Aux urnes, citoyens!

La croissance du PIB de notre pays a été nulle au deuxième trimestre 2015. Au mois de mai juin dernier l’inflation a été… négative, phénomène qui peut réjouir les consommateurs, moins les pouvoirs publics car, qui dit diminution des prix    sait que les recettes fiscales par la TVA sont moindres, ce qui va rendre très difficile l’exécution du budget de la Nation, toujours basé sur des hypothèses de croissance du PIB et de rentrées fiscales optimistes. Et pourtant, le Président de la République annonce urbi et orbi une baisse des impôts des ménages pour les années à venir. Personne de sensé ne peut y croire. Ce qui nous attend est une diminution des marges de manœuvre dans tous les domaines et, bien sûr, la Sécurité Sociale va, à nouveau, être mise à contribution.

C’est dans cette atmosphère très morose que s’approche le renouvellement des Unions Régionales des Professionnels de Santé. Ce scrutin aura une grande importance pour notre avenir. En effet, le résultat de cette élection servira de base à l’enquête de représentativité et assoira le poids de chaque syndicat pour le long round de négociations conventionnelles qui va s’ouvrir en 2016. Cette convention sera de tous les dangers pour la médecine ambulatoire, d’une part en raison des contraintes budgétaires que je viens d’évoquer et, d’autre part, à cause de la volonté affichée des politiques de diluer la pratique médicale dans l’ensemble des professions de santé. Il y a aujourd’hui, une volonté clairement affichée de modifier profondément les périmètres de l’ensemble des professionnels exerçant dans le monde du soin. Il va falloir y opposer une position claire de l’ensemble des syndicats médicaux sur le thème : les médecins ne sont pas des professionnels de santé comme les autres. Soyons fiers de notre différence.

Cette élection aura, dans le même esprit, une importance capitale en dessinant les nouvelles Unions Régionales qui seront les interlocuteurs privilégiés des Agences Régionales de Santé. Or, la loi de santé ambitionne de régionaliser la prise en charge médicale et la mise en place de la médecine coordonnée, qui se fera soit autour du médecin libéral soit autour de l’hôpital public. Il faut professionnaliser les Unions. L’objectif du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux est que, dans chaque région, soient élus des cardiologues issus de ses rangs. En effet, une réflexion nationale est souvent indispensable même dans le cas de problèmes locaux. La relation entre les unions régionales et l’échelon national devra être forte.

Cet éditorial est un appel à voter. Faites le dès que vous recevrez le matériel électoral début octobre, et choisissez les listes où figurent en position éligible les responsables régionaux et nationaux du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux. Nous allons être, cardiologues, en première ligne dans l’organisation des soins pour les maladies chroniques les plus fréquentes. Nous sommes les mieux à même de défendre notre place dans le système de santé.

Essayons de ne pas laisser à d’autres le soin de définir notre avenir.

Aux Urnes !

Eric Perchicot

Président du SNSMCV




Elections aux URPS : rejet de la loi de santé et revalorisations tarifaires au programme

Le 30 septembre dernier, le matériel de vote a été envoyé aux 116 000 médecins libéraux qui ont jusqu’au 12 octobre pour envoyer leur bulletin de vote afin d’élire leurs 870 représentants dans les Unions Régionales de Professions de Santé (URPS). Du fait de la réforme territoriale, le nombre des URPS va passer de 26 à 17 (13 nouvelle régions plus la Corse et les DOM-TOM). Le dépouillement des résultats par département et par collège aura lieu le 18 octobre prochain.

Vote UrpsLes premières élections aux Unions Régionales de Professionnels de Santé (URPS) se sont déroulées en septembre 2010. Vous souvenez-vous du thème central de la campagne électorale cette année là ? La loi Hôpital Patients Santé Territoire (HPST), votée en 2009 et que la majorité des médecins libéraux vouait aux gémonies et avec elle la ministre de la Santé d’alors, Roselyne Bachelot, qui l’avait soutenue.

Cinq ans plus tard, c’est le rejet massif du projet de loi de santé portée par Marisol Touraine qui a nourri la campagne pour les élections qui se déroulent en ce moment ! A quelques nuances près, comme l’Histoire bafouille.

En 2010, la loi HPST n’avait pas que des détracteurs, et tandis que la CSMF et le SML refusaient catégoriquement une loi « liberticide », MG France lui trouvait des atouts pour la médecine générale. Aussi la victoire de la CSMF et du SML fut-elle interprétée comme le rejet net et précis de la politique gouvernementale d’alors.

Aujourd’hui, parce que ce projet de loi a déterré la hache de guerre en instaurant la généralisation du tiers-payant, le projet de loi fait l’objet d’un rejet de toutes les organisations. Non au tiers-payant généralisé, c’est le leitmotiv de tous les discours syndicaux. Ensuite, chaque centrale décline son programme. Avec un autre thème commun pourtant, la revendication d’un exercice médical revalorisé, non dénuée d’une certaine surenchère tarifaire, campagne électorale oblige. Il est vrai que l’enjeu de ces élections aux URPS est d’importance puisque s’ouvriront l’année prochaine les négociations pour la nouvelle convention médicale et que, selon le score obtenu, tous n’auront pas le même poids de représentativité autour de la table des négociations.

CSMF : une grille tarifaire unique

« On ne veut plus se battre pour un ou deux euros qu’on obtient péniblement tous les deux ou trois ans pour revaloriser une consultation de base », prévient Jean-Paul Ortiz, le président de la Confédération des Médecins de France (CSMF). Considérant que « la consultation à 23 euros est déconnectée de la réalité quotidienne du cabinet médical » et constitue « un tarif irrespectueux, eu égard à l’engagement professionnel des médecins », mais opposé au développement par l’Assurance Maladie de la rémunération par forfait et réaffirmant que « les soins ne peuvent se concevoir que par le paiement à l’acte », le président Ortiz appelle à « une redéfinition de l’exercice médical » et plaide pour la mise en place d’une CCAM et d’une grille tarifaire unique applicable à l’ensemble des spécialités. Sans s’avancer sur le chiffrage d’une telle réforme, il estime que le tarif de base d’une telle grille ne devrait pas être inférieur à 30 euros.

La CSMF voient dans les élections aux URPS « un enjeu capital » pour que les médecins puissent  s’opposer aux ARS et puissent « renégocier » le projet de loi de santé. Jean-Paul Ortiz rappelle le précédent de la loi Fourcade de 2011 qui était revenu sur plusieurs mesures de la loi HPST.

FMF : un plan Marshall pour la médecine libérale

La Fédération des Médecins de France (FMF) n’a pas l’intention d’aller négocier la prochaine convention « pour obtenir des miettes ». C’est clair et dès la fin août, son président Jean-Paul Hamon avait annoncé que la revalorisation des honoraires serait au cœur de la campagne pour les élections aux URPS. Comme le SML, la FMF revendique aussi une hausse significative pour les médecins du premier secteur pour atteindre la moyenne européenne.

« Nous réclamons un vrai plan Marshall pour la médecine libérales », déclare Jean-Paul Hamon qui estime qu’il y faudrait un investissement de 5 milliards d’euros qui pourrait être abondé grâce à des économies faites sur la gestion des caisses d’Assurance Maladie, les cotisations perçues par les complémentaires santé, la rationalisation et la régulation des urgences hospitalières et la consommation de médicaments.

Opposée également au CAS, la FMF milite pour la création d’un secteur d’exercice unique au sein duquel les médecins appliqueraient des tarifs de base communs à chaque discipline mais pourraient aussi facturer des « compléments d’honoraires ».

Résolument opposée au projet de loi de santé, la FMF entend notamment combattre sur le terrain les efforts déployés par les tutelles pour développer le Dossier Médical Personnel (DMP) et les messageries sécurisées de santé, dénonçant une « farce ruineuse » pour des systèmes qui ne fonctionnent pas.

Le Bloc

Majoritaire dans le collège 2 (chirurgie, anesthésie-réanimation et gynécologie obstétrique) lors des élections de 2010, l’organisation est d’autant plus opposée au projet de loi de santé que ce texte prévoit la disparition de ce collège en 2020. Une menace à relativiser selon son président, Philippe Cuq, puisque Le Bloc a obtenu sa représentativité il y a cinq ans et présente cette année des listes dans le troisième collège comptant bien ainsi étendre son influence.

