2008 « les relations conventionnelles au bord de la rupture ?

307 – Rarement, la perspective conventionnelle n’aura été si peu lisible : les relations sont de plus en plus difficiles entre l’État et les syndicats signataires, malgré le soutien affiché par le Directeur Général de l’UNCAM. Chaque signature d’avenant fait l’objet d’un accouchement difficile ; pour exemple, le psychodrame particulièrement révélateur, autour des trois derniers avenants, paraissant, in extremis, au J.O. du 27 décembre.

Notons que la polémique était peu compréhensible hors du microcosme : la non-prolongation de la MPC aurait été incompréhensible et considérée comme un casus belli quant à la seconde phase de la CCAM technique, elle était largement financée par les baisses des actes de radiologie et de cardiologie interventionnelle.

à ce propos saluons l’équité des syndicats signataires qui a permis, à la demande du SNSMCV, de faire bénéficier les cardiologues interventionnels du forfait d’archivage.

Paradoxalement, jamais les opposants à la convention n’ont, semble-t-il, été aussi proches d’une signature. Il est vrai que le ministère ne ménage pas ses efforts de séduction avec pour enjeu la nouvelle représentativité pour les médecins généralistes. Bien malin celui qui dira lequel des deux protagonistes l’obtiendra.

Et pourtant le ciel de la médecine libérale ne s’éclaircit pas et les réformes s’annoncent à marche forcée : – la LFSS 2008 a déjà largement amputé les prérogatives conventionnelles : stabilisateurs économiques, contrats individuels par exemple ; – les États Généraux, initialement « vendus » aux internes pour faire passer la pilule des indispensables mesures correctives des inégalités démographiques, se sont étendus à toute l’organisation de la Santé. Certains souhaitent à l’évidence profiter de cette tribune pour en faire la promotion exclusive de la médecine de soins primaires en l’assimilant, à tort, systématiquement aux soins de premier recours où la cardiologie doit garder toute sa place, comme nombre d’autres spécialités ; – la mission Larcher doit redéfinir les champs respectifs de l’hospitalisation publique et privée. Ã entendre ce monsieur, la problématique ne se résumerait qu’à une question de politique de revenus des médecins spécialistes libéraux. Ã bon entendeur… ; – la mission Ritter devra définir la place et les missions des Agences Régionales de Santé, dont les nouveaux directeurs verront leurs prérogatives s’accroître à l’organisation de la médecine libérale. Il est facile de mesurer les dangers de ces nouvelles agences pour qui a participé aux SROSS sous la férule des ARH !

Point d’orgue à cette frénésie réformatrice, la loi annoncée pour juin « Offre de soins », loi de tous les dangers, en particulier pour le secteur II. Mais qu’est donc devenu le secteur optionnel ?

Bref un calendrier à couper le souffle pour cette nouvelle année que je vous souhaite, néanmoins, la meilleure possible. ■

Docteur Jean-François Thébaut, le 28 décembre 2007




PLFSS 2008 : la fin d’une logique conventionnelle ?

