Nouvelle règles pour le temps partiel

Des négociations ouvertes fin 2013 ont abouti cet été à la signature d’un accord entre les syndicats médicaux et les syndicats de salariés le 1er juillet dernier,

qui permettent aux cabinets médicaux, dont plus de la moitié emploient du personnel à temps partiel, de déroger au cadre légal. 

Pour le salarié à temps partiel, la durée journalière est fixée à 3 heures minimum de travail effectif par demi-journée. © Zsolt Nyulaszi
Pour le salarié à temps partiel, la durée journalière est fixée à 3 heures minimum de travail effectif par demi-journée. © Zsolt Nyulaszi

376 – Cet accord de branche fixe la durée minimale de travail du salarié à temps partiel à 16 heures par semaine pour l’ensemble des postes de la grille et à 5 heures hebdomadaires pour le personnel de nettoyage et d’entretien. Une durée inférieure à ces minima est possible sur demande écrite et motivée du salarié, soit pour lui permettre de faire face à des contraintes personnelles, soit pour lui permettre de cumuler plusieurs emplois lui  permettant d’atteindre au temps plein.

Pour le salarié à temps partiel, la durée journalière est fixée à 3 heures minimum de travail effectif par demi-journée et ne doit pas empêcher le cumul d’emploi. En clair, le salarié ne doit pas venir travailler pour seulement 2 heures. Les horaires des salariés qui travaillent moins de 24 heures doivent être regroupés par période dans la limite de 6 périodes hebdomadaire et si ce regroupement est compatible avec l’activité économique du cabinet. Les 5 heures minimales du personnel d’entretien peuvent être réparties sur les 5 jours de la semaine. Comme précédemment, l’interruption d’activité du salarié ne peut excéder 2 heures et l’amplitude horaire de sa journée de travail ne peut dépasser les 10 heures.

Les heures complémentaires du salarié à temps partiel sont majorées de 10 % si elles se limitent à 10 % du temps de travail fixé par contrat et de 25 % si elles dépassent ces 10 % mais dans la limite d’un tiers de la durée contractuelle. Attention : le cumul des heures contractuelles et complémentaires ne doit pas permettre au salarié d’atteindre les 35 heures hebdomadaire.

Le nouvel accord de branche permet désormais d’augmenter temporairement par avenant, dans la limite de 6 par an, la durée contractuelle du salarié à temps partiel, afin de l’amener soit à avoir un temps partiel plus important, soit d’atteindre un temps complet. Si l’on veut remplacer en interne d’un salarié absent, il est possible au sein du cabinet de faire un avenant à un salarié à temps partiel qui souhaite le remplacer temporairement (les avenants ne sont pas limités dans l’année dans ce cas). Les compléments d’heures négociés dans l’avenant n’entraînent aucune augmentation de salaire. Elles seront majorées de 25 % si le salarié se trouve travailler plus de 35 heures et donc faire des heures supplémentaires ou s’il travaille plus prévu par l’avenant.




Cabinets médicaux : soyez aux normes !

C’est en 2018 que le Gouvernement a repoussé la date limite pour la mise aux normes des Etablissements Recevant du Public (ERP) précédemment fixée au 1er janvier 2015.

Les cabinets médicaux sont des ERP de 5e catégorie et un certain nombre de démarches s’impose aux médecins dont le cabinet ne respecte pas les règles d’accessibilité au 1er janvier prochain comme à ceux dont le cabinet est d’ores et déjà accessible. Le Cardiologue vous rappelle le calendrier de ces démarches. Il vous informe aussi des nouvelles mesures en vigueur concernant le personnel travaillant à temps partiel dans vos cabinets. Selon une enquête de l’URPS Rhône-Alpes, les médecins employeurs sont majoritaires mais  se disent aussi majoritairement mal informés sur la réglementation du travail.

Problems with getting to work
© Photographee.eu

376 – L’ordonnance du 25 septembre dernier parue au Journal Officiel du 27 septembre a modifié les dispositions de la loi de février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Le dispositif de base de cette réforme est l’Agenda d’Accessibilité Programmée (Ad’AP) qui correspond à une engagement de réaliser les travaux nécessaires à la mise en conformité des locaux dans un délai de trois ans, de les financer et de respecter les règles d’accessibilité.

Les locaux ne sont pas conformes

Les médecins dont le cabinet ne répond pas aux normes d’accessibilité au 1er janvier prochain doivent impérativement déposer une Ad’AP dans les douze mois suivant la parution de l’ordonnance, donc au plus tard le 27 septembre 2015. Ce dépôt se fait auprès de la mairie de la commune où se situe le cabinet, qui doit informer du dépôt d’Ad’AP la commission pour l’accessibilité de la commune d’implantation ou la commission intercommunale compétente. Selon l’ordonnance du 25 septembre, l’Ad’AP comporte « une analyse des actions nécessaires » pour que l’établissement réponde aux exigences d’accessibilité et « prévoit le programme et le calendrier des travaux ainsi que les financements correspondants ». La durée d’exécution d’un Ad’AP «  ne peut excéder trois ans à compter de son approbation ». Cette durée peut « porter sur deux périodes de deux fois trois ans maximum chacune » dans un certain nombre de cas, notamment si le patrimoine est constitué de plusieurs établissements ou en cas de contraintes techniques ou financières particulières. C’est l’autorité administrative qui l’aura validée qui pourra accorder une éventuelle prorogation du délai d’exécution de l’Ad’AP.

L’absence non justifiée de dépôt de l’Ad’Ap dans les délais prévus sera sanctionnée par une amende forfaitaire de 1 500 euros, de même que feront l’objet d’une sanction pécuniaire l’absence de tout commencement d’exécution de l’agenda, de retard important dans l’exécution des engagements de travaux ou de non-respect de ces engagements au terme de l’échéancier établi pour leur réalisation. Le Cerfa « Agenda d’Accessibilité Programmée » est disponible sur le site www.accessibilité.gouv.fr.

Selon la nature des travaux, le formulaire d’Ad’AP diffère

Les travaux ne sont pas soumis à un permis de construire ou à un permis d’aménager : le formulaire Cerfa 13824*03 est à remplir, en complétant la partie « Demande d’approbation d’un Ad’AP pour un ERP isolé sur une seule période ». Il faut cependant obtenir une autorisation de travaux .

Les travaux nécessitent un permis de construire ou d’aménager : un dossier spécifique permettant de vérifier la conformité des ERP aux règles d’accessibilité et de sécurité contre l’incendie et la panique est à remplir en complétant la partie « Demande d’approbation d’Ad’AP pour un ERP isolé sur une seule période ».

Si l’Ad’AP est approuvé ainsi que l’autorisation de travaux ou le permis de construire, les travaux peuvent être commencés. En cas de refus de l’Ad’AP, un délai sera octroyé pour en déposer un nouveau.

En fin d’Ad’Ap, il faut obligatoirement transmettre à la préfecture du département une attestation d’achèvement des travaux, dont un exemplaire est à déposer en mairie et qui sera transmis à la commission d’accessibilité de la commune ou de l’intercommunalité.

Pour tout savoir sur les normes à respecter, qui vont de la largeur des portes et de la hauteur de leur poignée au pourcentage des plans inclinés extérieurs comme intérieurs en passant par le niveau d’éclairage minimal ou une signalétique adaptée, il est conseillé de se reporter au document de 44 pages « Les locaux des professionnels de santé : réussir l’accessibilité », publié par la Délégation ministérielle à l’accessibilité et téléchargeable sur www.sante.gouv.fr ou sur le site de l’Ordre (www.conseil-national.medecin.fr), qui a participé à son élaboration.

Les locaux sont conformes

La conformité du cabinet aux règles d’accessibilité au 1er janvier 2015 ne dispense pas le médecin propriétaire de toute démarche. Il doit adresser à la préfecture concernée une attestation d’accessibilité avant le 28 février 2015, qui l’exempte de l’obligation de dépôt d’un Ad’AP. Pour les ERP de 5e catégorie, donc pour les cabinets médicaux, il s’agit d’une attestation sur l’honneur, dont copie sera adressée à la mairie de la commune d’implantation du cabinet.

Les dérogations possibles

Plusieurs motifs de dérogation sont prévus par la loi :

– En cas d’impossibilité technique lié à l’environnement ou à la structure du bâtiment.

– Si le cabinet fait partie d’un patrimoine architectural qui doit être préservé.

– S’il y a une disproportion manifeste entre la mise aux normes et ses conséquences.

– Si l’Assemblée Générale des copropriétaires d’un bâtiment à usage principal d’habitation s’oppose à la réalisation des travaux de la mise en accessibilité d’un établissement recevant du public, la dérogation est accordée de plein droit.

La dérogation se fait par le formulaire Cerfa 13824 lorsque les travaux ne sont pas soumis à un permis de construire ou par le dossier spécifique en cas d’obligation de permis de construire. La demande de dérogation doit être déposée en mairie.




Cabinets médicaux : soyez aux normes !

