L’ancien monde bouge encore

Deux chiffres permettent d’évaluer le véritable enjeu du PLFSS 2018 en cours de débat parlementaire : un peu plus de 250 millions d’économies attendues d’un parcours de soins rendu plus « efficient ». Et cela au prix d’un investissement dans un « Fonds pour l’innovation » doté de… 30 millions d’euros. Dont 10 millions seulement « à la main » des ARS !

Toute la contradiction de la commande gouvernementale se lit dans ce fossé entre l’objectif et les moyens. Dans n’importe quel autre secteur de l’économie, assigner une telle performance aux acteurs prêterait à sourire ; c’est pourtant bien celle que le Gouvernement Philippe assigne aux médecins dans le prochain exercice budgétaire.

La conséquence en est d’ores et déjà prévisible : hors de portée, l’assignation comptable ne sera pas atteinte et la Cour des comptes en rendra le corps médical responsable dans une prochaine livraison. La mécanique infernale de la stigmatisation vient de recevoir un nouvel élan.

Ceux qui attendaient une nouvelle posture du Gouvernement dans la gestion des questions de santé en seront pour leurs frais : l’ancien monde se porte bien dans les coulisses du pouvoir politique. Je veux parler des administrations centrales qui sont généralement à l’œuvre derrière ces chiffrages aveugles.

Le paradoxe, c’est que le discours politique est d’une autre nature : on a envie de croire à la sincérité de Mme Buzyn lorsqu’elle affirme dans un entretien récent à la revue Egora : « Le système de santé français n’est pas mauvais. Les médecins ont tous l’habitude de discuter entre eux, mais l’idée c’est de donner la possibilité, à travers des protocoles de coopération simplifiés, d’écrire et de mettre en avant l’exercice coordonné pour entrer dans une responsabilité territoriale. Le médecin isolé a un impact dans sa façon de prendre en charge les patients, et il est important d’avoir une vision territoriale de cela. »

La coordination à la bonne échelle du territoire : comment ne pas être d’accord ? Mais comment ne pas déplorer d’en lire la traduction comptable dans le seul texte qui vaille : la « feuille de route » budgétaire ?




Abandon du tiers-payant généralisé et obligatoire, une victoire syndicale !

L’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) avait été saisie par la ministre des solidarités et de la santé, Mme Agnès Buzyn, dLune mission sur l’évaluation de la généralisation du tiers-payant, afin d’expertiser la simplicité, la rapidité et la fiabilité du tiers-payant pour les professionnels de santé.

Ce rapport reprend très largement ce que nous nuavons jamais cessé de dire.

Il confirme que la pratique du tiers-payant est très diverse selon les professions. Les pharmaciens, les infirmiers, les centres de santé sont proches de 100 % quand les médecins généralistes et spécialistes (hors radiologues) sont autour de 40 % et les chirurgiens-dentistes moins de 25 %. Ces chiffres sont influencés par le poids des ALD et les règles juridiques de chaque profession. Mais il est aussi observé une forte disparité selon les territoires et selon les secteurs daexercice. Il se dégage dans chaque profession deux camps nettement opposés, deun côté celui qui pratique pas ou très peu le tiers-payant (entre 0 et 9 % des actes), de luautre celui où le tiers-payant est quasi généralisé (entre 90 et 100 % des actes).

Il estime que, en assurance obligatoire (AMO), la pratique du tiers-payant fonctionne de manière globalement satisfaisante, mais que le principal frein à son développement est principalement un problème de confiance. Pour laassurance complémentaire (AMC), le problème est technique, notamment pour l’identification des droits.

Il reconnaît aussi le caractère chronophage du tiers-payant, avec comme conséquence  un coût financier que laon fasse la gestion soit même ou, comme les pharmaciens, par le recours à des intermédiaires.

In fine la mission considère que, en AMO, la généralisation est un objectif techniquement réalisable à brève échéance sous réserve que soit mis en œuvre un accompagnement renforcé des professionnels de santé et que, en AMC, la généralisation nuest un objectif atteignable techniquement à compter de 2019 que pour certaines professions de santé. Et encore faudra-t-il développer de nouveaux outils informatiques, mettre en place un dispositif d’accompagnement renforcé des professionnels de santé et sans doute aussi des mesures incitatives.

Dans la foulée de ce rapport la ministre a fait voter par le Parlement un amendement dans le cadre du PLFSS 2018 pour lever l’obligation d’appliquer le tiers-payant à compter du 30 novembre 2017. A  la place le Gouvernement remettra d’ici le 31 mars 2018 un rapport au Parlement détaillant les modalités de mise en œuvre du tiers-payant généralisable et ce après une large concertation.

Que retenir de tout cela ?

La victoire d’un combat syndical contre un tiers-payant généralisé et obligatoire, mortifère pour le caractère libéral de la médecine, chronophage, au coût non compensé et techniquement et administrativement irréaliste.

Un premier geste de la ministre pour rétablir la confiance avec les médecins libéraux, ce qui nea pas manqué de soulever laindignation de Marisol Touraine dont les échecs électoraux niont manifestement pas remis en cause son dogmatisme !

Et rester vigilants sur loévolution des travaux qui doivent conduire vers le tiers-payant généralisable et non obligatoire promis par le Président de la République.