306 – Comme chaque année, depuis 1997, le Parlement vient de voter la loi de Financement de la Sécurité Sociale pour l’année prochaine. Comme chaque année, le projet de loi a été l’objet d’un psychodrame législatif à l’occasion des allers et retours entre le Sénat et l’Assemblée Nationale, celle-ci ayant toujours le dernier mot. _ Comme chaque année, certains boutefeux « anti-médecins libéraux » se sont particulièrement illustrés. _ Le comble du ridicule a été atteint par la fameuse taxe de 0,50 centimes d’euro qui serait infligée aux médecins récalcitrants à l’informatisation des feuilles de soins. Taxe déjà envisagée il y a plus de 10 ans et jamais appliquée car techniquement irréalisable. _ L’anecdote prêterait à rire si elle ne traduisait pas de la part d’un élu du peuple, un acharnement d’autant plus indigne qu’il est le fait d’un confrère professionnel de santé. _ Mais plus importantes sont les
quatre décisions contenues dans cette loi : _ les mises en place de stabilisateurs économiques qui repousseront inévitablement à l’année suivante les augmentations tarifaires, du fait d’un ONDAM systématiquement trop faible pour l’ambulatoire. Cette année encore l’ONDAM délégué de ville sera évidement insuffisant, puisque proche de 2 % du fait du tour de passe-passe des franchises médicales, prélevées sur les soins de ville et attribuées, pour les deux tiers d’entre elles, aux secteurs hospitalier et médico-social ; _ la définition des contrats individuels qui, loin de « stimuler » la dynamique contractuelle, comme le prétend Madame Bachelot, isoleront les médecins en les mettant directement sous la tutelle de l’arbitraire des caisses, quand bien même « l’élaboration des contrats types n’exclut pas les syndicats signataires » : doux euphémisme de la Ministre ! ; _ la modification d’objectif des États Généraux de la Santé, qui devaient être initialement consacrés à la démographie médicale et qui concerneront en fait l’organisation de la santé. Leurs conclusions s’imposeront aux partenaires conventionnels alors même que les protagonistes seront d’origines singulièrement diverses, allant du front des opposants à la convention aux représentants des internes, en passant par les maires de France et les usagers triplement représentés ; _ la création des agences régionales de santé, avec des prérogatives qui concerneront, à n’en pas douter, les libéraux, alors même que leur représentativité y sera noyée parmi les administratifs de l’État, des caisses et des établissements de soins. _ Si on y ajoute l’encadrement drastique du secteur 2 avec la responsabilité nouvelle dévolue aux directeurs de Caisses de déterminer le tact et la mesure, il paraît évident que l’on change de logique. _ De force de proposition, le rôle des syndicats signataires risque fort de devoir glisser inévitablement vers celui de force de résistance. _ Déterminer si la résistance sera plus efficace de l’intérieur ou de l’extérieur sera alors l’enjeu essentiel ! ■

Docteur Jean-François Thébaut, _ le 27 novembre 2007




Liberté, liberté chérie

305 – En s’attaquant au droit d’installation le Président de la République et son Gouvernement s’attaquent à l’un des fondements de la médecine libérale.
Certes, à la lettre, cette liberté-là ne figurait pas dans la fameuse « Charte médicale » de 1927, dont on rappelle les cinq principes fondamentaux : – libre choix du médecin par le malade ; – respect du secret professionnel ; – entente directe sur les soins et honoraires ; – liberté thérapeutique ; – contrôle des malades par leur caisse et des médecins par leur syndicat.

L’évolution des relations conventionnelles a largement mis à mal au moins trois de ces items. _ La limitation de cette liberté d’installation serait lourde de conséquences et porteuse d’une une valeur hautement symbolique : – elle toucherait les plus jeunes d’entre nous, déjà réticents à l’idée de s’installer en libéral – elle serait imposée sans qu’aient pues être réellement testées les mesures incitatives – elle préfigurerait assurément un conventionnement individuel et sélectif en conditionnant aussi le choix du secteur – elle serait complétée, de surcroît, par la mise en place de contrats individuels qui renforceraient ce changement de logique.

Bien sûr il est de la responsabilité ultime du Président d’assurer une continuité territoriale et, en l’occurrence, une équité d’accès aux soins. C’est un discours d’autant plus recevable par les citoyens qu’il existe, à l’évidence, une désertification médicale de certaines régions.

Mais il faut rappeler haut et fort que ce désengagement n’est pas le seul fait des professionnels de santé. L’Etat y a une lourde responsabilité avec la fermeture successive des derniers services publics : trains, postes, écoles …, au nom de la rentabilité, des lois sociales du travail, de la sécurité des usagers.

Voudrait-on faire des médecins les derniers Mohicans…

Mais surtout, à l’approche d’élections de proximité, méfions-nous de discours démagogiques dont l’apparente évidence de bon sens cache une réalité non évaluée, à l’image de celle de la volonté du maintien d’hôpitaux de proximité. Rappelez-vous celui de Saint Affrique, maintenu ouvert après un sitting des élus et de toute la population, et qui a dû être fermé, en urgence, il y a peu, par le ministère de la Santé, à la suite d’accidents iatrogènes dramatiques.

