourraient en découler. Ainsi, l’IMPAS, société affiliée au mouvement mutualiste, a calculé que l’Assurance Maladie économiserait 56 millions d’euros par an en finançant à hauteur de 150 euros une activité physique ou sportive adaptée à 10 % de patients en ALD. Quant au Centre d’Analyse Stratégique (CAS), il souligne les avantages que les entreprises pourraient tirer en favorisant la pratique sportive sur les lieux de travail : « diminution de l’absentéisme, augmentation de la capacité de travail, bien-être ».

Se fondant sur ces constats, l’Académie de Médecine en conclut tout naturellement que les APS doivent faire l’objet d’une prescription médicale « rédigée selon les règles de toute prescription médicamenteuse » et « expliquée au patient avec une même rigueur ». Nature des APS, intensité, durée et fréquence des séances, mesures associées, suivi et contrôles médicaux à observer sont les items qui devront figurer sur la prescription. Enfin, poussant la logique jusqu’au bout, et puisque les vertus thérapeutique des APS sont manifestes, l’Académie de Médecine recommande l’adoption de « nouvelles dispositions réglementaires afi n d’organiser la prise en charge de ce nouveau domaine d’activités par l’Assurance Maladie dans le cadre de sa politique de prévention, en association avec les mutuelles et les assurances privées ». Que les pouvoirs publics initient et soutiennent une politique active d’encouragement à la pratique d’activités physique est une chose. Mais par les temps de crise et de déficit de la sécu qui courent, il est peu probable qu’ils décrètent demain le remboursement du sport sur ordonnance ! ■




Best of des grandes études 2012 – 1ère partie

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Mesure du FFR : un pas vers la reconnaissance

357 – C’est désormais acquis, la Haute Autorité de Santé évaluera l’année prochaine l’acte de mesure du Flux Coronaire Résiduel (FFR). En effet, la HAS a placé ce dossier sur le haut de la pile des quelque 54 dossiers qui lui avaient été soumis – tous domaines médicaux confondus. Pour mémoire, cette technique consiste à mesurer une différence de pression entre l’amont et l’aval d’une lésion coronaire afin de savoir si celle-ci est susceptible de provoquer une ischémie. Face à une lésion observée à la coronarographie mais dont l’impact clinique n’est pas certain, la mesure du FFR permet de décider de la nécessité ou non de revasculariser. Un FFR mesuré inférieur à 0,80 témoigne du retentissement fonctionnel d’une sténose.

Peu pratiquée en France _ Pratiquée et remboursée dans nombre de pays – notamment en Allemagne, en Angleterre, en Belgique – la mesure du FFR est très peu pratiquée en France où elle n’est pas prise en charge. Pourtant, une étude qui fait référence en a montré les bénéfices. L’étude FAME incluait 1 005 patients ayant une atteinte d’au moins deux ou trois vaisseaux (les troncs communs de la coronaire gauche étaient exclus) et randomisés en deux groupes : les patients du premier groupe étaient dilatés et stentés sur toutes les sténoses de plus de 50 % (pratique actuelle dans les centres de cardiologie interventionnelle), les patients du second groupe n’étaient dilatés que sur les sténoses fonctionnellement significatives (FFR inférieur à 0,80 %). L’utilisation de la mesure du FFR a permis de réduire de façon très significative le nombre de stents actifs implantés – avec en conséquence un bénéfice économique. Cela a également permis de réduire le nombre d’événements à un an (décès, infarctus du myocarde nécessitant un nouveau geste de revascularisation).

Objectif validation _ Mais l’étude FAME n’a pas validé l’apport de la FFR sur le choix du geste de revascularisation (tous les patients étaient dilatés), ni validé l’apport de la mesure du FFR pour guider la chirurgie coronaire (aucun patient n’était ponté). L’étape suivante est donc de valider l’utilisation de la mesure du FFR plus en amont, non pas au moment de l’angioplastie coronaire pour guider cet acte, mais au moment de la coronarographie diagnostique pour guider le choix de la méthode de revascularisation à proposer, angioplastie ou pontage, et le geste à réaliser (nombre de pontages, nombre d’artères à dilater). C’est l’objectif du programme hospitalier de recherche clinique proposé par le CHU de Lyon (étude FUTURE) auquel participent 35 centres de cardiologie interventionnelle (un maximum de 40 centres participants est prévu).

Plus de 80 % des centres ne participent pas à ce PHRC et n’ont aucun financement pour accéder à la mesure du FFR. D’où l’importance de l’évaluation de cet acte par la Haute Autorité de Santé. ■

Voir aussi l’entretien « Trois questions à Martine Gilard »




3 questions à Martine Gilard

357 – Les économies réalisées grâce à la mesure du FFR seraient de quel ordre ? _ La mesure du FFR permettrait de faire diminuer la pose de stents d’environ 25 %. L’économie de ces stents, des anti-agrégants qui les accompagnent et des remboursements, est évaluée entre 400 000 et un million d’euros.

Mais si la mesure du FFR est prise en charge demain, elle aura elle aussi un coût ? _ Certes, mais ce coût sera largement compensé par les économies engendrées grâce à cette mesure. Par ailleurs, cet acte n’est pas systématique mais n’est pratiqué que dans les cas douteux uniquement, donc moins couramment que la coronarographie. En outre, cet acte permettrait d’éviter de revasculariser des patients qui n’en ont pas besoin et, inversement, d’en revasculariser d’autres pour qui cela serait profitable, et c’est surtout cet aspect de santé publique qui importe.

Pensez-vous obtenir satisfaction pour la reconnaissance et la valorisation de cet acte ? Il est rare qu’un acte ait une reconnaissance aussi forte des sociétés savantes. La Haute Autorité de Santé va l’évaluer, c’est une étape importante. Je me suis personnellement beaucoup battue pour la reconnaissance de cet acte et je suis optimiste. Ne pas le reconnaître et le prendre en charge serait aller contre un acte qui permet de faire baisser la mortalité et d’engendrer des économies.




Hospitalisations pour IC : des grandes disparités régionales

357 – L’insuffisance cardiaque est une pathologie assez fréquente qui affecte particulièrement les personnes âgées. La Société Européenne de Cardiologie estime que 2 à 3 % des Européens en seraient affectés. Elle donne fréquemment lieu à des hospitalisations pour décompensations aiguës, dont la létalité est élevée : en 2009, France, cette létalité était de 8,8 % en intrahospitalier. En outre, le risque de décès reste élevé après hospitalisation. En 2008, l’IC représentait 4,1 % des décès en France ([Source : Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDCInserm).)].

Un des objectifs annexés à la loi de santé publique de 2004 vise la diminution de la mortalité et des décompensations aiguës des personnes souffrant d’IC. Plusieurs études ont montré que les patients ne bénéficient pas toujours d’une prise en charge optimale et qu’une partie des hospitalisations pour décompensation pourrait être évitée. Pour cela, une meilleure connaissance des données de surveillance populationnelle de cette pathologie est nécessaire.

 

Une étude de l’InVS publiée dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH n° 41, novembre 2012) y contribue, qui tente d’estimer le taux annuel de patients hospitalisés pour IC en France et les disparités régionales, la létalité hospitalière et les évolutions survenues entre 2002 et 2008. L’étude est fondée sur les données du PMSI-MCO qui incluent les hospitalisations avec l’IC comme diagnostic principal et les séjours avec diagnostic associé d’IC et diagnostic principal de cardio(néphro)pathie avec IC, d’OAP ou de foie cardiaque.

Une hausse des femmes hospitalisées _ En 2008, 148 292 patients ont été hospitalisés pour insuffisance cardiaque. Entre 2002 et 2008, le nombre de patients hospitalisés a augmenté de 14,4 %. Cependant, une analyse standardisée sur l’âge montre une légère diminution (- 2,5 %). La diminution la plus signification des taux concerne la tranche d’âges de 5 à 24 ans, les hommes de 65 à 84 ans et les femmes de 55 à 74 ans. En revanche, on observe une hausse des hospitalisations pour les femmes entre 45 et 54 ans, qui pourrait être, selon les auteurs de l’étude, la conséquence de l’augmentation annuelle de 3 % des infarctus du myocarde dans cette classe d’âge entre 2002 et 2008. Quant à la létalité intrahospitalière à la première hospitalisation, elle a diminué, passant de 8,9 % à 7,5 %, et concerne toutes les classes d’âges.

L’étude met en évidence des disparités importantes du taux standardisé d’hospitalisations pour IC entre les différentes régions françaises, et singulièrement entre les régions du nord et celles du sud en métropole (voir carte ci-dessous). Ainsi, tandis que ce taux est supérieur à la moyenne française de 30,9 % en Picardie, de 24,8 % en Basse-Normandie et de 24 % dans le Nord-Pas-de-Calais, il est inférieur à cette moyenne de 17,3 % en PACA, de 15,9 % en Languedoc-Roussillon et de 11 % en Rhône-Alpes. Sans avancer d’explication à ces différences, les auteurs de l’étude soulignent que les régions où les taux d’hospitalisation pour IC sont les plus élevés sont celles où les taux de mortalité sont aussi les plus élevés. ■

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Le nouveau dessin du paysage informatique

357 – Depuis la sortie des premières tablettes, la technique a considérablement évoluée : processeurs plus rapides, mémoires plus importantes, définition des écrans nettement meilleures (notamment pour la dernière génération de l’iPad). Il ne fallait que l’engouement des développeurs qui n’a pas d’égal pour lancer un produit qui n’existait pas il y a seulement… trois ans. Le premier iPad a été annoncé début 2010 par Steve Jobs ([Conférence de presse le 17 janvier 2010 au Yerba Buena Center for the Arts de San Francisco)], trois ans après le premier iPhone. Nous avions déjà annoncé il y a à peine un an que la tablette allait entrer à tous les étages de notre vie. Passe-partout informatique par excellence, la tablette se faufile aussi bien dans les milieux professionnels qu’à la maison, et c’est là toute la force de cette machine. Elle fait tout, tout de suite, et aussi bien, sinon mieux qu’un portable.

Il fait tout… _ L’un des domaines de prédilection de la tablette est sans conteste la lecture. Lire des articles de presse ou consulter ses mails, réserver ses vacances, « skyper » ou partager ses photos, chacun se crée une fonction pour cet objet, confortablement installé au fond de son canapé.

Car c’est là sa seconde force, il nous suit partout cet ustensile. Ou plutôt non, c’est plutôt nous qui le suivons ou le cherchons partout. Car le bougre, il sait y faire : télécommande de télévision, de chauffage ou d’alarme. Il vous permet également d’écouter de la musique, de regarder des films… Vous viviez comment avant 2010 ?

…et pour tout le monde _ La force d’Apple a été de créer un outil capable de plaire à tout le monde, et de servir à tout le monde. Petits et grands y trouverons leur compte, leurs applications, leurs envies. Alors tout naturellement, l’ordinateur portable perd du terrain (tableau ci-dessus), tout comme celui-ci à supplanté le desktop qui prônait fièrement à côté de votre bureau ou sous votre écran, c’était selon. Au lancement de l’iPad, les fabricants de PC ont d’abord considéré qu’il s’agissait de l’émergence d’un nouveau marché en cantonnant la tablette à la consultation de contenu, réservant la partie plus « noble » de l’informatique, la création de contenu, aux PC. Il n’aura fallu que quelques mois pour bousculer ces certitudes. En 2012, ce sont 208 millions d’ordinateurs portables qui seront vendus contre 121 millions de tablettes, en majorité des iPads ([NPD DisplaySearch Quarterly Mobile PC Shipment and Forecast Report.)]. Mais dans cinq ans, le marché des tablettes générera un chiffre d’affaires de 416 millions d’euros contre « seulement » 393 millions d’euros pour celui des PC portables. Le tour est ainsi bouclé, car les différences techniques entre les tablettes et les ordinateurs portables s’effaceront au fil des ans. ■

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Les mutuelles progressent dans la gestion du risque

357 – Les organismes complémentaires d’assurance santé manifestent depuis plusieurs années leur volonté de jouer un rôle plus actif dans la gestion du risque à travers la création de réseaux de soins, qui concernent pour l’essentiel l’optique, le dentaire, l’audioprothèse, domaines où la prise en charge par l’Assurance Maladie est quasiment nulle. Et jusqu’à présent, sans que personne ne s’en émeuve vraiment.
Mais quand il s’agit d’autoriser la Mutualité française, qui assure six Français sur dix, à créer des réseaux de soins et à moduler les remboursements de ses adhérents s’ils s’adressent à ces réseaux, c’est la panique chez les professionnels de santé libéraux, qui y voient une menace pour la liberté de choix des patients et l’indépendance de leur exercice.
A tort ou à raison ? Pour pouvoir répondre à la question, les usagers, par la voix du CISS, estiment qu’une étude d’impact serait de bon aloi avant de légiférer. Une chose est sûre : après l’engagement des complémentaires à hauteur de 150 millions d’euros pour revaloriser le secteur 1 dans le cadre du contrat d’accès aux soins, la création de réseaux mutualistes serait une étape majeure vers la cogestion du risque par les régimes obligatoires et complémentaires, selon certains, vers la privatisation du système de santé, selon d’autres.

Ces dernières années, tandis que la prise en charge des dépenses de santé par l’Assurance Maladie diminue, celle des organismes complémentaires augmente. Cette tendance persiste, comme en atteste la dernière livraison des Comptes nationaux de la Santé 2011. Cette année-là, le montant des dépenses courantes de santé s’élève à 240 milliards d’euros, soit 12 % du PIB. La Consommation de Soins et de Biens Médicaux (CSBM), qui en représente les trois quarts, atteints 180 milliards d’euros, progressant en valeur (+ 2,7 %) un peu plus rapidement qu’en 2010 (+ 2,5 %). Atteignant 135,8 milliards d’euros en 2011, la part de la Sécurité Sociale dans le financement de la CSBM est de 75,5 % contre 75,7 % en 2010. « La prise en charge par les organismes complémentaires est tendanciellement orientée à la hausse. Elle atteint 24,6 milliards d’euros en 2011, soit 13,7 % de la CSBM contre 13,5 % en 2010 », peut-on lire dans le n° 809 de la collection « Etudes et résultats » de la Drees. Entre 2000 et 2010, la part des organismes complémentaires dans le financement de dépenses de santé a augmenté de plus d’un point, passant de 12,4 % à 13,7 % en 2011. « Cette progression est le résultat de deux évolutions contraires : une part accrue des organismes complémentaires dans les soins hospitaliers, les soins de ville et les biens médicaux, et une réduction de leur prise en charge des médicaments », commente la Drees. Et ces tendances se confirment en 2011.

Pour certains, le désengagement progressif de l’Assurance Maladie n’est pas dû seulement aux tentatives réitérées de ralentir la croissance de son déficit, mais s’inscrit dans un mouvement d’institutionnalisation des organismes complémentaires qui vise à mettre sur le même pied l’Assurance Maladie solidaire et les assurances privées.

Revendiquer un autre rôle que simple payeur

Les organismes complémentaires estiment avoir acquis le droit de revendiquer un autre rôle que celui de simple payeur auprès des quelque 93 % de Français qu’elles assurent. Ces dernières années, on les a vu développer une politique de « gestion du risque » (voir Le Cardiologue n° 341). Pour pouvoir aller plus avant, les complémentaires souhaiteraient accéder aux données qui restent le monopole de l’Assurance Maladie. Mais jusqu’à ce jour, leur demande est rester vaine. Cependant, leurs ambitions de cogestion du système de santé ont récemment gagné du terrain avec la négociation de l’avenant 8. A cette occasion, les complémentaires se sont en effet engagées à hauteur de 150 millions d’euros pour la revalorisation des tarifs opposables des médecins libéraux, dans le cadre du contrat d’accès aux soins. « L’Assurance Maladie n’a plus les moyens, seule, de revaloriser les tarifs remboursables, déclarait le président de la Mutualité, Etienne Caniard, dans un entretien au Figaro. Nous pouvons y contribuer mais la participation plus importante des complémentaires dans le financement doit d’accompagner d’un rôle croissant dans la gestion du risque. Pourquoi ne pas financer en partie les nouveaux modes de rémunération des médecins, comme de nouveaux forfaits et réfléchir ensemble aux contreparties ? » .

Et pour cela, pourquoi ne pas permettre aux mutuelles de créer des réseaux de soins en contractualisant avec les professionnels de santé et de moduler les remboursements à leurs adhérents s’ils passent par ces réseaux, comme les assurances privées le font déjà ? C’est cette possibilité que tente d’introduire la proposition de loi Le Roux, avec les réactions que l’on sait de la part des professionnels de santé libéraux. Comme elle l’avait fait au moment de la loi Fourcade, la CSMF « repart au combat, et réaffirme son opposition totale à tous conventionnement individuel des médecins libéraux par les mutuelles à des fins tarifaires et dont l’effet serait de priver les patients de leur liberté de choix ». La centrale présidée par Michel Chassang « exige que les réseaux de soins soient ouverts à tous les médecins qui le souhaitent pour éviter toute distorsion de concurrence et préserver la liberté de choix du patient ». Elle exige aussi « que le contrat proposé par les mutuelles soit négocié nationalement avec les syndicats médicaux représentatifs et proposé à l’adhésion individuelle sans obligation supplémentaire ». Le SML, lui, n’a qu’une exigence : la suppression de ce projet. Pour lui, « la mise en place de réseaux de soins mutualistes et le chantage qui sera exercé localement sur les médecins libéraux représentent un danger pour l’organisation de l’exercice libéral conventionné et sur le paritarisme de notre système de protection sociale ».

Une bronca généralisée

La FMF, Le Bloc, la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) et l’Union Française des Médecins Libéraux (UFML) qui regroupent les « médecins pigeons » ont aussi dit tout le mal qu’ils pensaient du projet, tout comme les internes de l’ISHIH, les chefs de clinique de l’ISNCCA et les étudiant en médecine de l’ANEMF. Face à cette bronca généralisée, le Gouvernement a amendé le texte de la proposition de loi. Ainsi, son article 2 précise que « les conventions ne peuvent comprendre aucune stipulation portant atteinte au droit fondamental de chaque patient au libre choix du professionnel, de l’établissement ou du service de santé ». Il dit aussi que « l’adhésion aux conventions des professionnels, établissements et services de santé s’effectue sur la base de critères objectifs, transparents et non discriminatoires. L’adhésion à la convention ne peut comporter de clause d’exclusivité ». Il précise également que les conventions souscrites « ne peuvent comporter de stipulations tarifaires relatives aux actes et prestations médicaux ». Enfin, la proposition de loi adoptée pour l’instant par les seuls députés exclut les honoraires médicaux de son champ d’application. Mais ces amendements n’ont pas réussi à calmer les mécontents, qui restent très mobilisés contre la proposition de loi. Avec un certain succès.

L’Association Soins coordonnés créée par l’ancien président de MG France, Marital Olivier-Koehret, a lancé une pétition contre les réseaux de soins mutualiste qui a rassemblé à ce jour plus de 21 000 signatures. Elle se félicitait dans un récent communiqué de ce que la proposition de loi n’était pas inscrite à l’Agenda du Sénat, « ce qui laisse le temps à la mobilisation initiée par Soins coordonnés de leur expliquer les risques que fait courir cette proposition de loi à l’accès de tous aux soins de proximité et à l’indépendance professionnelle ».

Pour autant, l’affaire n’en restera pas là, et passée la trêve des confiseurs, elle reviendra bien dans les débat parlementaire. A moins que le Gouvernement « laisse du temps au temps » et ne suive le conseil assez judicieux des usagers de la santé du Collectif interassociatif sur la santé. Pour le CISS, il s’agit ni de sombrer dans « la parano antimutualiste », ni de sous-estimer les dangers de tels réseaux dans un contexte de concentration qui ne laissera place demain qu’à quelques grands groupes entre lesquels la concurrence ne se fera pas seulement sur les prix mais aussi sur les services. « Dans un système de santé désorganisé, ne serions-nous pas alors contraints de payer plus cher nos complémentaires pour acheter l’accès aux soins avec des coupes-files ou des téléconsultations ? », s’interroge le CISS, qui souligne aussi que les mutuelles ayant, contrairement aux complémentaires privés, des centres de santé et des établissements de soins, tout risque de filière fermée contraignante n’est pas à exclure. « Les enjeux sont trop importants pour qu’une proposition de loi statue sans étude d’impact. Faisons donc cette étude d’impact, la durée de la procédure législative le permet, conclut le CISS. Soit les craintes sont infondées et il convient de les écarter. Soit elles le sont et il convient de les prévenir. Dans les deux cas, mieux vaut le savoir. » Et si le Gouvernement écoutait les usagers ?

 

Etienne Caniard « La liberté tarifaire n’est pas
le meilleur moyen de rémunérer correctement les médecins »

Pour le président de la Mutualité française les réseaux de soins mutualistes s’inscrivent dans une logique de régulation coordonnée entre l’Assurance Maladie et les complémentaires pour réduire le reste à charge des usagers et garantir des revenus favorables aux professionnels de santé.

 

Comment interprétez-vous le tollé suscité par la proposition de loi Le Roux autorisant la création de réseaux de soins mutualistes ? Que répondez-vous à l’argument selon lequel les réseaux mutualistes menaceraient la liberté des patients comme des professionnels de santé ?

Etienne Caniard : Cette proposition de loi pâtit de beaucoup d’incompréhension et d’interférences avec d’autres dossiers, dont celui des dépassements d’honoraires. Chacun doit prendre conscience que, dans un contexte où les régimes obligatoires remboursent de moins en moins bien les soins courants, de l’ordre de 50 % seulement, les organismes complémentaires sont appelés à jouer un rôle plus important pour permettre l’accès aux soins. Pour autant ce texte n’est en fait qu’un retour à une situation en vigueur jusqu’en 2010, quand les mutuelles avaient la possibilité de mieux rembourser les usagers qui avaient recours à un professionnel ayant signé une convention avec elles. Cela concernait 30 millions de Français et ne gênait personne. Aucun texte n’encadrait cette pratique. Nous n’avons jamais eu de plainte pour entrave à la liberté de choix du patient, laquelle me semble davantage menacée par les dépassements d’honoraires. Par ailleurs, il faut préciser que l’arrêt de la Cour de Cassation de 2010 a interdit aux mutuelles le remboursement différencié, pas le conventionnement, et que cette pratique est encore permise aux assurances et aux institutions de prévoyance.