Outre le retrait du projet de loi « par tous les moyens, jusqu’au blocage sanitaire et au recours devant le Conseil Constitutionnel », Le Bloc demande une revalorisation tarifaire avec une valorisation des urgences et de la chirurgie ambulatoire, ainsi qu’un « accès pour tous les praticiens du bloc à des compléments d’honoraires et le maintien de la liberté d’honoraires ».

Farouchement hostile au CAS, Le Bloc milite pour « la création d’une “assurance complémentaire santé” pour nos salariés et les patients qui prendra en charge correctement les compléments d’honoraires » et veut « négocier des solutions d’assurance RCP à des tarifs acceptables pour toutes les spécialités, y compris les plus à risque ».

MG France : équité et revalorisation tarifaires

« La colère des médecins généralistes » à l’égard du projet de loi de santé et de l’obligation du tiers-payant, la dégradations des conditions d’exercice et l’absence de revalorisation tarifaire, sont les trois axes qu’avait annoncé MG France pour sa campagne électorale. Le syndicat généraliste bataille particulièrement pour l’obtention de l’équité tarifaire entre les médecins. Si la médecine générale a bien accédé au statut de spécialité à part entière en 2007, sa consultation de base est restée bloquée à 23 euros, quand celle des autres spécialités s’établit à 25 euros.

Le 17 septembre, le syndicat présidé par Claude Leicher a demandé au directeur de la CNAMTS, Nicolas Revel, d’annuler une décision du 7 mars 2007 fixant la liste des spécialités  éligibles à la cotation Majoration Provisoire Clinicien (MPC) de 2 euros, à l’exclusion des seuls généralistes. Après l’échec de cette démarche, MG France a décidé de déposer un recours en Conseil d’ Etat.

Ce combat pour l’équité n’est qu’un début, le C à 25 euros ne constituant pas une fin en soi. Rappelant que le 7 janvier prochain, « cela fera cinq ans que les honoraires des médecins de secteur 1 sont bloqués », MG France demande une revalorisation globale des honoraires. Claude Leicher fixe à 30 % cette revalorisation pour s’approcher de la moyenne européenne.

SML : ouverture du secteur 2 et consultation de base à 45 euros

Pour construire son programme, le Syndicat des Médecins Libéraux s’est appuyé sur une enquête menée l’été dernier auprès d’un millier de médecins dont les résultats ont montré une vive inquiétude quant à l’exercice libéral de la part de libéraux exaspérés par la dégradation de leur conditions d’exercice.

Rien d’étonnant dès lors à ce que la première revendication du syndicat soit le retrait pur et simple du projet de loi de santé dans lequel il voit « une étatisation » du système de santé. Pêle-mêle, le SML fustige les communautés professionnelles territoriales de santé et la dérive de la politique conventionnelle vers des adaptations locales sous la tutelle des ARS, l’article 47 instaurant un système national de gestion des données de santé qui menace le secret médical et la confidentialité des données.

Historiquement défenseur du secteur à honoraires libres, le SML présidé par Eric Henry demande l’ouverture du secteur 2. Le SML va même plus loin en réclamant la création d’un « secteur 3 » dans lequel que les actes effectués par les médecins non conventionnés (ils sont 1 800 actuellement) seraient remboursés au même niveau que les actes conventionnés. Les autres axes du programme SML concernent une meilleure coordination des soins, le développement de l’expertise particulière, une adaptation des études à l’exercice médical et la mise en place d’ « associations libérales de proximité » regroupant des médecins libéraux libres de la tutelle des ARS.

Enfin, le SML souhaite la mise en œuvre de la CCAM clinique, en chantier depuis dix ans, qui permettrait une hiérarchisation des consultations, la prise en compte du temps passé avec et en l’absence du patient et celle du rôle de coordination et de prévention du médecin.

Le SML revendique une revalorisation des tarifs de consultation « à la hauteur de la moyenne européenne », soit 30 % à 40 % de plus qu’aujourd’hui.

Pour Eric Henry, le tarif d’une consultation de base devrait se situer entre 40 et 45 euros.




Revenus 2014 : légère embellie

 

Plusieurs facteurs ont contribué l’année dernière à une hausse des revenus imposables des médecins libéraux, notamment des spécialistes, dont les cardiologues.

Les données issues des Associations Régionales Agréées des Professions Libérales (ARAPL) montrent une hausse des revenus des médecins par rapport à l’année 2013 où douze disciplines avaient vu leur résultat baisser ou stagner. C’était le cas des cardiologues libéraux qui, en dépit d’une hausse de 1,1 % de leurs recettes cette année-là, avaient vu leur bénéfice baisser de 1 %, s’établissant à 114 308 euros en moyenne, du fait d’une hausse des charges conséquentes. En 2014, 18 spécialisés voient leur bénéfice imposable progresser, dont la cardiologie avec un revenu moyen imposable de 123 000 euros. Plusieurs choses expliquent cette hausse.

D’une part, la quasi-totalité des spécialistes a bénéficié l’an passé de fruits de l’avenant 8 (réévaluation des actes techniques vers les tarifs cible de la CCAM et revalorisation ciblées d’actes cliniques, consultations des personnes âgées, extension du C2 notamment).

Par ailleurs, la quasi-totalité des spécialistes a touché une prime au titre de la Rémunération sur Objectifs de Santé Publique (ROSP). Leur grande majorité n’étant concernée que par le volet organisation du cabinet a perçu en moyenne 1 129 euros. Seuls les gastro-entérologues et les cardiologues engagés dans la ROSP pour leur pratique clinique ont touché une prime moyenne de 2 100 euros en 2014.

Enfin, la stabilité des charges l’année dernière alliée à une hausse d’activité (+ 3 % de remboursements de soins de médecine spécialisée selon la CNAM) ont contribué aussi à cette légère embellie des revenus des médecins libéraux en 2014, qui ne retrouvent cependant pas les niveaux d’il y a quelques années.




Prescriptions de transport : rappels à l’ordre de la Sécurité Sociale

La réduction du coût des transports est l’un des objectifs actuels de l’Assurance Maladie. Des cardiologues se sont fait rappeler à l’ordre car ils ne respectaient pas la réglementation. Cela s’est produit notamment dans des centres de pacemakers où, pour des raisons de commodité, on avait pris l’habitude, pour les contrôles de stimulateurs, de délivrer systématiquement une prescription de transport d’une consultation à l’autre.

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Les missions des URPS

Créées par la Loi HPST, outils au service des médecins libéraux, les URPS sont leur représentation dans les régions, face aux puissantes Agences Régionales de Santé (ARS). Selon le décret du 2 juin 2010 qui fixe leurs missions, les URPS participe :

– à la préparation et à la mise en œuvre du projet régional de santé

– à l’analyse des besoins de santé et de l’offre de soins en vue notamment de l’élaboration du schéma régional d’organisation des soins

– à l’organisation de l’exercice professionnel, entre autre, en ce qui concerne la permanence des soins, la continuité des soins et ls nouveaux modes d’exercice

– à des actions dans le domaine des soins, de la prévention, de la veille sanitaire, de la gestion des crises sanitaires, de la promotion de la santé et de l’éducation thérapeutique

– à la mise en œuvre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) avec les réseaux de soins, les centres de santé, les maisons de santé et les pôles de santé, ou des contrats ayant pour objet d’améliorer la qualité et la coordination des soins

– au déploiement et à l’utilisation des systèmes de communication et d’information partagés

– à la mise en œuvre du Développement Professionnels Continu (DPC)

Enfin, elles peuvent procéder à l’analyse des données agrégées nationales et régionales issues du Système National d’Information Interrégimes de l’Assurance Maladie (SNIIRAM) utiles à leurs missions.

Pour fonctionner, les URPS sont financées grâce à la contribution versée par tous les médecins libéraux. Cette contribution est fixée à 0,50 % des revenus professionnels mais elle est limitée à 0,50 % du plafond annuel de la Sécurité social. Pour l’année 2014, elle était de 182 euros.