Loin de combler le déficit des zones déficitaires, cette mesure coercitive risque fort de servir de repoussoir à l‘installation libérale et, donc, aboutir, en réalité par un effet boomerang, au contraire de l’effet recherché, puisque ce sont les médecins libéraux, et eux seuls, qui peuvent assurer la couverture médicale de proximité, sur l’ensemble de notre territoire. _ Et qu’en sera-t-il, si le Président ajoute à ces mesures l’obligation de garde, ainsi qu’il semble en avoir été convaincu par les arguments partisans et démagogiques du principal représentant des urgentistes, celui-ci, manifestement, au début de sa carrière politique !

Jean-François THEBAUT, _ Président. _ Le 16 octobre 2007.




Un parfum de 1995 !

304 – Rappelez-vous : des comptes sociaux dans le rouge, une croissance en berne, des exportations au plus bas.

Après qu’un nouveau président ait été élu assez massivement par les suffrages de la profession pour son discours clairement engagé sur le thème gaullien de « Médecins, je vous ai compris ! », pendant qu’un gouvernement libéral prêchait pour la relance avec force et qu’une Secrétaire d’État à la Santé, tout acquise, écoutait d’une oreille bienveillante les doléances de la médecine libérale, concomitamment, dans le conclave des bureaux dorés des ministères, était concoctée une réforme de l’assurance maladie dont on allait nous dire des nouvelles !

La réforme Juppé était présentée quelques semaines après la rentrée, en novembre, par un Premier Ministre droit dans ses bottes devant une Assemblée conquise et qui salue cette annonce par une standing ovation.

Mais, c’est du passé… me direz-vous.

Et pourtant la conjoncture est très similaire : un nouveau président très libéral, une Ministre aimable et appréciée, à l’écoute des médecins, mais aussi (et toujours) des comptes sociaux dramatiques, une dette gigantesque, un déficit des exportations et du budget, une croissance au ralenti, tout y est ou presque, si l’on excepte le chômage, retraite des baby-boomers oblige, et qui, en fait, ne constitue qu’un simple transfert de déficit depuis l’UNEDIC, vers les caisses de retraites.

De surcroît la campagne d’intoxication médiatique paraît relancée contre le corps médical avec, en première ligne, les déclarations intempestives et maladroites du Président de la Cour des Comptes qui non seulement remet en cause la légitimité conventionnelle mais de plus attaque durement la médecine libérale, que ce soit sur les sujets cumulés de la démographie, de la liberté d’installation, des tarifs et des différents secteurs, de la formation, ou même des relations avec l’industrie.

Bref, tout y passe ! Et il n’hésite pas à clamer haut et fort l’échec de la réforme de l’Assurance Maladie de 2004 qui n’a pas permis, selon lui, de solder les déficits.

Elle portait pourtant en elle, disons-le, les germes du succès : la maîtrise médicalisée, la responsabilisation des acteurs avec son parcours de soins et ses franchises, le DMP solution pleine d’espoir pour optimiser la coordination des soins, l’EPP sous l’égide de l’HAS. Tous les nouveaux paradigmes de la qualité et de la rationalisation des soins semblaient réunis.

Et pourtant, si échec il y a, il n’est qu’en demi-teinte, car il est lié en grande partie au montant de l’ONDAM 2007, nanifié dès sa naissance, et qui, en fixant des objectifs inaccessibles, ne pouvait qu’entraver la réussite de la réforme, la transformant en une maîtrise comptable pure et dure, avec son cortège de baisses autoritaires et inefficaces à terme.

D’aucuns diraient que lorsqu’on veut se débarrasser de son chien, on crie qu’il a la rage.

Alors, ne voudrait-on pas se débarrasser de la réforme de 2004 et nous refaire le coup de l’Ordonnance ?