Il convient d’aborder la question avec de bon sens. On ne peut pas raisonner de la même façon avec les professions régies par un numerus clausus ou non, ou celles soumises à des règles d’installation comme les pharmaciens. Concernant les opticiens, par exemple, l’absence de réglementation a multiplié le nombre de magasins par deux ces dix dernières années, sans que cette concurrence n’entraîne une baisse des tarifs, au contraire ! Avec des médecins, nous ne sommes pas du tout dans le même cas de figure. Dans la situation démographique qui est la leur, nous sommes plutôt face à un problème d’offre, sauf dans quelques situations particulières, où on observe d’ailleurs paradoxalement les plus forts dépassements d’honoraires.

La proposition de loi a été amendée et les honoraires des médecins sont exclus. Comment réagissez-vous ?

E. C. : C’est très regrettable pour l’accès aux soins des plus fragiles. Les arguments des détracteurs du texte qui ont obtenu cette conclusion sont d’ailleurs contradictoires. Ils réclament une prise en charge importante de leurs honoraires par les mutuelles, mais refusent qu’elles s’engagent davantage dans la régulation des dépenses de santé. Notre système de soins souffre pourtant d’un manque d’organisation, ce que confirment tous les experts et répète inlassablement le HCAAM. Un système efficient passe par un parcours de soins régulé en ce qui concerne les prix, pour assurer une bonne rémunération des professionnels et l’accès de tous aux soins, mais aussi l’organisation de la prise en charge. Nous avons donc besoin d’une contractualisation globale pour organiser un parcours de soins. Nous ne sommes pas dans une logique de HMO à l’américaine mais au contraire dans une régulation coordonnée entre les régimes obligatoires et régimes complémentaires, à la fois pour réduire le reste à charge des usagers et garantir des revenus favorables aux professionnels de santé. La liberté tarifaire n’est pas le meilleur moyen de rémunérer correctement les professionnels. Elle crée une situation inégalitaire entre les patients mais aussi entre les médecins, entre généralistes et spécialistes, et entre les différents lieux d’exercice.

Vous avez déclaré qu’une bonne mutuelle, selon vous, n’était pas une mutuelle qui remboursait sans limite, mais une mutuelle accessible à tous et régulant les dépenses. N’est-ce pas se substituer au rôle de l’Assurance Maladie obligatoire ?

E. C. : Dans une vision à court terme, on peut souhaiter une mutuelle qui rembourse toujours plus. Mais à long terme, cela n’est pas viable. Il y a vingt cinq ans, certains contrats proposaient le remboursement de prothèses dentaires au prix réel sans limite de niveau de remboursement, les prix des prothèses dentaires se sont alors envolés. A long terme, il est indispensable d’avoir des complémentaires qui évitent les effets inflationnistes sur les coûts, sauf à rendre le coût des soins inacceptable ! C’est pour cela qu’il est important d’avoir des accords globaux avec les professionnels de santé. Ce qui me gêne dans la liberté tarifaire, ce sont les inégalités énormes qui en découlent, tant pour le patient que pour les professionnels de santé. Ne pas donner un prix de l’acte médical n’est pas la meilleure façon de le valoriser !

La ministre de la Santé a repoussé à 2014 l’obligation faite aux mutuelles de rendre publics leurs frais de gestion. Comment faut-il interpréter ce report ?

E. C. : Nous ne refusons nullement la transparence, mais nous contestons la méthode retenue et la comparaison prévue avec les frais de gestion de l’Assurance Maladie. Cela n’a pas de sens ! Par exemple, contrairement aux mutuelles, l’Assurance Maladie n’a pas de frais de recouvrement de cotisations, puisque c’est l’ACOSS qui les recouvre pour elle. L’Assurance Maladie, parce qu’elle est obligatoire, ne répond pas au même modèle économique, c’est évident. Et quand elle rembourse la dépense hospitalière sans facturation individuelle, ses coûts de gestion n’ont rien à voir avec ceux des mutuelles, qui ont autant de factures à traiter que de séjours de leurs adhérents. Il fallait donc revoir les conditions de cette transparence. Ce travail est en cours.

 

Roland Cash

« La liberté de contractualiser, c’est le libéralisme »

Médecin, économiste et membre de la Commission évaluation économique et santé publique de la HAS, Roland Cash considère que les réseaux de soins sont un moyen efficace pour réguler le système de santé.

Comment interprétez-vous le tollé suscité par la proposition de loi Le Roux autorisant les réseaux de soins mutualistes ?

Roland Cash : Des réseaux de soins promus par des assureurs privés existent depuis longtemps. Certes, les syndicats dentaires ou d’opticiens s’y sont opposés, mais ils existent. La réaction provoquée par la proposition de loi pour revenir sur l’annulation d’un précédent texte de loi s’explique par l’extension de ces réseaux aux médecins, qui intervient dans un contexte peu favorable.

La Mutualité met en avant son souhait de participer à la régulation du système de soins avec ces réseaux de soins. Sont-ils efficaces pour cette régulation ?

R. C. : Dans le dentaire comme dans l’optique, ils ont très largement démontré leur efficacité. C’est, certes, moins confortable pour les professionnels de santé, mais c’est efficace.
Il y a quelque chose d’assez paradoxal dans l’opposition actuelle des professionnels de santé libéraux français aux réseaux de soins : la liberté de contractualiser, c’est le libéralisme. Après tout, l’Amérique, symbole du libéralisme absolu, est le pays des HMO.
D’ailleurs, aux Etats-Unis, des médecins se sont organisés entre eux pour pouvoir négocier avec les assureurs privés. Et en termes de contraintes pour les professionnels, les mutuelles françaises à côté, c’est de la rigolade ! En France, les résistances aux réseaux de soins sont très fortes, mais ce mode d’organisation semble inévitable pour réguler le système de santé. D’ailleurs, tous les pays se sont engagés dans cette voie d’une façon ou d’une autre.




Point d’actualité…

357 – Cette fin d’année n’augure rien de bon pour la cardiologie libérale en 2013. Sans revenir sur la signature de l’avenant n°8, dont nous avons montré tous les effets néfastes, je souhaite vous faire aujourd’hui un point sur l’actualité.

■ Le PLFSS 2013 vient d’être voté au Parlement. L’un des buts est ramener le déficit du régime général à 13,9 milliards d’euros, un objectif louable. Toutefois, c’est encore sur les soins de ville que les mesures d’économie seront les plus importantes ! L’encadrement de l’activité libérale à l’hôpital est reporté et sera rediscuté en fonction du rapport de la mission Laurent. La suppression de la convergence des tarifs hospitaliers entre public et privé va accentuer encore le déséquilibre entre ces deux secteurs d’activité. Quant à l’expérimentation du programme Prado sur l’accompagnement des insuffisants cardiaques en sortie d’hospitalisation, elle devrait prochainement se concrétiser. Nous avons insisté auprès de l’Assurance Maladie sur la place fondamentale du cardiologue libéral pour cette prise en charge. Qui mieux que lui pourra assurer le titrage des médicaments !

■ La proposition de loi dite « Le Roux », visant à officialiser la possibilité pour les mutuelles de créer leurs propres réseaux de soins, a été adoptée à l’Assemblée Nationale. Même, si les mutuelles ne peuvent négocier les honoraires des praticiens, et même si les patients gardent la liberté du choix du médecin, comment être certain qu’en fonction de leur niveau de prestations, les patients ne soient pas obligés de s’inscrire dans des filières de soins depuis le cabinet de ville jusqu’à la clinique.

■ Le déploiement de la rémunération sur objectifs de santé publique ne se fait pas sans difficultés. Nous sommes attentifs à vos remarques et nous ne manqueront pas de les transmettre à nos interlocuteurs. En particulier certains profils paraissent parfois très fantaisistes.

■ Le DPC verra-t-il le jour ? Les membres de l’Organisme de gestion du DPC viennent d’être nommés par décret. Le décret sur la Commission scientifique indépendante, désormais divisées en deux sous-commissions, une de médecins généralistes, une de médecins spécialistes, est en voie de finalisation. Elle assure, notamment, la validation des organismes de DPC. Le démarrage effectif ? Probablement pas avant 2014 ! En attendant, lors de cette nouvelle phase transitoire, l’UFCV continuera à vous proposer des programmes de DPC.

■ Les ARS continuent leurs attaques contre la cardiologie interventionnelle libérale. En Lorraine Jean-François Benevise, le Directeur Général, vient encore de frapper. Après la chirurgie cardiaque, il veut transférer, maintenant, le TAVI de la clinique Claude Bernard de Metz à l’hôpital, alors que toutes les conditions de sécurité sont remplies pour la réalisation de cet acte. Il est vrai que l’hôpital vient d’investir 21millions d’euros, il va bien falloir les rembourser ! Le directeur général de l’ARS du Limousin, Philippe Calmette, a retiré l’autorisation de rythmologie interventionnelle de la clinique du Colombier à Limoges. Des décisions révoltantes.

Il me reste à vous souhaiter un excellent Noël et de très bonnes fêtes de fin d’année.




Les enfants incas sacrifiés du volcan Llullaillaco

357 – Christian Ziccarelli – Un volcan inactif

Le mont Llullaillaco est un volcan de 6 739 m localisé dans les Andes, à l’ouest de la province de Salta, le plus haut sommet servant de frontière entre le Chili et l’Argentine. Dès 1952, une expédition chilienne signale l’existence de ruines archéologiques. Une première fouille est réalisée par l’Autrichien Mathias Rebitsh en 1958, suivie en 1971 par celle du Dr Orlando Barvo. Le lieu du sacrifice est localisé en 1974, mais il faudra attendre 1999 pour qu’une expédition, sous la direction de l’anthropologue américain le Dr Johann Reinhard, situe puis exhume les corps et les biens des enfants de Llullaillaco.

Comprendre le rapport des Incas avec la nature

Pour les cultures américaines précolombiennes la nature était considérée comme sacrée, notamment pour les Incas, les montagnes étaient des divinités. Ils construisirent sur les sommets des structures, les sanctuaires des hauteurs, leur permettant d’accomplir leur rite.

Le volcan Llullaillaco a ainsi plusieurs sites reliés par un chemin allant jusqu’au sommet. A 6 730 mètres furent découvertes deux enceintes connues sous le nom de « huttes doubles », un mur semi-circulaire ou « paravent » et enfin un chemin conduisant à une plate-forme cérémoniale circulaire. A l’époque de l’arrivée des conquistadors, les Incas occupaient un large territoire s’étendant jusqu’au Nord de l’Argentine actuelle.

Les enfants de Llullaillaco

Pour leurs rituels et sacrifices, les Incas offraient ce qu’ils possédaient de mieux. La vie des enfants et leurs biens mortuaires constituaient la plus grande offrande. Ont été retrouvés une Petite Fille de six ans, la Demoiselle de quinze ans et un Petit Garçon d’environ 7 ans. Ils sont présentés en alternance dans des vitrines spéciales reproduisant les conditions climatiques de haute altitude.

Devant ces enfants sacrifiés, on reste sans voix, avec un sentiment d’effroi et d’incompréhension.

Le Petit Garçon de 7 ans a été trouvé assis sur une tunique de couleur grise, la tête orientée vers le soleil naissant, les yeux mi-clos. Un manteau brun et rouge couvre sa tête et la moitié de son corps. Il avait les cheveux courts, un bracelet en argent et une parure de plumes blanches soutenue par une corde en laine entourée autour de la tête. Les offrandes, liées au monde masculin, étaient des statuettes anthropomorphes masculines en or, en argent, vêtues de textiles, en miniature, des camélidés (jouant un rôle fondamental dans l’économie inca), un spondyle et des lance-pierres. Plusieurs éléments, dont la déformation de son crâne, les ornements céphaliques avec des plumes et des fleurs, sont le témoin de sa haute lignée.

La Petite Fille foudroyée de 6 ans a été trouvée assise, les jambes fléchies et la tête levée regardant en direction du sud-ouest. Elle était accompagnée d’objets à usage personnel liés au monde féminin, notamment des poteries (jarre, assiettes, plats ornithomorphes décorés de motifs géométriques…), d’un petit sac (Chuspa) tissé en laine de camélidés et de statuettes féminines en or ou en argent, vêtues de textiles miniatures, coiffées de plumes.

Un petit Kero (verre) en bois avec des motifs géométriques entaillés, produit dans tout l’empire inca, servait pour la libation de la chicha (alcool de maïs).

La Demoiselle avait environ une quinzaine d’années. Sur son visage, on trouve des traces de pigments rouges et elle avait des petits fragments de feuille de coca dans la bouche. Elle était probablement « une vierge du soleil » ou Aella, éduquée dans la maison des Elues, un lieu de privilège pour certaines femmes au temps des Incas. Elle était assise, les jambes repliées et croisées, les bras reposant sur son ventre, la tête penchée vers l’épaule droite, la face orientée au nord-est. Elle portait un manteau de couleur sable et sur son épaule droite un unku, un des vêtements les plus caractéristiques et prestigieux de l’empire inca. Comme pour les autres enfants des offrandes miniatures, liées au monde féminin étaient disposées autour d’elle.

La Capac hucha

La Capac hucha ou « obligation royale », qui a lieu lors du mois dédié à la récolte ou en l’honneur de la mort d’un empereur, est un des rituels les plus importants du calendrier inca. Les enfants de tous les villages de l’empire, voire ceux des dirigeants, choisis pour leur beauté et leur perfection physique, étaient envoyés à Cusco.

Les Incas se réunissaient sur la place principale face aux images du Dieu de la création (Viracocha) et d’autres divinités. Après le sacrifice d’animaux, les prêtres et l’empereur inca célébraient des mariages symboliques entre les enfants des deux sexes. Retournant dans leur village où ils étaient reçus et acclamés avec joie, ces enfant se dirigeaient en cortège en chantant vers le lieu des offrandes.

On donnait à boire de la chicha à l’enfant élu, habillé de ses plus beaux vêtements. Une fois endormi, il était enterré avec les offrandes. Ils rejoignaient les ancêtres qui observaient les villages du haut des montagnes. Leur vie offerte servait à assurer à l’empire santé et prospérité, mais aussi à renforcer l’énergie vitale du souverain.

Partant de Cusco, les enfants de Llullaillaco auraient accompli à pied les 1 600 kilomètres qui les séparaient du lieu programmé de leur mort. ■




Château de France 2006 – Pessac-Léognan – B. Thomassin 33850 Léognan

Les vignobles des Graves, les plus anciens du Bordelais, complantés depuis plus de 2 000 ans, furent particulièrement réputés, lorsque le mariage d’Aliénor d’Aquitaine avec Henri Plantagenet en 1154 livra cette province à la couronne britannique pendant trois siècles, ses vins étant exportés massivement et accueillis avec enthousiasme par les Anglais qui y restent toujours très attachés. L’Américain Thomas Jefferson classait, fin XVIIIe, les vins de Graves comme les meilleurs vins de Bordeaux. Mais cette appellation perdit progressivement cette renommée au profit du Médoc. Il faut reconnaître que l’étendue, la diversité et l’hétérogénéité du vignoble, produisant beaucoup de vins légers, sans grande complexité, nuisaient à sa réputation, si bien qu’en 1987, une aire de production Pessac- Léognan, regroupant les terroirs les plus prestigieux, a été délimitée, imposant, dans une optique qualitative, des règles plus strictes : rendements de 45 hl/ha par exemple.

Le nom de Graves caractérise les petits galets polis, charriés depuis le quaternaire par les glaciers et la Garonne depuis les Pyrénées.

Le Château de France est l’un des domaines les plus sudistes de la bande de Pessac-Léognan s’étendant depuis les faubourgs de Bordeaux sur la rive gauche de la Garonne. Il bénéficie d’une bonne exposition sur un des plus beaux coteaux de la terrasse de Léognan, d’un climat doux , protégé des intempéries de l’Atlantique par la forêt des Landes à l’ouest, mais recevant une hygrométrie régulière grâce à l’océan. Le terrain très graveleux repose sur un sous-sol d’argile, d’alios, de calcaires et de faluns.

Le nom prestigieux de Château de France vient, en fait modestement, de l’ancien lieu-dit : le tènement de France, sur lequel fut édifiée une maison de maître à la fin du XVIIe siècle. Cette propriété familiale de 40 hectares, acquise en 1971 par Bernard Thomassin qui, dès le début, entreprit une importante replantation, est, depuis 1996, gérée par son fils, Arnaud, qui poursuit énergiquement les travaux de rénovation des installations et la réorganisation des vignobles. Malheureusement, un incendie, il y a un an, a complètement détruit le chai de vinification, mais sa reconstruction va permettre de moderniser et d’optimiser celui-ci.

La viticulture, raisonnée sur une plantation de 5 à 7 000 pieds/hectare en taille guyot double et simple, d’âge moyen de 45 ans, n’omet pas effeuillage, éclaircissage et vendanges au vert, notamment pour le millésime 2006, dont les mois de juin et juillet furent particulièrement chauds, ce qui permet de limiter les rendements et de fortifier les grappes restantes.

La vendange est manuelle, le tri pendant la cueillette et sur table au chai rigoureux.

La fermentation alcoolique de 7 à 10 jours, suivie de 3 à 4 semaines de macération, s’effectue en cuve thermorégulée à 30-32°, où a également lieu la malo-lactique.

L’élevage en barriques, comportant 40 % de bois neuf, s’étend sur 12 à 14 mois. L’assemblage réunit 60 % de cabernet-sauvignon et 40 % de merlot. Pour finir : collage au blanc d’oeuf, filtration légère avant mise en bouteille.

Annoncé par une robe grenat foncée aux belles irisations violettes, ce Château de France 2006 exprime, à l’ouverture du flacon, une certaine réduction qui disparaît après aération, puis, très vite, le nez est envahi par des arômes typiques des grands Graves : terre calcinée, tabac, bois de cèdre avant qu’apparaissent des notes confiturées de cassis et fumées de réglisse. La bouche harmonieuse, friande, épicée : clou de girofle, muscade, garde fraîcheur et minéralité, les tanins bien présents, mais souples et soyeux, le boisé très prégnant pendant les premières années, mais maintenant bien intégré, aboutissent à un vin de plaisir, souriant, loin de l’austérité des seigneurs médocains ou libournais. Peut-on seulement regretter une finale un peu courte ?

Ce Pessac-Léognan a l’élégance et la suavité aptes à s’accommoder à bien des poissons : lamproie à la bordelaise poireaux confits, sandre au beurre rouge. Mais, comme nombre de Bordeaux, il épousera joyeusement le navarin et le carré d’agneau, l’entrecôte bordelaise aux sarments de vigne, le rôti de veau aux girolles, voire un oeuf cocotte à la truffe noire. Il accompagnera certains desserts : soupe de fruits rouges, miroir au cassis, mais il se hérissera devant le chocolat.

Ainsi, ce Château de France, à l’instar des Graves Pyrénéens doucement polis et arrondis par les siècles, glisse sur la langue et le palais comme une délicate et onctueuse caresse. ■(gallery)




MCS en clinique : réclamations abusives, puis recul d’une caisse

Rappel des faits _ Le Dr L., cardiologue, exerce pour l’essentiel à son cabinet. De façon ponctuelle, elle intervient dans une clinique, à la demande de médecins non cardiologues de l’établissement, pour des malades hospitalisés qui nécessitent un avis cardiologique.

Elle pratique un interrogatoire du patient, un examen clinique et un électrocardiogramme.

Ses conclusions, avec conseils thérapeutiques éventuels, sont adressées au praticien qui a fait appel à elle, avec double au médecin traitant.

Conformément à la nomenclature et à la CCAM, elle code son acte CS08 + MPC + MCS + DEQP003. Courant mai dernier, elle reçoit un courrier de la CPAM de B. lui enjoignant de reverser dans le mois des honoraires qualifiés d’indus, et correspondant aux MCS cotées en établissement pendant la période du 1er avril 2010 au 31 décembre 2011. Nous apprenons en fait, au Syndicat, qu’il s’agit d’une vague de réclamations similaires adressées par la caisse à l’ensemble des cardiologues du département.

Position de la caisse. _ La caisse refuse la prise en charge de ces MCS en expliquant curieusement que « la majoration de coordination ne se cumule pas avec les honoraires de surveillance ».

Position du Syndicat des Cardiologues. _ Effectivement, la MCS ne se cumule pas avec les honoraires de surveillance, mais il ne s’agissait pas ici de cumul avec des honoraires de surveillance, mais avec des Consultations Spécialisées (CS), comme l’attestaient d’ailleurs les bordereaux de réclamations.

L’honoraire de surveillance est défini par l’article 20 des dispositions générales de la nomenclature, et il est coté C08, C04 ou C02.

Or, les MCS, dont la caisse réclamait le remboursement, n’étaient pas cumulées avec de telles cotations. Ces MCS étaient en fait cumulées avec des consultations spécialisées, effectuées par des cardiologues extérieurs à l’établissement, cotées CS et affectées du coefficient 0,8 car elles étaient associées à un ECG chez un patient hospitalisé, ceci en application de l’article III-3 des dispositions générales de la CCAM.

Nous étions ici dans le cadre de la « séquence de soins » décrite à l’article 13.2 de la convention et autorisant la MCS : _ Cette majoration de coordination est également applicable en cas de séquence de soins nécessitant un ou plusieurs intervenants, c’est-à-dire lorsque le patient est adressé par un médecin correspondant à un autre médecin spécialiste avec information au médecin traitant.

L’argument de la caisse, on le voit était assez grossier. Il reposait sur la similitude du coefficient 0,8 affecté à l’honoraire de surveillance coté C08, et au CS accompagnant l’ECG en établissement, coté donc CS0,8, mais il s’agissait bien de deux actes différents et ne relevant pas des mêmes règles.

Réaction du Syndicat des Cardiologues. _ Nous avons conseillé à nos adhérents de contester les décisions de leur caisse, en leur fournissant un argumentaire, ce qu’ils ont fait. Parallèlement, un courrier conjoint du Syndicat National et du Syndicat Régional a été adressé à la direction de la caisse, reprenant notre argumentation et précisant qu’en l’absence de règlement rapide de ce litige, notre Syndicat soutiendrait les cardiologues concernés pour engager des procédures de contentieux, et leur conseillerait de réclamer à leur CPAM des indemnités au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. En effet, les demandes qui leur étaient faites étaient manifestement abusives et ne reposaient sur aucun texte légal ou réglementaire.