Attractivité : les orientations retenues par Marisol Touraine

Lors du colloque de l’Intersyndicat National des PH (INPH), la ministre de la Santé a annoncé une feuille de route concrète pour les semaines qui viennent, avec un plan d’action pluriannuel sur l’attractitivité. Elle a indiqué les trois orientations selon lesquelles il lui semble raisonnable d’avancer : trouver des dispositions permettant de favoriser l’engagement dans les carrières médicales hospitalières ; donner envie aux PH de rester à l’hôpital en favorisant « la motivation professionnelle » et en encourageant « la diversification des parcours professionnels » ; promouvoir des politiques sociales et managériales envers les personnels médicaux. Mais, motus sur les moyens qui seront dégagés pour ce plan. Le présidente de l’INPH, Rachel Bocher, a observé que rien dans le projet de loi de santé ne semblait vraiment aller vers une amélioration de l’attractivité médicale à l’hôpital et souligné que « beaucoup de temps a passé depuis l’ouverture de la réflexion ». Rachel Bocher appelle donc à rattraper le temps perdu en appliquant la formule des « trois R : revalorisation, remédicalisation, responsabilisation ». Mais c’est bien sur le premier R que les négociations risquent d’achopper…




Attractivité : les préconisations de la mission Le Menn

Marisol Touraine a annoncé un plan pluriannel pour l’attractivité médicale à l’hôpital dans les semaines à venir inspiré du rapport que lui a remis en juillet Jacky Le Menn. 

Le directeur d’hôpital honoraire et ancien sénateur, Jachy Le Menn, a rendu en juillet à la ministre de la Santé son rapport sur l’attractivité médicale à l’hôpital que Marisol Touraine lui avait commandé en novembre 2014. La ministre n’a pas souhaité le rendre public dans un premier temps pour favoriser un « travail serein » avec les représentants des hospitaliers.

D’après l’agence APM, qui a pu en prendre connaissance, ce rapport insiste sur « le choc démographique » concernant le corps des praticiens hospitaliers (PH), indiquant qu’entre 2015 et 2020 « près de 30 % du corps des PH devraient partir à la retraite ». Et même si le numerus clausus a été relevé, l’arrivée de jeunes médecins « n’aura de plein effet qu’à partir de 2020 ».

Un choix d’abord d’ordre privé

Si toutefois ces jeunes médecins choisissent l’hôpital public, puisque l’on sait que ces dernières années, les jeunes professionnels font souvent le choix d’exercer dans le secteur privé, à temps partiel ou à temps plein, « mais aussi les professionnels plus chevronnés » note le rapport, qui insiste sur les écarts de rémunération entre le public et le privé, en défaveur du premier. En conséquence, « les employeurs doivent développer des stratégies de fidélisation s’ils veulent les conserver ». Pour ce faire, le rapport propose « un bouquet de préconisations ».

Parmi les mesures « immédiates », la mission conduite par Jacky Le Menn confirme sa proposition de permettre aux PH qui le souhaitent de travailler jusqu’à un âge plus avancé (72 ans) et celle d’assouplir les modalités du cumul emploi/retraite. Plusieurs de ses propositions vient à « assainir le recours au marché de l’intérim médical » et à donner aux praticiens un cadre permettant d’effectuer des missions de remplacement, notamment par la création de pools régionaux de PH titulaires.

Mais pour « dynamiser » les carrières de PH, la mission conseille aussi d’améliorer la rémunération en début de carrière (les cinq premières années) et de « réformer les régimes indemnitaires des praticiens ».

Dans la même optique de « dynamiser les parcours professionnels », le rapport Le Menn propose de généraliser l’élaboration de profils de postes et prendre des mesures pour reconnaître la pluralité des missions confiées aux PH, par exemple sous forme de valences d’enseignement et de recherche et de l’obtention du titre de chargé d’enseignement pour les PH concernés.

Ces mesures ont un coût, que la mission menée par Jacky Le Menn n’a pas chiffré, n’ayant eu ni le temps ni les moyens, explique-t-elle, de réaliser une étude d’impact organisationnelle et budgétaire de chacune. Subodorant cependant que le coût des telles préconisations est inenvisageable dans le contexte économique « contraint » actuel,  le rapport suggère qu’elles soient étalées sur une durée qui devrait cependant être « inférieure à cinq exercices budgétaires » et qu’elles concernent en priorité « les zones en tension ».  Par ailleurs, la mission estime que des économies « intelligentes et responsables » peuvent être dégagées grâce à la création des Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) et à « une maîtrise rénovée de l’emploi médical temporaire à l’hôpital ».




Reprendre le contrôle de soi sur le « data driven »

Dans notre précédent numéro, nous avons vu à quel point notre univers peut être surveillé, non pas seulement par l’extérieur (ceux qui ont un possible accès à nos données), mais aussi – et surtout – par nous-mêmes en introduisant des applications dans notre vie quotidienne.

Des études ont été lancées sur les nouvelles addictions que sont les applications connectées, à tel point que les psychologues tirent la sonnette d’alarme, non pas seulement sur les enfants qui passent trop de temps sur leurs tablettes, mais également sur les adolescents et les adultes pour qui connexion rime avec sociabilité. La vie « Data-Driven » interpelle les anthropologues et autres chercheurs qui explorent la relation entre la conception de la technologie et la dépendance.

Les gens ne sont pas intéressés par les données, ils veulent simplement des objets de haute technologie qui les aident et les transforment dans leur vie courante. L’enjeu n’est pas tant la connaissance de soi que d’objets qui prennent soin de vous. Mais en élargissant ces aides technologiques à la hauteur d’une journée (voir notre précédent numéro), on mesure à quel point le temps nous échappe et peut nous amener vers notre propre infantilisation.

Générateurs de stress

Utiliser par exemple une application qui vibre lorsque vous ne vous tenez pas correctement en corrigeant vos postures vous aide à vous tenir droit toute la journée. Vous pouvez également surveiller votre cerveau et comprendre votre état d’esprit, en quelque sorte une méditation connectée et assistée qui vous aiderait à retrouver votre calme (je vois déjà Matthieu Ricard en sourire). C’est l’un des pouvoirs de la technologie à vivre mieux, pourrait-on dire. Une technologie statique, passive et qui ne persiste pas dans le temps n’engage à rien, a rapporté Nuance Communications en rappelant que les utilisateurs abandonnent les objets quelques semaines après s’être connectés…

Si croisement technologique et connecté entre la mesure de soi et le comportement pose de réels problèmes en générant une forte anxiété, les chercheurs se sont aperçus qu’ils se révélaient peu utiles.

Sur l’alimentation par exemple, une étude sur les applications déterminant les apports caloriques [1] a montré que seules 3 % sont utilisées plus d’une semaine. Il a également été montré que ces applications tendent plutôt à décourager quand les progrès ne sont pas au rendez-vous, ce qui est le cas de la plupart des utilisateurs.

Il est en effet impossible, par exemple, de déterminer précisément son apport calorique via ces applications : imprécision, liste des ingrédients incomplète… Beaucoup de personnes sous-, ou sur-estime, leur apport calorique, ce qui favorise également l’abandon. Pire, il est plus facile d’obtenir les informations nutritionnelles des aliments industriels, ce qui favorise évidemment une alimentation moins saine et équilibrée.  Enfin, le temps passé à rentrer les informations nutritionnelles devient chronophage.

Tout cela conduit un individu à être moins spontané et à éviter les situations inconnues ou non quantifiables, ce qui sous-entend une dépendance directe des applications. Un tracker d’activité (ou montre connectée pour faire simple) qui a du mal à maintenir son signal donne une certaine angoisse à celui ou celle qui l’utilise en permanence (courir dans les bois par exemple). La connexion devient anxiogène, d’autant qu’il interfère en permanence dans votre emploi du temps. Un chercheur en avait d’ailleurs fait l’expérience : « Mon anxiété était le résultat de ne pas être en mesure de capturer de manière fiable mes données tout en me sentant obligée de le faire. Sans mesures fiables et complètes, comment pouvais-je devenir la version idéale de moi-même ? » [2]

Pas sûr pourtant que cela réponde aux angoisses que le contrôle de soi génère. Car si demain les objets parviennent à développer des mesures toujours plus fines et précises, ils ne parviendront pas pour autant à faire s’éloigner l’angoisse que la mesure et le contrôle de soi cherchent à combler : c’est-à-dire devenir cet inatteignable modèle idéal de soi-même. n

[1] Science of Us

[2] Candice Lanius (@misclanius) pour Cyborgology,




Anticancéreux : Comment endiguer leur coût prohibitif

On soigne de mieux en mieux les cancers mais à un prix qui commence à poser un sérieux problème qui était au centre d’une récente réunion organisé au Sénat par Unicancer R&D et ses partenaires et au cours de laquelle le président de la HAS, Jean-Luc Harousseau, a esquissé des solutions possibles.