Le Gouvernement a repoussé à 2018 la date limite pour la mise aux normes des Etablissements Recevant du Public (ERP) précédemment fixée au 1er janvier 2015. Les cabinets médicaux sont des ERP de 5e catégorie et un certain nombre de démarches s’impose aux médecins dont le cabinet de respecte pas les règles d’accessibilité au 1er janvier prochain comme à ceux dont le cabinet est d’ores et déjà accessible. Le Cardiologue vous rappelle le calendrier de ces démarches.

375 – L’ordonnance du 25 septembre dernier parue au Journal Officiel du 27 septembre a modifié les dispositions de la loi de février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Le dispositif de base de cette réforme est l’Agenda d’Accessibilité programmée (Ad’Ap) qui correspond à un engagement de réaliser les travaux nécessaires à la mise en conformité des locaux dans un délai de trois ans, de les financer et de respecter les règles d’accessibilité.

Vos locaux ne sont pas conformes

Les médecins dont le cabinet ne répond pas aux normes d’accessibilité au 1er janvier prochains doivent impérativement déposer une Ad’AP dans les douze mois suivant la parution de l’ordonnance, donc au plus tard le 27 septembre 2015. Ce dépôt se fait auprès de la mairie de la commune où se situe le cabinet, qui doit informer du dépôt d’Ad’Ap la commission pour l’accessibilité de la commune d’implantation ou la commission intercommunale compétente. Selon l’ordonnance du 25 septembre, l’Ad’AP comporte « une analyse des actions nécessaires » pour que l’établissement réponde aux exigences d’accessibilité et « prévoit le programme et le calendrier des travaux ainsi que les financements correspondants ». La durée d’exécution d’un Ad’Ap « ne peut excéder trois ans à compter de son approbation ». Cette durée peut « porter sur deux périodes de deux fois trois ans maximum chacune » dans un certain nombre de cas, notamment si le patrimoine est constitué de plusieurs établissements ou en cas de contraintes techniques ou financières particulières. C’est l’autorité administrative qui l’aura validée qui pourra accorder une éventuelle prorogation du délai d’exécution de l’Ad’Ap.

L’absence non justifiée de dépôt de l’Ad’Ap dans les délais prévus sera sanctionnée par une amende forfaitaire de 1 500 euros, de même que feront l’objet d’une sanction pécuniaire l’absence de tout commencement d’exécution de l’agenda, de retard important dans l’exécution des engagements de travaux ou de non respect de ces engagements au terme de l’échéancier établi pour leur réalisation. Le formulaire simplifié Cerfa « Agenda d’Accessibilité Programmée » devrait être disponible sur le site www.accessibilité.gouv.fr à compter de la mi-novembre 2014.

Selon la nature des travaux, le formulaire d’Ad’AP diffère : 

Les travaux ne sont pas soumis à un permis de construire ou à un permis d’aménager : le formulaire Cerfa 13824*03 est à remplir, en complétant la partie « Demande d’approbation d’un Ad’AP pour un ERP isolé sur une seule période ». Il faut cependant obtenir une autorisation de travaux.

Les travaux nécessitent un permis de construire ou d’aménager : un dossier spécifique permettant de vérifier la conformité des ERP aux règles d’accessibilité et de sécurité contre l’incendie et la panique est à remplir en complétant la partie « Demande d’approbation d’Ad’AP pour un ERP isolé sur une seule période ».

Si l’Ad’AP est approuvé ainsi que l’autorisation de travaux ou le permis de construire, les travaux peuvent être commencés. En cas de refus de l’Ad’AP, un délai sera octroyé pour en déposer un nouveau.

En fin d’Ad’Ap, il faut obligatoirement transmettre à la préfecture du département une attestation d’achèvement des travaux, dont un exemplaire est à déposer en mairie et qui sera transmis à la commission d’accessibilité de la commune ou de l’intercommunalité.

Les locaux sont conformes

La conformité du cabinet aux règles d’accessibilité au 1er janvier 2015 ne dispense pas le médecin propriétaire de toute démarche. Il doit adresser à la préfecture concernée une attestation d’accessibilité avant le 28 février 2015, qui l’exempte de l’obligation de dépôt d’un Ad’AP. Pour les ERP de 5e catégorie, donc pour les cabinets médicaux, il s’agit d’une attestation de conformité, dont copie sera adressée à la mairie de la commune d’implantation du cabinet.

 

Les dérogations possibles

Trois motifs de dérogation sont prévus par la loi : en cas d’impossibilité technique liée à l’environnement ou à la structure du bâtiment, si le cabinet fait partie d’un patrimoine architectural qui doit être préservé et s’il y a une disproportion manifeste entre la mise aux normes et ses conséquences. La dérogation se fait par le formulaire Cerfa 13824 lorsque les travaux ne sont pas soumis à un permis de construire ou par le dossier spécifique en cas d’obligation de permis de construire. La demande de dérogation doit être déposée en mairie.




Nouvelle règles pour le temps partiel

Des négociations ouvertes fin 2013 ont abouti cet été à la signature d’un accord entre les syndicats médicaux et les syndicats de salariés le 1er juillet dernier, qui permet aux cabinets médicaux, dont plus de la moitié emploient du personnel à temps partiel, de déroger au cadre légal.

375 – Cet accord de branche fixe la durée minimale de travail du salarié à temps partiel à 16 heures par semaine pour l’ensemble des postes de la grille et à 5 heures hebdomadaires pour le personnel de nettoyage et d’entretien. Une durée inférieure à ces minima est possible sur demande écrite et motivée du salarié, soit pour lui permettre de faire face à des contraintes personnelles, soit pour lui permettre de cumuler plusieurs emplois lui  permettant d’atteindre au temps plein.

Pour le salarié à temps partiel, la durée journalière est fixée à 3 heures minimum de travail effectif par demi-journée et ne doit pas empêcher le cumul d’emploi. En clair, le salarié ne doit pas venir travailler pour seulement 2 heures. Les horaires des salariés qui travaillent moins de 24 heures doivent être regroupés par période dans la limite de 6 périodes hebdomadaire et si ce regroupement est compatible avec l’activité économique du cabinet. Les 5 heures minimales du personnel d’entretien peuvent être réparties sur les 5 jours de la semaine. Comme précédemment, l’interruption d’activité du salarié ne peut excéder 2 heures et l’amplitude horaire de sa journée de travail ne peut dépasser les 10 heures.

Les heures complémentaires du salarié à temps partiel sont majorées de 10 % si elles se limitent à 10 % du temps de travail fixé par contrat et de 25 % si elles dépassent ces 10 % mais dans la limite d’un tiers de la durée contractuelle. Attention : le cumul des heures contractuelles et complémentaires ne doit pas permettre au salarié d’atteindre les 35 heures hebdomadaires.

Le nouvel accord de branche permet désormais d’augmenter temporairement par avenant, dans la limite de 6 par an, la durée contractuelle du salarié à temps partiel, afin de l’amener soit à avoir un temps partiel plus important, soit d’atteindre un temps complet. Si l’on veut remplacer en interne d’un salarié absent, il est possible au sein du cabinet de faire un avenant à un salarié à temps partiel qui souhaite le remplacer temporairement (les avenants ne sont pas limités dans l’année dans ce cas). Les compléments d’heures négociés dans l’avenant n’entraînent aucune augmentation de salaire. Elles seront majorées de 25 % si le salarié se trouve travailler plus de 35 heures et donc faire des heures supplémentaires ou s’il travaille plus prévu par l’avenant.




Les médecins « notés » sur internet ? Pas en France !

Business CardAux Etats-Unis, les médecins ont dû s’accoutumer (ou pas !) à faire l’objet d’évaluation et de commentaires de la part des patients sur des sites dédiés. Le site rateMDs.com comptabilise plus de 2 millions de commentaires depuis sa création en 2004. En France, si ça et là, quelques médecins voit arriver un nouveau patient qui déclare l’avoir choisi au vu de commentaires favorables à son sujet sur Internet, on est très loin de l’Amérique ! Les deux premiers sites de notation des médecins (note2bib.com et demedica.com) ont été contraints de fermer sitôt ouverts pour causes de non-feu vert de la CNIL, atteinte à la vie privée et diffamation. Parmi les rares officiant sur la toile, notetondoc.com, enregistre péniblement 4 000 avis collectés depuis sa création en 2012, très, très loin des 2 millions de son confrère étasunien. 

Pourquoi cet insuccès ? D’abord et contrairement à ce que pensent souvent les médecins français, ils jouissent encore d’une certaine aura qui les met à l’abri d’être notés au même titre qu’un hôtel ou une agence de voyages. Ensuite, la loi Informatique et Libertés autorise un médecin mal noté d’exiger la suppression des mauvaises appréciations. Enfin, selon le Baromètre du CISS, ce n’est pas à internet que les Français font confiance pour choisir un médecin mais à… un médecin !




Entretien Me Frédérique Claudot  – « Avec un dossier médical bien tenu, on a rarement de problème »

Claudot Frederique 300pxAvocat, Me Frédérique Claudot est maître de conférence des universités-praticien hospitalier à l’université de Lorraine-CHU de Nancy, avocat et membre du groupe Ethique et responsabilité professionnelle de la SFC. Pour Le Cardiologue, elle explique ce qu’il faut entendre par une information « loyale, claire et appropriée » et insiste sur l’importance de la traçabilité de cette information dans le dossier médical du patient.