Et si on reparlait de la médecine spécialisée libérale…

Depuis de trop nombreuses années, la médecine spécialisée libérale est exclue du discours des différents acteurs du système de santé quels qu’ils soient, gouvernants, élus locaux, institutions régionales ou usagers de la médecine. A l’inverse, la médecine générale est élevée sur un piédestal surtout sous le modèle d’une médecine cantonnée dans une maison de santé pluriprofessionnelle sous tutelle de l’ARS et connectée à son seul environnement immédiat, paramédical, médicosocial et social. Dans ce schéma partagé par les gouvernements toutes couleurs politiques confondues, le médecin spécialiste ne peut être que dans un établissement de santé, idéalement public.

Une telle vision dogmatique de l’organisation des soins ne peut que courir à l’échec.

Pourtant par l’expertise qu’il a dans sa discipline le médecin spécialiste apporte une valeur ajoutée à la qualité des soins dans leurs différentes étapes. Il contribue à une hiérarchisation des soins qui évite bien souvent le recours à l’hospitalisation. Quel contresens serait de se priver d’une médecine spécialisée de proximité au moment où doit s’engager le virage ambulatoire. Et peut-on sérieusement concevoir et faciliter l’installation de jeunes médecins sans leur donner une possibilité d’accès simple à un spécialiste ?

Après ces longues années d’abandon, la médecine spécialisée libérale entend reprendre toute sa place dans le système de soins en s’adaptant à ses nouvelles exigences :

Parcours de soins, elle apporte la pertinence médicale et médico-économique et elle peut en devenir le pilote à certains moments de la maladie.

Organisation territoriale des soins, elle assure l’interface ville/hôpital, en lien avec toutes les autres spécialités, dans un exercice regroupé pour faciliter l’accès aux soins de la population même dans les zones les plus reculées. Pour ce, de nouvelles pratiques devront être développées, télémédecine, consultations avancées, stages d’internes. La coordination se fera par les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et plates-formes territoriales d’appui (PTA) qu’il faudra intégrer faute de quoi elles le seront par les ARS et GHT.

Virage ambulatoire, nous verrons à travers le futur ONDAM si le gouvernement partage la vision de l’IGAS d’un monopole de l’hôpital public ou s’il s’agit vraiment d’un transfert vers la ville qui requiert alors des moyens financiers et structuraux.

Autant de nouveaux mots et façons différentes de travailler mais par certains aspects pas si loin que cela de la pratique des cardiologues libéraux.

Si la médecine spécialisée libérale est prête à s’engager sur ces voies elle est en droit d’attendre en retour une vraie reconnaissance et le rétablissement d’un climat de confiance.

Les propos tenus par le nouveau Gouvernement semblent en rupture avec ceux des cinq dernières années. Il affiche sa volonté de plus grande écoute, de renouer les liens avec les médecins libéraux, de promouvoir la pertinence et la qualité des actes, d’impliquer les libéraux dans sa politique de prévention. Tout cela nous pouvons l’entendre et l’accompagner. Lueur d’espoir après de sombres années, certainement une chance à ne pas gâcher, mais attention, les cardiologues libéraux ne seront pas dupes, au-delà des mots ce sont les actes qu’ils attendent et jugeront.

Jean-Pierre Binon
Président du SNSMCV




La cardiologie en 10 leçons…

Et une réforme de plus que l’ancienne ministre ne nous aura pas épargnée en publiant même le dernier arrêté la veille du premier tour de l’élection présidentielle et en pleine contestation des acteurs concernés, internes, syndicats, collèges professionnels… ! Il fallait coûte que coûte mettre en place la réforme du 3e cycle des études médicales comme si c’était une urgence prioritaire pour le pays.

Plusieurs voies permettent aujourd’hui la qualification à une spécialité, celle du DES par le biais de l’internat, celle de la Commission ordinale de qualification pour les médecins déjà exerçant et qui veulent changer de spécialité, celle de la reconnaissance, automatique, d’un diplôme européen et enfin celle des autorisations ministérielles pour les diplômés étrangers hors Europe.

En cardiologie, 70 % des nouveaux qualifiés sont issus du DES et, à part égale pour les 30 % restants, de la voie européenne et de celle des autorisations ministérielles.

La réforme s’appuyait initialement sur un constat partagé de simplifier le cursus, d’assurer un meilleur suivi de l’étudiant, de décloisonner les spécialités et de s’appuyer sur de nouveaux outils pédagogiques apportés par les nouvelles technologies.

Mais comme bien souvent les priorités budgétaires ont pris le pas sur les considérations académiques.

L’augmentation du numerus clausus ces dernières années se traduit en effet par un afflux d’internes qu’il va être difficile de former et financer. Résultat, la dernière phase dite de consolidation ampute, de facto, d’une année la formation. Et tout laisse penser que cette phase, qui requiert d’avoir soutenu sa thèse, se substituera à l’assistanat dont il n’est pas prévu une augmentation significative des effectifs. Le clinicat quant à lui sera réservé aux quelques futurs hospitalo-universitaires. On comprend ainsi la grogne des internes qui ont depuis avril débuté un mouvement de grève.

Autre aberration, les différenciations des durées de formation selon les spécialités sorties du chapeau au dernier moment, alors que depuis 2014 il était imposé un cursus de 4 ans pour toutes les spécialités médicales. Et ce sans aucune transparence ni travaux d’évaluation des besoins et évolutions de chaque spécialité. Comment peut-on justifier qu’il faille 4 ans pour former un cardiologue ou un gastro-entérologue et 5 ans un pneumologue ?

Une surspécialisation pourra s’acquérir par le biais d’une option ou formation transversale mais nul ne sait combien d’étudiants (à noter que l’on ne parle plus d’interne ni d’internat mais étudiant et 3e cycle) pourront accéder à ces formations et sur quels critères ils seront choisis. En outre qui peut raisonnablement imaginer qu’un étudiant qui n’a, ou presque, jamais  mis les pieds dans une salle de cathétérisme puisse en une année devenir autonome dans les procédures interventionnelles ?