Trouver le juste prix entre l’innovation thérapeutique, la R&D et le retour sur investissement. © Benis Arapovic
Trouver le juste prix entre l’innovation thérapeutique, la R&D et le retour sur investissement. © Benis Arapovic

Devant l’inflation observée depuis quelques années, le problème du coût des anticancéreux devient criant, surtout dans le contexte d’un Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM) qui se réduit comme peau de chagrin. Comment faire pour ne pas compromettre l’accès des malades aux anticancéreux innovants sans faire exploser l’Assurance Maladie déjà déficitaire, sans en arriver à des mesures radicales de rationnement comme au Royaume-Uni où la Cancer Drugs Fund a décidé récemment le déremboursement de 17 anticancéreux.

Les chiffres donnent effectivement le vertige. Ainsi, dans le cancer du poumon Non A Petites Cellules (NAPC), « l’impact budgétaire sera très important », a souligné Jean-Luc Harousseau, le président de la Haute Autorité de Santé (HAS), avançant le chiffre de 3 milliards d’euros pour ce cancer très fréquent. Il a été possible de respecter l’ONDAM tant qu’il était à 2 % ou 2 % grâce à des efforts de l’industrie pharmaceutique, des baisses de prix et des déremboursements, a-t-il expliqué en substance.

Mais avec un ONDAM à 1,75 % et qui va rester sous la barre 2 %, dans les années à venir, « nous ne pourrons plus faire des économies. Ce ne sera pas soutenable et il en va de la pérennité du système français. Tous les médecins, y compris les cancérologues, vont devoir faire des efforts sur les prescriptions pas efficientes, ni pertinentes », estime Jean-Luc Harousseau pour qui la solution se trouve sans doute dans un juste prix pour l’innovation thérapeutique. « Certains prix sont déraisonnables et ne sont pas expliqués. Même si l’on sait que la R&D coûte cher et que certains recherchent un retour sur investissement rapide en raison de la compétition, les prix sont trop élevés », estime le président de la HAS qui plaide pour « plus de lisibilité sur les prix décidés par l’industrie pharmaceutique ».

Plusieurs pistes à l’étude

Rappelant l’introduction en France de l’évaluation médico-économique pour les médicaments qui auront un impact significatif sur les dépenses d’Assurance Maladie, Jean-Luc Harousseau estime qu’il existe plusieurs pistes pour éviter les restrictions d’outre-Manche. Ainsi le système des prix conditionnels ou « risk sharing », pratiqués en Angleterre et en Italie, qui consiste à accorder un prix à un laboratoire qui doit ensuite démontrer que le bénéfice a bien été apporté.

Une autre piste est celle des prix au parcours de soins pour ne pas cumuler les coûts des nouveaux médicaments qui seront prescrits en association. Difficile à réaliser en France où les registres sont insuffisants, reconnaît Jean-Luc Harousseau, qui suggère cependant d’effectuer « des expérimentations pour une maladie donnée à un stade donné ».

En outre, aux critères actuels de fixation des prix des médicaments, il préconise d’ajouter le critère de durée du traitement. Il explique qu’on détermine un prix par rapport à la situation de prescription immédiate comme pour Glivec (imatinib, Novartis) qui a été comparé à une greffe de moelle osseuse « alors que les patients le prennent maintenant pendant 10 ans et cela fait boule de neige entre les nouveaux patients et ceux cumulés d’année en année, alors que le prix n’a pas beaucoup baissé ».

Enfin, prenant l’exemple de l’anti-VHC Sovaldi dont le remboursement intervient à un certain stade de la maladie (F2), Jean-Luc Harousseau propose d’entamer une réflexion pour donner un anticancéreux aux malades qui en ont vraiment besoin, ce qui suppose d’avoir des marqueurs permettant d’identifier les patients qui en tireront un réel bénéfice. « On a vraiment besoin de savoir quels sont les malades qui en auront besoin car si on les donne à tout le monde, il y aura des restrictions et on dira à un moment pas plus de 5 000 malades par an, et cela se traduira par des pertes de chances, prévient le président de la HAS. Ce qui compte, c’est de donner accès au meilleur traitement à tous ceux qui en ont besoin. »

L’entreprise n’est pas aisée mais l’enjeu est de taille, d’autant que ce qui concerne la cancérologie concerne déjà ou concernera demain d’autres spécialités.




Eric Perchicot : « Nous allons vers une médecine d’accompagnement »

Interview du Président du SNSMCV, Eric Perchicot

Que vous inspire ce débat sur l’observance ? 

Eric Perchicot : C’est un sujet passionnant et prioritaire. Avec la part croissante des malades chroniques, nous passons d’une médecine curative à une médecine d’accompagnement où le médecin est là, moins pour guérir le patient chronique que pour cogérer avec lui sa maladie. Dans ce compagnonnage, obtenir l’adhésion du patient au principe de son traitement est une étape capitale dans sa prise en charge. A cet égard, je suis d’accord pour parler d’adhésion thérapeutique plutôt que d’observance, ce terme relevant d’un discours « descendant » du médecin vers le patient, pour ne pas dire condescendant. Donc, le rôle du praticien ne se réduit pas à la prescription, mais s’étend à l’explication du comment et du pourquoi, dans une perspective d’optimisation du traitement et de responsabilisation du patient. Et cela ne concerne pas seulement le médicament, mais aussi l’hygiène de vie à respecter, diététique, activité physique, etc. La démocratie sanitaire suppose que le patient a des droits, certes, mais aussi un rôle actif à jouer dans sa prise en charge, qu’il doit faire l’effort de comprendre la nécessité de son traitement et prendre conscience du coût investi par la collectivité.

Ce rôle du médecin suppose du temps…

E. P. : Evidemment, et l’on en revient toujours à la nécessité de valorisée la consultation. Il faudrait que les pouvoirs publics comprennent qu’investir dans cette valorisation n’est pas, au bout du compte de l’argent dépensé en plus, mais en moins : des traitements respectés sont des complications en moins et donc des coûts en moins. L’Education Thérapeutique du Patient (ETP) pourrait – et devrait – jouer un rôle important et permettrait de faire diminuer les complications des maladies chroniques. Que des « patients experts » y participent, c’est une évidence, les médecins ne pouvant pas tout faire. Le problème, c’est que l’ETP a été prise en main par des grands spécialistes, et doit obéir à des cahiers des charges d’une complexité rébarbative. Cela étant dit, je suis pragmatique : obtenir l’observance dans la prise des médicaments avec l’aide d’un semainier et par un discours commun de tous et le respect d’une bonne hygiène de vie constituerait déjà un grand pas. Je suis convaincu que l’avenir de la médecine est dans la prévention primaire et secondaire.




L’observance au cœur des débats

L’observance – et les moyens de l’optimiser – a fait l’objet de colloques cet été et d’un récent rapport de l’IGAS. Avec un point de convergence : le système de santé français qui privilégie le curatif est peu adéquat au développement de l’ « adhésion » ou de l’ « alliance » thérapeutiques. 

L'observance au cœur des débats.
Dans 70 % des cas, le patient n’a pas compris soit son traitement, soit sa pathologie, preuve que le temps de l’écoute, de l’explication et de la compréhension n’existe pas. Monkey Business – Fotolia

L’observance était le thème d’un « atelier de prospective » de la 5e université d’été de la performance en santé, organisée à la fin de l’été à Tours par l’Agence Nationale d’Appui à la performance des établissements de santé (ANAP).

Citant une étude réalisée par IMS Health sur le sujet, le directeur général d’Observia, société de conseil expert et de solutions technique en matière d’observance, Geoffroy Vergez, a indiqué que l’observance est inférieure à 50 % dans la plupart des maladies chroniques. L’oubli n’étant en cause que dans 30 % des cas, dans 70 % des cas, la non-observance serait donc « volontaire » ou résulterait d’une « non-compréhension du patient ». La peur des effets secondaires et l’impression qu’un médicament est inutile – surtout dans les maladies non symptomatiques – peuvent expliquer l’abandon du traitement, comme la dépression ou le déni de la maladie, mais aussi l’incapacité cognitive à suivre un traitement.

Pour Geoffroy Vergez, ces abandons de traitement s’expliquent par le fait qu’en consultation « le temps de l’écoute, de l’explication et de la compréhension n’existe pas ». Et pourtant, « dans 70 % des cas, le patient n’a pas compris soit son traitement, soit sa pathologie ». Normal, puisque notre système de soins est « organisé pour traiter les patients à l’acte et non pour un suivi au long cours ». Or, les besoins de soins concernent de plus en plus des pathologies chroniques. « On a l’arsenal thérapeutique, mais il faut maintenant que les patients comprennent le “bénéfices/risques” des traitements et des parcours de soins », estime Geoffroy Vergez.