La caisse revient sur sa décision. _ A la suite de ces différentes interventions, par un courrier du 17 septembre, la CPAM de B. informe les cardiologues concernés « qu’après nouvelle étude du dossier » elle annule sa réclamation de reversement d’honoraires « indus ». _ Elle ne formule évidemment aucune excuse ni aucun regret pour le temps qu’elle a fait perdre à des médecins par sa méconnaissance de textes élémentaires. _ Cette affaire montre que la détermination paie, et ceci d’autant plus qu’elle est coordonnée.

Il nous reste à régler un contentieux avec cette même caisse. Elle refuse la cotation d’ECG pratiqués par des cardiologues, à la demande des anesthésistes, sur des malades hospitalisés en unité de soins continus, en postopératoire. La CPAM méconnaît là l’article 1-11 des dispositions générales de la CCAM sur les actes pratiqués par des médecins différents. _ Le Syndicat des Cardiologues a prévu de déposer un dossier à la Commission de Hiérarchisation des Actes Professionnels qui se réunira en décembre.

Les différents textes régissant les rapports entre les médecins et les caisses sont émaillés de sanctions concernant les seuls médecins. A quand des sanctions pour les responsables de caisses qui, par méconnaissance ou interprétation abusive de la réglementation, font gaspiller inutilement du temps médical ?

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Conditions pour coder une MCS en établissement _ ■ Le malade doit être en parcours de soins, c’est à dire qu’il doit avoir déclaré son médecin traitant. _ ■ Le médecin traitant doit être tenu informé.(gallery)




Une « neutralité » tarifaire très hypothétique

356 – Ce rapport cherche à savoir si ces deux outils tarifaires qui avaient pour objectif « de mieux connaître l’activité de soins mais aussi de rendre la rémunération des acteurs du système de santé plus équitable » ont permis d’atteindre cet objectif. Rien de moins sûr. Concernant la tarification des séjours hospitaliers, l’IGAS constate que la « neutralité » dans l’allocation des ressources entre activité que sont censés apporter les GHM n’existe pas. « Les tarifs T2A actuels s’écartent de cette neutralité (pour plus d’un milliard d’euros globalement, à la hausse comme à la baisse) et ces écarts ne se résorbent pas. Il sont plus marquées, relativement, pour les cliniques privées que pour les établissements publics ». Selon les auteurs du rapport, « ces écarts tiennent pour l’essentiel au conflit entre le principe de neutralité tarifaire inhérent à la T2A et le souci de ménager les ressources “historiques” des établissements ».

Concernant la tarification des actes techniques des libéraux, les auteurs estiment que la convergence entre les tarifs cibles résultant de l’élaboration de la CCAM et la rémunération antérieure des actes a « d’emblée achoppé sur le refus des syndicats médicaux d’entériner des “pertes” sur les actes historiquement “surtarifés” ». Car bien sûr, ce processus se fait dans le cadre d’une enveloppe fermée au sein de l’ONDAM, la revalorisation de certains actes ne peut se faire que par des baisses de tarif sur d’autres actes. « Faute de marges de manoeuvre financières permettant d’aligner tous les tarifs sur les plus favorables, le processus de convergence n’a permis qu’une revalorisation partielle des actes qui devaient bénéficier de la nouvelle tarification. » Mais le rapport de l’IGAS souligne que « la cible elle-même est devenu obsolète » puisque « ni l’évaluation du travail médical, ni l’estimation des coûts de la pratique n’ont été actualisées alors que des évolutions sont nécessairement intervenues d’une part et que des limites méthodologiques d’emblée identifiés appelaient à des affinements continus d’autres part ». L’IGAS recommande donc de confier la maintenance de la nomenclature (libellés des actes) à « une instance autonome, distincte de la CNAM, pour garantir une meilleure prise en compte des innovations ».




Démographie : proximité n’est pas toujours accessibilité

356 – Il existe des déserts médicaux, certes, pourtant, une grande partie de la population vit à faible distance du lieu d’exercice d’un professionnels de premiers recours. Selon une étude de la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES), en 2010, 84 % de la population française vit dans une commune où exerce au moins un médecin généraliste libéral et 100 % réside à moins de 15 minutes d’une commune « équipée », c’est-à-dire où exerce en cabinet principal ou secondaire au moins un professionnel de premier recours : médecin généraliste, infirmier, masseur-kinésithérapeute, ophtalmologue et gynécologue, deux spécialistes en accès direct fréquemment consultés en premier recours.

Une demande excédant largement l’offre _ Pourtant, les patients ne consultent pas toujours le professionnel de santé le plus proche pour les soins de premier recours. Parmi les explications à ce phénomène, la DREES privilégie le manque de disponibilité du professionnel le plus proche compte tenu d’une demande excédant largement l’offre dans son rayon d’exercice, qui oblige les patients à aller consulter plus loin. Pas beaucoup plus loin dans la plupart des cas : pour les généralistes et les kinés, un peu plus de 60 % des consultations ont lieu dans la commune équipée la plus proche. Cette part n’est que de 51 % pour les ophtalmologues et de 48 % pour les gynécologues.

Près des deux tiers des consultations qui ne se font pas au plus proche ont lieu dans une commune plus grande en termes de population ou d’emplois. Ce constat est encore plus marqué pour les consultations de spécialistes, gynécologues ou ophtalmologues. Lorsque les patients ne se rendent pas au plus proche, le temps supplémentaire parcouru est de l’ordre d’une quinzaine de minutes pour les médecins généralistes, et de vingt minutes pour les kinés, les gynécologues et les ophtalmologues.

Pour cerner plus justement les disparités territoriales d’accès aux soins, la DREES et l’IRDES ont élaboré un nouvel indicateur d’Accessibilité Potentiel Localisé (APL), calculé pour chaque commune et tenant compte des tensions locales entre offre et demande de soins. A l’aune de cet indicateur, l’accessibilité aux médecins généralistes libéraux est peu variable d’une commune à l’autre. Seuls 0,2 % des habitants ont une APL deux fois plus élevés que la moyenne et 7 % une APL deux fois plus faible que la moyenne. Mais les disparités territoriales sont fortes : 5 % de la population à une accessibilité plus de deux fois supérieure à la moyenne nationale et environ 20 % ont une accessibilité plus de deux fois inférieure à la moyenne.




Offre de soins : les réseaux de soins mutualistes remis en selle

356 – La ministre des Affaires sociales et de la Santé a notamment précisé qu’elle soutenait la proposition de loi de députés socialistes permettant aux mutuelles de « conventionner avec des réseaux de prestataires médicaux ou paramédicaux ».

La veille de son intervention, le président du groupe socialiste, républicain et citoyen de l’Assemblée nationale, Bruno Le Roux (Seine-Saint-Denis), et six autres députés avaient déposé une proposition de loi allant dans ce sens.

Ne comportant qu’un seul article, le texte reprend en fait une disposition de la loi Fourcade votée en juillet 2011 qui avait été très remaniée dans un premier temps avant d’être invalidée pour des raisons de forme par le Conseil constitutionnel.

La proposition de loi stipule que les mutuelles peuvent « instaurer des différences dans le niveau de prestations lorsque l’assuré choisit de recourir à un professionnel de santé, un établissement de santé ou un service de santé membre d’un réseau de soins ou avec lequel les mutuelles, unions ou fédérations ont conclu un contrat comportant des obligations en matière d’offre de soins ». L’objectif de ce texte est de « favoriser une régulation des coûts de santé en vue de maîtriser les restes à charge pour les ménages et le montant des cotisations des complémentaires santé, évitant ainsi des démutualisations ». Il vise également à « améliorer la qualité de l’offre à travers les engagements pris par les professionnels de santé au sein des réseaux ainsi constitués ».




Rupture de médicaments : un décret diversement apprécié

356 – Une première version du texte avait provoqué l’ire des grossistes répartiteurs qui dénonçaient en particulier la mise en place par les laboratoires pharmaceutiques de « centres d’appel d’urgence » accessibles aux pharmaciens d’officines pouvant ainsi se procurer à la source, en cas de pénurie, des médicaments présentant un « intérêt thérapeutique majeur » listés par l’ANSM. La Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique ne voulait en aucun cas de ce « circuit parallèle permettant aux laboratoires d’atteindre directement les pharmaciens d’officine. Les grossistes devront pourtant faire avec, puisque cette disposition demeure dans le décret publié assoupli en revanche en ce qui concerne leurs activités d’exportation, puisque la notion d’exportation parallèle n’est plus évoquée. Ce qui ne satisfait pas du tout le collectif d’associations de lutte contre le sida TRT-5 « très en colère et très déçu ». Pour ce collectif, il manque au texte définitif la définition d’un statut particulier pour une liste « restreinte » de médicaments à intérêt thérapeutique majeur (antirétroviraux, traitements des hépatites B et C, anticancéreux, cardiotoniques, immunosuppresseurs) « pour limiter leur exportation hors territoire national ». S’exprimant lors d’une réunion de l’Association des Cadres de l’Industrie Pharmaceutique (ACIP), Marisol Touraine a promis de « sécuriser l’approvisionnement des médicaments indispensables » s’engageant à « aller plus loin en passant par la loi ».

Quant aux représentants des syndicats de pharmaciens, ils se sont montrés prudents quant à l’efficacité du décret pour mettre fin aux ruptures d’approvisionnement. Le président de l’Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine (USPO), Gilles Bonnefond, s’est dit « sceptique sur l’efficacité du décret », mais considère que le dispositif « sera efficace si tout le monde prend ses responsabilités ». « La responsabilité de chaque acteur doit permettre de retrouver le calme nécessaire », a estimé en écho le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Philippe Gaertner.




Recherche : un Nobel pour des cellules reprogrammables

356 – Le Britannique John Gurdon (79 ans) et le Japonais Shinya Yamanaka (50 ans) se sont vu attribuer le Prix Nobel 2012 de physiologie et médecine. Leurs travaux, distants de plus de quarante ans, ont permis la reprogrammation de cellules matures en cellules souches pluripotentes. Ils ont ainsi renversé la certitude ancienne selon laquelle une cellule une fois différenciée et spécialisée en tel ou tel type cellulaire l’était définitivement. Seules, pensait-on, les cellules embryonnaires immatures au tout début du développement de l’embryon étaient pluripotentes, capables de se différencier en différents types cellulaires.

En 1962, la publication des travaux de John Grudon remet en cause l’irréversibilité cellulaire. En introduisant dans un oeuf de grenouille dont on avait enlevé le noyau, le noyau d’une cellule de têtard déjà différenciées, il parvient à obtenir le développement de l’oeuf en un organisme entier, d’abord têtard puis grenouille. John Gurdon avait ainsi prouvé que le noyau d’une cellule différenciée replacé dans un milieu embryonnaire pouvait retrouver sa capacité de conduire le développement entier d’un individu.

Mais sans transfert de noyau, pourrait- on induire une cellule différenciée entière à se reprogrammer pour redevenir pluripotente, en ayant les mêmes propriétés qu’une cellule souche embryonnaire ? En 2006, Shinya Yamanaka apporte une réponse positive à la question en introduisant plusieurs gènes dans la cellule. Ses travaux conduisent à la création de cellules souches pluripotentes induites (cellules IPS). Elles sont créées à partir d’une cellule de peau qui, grâce à quatre gènes seulement, a été induite à redevenir pluripotente, elles peuvent ensuite être induites à se différencier en différentes cellules comme des fibroblastes, des neurones ou des cellules de tractus digestif. Des cellules IPS peuvent donc être créées à partir de cellules humaines. Ainsi, à partir de cellules de peau de patients atteints de différentes pathologies, les chercheurs peuvent les reprogrammer et les étudier pour comprendre les mécanismes conduisant à la maladie et, éventuellement, développer de nouveaux traitements.




Forfaits : le recul du paiement à l’acte

356 – L’article 40 du PLFSS 2013 prévoit la création de 200 postes de praticiens territoriaux de médecine générale. Rappelons qu’il s’agit de jeunes médecins qui choisiront, volontairement, de s’installer dans des territoires menacés de désertification médicale, dans lesquels exercent toujours des professionnels de santé mais sur le point de partir en retraite. Ces PTMG s’installeront avec ou à côté de ces professionnels, pouvant exercer avec un ou plusieurs d’entre eux. Ils devront pratiquer les tarifs du secteur 1, mais l’Assurance Maladie leur garantira par contrat « un revenu minimal annuel pendant deux années » avec la perspective qu’ils s’installent durablement et prennent le relais des médecins généralistes qui partiront. Cette « rémunération complémentaire aux revenus issus de l’exercice des fonctions de soins » sera fixée par arrêté et tiendra compte de « celle à laquelle ils pourraient prétendre en tant qu’assistant spécialiste hospitalier ainsi que des sujétions notamment liées aux probables nombreux déplacements ». Cent premiers postes devraient être créés au 1er mai prochain, pour un coût de 4,5 millions d’euros en 2013 et 10,8 millions d’euros en année pleine à partir de 2014. Avec l’accord du Gouvernement, les députés ont ouvert l’accès à ce nouveau statut aux remplaçants pas encore inscrits à l’Ordre en tant que libéral, ainsi qu’aux assistants spécialistes à temps partiel exerçant en établissement de santé.

L’article 39 du PLFSS 2013, quant à lui, vise à favoriser par le biais de nouveaux modes de rémunération le développement d’équipes de professionnels de santé de proximité pouvant assurer aux patients de nouveaux services comme la prévention, l’éducation thérapeutique et le dépistage. Ces nouveaux services seraient couverts par une rémunération annuelle versée à l’équipe en fonction du respect de certains engagements et de l’atteinte d’objectifs « de santé publique, de qualité et d’efficience de soins ». Marisol Touraine a indiqué que ces forfaits pourraient être proches de ceux versés dans le cadre des expérimentations de nouveaux modes de rémunération mises en place par la LFSS de 2008. « Ces rémunérations étaient d’environ 50 000 euros par équipe et c’est la perspective dans laquelle nous nous situons », a précisé la ministre. En 2008, le budget des expérimentations était de 8,5 millions d’euros. Le coût du dispositif instauré par le PLFSS 2013 est estimé à 30 millions d’euros en 2014, 48,5 millions en 2015 et 67 millions d’euros en 2016.

Un changement majeur d’orientation _ L’opposition s’est montrée très critique. Ainsi, le député du Loiret, Jean-Pierre Door, s’est interrogé sur l’opportunité d’introduire un paiement à la capitation qui ne correspond pas, selon lui, au « mode de médecine à la française ». Mais pour la ministre de la Santé et des Affaires sociales, ce dispositif marque « un changement majeur d’orientation » : « c’est la première fois que nous envisageons très concrètement de rémunérer un travail en équipe et non plus exclusivement le travail individuel de chaque professionnel ». Sans envisager pour autant la disparition complète du paiement à l’acte, il est évident que la multiplication des forfaits tire vers une mixité de la rémunération des professionnels de santé libéraux nécessaire par ailleurs à la valorisation de leur travail de santé publique. Un « tournant majeur », sans doute, puisque la France sort petit à petit d’un système de santé fondé essentiellement sur la prise en charge du soin aigu, honoré par le paiement à l’acte, pour entrer dans le peloton des pays européen où cette mixité de rémunération existe déjà depuis de nombreuses années.




Eclipse du Sunshine Act à la française ?

356 – Depuis le mois de septembre, un groupe de travail, réuni à l’initiative de la ministre de la Santé et des Affaires sociales, planche sur la rédaction du projet de décret d’application « relatif à la transparence des avantages consentis par les entreprises produisant ou commercialisant des produits à finalité sanitaire et cosmétique destinés à l’homme », et sur celle de la circulaire qui accompagnera le décret. Jugeant irréaliste un premier projet de texte élaboré par le Gouvernement précédent, Marisol Touraine souhaite ainsi une nouvelle rédaction telle « que l’obligation de publication prévue par la loi soit réaliste et adaptée pour être effective et utile ».
Un certain nombre de mesures contenues dans ces projets, et notamment l’abandon de l’obligation de déclaration au premier euro a provoqué de vives protestations, notamment – et sans surprise – de la part de Prescrire, mais plus étonnement, de la part du Conseil national de l’ordre des médecins qui est monté au créneau pour dénoncer un projet de décret qui « détricote la loi ». Sans préjuger de la version définitive du décret, Le Cardiologue fait le point sur la question. En donnant la parole aux acteurs qui ont accepté de s’exprimer alors que les négociations ne sont pas terminées.

 

Le Diable est dans les détails, c’est bien connu, et ce qui est en train de se passer avec la rédaction d’un des décrets d’application de la loi de décembre 2011 en est une belle illustration. Inutile de rappeler le contexte dans lequel est née cette loi. L’affaire Mediator a mis cruellement à jour les dysfonctionnements de notre système d’évaluation et de sécurité des produits de santé, en particulier l’absence de transparence sur les liens d’intérêt existant entre les experts auprès des instances d’évaluation et les industries de la santé. Après moult rapports et des Etats généraux du médicament, une loi de renforcement de la sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé a été votée le 2 décembre 2011.

Cette loi prévoit, dans son article 2, que les entreprises de produits de santé doivent déclarer les conventions qu’elles concluent et les avantages qu’elles consentent aux acteurs du champ des produits de santé, personnes ou structures. Selon la loi, l’obligation de déclaration devait être effective à la publication du décret d’application et au plus tard au 1er août 2012 pour les conventions appliquées ou conclues et les avantages accordés et rémunérations versées à compter du 1er janvier 2012. Personne n’échappe, selon la loi, à ce « Sunshine Act » à la française, puisque cette obligation de déclaration s’applique à tous les professionnels de santé et leurs associations, aux étudiants se destinant à une profession de santé et leur groupements, aux associations d’usagers du système de santé, aux établissements de santé publics et privés, aux fondations, sociétés savantes, sociétés ou organismes de conseil intervenant dans le secteur des produits de santé, aux entreprises éditrices de presse, à tous les medias et aux organismes assurant la formation initiale des professionnels de santé.

Un engagement de Xavier Bertrand

Un décret devait fixer le seuil à partir duquel l’obligation de déclaration s’imposait. Un premier projet de décret en février de cette année, sous le précédent Gouvernement qui prévoyait l’obligation de déclaration des avantages consentis au premier euro, comme le ministre de la Santé et des Affaires sociales de l’époque, Xavier Bertrand, s’y était engagé. Ce projet de texte prévoyait aussi qu’un arrêté déterminerait le modèle-type de formulaire que les entreprises devront rendre public. Concernant les convention, ce formulaire devrait identifier les parties, préciser la date de signature et l’objet de la convention « sans que puisse leur être opposé le secret industriel et commercial », précisait le projet de décret. Le formulaire relatif aux avantages consentis en nature ou en espèces, il devait comporter les mêmes renseignement que le formulaire pour les convention ainsi que « la forme, la nature et le montant de chacun des avantages » et les motif pour lesquels ils ont été octroyés. Il précisait également que les entreprises devaient transmettre « sans délai » les formulaires aux Ordres professionnels.
Cela, c’était au début de l’année. Les élections présidentielles ont porté François Hollande au pouvoir avant que ne soit publié le décret, qui ne faisait pas l’unanimité, on s’en doute. Au Gouvernement socialiste donc de prendre le relais.  En juillet dernier, Marisol Touraine a annoncé la mise en place d’un groupe de travail destiné à faire évoluer le projet de décret d’application des mesures relatives au Sunshine Act à la française, et visait alors une entrée en vigueur du texte pour le mois d’octobre… Très critique à l’égard du projet de décret élaboré par le précédent gouvernement, la ministre estimait dans un communiqué qu’il « ne répond(ait) pas aux problèmes de conflits d’intérêts qui se posent concrètement et impos(ait) aux entreprises des obligations de publication à la fois imprécises dans leur objet et irréalistes dans leur définition ». « Il faut donc que l’obligation de publication prévue par la loi soit réaliste et adaptée pour être effective et utile », concluait Marisol Touraine, convaincue du bien fondé de la transparence en matière de promotion des produits de santé.

Un nouveau projet de décret très critiqué

Mise en place à la rentrée, ce groupe de travail a donc travaillé à l’élaboration d’un nouveau projet de décret. A l’issue de la deuxième réunion, Prescrire et Formindep ont décidé de ne pas assister à la troisième, à l’issue de laquelle, c’est l’Ordre des médecins qui a manifesté son désaccord dans un communiqué très critique qui, sous le titre « de la lumière à l’obscurité » dénonce « la volonté affichée dans le projet de décret de vider de la loi de sa portée, sous des prétextes fallacieux ».
Qu’est-ce qui a motivé ces réactions ? Pour les adversaires du nouveau projet de décret, le renoncement à l’obligation de déclaration au premier euro constitue le casus belli. La nouvelle mouture du texte prévoit effectivement que le seuil des déclarations des avantages consentis par les laboratoires aux acteurs du champ des produits de santé serait fixé à 60 euros (la rumeur aujourd’hui parle d’un seuil établi à 30 euros). Dans leur déclaration, les entreprises devraient préciser « la tranche dans laquelle est compris le montant cumulé, arrondi à l’euro le plus proche, sur une période de six mois et pour chaque bénéficiaire », des avantages consentis « directs ou indirects, en nature ou en espèces ».
Six tranches sont prévues ; de 60 à 500 euros ; de 501 à 1 000 euros ; de 1 001 à 10 000 euros ; de 10 001 à 100 000 euros ; de 100 001 à 500 000 euros et supérieure à 500 000 euros. Les détracteurs du projet de décret voient dans ce système de tranches le moyen de dissimuler des sommes cumulées dans de « larges tranches » et soulignent notamment l’écart allant de 1 001 à 10 000 euros.

Le flou de la notion d’avantage

Autre objet de critique : le décret prévoit que la publication se fera sur le site de chaque entreprise ou « à défaut sur le site d’une groupement d’entreprises » et non sur un site unique regroupant toutes les informations. En outre, le projet de circulaire qui accompagnera le décret  précise que « l’entreprise ou le responsable du site en cas de regroupement doit veiller à la mise en place de mesures visant à empêcher les moteurs de recherche de procéder à une indexation des bénéficiaires ».
Enfin, l’interprétation de la notion d’avantage donne lieu à un certain flou qui n’est pas du goût des opposants au projet de décret et de circulaire. Dans cette dernière, on peut en effet lire que « l’avantage à rendre public s’entend de ce qui est alloué ou versé à une personne bénéficiaire sans contrepartie ». Dans la version du 17 octobre du projet de circulaire, une phrase a été supprimée : « Dès lors, les rémunérations d’un service ne doivent pas être considérées comme entrant dans le champ de l’obligation de publication, puisque, par nature, celles-ci ne constituent pas des avantages ».