Le bilan pour la cardiologie est redoutable. Elle se retrouve fortement dévalorisée par rapport à d’autres spécialités, elle devient même le parent pauvre de l’Europe avec la Bulgarie et la Lettonie alors qu’il faut 7 ans pour former un cardiologue au Royaume-Uni et en Norvège ! La formation est manifestement insuffisante pour acquérir les compétences requises pour un haut niveau de technicité. Elle enferme les futurs cardiologues dans des champs d’activité prédéfinis dont ils pourront difficilement s’échapper et le recrutement des équipes interventionnelles libérales est manifestement menacé.

Reforme bâclée, sans méthode, ni cohérence ni transparence, copie à reprendre !

Jean-Pierre Binon
Président du SNSMCV




Le triste bilan des années Touraine

Au terme d’un quinquennat à la tête du ministère de la Santé, un record de longévité à ce poste sous la Ve  République partagé avec Simone Veil, Marisol Touraine laissera un souvenir bien amer aux médecins.

Après la période noire de l’époque Bachelot obligeant même à un nettoyage de sa loi sous l’égide de Xavier Bertrand et Jean-Pierre Fourcade, nous pouvions espérer être sortis du totalitarisme étatique. Et de fait, les premiers pas de la nouvelle ministre étaient plutôt encourageants, signature du CAS malgré ses insuffisances et élaboration innovante de la stratégie nationale de santé même si elle était issue d’un débat pseudo-démocratique car largement biaisé par les ARS. Cette stratégie, axée sur la structuration des parcours de soins, le virage ambulatoire et la coordination interprofessionnelle, aurait pu déboucher sur une nouvelle dynamique favorable à la médecine de ville.

Mais, premier rendez-vous manqué, la loi de Santé tourne le dos à ce virage ambulatoire. Elle instaure le tout hôpital à travers le service public hospitalier et les GHT dont sont exclus les établissements privés, muselle la médecine de ville dans des MSP ou, mieux, des centres de santé et dans des communautés professionnelles locales sous tutelles des ARS. Elle nie la médecine libérale spécialisée de proximité pour ne concevoir la place des spécialistes qu’à l’hôpital. C’est d’ailleurs in extremis que les travaux de la commission coanimée par Jean-François Thébaut ont pu remettre dans le circuit les spécialistes au sein des communautés professionnelles territoriales de santé. Et cette loi porte le coup de grâce à la médecine libérale en instaurant le principe du tiers-payant généralisé obligatoire au nom du grand principe de l’accès aux soins pourtant nullement menacé pour cette raison.

Le deuxième rendez-vous manqué fut celui de la convention médicale dont les négociations pilotées par le ministère ont confirmé la dérive étatique. La déception est grande d’une convention qui n’apporte aucune mesure restructurante pour la médecine libérale, qui laisse de côté les médecins spécialistes, oublie largement la CCAM technique et pénalise les patients selon le secteur d’exercice du médecin. La convention ne sera d’ailleurs signée que par trois syndicats sur cinq
qui n’hésiteront pas à en attaquer immédiatement certaines dispositions !

Et pour parachever cette dérive étatique l’article 99 de la LFSS 2017 qui autorise le directeur de la CNAMTS à passer outre la négociation et imposer des baisses de tarifs, ce qu’il s’est empressé d’appliquer aux radiologues dès le mois de janvier. A qui le tour maintenant ?

Ces cinq années auront été une des pires périodes pour la médecine libérale. Dogmatisme, étatisme, discours antilibéral et hospitalo-centré auront été les lignes de conduite dominantes. La ministre s’est sciemment coupée de la représentation syndicale. Elle est restée sourde au défilé contre sa loi de 40 000 professionnels de santé dans les rues de Paris le 15 mars 2015. A trois jours du scrutin présidentiel, elle publie l’arrêté portant la réforme du troisième cycle des études médicales contre l’avis de la plupart des collèges nationaux professionnels et des internes en grève. Pas étonnant dès lors qu’un récent sondage lui confère  86 % d’opinions défavorables auprès des professionnels et  4 % d’avis positifs

Et ce pour quel résultat ? L’hôpital public ne se porte pas mieux, l’Assurance Maladie garde un déficit important, l’obligation d’adhérer à une complémentaire santé et l’encadrement des contrats responsables ont contraints beaucoup d’assurés à souscrire une surcomplémentaire, et  le malaise reste profond chez les médecins dont les conditions de travail se détériorent au fur et à mesure que leurs charges progressent.

Il appartiendra au nouveau ministre de rompre ce cycle infernal, de construire un système coordonné où chaque acteur sera dans son vrai rôle et à sa juste valorisation et, surtout, de rétablir la confiance avec des médecins  qui connaissent leur métier et sont conscients de ses enjeux sociétaux.




Besoin d’un nouveau souffle

Nous allons être appelés à élire le nouveau Président de la République. Jamais cette élection majeure de la Ve République ne se sera déroulée dans un contexte aussi mouvant qu’incertain.

À l’étranger les électeurs se sont ingéniés à démentir tous les sondages. En Grande-Bretagne le Brexit s’est imposé, aux États-Unis l’élection de Donald Trump paraissait improbable tout comme en Italie le départ de Matteo Renzi. Et pourtant tout cela est arrivé.