Et bien entendu, l’observance n’a pas trait qu’aux médicaments, mais s’étend aux règles hygiéno-diététiques et c’est pourquoi l’éducation thérapeutique « est extrêmement importante », selon le Pr Christine Sylvain, hépatologue, chef de service au CHU de Poitiers. Elle explique qu’une étude américaine sur les effets d’un dispositif électronique de suivi de l’observance a montré l’importance de « revoir le patient, discuter avec lui » pour mettre en évidence des éléments expliquant qu’il ait arrêté son traitement.

Pour elle, cette « consultation d’observance » serait un « espace de liberté » et de dialogue permettant au patient, par étapes, « d’assimiler tous les éléments de sa prise en charge » et devrait inclure, outre le médecin et son patient, les équipes soignantes et les associations de patients. Lesquelles ont d’ailleurs recommandé lors d’un colloque organisé fin juin par le Collectif Interassociatif Sur la Santé (CISS) de préférer au terme d’observance, qui suggère l’obéissance, celui d’ « adhésion thérapeutique ».

L’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS), dans un rapport sur l’observance remis cet été à Marisol Touraine, préconise quant à elle de parler plutôt d’ « alliance » entre médecin et patient, dans une volonté de rechercher « le traitement le plus acceptable par l’un et par l’autre, en s’appuyant sur une double expertise, celle du médecin utilisant les données actuelles de la science et celle du patient qui vit les troubles dont il est affecté ». Pour développer cette alliance, l’IGAS recommande de promouvoir l’ETP qui doit être considérée « comme une composante de l’acte de soin » et à ce titre « faire l’objet d’un financement sur le risque, aussi bien à l’hôpital qu’en ambulatoire, au fur et à mesure que seront démontrés les gains d’efficience qu’elle permet, rendant possible son inscription à la nomenclature des actes ». Enfin, l’IGAS se prononce contre le remboursement des soins conditionné à l’observance thérapeutique. Si elle admet qu’il peut paraître « juste de réduite en tout ou partie l’effort de solidarité » pour un patient non observant, elle souligne que la mesure de l’observance est « difficile et souvent imprécise » et que les seuils d’observance « ne reposent pas toujours sur une argumentation scientifique incontestable ». En outre, l’IGAS souligne « le paradoxe de compliquer l’accès aux soins du patient en créant une barrière financière » et estime que la modulation du remboursement « assimilée à une sanction » pourrait être « perçue comme une injustice » alors même que les dispositifs d’amélioration de la qualité des soins reposent sur une incitation financière pour les professionnels de santé.




Accessibilité : MG France demande un moratoire, la CSMF un délai

Une fois n’est pas coutume, les deux syndicats sont d’accord pour contester les délais octroyés aux médecins libéraux pour mettre leurs cabinets en conformité avec les normes d’accessibilité. Les praticiens dont le cabinet n’est pas accessible aux personnes handicapées avaient jusqu’au 27 septembre pour déposer en préfecture un Agenda d’Accessibilité programmé (Ad Ap) et trois ans pour réaliser les travaux nécessaire. Constatant les nombreuses difficultés rencontrées par les médecins dans cette démarche, et en particulier les difficultés financières, MG France demande un moratoire et que les pouvoir publics engagent « immédiatement » une négociation avec les médecins libéraux. Dans cette attente, le syndicat conseille aux généralistes « de ne pas s’engager dans de coûteuses études préalables qui ne règlent aucune de leurs difficultés » et de « différer, dans l’attente du résultat de cette négociation, leurs démarches administratives ». La CSMF a demandé également le report de la date boutoir du 27 septembre et « réclame des aides et un accompagnement de l’Etat pour permettre aux médecins libéraux de mettre leurs cabinets aux normes d’accessibilité dans de bonnes conditions ».




La Cour des Comptes prône le conventionnement sélectif

Dans son rapport annuel sur l’application des lois de financement de la Sécurité Sociale, la Cour des Comptes émet des doutes quant à la réalisation du plan triennal d’économies programmé dans le cadre de l’Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM). Et provoque l’ire des libéraux en prônant le conventionnement sélectif.

La solution du conventionnement sélectif de la Cour des Comptes ne se ferait pas uniquement sur les professions visées aujourd'hui pour leurs excès – comme par exemple les kinésithérapeutes – mais à l’ensemble des professionnels de santé, y compris les médecins. © 6sous - Fotolia
La solution du conventionnement sélectif de la Cour des Comptes ne se ferait pas uniquement sur les professions visées aujourd’hui pour leurs excès – comme par exemple les kinésithérapeutes – mais à l’ensemble des professionnels de santé, y compris les médecins. © 6sous – Fotolia

Les Sages de la rue Cambon jugent la réalisation des économies déjà programmées dans le cadre de l’ONDAM « empreinte d’une grande fragilité ». Pour mémoire, le plan d’économies triennal 2015-2017 est de 9,3 milliards d’euros, dont 6,3 milliards attendus des soins de ville et 3 milliards attendus des établissements hospitaliers, dont 1 milliard grâce au « virage ambulatoire ». Pour cette année, première de la mise en œuvre du plan, ce sont 3,2 milliards d’euros d’économies qui sont attendus, « en hausse de 800 millions d’euros par rapport à 2014 », souligne le rapport.

Le septicisme de la Cour des Comptes

Si la Cour des Comptes estime que « l’élaboration d’un programme pluriannuel d’économies associé à la trajectoire d’évolution de l’ONDAM constitue en soi un progrès notable dès lors qu’un certain nombre d’actions ne peuvent avoir d’effets que dans la durée », elle se montre sceptique quant à sa réalisation. Pour elle, en effet, ce plan est fragile « faute que soient associées systématiquement aux objectifs les mesures précises permettant de les atteindre ». « Leur déclinaison prévues dans chacune des lois de financement successives risque de provoquer des difficultés à respecter des ONDAM très contraints, eu égard aux délais inévitables de mise en œuvre et de montée en charge, alors même que pèsent d’ores et déjà sur leur exécution de nombreux risques », estime la Cour des Comptes. Pour elle, il faut « renforcer les modes de régulation infra-annuels de la dépense, non seulement hospitalière comme cela existe déjà, mais aussi en matière de soins de ville », vue « la faiblesse des marges de précaution disponibles dans le contexte d’un ralentissement – qui va s’accentuer – du taux de progression de l’ONDAM ».

Elle appelle à une diminution du seuil d’intervention du comité d’alerte (aujourd’hui enclenché quand le risque de dépassement de l’ONDAM est de 0,5 %), qui lui semble « d’autant plus indispensable » que « des contraintes vont peser sur le respect de l’ONDAM en 2016 et 2017 par rapport à 2015 ». Parmi ces contraintes, elle cite « la remontée prévue des taux d’inflation, qui accentuera la pression sur les postes de dépenses des établissements de santé », les « négociations en cours ou à venir avec les professionnels libéraux et dans la fonction publique », ainsi que les « innovations thérapeutiques ».

Une préconisation à l’ensemble des professionnels de Santé

La Cour des Comptes insiste donc sur le fait que l’atteinte des objectifs affichés de ralentissement de la progression de l’ONDAM pour 2016 et 2017 nécessite « la mise en œuvre, sans attendre, de réformes structurelles dans le secteur des soins de ville comme dans celui des établissements de santé ». Les medias ont largement relayé en particulier l’envolée des dépenses de soins infirmiers et de kinésithérapie mise en exergue par les magistrats de la rue Cambon, ainsi que la solution du conventionnement sélectif qu’ils préconisent d’appliquer non seulement à ces deux professions, mais plus largement « à l’ensemble des professions de santé, y compris les médecins ».

Inutile de dire que cette préconisation a suscité une levée de boucliers chez les médecins libéraux. La CSMF, qui « défendra toujours la liberté d’installation des médecins libéraux, corollaire de la liberté des patients de choisir leur médecin », fustige l’opinion de la Cour des Comptes selon laquelle un conventionnement sélectif permettrait de fixer plus clairement « des objectifs de gains d’efficience, en dotant les ARS de prérogatives accrues pour les réaliser » et y voit un nouvel exemple de « la volonté d’étatisation du système de santé, à travers les ARS, véritables bras armés de l’Etat dans les régions ».