 

Les actions intentées par des patients à l’encontre de médecins pour manquement à l’obligation d’information quant aux risques encourus lors d’un traitement ou d’une intervention sont-elles nombreuses ?

Frédérique Claudot : La jurisprudence sur le défaut d’information est relativement importante, cependant, elle concerne peu le domaine de la cardiologie. Je rappelle que depuis un arrêt de la Cour de Cassation de 1997, c’est au médecin de prouver qu’il a bien informé son patient. Ce principe jurisprudentiel a été consacré par le Code de la Santé Publique en (art. L. 1111-2).

Comment un médecin peut-il apporter cette preuve ?

F. C. : L’information donnée au patient peut être prouvée par tout moyen, mais le dossier médical constitue l’élément essentiel. La traçabilité est donc de toute première importance. Il ne s’agit pas d’écrire l’intégralité des informations qui ont été données, mais les éléments principaux et les points qui ont éventuellement nécessité des éclaircissements supplémentaires. Avec un dossier médical bien tenu, on a rarement de problème.

Quels conseils donneriez-vous aux médecins pour être certains d’être en conformité avec la loi sur ce point ?

F. C. : Je conseillerais aux médecins de lire attentivement les articles du Code de santé publique et du Code de Déontologie médicale qui portent sur cette obligation d’information et d’en bien comprendre les termes : l’information délivrée doit être « loyale, claire et appropriée ». Ensuite, il s’agit de bien cerner sur quoi doit porter l’information. Je leur conseillerais également de s’adapter au patient et de ne pas penser à sa place pour minimiser l’information sur les risques : certains patients veulent connaître tous les risques. Une fois l’information délivrée, j’insiste vraiment sur la nécessité de prendre le temps de la tracer dans le dossier médical.

Comment interpréter les termes « loyale, claire et appropriée » ?

F. C. : « Loyale », signifie sincère et conforme à la loi, ce qui suppose de connaître la loi. « Claire » signifie que l’information doit être aisément comprise, limpide – au sens propre « claire » signifie « qui émet de la lumière » – et que le médecin doit s’assurer que l’information délivrée à bien été comprise par le patient. Enfin « appropriée » signifie appropriée au patient et aux circonstances : on n’annonce pas de la même façon à un patient de 20 ans qu’il ne pourra pas devenir joueur de foot professionnel et qu’il va devoir réorienter sa carrière qu’à un patient de 65 ans qu’il va falloir espacer les compétitions de tennis le week-end. On n’informe pas de la même façon un patient de 15 ans, de 40 ans et de 75 ans – et tous les patients de 75 ans ne réagiront pas à l’identique –, un patient en consultation ou hospitalisé, dans sa chambre ou au bloc, francophone ou qui ne maîtrise pas bien le français, un patient atteint d’une maladie chronique éduqué et un patient en épisode aigu. Toutes ces circonstances influent sur la réceptivité du patient, sur la sidération, de même que la gravité du diagnostic et du pronostic.

L’information doit permettre au patient de prendre une décision concernant une intervention sur son corps, mais en réalité, sa décision concerne aussi sa santé, sa personne, sa future vie de tous les jours…

Les références : art. L. 1111-2 et art. R. 4127-35 du code de la santé publique




Entretien Cédric Gaultier – « La prescription des nouveaux anticoagulants requiert toute l’attention des cardiologues »

Gaultier_Cedric 300pxCardiologue conseil au Sou Médical, groupe MACSF, et cardiologue interventionnel à La clinique de la Roseraie, groupe villa Maria, le Dr Cédric Gaultier insiste sur le fait que l’information faite auprès du patient par le cardiologie clinicien ne dédouane pas le cardiologue technicien de son obligation d’information.

 

En cas de problème, le praticien doit prouver qu’il a bien informé son patient sur les risques d’un traitement ou d’une intervention. Cette obligation revêt-elle un caractère particulier dans le domaine de la cardiologie ?

Cédric Gaultier : L’information doit tout d’abord se faire oralement. Pour les actes techniques – épreuve d’effort, coronarographie, échographie transoesophagienne, etc. – des documents élaborés par la SFC sont à la disposition des cardiologues. Ils doivent être explicités puis idéalement signés par le patient. Je les invite vraiment à avoir cette démarche. Sauf en cas d’urgence, le document doit être recueilli signé après un délai de réflexion laissé au patient. Je recommande aux médecins de l’agrafer dans le dossier médical et à indiquer dans tout courrier adressé au médecin traitant ou au correspondant spécialiste technique que le patient a été informé et qu’il a pris connaissance de ce document.

Concernant l’information, j’insiste sur le fait qu’il est aussi important d’expliquer les risques qu’il y a à ne pas faire un acte diagnostic ou thérapeutique, c’est un élément capital dans le consentement du patient.

Le médecin qui prescrit l’acte n’est pas toujours celui qui le réalise. Lequel doit informer le patient ?

C. G. : Le spécialiste clinicien connaît l’acte et peut donc informer son patient globalement. Ensuite, il revient au spécialiste technicien de s’assurer que cette information a bien été délivrée par le cardiologue traitant et de la compléter sur les modalités plus techniques : l’information faite préalablement par le cardiologue traitant ne le dédouane pas de son devoir d’informer le patient. Enfin, il arrive que le patient refuse d’être informé et c’est un problème délicat car ce refus ne dédouane pas non plus le praticien de son obligation d’information. Dans un tel cas, il a intérêt à se tourner vers une personne de l’entourage désigné par le patient (personne de confiance).

Les déclarations concernant les cardiologues sont-elles importantes et quels en sont les motifs ? 

C. G. : Nous assurons 3 585 cardiologues, libéraux dans une très grande majorité. En 2012, nous avons enregistré 86 déclarations de sinistre, ce qui représente une sinistralité de 3,3 %, stable puisqu’elle était de 3,5 % l’année précédente. Nous n’assistons pas à une explosion de plaintes concernant les cardiologues. Sur les 86 déclarations enregistrées en 2012, 16 ont donné lieu à des procédures civiles, 4 à des plaintes ordinales et 34 n’étaient que des réclamations qui ont été traitées soit par l’intermédiaire d’un avocat, soit par simple courrier. Enfin, il y a eu 32 saisines des Commissions de Conciliation et d’Indemnisation (CCI).

Concernant les motifs de déclaration, il est bon d’attirer l’attention des cardiologues sur celles mettant en cause les nouveaux anticoagulants (AntiCoagulants Oraux Directs ou AOD). Ils ont été à l’origine d’un seul recours en 2012, mais de trois l’année dernière. Les médecins ont tendance à oublier ou minimiser les risques du traitement. Le praticien doit vraiment être vigilant quant aux interactions avec d’autres médicaments (antiagrégants, anti-inflammatoires), contre-indiquer leur prise avec la pratique de sports violents et surveiller la fonction rénale du patient. Certains patients, en particulier les personnes âgées, ne comprennent pas toujours très bien les explications qui leur sont données, d’où l’intérêt des cartes conçues par les laboratoires et sur lesquelles figurent des renseignements précieux en cas d’incident (le produit prescrit, la posologie, etc.). Il est impératif de suivre les recommandations édictées par les sociétés savantes mais d’être également attentif à celles de la HAS et de l’Assurance Maladie qui ont tendance recommander aux médecins de ne pas prescrire d’AOD chez les patients équilibrés sous antivitaminiques. L’alternative existant, un praticien peut être amené à justifier sa prescription d’AOD s’il fait l’objet d’une plainte, car si elle n’est pas strictement conforme aux recommandations, il pourra se voir reprocher d’avoir privilégié ces nouveaux anticoagulants.




Patients bien informés… médecins bien protégés

© Dalaprod
© Dalaprod

Vos patients connaissent de plus en plus leurs droits. Ils sont en particulier de plus en plus nombreux à savoir qu’une information concernant les traitements et leurs risques doivent leur être délivrée par le médecin. Mais ils estiment aussi que ce droit n’est pas aussi bien respecté qu’il le devrait. Une bonne raison pour examiner de près, avec des experts, ce droit des patients qui est un devoir des médecins.

 Le Collectif Interassociatif Sur la Santé, le CISS, sonde régulièrement la population sur son niveau d’information quant à la connaissance des ses droit en matière de santé. Le dernier Baromètre 2014 LH2-CISS fait état de 92 % des Français se déclarant bien informés sur leur état de santé et les traitements qui y sont liés. Un résultat en hausse de 7 points par rapport à l’année dernière. On trouve également une amélioration des scores en ce qui concerne l’information sur le parcours de soins et le système de santé (85 %, + 7 points, sur la qualité des soins en établissement (83 %, + 7 points) et surtout sur le coût des soins (79 %, + 10 points), ainsi que sur les recours et démarches à effectuer en cas de problème grave lié aux soins (70 %, + 15 points). 

Pourtant, la méconnaissance des Français perdure en ce qui concerne les différentes commissions de recours : environ 35 % seulement des personnes interrogées ont entendu parler des Commissions Régionales de Conciliation et d’Indemnisation (CRCI) et 15 % connaissent les Commissions des Relations avec les Usagers et de la Qualité de la Prise en Charge (CRUQPC). Une immense majorité des Français savent qu’ils ont le droit d’être informés sur les soins reçus (90 %), mais le respect de ce droit ne fait pas un si bon score : 73 % estiment qu’il est bien appliqué.