En France, pour la première fois, un président sortant n’est plus en capacité de se présenter. Les élections primaires ont, elles, sorti de l’échiquier un ancien président et deux anciens premiers ministres. Les affaires viennent perturber le déroulement de l’élection et creusent le fossé entre la nation et ses élus.

Comment s’étonner de cette situation après trente ans de promesses non tenues par nos élus, un état qui se désagrège moralement et financièrement, et de plus en plus de Français en situation précaire.

Peut-on déceler un sursaut à la lecture des programmes des candidats dans le domaine de la santé ?

Certes les approches se différencient sur plusieurs points. Rationnement des dépenses hospitalières contre relance des recrutements et des investissements, création d’une armée de médecins généralistes fonctionnaires contre maintien d’une médecine libérale, un secteur 2 préservé, encadré ou aboli, les complémentaires santé refondées ou dissoutes, le tiers-payant  généralisé supprimé, maintenu, ou même généralisable pour un candidat !

Tous se rejoignent pour rembourser à 100 % lunettes, soins dentaires et prothèses auditives sans d’ailleurs préciser le financement et les conditions de prise en charge.

Tous veulent des MSP, certes plus ou moins étatisées selon la sensibilité politique, ainsi élevées en nouveau dogme de l’organisation de la médecine sans ne s’être jamais posé la question de leur modèle économique, leur impact sur les territoires et leur efficience quand on sait qu’elles réduisent le recours aux médecins spécialistes et qu’il s’agit là d’un facteur de dégradation du système de soins.

Enfin force est de constater que les lois Bachelot et Touraine ne sont pas remises en cause et qu’on a du mal à voir la médecine libérale, dans toutes ses composantes généralistes et spécialistes, placée au cœur de l’organisation du système de santé dans les territoires aux côtés d’établissements de santé recentrés sur leurs missions d’excellence.

Manifestement si certaines mesures sont intéressantes nous sommes loin de ce virage qui permettra à notre pays riche de créativité et d’initiatives locales innovantes, en médecine comme ailleurs de se libérer de son carcan étatique.

Le prochain président aura la lourde responsabilité de rétablir la confiance et de libérer les énergies, de laisser le pays respirer…




Numéro 400

Ce numéro du Cardiologue revêt une forte valeur symbolique puisqu’il porte le numéro 400. C’est le 1er mars 1965  que notre syndicat,  fondé en 1949 sous la présidence du Professeur Camille Lian, publie le 1er numéro de son journal officiel, Le Cardiologue

Depuis, la revue a continuellement paru, initialement à un rythme trimestriel puis mensuel.

Le Cardiologue est la seule revue cardiologique à la fois revue socioprofessionnelle et scientifique. Cette bivalence lui donne toute son originalité et son intérêt en offrant aux cardiologues une information non seulement de qualité mais aussi la plus complète et précise possible sur tous les aspects de leur métier.

Dans les pages socioprofessionnelles Le Cardiologue apporte informations et éclairages sur tout ce qui fait l’actualité du moment dans le monde de la santé, en sollicitant des interviews des experts des sujets concernés.

Chaque numéro inclut  aussi un cahier FMC, les deux premiers numéros de l’année étant plus particulièrement consacrés aux best of des grandes études et communications des congrès américains et européens.

Nous avons tenu à poursuivre la rubrique de Vincent Guillot  sur les problèmes de nomenclature. Cela nous a paru primordial car les règles des cotations demeurent complexes et les contrôles des caisses toujours prégnants.

Au fil du temps la revue s’est aussi ouverte sur l’extérieur en s’enrichissant de rubriques sur les nouvelles technologies, la culture et les arts, sans oublier les plaisirs gustatifs à travers sa page oenologique.

À l’heure d’un monde connecté, il a été fait le choix de garder une édition papier classique à côté de numéros uniquement numériques. Mais, modernité oblige, l’ensemble des publications est consultable sur notre site internet www.lecardiologue.com, et ce in extenso pour tous les abonnés.

Le Cardiologue se félicite de ne jamais quitter dans les études sur les audiences de lecture  les  trois premiers rangs chez les médecins libéraux ou mixtes et il est au premier rang des mensuels en 2016. Qu’en soient  vivement remerciés et félicités ses collaborateurs, ses rédacteurs et ses lecteurs.

La publication d’un journal a un coût que les recettes publicitaires ne suffisent plus aujourd’hui à couvrir, son financement repose aujourd’hui essentiellement sur les abonnés.

C’est grâce à vous et à votre confiance renouvelée chaque année que nous continuerons cette belle aventure débutée il y a 52 ans et fidèle aux vœux de son fondateur d’un journal « œuvre de l’ensemble des cardiologues » et reflet « de la forme la plus représentative et la plus vraie de ce qui est notre activité professionnelle ».




Elections…

L’assemblée générale de notre syndicat qui s’est tenue le 28 janvier a procédé au renouvellement de son Conseil d’Administration d’où sont issus nouveaux Bureau et président. Hommage appuyé a été rendu à l’équipe sortante et à son président, Eric Perchicot. C’est un double choix qui a été fait : celui du changement avec l’arrivée de jeunes cardiologues et de la continuité avec celles et ceux qui en poursuivant leur engagement nous apportent leur expérience. La nouvelle équipe aura pour tâche de défendre et promouvoir les cardiologues et la cardiologie ; elle devra aussi préparer la cardiologie de demain, une cardiologie dans un exercice regroupé, une cardiologie de l’urgence et du chronique, toujours ouverte sur les nouvelles technologies.