Le PLFSS avec la bataille de l’ONDAM 2008 est lancé : c’est lui qui nous indiquera l’espérance de vie de la maîtrise médicalisée. En dessous de 3 % pour la ville ce sera la pire des euthanasies, au dessus de 3,5 % l’espoir d’une guérison, entre les deux… les soins palliatifs.

Mais au fait le PLFSS et l’ONDAM, rappelez-vous, ils ont été institués par l’Ordonnance de 1996 ! ■

Docteur Jean-François Thébaut, le 17 septembre 2007




Communiqué de presse du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux

303 – Le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Coeur et des Vaisseaux alerte solennellement le nouveau Gouvernement sur les dangers d’un changement de logique conventionnelle faisant craindre un retour aux pires heures de la maîtrise comptable.

Le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Coeur et des Vaisseaux souligne l’absurdité de la situation faisant qu’un ONDAM de ville, à l’évidence insuffisant, entraîne inéluctablement une procédure d’alerte qui remet en cause les principes de la maîtrise médicalisée et l’avenant 23 signé le mois précédent.

Ce changement de logique, d’autant moins compréhensible qu’aux dires mêmes du Directeur Général de l’Assurance Maladie les dépenses 2006 étaient exceptionnellement faibles, décrédibilise, aux yeux des médecins, les négociations conventionnelles alors même que les objectifs inhérents à la médecine libérale sont pratiquement tous en passe d’être atteints.

Le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Coeur et des Vaisseaux redoute que la majoration des pénalités hors parcours soit un facteur limitant majeur à l’accès aux spécialistes et transforme le parcours de soins en véritable filière.

Le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Coeur et des Vaisseaux rappelle son attachement au système conventionnel et à la maîtrise médicalisée, seule voie possible pour un partenariat équilibré ; toute autre décision arbitraire remettrait en cause profondément la confiance indispensable vis-à-vis de la tutelle.

Docteur Jean-François Thébaut, le 25 juin 2007




Présider ou l’art de gérer les contradictions !

302 – Alors même que pour la première fois depuis sa création le Comité d’Alerte s’alarme, rarement un Gouvernement se sera trouvé, pour ce qui concerne les comptes de l’Assurance Maladie, devant un tel amoncellement de problèmes qui réclament des solutions aussi contradictoires : – rétablir l’équilibre des comptes -* sans augmenter les prélèvements obligatoires -* sans alourdir la dette -* sans diminuer significativement les remboursements -* sans augmenter l’ONDAM de ville pourtant manifestement insuffisant ;

– maintenir un accès aux soins équitable -* tout en responsabilisant les patients et en favorisant le parcours de soins -* mais sans pénaliser les plus démunis -* et tout ceci en refusant de transférer les charges sur les complémentaires ;

– responsabiliser les médecins -* sans trahir le concept de médicalisation de la maîtrise -* sans remettre en question les négociations tarifaires récentissimes qui venaient de conclure à la hausse pour les généralistes ou à la baisse comme pour les radiologues et pour les cardiologues interventionnels ;

– prôner le libéralisme -* en encadrant encore plus la médecine libérale et l’esprit d’entreprise de l’industrie du médicament -* en menaçant d’un encadrement strict du secteur II en échange d’un secteur optionnel réduit au strict minimum.

Alors comment faire ?

Notre expert favori répondrait, vraisemblablement, associer un peu de chaque mesure pour les rendre tolérables et acceptables par chacun des protagonistes.

L’un de nos trois ministres de tutelles, puisque nous en avons trois comme dans les années 1990, Eric Woerth en l’occurrence, se veut rassurant : « ce ne sera pas un drame… » « on peut faire beaucoup d’économies via des mesures réglementaires… ». Beaucoup, c’est un minimum de 900 millions d’Euros pour rentrer dans les clous ?

Mais dans quels clous au juste ? Certes l’ONDAM va être dépassé, c’était une évidence. Mais les comptes seront bons puisque les recettes vont être plus élevées et donc le déficit contenu. Ce qui paraissait initialement moins évident !