Une information qui doit être « loyale, claire et appropriée »

Ces derniers résultats ne doivent pas inquiéter les cardiologues quant à judiciarisation accrue de leur profession. Ainsi que le dit le Dr Cédric Gaultier, cardiologue conseil au Sou Médical, groupe MACSF, le nombre des déclarations les mettant en cause est faible et stable (voir entretien de Cédric Gaultier). En revanche, cette meilleure connaissance qu’ont leurs patients des recours possibles doit les inciter à être encore plus vigilants quant à leur obligation envers eux, en particulier celle concernant l’information sur les traitements, investigations et interventions nécessités par la pathologie et les risques qu’ils comportent.

Une information qui doit être « loyale, claire et appropriée », selon les termes du Code de la santé publique, que Me Frédérique Claudot explicite dans l’entretien qu’elle nous a accordé. Comme le Dr Cédric Gaultier, Me Claudot insiste sur l’importance de la traçabilité de cette information dans le dossier médical du patient.

La confiance des Français

Le Baromètre du CISS montre que les Français garde une confiance immense dans les professionnels de santé. Ce sont eux qu’ils plébiscitent pour le choix d’un professionnel ou d’un établissement de santé (86 %, + 6 points), surtout leur médecin traitant (79 %, + 8 points), beaucoup moins un médecin spécialiste, qui ne remporte que 5 % des suffrages, et encore moins internet (3 %), qui est cependant de plus en plus reconnu comme une source d’information en santé. 57 % des personnes interrogées déclarent qu’internet « permet d’être mieux informé pour dialoguer avec le médecin » et 53 % qu’il apporte « un soutien psychologique » grâce aux témoignages et échanges avec d’autres patients.




DPC : Le sévère état des lieux de l’IGAS

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© Diego Cervo

«Au terme de ses investigations, la mission conclut à l’existence de nombreux dysfonctionnements dans la mise en œuvre du Développement Professionnel Continu. Ces ratés ne révèlent cependant pas de manquements graves, a fortiori de fautes, de la part de l’OGDPC. La conception même de la réforme est en cause ainsi que la conduite de son application. »

Selon les auteurs (1) du rapport, l’analyse de la réforme fait apparaître « plusieurs vices de conception. Ainsi, « l’obligation de formation n’a pas de contenu précis : ni le volume d’heures, ni le contenu de la formation ne font l’objet de prescription ». L’absence d’organisation de la sanction du manquement à l’obligation constitue un autre « vice ». Enfin, « les aléas budgétaires qui affectent la construction des budgets de l’OGDPC ne donnent aucune assurance qu’il sera possible de financer le coût d’un DPC généralisé à tous les effectifs de l’ensemble des professions ».

Viennent ensuite, « quelques mauvais réglages » constatés par l’IGAS. Parmi ceux-ci, la procédure d’évaluation des organismes de DPC par les Commissions Scientifiques Indépendantes (CSI) qui « n’apporte pas toute garantie de qualité » et l’absence de contrôles a posteriori des organismes.

« La conduite de projet a été défectueuse. Dans un cadre juridique contraint par des textes qui empiètent sur la marge de gestion nécessaire, les remises en cause de règles édictées après “arbitrage” politique, les délais trop serrés, le choix technique hasardeux d’un recours exclusif à l’informatique, ont mis sous une pression exclusive l’OGDPC », tranche sévèrement le rapport, qui exonère donc l’organisme gestionnaire, dont « la responsabilité apparaît limitée », pour mieux dénoncer un pilotage confus dû à l’omniprésence de l’Etat. Enfin, l’IGAS constate qu’« une carapace de scepticisme entoure cette réforme dont beaucoup considèrent qu’elle échouera ». Aussi la mission recommande-t-elle impérativement un « travail de concertation approfondie » en préalable à toute modification du dispositif. « La concertation doit s’étendre à l’élaboration des textes afin que la réforme s’élabore sans ambiguïté et recueille la meilleure adhésion des acteurs », préconise-t-elle.

Mais quelle réforme apporter au dispositif de DPC ? L’IGAS propose quatre scénarios possibles. Le premier consiste « à maintenir le système actuel en en corrigeant les dysfonctionnements ». Il faudrait notamment consolider le financement du DPC, assortir l’obligation d’un « jeu de sanctions réelles » en cas de manquement. La mission propose également « d’alléger la gouvernance et de garantir une concurrence loyale entre organismes de formation ». Dans le second scénario, les missions de l’OGDPC seraient recentrées sur la formation interprofessionnelle et les priorités de santé publique et tout ce qui a trait aux formations de DPC propre à chaque profession ou secteur d’activité relèverait des organismes gestionnaires spécifiques (ANFH, OPCA et FAF). Dans le troisième scénario proposé par l’IGAS, le DPC serait circoncis « à un socle de connaissance à actualiser que détermine le professionnel après évaluation de sa pratique », socle qui serait à acquérir auprès d’organismes ayant été évalués. Quant au quatrième scénario, il est radical, puisqu’il « consiste en l’application de droit commun de la formation continue : de légale, l’obligation redevient déontologique, l’OGDPC est supprimé et les fonds publics sont convertis en incitations, notamment dans le cadre des conventions avec l’Assurance Maladie ». Des incitations qui pourraient prendre la forme de points supplémentaires dans le cadre de la ROSP ou d’une majoration du C pour les médecins justifiant de leur engagement dans le DPC.

Il revient à présent à Marisol Touraine de trancher entre les quatre scénarios. Mais si elle dispose du rapport de l’IGAS pour éclairer sa décision, elle connaît aussi le souhait de la majorité des professionnels qui, après quinze ans d’errance de leur formation continue de réforme en réforme, vivraient très mal une nouvelle remise en cause radicale. Les syndicats médicaux ont réagi dès la sortie du rapport : ils demandent que soient apportées rapidement des modifications au dispositif de DPC allant dans le sens de sa simplification et d’une augmentation de son financement. Sur ce dernier point, toute la concertation du monde n’aboutira sans doute pas à leur complète satisfaction…

(1) Bertrand Deumie, Philippe Georges, membres de l’IGAS ; Jean-Philippe Natali, interne de santé publique, stagiaire à l’IGAS.

 




L’An II du parcours de soins

371 – Après la mise en place en 2004 du dispositif du médecin traitant qui a instauré un certain type parcours de soins, la Stratégie Nationale de Santé (SNS) portée par le Gouvernement fait de la médecine de proximité une priorité afin d’éviter les complications et les hospitalisations inutiles. Pour ce faire, la SNS met en avant les parcours de soins, dont la définition reste assez floue, tout comme la place que les spécialistes y occuperont.

American doctor talking to senior couple in surgeryParcours de soins : depuis qu’en septembre dernier la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a dévoilé la Stratégie Nationale de Santé (SNS) qui a vocation à inspirer largement la future loi réformant notre système de santé, ce vocable est omniprésent. Mais que recouvre-t-il exactement ? Jusque là, on connaissait le parcours de soins coordonné, tel qu’il a été instauré par la la loi du 13 août 2004 relative à l’Assurance Maladie. Il consiste à confier à un médecin traitant les différentes interventions des professionnels de santé pour un même assuré, dans un objectif de rationalisation des soins. Son respect conditionne la prise en charge normale des dépenses de santé. A défaut, les patients s’exposent à des majorations financières. A défaut d’avoir apporté la coordination optimale au système de santé, on sait le succès de ce parcours, puisqu’aujourd’hui, la quasi-totalité des assurés ont choisi de déclarer un médecin traitant – leur médecin généraliste dans 99 % des cas.

Alors, à quoi pense la ministre de la Santé quand elle parle de parcours de soins ? « L’essentiel est de mieux prendre en charge en ville pour éviter les complications et hospitalisations inutiles. L’organisation des soins doit être simplifiée, décloisonnée, recentrée autour du médecin traitant, articulant les interventions des professionnels, services et établissements d’un territoire autour de parcours dans lesquels la personne est un acteur de sa santé et de sa prise en charge intégrant les logiques d’éducation thérapeutique, de dépistage, de promotion de la santé, de modification des modes de vie. La Stratégie Nationale de Santé doit porter et accompagner ces profonds changements au travers d’un projet global encourageant le parcours de la personne (patient, personnes âgée, personne handicapée), la coopération entre professionnels, la al coordination ville-hôpital et la démocratie sanitaire dans le cadre des territoires. » Voilà ce que dit la SNS. C’est beaucoup, c’est ambitieux et dans ces principes, on ne peut qu’y souscrire. Mais c’est aussi très flou quant à la définition exacte de ce que seront ces parcours de soins, ainsi que l’observe l’économiste de la santé, Claude Le Pen (voir entretien de Claude Le Pen).