D’autres élections se profilent, présidentielles puis législatives. Ce doit être l’occasion d’un grand débat démocratique, explicatif sur la situation du pays et l’exposé clair des réponses apportées par les différents candidats pour que les citoyens puissent faire un choix éclairé au moment du vote.

Le pays va mal, le chômage est au plus haut, de plus en plus de personnes passent sous le seuil de pauvreté, le commerce extérieur est déficitaire, la dette s’alourdit chaque mois avec la menace de la remontée des taux d’intérêts qui rendra son remboursement de plus en plus difficile.

La santé ne peut être exclue du débat comme ce fut malheureusement le cas lors des élections précédentes. N’en déplaise à notre ministre, les comptes restent déficitaires avec une dette de près de 150 milliards d’euros qui s’alourdit chaque année et à laquelle se rajoutent 3 milliards d’intérêts d’emprunt. Pouvons-nous laisser une telle facture à nos enfants sans risquer un conflit entre génération ? Pire encore ce déficit n’empêche pas une dégradation du système. L’accès aux soins devient une vraie préoccupation pour une frange de plus en plus large de la population qui vit l’angoisse de ne plus trouver de médecins ; la situation financière des établissements hospitaliers publics et privés est tendue et les médecins sont sous une pression qui les détourne de leur métier. Nous ne pouvons faire l’impasse sur des questions aussi cruciales que les sources de financement, la part entre assurance obligatoire et complémentaire, l’équilibre entre système public et libéral, l’organisation des soins avec une réponse graduée sur les territoires entre médecine générale et de spécialité et le maintien d’une offre hospitalière structurée et équilibrée entre ses différentes composantes. Il faudra bien trancher entre deux approches opposées, celle, qui progresse actuellement, d’un système entièrement sous la coupe de l’Etat et celle qui laisse la part à l’initiative individuelle, la liberté d’entreprendre, dans un cadre négocié.

Ce débat, nous sommes prêts à le porter, ce serait une grave erreur de l’enterrer au risque de lendemains douloureux.

Jean-Pierre Binon

Président du SNSMCV




Fin de partie

« Le changement est dans l’ADN de l’Amérique » a proclamé Barak Obama dans son discours d’adieu à Chicago, discours où il affirme son optimisme pour l’avenir du pays qu’il estime avoir transformé positivement.

En France le quinquennat s’achève. François Hollande en annonçant qu’il ne briguerait pas un second mandat a fait, lui aussi, le panégyrique de son action, bilan qu’aucun des prétendants socialistes à l’investiture, pourtant pour la plupart anciens ministres, ne semble souhaiter défendre.

Fin de partie probable pour Marisol Touraine, fidèle parmi les fidèles, qui aura réussi le tour de force d’être ministre des affaires sociales de la santé et du droit des femmes pendant tout le quinquennat, fait unique sous la Ve République. Que l’on apprécie ou pas ses convictions et ses méthodes, ses décisions auront dans les années qui viennent un impact profond sur le paysage de la santé. Elle aura réussi par la création des groupements hospitaliers de territoires (GHT) à faire fondre le nombre d’hôpitaux du pays, les plus petites structures étant amenées, de fait, progressivement à disparaître sans qu’elle ait eu à affronter la fronde des élus locaux. Les GHT ont l’ambition, clairement affichée dans la loi de modernisation du système de santé publié en janvier 2016, de structurer l’offre de soins dans les territoires et pas seulement en ce qui concerne l’hospitalisation.

La même loi s’est attaquée au chantier de l’organisation des pratiques ambulatoires avec la création des équipes de soins primaires (ESP), des communautés territoriales de professionnels de santé (CPTS) et des plates-formes d’appui (PTA).

Les textes règlementaires sur ces modèles d’organisation ont été publiés au Journal Officiel ces dernières semaines. Ils sont suffisamment vagues pour laisser aux Professionnels de Santé dans les territoires, quelle que soit leur forme d’organisation actuelle, la liberté de leur mise en œuvre. Ce sont toujours les individus qui font la réussite d’un projet quelle que soit la qualité de la structure imaginée sur le papier.

Madame Touraine restera l’égerie du tiers-payant obligatoire, envers et contre tout, stigmate d’un dogmatisme quasi mystique. La raison ne peut que se briser sur le mur de l’idéologie qui peut se révéler une infirmité dans les relation sociales.

Dans Fin de Partie, la pièce de Samuel Beckett, les différents protagonistes, dans une atmosphère apocalyptique de fin du monde, sont des handicapés de la vie. Nous ne sommes bien sûrs pas dans les extrémités décrites par Beckett quoique… De notre ADN semblent avoir disparu les gènes du changement chers au Président des Etats-Unis. Conservatisme et individualisme sont deux infirmités, à chacun les siennes me direz-vous, qui peuvent participer à la disparition de la pratique libérale des métiers de la santé. Fin de partie ? 2017 nous le révèlera peut-être.

Fin de partie en tout cas pour votre serviteur, qui, lui aussi en fin de mandat, transmettra le relais à son successeur à la fin de ce mois avec l’intime conviction que le pire n’est jamais sûr et que la fatalité n’existe pas.

Eric Perchicot

Président du SNSMCV




Vœux pieux ?

François Fillon aura eu le mérite de mettre en pleine lumière le débat sur l’avenir de notre système de santé. Les réactions, tant de gauche que de droite d’ailleurs, et la réprobation clairement manifestée par l’opinion publique sur ses propositions libérales l’on promptement incité à faire machine arrière. Cela laisse mal augurer de l’avenir, car cette reculade peut donner à croire que, soit ses positions étaient peu réfléchies, soit son courage politique est à l’aulne de la moyenne du personnel politique.