Ainsi donc, les avantages en nature comme les dons de matériels, les invitations, les frais de restauration ou la prise en charge de voyages d’agrément, ou en espèce comme des commissions, des remises, des ristournes ou des remboursements de frais devraient être déclarés, mais pas les rémunérations perçus pour des interventions lors de congrès ou la participation d’un professionnel au board d’une entreprise. Cela fait tout de même tout un pan, et non des moindres, des « avantages » qui échapperait à la déclaration publique.
La date souhaitée par Marisol Touraine pour l’entrée en vigueur de l’obligation de déclaration est dépassée. A l’heure où nous paraissons, une autre réunion du groupe de travail aura eu lieu. La seule modification qu’on peut sans doute en attendre est l’abaissement du seuil de l’obligation de déclaration. Mais dans la mesure où le retour à l’obligation de déclaration dès le premier euro est exclu, le décret paraîtra en l’état pour l’essentiel. Et l’opposition ne manquera pas de souligner que le Gouvernement socialiste obscurcit quelque peu le Sunshine à la française. En passant sous silence que, malgré son attitude volontariste, Xavier Bertrand n’a pas imposé son projet de décret au début de l’année, trop heureux sans doute de laisser à son successeur ce délicat dossier.

 

Albert Hagège (SFC) 

« L’Ordre joue un jeu dangereux »

Président de la Société Française de Cardiologie, le Pr Albert Hagège participe à ce titre au groupe de travail pour la rédaction du décret d’application relatif à la publication des liens d’intérêt. « Au sein de ce groupe de travail nous essayons de trouver une solution raisonnable, et nous y étions parvenus dès la deuxième réunion. Mais Prescrire et Formindep d’abord, puis l’Ordre des médecins ensuite ont dénoncé le texte et fait pression sur les gens de la commission pour introduire plus de contrôle et un seuil de déclaration fixé au premier euro, ce qui n’est pas réaliste. » Albert Hagège estime que l’Ordre fait une interprétation erronée du projet de décret. « Tous les contrats entre industrie et professionnels de santé seront publiés sur les sites des industriels et la transparence est obligatoire pour tout le mode. L’Ordre voudrait aussi que si l’industrie donne de l’argent pour un but collectif, cela passe aussi par lui ! Je ne sais pas ce que cherche l’Ordre, mais il joue un jeu dangereux. Je crois surtout qu’il veut que tout passe par lui pour tout contrôler. »

 

François Rousselot

« L’opacité organisée »

Le président de la commission des relations médecin-industrie du Conseil national de l’ordre des médecins explique en quoi le projet de décret d’application « détricote » la loi de décembre 2011 et pourquoi l’Ordre est prêt à faire un recours en Conseil d’Etat s’il devait être publié dans sa version actuelle.

 

L’Ordre a protesté contre le projet de décret d’application de la loi de décembre 2011. Quels sont vos points de désaccord ?

François Rousselot : La première réunion avec la DGS était consacrée au projet de décret. Mais la deuxième réunion et les suivantes ne portaient plus sur ce texte mais sur la circulaire d’application. L’Ordre a manifesté son étonnement devant ce qui nous semblait prématuré. Petit à petit, il est apparu que la position de la DGS se durcissait dans un même sens, allant vers un détricotage de la loi et le sens de l’industrie pharmaceutique.

Concrètement, cela se manifeste comment ?

F. R. : Le problème principal réside dans l’interprétation du terme « avantages » inscrit dans la loi, et de l’interprétation qu’en fait la DGS, avec laquelle nous ne sommes absolument pas d’accord. Selon l’analyse de la DGS, les avantages désignent les dons fait par l’industrie pharmaceutique aux professionnels de santé sans contrepartie, et doivent à ce titre faire l’objet d’une déclaration. A l’inverse, les rémunérations perçues pour des travaux effectués à la demande de l’industrie ne seraient pas soumises à cette obligation. Les liens d’intérêt sont les plus forts échapperont donc totalement à la transparence. Le bloc-notes et le stylo donné à un médecin, un billet d’avion pour participer à un congrès devront être déclarés, mais pas les rémunérations des orateurs au même congrès !
Par ailleurs, les avantages perçus par les professionnels de santé au travers des associations subventionnées ne sert pas publiables non plus : aucun contrôle ne pourra donc s’exercer, c’est de l’opacité organisée !

Vous dénoncez également la mise à l’écart de l’Ordre ?

F. R. : Tous les Ordres sont concernés, mais l’Ordre des médecins l’est tout particulièrement qui, en l’état actuel du texte est totalement écarté du dispositif. En effet, le projet de décret ne prévoit pas l’obligation de transmission par voie électronique des conventions entre médecins et industriels de la santé adressées à l’Ordre des médecins. Et ce en dépit des observations de la Cour des Comptes. Il n’est pas prévu non plus que les industriels aient l’obligation de transmettre les conventions conclues avec les médecins, et en particulier les contrats d’experts et d’orateurs.

Comment expliquez-vous l’attitude de la Direction générale de la santé ?

F. R. : Je peux comprendre que dans le contexte de la crise économique l’on ménage une industrie de santé pourvoyeuse d’emplois. Mais l’on peut quand même s’étonner de l’attitude des politiques actuellement au pouvoir, car lorsqu’ils étaient dans l’opposition, à l’époque du débat sur la loi, ils trouvaient que rien n’était jamais assez transparent…

Pour quelle date est prévue la parution du décret, et quelle suite l’Ordre compte-t-il donner si le texte paraît en l’état ?

F. R. : La publication étati annoncée pour la mi-janvier, mais ce délai paraît court aujourd’hui, une fois finalisé, il doit être soumis à la CNIL et au Conseil d’Etat. Si les textes du décret et de la circulaire devaient rester dans leur actuelle version, le Conseil national de l’ordre des médecins ferait un recours en Conseil d’Etat avec la quasi-assurance d’obtenir gain de cause : on a du mal à penser que le Conseil d’Etat puisse approuver un texte d’application si éloigné de la loi de décembre 2011.




Le labyrinthe de Chartres

356 – Christian Ziccarelli – Le Labyrinthe, tout un mythe _ Originellement, le Labyrinthe est le palais Crétois de Minos où était enfermé le Minotaure. Pour prouver ses droits sur le trône de la Crète dont il était devenu le roi, « Minos demanda aux dieux d’exaucer ses prières. Après avoir dédié un autel à Poséidon et fait tous les préparatifs pour le sacrifice, il demanda qu’un taureau sortît de la mer. Aussitôt un taureau d’un blanc éblouissant apparu, mais tellement impressionné par sa beauté, il l’envoya rejoindre ses propres troupeaux et en tua un autre à sa place ». Pour se venger Poséidon fit que Pasiphaé, la femme de Minos, s’éprit du taureau blanc, si bien qu’elle en eut un fils le fameux Minotaure. Pour éviter le scandale, Minos demanda à Dédale de construire une demeure d’où il ne pourrait jamais sortir, le Labyrinthe. Androgée, un des fils de Minos, alors qu’il se rendait à des jeux funèbres, fut tué dans une embuscade tendue par le roi d’Egée. En représailles Minos exigea que les Athéniens envoient sept jeunes gens et sept jeunes filles tous les neuf ans au Labyrinthe où le Minotaure, les attendait pour les dévorer. Thésée, devant la douleur des parents dont les enfants étaient susceptibles d’être tirés au sort, s’offrit volontairement, comme victime. Ariane la propre fille de Minos eut « le coup de foudre » pour Thésée. Dédale avait donné à Ariane un peloton de ficelle magique qui allait permettre à Thésée à la fois de se rendre au repaire secret du Minotaure pour le tuer, mais aussi de retrouver la sortie du Labyrinthe.

Octogonaux ou circulaires, la plupart des labyrinthes de nos cathédrales nous sont connus grâce à des dessins _ En fait, il s’agit de développer un seul chemin aussi long que possible qui part de l’extérieur et aboutit au centre. Celui de Chartres est constitué par des dalles claires en calcaire de Berchères larges de trente-quatre centimètres, que cloisonnent des bandes de pierre sombre (marbre bleu noir) de huit centimètres. La longueur du parcours est exactement de 261,50 m. A Lucques, on retrouve soigneusement gravé sur un pilier du porche roman de la cathédrale, un labyrinthe « en miniature » rigoureusement identique à celui de Chartres. En fait Le labyrinthe fait partie d’une longue tradition. Le plus ancien du monde chrétien est en Algérie, il date de 328. On le retrouve dans de nombreux manuscrits, ou sur des murs d’église aux quatre coins de l’Europe.

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Le dédale, la lieue, le chemin de Jérusalem _ Telles sont les trois autres désignations du labyrinthe. Dédale n’était autre que l’architecte de Minos à qui il avait demandé de construire le Labyrinthe pour cacher en son centre le Minotaure. La lieue correspond à une unité de longueur voisine de 4 km. A pied, il faut environ une heure pour parcourir cette distance. C’est le temps mis par les pèlerins qui le font, encore aujourd’hui, à genoux en récitant le Miserere. Le chemin de Jérusalem est plus énigmatique. Il pourrait être l’équivalent d’un pèlerinage en terre sainte. Le croyant, qui ne pouvait l’accomplir en réel, le parcourait en imagination jusqu’à ce qu’il arrive au centre, aux lieux saints. Il pouvait ainsi obtenir des indulgences.

L’origine de ce tracé peut être recherchée dans la civilisation crétoise, mais il est également possible que la société mégalithique l’ait introduit en Europe occidentale, car dans le musée de Dublin on peut admirer un magnifique labyrinthe mégalithique gravé dans la pierre. Pour le monde gréco-romain, c’est le déroulement de la vie, aboutissant au monde des morts, pour les chrétiens au contraire l’aboutissement, c’est le paradis.

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Sans tomber dans l’ésotérisme _ Gravés sur le sol, les labyrinthes sont la signature de confréries initiatiques de constructeurs, expliquant la présence de leurs noms. A Amiens, les portraits de l’évêque et des trois architectes sont incrustés dans la dalle centrale en marbre blanc.

A Chartres, il est curieux de constater que le diamètre du labyrinthe est à peu de chose près égal au diamètre de la rose occidentale. La distance du centre au mur de la façade est voisine de la distance du sol au centre de la rose. Une ligne imaginaire joignant le centre de la rose au centre du labyrinthe serait l’hypoténuse d’un triangle remarquable à la fois rectangle et isocèle…

On retrouve régulièrement les nombres 3 (symbolique de l’esprit), 4 (celui de la matière) et le chiffre 7 (le centre est en face des piles qui divisent les sept travées de la nef en 4+3, il y a également 4 travées dans le coeur et trois dans chaque bras du transept).

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Jean-François Rey : « Les spécialistes n’ont pas fait leurs calculs »

356 – L’avenant 8 ne fait pas l’unanimité parmi les médecins. Certains spécialistes en particulier ne comprennent pas qu’en le signant, les syndicats médicaux aient entériné des baisses de tarifs. Que leur répondez-vous ? _ Jean-François Rey : Je sais bien que tous les spécialistes qui font de l’imagerie, et notamment les cardiologues, sont très mécontents des baisses de tarifs prévues. Mais à cet égard, l’avenant 8 n’est que le vecteur du PLFSS 2013 qui instaure ces baisses. Je conçois parfaitement que la pilule soit difficile à passer, mais c’est une pilule gouvernementale, pas conventionnelle ! C’est aux parlementaires qui votent le PLFSS qu’ils doivent s’adresser. J’ajoute que nous avons bataillé pour obtenir que ces baisses de tarifs soient étalées sur trois ans et qu’elles n’interviennent pas immédiatement dans leur totalité.

Le contrat d’accès aux soins laisse également sceptique une bonne part des médecins, qui considèrent qu’il n’est pas si attractif que cela. Ont-ils tort ou raison de penser ainsi ? _ J.-F. Rey: Je tiens tout d’abord a souligner que le secteur 2 est protégé : l’avenant que nous avons signé ne menace en rien les praticiens de ce secteur qui l’utilisent de manière raisonnable. Quant à son attractivité, elle sera bien réelle. Je crois que beaucoup de spécialistes de secteur 2 qui critiquent le contrat d’accès aux soins n’ont pas fait leurs calculs. Les médecins qui opteront pour le contrat d’accès aux soins s’engageront à ne pas dépasser pendant les trois ans de la durée du contrat le taux moyen de leurs dépassements constaté sur l’année 2012, année de référence. Mais ce taux de dépassement ne sera plus calculé sur 23 euros, mais sur 28 euros, puisque les adhérents au contrat bénéficieront d’un tarif de base de 28 euros au lieu de 23 euros. Ce contrat sera financièrement attractif. Mais au-delà de cet aspect, cet accord va nous remettre en cohérence avec le serment d’Hippocrate et les patients. J’ajoute que chaque année de la durée du contrat, le médecin peut le dénoncer s’il n’est pas satisfait.

Je crois que lorsqu’on aura largement expliqué ce contrat aux médecins, ils s’apercevront qu’il est avantageux. D’ailleurs, je fais remarquer que certaines réactions, celle du CISS notamment, dénoncent cet accord parce que selon eux, il favorise beaucoup les médecins.

Parmi les critères qui permettront aux commissions paritaires régionales d’apprécier le caractère abusif ou non de certains dépassements, la prise en compte des « niveaux d’expertise et de compétence » ne risque-t-il pas de favoriser les hospitalo-universitaires chez qui l’on constate les dépassements les plus outranciers ? _ J.-F. Rey : Non, car il n’est plus question dans l’avenant 8 que nous avons signé des titres et travaux, mais de niveau d’expertise et de compétences, deux notions qui ne sont pas l’exclusive des hospitalo-universitaires, mais concernent également les médecins libéraux à travers la formation, l’enseignement, la recherche, etc. La version définitive de l’avenant 8 respecte l’équité entre tous les médecins.(gallery)




Avenant 8 : Christian Ziccarelli (SNSMCV) « Une forfaitisation rampante »

356 – Le Syndicat national des spécialistes des maladies du coeur et des vaisseaux a violemment dénoncé la signature de l’avenant 8. Pourquoi ?

Christian Ziccarelli : La première raison de notre colère est la révision à la baisse du tarif de nombreux actes, d’imagerie notamment. Ces baisses de tarif concernent 30 % des cardiologues. Cette baisse est de 7,5 % sur trois ans, mais en réalité, elle sera de 12 % si l’on prend en compte l’augmentation du coût de la vie. Tous les cardiologues interventionnels sont également concernés par cette baisse de 12 % sur trois ans. Nous sommes d’autant plus ulcérés qu’en contrepartie l’avenant n’apporte aucune revalorisation des actes de secteur 1.

Vous dénoncez des changements dans le mode de rémunération. Etes-vous opposé à la diversification de la rémunération des médecins libéraux ?

Ch. Z. : Non, mais nous estimons que la négociation a dépassé son objectif en remettant profondément en cause le mode de rémunération des médecins à honoraires conventionnés. Certes, le paiement à l’acte reste encore majoritaire, mais nous assistons à une véritable forfaitisation rampante, avec l’introduction de plus en plus de forfaits. Par exemple, la majoration de 5 euros pour la consultation des plus de 80 ans est un artifice ; dans la mesure où cette majoration sera payée chaque trimestre, c’est un forfait déguisé en majoration. Si l’évolution de la médecine rend nécessaire une adaptation profonde du paiement à l’acte et l’émergence des nouveaux modes de rémunération, ce ne peut et ne doit se faire dans le cadre d’un avenant, mais par une réflexion globale sur le parcours de soins et la prise en charge des pathologies chroniques entre les professionnels de santé et l’Assurance Maladie.




Avenant 8 : pour les spécialistes, le compte n’est pas bon

356 – A l’issue d’un marathon de 21 heures et après un appel téléphonique de la ministre de la Santé et des Affaires sociales, l’ultime réunion des partenaires conventionnels a finalement vu la signature d’un relevé de conclusion par quatre syndicats, CSMF, SML, FMF et Le Bloc). Une belle unanimité qui n’a pas résisté à l’examen du texte par les assemblées générales des différents syndicats. Au final, seuls la CSMF, le SML et MG France ont signé l’avenant 8.

D’abord pour les généralistes _ Pour la centrale présidée par Claude Leicher, on voit bien l’intérêt qu’elle avait à le faire : les revalorisations du secteur 1 instaurées par l’avenant 8 concernent en premier lieu les généralistes. La première prévoit une rémunération forfaitaire trimestrielle de 5 euros par consultation destinée aux personnes âgées. La deuxième concerne une consultation (ou visite) de suivi de sortie d’hospitalisation en court séjour (MCO ou psychiatrie) des patients à forte comorbidité rémunérée 2 C. La troisième revalorisation passe par la création d’une consultation longue et complexe de suivi des patients insuffisants cardiaques après une hospitalisation pour une décompensation de leur affection. Les médecins correspondants concernés – psychiatres et cardiologues – « pourront réaliser les consultations dans le cadre du parcours de soins coordonnés », autrement dit après passage obligatoire par le généraliste. Ces deux consultations de suivi, qui seront mises en oeuvre le 1er juillet prochain, sont accessibles aux médecins de secteur 1 et à ceux de secteur 2 qui adhèreront au contrat d’accès aux soins. Enfin, le forfait médecin traitant limité jusqu’à présent aux patients en ALD sera étendu à l’ensemble de la patientèle.

Ce contrat d’accès aux soins, nouvel avatar de feu le secteur optionnel, est ouvert aux praticiens du secteur 2 ainsi qu’aux anciens chefs de clinique et assimilés bloqués en secteur 1. D’une durée de trois ans (mais pouvant être dénoncé par le praticien chaque année), il engage le médecin qui y souscrit à respecter un pourcentage d’actes aux tarifs opposables égal ou supérieur à celui constaté en 2012, année de référence, ainsi que le taux de dépassements constaté en 2012 « recalculé », c’est-à-dire calculé sur la base de remboursement – supérieur – des tarifs de secteur 1. Là se trouve l’intérêt financier du contrat, selon les signataires de l’avenant (voir par ailleurs l’entretien avec Jean-François Rey).

Un bras de fer avec le Gouvernement _ L’autre avantage réside dans la prise en charge par l’Assurance Maladie des charges sociales du médecin pour le pourcentage d’actes pratiqués aux tarifs opposables. Les médecins opposants à l’avenant 8 n’y voient pourtant pas d’intérêt, d’autant que le taux de 150 % fixant le seuil à partir duquel un dépassement peut être jugé excessif et donc passible de sanction, bien que présenté comme un indicateur parmi d’autres, leur semble un couperet dangereux pour nombre de spécialistes. Si l’on ajoute à cela les baisses de tarifs, notamment en imagerie médicale, entérinées par l’avenant, les spécialistes libéraux, et singulièrement ceux du secteur 1, ne sont certes pas les gagnants de cet accord.

Nombre d’entre eux sont descendus dans la rue pour manifester leur colère, engageant ainsi un bras de fer avec le Gouvernement, dont il n’est pas sûr qu’ils sortent vainqueurs en ces temps de crise économique générale où, faute d’argent pour tout le monde, les revalorisations des uns sonnent les baisses de tarifs des autres.




Coeur et anesthésie

356 – Qu’on en juge : les deux auteurs, Pierre Coriat et Yannick Le Manach, anesthésistes réanimateurs eux-mêmes, se sont entourés, pour rédiger ce traité, de pas moins de 95 rédacteurs, dont 70 anesthésistes-réanimateurs, plusieurs gériatres, des chirurgiens, des pharmacologues, et seulement 2 cardiologues ou du moins recensés comme tels.

A titre d’exemples, le chapitre sur les statines est rédigé par des anesthésistes- réanimateurs, comme celui qui concerne les antiarythmiques, ou même la place des examens complémentaires, ou (mieux encore) celui qui a trait aux techniques ultrasonores (pour parler clair à l’échographie cardiaque ou vasculaire) pour lesquelles l’auteur regrette fermement qu’elles soient vues comme « l’apanage » des cardiologues ou radiologues et demande que la formation à ces techniques soit intégrée au cursus de tout anesthésiste-réanimateur en formation, y compris (tant qu’on y est !) pour dépister d’éventuelles lésions suggérant une endocardite…

Voilà qui devrait faire plaisir au Syndicat des cardiologues qui désespère de voir aboutir un jour sa proposition de former des « sonographers », ou plus précisément de créer un métier de techniciens en cardiologie ; grâce aux anesthésistes, il devrait pouvoir bientôt disposer de collaborateurs efficaces.

Cela dit, l’ouvrage ne manque pas d’intérêt. Sans perdre de temps en introduction, préface ou préambule, on entre tout de suite dans le vif du sujet : les premiers chapitres abordent les modifications hémodynamiques de la période opératoire induites par l’anesthésie générale ou régionale, par la coeliochirurgie, et ses implications sur le monitorage circulatoire, le remplissage vasculaire et l’échographie.

Viennent ensuite les interactions entre médicaments cardiovasculaires et anesthésie : tous les produits ou presque sont abordés, y compris dans la prévention de la maladie thromboembolique veineuse. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’un chapitre entier est consacré à la réduction du risque de l’opéré par l’utilisation périopératoire de l’ivabradine, que l’auteur recommande d’utiliser sur des arguments sans doute fondés, mais qui lui sont personnels puisque, sauf erreur, ils ne semblent pas étayés par des études publiées ou une AMM adaptée.

Les chapitres suivants se veulent tout à fait pragmatiques et concernent l’évaluation préopératoire du risque cardiaque, avec un chapitre que le cardiologue clinicien étudiera d’un peu plus près puisqu’il s’intéresse aux indications de l’électrocardiogramme qui sont d’ailleurs abordées avec précision, sérieux et documentation exhaustive (49 références bibliographiques).

Les deux dernières parties de l’ouvrage sont particulièrement importantes, détaillant les pathologies et complications cardiaques de l’opéré ainsi que leur prise en charge. Il est même question du syndrome de Tako-Tsubo qui serait sur le point de devenir « la » nouvelle préoccupation de l’anesthésiste…

Alors, en définitive : à lire ? _ Oui, certainement, par les anesthésistes qui y puiseront une source importante d’informations théoriques et pratiques de qualité. Et par les cardiologues ? Sans doute aussi, même si certains chapitres sont susceptibles de leur donner quelques démangeaisons.