Le médecin généraliste, le pivot central

La seule chose qui soit très claire, c’est que dans cette organisation le médecin traitant, autrement dit le médecin généraliste, est le pivot central. Ce qui n’a pas échappé aux spécialistes libéraux, en particulier aux cardiologues de ville, qui s’en inquiètent. Dans ces parcours de soins, quelle place occuperont-ils ? Avant que de futurs textes ne fixent les choses, ils affirment qu’ils entendent occuper rien que leur place, mais toute leur place, comme l’explique le nouveau président des spécialistes confédérés, Patrick Gasser, et le secrétaire général du SNSMCV, Frédéric Fossati. C’est d’autant plus important que viennent de s’ouvrir les négociations sur les coopérations interprofessionnelles et la rémunération du travail en équipe, que Marisol Touraine souhaite voir aboutir à la fin juillet. « Lors de la première réunion, à laquelle tous les syndicats ont participé, il a été décidé de s’occuper d’abord du fond au cours de trois réunions qui s’étaleront jusqu’à la fin mai, avant de s’occuper de la forme entre la fin juin et le 15 juillet », explique Jean-François Rey, le président de l’Union Nationale des Professions de Santé (UNPS). Selon lui, « la rémunération de ce nouvel acte, qui est plutôt une succession de missions – outil informatique, prise en charge de pathologies lourdes, chroniques ou de polypathologies et coordination médicale et médico-sociale, prévention ETP – devra avoir le même niveau quel que soit le professionnel de santé concerné ». A priori, nul n’est exclu…

Catherine Sanfourche




Claude Le Pen : « Une réponse floue à un vrai problème »

371 – Pour l’économiste de la santé, avant de parler d’efficience du parcours de soins, il faudrait déjà donner une définition précise de ce que recouvre ce terme.

lepenLa Stratégie Nationale de Santé met en avant les parcours de soins. Que pensez-vous de ce mode d’organisation ?

Claude Le Pen : C’est une manière mal définie d’aborder le vrai problème du manque de coordination de notre système de santé, un mot magique sensé régler tous les problèmes. J’avoue être assez sceptique. Car enfin, qu’entend-on exactement par « parcours de soins » ? S’agit-il d’une filière de soins avec le médecin traitant en « gate keeper » à la façon anglaise ? Faut-il l’entendre comme un continuum ville/hôpital ou un protocole au sens que lui donne la HAS ? Ou encore, s’agit-il d’une logistique de communication organisée par le médecin traitant avec un dossier médical partagé ? A l’heure actuelle, on ne sait pas ce que le ministère entend exactement par « parcours de soins ». Ce qui est sûr, c’est qu’on ne part pas de rien et que sur le terrain, des professionnels de santé ont l’habitude de travailler ensemble. Il s’agirait donc de passer de relations informelles à une organisation structurée avec l’arrière-pensée d’un gain à tirer d’une formalisation du parcours de soins.

Vous ne semblez pas convaincu. Pour l’économiste de la santé que vous êtes, le parcours de soins ne peut-il pas être, en effet, source d’efficience pour notre système de santé ?

C. L P. : Je n’en suis pas convaincu et d’ailleurs, rien ne permet de l’affirmer. Sur le plan financier d’abord, formaliser le parcours de soins signifie passer d’un travail de coordination effectué actuellement gratuitement par les professionnels de santé à un financement de ce travail et donc dépenser plus. Nous n’avons aucune preuve manifeste qu’on ferait des économies avec les parcours de soins. Ensuite, sur le plan de la qualité, on suppose qu’elle serait supérieure dans un parcours coordonné. Mais si gain qualitatif il y a, il reste à démontrer où se trouve le déficit qualitatif dans l’organisation informelle actuelle. Quelles preuves indiscutables a-t-on que les patients chroniques sont mal traités aujourd’hui ? Aucune.

Il existe déjà pourtant des expérimentations qui peuvent apporter des enseignements ?

C. L P. : Il s’agit d’expériences issues du terrain, plus ou moins reproductibles plutôt que de solutions pérennes, modélisables, reproductibles. Quant aux expériences passées, elles n’ont pas été réellement évaluées. Cette absence d’évaluation des expériences passées, leur aspect très local et l’absence de définition précise de ce qu’on entend vraiment par parcours de soins me laissent extrêmement dubitatif. Et je crains qu’on ne reproduise avec les parcours de soins ce qui s’est passé dans les années 90 avec les réseaux de soins : faute d’une réelle évaluation, on n’en a tiré aucune leçon, on n’a pu ni les généraliser ni les stopper et on les laisse mourir. Notre système de soins manque peut-être de coordination, mais la politique de santé aussi !

Catherine Sanfourche




Frédéric Fossati (SNSMCV) : « La médecine de proximité n’est pas l’apanage des généralistes »

371 – Quel est votre sentiment au regard des parcours de soins, point fort de la Stratégie Nationale de Santé ?

fossatiFrédéric Fossati : A l’heure on l’on parle beaucoup de simplification administrative, j’avoue de pas voir très bien l’utilité d’encadrer et de réglementer des réseaux informels qui existent de fait sur le terrain. Après tout, la réforme du médecin traitant a déjà formalisé un parcours de soins que les patients respectent dans leur immense majorité. Dans notre région, nous, cardiologues libéraux, recevons très, très peu de patients venant nous consulter en accès direct.

Vous êtes donc plutôt inquiet quant à la future loi de santé publique qui sera inspirée de la SNS ?

F. F. : Il est clair que la Stratégie Nationale de Santé est en faveur d’un super médecin généraliste référent et donne l’impression que les spécialistes sont oubliés. Pourtant, la médecine de proximité n’est pas l’apanage des médecins généralistes. Il faut affirmer la place du médecin spécialiste de proximité qui a tout son rôle à jouer quand le généraliste n’a plus la possibilité d’assurer seul le suivi optimal de son patient. La balle est bien sûr dans le camp du ministère, mais il ne faut pas que le spécialiste de proximité soit écarté. Le SNSMCV doit mener ce combat, et l’on peut compter sur Eric Perchicot pour influer en ce sens et que les cardiologues ne soient pas oubliés, en particulier dans les parcours spécifiques de cardiologies type PRADO (Programme de Retour Anticipé au Domicile). Le cardiologue doit y être un maillon essentiel et non une variable d’ajustement. A nous de montrer que nous sommes présents et capables de prendre en charge les patients dans cette situation.

Catherine Sanfourche




Les parcours de soins selon la HAS

371 – Afin de faciliter la prise en charge des personnes atteintes de maladie chronique, la HAS a élaboré en 2012 de nouveaux guides et outils destinés aux équipes soignantes et aux malades. « Au lieu de réactualiser les guides ALD, le nouveau Collège de la HAS a décidé de faire des guides parcours de soins par pathologie », explique Jean-François Thébaut, membre du collège de la HAS et président de la Commission amélioration des pratiques professionnelles et de la sécurité des patients. A la différence des guides ALD, les guides parcours de soins sont destinés à l’ensemble des professionnels prenant en charge les malades. Ils abordent la globalité du parcours et non plus seulement les critères ALD. Réalisés avec l’aide de professionnels et d’associations, ils précisent, à toutes les étapes, le rôle de chaque intervenant, le rythme des consultations et les actions à entreprendre. « Dans ces guides, nous faisons toujours très attention à situer chaque professionnels à sa bonne place », commente Jean-François Thébaut.

A ce jour, la HAS a publié des guides concernant l’AVC, la BPCO, les cancers broncho-pulmonaires et le mésothéliome pleural malin, l’infarctus du myocarde, l’insuffisance cardiaque, le lymphome de Hodgkin, la maladie de Parkinson, la maladie rénale chronique et les soins palliatifs. « Toutes les pathologies ont vocation à faire l’objet d’un guide parcours de soins. La psychiatrie est en cours de rédaction, ainsi que la rééducation, l’insuffisance coronarienne. »

Catherine Sanfourche




Patrick Gasser (UMESPE) : « Pas de parcours de soins sans les spécialistes libéraux »

371 – Pour le nouveau président des L’union des Médecins Spécialistes de la CSMF les parcours de soins sont voués à l’échec s’ils se font sans les spécialistes de proximité.  

Gasser« Donner une vraie place aux spécialistes libéraux dans la Stratégie Nationale de Santé ». Dès votre arrivée à la présidence de l’UMESPE, vous avez affirmé cela comme une des priorités d’action du syndicat. Pouvez-vous préciser un peu ?

Patrick Gasser : Aujourd’hui, on ne parle que du médecin généraliste dans la prise en charge du patient, alors même qu’on dit vouloir la meilleure qualité possible pour cette prise en charge des patients chroniques ou des personnes âgées ou des patients polypathologiques. Un médecin généraliste ne travaille pourtant pas seul mais avec ses correspondants spécialistes. Nous avons cette chance en France d’avoir encore des spécialistes de proximité qui évitent de nombreuses hospitalisations et qui, avec les généralistes, constituent un véritable maillage du territoire. Si les efforts du  Gouvernement continuent de porter essentiellement sur le premier recours et le médecin traitant, en ignorant les spécialistes de ville, nous allons à l’échec pour ce qui est des parcours de soins. C’est un enjeu majeur.

Est-ce à dire que vous revendiquez la place de coordinateur dans le parcours de soins ?