Malheureusement, la controverse n’a porté que sur le volet financement et équilibre du système de protection sociale. On a évoqué : rétablissement des comptes, panier de soins, périmètre de celui-ci (petit risque ? gros risque ?). On nous a ressorti le Conseil National de la Résistance, Pierre Laroque… bref, la politique politicienne a vite repris son cours. En revanche, personne ne s’est penché sur le problème de fond, celui qui devrait être traité en priorité : l’architecture et l’organisation du système de soins dans un monde qui a radicalement changé depuis 1945 date de la création de la Sécurité Sociale et fin des années cinquante, époque à laquelle a été mis en place notre système hospitalo-universitaire.

Le vieillissement spectaculaire de la population, l’amélioration remarquable des thérapeutiques ont totalement transformé la nature des pathologies que nous prenons en charge. Nos schémas organisationnels sont progressivement devenus obsolètes ce qui a généré des pratiques inadéquates, coûteuses et peu efficientes.

Sans ordre préférentiel chacun peut constater chiffres à l’appui :

  • un surdimensionnement de l’hôpital public formaté pour la prise en charge des pathologies aiguës et non pour l’accompagnement des maladies chroniques ;
  • un mode de rémunération, le paiement à l’acte qui, seul, n’est plus pertinent pour rémunérer l’ensemble des missions du corps médical, même s’il reste incontournable dans certaines situations cliniques ;
  • un fonctionnement « en silo » des différents professionnels, peu à même de créer les conditions de prise en charge efficace des maladies chroniques qui nécessitent un parcours de soins coordonné et cohérent ;
  • l’absence de réflexion, et une défiance évidente de chaque acteur, sur la délégation de tâches qui doit libérer le médecin de tout ce qui ne justifie pas sa haute valeur ajoutée et autoriser chaque intervenant à valoriser son métier ;
  • la non-prise en compte de tous les outils regroupés sous le vocable de e-santé dont on ne mesure pas aujourd’hui ce que l’irruption dans le champ de la santé va chambouler de nos pratiques ;
  • le retard à l’adaptation du mode d’exercice libéral, qui du cabinet isolé doit évoluer vers l’entreprise médicale de proximité, regroupant l’ensemble des professionnels de santé participant aux missions de soins, de prévention et de santé publique dans les territoires. Ces structures associant les équipes de premiers recours et d’expertise ambulatoire doivent devenir la pierre angulaire de la prise en charge des maladies chroniques pour toute personne ne justifiant pas d’une hospitalisation complète :
  • enfin les pouvoirs publics et les représentants de toutes les professions de santé doivent s’entendre pour stopper la déferlante de nouveaux professionnels et stabiliser la densité des intervenants, indispensable pour rationaliser l’offre de soins, mettre en place une coordination efficace et contrôler les coûts.

Voilà ce qui devrait être débattu aujourd’hui, car sujet de société concernant tous les Français qui gagnerait à être exposé sans tabou et en complète transparence.

Tout cela, vœux pieux à l’approche de Noël ?

Il n’est pas indispensable d’être croyant pour avoir foi dans les facultés d’adaptation de la société, même si dans notre beau pays il faut le plus souvent attendre d’être dos au mur pour réagir. Nous y serons bientôt.




« La démocratie est le pire des systèmes…

à l’exclusion de tous les autres », aphorisme célèbre attribué à Winston Churchill. Certes, cette prévention envers le suffrage universel n’est pas nouvelle puisque, déjà, les philosophes des lumières le regardaient avec circonspection arguant du fait qu’un tribun brillant pouvait facilement manipuler les masses. Il est probable que Winston Churchill partageait la même vision.

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Le mari de Madame Bovary : le retour ?

Charles Bovary, époux d’Emma Bovary, exerçait le métier d’officier de santé. Le corps des officiers de santé avait été créé en 1793 par les révolutionnaires. Dans un souci louable d’égalité entre les citoyens, l’objectif était de permettre à chacun d’être soigné quelle que soit sa condition, ce qui était loin d’être le cas sous l’ancien régime. Tout le XIXe siècle a été marqué par les conflits entre ces soignants non-médecins, aux compétences limitées, et les docteurs en médecine. La médecine académique a obtenu la fin des officiers de santé en 1892, les derniers d’entre eux cessant leur activité au début du vingtième siècle.

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Été meurtrier ?

Une nouvelle convention médicale a été signée par  MG-France, la FMF et Le BLOC le 25 août dernier. À écouter la FMF c’est une « signature de combat », la signature de combat étant au combat ce que le play-back est à la chanson : une duperie qui ne trompe que les naïfs. Pour ancrer un peu plus son comportement dans l’ubuesque,  cette centrale vient d’annoncer qu’elle allait attaquer en Conseil d’État certaines parties du texte.
Quant à MG-France, grand artisan du texte conventionnel, elle  vient de demander aux spécialistes en médecine générale de poursuivre la désobéissance tarifaire… Ces postures paradoxales ne sont motivées que par la prise de conscience que, sur le terrain, une immense majorité des médecins libéraux, quelle que soit leur spécialité, ne se reconnaît pas dans un texte de peu d’ambition qui n’offre à personne, quelle que soit sa génération, un cadre professionnel rénové.