Alors n’y aurait-il plus d’urgence ?… Disons…, pas avant le deuxième tour des législatives ! ■

Docteur Jean-François Thébaut, le 5 juin 2007




Au travail, Monsieur le Président !

301 – En chaque chose, selon les philosophes chinois, il y a du bon mais aussi du mauvais.

Le versant positif de l’élection du nouveau président de la République, ce devrait être la garantie de la continuité : la Santé ne devrait, sans doute, pas être le champ de la rupture fréquemment évoquée. On imagine mal la nouvelle équipe remettre en question profondément l’esprit de la réforme de l’Assurance Maladie, d’autant qu’il devrait, quoi qu’on en dise, persister une certaine complicité entre le directeur général de l’Assurance Maladie, qui fut l’un des artisans de cette réforme, et le futur cabinet ministériel. _ De nombreuses pistes, qui ne sont pas pour nous déplaire, ont été tracées dans le programme du candidat élu : – responsabilisation de tous les acteurs avec remises à plat des franchises – espérons que l’abolition du fameux forfait de 18 €, décidé sur l’écho-cardiographie mais jamais appliqué, fera partie de ce train de mesures ; – espaces de liberté tarifaire et de valorisation des efforts de FMC et d’EPP, ce qui rappelle fortement le secteur d’excellence proposé par le deuxième Livre Blanc de la Cardiologie ; – amélioration du parcours et de la coordination des soins, sans que soit sacrifiée la médecine spécialisée de proximité ; – triplement du budget sur la prévention ; – incitation « énergique » au regroupement comme solution à la désertification médicale. _ Gageons enfin que le DMP retrouvera le deuxième souffle dont il a tellement besoin.

Mais corollaire du réalisme économique, cela signifiera aussi à n’en pas douter : – un renforcement des politiques de contrôles avec un objectif affiché de 10 milliards d’euros. Espérons que les médecins ne seront pas seuls à faire les frais de cette lutte contre les abus, les fraudes et les gaspillages ; – une politique budgétaire rigoureuse dont on redoute un ONDAM de ville trop étriqué qui ne permette pas d’assumer les échéances tarifaires annoncées. Les conclusions du prochain comité d’alerte seront à ce titre très instructives. Enfin au chapitre des craintes : – il faut toujours redouter un hospitalo-tropisme des orientations budgétaires, surtout dans l’état de désordre affiché des hôpitaux et compte tenu des propositions contradictoires faites par certains porte-parole officieux, allant jusqu’à prôner la réorganisation des soins locaux autour d’hôpitaux de proximité ; – le découplage du ministère de la Santé de celui des Comptes Sociaux, qui retirerait du poids aux négociateurs et nous renverrait aux affres de la maîtrise comptable. Le vote, semble-t-il majoritaire, des médecins libéraux en faveur du candidat élu, ne les met pas pour autant à l’abri du pragmatisme économique le plus technocratique. Souvenons-nous du plan Juppé !

Nous devons rester vigilants, même si certaines mesures vont, à n’en pas douter, dans le sens du maintien des grands principes de notre système de soins, comme, par exemple, l’expérimentation d’une TVA sociale destinée à le financer de façon efficace et pérenne.

Docteur Jean-François Thébaut, le 9 mai 2007




Avenant 23 : les limites de la maîtrise médicalisée ?

300 – L’un des fondements de la convention repose sur la maîtrise médicalisée. Dans l’esprit des syndicats signataires, à n’en pas douter, cela signifie une médicalisation d’attribution des allocations de ressources : soigner au juste prix en évitant redondance des actes ou prescriptions inappropriées voire inutiles.

Dans un premier temps, il était facile d’imaginer que les économies ainsi faites puissent servir de ressources aux négociations tarifaires suivantes, et l’on pouvait concevoir que les médecins veuillent engranger en retour une partie de leurs efforts.