P. G. : Le parcours de soins nécessite que de liens très forts existent entre spécialiste et généraliste, mais celui qui coordonne tout, c’est le médecin traitant, c’est le généraliste. Nous revendiquons un rôle d’expert et d’échanges avec le médecin traitant pour décider de la meilleure prise en charge possible d’un patient, mais nous ne revendiquons absolument pas le rôle de coordinateur dans le parcours de santé.

Vous allez donc être particulièrement attentif à ce que cette place soit respectée au cours des négociations sur la coopération interprofessionnelle et la rémunération du travail en équipe ?

P. G. : Bien évidemment. A un moment ou à un autre, il faudra que les spécialistes s’invitent un peu ! A l’UMESPE/CSMF, la coordination entre les spécialistes et les généralistes est forte. Je travaille depuis longtemps avec le président de l’UNOF, Luc Duquesnel, et nous portons depuis quatre ou cinq ans ce discours de coordination entre le premier et de deuxième recours. La CSMF porte ce discours et le portera lors de ces négociations.

Catherine Sanfourche




Les sujets d’actualité en 2014

370 – En ce (encore) début d’année, Le Cardiologue en revue quelques sujetsqui ont changé, changeront ou changeront peut-être la pratique cette année.

Quant au nouveau président du SNSMCV, Eric Perchicot, il explique quelles seront les priorités du syndicat en 2014.

La transparence s’applique

Accessibilité : trois ans de sursis maximum pour les médecins

La télécardiologie enfin rémunérée ?

Mesure de la FFR : au programme de la HAS

Avenant 8

Entretien Eric Perchicot : « Inscrire le cardiologue dans le parcours de soins est une priorité »

 




La transparence s’applique

370 – Le Cardiologue passe en revue quelques sujets qui ont changé, changeront ou changeront peut-être la pratique en 2014…

On ne reviendra pas sur les « affaires » de santé publique qui ont abouti à ce que s’impose en France la nécessité de permettre au public de savoir quelles relations entretenait tel ou tel acteur du champ de la santé avec les industriel du secteur. L’essentiel est qu’après bien des rebondissements et démêlés, le SunShine à la française a finalement fait l’objet de tous les textes voulus pour pouvoir s’appliquer.

Les médecins sont concernés en premier chef par le dispositif de transparence. Mais il concerne également les associations de professionnels de santé, les étudiants et leurs associations, les associations d’usagers, les établissements de santé, les fondations et sociétés savantes, les entreprises de presse, les éditeurs de logiciels, les personnes morales assurant ou participant à la formation initiale et les syndicats en tant que défenseurs des intérêts catégoriels d’une profession. Seules échappent au dispositif les associations de professionnels dont l’objet social est la recherche en santé ou la formation médicale.

Dès qu’une entreprise est liée par convention à un praticien ou lui octroie des avantages en nature ou en espèces supérieurs à 10 euros, elle doit le publier sur un site internet public unique. Ces « avantages » comprennent les prestations d’hospitalité (transport, hébergement, repas, etc.) et les prestations d’ « études » pour les activités de recherche ou d’évaluation scientifique. Toutes les prestations rémunérées pour le compte d’une entreprise (orateur, consultant, expert) sont également concernées.

Cependant, s’il s’agit d’un avantage avec contrepartie, pour lequel une convention a été signée, l’obligation de publication ne porte que sur l’existence d’une convention, pas sur le montant de la prestation. Mais si l’avantage est sans contrepartie, le montant TTC doit être déclaré. Ce qui fait que la transparence n’est pas tout à fait la même pour tout le monde !

A noter que le Sunshine à la française n’a pas aboli la « loi anti-cadeaux, qui interdit aux professionnels médicaux (comme aux étudiants) de recevoir des « cadeaux » en espèces ou en nature de la part des entreprises, de façon directe ou indirecte.




Accessibilité : trois ans de sursis maximum pour les médecins

370 – Le Cardiologue passe en revue quelques sujets qui ont changé, changeront ou changeront peut-être la pratique en 2014…

La loi de février 2005 pour l’égalité des droits des personnes handicapées prévoit que tous les établissements recevant du public doivent être accessibles « aux personnes handicapées quel que soit le type de handicap, notamment physique, sensoriel, cognitif, mental ou psychique ». Les cabinets médicaux sont donc eux aussi, soumis à cette obligation, qui devait être effective le 1er janvier 2015. Déjà, depuis le 1er janvier 2007 tout nouveau cabinet médical doit répondre aux exigences de la loi en matière d’accessibilité. Mais le problème concerne surtout la mise aux normes des cabinets anciens. A un an de la date fatidique, force est de constater que nombreux sont les Espaces Recevant du Public (ERP), dont les cabinets médicaux, qui ne sont pas aux normes d’accessibilité et ne seront de toute évidence toujours pas « dans les clous » le 1er janvier prochain. Devant ce constat, un comité interministériel, sous l’égide de Matignon, a été mis en place et a prévu des aménagements possibles pour les professionnels qui n’auraient pu se mettre en conformité au 31 décembre de cette année. Après concertation menée par Marie-Arlette Carlotti, la ministre chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l’Exclusion, des Agendas d’Accessibilité Programmée (Ad’AP) ont été mis en place. Ainsi, les professionnels de santé libéraux dont le cabinet n’est pas conforme devront obligatoirement sous peine de pénalités – signaler auprès des collectivités avant la fin de cette année leur volonté de réaliser les travaux nécessaires. Il devront ensuite remplir un dossier d’Ad’AP au plus tard douze mois après la publication de l’ordonnance prévue pour l’été. Une commission ad hoc examinera alors les caractéristiques et la situation du cabinet, déterminera si un délai supplémentaire est nécessaire et évaluera la durée de l’Ad’AP.

Pour les ERP de moins de 300 personnes, et donc pour les cabinets médicaux, ce délai supplémentaire ne pourra excéder trois ans.

Rappelons qu’il existe trois motifs de dérogation à l’obligation d’accessibilité des locaux aux personnes handicapées. Le premier nécessite de démontrer l’impossibilité technique de procéder aux aménagements nécessaires. Le second concerne les cas où un patrimoine architectural doit être conservé. Le troisième peut être invoqué en cas de disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences. Pour pouvoir bénéficier d’une dérogation, il faut s’adresser à la Direction de l’Equipement et s’informer auprès de la Commission Consultative Départementale de Sécurité et d’Accessibilité (CCDSA).




La télécardiologie enfin rémunérée ?

370 – Le Cardiologue passe en revue quelques sujets qui ont changé, changeront ou changeront peut-être la pratique en 2014…

La sécurité et l’efficacité de la télésurveillance des porteurs de stimulateur cardiaque et de défibrillateur ont été démontrées et les économies qu’elle génère aussi (voir Le Cardiologue n° 368-369). Reste que depuis la parution du décret sur la télémédecine d’octobre 2010 prévoyant la rémunération des actes de télémédecine, les cardiologues qui assurent cette télésurveillance le font toujours… gratuitement ! Pourtant, deux demandes de création d’actes (« télésurveillance d’un stimulateur » et « télésurveillance d’un défibrillateur ») ont été déposées à la HAS en 2011. Et l’année suivante, le Conseil National Professionnel de Cardiologie (CNPC) et l’Ordre des médecins ont proposé un forfait global annuel pour ces deux actes à deux niveaux : plus élevé la première année pour tenir des charges liées à la mise en place du DM, inférieur ensuite. Les deux instances ont proposé des forfaits de 360 euros et 320 euros pour la surveillance d’un stimulateur, et de 380 euros et 250 euros pour celle d’un défibrillateur.

L’étude ECOST « indique clairement qu’une prise en charge par l’Assurance Maladie sur la base des propositions du CNPC et du CNOM est tout à fait rationnelle et n’engendre pas de coût supplémentaire ». Les propositions de forfaits avaient été faites en effet sur la base du coût annuel de la surveillance conventionnelle pour l’Assurance Maladie qui se situait alors entre 200 et 400 euros pour les porteurs de stimulateurs et entre 212 et 424 euros pour les porteurs de défibrillateur. « Ces propositions ont été faites sur la base d’un acte en face à face à 61,04 euros, commente le Dr Arnaud Lazarus. Or, cet acte évolue vers son tarif-cible qui sera bientôt d’environ 70 euros, soit 10 euros d’écart par rapport à ce que nous avions calculé. Les forfaits proposés sont donc sous-estimés. »

Même revus à la hausse, le différentiel avec le coût annuel d’un traitement conventionnel resterait raisonnable et les cardiologues ont bon espoir d’aboutir à un accord prochainement pour la rémunération de ces deux actes de télécardiologie. Une réunion imminente avec l’Assurance Maladie permettra de savoir s’ils ont raison d’espérer…




Mesure de la FFR : au programme de la HAS

370 – Le Cardiologue passe en revue quelques sujets qui ont changé, changeront ou changeront peut-être la pratique en 2014…

Prévue pour 2013, l’évaluation de l’acte de mesure du Flux Coronaire Résiduel (FFR) par la Haute Autorité de Santé devrait être effective cette année. En tout cas, elle figure au « Programme de travail 2014 » consultable sur le site de la haute instance. Elle devrait débuter ce premier trimestre et s’achever au 1er trimestre 2015.