Coeur et anesthésie _ Auteurs : Pierre Coriat et Yannick Le Manach _ Editeur : Arnette _ Pagination : 846 pages _ Prix : Environ 75,00 €(gallery)




Sport, exercice et cardiologie

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Une signature inacceptable !

356 – Le SML, la CSMF et MG France viennent d’apposer leur signature sur l’avenant n°8. Si celle de MG France est à la limite compréhensible, le blanc-seing des deux autres syndicats signataires pose plus d’interrogations que de réponses. Le Syndicat des cardiologues s’est, quant à lui, fortement opposé à cet accord, qu’il a qualifié « de dupes ». La cardiologie interventionnelle et les 30 % d’entre nous qui pratiquent l’échographie vasculaire voient le tarif de leurs actes diminué de façon notable sur 3 ans à partir du 1er juillet 2013. Sans tenir compte de la progression du coût de la vie sur la même période, les forfaits d’imagerie de la cardiologie interventionnelle seront décotés de 12 % et les actes d’échographie vasculaire de 7,5 %. Pour quelles contreparties ? Des miettes distribuées avec parcimonie ! Un forfait déguisé de 5 euros sur tous les actes réalisés chez les patients de plus 85 ans à partir du 1er juillet 2013, et chez les plus de 80 ans à partir du 1er juillet 2014, versé trimestriellement. Et c’est tout pour le secteur 1 ! Quant aux cardiologues en secteur 2 auront-ils intérêt à prendre le contrat d’accès aux soins ? Je leur conseille fort de prendre leur calculette. En effet le taux autorisé de dépassement sera calculé sur la moyenne de leur dépassement en 2012 et recalculé en fonction du taux de remboursement des actes en secteur 1. Un certain taux d’actes sera à effectuer en secteur opposable. C’est sur cette seule partie que 2/3 de leurs charges sociales seront prises en charge par l’Assurance Maladie. Implicitement les dépassements seront tolérés jusqu’à 150 %. Ce contrat ne pourra être accessible qu’à partir du 1er juillet 2013 si, et seulement si, au moins 30 % des médecins en secteurs 2 y souscrivent. Difficile d’adhérer au triomphalisme affiché par certains syndicats signataires ! En fait la victoire médiatique revient à notre ministre de la Santé, Marisol Touraine qui a réussi à imposer cet accord à « l’arraché ».

Madame la Ministre, attention à ne pas faire disparaître tout un pan de la cardiologie française ; même si on a souvent l’impression que vous en doutez, les cardiologues libéraux accomplissent un travail considérable en lien avec leurs collègues hospitaliers. Je voudrais attirer votre attention sur le comportement de certains Directeurs d’ARS. Menacer de fermeture la seule clinique pratiquant la chirurgie cardiaque en Lorraine sous prétexte qu’il faut rentabiliser le CHU voisin, menacer de supprimer les autorisations de cardiologie interventionnelle sous des prétextes futiles, sont préjudiciable à l’ensemble de la profession.

Madame la Ministre, le Syndicat des cardiologues souhaite vous rencontrer pour vous exposer les difficultés auxquelles se confronte aujourd’hui la cardiologie libérale.




Château de la Tuilerie Eole Blanc 2008 – Costières de Nîmes – Chantal Comte 80900 Nîmes

Le Château de la Tuilerie est un domaine de 70 hectares, complanté pour seulement 10 % en blanc, sis sur la partie la plus ancienne de la formation géologique de la Costière constituée par plusieurs mètres d’alluvions caillouteuses drainées par le Rhône au quaternaire sur la marne argileuse du pliocène. Le sol est pauvre, acide, filtrant, recouvert de sable et galets roulés qui confèrent aux vins, finesse et élégance. Les sous-sols argileux font pousser des vignes, dont l’alimentation en eau et minéraux est limitée contribuant à la faiblesse des rendements et la production de grappes à petits grains, et ainsi de vins concentrés et aromatiques. L’exposition au nord, la ventilation par le mistral sont favorables au maintien d’une bonne acidité et à la synthèse des anthocyanes pour les rouges.

Au Château de la Tuilerie, enherbement, ébourgeonnage, effeuillage sur une taille en cordons de Royat entraînent des rendements très faibles : 20 hl/ha pour la cuvée Eole. L’agriculture est raisonnée limitant les intrants chimiques au strict nécessaire, mais Chantal Comte, l’experte propriétaire, se méfie beaucoup de la mode actuelle pour le bio, et notamment de l’utilisation de métaux lourds, tel le cuivre dans la bouillie bordelaise. La date de la récolte est scientifiquement déterminée par les degrés de maturité alcoolique, et surtout phénolique, et par la qualité des pépins. Les vendanges, là aussi au rebours des tendances actuelles, sont effectuées par une machine perfectionnée permettant un tri extrêmement sélectif des meilleurs raisins, si bien que la table de tri n’est presque jamais utilisée.

Pour la cuvée Eole Blanc, les différents lots, réceptionnés par gravité, sont pressurés pneumatiquement et ébourbés pendant 24 à 48 h à 10 °. La fermentation alcoolique s’opère en fûts neufs à température constante de 18 °, puis l’élevage s’étend pendant au minimum 1 an en barriques de chêne neuves de 220 litres avec un batonnage manuel régulier, pour remettre les lies en suspension et apporter gras et complexité. Les bouteilles, après collage et très légère filtration, mûrissent en cave pendant 6 mois avant commercialisation. La cuvée Eole Blanc n’est produite que dans les grands millésimes, où la qualité des raisins est impeccable, en très faible quantité, environ 4 000 bouteilles, ce qui justifie son prix élevé pour l’appellation. Elle résulte d’un assemblage savant, variable d’une année à l’autre, déterminé par la viticultrice, pour l’année 2008 : viognier 20 %, rolle 10 %, grenache blanc, clairette, roussanne, marsanne.

Son nom aérien rend hommage à Clément Ader, grand-oncle de Chantal Comte, pionnier de l’aviation, qui avait baptisé sa première machine volante Eole, dieu des vents dans la mythologie grecque, et ce n’est pas un hasard, si cette cuvée Eole prenait son envol en 1989, date anniversaire du centenaire de l’aviation !

Chantal Comte a réhabilité, par ce vin d’exception, classé en 2007 par la revue Decanter, parmi les 100 plus grands vins blancs du monde, une bouteille ancienne en verre noir fabriquée au 18e siècle, dénommée « arlésienne ».

Parée d’une robe limpide et brillante jaune or avec des reflets verts, cette cuvée Eole Blanc 2008 exhale de doux parfums de pamplemousse, de bergamotes et de fruits exotiques : ananas, mangue, fruit de la passion, avec quelques notes miellées. La bouche voluptueuse, séveuse, glycérinée exprime, sur une bonne acidité et fraîcheur, une attaque franche sur des notes de pêche blanche, de jasmin et de vanille se poursuivant avec des arômes de brioche toastée et d’épices sur une longueur interminable.

Surprenant à plus d’un titre, ce vin est d’une complexité défiant l’analyse organoleptique classique et, de plus, ses arômes et fragrances se modifi ent continuellement au cours de la dégustation et en fonction des mets proposés. Ainsi, les accords culinaires avec ce vin opulent, rond, mais complexe, peuvent prêter à controverse. Chantal Comte estime qu’il est le compagnon idéal des truffes, de la crème, des champignons et le recommande sur un carpaccio de foie gras, un homard grillé, une belle volaille fermière aux champignons des bois. Personnellement, je suis influencé par les flaveurs méditerranéennes de cet Eole Blanc qui respire les vacances et le marierai volontiers avec des coquilles Saint-Jacques à la provençale, des ravioles aux truffes, mais il ne sera pas heurté par un aïoli ou une bouillabaisse qu’au contraire, il caresse et enveloppe. Il épousera, sans hésitation, des fromages de chèvre affinés et tous desserts à base d’amande et de vanille : crème brûlée, galette des rois, pithiviers.

Mais laissons conclure Chantal Comte : « S’il est culture et mémoire, inventons le vin chaque jour ! S’il est fait d’amour, d’inquiétude et de soins attentifs, il est d’abord source de plaisir ! »




La chapelle Foujita – Reims

355 – Christian Ziccarelli – Une église à nef unique _ Il est vrai que l’extérieur de cette chapelle n’attire pas l‘oeil. Sa construction datant de 1965 est d’inspiration romane. En 1959, à la suite de la conversion de l’artiste au catholicisme et de son ambition à imiter les fresquistes de la Renaissance, son parrain René Lalou, président de la maison de champagne Mumm, lui offre la possibilité de réaliser son rêve : un ensemble religieux autonome. Les travaux débutent sous la direction de l’architecte Maurice Clauzier, les vitraux seront réalisés par le maître verrier Charles Marq, les ferronneries, les sculptures par Maxime Chiquet et Les Frères André. Tout a été conçu par l’artiste, jusqu’à la porte donnant sur la sacristie. Foujita, du mois de juin au mois d’août 1966, alors âgé de quatre-vingts ans, au crépuscule de sa vie, réalise avec une grande virtuosité, et pour la première fois de sa vie, une fresque de deux cents mètres carrés environ. La chapelle dédiée à Notre- Dame-de-la-Paix est bénie le 1er octobre 1966. René Lalou l’offre à la Ville de Reims le 16 octobre 1966. Tsuguharu Fujita et sa femme Marie-Madeleine Kimiyo y reposent ensemble depuis 2009.

Un décor original classique _ Le décor fut réalisé aux pinceaux et non à la brosse, rapidement sur un ciment spécial non sec. Les scènes de la vie du Christ sont disposées volontairement de façon non chronologique.

En entrant à droite on voit successivement, la Nativité, l’enfant Jésus éclairé par le rayon de l’Etoile, le portement de croix, la Cène dans la voûte en cul de four du transept droit et la Résurrection. Au fond de la nef dans l’abside centrale, se succèdent Dieu le Père en majesté, la Visitation, Notre-Dame-de- la-Paix (Kimiyo, sa femme, est représentée à genoux), puis à gauche, au-dessus de la porte de la Sacristie, la pêche miraculeuse, une curieuse Notre-Dame-des-Vendanges (dans un paysage où se dressent la Cathédrale de Reims et la Basilique Saint-Rémi) et les Sept Péchés Capitaux. Sur le mur de gauche, le Christ bénit les malades, puis on peut voir la Descente de Croix et le Baptême du Christ. Enfin, au-dessus de la porte d’entrée, la Crucifixion, la Vierge jeune mère est en blanc, la Vierge de douleur en noir. L’iconographie reprend celle de l’art occidental.

Foujita se représente et fait le portrait de René Lalou, le donateur, selon la tradition des artistes de la Renaissance. Cette fresque est surprenante à plus d’un titre. Foujita allie sa propre tradition picturale, privilégiant le trait, à celle de l’art sacré de l’Occident. Tel un rébus on y retrouve une multitude de petits détails « étranges parfois angoissants, des créatures hybrides, fauves et animales, rappelant peut-être Diego Rivera ou le Douanier Rousseau, des corps et des pendus calcinés, des monstres et des ossements suggérant pour certains observateurs de l’époque les horreurs nucléaires d’Hiroshima et de Nagasaki ». Les références à Bruegel, Botticelli, Dürer ne peuvent échapper à l’observateur et montrent à quel point Foujita recherchait avec obsession la synthèse entre le passé et le présent.

Léonard Foujita (1886-1968) _ Né au Japon, à Tokyo, fils du général Fujita de l’état major impérial, ancien élève de l’Ecole des Beaux-Arts de Tokyo, Tsuguharu Fujita arrive à Paris en 1913. Très rapidement, il devient célèbre, fréquente les artistes de l’Ecole de Paris à Montparnasse (Modigliani, Soutine, Zadkine, Rivera…). Peu connu des Français, il est pourtant l’une des figures marquantes de l’entre-deux-guerres et de ses années folles. Il fréquente le Louvre, s’imprègne de l’art européen, mais reste très attaché à sa culture nippone qui transparaît en permanence dans sa peinture. Dès 1921, il est renommé pour ses tableaux de nus féminins (« Youki, déesse de la neige »). Le Cercle Interallié et la Maison du Japon lui passent commande, il expose en 1928 à la Galerie Bernheim, puis au musée du Jeu de Paume, deux diptyques intitulés « Combats » et « Grande Composition » qui firent sensation. Il découvre dans la décennie suivante les fresques murales de Diego Rivera en Amérique Latine et s’inscrit dans la grande tradition historique. Il se réinstalle au Japon où il reste jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. De retour en France en 1950, il se consacre désormais à l’art sacré européen et notamment il illustre, pour l’éditeur Foret, l’Apocalypse de Saint-Jean avec Dali, Fini, Mathieu Zadkine, Trémois. Le 18 juin 1959 visitant la basilique Saint-Rémi avec son ami Georges Prades (ancien vice-président du Conseil municipal de Paris), transfiguré, il décide de devenir chrétien, mais souhaite être baptisé dans la cathédrale de Reims. Ce voeu sera accompli en novembre de la même année en présence d’une foule de journalistes et de photographes. Il prend le prénom de Léonard en référence à Léonard de Vinci dont il est un grand admirateur. Les dernières années de sa vie sont consacrées à la peinture religieuse, multipliant les madones, pour réaliser le chef-d’oeuvre monumental que nous pouvons admirer à la chapelle Notre- Dame-de-la-Paix à Reims. Foujita est également célèbre pour ses dessins et tableaux de chats qui l’ont accompagné durant toute son activité. Il s’éteint à Zurich le 29 janvier 1968. Outre Reims, vous pouvez le découvrir à Villiers- le-Bâcle où se trouve sa maison atelier aux confins des départements de l’Essonne et des Yvelines. ■




Prescription de génériques : Les médecins sous pression

355 – Le recours aux médicaments génériques marque un net recul et cela inquiète la CNAM. En 2011, alors que l’objectif tous régimes était d’atteindre un taux de délivrance dans le répertoire de 80 %, ce taux s’établissait à 76,2 % à la fi n de l’année, limitant ainsi l’économie à 16 millions au lieu des 40 millions escomptés. Et en avril de cette année, le taux de substitution est tombé à 72 % quand l’objectif fi xé vise 85 % de substitutions. L’Assurance Maladie est donc passée à l’action.

La punition des nantis _ Après un premier accord signé en avril dernier avec les syndicats de pharmaciens, un second accord a été passé en juillet selon lequel les patients qui refusent les médicaments génériques proposés en pharmacie ne peuvent plus bénéficier du tiers payant et doivent faire l’avance de frais. La « punition » concerne tous les patients, y compris ceux qui relèvent de l’ALD, de la CMUC, de l’AME et ceux pris en charge au titre d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. Exception faite, bien sûr, des prescriptions portant la mention « non substituable » manuscrite du médecin.

Ce cran supplémentaire dans la politique volontariste de l’Assurance Maladie à l’égard des génériques n’a pas ravi les professionnels de santé. Certains pharmaciens, par la voix de l’Union Nationale des Pharmaciens de France (UNPF, 12 % des pharmaciens) se sont inquiétés de « grandes différences de traitement » constatées sur le terrain « selon les caisses primaires d’Assurance Maladie ». C’est vrai que certaines caisses ont adopté des mesures radicales. Ainsi, une pharmacienne des Deux-Sèvres s’est vue déconventionnée cet été pendant un mois pour n’avoir délivré que 50 % des génériques en 2011 alors que le CPAM lui avait demandé d’en délivrer 60 %. Selon l’Assurance Maladie, ce genre de sanction est rarissime. Certes, mais il n’empêche que d’autres caisses ont aussi durci le ton ; dans les Bouches-du-Rhône, les trois régimes d’Assurance Maladie et les syndicats de pharmaciens mènent un campagne active auprès des médecins et du grand public. Les médecins font cependant observer que la délivrance de génériques n’est pas toujours évidente auprès de certaines populations, en particulier les personnes âgées.

Un problème de qualité _ Pour sa défense, la pharmacienne des Deux-Sèvres a déclaré n’être pas opposée aux génériques, mais « pour des génériques de qualité ». Qualité, le mot est dit et de plus en plus nombreuses des voix s’élèvent pour contester la stricte équivalence entre produits princeps et génériques. La dernière en date est celle du Collectif Interassociatif Sur la Santé (CISS) qui, dans une lettre ouverte à Marisol Touraine appelle la ministre des Affaires sociales et de la Santé à se saisir du problème de la bioéquivalence des génériques qui « soulève des interrogations parmi les patients ». Le CISS se dit « convaincu que l’existence des génériques et leur substitution aux médicaments de spécialité sont essentielles au maintien de notre système d’Assurance Maladie » mais considère que la réglementation française ne garantit pas la stricte équivalence et dénonce l’autorisation en France d’un médicament essentiellement similaire comme générique au lieu d’exiger un autogénérique fabriqué par le laboratoire qui commercialise le princeps. Le CISS demande donc la tenue d’une table ronde « de haut niveau, en situation de recommander les adaptations nécessaires des règles de nature à garantir la bioéquivalence du générique par rapport au princeps ». ■

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Cœur et travail, ou comment concilier maladie cardiaque et activité professionnelle

355 – Quatre présidents de sociétés savantes ont assuré la préface de l’ouvrage dont le sous-titre « Comment concilier maladie cardiaque et activité professionnelle ? » affiche clairement la volonté des auteurs de s’insérer dans le concret.

De fait, ce livre fourmille d’informations inhabituelles, voire insolites, mais toujours pertinentes, qui améliorent notre culture générale tout en débouchant sur des applications éminemment pratiques :  Connaissez-vous par exemple « l’hypnose contemporaine » dans laquelle l’hypnothérapeute (eh oui !) « conduit le patient vers ses ressources intérieures engrammées dans sa mémoire » ? Savez-vous bien ce qu’est l’EMDR, cette technique qui consiste à faire « revivre au patient victime d’un événement traumatique la scène qui est l’origine de sa souffrance » ? Cela permettrait notamment au cardiologue de traiter le syndrome de stress post-traumatique après une chirurgie cardiaque ou un séjour en réanimation. _ Comment considérez-vous le « coping », ce processus d’adaptation qui permet d’affronter plus sereinement les situations à risque lors de la reprise du travail ?

La faute à l’employeur. Et, last but not least, que penser de la faute inexcusable de l’employeur ? Ce n’est pas un concept fumeux ! Cette faute peut être engagée dès que l’on démontre que l’employeur n’a pas eu conscience du danger encouru par l’un de ses salariés et n’a pas engagé de mesure propre à faire face au risque. C’est ainsi qu’un IDM dont a été victime le rédacteur en chef d’une société de presse (bigre !), lourdement surchargé par son activité professionnelle, a été reconnu comme accident du travail.

Les différentes situations rencontrées. Pour autant cet ouvrage n’a rien de décousu ; il est construit de façon très didactique en plusieurs parties qui abordent les différentes situations rencontrées en pathologie cardiovasculaire.

Le premier thème traite des urgences CV survenues pendant l’activité professionnelle, en soulignant à chaque fois le rôle du médecin du travail qui se doit d’assurer le premier contact médical pour administrer les premiers soins et orienter le patient.

Le chapitre consacré à « la mort subite en entreprise » est à cet égard exemplaire : l’arrêt cardiocirculatoire, rare mais toujours possible sur le lieu du travail, implique évidemment une parfaite connaissance de la chaîne de survie par le médecin du travail ; de même, le rôle et les devoirs de l’entreprise y sont précisés, le Code du travail lui assignant une obligation de sécurité de résultat (matériel de premier secours, défibrillateur et autres).

Les deux parties suivantes traitent du dépistage des pathologies cardiovasculaires par la médecine du travail, de leur prévention et de l’installation d’une prise en charge psychosociale en insistant sur l’importance de la relation stress, coeur et travail.

La partie du cardiologue. Le cardiologue se sentira plus particulièrement concerné par les parties qui traitent de la reprise de l’activité professionnelle du patient cardiaque, avec les aspects légaux qui visent à déterminer l’aptitude, l’inaptitude, la notion de handicap et de pénibilité.

Il trouvera également une source d’informations essentielles sur les chapitres consacrés aux situations particulières du travail à la chaleur, au froid, en altitude ou exposé aux rayonnements électromagnétiques.

En somme, cet ouvrage pourrait rapidement devenir incontournable pour tous ceux qu’intéresse la collaboration indispensable entre le cardiologue et le médecin du travail dans toutes les situations de prévention cardiovasculaire dans le monde du travail comme de reprise d’une activité professionnelle après un accident cardiaque.

A lire… et à conserver dans sa bibliothèque. ■

Cœur et travail _ Auteurs : Bernard Pierre – collectif _ Editeur : Frison-Roche _ Caractéristiques : 387 pages _ Prix : 44,00 €




Imagerie médicale : les pétaoctets dans le nuage

355 – En 2008, l’ARH d’Ile-de-France ouvrait une nouvelle ère dans l’e-santé et la transmission de données en lançant un cloud computing ([Le cloud computing, qui se trouve dans tous les secteurs d’activités, est un concept qui consiste à déporter sur des serveurs distants des stockages et des traitements informatiques traditionnellement localisés sur des serveurs locaux ou sur le poste de l’utilisateur.)]. Mettant à la disposition des différents intervenants, qu’ils soient à l’hôpital, en établissements de santé ou en cabinet de ville, un gigantesque archivage, appelé RSF (Région Sans Film) ou Cloud- PACS ([PACS : Picture Archiving and Communication System, système d’information permettant de traiter et interpréter les images médicales numériques.)], l’ARH répondait à la dématérialisation de l’imagerie médicale. Les médecins devront s’habituer à ne plus réclamer de clichés, mais de les consulter sur écran.

Cette architecture « machine to machine » transmet directement les images dans le cloud et permet de consulter dans un colossal stockage d’imagerie numérique. Et nous voici directement en pleine ère du pétaoctet ([1 pétaoctet = 1 024 téraoctets. 1 téraoctet = 1024 gigaoctets.)], une quantité d’informations qu’il va falloir – et savoir – traiter quotidiennement (Google traite plus de 20 pétaoctets de données par jour) alors qu’on estime à environ 50 pétaoctets la capacité nécessaire à contenir l’intégralité des écrits de l’humanité depuis sa création.