Mais les économies ont une limite, d’autant que notre exercice ne se révèle pas, à l’étude, si inutilement dispendieux. Il faut se rendre à l’évidence, bientôt elles ne permettront plus de dégager suffisamment de masses financières pour générer les augmentations nécessaires à la restructuration indispensable de notre système de santé avec en premier lieu la CCAM des actes cliniques.

La bataille de l’ONDAM 2007 était déjà très significative, l’augmentation de l’indice des soins ambulatoires était gagée par une évolution négative des prescriptions médicamenteuses.

L’avenant 23 en est un autre exemple. Tout le monde s’accordait à reconnaître indispensable l’évolution du C à 23 € et la mise en place de la deuxième phase de la CCAM technique.

La première est potentiellement gagée par des résultats que l’on sait d’avance pessimistes, le comité d’alerte est là pour nous le rappeler. La seconde s’est faite au prix intenable d’une redistribution inter-spécialité. La CCAM devient un outil de régulation des revenus.

Les radiologues, les cardiologues interventionnels et les isotopistes ont subi une baisse autoritaire dont la seule marge de discussion n’était en réalité que dans sa répartition.

Mais ce n’est pas tout, nos confrères généralistes se sont également engagés à des objectifs individuels « d’efficience des actions de prévention » dont le principe est, bien sûr, louable, mais dont la mise en oeuvre prêterait à rire si elle n’était pas dangereuse : lisez les 10 pages de courbes, graphiques et tableaux de l’annexe 1 : ce n’est plus de la médecine, ce sont des mathématiques… Polytechnique oblige ?

Il faut revenir aux concepts simples et pragmatiques : la maîtrise médicalisée ne pourra jamais gérer de manière satisfaisante la pénurie d’un ONDAM insuffisant.

Le prochain gouvernement n’aura d’autres alternatives que de s’accorder un objectif en rapport avec les besoins réels des patients et ce avec l’aval des médecins, ou de revenir aux pires heures de la maîtrise comptable contre les médecins et contre les patients. ■

Docteur Jean-François Thébaut, le 16 avril 2007




Editorial du n° 299

299 – A l’heure où nous mettons sous presse, bien malin celui qui pourrait prédire le résultat final des négociations conventionnelles.

Alors qu’elles paraissaient bien engagées, un grain de sable, de la taille d’un menhir, menace de faire dérailler le train conventionnel.

Pourtant tout le monde semblait avoir besoin de cet accord : – le ministre pour symboliser le succès de sa réforme avant les élections ; – le directeur de l’UNCAM, pour montrer ses qualités de négociateur ; – les syndicats signataires pour « engranger » les fruits de leur investissement ; – les médecins généralistes pour authentifier leur récent statut de spécialistes ; – les spécialités cliniques pour lancer la salvatrice CCAM des actes cliniques ; – les chirurgiens et autres obstétriciens pour valoriser un exercice, certes rémunérateur, mais peu attirant aux dires des nouvelles générations ; – les spécialités médico-techniques pour « toucher » le deuxième tiers des revalorisations.

Bref, tout le monde, hormis les « imageurs interventionnels ou non », s’attendait à toucher sa part du gâteau !

C’était sans compter avec la dure réalité des chiffres et les qualités comptables du directeur général de l’UNCAM.

– Le C à 23 € paraît impossible avant 18 mois au mieux… si tout va bien ! – La CCAM des actes cliniques est remise aux calendes grecques faute de budget puisque l’intégralité des marges est consacrée à la revalorisation du C ! – La CCAM des actes techniques est proposée à budget constant. Il fallait l’oser !

Bref la crise !

Les opposants triomphent sur l’air de « on vous l’avait bien dit » tandis que les signataires crient à la trahison.

Et pourtant, même dans la douleur, il faudra trouver une solution ; car c’est, désormais, une évidence pour tous qu’en l’absence de convention, la porte est ouverte à l’anarchie tarifaire tant dans le sens des dépassements non maîtrisés que celui des baisses tarifaires autoritaires, ce dont les cardiologues ont un souvenir particulièrement amer !

La seule inconnue est de savoir qui rejoindra la convention après les élections ?