Pour mémoire, cette technique consiste à mesurer une différence de pression entre l’amont et l’aval d’une lésion coronaire afin de juger l’importance de l’ischémie. Face à une lésion observée à la coronarographie mais dont l’impact clinique n’est pas certain, la FFR permet de décider de la nécessité ou non de revasculariser. Une FFR mesurée inférieure à 0,80 témoigne du retentissement fonctionnel d’une sténose.

Pratiquée et remboursée dans nombre de pays – notamment en Allemangne, en Angleterre, en Belgique – la mesure de la FFR est très peu pratiquée en France où elle n’est pas prise en charge. Pourtant, une étude qui fait référence (l’étude FAME) en a montré les bénéfices : l’utilisation de la FFR a permis de réduire de façon très significative le nombre de stents actifs implantés – avec en conséquence un bénéfice économique.

Selon Martine Gilard, professeur de cardiologie au CHU de Brest et ex-présidente du Groupe Athérome et cardiologie interventionnelle (GACI) de la Société Française de Cardiologie (SFC), « la mesure de la FFR permettrait de faire diminuer la pose de stents d’environ 25 %. L’économie de ces stents, des antiagrégants qui les accompagnent et des remboursements est évaluée entre 400 000 et un million d’euros ». Elle tenait ces propos dans Le Cardiologue n° 357 en décembre 2012 et se disait alors « optimiste » quant à la reconnaissance et la valorisation de cet acte…




Entretien Eric Perchicot : « Inscrire le cardiologue dans le parcours de soins est une priorité »

370 – Le nouveau président du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux (SNSMV), Eric Perchicot, détaille pour Le Cardiologue quelles sont les priorités pour l’action syndicale qu’il entend mettre en avant au cours de cette année.

Vous venez de succéder à Christian Ziccarelli à la présidence du SNSMCV. Quelles vont être vos priorités pour l’année 2014 ?

Eric Perchicot. Tout d’abord, je tiens à dire que je vais travailler dans la continuité de mon prédécesseur qui a fait un excellent travail durant son mandat. Une priorité me semble incontournable pour le Syndicat cette année : inscrire le cardiologue dans la continuité des soins. Dans le parcours de soins tel qu’il apparaît pour l’instant dans la Stratégie Nationale de Santé, notre place est assez flou. Alors qu’il doit se concrétiser dans une loi de santé publique, il me paraît primordial de convaincre les pouvoirs publics et les autres médecins d’inscrire le cardiologue pleinement dans le parcours de soins. S’il l’est de fait sur le terrain, dans notre pratique quotidienne, où nous ne rencontrons pas de problème avec nos autres confrères, encore faut-il qu’il soit inscrit dans le parcours de soins si celui-ci doit être formalisé. Un cardiologue qui a fait dix à douze ans d’études est dans de nombreux cas le plus à même de faire le bon choix pour le patient, toute la force du médecin étant de dépister le problème derrière une apparente « normalité ». Dire autre chose est faux. A cet égard, je rappellerai que nous sommes opposés aux transferts de compétences, terme qui ne veut rien dire, mais pas à une réflexion sur des délégations de tâches protocolisées. Oui au parcours d soins, mais dans lequel le cardiologue doit avoir une place clairement définie.

Ma deuxième priorité concerne la politique tarifaire. Le Syndicat s’est opposé à l’avenant 8 et à l’encadrement des compléments d’honoraires. Et j’insiste sur ce terme parce que la sémantique est importante : il s’agit bien de compléments d’honoraires et non de dépassements. L’aggravation de ces compléments d’honoraires est due à la non, ou trop faible, revalorisation des actes depuis plus de 10 ans dont résulte une valorisation du tarif des actes d’un niveau indigent par rapport aux autres pays européens. Il va falloir sortir de la problématique de la poule et de l’oeuf. Nous voulons bien accepter un encadrement des compléments d’honoraires mais à condition d’une remise à niveau significative des tarifs de base. Une grande partie de nos honoraires est liée aux actes techniques. Or, le point de travail fixé à 0,44 euro au démarrage de la CCAM technique n’a jamais été réévalué, contrairement à ce qui était prévu lors de sa création. Il faut donc revenir à ce qui était prévu et procéder à une actualisation de la CCAM technique.

Parmi les chose prévues mais jamais concrétisées, les cardiologues attendent toujours l’inscription des actes de télésurveillance à la nomenclature qui leur permettrait d’être rémunérés pour cet acte. Où en est-on ?

E. P. Nous attendons un arbitrage. Il est juste de dire que nos interlocuteurs à l’Assurance Maladie sont à l’écoute et conscient que nos propositions sont raisonnables. Nous devrions aboutir sur cette question cette année.

Le DPC fera-t-il également partie de vos priorités ?

E. P. Il s’agit d’une obligation légale, inutile de s’y opposer, en rappelant que le DPC ne remplacera jamais l’ensemble de la formation continue. Mais c’est un peu le parcours du combattant et nous souhaiterions une simplification de la mise en oeuvre dans le respect des modalités édictées par la Haute Autorité de Santé, et auxquelles nous sommes très attachés : dans un premier temps évaluation des pratiques du médecin, actualisation des connaissances sur le thème choisi et dans un troisième temps, évaluation de l’impact sur les pratiques dans les semaines qui suivent la formation.

Après les généralistes, les cardiologues ont été les premiers spécialistes à adopté le disposition de la Rémunération sur Objectifs de Santé Publique, la ROSP. Quel en est le premier bilan et des évolutions sont-elles envisagées ?

E. P. Nous ne sommes qu’au début et certains indicateurs ne sont pas parfaits. Les cardiologues s’impatientent, mais nous travaillons avec l’Assurance Maladie pour les améliorer. La médecine de ville ne disposant pas de l’équivalent du PMSI à l’hôpital, l’Assurance Maladie ne sait pas ce que recouvrent les prescriptions et la tâche pas n’est pas aisée pour élaborer des indicateurs. Mais je suis persuadé qu’il s’agit d’un système d’avenir mais qui doit être grandement amélioré. A terme, avec des indicateurs beaucoup plus nombreux et plus pertinents, la ROSP pourrait devenir une méthode de DPC intégrée harmonieusement à la pratique médicale, un brin d’optimisme ne fait jamais de mal…




Avenant 8

370 – Le Cardiologue passe en revue quelques sujets qui ont changé, changeront ou changeront peut-être la pratique en 2014…

Instauré par l’avenant 8, le Contrat d’Accès aux Soins (CAS) est ouvert aux médecins du secteur 2 et les médecins titulaires d’un DP, aux médecins qui s’installent pour la première fois et dont les titres leur permet d’opter pour le secteur 2 (chefs de clinique) et aux médecins du secteur 1 installés avant le 1er janvier 2013 et dont les titres leurs permettent d’accéder au secteur 2.

Un médecin adhérant aux CAS s’engage à ne pas augmenter ses tarifs durant les trois années du contrat, à respecter son taux de dépassement moyen de l’année précédente recalculé (pour les secteurs 2), à réaliser une part de son activité à tarif opposable égale ou supérieure à celle pratiquée avant son adhésion et à respecter un taux de dépassement moyen recalculé au maximum égal à 100 % du tarif opposable de la Sécurité Sociale.

En contrepartie, il bénéficie des revalorisations applicables aux médecins exerçant en secteur 1 et de la prise en charge des cotisations sociales sur les honoraires correspondant à l’activité réalisée aux tarifs opposables. Au cours des trois ans du contrat, le médecin peut le résilier chaque année à la date anniversaire de sa signature. Plus de 11 000 médecins ont a ce jour opté pour le CAS.

Signé par l’Assurance Maladie, les syndicats médicaux et les complémentaires, le CAS prévoit un remboursement privilégié des compléments d’honoraires pour ses signataires, ce qui n’est toujours pas une réalité. La CSMF s’exaspère quelque peu des atermoiements des complémentaires et demande que les contrats responsables prévoit le remboursement intégral des compléments d’honoraires maîtrisés dans le cadre du CAS.

Depuis le 1er mars, et pour faire suite à l’avenant n° 8 à la convention, l’évolution vers les valeurs cibles se poursuit avec la revalorisation des actes cardiologiques suivants :

Tableau fenetresur

En outre, la Majoration pour Personne Agée (MPA) de 5 euros applicable depuis juillet dernier pour les consultations de patients âgés de plus de 85 ans s’appliquera également aux consultations des plus de 80 ans à compter du 1er juillet prochain.

D’autres revalorisations tarifaires sont cependant attendues par les médecins libéraux, en particulier par les cardiologues qui n’ont pas vu d’évolution de leur point de travail depuis sa création, ainsi que l’explique Eric Perchicot.




Le HCAAM favorise la maîtrise de dépenses

368-369 – Dans son dernier rapport annuel, à partir de projections réalisées jusqu’en 2060 concernant les dépenses de santé et le déficit des régimes obligatoires d’Assurance Maladie, le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie analyse les divers moyens qui permettraient de revenir à l’équilibre. Et privilégie une nouvelle fois la maîtrise des dépenses de santé en mobilisant « les nombreux gisements d’efficience du système de soins ». Les pistes envisagées ne sont ni plus ni moins celles esquissées dans la Stratégie Nationale de Santé du Gouvernement. Les solutions ne sont donc plus à chercher, mais à appliquer, signifie le HCAAM qui souligne « l’urgence du passage à l’acte ». Il s’agit donc maintenant d’avoir du courage politique, estime Jean-François Rey, le président des spécialistes confédérés (UMESPE) dans un entretien (voir autre article dans notre rubrique Fenêtre sur…). 