Du pétaoctet au smartphone _ Ce développement numérique poursuit naturellement sa route des terminaux informatiques traditionnels (ordinateur de bureau ou portable) vers les smartphones et autres tablettes. Les professionnels de santé portent un intérêt grandissant pour ces outils, et l’on sait qu’ils vont jouer un grand rôle dans l’avenir. Certaines applications transforment l’iPad en terminal d’imagerie médicale, une révolution dans un secteur particulièrement réglementé. La Food and Drug Administration (FDA) a homologué ([L’homologation se limite à une utilisation hors diagnostic.)] plusieurs applications pour iPad et iPhone, et ce grâce aux nouveaux écrans Rétina qui permettent de se rapprocher des écrans plus sophistiqués, mais avec une facilité déconcertante. ■

LES CHIFFRES

_ ■ 16 500 IRM par semaine sont réalisés dans les hôpitaux les plus importants. _ ■ Une IRM du cerveau représente environ 4 go de données. _ ■ Une IRM 3D pèse environ 16 go de données. _ ■ 700 pétaoctets sont potentiellement à stocker toutes les semaines.

AirStrip Cardiology _ Air Strip Cardiology est une application qui permet de contrôler l’état cardiaque de votre patient directement sur votre iPhone ou iPad de manière quasi instantanée. Un monitoring distance en quelque sorte. _ En plus de proposer la lecture de l’ECG, l’app garde en mémoire l’historique permettant une prise de décision clinique. Elle permet également d’observer fi nement les diagrammes et prendre des mesures. De cette manière des différences infimes mais importantes peuvent être repérées. Cette application a reçu le certificat CE l’autorisation de commercialisation dans la Communauté européenne.

Médicaments 2012 _ Pour ceux qui n’ont pas encore le Vidal dans leur poche ou qui sont réfractaire à payer les 29,99 euros annuels pour se le procurer, il existe une alternative intéressante établie sur la base de données de l’Afssaps et de l’EMA. _ D’une ergonomie simple et intuitive, elle présente le Résumé des Caractéristiques des Produits, les équivalents référents/génériques, la recherche d’interactions médicamenteuses, et différents outils adaptés. L’application ne propose pas de parapharmacie ni de recherche par indication.(gallery)




Insuffisance cardiaque : prise en charge… insuffisante

Contrairement aux recommandations en vigueur, 40 % des patients souffrant d’insuffisance cardiaque et pris en charge au titre de l’ALD ne font pas l’objet d’un suivi annuel par un cardiologue. Ce sont les résultats d’une étude menée par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés en 2008 et qui a porté sur 154 000 patients en ALD([« Caractéristiques et trajet des insuffisants cardiaques du régime général », Points de repères n° 38, août 2012.)]. Au total, ce sont donc 53 00 insuffisants cardiaques qui n’ont pas vu de cardiologue et n’ont pas été hospitalisés pour une affection cardiovasculaire qui leur aurait permis d’en voir un, surtout des femmes. Pour l’immense majorité (96 %), ils ont consulté au moins une fois un médecin généraliste dans l’année, et 87 % ont vu leur médecin au moins quatre fois. Toutes causes confondues, la moyenne annuelle des consultations ou visites s’établit à 10,6.

Parallèlement à ce manque de suivi spécialiste, le rapport de la CNAMTS met en évidence également un respect insuffisant des recommandations en matière de traitement médicamenteux. En effet, dans 47 % des cas, les patients sont traités par un IEC, dans 44 % des cas par un bêtabloquant ; 68 % d’entre eux sont traités par un diurétique, 18 % par un antialdostérone et 28 % par un antagoniste de l’angiotensine (ARA2). Seuls 19 % des patients insuffisants cardiaques reçoivent la trithérapie recommandée diurétique-bêtabloquant-IEC. Les auteurs de l’étude constatent que cette proportion tombe à 11 % chez les malades de plus de 85 ans mais indiquent qu’ils souffrent souvent d’une insuffisance cardiaque à fonction systolique préservée. Chez les femmes, seules 14,6 % bénéficient de la trithérapie recommandée (contre 23 % pour les hommes). En outre, l’étude montre que des patients reçoivent parfois des traitements déconseillés. Ainsi, il a été prescrit à un quart d’entre eux des Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens (AINS) alors même qu’ils peuvent entraîner une rétention hydrosodée et aggraver la maladie voire augmenter la toxicité rénale lorsqu’il sont associés aux diurétiques, IEC et ARA2. De même, près d’un quart des patients considérés dans l’étude prend un inhibiteur calcique, non recommandé dans l’insuffisance cardiaque systolique.

Des conséquences sanitaires et économiques

Ce défaut de suivi et ces prescriptions non adaptées expliquent sans doute en grande partie que l’on n’ait pas atteint l’objectif 73 de la loi de santé publique de 2004 qui prévoyait de réduire d’au moins 25 % sur cinq ans les décompensations aiguës d’insuffisance cardiaque. Plus, le rapport de la CNAMTS cite les analyses de l’Institut de veille sanitaire qui font état d’une croissance de 35 % du nombre de séjours hospitaliers et de 26 % du taux brut d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque entre 1997 et 2008. Les conséquences ne sont pas seulement sanitaires, elles sont aussi économiques : représentant 63,4 % des remboursements (plus d’un milliard d’euros en 2007), les hospitalisations sont le premier poste de dépenses de l’Assurance Maladie pour les insuffisants cardiaques en ALD. Loin derrière viennent les remboursements des traitements pharmaceutiques (12,8 %), et encore plus loin, ceux des honoraires médicaux (6,4 %).

Très logiquement, les auteurs du rapport de la CNAMTS estiment en conclusion « qu’une partie des hospitalisations pourrait être évitée par une augmentation des prescriptions et du suivi conformes aux recommandations ainsi qu’une meilleure observance des règles hygiénodiététiques et des traitements par les patients », et recommande une meilleure diffusion des recommandations françaises et européennes, surtout en ce qui concerne les traitements médicamenteux « dont la prescription est particulièrement complexe ». ■




Trop c’est trop !

355 – L’idée, pour le moins intolérable et injurieuse, de vouloir baisser le tarif des actes de la cardiologie interventionnelle, non seulement pour les attribuer à ceux des spécialités n’ayant pas atteint leurs valeurs cibles, mais aussi pour revaloriser certains actes de la cardiologie clinique, est un « casus belli ». Toutes les spécialités ont le devoir de s’unir pour faire obstacle à de telles mesures. Ne pas respecter ses engagements est déshonorant, l’Assurance Maladie avait pourtant affi rmé, lors de la signature de la convention, qu’il n’y aurait plus d’actes perdants. Comment accepter cette nouvelle attaque alors que les cardiologues ont déjà subi de « plein fouet » la suppression de l’association d’un ECG/2 à l’échocardiographie. Le SNSMCV n’a pourtant pas démérité. En consentant à coopérer à l’élaboration de la rémunération sur objectifs de santé publique, il affi rme sa volonté de participer à l’amélioration de la pertinence des soins et à leur effi cience. Depuis la création de la CCAM, il n’y a eu aucune revalorisation du coût de la pratique, certains de nos actes ont été diminués. L’UNCAM l’a annoncé, il n’y aura pas de valorisation des actes techniques avant 2014, une situation devenue inacceptable. La volonté des pouvoirs publics est-elle de faire disparaître la médecine spécialiste libérale ?

A l’heure où j’écris ces lignes, la négociation sur l’encadrement du secteur 2 arrive à son point ultime. En l’absence d’accord, la Ministre devra légiférer. Les syndicats signataires, la CSMF, le SML, la FMF et MG France restent circonspects. Le SNSMCV ne donnera son aval que si deux conditions sont remplies : une revalorisation immédiate des actes du secteur 1, notamment du coût de la pratique et des tarifs inchangés pour les actes de la cardiologie interventionnelle.

Le PLFSS est en ce point démonstratif, la majorité des efforts fi nanciers est demandée à la médecine de ville, nos collègues radiologues et biologistes voient une nouvelle fois le tarif de leurs actes attaqué. La cardiologie interventionnelle risque d’être la prochaine sur la liste ! Bien que l’UFCV ait un savoir-faire reconnu sur l’éducation thérapeutique du patient insuffi sant cardiaque via sa plate-forme téléphonique, l’Assurance Maladie n’a pas jugé opportun de nous convier à participer à son futur projet sur le même sujet. La place du cardiologue libéral y est opaque. Pourtant, il est un maillon incontournable pour l’équilibrage du traitement de l’insuffi sant cardiaque.

Le paiement à l’acte va-t-il progressivement disparaître ? La forfaitisation gagne du terrain. Les bénéfi ciaires en seront essentiellement les structures ou équipes pluriprofessionnelles. Depuis plusieurs années, le SNSMCV vous incite à vous regrouper. Il devient urgent de le faire au sein de maisons pluridisciplinaires. Des avancées juridiques vous facilitent aujourd’hui leur création.




Finances de l’hôpital : le grand emprunt au secours de l’hôpital

355 – Les finances de l’hôpital public vont mal, on le sait. Poussés par les plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012, ils ont massivement investi pour se moderniser, mais se sont du même coup endettés : en dix ans, l’endettement hospitalier a triplé pour attendre aujourd’hui 24 milliards d’euros. Mais, outre qu’à ce stade la poursuite de l’endettement serait périlleuse, les banques rechignent de plus en plus à consentir des prêts aux hôpitaux jugeant le secteur hospitalier peu fi able. Les établissements ont donc souvent puisé sur leur budget de fonctionnement pour leurs investissements de modernisation, autrement dit sur ce qui leur vient de l’Assurance Maladie. Dans un rapport récent de sa Mission d’Evaluation et de Contrôle de la Sécurité Sociale (MECSS), le Sénat juge qu’il serait judicieux que l’Etat recoure aux ressources du grand emprunt pour les investissements hospitaliers.

Marisol Touraine a confirmé que c’était une piste sur laquelle le Gouvernement travaillait : « Nous réfléchissons à trouver des fonds qui ne soient pas ceux de la Sécurité Sociale, mais, par exemple, l’argent du grand emprunt ». La ministre chiffre les besoins d’investissement immobilier des hôpitaux dans les années à venir à environ 6 milliards d’euros. Selon le commissariat général à l’investissement, il reste actuellement 8 milliards d’euros à allouer dans le cadre du grand emprunt.

En attendant la décision Gouvernementale sur ce sujet, il reste à parer au plus urgent, c’est-à-dire à améliorer la trésorerie des établissements. Certains hôpitaux connaissent des fi ns de mois plus que difficiles. Pour ce faire, un arrêté paru à la fin du mois d’août vient modifier un précédent arrêté de janvier 2008 en avançant de cinq jours les versements de l’Assurance Maladie aux hôpitaux : désormais, 60 % de l’allocation mensuelle sera versée au 20e jour du mois au lieu du 25e jour, tandis que les 40 % restants seront toujours versés le 5e et le 15e jour du mois suivant. Cette mesure avait été demandée par la FHF, qui s’est également prononcée en faveur d’un « livret H », sur le modéèle du livret 4, et qui serait géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Dans son rapport, la MECSS du Sénat dit avoir pu « mettre en évidence des déterminants que les établissements mobilisent de façon privilégiée pour améliorer leurs résultats financiers, mais souligne que la qualité de soins est un priorité, la nonqualité constituant d’ailleurs « un gisement à exploiter ». En conséquence, le Sénat considère qu’il est « indispensable que les décideurs et en particulier les ARS accordent une même importance aux résultats sur la qualité qu’aux résultats financiers », et se doter pour cela « de véritables indicateurs de résultats et non pas seulement de moyens ou de procédures ». ■

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Système de soins : réguler par la qualité, le credo de la HAS

355 – « Nous souhaitons évoluer pour que la HAS ne soit plus perçue comme une institution en surplomb qui surveille l’état de l’art, mais pas ce qui se passe après », a déclaré Jean-Luc Harousseau. La HAS veut donc s’engager plus concrètement dans la régulation du système de soins à travers ses deux grandes missions, l’évaluation des produits de santé et l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins.

Une mission renforcée _ Concernant la première, Jean-Luc Harousseau estime qu’elle doit « aboutir à la gestion optimale du panier de soins ». En charge de certaines évaluations médico-économiques depuis 2008, la HAS a vu cette mission renforcée cette année par la loi de financement de la Sécurité Sociale qui lui a confi é plus spécifiquement l’évaluation médico-économique des produits de santé. Le décret d’application devrait sortir très prochainement. Dans ce domaine, le projet d’Indice Thérapeutique Relatif (ITR) élaboré par la HAS (voir Le Cardiologue n° 354) a été présenté à la Direction de la Sécurité Sociale et à la Direction générale de la santé, mais aucun calendrier d’entrée en vigueur n’a encore été établi. L’idée générale de ce nouveau dispositif est que « dans l’avenir, on ne parlera plus de SMR pour se focaliser sur l’ASMR renforcé, c’est-à-dire l’ITR. Aujourd’hui s’impose la nécessité d’évaluer ce qu’apporte un nouveau produit par comparaison avec ceux déjà sur le marché », commente Jean-Luc Harousseau.

Une certification dans les temps _ Pour ce qui est de sa mission d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, la HAS affiche une certaine satisfaction concernant particulièrement la certification des établissements et l’accréditation des médecins. Pour la première, la HAS est « dans les temps » pour achever à la fin 2014 la certification des 2 800 établissements de santé français. Quant à la seconde, 10 000 praticiens de spécialité à haut risque sont engagés à ce jour dans la démarche d’accréditation et 8 000 sont accrédités. « A l’avenir, nous souhaiterons que le travail effectué par ces professionnels engagés dans ce processus soit pris en compte pour le DPC, déclare Jean-Luc Harousseau. En outre, il nous paraît souhaitable que l’accréditation ne soit pas réservée à ces seuls spécialistes, mais élargie à d’autres, surtout à l’hôpital et de lier, à moyen terme, la certification des établissements et l’accréditation des professionnels de santé. »

L’autre versant de la mission d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins concerne l’organisation du parcours de soins « pour nous, un axe majeur pour l’avenir, souligne Jean- Luc Harousseau. Nous avons à peu près tous les outils pour élaborer un parcours de soins et l’implémenter sur le terrain. » Après la production de quatre guides récemment réactualisés, deux prochains auront trait à l’annonce d’une maladie chronique et aux soins palliatifs.

Quatre à six autres guides devraient voir le jour l’année prochaine. « On ne va pas décider du jour au lendemain que tel parcours de soins s’applique. Cela se fera progressivement », précise Jean-Luc Harousseau. Président de la Commission parcours de soins et maladies chroniques, Alain Cordier explique qu’il s’agit de « passer d’une logique d’expérimentation à une logique de prototype, avec banc d’essai auprès des professionnels de santé ».

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DMP : Progression chaotique et coûteuse

Lorsque le ministre Douste-Blazy annonça en 2003 que deux ans plus tard tous les Français auraient un dossier médical électronique – qui s’est d’abord appelé dossier médical partagé avant de devenir le dossier médical personnel – les gens les plus avisés savaient qu’il s’agissait là d’un pari irréalisable en si peu de temps. Les plus sceptiques pensaient même qu’il était irréalisable tout court compte tenu des obstacles à surmonter et des investissements financiers nécessaires, et faisaient remarquer qu’un tel dossier diffusé dans une population entière n’existait dans aucun pays.

Presque dix années plus tard, le DMP n’est toujours pas généralisé, mais les travaux préparatoires à son développement ont en revanche englouti déjà pas mal d’argent. C’est en substance ce que constate aujourd’hui la Cour des comptes. Dans un rapport établi à la demande de la demande de la commission des fi nances de l’Assemblée nationale, les magistrats de la rue Cambon additionnent le montant global des ressources directement et spécifiquement mobilisées pour le DMP de 2005 à 2011, le coût direct de dispositifs convergents, tels le dossier communicant en cancérologie ou le dossier pharmaceutique, et les dépenses engagées pour les dossiers patients informatisés à l’hôpital, pour un total qui se chiffre à un demi-milliard d’euros, assumé pour l’essentiel par l’Assurance Maladie.

Le rapport souligne à cet égard la difficulté de tracer l’ensemble des dépenses effectivement engagées et poursuit par des critiques visant plus l’Etat que les deux opérateurs qui ont successivement porté le projet, le GIP-DMP d’abord, puis l’ASIP Santé depuis 2009. D’ailleurs, le pragmatisme insuffl é à cette dernière par son directeur Jean-Yves Robin a quelque peu accéléré la diffusion du DMP. La Cour des comptes constate d’ailleurs « de bons résultats ou un démarrage du déploiement crédibles en 2012 dans certaines régions ».

Ni stratégie, ni réflexion _ « Au-delà de l’insuffi sance grave de suivi financier qui a accompagné le développement du DMP », elle dénonce l’absence de parution au Journal Offi ciel du décret qui devait fi xer le champ d’application du DMP, son contenu et son mode de montée en charge. En l’absence de ce cadre législatif, la Cour des comptes constate que le DMP s’est développé « sans aucune stratégie préétablie », ni aucune réflexion quant au choix de cibler certaines catégories de patients, comme les malades chroniques, par exemple. Il est « urgent que l’Etat défi nisse enfi n, dans une concertation plus étroite avec tous les acteurs, une stratégie d’ensemble pour intégrer le DMP dans une vision globale de l’organisation du dispositif de soins et des systèmes d’information en santé, de manière à assurer la cohérence et la convergence de dispositifs à certains égards foisonnants et à éviter une dérive des coûts à venir ».

Parmi les conséquences fâcheuses du développement anarchique du DMP, la Cour des comptes pointe l’absence de mise en place à une échéance déterminée d’une politique de sécurité ainsi que celle de l’Identifiant National de Santé (INS), dont le décret n’est toujours pas paru. Sans parler de l’adoption, à quelques mois d’intervalle, de deux « normes d’interopérabilité » distinctes pour le même objet, l’une par l’ASIP Santé, l’autre par la CNAMTS…

La Cour des comptes considère donc « urgent et indispensable un ferme redressement dans le pilotage stratégique et la maîtrise des coûts du DMP comme de l’ensemble des dossiers médicaux informatisés qui ont vocation à converger vers lui », et formule treize recommandations pour ce faire. Elle préconise notamment la conclusion d’un contrat pluriannuel entre l’Etat et l’ASIP Santé sur le déploiement du dispositif. ■

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Dépassements d’honoraires : vers un accord difficile

La première réunion, début septembre, sur les sanctions pour dépassements abusifs a pris les médecins libéraux à rebrousse-poil les unissant vent debout contre les propositions de l’UNCAM. La seconde, sur le contrat d’accès aux soins version Assurance Maladie laisse beaucoup de questions sans réponse qui concernent les critères d’éligibilité au contrat, la part minimale d’activité aux tarifs opposables, les pénalités en cas de non-respect, les conditions de son ouverture aux nouveaux installés… En outre, l’UNCAM reste muette sur le sort réservé aux médecins du secteur 2 qui n’adhèreraient pas au contrat. Or, les syndicats n’entendent pas qu’on touche aux médecins de ce secteur. « Il n’est pas question de pénaliser les médecins du secteur 2 qui ne voudront pas signer le contrat et n’abusent pas dans leurs dépassements, prévient Michel Chassang, le président de la CSMF. Qu’on leur fiche la paix ! »

La réunion sur les tarifs du secteur 1 n’a pas soulevé plus d’enthousiasme, comme on pouvait s’en douter. Les caisses étant vides, les « pistes » ouvertes par l’UNCAM sont maigres. Frédéric van Roekeghem a rappelé que les premiers versements au titre du P4P interviendraient en mars prochain et représenteraient 3,9 % de l’ensemble des revenus des médecins traitants en 2013. La troisième étape de revalorisation de la nomenclature des actes techniques, qui concerne 42 % des tarifs cibles devrait être « soldée d’ici à la fin de la convention en 2016, sous réserve que cela se fasse par solidarité interprofessionnelle ». Autrement dit, sous réserve de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Par exemple, en réajustant à la baisse sur trois ans les tarifs de quatre spécialités (cardiologie interventionnelle, gastroentérologie, médecine nucléaire et radiologie) pour revaloriser les tarifs d’une dizaine d’autres, notamment la cardiologie. Bénéficieraient de ces revalorisations les médecins de secteur 1, bien sûr, mais aussi les signataires du futur contrat d’accès aux soins. Bref, dans l’immédiat, aucune revalorisation en vue. Au grand dam des syndicats, qui ne manquent pourtant pas de propositions en la matière. Ainsi, la CSMF a présenté sa Majoration pour Grand Age (MGA) de 10 euros pour les consultations et visites des personnes de 80 ans et plus. « Pas à l’ordre du jour » a répondu en substance le directeur de l’UNCAM, qui privilégierait d’ailleurs des critères médicaux plutôt que d’âge pour ce genre de majoration. Plus proche de la majoration de 10 euros proposée par le SML mais pour des consultations longues concernant des malades en ALD, polypathologiques ou atteints de maladies neurodégénératives, quel que soit l’âge.

Au total, les syndicats médicaux sont sortis fort mécontents de cette séance comme de la suivante d’ailleurs qui devait synthétiser quelque peu les précédentes. La synthèse est vite faite : les propositions de l’UNCAM pour réguler les dépassements d’honoraires continuent de déplaire aux médecins et l’absence d’ouverture sur les revalorisations du secteur 1 bloque tout. A moins que… le coup de théâtre est venu de l’UNOCAM sortant de son silence pour laisser entendre que les complémentaires pourraient participer à la revalorisation du secteur 1 en allant au-delà de la prise en charge du seul ticket modérateur. Une perspective « intéressante » pour Michel Chassang (CSMF) mais « surréaliste » pour Christian Jeambrun (SML) : « L’UNOCAM prépare sa sortie. Sans la suppression de la taxe sur les contrats responsables et l’autorisation de créer des réseaux de soins pour la Mutualité, l’UNOCAM n’a pas l’intention de signer quoi que ce soit. Quant au contrat d’accès aux soins, il est parti pour avoir le même sort que le secteur optionnel. »

Mais après tout, lorsque les négociations sur l’actuelle convention avaient débuté, personne n’osait penser que tous les syndicats la signeraient à la fi n de juillet dernier. Marisol Touraine a affirmé son souhait de voir la négociation aboutir : un signe ministériel pourrait peut-être faciliter les choses… ■

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Répertoire Partagé des Professionnels de Santé : exercice de la médecine sur plusieurs sites

Notre collègue s’est montré très surpris, car cette « autre activité » était la réalisation d’épreuves d’effort, que l’on ne peut pas surveiller en cabinet pour des raisons de sécurité, et qu’il faisait depuis vingt ans en externe dans une clinique, ce qui est la pratique habituelle.