Nous n’avons que trop tardé, financeurs et acteurs, à faire publiquement le constat que nous connaissons tous : le système actuel est obsolète et n’est plus à même de satisfaire la population et les professionnels. Je ne reviendrai pas sur la longue dérive conventionnelle qui a conduit à des tarifs de consultation indignes, cause première du marasme actuel. L’effet volume, que plus personne ne nie, en est la conséquence et le facteur qui aujourd’hui gèle toute prospective. La fluidité de la prise en charge du patient dans un système de santé rénové passera par une refondation complète des types de rémunérations. Cette révolution ne sera réussie que si nous acceptons de réfléchir à une valorisation des pratiques médicales qui ne reposerait plus que sur le tarif des actes, le paiement à la pathologie apparaissant plus adapté à la prise en charge des maladies chroniques.

Le chantier est immense et demandera des années avant d’être achevé, raison suffisante pour ne plus reculer et surtout ne pas attendre la nouvelle convention pour en poser la première pierre.

Un dirigeant de la Fédération Hospitalière de France a récemment déclaré que les Groupements Hospitaliers de Territoires seront « très ouverts sur la médecine de ville », espérons que cette ouverture ne soit pas celle des abattoirs sur les animaux d’élevage. Il n’y a qu’à voir en quelle estime sont tenus les praticiens temps partiels dans les hôpitaux depuis des décennies pour constater qu’un partenariat équilibré, pourtant indispensable, va nécessiter beaucoup de bonne volonté. Déclinant sur le terrain les articles de la loi de santé, l’hôpital public, à marche forcée, se met un ordre de bataille pour prendre une part importante dans l’ambulatoire. Ne regardons pas le train passer, les médecins libéraux doivent, dans la même logique, sacrifier l’exercice individuel et s’organiser  pour faire des propositions de services, coordonnées et alternatives à l’offre publique.

Un arrêté est paru il y a quelques semaines élargissant encore un peu le numerus clausus. Ces futurs médecins et maïeuticiens n’arriveront sur le terrain que dans une dizaine d’années. Ils aggraveront la pléthore des professionnels de santé que l’on voit poindre à l’horizon des années 2020. Je le répète : il y a suffisamment d’acteurs sur la scène nationale pour prendre en charge l’ensemble de la population sous réserve d’une coordination territoriale efficace, d’une délégation des tâches efficiente et d’une relation ville-hôpital opérationnelle.

Été meurtrier pour la médecine libérale ? Ce n’est pas encore inéluctable.

Eric Perchicot




Bonnes vacances

Chères Consœurs,

Chers Confrères,

Chers amis,

 

J’ai le plaisir de vous confirmer ce que je vous annonçais dans ma circulaire précédente : vous pouvez dès aujourd’hui, vous acquitter de votre cotisation syndicale en ligne. Il vous suffit de cliquer ici pour vous connecter.

Ce n’est qu’une possibilité supplémentaire qui vous est offerte ; vous avez bien sûr la possibilité comme habituellement d’adresser directement un chèque à votre trésorier régional ou départemental.

Dernière circulaire avant quelques semaines de repos.

Hier soir (jeudi 27 juillet) vers 23 heures s’est achevée la dernière réunion de la négociation conventionnelle. Deux syndicats, MG France et Le Bloc, ont déjà paraphé le protocole d’accord. Les 3 autres structures polycatégorielles réservent leur réponse après consultation de leurs instances.

Comme je l’anticipais dès le début du rendu conventionnel, cette convention n’est malheureusement qu’un rafistolage d’un système en bout de course. Considérer comme un  « triomphe » le passage de la consultation du médecin généraliste de 23 à 25 € (par le biais d’une majoration de 2 € adossé au C maintenu à 23 €) au 1er mai 2017 montre quelle était l’ambition des partenaires. Je suis un peu plus convaincu aujourd’hui encore de la nécessité d’une remise à plat complète de l’organisation de la médecine libérale. Espérons qu’il ne faudra pas attendre 5 ans pour s’atteler à cette tâche très ardue, mais qui conditionne l’avenir de notre mode d’exercice.

Nous aurons l’occasion d’en parler plus précisément mais sachez que les quelques revalorisations obtenues par les signataires ont un calendrier de mise en œuvre qui court jusqu’au 2e semestre 2018, bien au-delà d’une échéance électorale qui risque rebattre totalement les cartes.

Bonnes vacances à chacun d’entre vous.

Amicalement.

 

Docteur Eric PERCHICOT,

Président.

 

URGENT : Merci de nous faire parvenir votre adresse mail afin de recevoir les versions uniquement ONLINE de la revue Le Cardiologue d’une part et les informations syndicales plus rapidement d’autre part.

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L’esprit des lois

La caractéristique constitutive du bouc émissaire, voué à la vindicte populaire, est qu’il doit être innocent de ce dont on l’accable. La façon dont les médecins exerçant en secteur « à honoraires libres » sont traités aujourd’hui en est un exemple caricatural. Par l’augmentation du prix du tabac, les Pouvoirs Publics espèrent décourager les fumeurs de poursuivre cette addiction dangereuse pour la santé et coûteuse pour l’Assurance Maladie. Dans la même logique, en augmentant le reste à charge des patients faisant confiance à leurs médecins secteur 2, la puissance publique a l’objectif de faire disparaître ce mode d’exercice. Grande différence cependant : la nocivité du tabac pour la santé est démontrée, alors que l’exercice de la médecine en secteur 2 n’entraîne aucun préjudice pour la santé et n’enfreint aucune réglementation.

En 1980, c’est l’Assurance Maladie qui a inventé le secteur à honoraires libres. Le contrat conventionnel était le suivant : libre fixation des honoraires, en respectant bien sûr tact et mesure, et cessation de  la participation de l’Assurance Maladie aux cotisations sociales  des médecins qui optaient pour ce nouveau secteur d’exercice.