En novembre dernier, le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, avait saisi le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) pour une demande d’analyse de préconisations sur l’équilibre des comptes de la protection sociale, à mener en lien avec diverses instances. Le dernier rapport annuel du HCAAM comporte donc des projections d’ici à 2060 qui ont été effectuées par un groupe de travail qui a réuni des représentants de la Direction générale du trésor, de l’INSEE, de la Direction de la Sécurité Sociale (DSS), de la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) et de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS).

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Figure 1. Financement des dépenses totales de santé en 2011

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Figure 2. Evolutions annuelles du POB et de l’ONDAM exécuté, 1998-2013

Des projections vers un déficit abyssal

Selon les projections « spontanées », c’est-à-dire ne prenant pas en compte les mesures de redressement des comptes publics, les dépenses totales de santé (remboursées ou non) passeraient de 10,3 % du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2011 à 13,1 % du PIB en 2060. Les dépenses remboursées par les régimes obligatoires passeraient de 8,1 % à 10,4 % du PIB. Cette évolution aurait pour conséquence un accroissement du déficit de ces régimes, qui passerait de 0,4 % à 2,4 % du PIB. En « valeur équivalente », cela signifie que ce déficit de 7,4 milliards d’euros en 2011 avoisinerait les 14 milliards en 2020, les 29 milliards en 2030, dépasserait les 41 milliards en 2040 pour se stabiliser à près de 49 milliards d’euros en 2060.

Pour tenter d’infléchir cette courbe vertigineuse, le HCAAM analyse l’efficacité de trois « leviers de retour à l’équilibre » : hausse des recettes publiques (cotisations sociales, impôts et taxes), baisse des remboursements par les régimes obligatoires (et donc transfert vers les organismes complémentaires) et infléchissement de la croissance des dépenses de santé (à taux de remboursement inchangé).

A supposer que l’équilibre du système d’Assurance Maladie soit atteint en 2020 par l’un ou l’autre de ces leviers ou une combinaison des trois, le HCAAM explique que « sans mesure nouvelles le niveau de déficit de 2020 serait reconstitué dès 2030 (0,7 point de PIB) », « se creuserait encore jusqu’à doubler en 2040 (1,4 point de PIB) », puis « se dégraderait ensuite à un moindre rythme » pour atteindre 1,7 point de PIB en 2060. Les experts du HCAAM affirment donc que « pour pérenniser l’équilibre budgétaire atteint en 2020, des efforts devraient être poursuivis sans relâche du moins jusqu’en 2040, date après laquelle le vieillissement de la population ralentit ».

Un désengagement de la Sécurité Sociale

Quant au « levier » qui a la faveur du HCAAM, sans surprise puisqu’il l’a déjà privilégié par le passé, c’est la maîtrise des dépenses. Recourir aux seules hausses des recettes publiques supposerait en effet que ces hausses soient récurrentes jusqu’en 2040 et continuent d’être importantes chaque année, de 0,07 point de PIB, soit 0,1 point de CSG tous les ans. Lourd pour les ménages et politiquement intenable. La voie de la baisse du remboursement pour le retour à l’équilibre impliquerait un désengagement de la Sécurité Sociale poursuivi sans discontinuer avec des reculs toujours massifs jusqu’en 2040 et « une baisse de prise en charge de 10 points serait nécessaire entre 2020 et 2040 pour maintenir l’équilibre du système », souligne le HCAAM, qui opte donc pour la troisième voie, celle de la maîtrise, avec un ralentissement de la dépense de soins entre 2020 et 2040 qui devrait être d’environ 0,8 point par an par rapport à son évolution spontanée, puis nettement moins ensuite (– 0,2 point). Ce dernier levier est celui que le HCAAM a toujours préconisé considérant que la croissance des dépenses totales de santé spontanément supérieure à celle du PIB constitue « la véritable menace sur l’équilibre durable du système ».

Le Haut Comité pour l’Avenir de l’Assurance Maladie réaffirme donc « l’impérieuse nécessité d’une maîtrise des dépenses de santé, mobilisant les nombreux gisements d’efficience du système de soins » : une meilleurs organisation de ce système, l’articulation entre la ville et l’hôpital « afin d’éviter les séjours inadéquats », la coordination entre les professionnels de santé et sociaux et la mise en place de parcours de santé coordonnés. Avec pour corollaire à la réalisation de ces objectifs la mise disposition des données de santé, mais aussi « la définition pertinente du périmètre du panier de soins, incluant la prévention, ainsi que le respect du bon usage ». Le tout avec « une gouvernance plus efficace de l’ensemble du système de soins tant au niveau central que territorial afin de rendre plus efficiente la régulation ».

L’urgence de passer à l’acte

Rien de très neuf dans ce nouveau rapport du HCAAM, qui ne revendique d’ailleurs pas l’innovation mais insiste en revanche sur « l’urgence du passage à l’acte au regard des déficits accumulés et de l’évolution démographique en cours ». C’est ce courage, indique-t-il, qui devra accompagner la Stratégie Nationale de Santé « définie par les pouvoirs publics, qui se déploiera sur plusieurs années et dont tous les effets ne seront pas immédiats ». On sait, hélas, ce qu’il en est du courage politique, toutes tendances confondues…

 




Jean-François Rey (UMESPE) : « La médecine de ville prouve l’efficacité de la maîtrise »

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© Pascal Wolff

Jean-François Rey : Etant donné la hauteur des cotisations sociales en France et le coût du travail qui en découle, les augmenter n’est pas envisageable. Mettre les organismes complémentaires à contribution n’est pas non plus la bonne solution car elles ne vont pas inventer la pierre philosophale : une plus grande intervention de leur part ne peut que setraduire par des hausses de cotisations. Reste en effet la maîtrise des dépenses à laquelle la CSMF et l’UMESPE sont favorables. Mais il faut que le politique ait le courage de dire où sont les marges d’efficience. L’industrie pharmaceutique a déjà été mise largement à contribution et la médecine de ville aussi.

Reste le problème que personne ne veut attaquer de front, celui de l’hôpital. La France compte autant de lits d’hospitalisation que l’Allemagne avec vingt millions d’habitants en moins, c’est insensé ! Sans compter les disparités de coûts pour des actes similaires entre le secteur hospitalier public et le secteur privé : tout le monde connaît l’exemple de l’appendicectomie pour laquelle le surcoût à l’hôpital public est de 20 à 30 % par rapport aux cliniques privées. Il est toujours impossible de connaître la prescription de chaque praticien hospitalier quand celle des médecins de ville est transparente pour l’Assurance Maladie. J’ai participé récemment à une grande réunion sur la chirurgie ambulatoire où des confrères du public avaient l’air de découvrir qu’elle ne concerne pas seulement la chirurgie traditionnelle mais aussi la chirurgie cardiaque, la chirurgie interventionnelle, etc.

Dans les cliniques privées, la chirurgie ambulatoire commence à 7 heures du matin et finit à 20 heures le soir. On me dit qu’après 13 heures, elle n’est plus possible à l’hôpital public faute de pouvoir assurer la surveillance postopératoire. Et face à ces constats, je ne mets absolument pas en cause les confrères du public, mais l’organisation de la structure publique. Mais cette analyse a été faite par tous, à gauche comme à droite.

Mais toucher à l’hôpital est toujours politiquement délicat…

J-F. R. : Bien sûr ! On voit bien que la fermeture du moindre petit établissement provoque de vives réactions dans la population et chez les maires des communes concernées.

On voit bien que la droite a repoussé la convergence tarifaire entre public et privé supprimée par la gauche. C’est un manque de courage politique. Mais on ne peut plus continuer à voir s’empiler les rapports et les analyses.

La maîtrise des dépenses fonctionne en ville alors que personne n’y croyait ! Résultat : la médecine de ville est exemplaire et est responsable d’une sous-consommation de l’ONDAM de 500 millions d’euros en 2013 quand l’hôpital est toujours en dehors des clous.

Le HCAAM a raison : la seule façon d’endiguer les dépenses de santé réside dans la maîtrise de leur évolution, mais il faut passer à l’acte ! n




Une nouvelle présidente pour le HCAAM

368-369 – Depuis le 1er février, c’est Anne-Marie Brocas (57 ans) qui préside le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie. Elle succède à Annick Morel, qui le présidait depuis novembre 2012 mais qui a fait valoir ses droits à la retraite. Diplômée de Institut des Sciences Politiques de Paris et ancienne élève de l’ENA, Anne-Marie Brocas est administratrice civile hors classe. Spécialiste des assurances sociales (maladie, vieillesse, chômage), elle a travaillé dans divers ministères. Plus récemment, elle a été directrice de la DREES, de 2006 à 2012, date à laquelle elle est devenue inspectrice générale des affaires sociales (IGAS).