Il avait omis, en fait, comme sans doute beaucoup d’autres cardiologues, de communiquer à l’Ordre, son contrat avec l’établissement. Ceci est l’occasion de rappeler quelques règles du Code de Déontologie qui découlent du Code de la Santé Publique.

Obligation de contrats et de leur communication à l’Ordre _ « Toute association ou société entre médecins en vue de l’exercice de la profession doit faire l’objet d’un contrat écrit qui respecte l’indépendance professionnelle de chacun d’eux. »(Article 91 du Code de Déontologie et article R.4127-91 du code de la santé publique).

De même (Article 83 du Code de Déontologie et article R.4127-82 du code de la santé publique), « l’exercice habituel de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d’une entreprise, d’une collectivité ou d’une institution ressortissant au droit privé doit, dans tous les cas, faire l’objet d’un contrat écrit. » _ Cela concerne l’exercice en clinique. _ Ces contrats, et les avenants éventuels, doivent être communiqués au Conseil Départemental de l’Ordre.

Exercice sur plusieurs sites _ On ne parle plus maintenant de cabinets secondaires, mais de sites distincts d’exercice. C’est l’objet de l’article 85 du Code de Déontologie (Article R.4127-85 du CSP). _ Il est précisé que « le lieu habituel d’exercice d’un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental ».

Il est néanmoins possible, « dans l’intérêt de la population », d’exercer sur plusieurs sites distincts de la résidence professionnelle habituelle.

Deux possibilités :
■ soit lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ;
■ soit lorsque les investigations et les soins nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en oeuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants. C’est dans ce cadre qu’un cardiologue peut utiliser le plateau technique d’une clinique pour certains actes non réalisables au cabinet. La demande d’ouverture d’un site distinct du cabinet doit être adressée au conseil départemental de l’Ordre, avec toutes les informations utiles. L’absence de réponse après un délai de trois mois vaut autorisation implicite.

SEL L’exercice multisite en Société d’Exercice Libéral (SEL) était soumis jusque récemment à des conditions particulières et restrictives. Le décret n° 2012-884 du 17 juillet 2012, modifiant l’article R.4113-23 du Code de la Santé Publique, permet désormais à une SEL d’exercer sur plusieurs sites distincts de sa « résidence professionnelle » dans les mêmes conditions, et avec les mêmes demandes d’autorisation à l’Ordre que celles prévues par l’article R.4127-85 du CSP précisées ci-dessus. ■

Article R4127-85 – Modifié par Décret 2005-840 2005-07-20 art. 11 2° JORF 26 juillet 2005

Le lieu habituel d’exercice d’un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du Conseil départemental, conformément à l’article L. 4112-1.

Dans l’intérêt de la population, un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle : – lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ; – ou lorsque les investigations et les soins qu’il entreprend nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en oeuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants. Le médecin doit prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d’exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins. _ La demande d’ouverture d’un lieu d’exercice distinct est adressée au Conseil départemental dans le ressort duquel se situe l’activité envisagée. Elle doit être accompagnée de toutes informations utiles sur les conditions d’exercice. Si celles-ci sont insuffisantes, le conseil départemental doit demander des précisions complémentaires. _ Le Conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit est informé de la demande lorsque celle-ci concerne un site situé dans un autre département. _ Le silence gardé par le Conseil départemental sollicité vaut autorisation implicite à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande ou de la réponse au supplément d’information demandé. _ L’autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fi n si les conditions fixées aux alinéas précédents ne sont plus réunies. _ Les recours contentieux contre les décisions de refus, de retrait ou d’abrogation d’autorisation ainsi que ceux dirigés contre les décisions explicites ou implicites d’autorisation ne sont recevables qu’à la condition d’avoir été précédés d’un recours administratif devant le Conseil national de l’Ordre.

L’article R. 4113-23 du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes _ « Art. R. 4113-23.-I. Le lieu habituel d’exercice d’une société d’exercice libéral de médecins est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle elle est inscrite au tableau de l’Ordre. « Toutefois, dans l’intérêt de la population, la société peut être autorisée à exercer son activité sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle :

« lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ; ou

« lorsque les investigations et les soins à entreprendre nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en oeuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants.
« I. La société prend toutes dispositions pour que soient assurées sur l’ensemble des sites d’exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins.
« II. La demande d’ouverture d’un site distinct est adressée au Conseil départemental dans le ressort duquel se situe l’activité envisagée. Elle est accompagnée de toutes informations utiles sur les conditions d’exercice. Si ces informations sont insuffisantes, le Conseil départemental demande des précisions complémentaires. « Lorsque le site concerné est implanté dans un autre département, le conseil départemental au tableau duquel la société est inscrite est informé de la demande et des suites qui lui sont données. « Le Conseil départemental saisi se prononce, par une décision motivée, dans un délai de trois mois à compter de la réception du dossier de demande complet. L’autorisation est réputée acquise au terme de ce délai.
« III. L’autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fi n si les conditions fixées au I ne sont plus réunies.
« IV. Les recours contentieux formés devant le tribunal administratif territorialement compétent contre les décisions de refus, de retrait ou d’abrogation d’autorisation ainsi que ceux dirigés contre les décisions d’autorisation ne sont recevables qu’à la condition d’avoir été précédés d’un recours administratif devant le Conseil national de l’Ordre des médecins. « Si l’ouverture d’un site distinct implique, eu égard notamment aux statuts types établis par le Conseil national de l’Ordre des médecins, l’inscription d’une mention en ce sens dans les statuts de la société ou la modification de ces statuts, les dispositions de l’article R. 4113-4 ne s’appliquent pas à cette inscription ou à cette modification. »




Un PLFSS 2013 rude pour les libéraux

355 – Conformément aux engagements du candidat François Hollande, le Gouvernement socialiste affiche sa volonté d’investir dans la santé en fixant pour l’année prochaine un Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM) à 2,7 %, légèrement supérieur à celui de 2012. Pour réduire le déficit de la Sécurité Sociale et « maintenir le haut niveau de protection sociale des Français sans les faire payer », il sollicite les professionnels de santé pour réaliser la totalité des économies recherchées. Tout particulièrement la médecine de ville qui devra assumer les trois quarts de l’effort demandé.Lourd tribut pour la médecine de ville

Contrairement au PLFSS 2012, celui de 2013 instaure un sous-ONDAM égal pour la ville et l’hôpital. Sauf qu’à y regarder de plus près, cette égalité n’est qu’apparente. En effet, pour les soins de ville, l’effort demandé se chiffre à 1,76 milliard d’euros, soit les trois quarts de l’effort total demandé. Le tribut des produits de santé sera majeur : 876 millions d’euros d’économie attendus de baisses tarifaires sur les médicaments princeps et les génériques (530 millions d’euros), ainsi que sur les dispositifs médicaux (75 millions d’euros).
Concernant les génériques, il s’agit pour le Gouvernement de « rattraper » les prix, beaucoup plus bas pratiqués dans les autres pays européens. Cette « harmonisation » devrait rapporter 100 millions d’euros. Pour ce qui est des médicaments princeps, il s’agit de baisser le prix de ceux qui ne voient pas leur prix baisser à l’expiration de leur brevet, comme c’est le quand il existe un générique (50 millions d’euros d’économie attendus). Enfin, il est également prévu une « mise en cohérence » des prix des molécules au sein d’une même classe thérapeutique qui devrait permettre d’économiser 95 millions d’euros.
Des économies à hauteur de 225 millions d’euros relatives aux professionnels de l’offre de soins ambulatoires vont toucher essentiellement les radiologues et les biologistes qui vont à nouveau subir des baisses de tarifs pour un montant total de 155 millions. Les cardiologues ne sont pas à l’abri qui pourraient, eux aussi, voir baisser le tarif de certains actes de cardiologie interventionnelle. Par ailleurs, 70 millions d’économies sont attendus d’une meilleure efficience des prescriptions de transports de patients associée à la mise en place de plates-formes d’organisation de ces transports.
Pour les médecins, la maîtrise médicalisée ne se relâche pas, bien évidemment. On attend de la maîtrise de leurs prescriptions et de l’amélioration de leurs pratiques pas moins de 605 millions d’euros… Ils seront priés, en particulier, d’augmenter de leur prescription dans le répertoire des génériques et d’avoir « une prescription plus homogène des arrêts de travail grâce à la diffusion de référentiels ». Les résultats escomptés du paiement à la performance mis en place pour les généralistes et les cardiologues participent également à cet effort de maîtrise. En outre, une action contre la iatrogénie médicamenteuse et « un meilleur contrôle de certaines prescriptions d’exception » devrait dégager 15 millions d’euros dans les deux cas.
Enfin, intensifiée par le précédent Gouvernement, la chasse à la fraude se poursuivra, qui devrait générer une économie complémentaire de 50 millions d’euros

L’efficience par la réorganisation du système de soins

« Moderniser, c’est consolider dans la durée et gagner en efficience », affirme Marisol Touraine, dont la « conviction » est qu’« on peut soigner mieux et faire des économies ». Mais l’objectif économique va aussi de pair avec la demande des patients que « leurs parcours de soins soient organisés de la médecine de ville à l’hôpital et de celui-ci au domicile ou en établissement médico-social ». Il s’agit donc de « bâtir les parcours autour du patient et non des structures ». A cet effet, « les professionnels libéraux assureront le rôle de pivot dans l’organisation des soins, tandis que l’hôpital sera l’épine dorsale du système de santé publique. Les établissements médico-sociaux seront articulés avec cette prise en charge aiguë ». Le PLFSS 2013 comporte donc les « premières concrétisations » de cette évolution, soit trois mesures. La première porte sur la création de forfaits pour les équipes de professionnels de proximité afin qu’ils puissent assurer de nouveaux services aux patients : prévention, éducation thérapeutique, dépistage. C’est aux partenaires conventionnels qu’il revient de négocier ces forfaits dont le déploiement est annoncé pour septembre 2013.

La deuxième mesure se veut « une réponse immédiate au problème des déserts médicaux » par la création, dès l’année prochaine, de 200 postes de jeunes médecins généralistes s’engageant à travailler dans des zones sous-médicalisées, en appui des médecins qui y exercent et approchent de la retraite. Dans le cadre d’un contrat passé avec l’Assurance Maladie, ces praticiens locaux pourraient percevoir un revenu minimal annuel pendant deux ans. L’idée est, bien sûr, de voir ces jeunes médecins succéder à leurs confrères aînés à l’heure de leur cessation d’activité.
Enfin, la troisième mesure de modernisation du système de soins prévoit l’expérimentation d’un parcours de soins pour les personnes âgées véritablement décloisonné entre la ville, l’hôpital et le secteur médico-social. Le PLFSS précise que cette organisation transversale permettra « d’adapter le système de financement des soins et apportera aux patients une meilleure lisibilité de leur suivi médical : le bon soin, au bon endroit et au juste coût ».

 

Bronca générale contre le PLFSS

Les cardiologues libéraux « Refusons toute compromission infâme »

C’est avec consternation que le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux  (SNSMCV) a pris connaissance et du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale 2013 et des propositions de l’Assurance Maladie présentées lors de la réunion du 3 octobre sur l’évolution des honoraires.
La cardiologie interventionnelle, pas plus que les autres spécialités dites « riches », ne peut être la variable d’ajustement des honoraires des autres spécialités. Toute nouvelle baisse du tarif des actes de la cardiologie interventionnelle serait une véritable provocation après la suppression de l’association de l’ECG/2 à une échocardiographie.
Il est illusoire d’espérer résoudre honnêtement la problématique des compléments d’honoraires sans s’attaquer de front au fond du problème qui est de toute évidence la non-revalorisation des actes du secteur 1 depuis plus de 25 ans.
Nous appelons les syndicats négociant avec l’Assurance Maladie à refuser tout accord actant des revalorisations ciblées aux dépens de certaines spécialités. Le SNSMCV met en garde l’Assurance Maladie et le Gouvernement si une telle décision était prise. La médecine ambulatoire a montré son sens des responsabilités puisque, pour la troisième année consécutive, elle respecte l’ONDAM. C’est ailleurs qu’il faut chercher des marges de manœuvre.
Pas de dépeçage, restons unis, refusons toute compromission infâme. Assez !

 

CSMF Une équité de façade entre ville et hôpital

A la confédération, on se dit « inquiet » de cet ONDAM. « Ce n’est pas celui promis par le candidat François Hollande, 2, 7 % ce n’est pas 3 %, commente Michel Chassang. Certes, nous sommes passés de 2,5 % à 2,7 %, mais on nous annonce un ONDAM dégressif jusqu’à atteindre 2,5 % en 2015. Nous y voyons une menace sur notre exercice. Mais surtout, la parité entre l’ONDAM de ville et celui de l’hôpital n’est qu’une façade qui masque une iniquité dans l’effort demandé. En effet, sur les 2,4 milliards d’euros d’économie prévus par le PLFSS, on demande à l’hôpital un effort à hauteur de 657 millions d’euros et 1,76 milliard d’euros d’économie à la ville. Autrement dit, les libéraux devront réaliser 73 % des économies demandées ! On est très loin de l’équilibre affiché. Cette injustice est d’autant plus difficile à accepter que l’ONDAM a été respecté en 2011 avec une sous-réalisation de 800 millions d’euros et qu’il le sera cette année avec une sous-estimation de 350 millions. Dans les deux cas, la sous-réalisation de l’ONDAM est due à la médecine de ville. Nous avons donc du mal à accepter l’effort qu’on nous demande pour 2013 alors qu’on laisse filer les dépenses hospitalières. Et par-dessus le marché, le PLFSS prévoit la baisse d’actes de radiologie et de biologie à hauteur de 55 millions d’euros ! Nous demandons au Gouvernement de revenir sur cette décision. En revanche, la CSMF salue certaines mesures structurantes du PLFSS, telle la mise en place d’expérimentation en médecine ambulatoire et le financement de 200 postes pour de jeunes médecins généralistes qui exerceront aux côtés de médecins proches de la retraite dans des zones sous-médicalisées. Il faut absolument renforcer les soins de ville par une dé-hospitalisation, estime Michel Chassang, qui souligne que la France compte une fois et demie plus de lits d’hôpital que l’Allemagne. « C’est ainsi qu’on dégagera des marges de manœuvre. »

 

SML PLFSS 2013 : le temps des vendanges !

C’est la métaphore retenue par le Syndicat des Médecins Libéraux pour dénoncer les baisses de tarif annoncées. « Comme chaque année maintenant, lorsqu’il  faut boucler les recettes du PLFSS, l’état s’arroge le droit de “vendanger” les grappes qui émergent, biologistes, radiologues et peut-être demain cardiologues et d’autres …  Le seul critère retenu est le plus inique qui soit, car établi sur des moyennes. Le chiffre d’affaires conditionne les appétits de “Bercy” et fait fi de tout ce que représentent les laboratoires d’analyses et les cabinets de radiologie, notamment en matière d’offre de soins de proximité, mais aussi en matière d’emplois induits. » Mais l’ire du SML ne s’arrête pas à ces baisses de tarif. « Avec les 200 officiers de santé sous contrôle des ARS, c’est une vraie médecine bolchévique qui se profile dans ce PLFSS », estime son président, Christian Jeambrun. Quant à nous, nous proposons trois amendements. Le premier a trait à la prescription en DCI pour éviter la brimade inutile de la mention manuscrite “Non substituable”. Le deuxième concerne le statut de médecin retraité actif, que nous avons bon espoir de voir aboutir. Quant au troisième, il vise à proposer un parcours de soins à entrées multiples, en lieu et place du parcours de soins à entrée unique que Madame Touraine entend imposer. »

FHP Une répartition délétère

La Fédération de l’Hospitalisation Privé (FHP) dénonce l’inégalité de traitement entre secteur public et secteur privé. « Alors que le taux de croissance de l’ONDAM marque une volonté du Gouvernement de consacrer des moyens importants à la santé, et que le taux d’évolution de l’Ondam hospitalier est identique à l’an passé (+2,6 %), la FHP dénonce une répartition délétère des sommes allouées: +2,4 % pour les établissements de santé tarifés à l’activité contre +2,7 % en 2012, tandis que les autres dépenses pour l’hôpital sont affichées en forte croissance avec une évolution de +3,1 % contre +2,2 % l’an passé. »

« Dans un système de régulation prix/volume, nous redoutons une campagne tarifaire 2013 fortement pénalisante conduisant à une aggravation des difficultés économiques du secteur de l’hospitalisation privée », s’alarme Jean-Loup Durousset, le président de la FHP, rappelant que 28 % des cliniques et hôpitaux privés sont déficitaires toutes spécialités confondues, ce taux s’élevant à près de 40 % pour les établissements de médecine-chirurgie-obstétrique.

 

LEEM Des baisses de prix ni justifiées, ni raisonnables

Les entreprises du médicament ont bien évidemment réagi défavorablement au PLFSS 2013. Dans un communiqué, le LEEM souligne que « le Projet Loi Financement Sécurité Sociale (PLFSS)  fait à nouveau peser sur les entreprises du médicament l’essentiel des économies (près de 50 %), alors que le médicament ne représente que 15 % des dépenses d’Assurance Maladie ».

« Ce projet intervient dans un contexte de décroissance de chiffre d’affaires sans précédent pour le secteur. » En prix industriels, le médicament en ville et à l’hôpital devrait en effet subir, en 2012, une baisse de –1,5 %, selon les données de l’Assurance Maladie. Cette réduction est d’ailleurs susceptible de s’amplifier au dernier trimestre 2012 du fait de l’impact de la mesure « tiers payant contre générique, intégralement financée par l’industrie pharmaceutique. Dans un tel contexte, l’ampleur des baisses de prix envisagées dans le PLFSS pour 2013 n’est ni justifiée, ni raisonnable. »

 

L’hôpital ménagé

L’hôpital public va mal, on le sait. Le Gouvernement le ménage, cela se voit dans le PLFSS 2013 qui exige de lui 657 millions d’euros d’économies, soit un quart de l’effort général demandé. Sur ces 657 millions, 314 millions sont attendus de l’amélioration de l’efficience interne, qui passera par une meilleure politique des achats et l’évolution de l’organisation des pharmacies à usage intérieur. Par des actions de la gestion du risque, le Gouvernement souhaite « améliorer la pertinence des actes et du recours à l’hospitalisation » et développer les techniques les plus efficientes, en particulier la chirurgie ambulatoire, la prise en charge de l’insuffisance rénale chronique par dialyse péritonéale et les greffes. Il en attend une prise en charge plus appropriée pour les patients en même temps que moins coûteuse (193 millions d’euros d’économies escomptés). Enfin, « un effort particulier sera également réalisé sur les produits de santé facturés à l’Assurance Maladie en sus du tarif d’hospitalisation, pour un montant total de 150 millions d’euros, notamment dans le cadre de baisses tarifaires ». 




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Domaine Gourt De Mautens Rasteau 2006 – Jérôme Bressy 84110 Rasteau

Je ne peux qu’approuver, ce Gourt de Mautens 2006 est certainement le vin le plus enthousiasmant que j’ai pu déguster depuis le début de cette année, alors que le 2007, honoré par Bettane et Desseauve, s’annonce encore meilleur.

Jérôme Bressy a pris en main le domaine familial, où, jusqu’alors, la vendange était livrée à la cave coopérative, en 1996 à l’âge de 23 ans avec, d’emblée, une obsession : réaliser le plus grand vin possible. Son parcours a été ponctué d’essais, d’erreurs, de changements, de virages. Il est parfois allé trop loin dans la maturité de ses raisins, mais il a persévéré dans son projet, pour produire, dès 2005, des vins de haute qualité affirmant la grandeur et l’originalité du terroir Rasteau méconnu, mais si qualitatif.

Effectivement, ses vignes sur sols d’argiles rouges avec alluvions de Riss et de marnes argilo- calcaires, possédant la capacité de stocker l’humidité et permettant une bonne régulation hydrique, bénéficient d’une belle exposition solaire, plantées en terrasses et coteaux. Les résurgences qui apparaissent après les pluies, sont ainsi à l’origine du nom du domaine : Gourt, trou d’eau, Mautens, par mauvais temps.

Mais Jérôme Bressy a très vite compris que tout commençait par le travail dans la vigne : cultures biologique certifiée, et biodynamique depuis 2008, aucun produit chimique, proscription de tout désherbant, insecticide, pesticide, etc., traitements par tisanes de plantes, poudres de roche, décoctions de soufre à dose infinitésimale. Les vignes sont enherbées, labourées à la charrue, elles portent 3 à 6 grappes par plant en taille gobelet. Les travaux d’ébourgeonnage, d’éclaircissage, de démamage, sans rognage, conduits selon les caractéristiques de chaque pied, limitent drastiquement les rendements de 10 à 15 hl/ha.

Sur la plupart des parcelles, les différents cépages sont plantés en « foule » ; c’est-à-dire mélangés, choix de J. Bressy, pour pouvoir cueillir les raisins à la maturité optimale, non pas en fonction du cépage, mais du terroir et c’est le talent du vigneron qui détermine sur l’observation des pulpes, peaux et pépins, quelle vigne est prête, en allant le plus loin possible dans la maturité des raisins, pour gommer le caractère rustique des tannins inhérents au terroir marneux.

Les vendanges manuelles en caissettes ajourées permettent déjà une sélection sévère à la cueillette, tout ce qui n’est pas digne, je le jette (J. Bressy), complétée par un tri grain par grain sur table à la cuverie.

Jérôme Bressy a fait le choix de ne produire qu’un seul cru grâce à un assemblage savant de 70 % de grenache, 15 % de carignan, tous deux produit par des vignes de 50 à 90 ans d’âge, et de 15 % de mourvèdre, syrah, counoise, vaccarèse. La vinification, en lots séparés, selon les terroirs mariant les différents cépages, des grappes éraflées pour le 2006 (mais non pour les millésimes suivants), bénéficie d’un levurage indigène avec un très léger sulfitage. La macération a lieu en petite cuve de bois pendant 18 jours, après un pressurage pneumatique doux, seuls, les 1ers jus sont gardés. L’élevage sur lies, sans soutirage, s’opère en fonction des lots, soit en foudre de 15 hl, soit en demi-muid de 600 l et, pour certains, en cuve pendant une 1ère phase de 15 mois avant d’être assemblés pour un 2e affinage en cuve béton de 20 mois. L’élevage est donc particulièrement long sur près de 3 ans avant la mise en bouteille par gravité, sans filtration, ni collage. Une attention toute particulière est apportée aux bouchons en fleur de liège.