Projet de loi de santé : les médecins toujours mobilisés mais moins unis

L’été n’a pas calmé la colère des médecins libéraux, toujours aussi opposés au projet de loi de santé. Actions coup-de-poing et mots d’ordre de grève se multiplient mais, campagne électorale oblige, l’unité syndicale du printemps n’est plus là.

On a vu bien des mouvements sociaux se diluer dans les chaleurs estivales… Et bien, il n’en est rien concernant la fronde des médecins libéraux contre le projet de loi de santé. La rentrée les a trouvés toujours aussi mobilisés, collectifs et coordinations ont fleuri dans les départements et les actions se sont multipliées. Ainsi « la marche pour la santé » initié par MST 71, collectif de professionnels de santé de Saône-et-Loire, a relié Châlon-sur-Saône à Château-Chinon, première sous-préfecture de France dépourvue de généralistes.

Les généralistes de l’UNOF ont fait leur tour de France en quinze étapes, marqué par des « opérations coup-de-poing » pour faire entendre leur refus de la loi de santé et appeler les médecins à la désobéissance civile avec le refus d’appliquer le tiers-payant généralisé. La désobéissance civile est d’ailleurs la stratégie retenue par la CSMF, chez ses généralistes (UNOF) comme chez les spécialistes (UMESPE). Elle se tient à l’écart – en tout cas pour l’instant – des mots d’ordre de grève et autres fermetures de cabinets.

A l’inverse, trois syndicats, le Syndicat des Médecins Libéraux (SML), Le Bloc, la Fédération des Médecins de France (FMF), ainsi que l’Union Française pour  une Médecine Libre (UFML) ont appelé au « blocage sanitaire » à compter du 3 octobre. Annoncée comme illimitée, cette grève pourrait n’être que temporaire, histoire de na pas brûler toutes les cartouches à la fois : s’il était important de mobiliser les médecins lors du passage de la loi devant le Sénat, il sera tout aussi important de les mobiliser quand le projet repassera à l’Assemblée Nationale pour le vote définitif, à l’automne. D’autant que, si les sénateurs ont répondu aux souhaits des médecins en modifiant largement le texte, supprimant notamment le tiers-payant généralisé, on sait que, la procédure d’urgence ayant été décrété pour ce texte, c’est l’Assemblée Nationale qui aura le dernier mot et votera un texte conforme aux volontés gouvernementales.

Une unité fissurée

Quant à MG France, tout en appelant à l’unité syndicale, mais estimant qu’il n’est pas « sérieux » de faire grève un samedi ou un dimanche (NDLR : le 3 octobre est un samedi), c’est pour le 5 octobre que le syndicat de généraliste a lancé son mot d’ordre de grève contre le tiers-payant généralisé. L’UNOF a décliné l’invitation à y participer : « c’est le pyromane qui appelle les pompiers pour éteindre l’incendie », a ironisé  son président, Luc Duquesnel.

Comme en témoigne ce genre de remarques ironiques, la belle unité syndicale du printemps s’est quelque peu fissurée. La campagne pour les élections aux Unions Régionales des Professions de Santé (URPS) qui sont en cours n’y est pas étrangère, qui voit les alliés contre le projet de loi de santé devenir des candidats concurrents. n




L’Homme de Tollund (IIIe siècle av. J.-C.)

L’homme de Tollund fut découvert, fortuitement, le 8 mai 1950 dans les tourbières du Danemark à dix kilomètres à l’Ouest de Silkeborg. Son état de conservation, notamment de son visage, était tel, que les découvreurs, les frères Höjgaard, venus prendre de la tourbe pour se chauffer, ont cru au meurtre d’un adolescent récemment disparu. Très rapidement, les analyses faites par les archéologues, montrent qu’il s’agit  d’un individu appartenant au groupe de ce que l’on appelle les hommes des tourbières, un homme de l’âge du fer (VIIIe – Ier siècle avant notre ère).  

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Une découverte stupéfiante

Trouvé à 2,50 mètres sous le sol, il était en décubitus latéral droit, les membres inférieurs repliés sur le torse, une main au dessus du genou, l’autre sous son menton. Il avait une corde tressée de deux bandes de cuir, attachée autour du cou à l’origine de traces profondes sur le devant et les côtés de la gorge (rien au niveau de la nuque). Les cheveux sont coupés courts. Le visage, très bien conservé, est surprenant de réalisme, avec une pilosité d’un à  deux millimètres prés de la lèvre inférieure, les sourcils sont intacts. En raison de la rigidité cadavérique, il a du être enterré huit à douze heures après sa mort, après un à trois jours d’attente. Il a sans doute marché pieds nus car il a deux cicatrices aux pieds dont une s’est infectée.  Des empreintes du pouce droit ont pu être réalisées.

corde_corpsSa taille était d’un mètre soixante et un, sa peau est tannée (liée à l’acidité du milieu). Il portait, un bonnet fait de huit pièces de mouton, doublé de laine et tenu par une fine lanière située sous le menton et, une ceinture étroite en cuir de buffle. La désagrégation (milieu acide) des vêtements constitués en fibres végétales, peut expliquer leur absence.

Son cœur, ses poumons et son foie ont été bien préservés. Les différentes études ont démontré qu’il a pris son dernier repas de douze à vingt-quatre heures avant sa mort. Il était constitué de purée d’orge, de graines de lin, de carmeline et de mauvaises herbes, mais sans fruit (mort probable en hiver). L’analyse des dents confirme qu’il n’avait pas moins de 22 ans. La présence de d’arthrose vertébrale permet de situer son âge autour de trente, quarante ans. Il souffrait de tricocéphalose. Il est mort par pendaison mais sans chute libre (pas de dislocation vertébrale).

Selon la palynologie, il aurait vécu vers 350 av. J.-C. La datation au carbone 14 situe sa mort vers 355 av. J.-C. L’échantillon d’ADN d’un cheveu établit  son existence entre 265 et 40 av. J.-C.

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Les hommes des tourbières 

Il s’agit de restes humains naturellement momifiés, retrouvés dans les tourbières  du Nord de l’Europe (Scandinavie, Allemagne du Nord, Iles britanniques). La momification naturelle est liée au phénomène de la dessiccation correspondant au processus de déshydratation.

Si les momies égyptiennes sont le fait d’un phénomène culturel  (par l’action de l’homme), la momification des hommes des tourbières repose sur la particularité du climat et du milieu. Les tourbières se forment en règle dans des cuvettes d’eau stagnante sur un sol de schiste ou de granit (donc acide). La compression de la tourbe ne permet pas la pénétration d’oxygène et la température régnante est inférieure à 4°C.  Dans ces lieux venteux, froids, anaérobiques, acides et cumulant continuellement de l’eau, les micro-organismes ne peuvent pas se développer et, ainsi, la putréfaction se réaliser. Ces conditions spécifiques permettent  la conservation de la peau, des cheveux et des organes internes. Il est, par exemple, possible de faire des analyses ADN pour préciser l’origine géographique, de connaître la dernière alimentation, etc. Par contre le milieu acide dissout le carbonate de calcium, aussi, le squelette est-il rarement intact.

L’homme de Grauballe, la Dame d’Elling…

Plus d’un millier de corps datant de l’âge du fer, ont été retrouvés dans les tourbières du Nord de l’Europe. Les momies artificielles sont vidées des intestins, du cerveau, des muscles, et embaumées, ce qui n’est pas le cas des cadavres des tourbières qui présentent des échantillons de peau et d’organes internes très bien conservés. Parfois sont préservés les tatouages, les empreintes digitales, ou encore certains indices permettant de déterminer les causes de leur mort. Si certains individus semblent morts par accident d’autres ont été étranglés ou égorgés ,ce qui posent de nombreuses questions sur l’origine de leur mort : sacrifices rituels, exécutions ?