En théorie, entre la gauche et la droite, les orientations semblent simples et les syndicats y retrouveront respectivement leur credo, voire leur fonds de commerce. Pour nous les spécialistes, cela signifie d’un côté plus d’encadrement au nom de la solidarité de l’autre l’hypothèse des honoraires au mérite au nom du libre concurrence.

L’important sera de défendre la pérennité de la cardiologie libérale. _ Docteur Jean-François THÉBAUT, le 13 mars 2007




Lettre ouverte à mesdames et messieurs les candidats à la Présidence de la République

298 – Le système de soins français est reconnu partout pour sa qualité et son accessibilité à tous. _ C’est notamment parce qu’il repose sur une double dualité. D’une part, pour ce qui concerne l’hospitalisation et les plateaux techniques lourds, nos compatriotes disposent à la fois d’un secteur public et d’un secteur privé, et ils bénéficient d’autre part d’une médecine spécialisée libérale de qualité et de proximité, numériquement égale à celle de premier recours. _ L’accès à la spécialisation de la médecine générale ne changera, en fait, rien à cette dualité. _ Pour nos patients, la médecine spécialisée libérale, dont la cardiologie en particulier, est une grande richesse qui ne doit pas être dilapidée. _ Il est normal d’augmenter les honoraires de nos confrères, médecins de famille, qui ont un rôle quotidien fondamental, mais le statut des spécialistes ne doit pas être ignoré pour autant. – Il ne s’agit pas de privilégier les uns par rapport aux autres, il s’agit seulement d’être juste. – En optant pour un exercice exclusif, les spécialistes décident d’un mode d’exercice différent : – différent dans le recrutement des patients, de fait, limités en nombre ; – différent dans le temps consacré à chaque patient, qui est communément le double voire le triple de celui d’une consultation de premier recours ; – différent dans le contenu et l’expertise du service médical rendu, plus pointu, plus approfondi, le plus souvent complété par un compte rendu ou une lettre de synthèse – différent dans le degré de responsabilité, puisqu’il est considéré comme expert consultant, ce qui est largement concrétisé par le montant des primes de RCP. _ Au nom de la justice la plus élémentaire, cette différence doit se retrouver dans le montant des honoraires de base du spécialiste. _ Et quel que soit le mode de rémunération, cette revalorisation doit être appropriée et concrète. _ Or, à ce jour, dans vos discours et vos promesses, jamais un mot, jamais une allusion aux spécialistes libéraux, rappelons-le, en nombre égal avec les omnipraticiens généralistes. _ Sachez que votre responsabilité est immense, parce que la démographie des spécialistes, et surtout des cardiologues, va atteindre rapidement un niveau critique incompatible avec une prise en charge correcte des patients, alors qu’elle est déjà souvent insuffisante dans certaines régions, obligeant à de coûteux recours hospitaliers avec le corollaire du transport médicalisé ! _ Les jeunes se détournent de l’exercice libéral. L’exemple des seniors n’est plus enviable, ils sont découragés par une mise en place partisane du parcours de soins et une dévalorisation constante des honoraires. Citons à cet effet pour preuve le montant de la CSC, qui, autoritairement baissée peu après sa création, n’a rejoint sa valeur initiale, qu’au prix du rafistolage de la MCC. Plus de 10 ans sans augmentation ! Quel salarié l’accepterait ? _ Le pouvoir d’achat des spécialistes ne s’est maintenu, voire modérément élevé, qu’au prix d’une augmentation d’activité, tandis que la majorité des Français, profitait des 35 heures. _ La réforme de l’Assurance Maladie devait valoriser le rôle de l’omnipraticien, mais aussi celui du consultant. Cette valorisation n’est pas au rendez-vous et aucun de vos discours ne l’évoquent. _ Les spécialistes libéraux, et les cardiologues en particulier, sont très inquiets. Ils sauront lire et entendre vos projets les concernant, et ils attendent de connaître votre position à leur sujet. ■ _ Docteur Jean-François THÉBAUT, le 16 février 2007