Ce remarquable Gourt de Mautens 2006 est un monument. Annoncé par une robe velours cramoisi, ce vin aux jambages gras exprime un ample et doux nez de pruneau, de chocolat noir, de kirsch confituré et d’herbes de Provence rôties. Ces imposantes senteurs sont suivies en bouche d’une puissance et d’une richesse superbes, ainsi que d’une profondeur et d’une intensité somptueuses. Une étrange sensation de plénitude envahit la bouche mêlant les nuances d’un bouquet aromatique finement épicé avec des impressions tactiles, veloutées, étonnamment diversifiées.

Ce très grand vin peut se suffire à lui-même et se déguster seul avec quelques brins de Saint-Nectaire.

Mais il s’appréciera aussi bien avec des plats méditerranéens : grillades aux herbes, pintade aux olives, pastilla de pigeon, qu’avec la grande cuisine : tournedos Rossini, lièvre à la royale. A Noël, une oie ou un chapon l’accompagneront avec enthousiasme.

Dès ses débuts, Jérôme Bressy avait cette ambition, « construire vraiment un vin avec une personnalité encore plus affirmée, avec une profondeur, une texture de tannins d’une grande noblesse, une grande longueur, une palette d’arômes très large : le plus grand vin possible » ! Indéniablement, il a atteint son but à moins de 40 ans… ■




L’observance : difficile à observer, urgent de l’améliorer

354 – S’il est difficile de mesurer avec précision l’observance des patients, on sait cependant que ses scores sont loin d’être olympiques… Son amélioration repose essentiellement sur la bonne connaissance de sa maladie par le patient et la communication avec le médecin. C’est pourquoi l’observance est un des sujets majeurs de l’éducation thérapeutique du patient. L’UFCV le sait bien qui lancera à l’automne prochain un vaste programme d’observance thérapeutique, « Mon cœur et moi ».

Des patients « observants », c’est le rêve de tous les médecins. Mais comme l’on dit familièrement « Faut pas rêver ! » : tous les malades n’obéissent pas strictement à l’ordonnance médicale… On définit généralement l’observance comme la concordance entre le comportement d’un patient et les prescriptions médicamenteuses, mais aussi hygiéniques et diététiques qui lui ont été faites. Mais cette concordance n’est pas toujours totale. Dès lors, où se situe la frontière entre l’observance et la non-observance. Il est généralement admis que les patients bons observants prennent au moins 80 % de leur traitement tandis que les mauvais en prennent moins de 50 %. On voit que dans les deux cas la fourchette est large entre 100 % et 80 % , comme entre 50 % et 0 %… 

Des mesures de l’observance aléatoires

C’est que la mesure de l’observance est chose très complexe, les paramètres pouvant interférer dans le bon suivi d’une prescription étant très nombreux et d’ordre psychologique, pharmacologiques ou socioculturels. Aucune méthode de mesure valide et objective n’existe : il est aisé de comprendre l’infaisabilité de celle qui serait la plus fiable, la mesure directe du taux sanguin d’un médicament. Ne reste qu’une série de mesures indirectes permettant de cerner le problème plus que le quantifier avec précision. L’entretien clinique et l’autodéclaration du patient ne sont pas sans présenter de biais, notamment celui de la surestimation par le patient de son observance. Le décalage entre les dates de renouvellement de l’ordonnance et la durée de prescription est une piste, comme le repérage sur l’ordonnance des dates réelles de délivrance par le pharmacien. La « visite » des pharmacies familiales et la « délation » de l’entourage peuvent être éclairantes sur le niveau d’observance. Des moyens plus modernes comme les dispensateurs électroniques de médicaments se révèlent peu pertinents en pratique courante, malgré le recours à la technologie : ouvrir le pilulier électronique n’implique pas forcément la prise du médicament… Pour imparfaits qu’ils soient, tous ces moyens ont été utilisés dans diverses études dont les résultats colligés permettent d’évaluer grossièrement la prévalence de l’observance. Ainsi, on situe l’observance des malades souffrant d’une maladie chronique entre 30 % et 50 %. Une étude publiée dans le Concours médical en 1992 (J.-P. Olier, « Observance thérapeutique au cours des états dépressifs ») a montré que l’observance est moindre dans les maladies psychiatriques. En cardiologie, les résultats de l’étude EUROASPIRE (1) ont montré qu’après avoir présenté un événement coronaire, 28 % des patients continuent de fumer, que 49 % gardent un bilan cholestérol anormal, que 34 % ont une surcharge pondérale et que 48 % n’ont pas une PA équilibrée. Une étude (2) a aussi montré que la monoprise améliore l’observance chez les patients atteints de HTA, que l’oubli de la prise du soir est trois fois plus fréquent que l’oubli de la prise du matin et que le taux d’observance est de 73 % pour deux prises, mais s’élève à 92 % avec une seule prise. Aux Etats-Unis, 5,3 % des hospitalisations seraient dues à une mauvaise observance. Les firmes pharmaceutiques américaines estiment les pertes annuelles dues à la mauvaise observance des traitements à 20 milliards de dollars. Ce qui a motivé lesdites firmes à développer outre-Atlantique des programmes d’« aide à l’observance ». Des initiatives que les laboratoires souhaiteraient initier en France, ce qui ne leur est pas autorisé pour l’heure. Les textes sur l’Education Thérapeutique du Patient (ETP) ne leur laisse qu’une place très réduite et très encadrée. 

L’ETP : un outil pertinent

L’ETP est pourtant sans doute l’outil le plus pertinent pour améliorer l’observance des patients. Les praticiens en font souvent dans leur cabinet, sans le savoir, comme Monsieur Jourdain fait de la prose, ou en le sachant. Mais ils savent aussi que cette communication avec le patient est chronophage et qu’elle n’est pas financièrement prise en compte dans le tarif de la consultation… Quant à l’ETP organisée, si les textes la régissant existent, son financement est plus aléatoire et loin de répondre aux besoins. Heureusement, des groupes pharmaceutiques s’engagent pour financer des programmes d’ETP. L’UFCV proposera bientôt le programme d’observance thérapeutique « Mon cœur et moi » (voir entretien avec Patrick Assyag plus loin).

 

Entretien Jacques Blacher

« La transmission de l’information médicalisée est le secret de l’observance »

Chef de service de cardiologie à l’Hôtel Dieu (Paris), le Pr Jacques Blacher s’intéresse de près au phénomène de l’observance dans le domaine de spécialité qui est le sien, l’HTA. Mais selon lui, les facteurs déterminants dans la prise régulière du traitement par le patient sont transposables aux autres spécialités. A partir de quel seuil peut-on parler d’inobservance et a-t-on identifié des facteurs déterminants dans l’observance ?

Jacques Blacher : On estime que l’observance est bonne si le patient prend au moins 80 % de son traitement. En dessous de ce pourcentage, il n’y a pas observance du traitement. Mais l’observance ou l’inobservance sont complexes à quantifier précisément. Quelques études scientifiques – mais peut transposables à la clinique quotidienne – ont montré que l’observance état médiocre parmi les patients souffrant d’HTA, puisque 50 % arrêtent leur traitement au bout d’un an. L’emploi d’un pilulier électronique qui émet un « bip » chaque fois que le patient l’ouvre est un des « petits » moyens à notre disposition pour tenter de cerner le phénomène de l’observance. Avec des limites : le fait que le patient ouvre son pilulier ne signifie pas forcément qu’il prend son médicament… De même, l’interrogatoire du patient ne donne pas des résultats fiables. Si vous dites à un patient « Vous prenez bien votre traitement », il vous répondra « oui ». On obtient sans doute une réponse plus proche de la vérité en posant une question plus ouverte, du type « Combien de fois avez-vous oublié de prendre votre traitement ? ». Avec l’ensemble de ces « petits » moyens, on peut parvenir à avoir une idée de l’observance chez les patients atteints de HTA. Mais cela reste difficile. Et la présence ou non de symptômes dans les maladies chroniques ne marque pas une grande différence : des patients chroniques avec symptômes peuvent ne pas prendre leur traitement. Des psychologues qui se sont intéressés au phénomène ont montré que l’observance est étroitement liée aux caractéristiques du patient, du médecin et de la prescription. Ils ont ainsi mis en évidence que lorsque le patient ne connaît pas sa maladie, son observance du traitement est réduite. Bien évidemment, les handicaps sensoriels, la vieillesse et les troubles mentaux sont des facteurs réducteurs de l’observance. Comme le sont les effets dévastateurs de ce que peut dire l’entourage – en positif ou en négatif –, les interférences des médias et tout ce que peuvent dire les acteurs autour du patient : infirmières, pharmaciens, médecin traitant, etc. De même, la lecture des notices des médicaments qui doivent obligatoirement contenir tous les effets secondaires possibles peut influencer négativement les personnes angoissées.

Quelle est l’influence des comportements du prescripteur ?

J. B. : Elle est très importante et il faut la souligner, car on peut agir dessus. Ainsi, l’imprécision du médecin dans le diagnostic qu’il donne au malade est dommageable. Si l’on met en avant les certitudes sur ce diagnostic et que l’on fixe des objectifs, on a plus de chance que le patient prenne son traitement. Il faut aussi savoir négocier avec le patient et ne pas être trop paternaliste : au bout du compte, c’est lui qui décide de prendre son traitement ou non. Il est préférable de dire « Je vous propose ce traitement » que « Je vous ordonne ce traitement » – à cet égard, le terme d’ordon nance n’est pas neutre… Quant à la rédaction de l’ordonnance justement, elle doit être simple, précise, écrite lisiblement, opter pour une monoprise plutôt que pour des prises multiples, et ne pas être trop onéreuse, le facteur prix étant très important pour certaines personnes. Il faut expliquer au patient qu’il existe des génériques que le pharmacien peut lui proposer. Et surtout, il ne faut pas cacher les effets secondaires au patient ; il faut lui en parler et lui dire qu’il peut revenir si certains d’entre eux se manifestent. D’ailleurs, dans tous les cas, on aura intérêt à lui expliquer qu’on ne peut être absolument certain du résultat et qu’on évaluera dans le temps les effets du traitement.

Il ressort de vos propos que la communication est déterminante pour l’observance dont le patient fera preuve ?

J. B. : Le secret de l’observance réside dans la transmission de l’information médicalisée. Pour convaincre le patient qu’il y a plus de bénéfices que d’inconvénients à prendre son traitement, il est nécessaire de lui transmettre les données qui nous ont nous-mêmes convaincus de l’efficacité du médicament. On aura donc tout intérêt à lui expliquer que des essais thérapeutiques ont montré que la prise du traitement réduit les risques d’AVC, etc. Autrement dit, il faut faire de l’éducation thérapeutique du patient, qui nécessite de la compétence et du temps, mais là, c’est une autre question… Mais ce qui est certain, c’est que l’observance dépend étroitement de la relation de confiance entre le patient et le médecin, et que cette relation n’est pas acquise, elle se gagne !    

 

Entretien Patrick Assyag

« Mon cœur et moi » : le programme de l’UFCV

Le Dr Patrick Assyag détaille pour Le Cardiologue le programme d’observance thérapeutique « Mon cœur et moi » conçu par l’UFCV, dont il est membre du conseil scientifique. Ce programme, qui démarrera en novembre prochain après un phase test, pourrait toucher 1 500 patients ayant été victimes d’un syndrome coronaire aigu depuis moins d’un an.  Qu’est-ce qui a motivé le programme « Mon cœur et moi » ? Patrick Assyag : Le phénomène d’observance thérapeutique constitue un défi majeur dans le cadre du syndrome coronaire aigu. On sait que 70 % des patients vont présenter une récidive d’événements cardiovasculaires fatale ou non fatale dans les douze mois suivant un syndrome coronaire aigu. On sait aussi que 30 % arrêtent partiellement ou totalement de prendre leur traitement dans les quatre semaines suivant leur sortie de l’hôpital, tandis que 12 % arrêtent tous les traitements conduisant ainsi à une augmentation significative de la mortalité à un an. Si la prise en charge du syndrome coronaire aigu a été nettement améliorée ces dernières années par les innovations technologiques et médicamenteuses, elle pourrait être cependant améliorée par une meilleure observance. C’est la raison pour laquelle l’UFCV, en partenariat avec la société CRM et AstraZeneca, a souhaité proposer le programme d’observance thérapeutique «  Mon cœur et moi » chez les patients au décours d’un syndrome coronaire aigu. Ce programme a été validé par un comité scientifique composé à parité de cardiologues libéraux et hospitaliers. Un test d’évaluation sera réalisé dans le courant du mois de septembre auprès d’un panel de cardiologues et de patients pour un démarrage du programme début novembre. 

Quel est le contenu de ce programme et comment se déroulera-t-il ?

P. A. : Le programme se déroulera sur une année. Il comprend une phase active de six semaines. A chacune de ces six semaines correspond un thème « Observance/Inobservance », « La maladie et sa compréhension », « Le médicament : mieux le comprendre », « Vos facteurs de risque », « Vous et les professionnels de santé », « Vous et les autres ». Une évaluation sera faite avant et après le programme par le cardiologue au moyen d’un questionnaire rempli par le patient sur les facteurs de risques. Le programme sera personnalisé en fonction des facteurs de risque de chaque patient et visera à évaluer les risques de mauvaise observance et à les corriger. La phase au long cours consistera en un accompagnement des patients, hebdomadaire d’abord, puis mensuel, pour une meilleure observance. Enfin, la phase bilan fera le point complet à 6 mois et à un an pour mesurer l’adhérence du patient au programme et les comportements. 

Sur quels critères les patients seront-ils inclus dans ce programme et combien seront-ils à y participer ?

P. A. : Seront inclus tous les patients dont la date de survenue du syndrome coronaire aigu sera inférieure à un an, et possédant un ordinateur et un accès à internet. C’est d’ailleurs là un petit biais introduit dans la sélection. Pour ce qui est du nombre de patients inclus, il n’est pas encore fixé. Mais sachant que nous comptons sur la participation d’environ cent cinquante cardiologues libéraux et que chacun d’entre eux pourrait proposer ce programme à une dizaine de patients, le nombre total de patients pourrait avoisiner 1 500. 

On voit le bénéfice du programme pour les patients, mais qu’en sera-t-il pour les cardiologues ?

P. A. : Ce programme a également pour objectif d’accompagner les professionnels de santé dans une approche multifactorielle où ils se verront attribuer un espace personnalisé enrichi de multiples informations sur l’observance thérapeutique ainsi que les nouvelles recommandations et publications. D’autre part, ils seront régulièrement informés de l’évolution du programme d’observance de leur patient.




L’espérance de vie continue de progresser en France

354 – Comparativement aux pays de même niveau de vie, l’état de santé en France est plutôt bon. C’est ce qui ressort du dernier rapport de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) sur « L’état de santé de la population en France ». Avec cependant de notables différences entres les sexes. En effet, en 2011 l’espérance de vie à la naissance est de 84,8 ans pour les femmes et de 78,2 ans pour les hommes. Mais si cette espérance de vie continue de progresser, l’écart entre les deux sexes tend à se réduire : en dix ans, les hommes ont gagné 2,8 ans d’espérance de vie quand le femmes n’en n’ont gagné « que » 1,9 an. Une tendance qu’on observe aussi s’agissant de l’espérance de vie après 65 ans en France, qui est la plus élevée d’Europe : elle continue de progresser pour les deux sexes, mais elle est en 2010 de 22,8 ans chez les femmes, soit 1,6 an de plus qu’en 2000, tandis que celle des hommes s’établie à 18,6 ans, soit un gain de 1,9 an en dix ans.

Une baisse des décès cardiovasculaires

Le poids des décès cardiovasculaires dans la mortalité totale reste important, mais il n’a cessé de diminuer, passant de 33,2 % en 1990 à 27,5 % en 2008. Parmi ces décès, ceux par cardiopathie ischémique pèsent pour plus d’un quart (25,8 % en 2008), mais ont connu, eux aussi, une baisse importante : le taux de décès a diminué de 23 %, et le taux standardisé, de 44 %. Cette diminution, qui concerne tous les âges, les personnes de moins de 65 ans (- 46 %) comme celles de 65 ans et plus (- 43 %), s’inscrit dans une tendance à la baisse plus ancienne, qui a débuté au milieu des années 1970 pour les personnes de moins de 75 ans et au milieu des années 1990 pour les plus âgées. Les améliorations progressives de la prévention primaire -individuelle comme collective- de la prise en charge des malades lors de la phase aiguë, et de la prévention secondaire expliquent cette tendance à la baisse.

La France : le taux de mortalité coronaire le plus bas en Europe

Comme les année précédentes, en 2007, la France reste le pays où l’on observe le taux de mortalité coronaire le plus bas parmi les 27 pays de l’Union européenne, suivi de près par le Portugal, les Pays-Bas, l’Espagne et l’Italie. Il convient cependant de relativiser ce score : si l’on inclut les décès avec données insuffisantes, telles les morts subites pour lesquelles la nature coronaire ne peut être ni affirmée ni écartée, la sous-estimation des décès coronaires se révèle sensible en France, où le poids de ces décès avec données insuffisantes est important.

En 2008, les services de médecine, chirurgie et odontologie ont enregistré 309 000 séjours motivés par une cardiopathie ischémique. Ces séjours ont surtout concernés les hommes (71 %), dans 41,7 % il s’agissait d’hommes de 45 à 54 ans, dans 48,7 % des cas de 65 à 84 ans, ceux de 85 ans et plus ne représentant que 4,5 % de ces séjours. Ces proportions étaient respectivement de 23,8 %, 58,3 % et 14,9 % chez les femmes. En 2007, la France faisait partie, avec Malte, Chypre, l’Espagne, le Portugal, la Roumanie, l’Irlande, la Slovénie et le Royaume-Uni, des pays qui enregistraient les taux d’hospitalisation pour cardiopathie ischémique les plus faibles de l’Union Européenne. ■

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La maîtrise selon l’IGAS et l’IGF

354 – Ce n’est pas tout à fait un hasard si ce rapport a été rendu public cet été, en amont de la discussion parlementaire sur le PLFSS pour 2013, par la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, et le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac. C’est une façon d’annoncer la rigueur pour les années à venir dans le domaine de la santé. L’IGAS et l’IGF estiment que la limitation annuelle à 2,5 % de la progression de l’ONDAM revient à trouver chaque année 2,8 milliards d’euros d’économies sur le quinquennat à venir, soit 10 à 15 milliards d’euros. Pour y parvenir, le rapport privilégie la poursuite de la maîtrise des dépenses selon trois principes : « l’Assurance Maladie ne doit financer que ce qui est nécessaire à la prise en charge médicale et soignante », et ce au « meilleur coût », tout en garantissant « l’accessibilité financière aux soins ». Grosso modo, l’effort reposerait sur l’hôpital pour 12,5 milliards, pour 5,96 la médecine de ville et sur le secteur médico-social pour 100 millions d’euros.

Pour atteindre ces objectifs, l’IGAS et l’IGF préconisent que « des objectifs annuels de prescription » soient fixés chaque année aux médecins libéraux, concernant essentiellement les médicaments, la biologie, les arrêts de travail, les transports sanitaires et les soins d’auxiliaires médicaux.

D’incitatifs dans un premier temps, ces objectifs deviendraient contraignants par la suite… Le rapport évalue à 1,5 milliard d’euros les économies que dégageraient des objectifs de réduction de volumes. A côté de cette baisse des volumes, il préconise aussi la poursuite des baisses de tarifs visant notamment les spécialistes à travers la nomenclature technique (100 millions d’euros), les radiologues (250 millions), la biologie (200 millions), les transports sanitaires (100 millions). La réduction de la marge unitaire des pharmaciens par boîte de médicament réduite pourrait rapporter 150 millions et une baisse de 10 % du nombre d’officines d’ici à 2016 fait partie des « perspectives d’économies d’échelle significatives » attendues de la restructuration de plusieurs professions. Le rapport développe également longuement les « gains d’efficience » qui « doivent être recherchés par l’ensemble des professionnels et des établissements pour que l’Assurance Maladie paye les biens et services médicaux aux meilleurs prix ».

Côté hôpital, l’IGAS et l’IGF prônent le recentrage de l’hôpital sur « la prise en charge des pathologies lourdes nécessitant des équipes spécialisées et des équipements coûteux », et le désengorgement de urgences en garantissant un « accès permanent au soins de premiers recours » par la multiplication des maisons de gardes, des services-porte. ■

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Crime de lèse-majesté !

354 – Certains d’entre vous ont certainement lu avec beaucoup d’intérêt le communiqué de presse majeur de la Société Française de Médecine Vasculaire. Oh scandale ! Dans l’avenant n°7 sur la rémunération sur objectifs de santé publique, nous sommes taxés de spécialistes en cardiologie et médecine vasculaire. Dés le lendemain de sa parution au Journal Officiel, nos collègues en appellent au ministre. La médecine vasculaire est une « entité propre », et les cardiologues ne sont pas des spécialistes en médecine vasculaire mais en cardiologie et maladie des vaisseaux. Un communiqué de presse sans doute écrit dans la précipitation car, mes chers collègues, le libellé exact de notre spécialité est « spécialiste en cardiologie et maladies vasculaires ».

Devant ces arguties sémantiques, je me suis empressé de m’informer sur le terme de « médecine » : la médecine est une science, un art, une technique dont les buts sont de prévenir, de diagnostiquer et de traiter une maladie. En relisant avec attention le cursus d’un futur spécialiste en cardiologie et maladies vasculaires, j’ai pu constaté que notre diplôme répond à tous ces critères. C’est d’autant plus vrai qu’avant de pouvoir prétendre à une spécialité, il faut déjà avoir terminé sa formation initiale. Satisfaction, le terme de médecine n’est donc pas usurpé.

Le vasculaire est-il maintenant une entité propre à la seule médecine vasculaire ? Surprenant quelle est la différence entre maladie des vaisseaux, maladie vasculaire, médecine vasculaire ? A chaque fois, maladie ou médecine vasculaire sous-entend la pathologie des vaisseaux, mais il est vrai que les cardiologues dans leur grande majorité ne s’investissent pas assez dans la prise en charge de la pathologie veineuse superficielle. Est-ce là, la spécificité propre de la médecine vasculaire ?