L’homme d’Old Croghan (Irlande), âgé de vingt à trente ans, a été poignardé au niveau de la poitrine, l’un de ses bras a été profondément entaillé, et ses seins tranchés (torturé avant d’être mis à mort ?) ; l’homme de Grauballe (Danemark) a été égorgé et assommé (avant ou après le mort ?) ; la jeune fille d’Yde (Pays Bas) a été étranglée et poignardée ; la Dame d’Elling (Danemark) de vingt-cinq à trente ans a été pendue. D’autres corps ont été retrouvés poignardés et éviscérés, ou la tête fracassée, ou décapités…

Une offrande aux dieux

On pourrait penser que ces morts ont été torturés ou assassinés. Cependant ils ont reçu des funérailles soignées (soin dans la position, soin du corps parfois enveloppé d’un vêtement). Les cadavres sont déposés volontairement dans la tourbière. Pour les hommes de l’âge du fer, les tourbières avaient une signification particulière. Ces mises à mort dépasseraient le cadre de la justice et les raisons morales. On y retrouve des offrandes de valeur, comme le chaudron de Gundestrup, des collections d’armes (Illerup Adal), des dépôts de vaisselle en terre cuite, des morceaux de bétail, etc.

Les tourbières seraient habitées par les dieux, un lieu de passage entre le monde des vivants et celui des morts, ce qui expliquerait la pratique d’inhumations dans de tels endroits.

Différentes hypothèses ont été émises :

– une offrande aux dieux pour les remercier de pourvoir à l’approvisionnement en tourbe permettant de supporter les hivers longs et froids,

– parce que les tourbières leur procurent le fer (la seule source au Danemark de minerai de fer),

– pour faire revenir le printemps (rite de fécondité).

Le meurtre, un suicide semblent moins probables.

On peut observer l’homme de Tollund au musée de Silkeborg dans le Jutland.

Christian Fischer, conservateur du Musée de Silkebo : les derniers instants de l’Homme de Tollund.

« Un jour d’hiver – ou peut-être était-ce tôt au printemps –, il y a approximativement 2 300 ans, un homme s’assied pour manger un repas de gruau, ou une sorte de porridge cuisiné de graines et de céréales broyées avec une meule de pierre. L’homme est en bonne santé, ou tout au moins son état ne trahit aucun signe de maladie apparente. Environ 12 heures après son repas, il est pendu – probablement en sacrifice aux dieux. Tout ceci s’accomplit sans l’usage de la force, car ses poignets et ses chevilles n’ont pas été ligotés. Son corps ne chute pas brutalement durant la pendaison. Une fois mort, la corde de cuir qui a servi à le pendre est coupée et son corps est transporté à pieds dans la tourbière sur un chemin de planches. Il est déposé en position fœtale, dans un trou dans la tourbe, préalablement drainé. Sa face devrait présenter les stigmates de la pendaison – les yeux exorbités, la bouche ouverte, la langue pendante. Mais on s’est assuré que son visage paraisse si paisible qu’on le croit endormi. (…) On ne sait pas à quel dieu il a été sacrifié. Mais le fait que les hommes des tourbières du Danemark se trouvent là où la tourbe était utilisée à l’âge de Fer laisse à penser que ces corps ont été sacrifiés aux dieux en remerciement pour la tourbe qui leur a été prélevée. »

 

 Bibliographie

1/ The Tollund Man- A face from Prehistoric Denmark : www.tollundman.dk

2/ Chloé CORBEX, Charlotte DEFER. L’homme de Tullund, la Sorbonne 2015.

3/ P-V GLOB. Les hommes des tourbières. « Résurrection du Passé ». Ed. Fayard Paris 1966

4/ Valérie Morisson. L’intemporel incarné : les corps des tourbières entre métaphore et littéralité. etudesirlandaises.revues.org › Numéros › 34.1 › Art et image




Gewurztraminer Qvevri 2011 – Vin Orange

Le drapeau tricolore des vins : rouge, blanc, rosé, viendrait-il à se déchirer ? Car voilà qu’apparaît une 4e couleur : l’orange.

L’histoire des vins oranges remonte à plusieurs millénaires en Géorgie, mais ils n’ont été « redécouverts » que depuis une vingtaine d’années par les producteurs occidentaux révélant, de ce fait, non seulement une nouvelle couleur, mais surtout un nouveau goût dans le vin.

Le vin orange est tout simplement un vin blanc vinifié comme un vin rouge. Classiquement, les raisins blancs, après vendange, sont, de suite, pressés et le jus immédiatement mis en fermentation. Pour les vins oranges, la fermentation s’opère sur des raisins entiers, égrappés ou non, le jus restant en contact, plus ou moins longtemps avec les peaux et autres éléments solides qui contiennent des tanins, polyphénols pour certains colorants. Ceux-ci confèrent cette couleur orangée et une certaine tannicité au vin.

Cette opération nécessite qualité et maturité optimales des raisins, car les longues macérations permettent une forte extraction de substances aromatiques. Plus les raisins sont mûrs et sains, plus le bouquet aromatique sera noble, plus les températures seront stables et fraîches, plus subtils seront les arômes. En outre, les structures solides doivent être toujours immergées, pour éviter le contact avec l’air et l’apparition de bactéries acétiques. C’est là qu’intervient l’amphore, dont les dimensions et la forme garantissent une température fraîche, constante et uniforme dans tout le liquide et une mineure surface de son exposition à l’air. Mais 2 difficultés apparaissent : les jarres traditionnelles de Géorgie nécessitent un tapissage interne, pour rester étanches au liquide et poreuses à l’air, habituellement par de la cire d’abeille qui apporte des arômes particuliers très différents du boisé classique. De plus, leurs contenances, au minimum 500 litres, obligent, pour garder une t ° constante basse et éviter l’éclatement, d’être enterrées, d’où les puissantes notes terreuses et racinaires qui peuvent souvent rebuter.

Quoiqu’il en soit, cette vinification par macération des vins blancs, qu’elle s’opère ou non en amphores enterrées, connaît un succès grandissant, illustré par Radikon, Gravner (Frioul), Movia (Slovénie), Mathier (Valois), Gauby (Roussillon), Tissot (Jura), Bannwarth (Alsace).

L’aventure, pour Laurent Bannwarth, débute en 2001, lorsqu’il accueille un étudiant géorgien qui l’amène à s’intéresser au mode original de vinification dans son pays. Viticulteur déjà réputé pour son choix d’agriculture biologique et biodynamique, la qualité de ses vins, il décide d’adopter les techniques géorgiennes pour une petite partie de sa production et importe, avec difficultés, les jarres traditionnelles en terre cuite, les qvevris, qui donnent leur nom à ses cuvées.

A l’issue du pressurage, le jus est mis à fermenter et à macérer avec les parties solides enfermées dans des sacs de jute, comme de géants sachets de tisane, immergés dans les jarres enterrées. La quantité de marc, la durée de l’infusion permettent de nuancer la couleur, l’extraction des tanins, et arômes. Au bout de 6 mois en moyenne, le vin est soutiré et relogé dans d’autres qvevris pour un élevage sur lies fines pendant 4 mois. La présence d’air et l’absence de voile levurien permettent une oxydation modérée et contrôlée. Il n’y aucun levurage, sulfitage pendant la vinification, ni collage ou filtration pour la mise en bouteille, ce qui aboutit à un vin le plus naturel possible.

Parmi les quatre cuvées oranges obtenues par macération dégustées au domaine, le Gewurztraminer 2011 nous est apparu le plus convaincant. La robe soutenue d’un bel orange saumoné aux reflets acajous d’un vieux cognac est légèrement trouble (absence de filtration). Le nez est envahi par des fragrances prégnantes de rose fanée, de fruit de la passion, d’orange sanguine typiquement Gewurztraminer, puis se révèlent progressivement de riches arômes d’épices, poivre blanc, fruits secs et des notes de cire d’abeille, d’encens, de fumée. En bouche, s’exhalent beaucoup de prestance, une saveur prenante, des tanins suaves liés à un peu de sucre résiduel. La longue finale fait ressortir les flaveurs typiques de vin orange : notes racinaires d’humus, de mousseron.

En résumé, ce Gewurztraminer « Qvevri » développe une tonicité, une fraîcheur de tanins et une puissance des expressions aromatiques jusqu’ici inconnues qui réellement « décoiffent ».

Les vins oranges arrivent sur nos tables à l’improviste, leurs arômes, textures, saveurs particuliers, leur structure tanique créent une nouvelle dimension et une grande richesse en matière de mariages culinaires, mais tout reste à découvrir ! D’emblée, je proposerai des accords autour de la terre, du fumé, des épices. J’ai essayé, avec une réussite certaine, de goûter ce Gewurztraminer Qvevri en apéritif sur poissons fumés, œufs de lump, tarama. Il s’accordera probablement avec des plats orientaux épicés, des tajines… mais je le positionnerai préférentiellement, pendant l’automne, pour escorter viandes fumées, poêlées de champignons, châtaignes rôties. Il se confrontera, sans difficulté, à des fromages forts, époisses, vieux lille et surtout munster.

Petits conseils de dégustation : ces vins ne doivent pas être servis frais, mais chambrés comme un vin rouge, le carafage est préconisé après ouverture, il faut les boire rapidement ( !) après le débouchage, car ce sont des vins « vivants » qui évoluent vite.

Laurent Bannwarth 68420 Obermorschwihr




Cardiologie nucléaire

Comme le rappellent les auteurs dans leur préface, ce livre est un peu la suite de leur « atlas pratique de scintigraphie myocardique » publié en 2006, qui avait alors connu un succès rapide et conséquent. Entre-temps, des changements substantiels ont vu le jour, qui ont justifié la réécriture de cet atlas en y intégrant les progrès récents de la discipline.

L’ouvrage actuel présente les outils, les procédures d’examen et les résultats en fonction de la pathologie ainsi que les apports technologiques récents que constituent les nouvelles caméras à semi-conducteurs CZT, qui améliorent de beaucoup la qualité diagnostique tout en réduisant drastiquement la toxicité potentielle.

Après des rappels techniques, les pathologies abordées sont représentées selon une double approche, la séméiologie topographique et la séméiologie clinique. Dans ces deux parties, les auteurs on choisi de présenter des cas cliniques, exposés de façon homogène et systématique, incluant à chaque fois les antécédents des patients et les examens pratiqués, coronarographie et scintigraphies de repos et d’effort. On peut même accéder à des compléments vidéo à partir de QR-codes, faisant de ce livre une véritable banque d’images de cardiologie.

L’ouvrage aborde également les autres explorations nucléaires cardiaques que sont l’imagerie de l’innervation myocardique et de l’amylose cardiaque, la tomographie par émission de positons pour l’étude de la viabilité myocardique, la sarcoïdose et les endocardites infectieuses ainsi que la ventriculographie isotopique.

Nul doute que cet ouvrage, didactique et pratique, devienne rapidement indispensable aux médecins nucléaires ; il est certain qu’il sera également très utile aux cardiologues désireux de se familiariser avec les apports de la cardiologie nucléaire dans la prise en charge des patients coronariens et au dépistage des patients à risque.

Ce livre, édité aux éditions Lavoisier (prix de vente de 59,00 euros), a été rédigé par B. Songy, médecin nucléaire et cardiologue, M. Guernou, médecin nucléaire, et O. Bélissant, interne en médecine.




Recommandations et prescriptions en cardiologie

Pour notre plus grande satisfaction, Robert Haïat et  Gérard Leroy récidivent ! Nul doute que cette 6e édition des désormais célèbres  « recommandations », ne devienne comme les précédentes un best-seller, incontournable pour quiconque s’intéresse à la pratique de la cardiologie.

On ne compte plus les ouvrages de ces deux auteurs sur le sujet, des grands essais cliniques en pathologie cardiovasculaire à la lecture transversale des études, en passant par la cardiopathie ischémique, etc.

Cette nouvelle mouture, qui est, comme le précisent les auteurs dans leur avant-propos, le fruit de 25 années de travail, aborde à nouveau tous les domaines de la pathologie cardiovasculaire, en synthétisant les résultats des grands essais cliniques ; les noms des médicaments sont systématiquement cités et les dernières recommandations nationales et internationales sont autant que possible rappelées à la fin des chapitres.

C’est bien pour cela que ce manuel est devenu un classique attendu et gardé en bonne place dans les cabinets médicaux  français, mais aussi étrangers si l’on se réfère à ses nombreuses traductions et mises à jour ; en fait, l’ouvrage ne se limite pas – ce qui serait déjà un gage de réussite – à simplifier le travail du cardiologue ; comme le souligne le Président de la Société Française de Cardiologie dans sa préface, il doit avoir toute sa place dans la bibliothèque du médecin généraliste ou de l’étudiant, auxquels il va grandement simplifier la tâche en les aidant à se repérer dans la masse des études, ô combien nombreuses, et l’évolution permanente des prescriptions.

Faut-il rappeler que notre ami Robert Haïat est l’un des collaborateurs les plus fidèles et les plus éminents du Cardiologue, qui lui doit depuis plusieurs années les deux numéros des « Best of en cardiologie », que nos lecteurs attendent chaque fois avec la même impatience.

Toutes nos félicitations aux auteurs pour ce magnifique précis de prescription en cardiologie que chacun devrait se dépêcher d’acquérir (Editions Frison-Roche).




Et une nouvelle structure, une !

Tandis que la concentration des agences sanitaires est attendue, un décret du 2 septembre dernier crée un nouvel organisme : le Conseil national consultatif pour la biosécurité. Rattaché au ministère de la Défense et présidé par le secrétaire général de la Défense et de la Sécurité Nationale, ce conseil rassemble des scientifiques et des autorités de l’Etat et a pour mission d’éclairer les pouvoirs publics, la communauté scientifique et la population sur les bénéfices et les risques que présentent les progrès de la recherche en sciences de la vie.




Démission du président de la HAS

Selon nos confrères de l’agence APM, le président du Collège de la Haute Autorité de Santé (HAS), dont le mandat s’achevait le 31 janvier prochain,  aurait donné sa démission pour des raisons personnelles. La date de son départ effectif  n’était pas connue à l’heure du bouclage de ce numéro. Spécialiste d’onco-hématologie, chef du service d’hématologie du CHU de Nantes de 1984 à 2008, Jean-Luc Harousseau (67 ans) avait été nommé à la présidence de la HAS par Nicolas Sarkozy en 2011 pour un mandat de six ans. Depuis février 2014, il était également président de la Commission Evaluation Economique et de Santé Publique (CEESP).




Changement de statut pour l’IRDES

L’Institut de Recherche et Documentation en Economie de la Santé (ex-CREDES) qui avait jusqu’à présent le statut d’association loi de 1901 devient un Groupement d’Intérêt Public (GIP), suivant le vœu de son conseil d’administration qui souhaitait ainsi le « sécuriser et le pérenniser ». Outre ses membres traditionnels – Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS), Caisse Centrale de la Mutualité Sociale Agricole (CCMSA), Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants (RSI) – l’IRDES accueille deux nouvelles institutions : l’Etat, représenté par la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) et la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA).




Claude Evin prend la robe 

L’ex-ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection sociale de 1088 à 1991, l’ex-président de la FHF de 2004 à 2009 et l’ex-directeur de l’ARS Ile-de-France rejoint le cabinet d’avocats d’affaires international DLA Piper au sein duquel il conseillera les professionnels et les établissements de santé dans les domaines de l’appui stratégique, l’organisation sanitaire, les coopérations, le droit des établissements et des professions médicales et le droit de la responsabilité.




Une filière spéciale pour les déserts médicaux ?

Le député PS de Haute-Garonne Gérard Bapt propose d’augmenter de 10 % le numerus clausus pour l’affecter à une nouvelle filière aménagée à l’université lors de la Première Année commune aux études de Santé (Paces). Les étudiants obtenant des moyennes frisant 13,5 ou 14 sur 20 et devant, soit renoncer à leurs études médicales, soit les poursuivre dans un autre pays de l’Union Européenne, y seraient admis moyennant un engagement à exercer pendant 8 ans dans un territoire médicalement défavorisé. Le CNPS flaire la fausse bonne idée et « s’interroge sur les conséquences, notamment en termes de qualité des soins et de visibilité pour les patients, de la mise en place d’un système de diplômes à géométrie variable pour une même profession ».




Juppé bat sa coulpe

Invité aux Rencontres régionales de La Baule organisées par l’URPS, l’ancien premier ministre a fait exprimer ses regrets aux médecins libéraux concernant la réforme qu’il a initiée en 1995, les fameuses « ordonnances Juppé », qui instauraient notamment un dispositif de sanctions financières collectives pour les dépassements de certains. « Oui, il y avait des erreurs dans la réforme que j’ai présentée. Nous ne nous sommes pas compris parce que je ne vous ai pas suffisamment parlé et parce que je ne vous ai pas suffisamment écoutés. Je ne reproduirai pas cette erreur ». Celui qui se voit futur Président de la République aurait tout aussi bien pu ajouter : « Je vous ai compris, votez pour moi » !




27e congrès du CNCF

Programme – Abstraits – Marseille – 22-24 octobre 2015

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