Une diminution du niveau de remboursement des patients ne faisait pas partie du contrat. Ce n’est que progressivement à partir de la convention de 2005, aggravé par l’avenant numéro 8 de la convention 2011, que l’on a assisté à un découplage entre le tarif des actes conventionnels et le niveau de remboursement de ces mêmes actes quand le médecin les pratiquant exerçait en secteur 2.

Rendre responsable ces médecins de l’augmentation des dépassements est une insulte au bon sens. Cet accroissement est en lien direct avec la stagnation du tarif des actes. Nous y voilà : le praticien/bouc émissaire est là pour détourner la population de la responsabilité des Pouvoirs Publics.

On ne se grandit jamais à abaisser autrui. La stigmatisation des médecins exerçant en secteur 2 est insupportable. Il est inacceptable que les patients qui leur font confiance soient sanctionnés. L’ensemble des syndicats de médecins, quelles que soient leurs convictions, doit s’élever contre cette manipulation. Le niveau de remboursement des patients ne doit pas dépendre du secteur d’exercice du médecin, pas plus que la qualité des prestations sociales auxquelles a droit ce dernier.

Cette façon de faire est un dévoiement complet de l’esprit de la création du secteur à honoraires libres et de la lettre du texte conventionnel.

« Il serait contraire à la raison que la loi flétrit dans les enfants ce qu’elle a approuvé dans le père » Montesquieu, L’esprit des lois, 1748.

Eric Perchicot




Marché de dupes ?

Au début du mois de mai s’est achevé le 1er round des discussions conventionnelles. Il a permis à l’Assurance Maladie de faire son état des lieux de la convention précédente et mettre en avant les éléments positifs de celle-ci. Les diverses mesures d’amélioration des revenus des médecins libéraux ont été actées, en laissant soigneusement de côté les plans d’économie imposés dans le même temps à certaines spécialités ou certaines activités, d’imagerie en particulier.

Le discours, à usage de la population, est simple : les médecins libéraux ont augmenté leurs revenus sur les cinq dernières années, revenus, bien sûr largement étalés dans la presse. Le message est clair : ils ont des revenus élevés et ceux-ci s’accroissent régulièrement.

Quels sont les atouts des protagonistes de cette négociation ?

Pour ce qui est du couple ministère/Assurance Maladie, ils sont nombreux : il gère le rythme et le contenu des réunions, il a accès aux médias sans limite, il tient les cordons de la bourse et seul connaît le montant de l’enveloppe qu’il est disposé à accorder pour la signature d’un accord. Les duétistes ont de plus un bâton sous la forme d’un règlement arbitral, si une signature n’a pas été apposée par les syndicats représentatifs au texte conventionnel avant la fin juillet.

Pour ce qui est des syndicats représentatifs, le décompte des atouts est simple, il n’y a n’a qu’un : le calendrier des discussions, à moins d’un an de l’élection présidentielle et donc le caractère délétère pour le Pouvoir en place d’un échec des négociations. Ne pas se mettre à dos un nouveau corps social, dans le contexte que nous connaissons, est certainement l’élément qui peut jouer en faveur d’un accord raisonnable.

Les deux parties peuvent-elles arriver à un compromis gagnant-gagnant ? Encore faudrait-il définir ce que pourrait être ce compromis. Pour les pouvoirs publics, qui se sont engagés dans une politique des revenus, des revalorisations ciblées qui permettraient une diminution significative de l’écart de bénéfices entre les spécialités au bas de l’échelle et les mieux lotis seraient satisfaisantes.

Pour les médecins libéraux, que les spécialités ayant actuellement des revenus annuels en dessous de 60 000 € puissent les augmenter significativement est un objectif prioritaire, sous réserve que ce ne soit pas au détriment des spécialités les mieux loties.

Or, il apparaît que, en parallèle aux réunions conventionnelles, l’Assurance Maladie travaille à un plan d’économies sur « l’imagerie médicale » qui permettrait, au moins en partie, d’abonder l’enveloppe de la revalorisation des spécialités sinistrées.

Ce système de vases communicants est inacceptable. Déshabiller Pierre pour habiller Paul n’est pas une bonne politique. Espérons que les syndicats polycatégoriels refuseront ce marché de dupes d’autant que les mêmes pouvoirs publics, quand ils sont employeurs se pliant alors à la loi du marché, font des ponts d’or aux médecins de ces spécialitées « nanties », praticiens dont ils ont besoin dans les hôpitaux publics.

La négociation conventionnelle permettra de répondre à deux questions simples : les syndicats représentatifs auront-ils assez de lucidité et de courage pour refuser un accord qui stigmatiserait certaines spécialités ? L’organisation syndicale telle qu’elle est aujourd’hui représente-t-elle équitablement l’ensemble des spécialités médicales ?

Ainsi, Les semaines qui viennent nous aideront à apprécier si une refondation du paysage syndical va s’avérer indispensable dans l’avenir. A suivre…

Eric Perchicot

 




Etat de déliquescence

Les révélations du dossier Panama Papers ne sont que le dernier avatar révélé du travail d’érosion de la base fiscale des Etats au détriment de la budgétisation des Nations mêmes les plus avancées. Ces mécanismes d’évitement de l’impôt à l’échelle mondiale n’ont pu se mettre en place sans la complicité, ou du moins la complaisance, des politiques au pouvoir. Il serait facile de jeter l’opprobre sur des paradis fiscaux exotiques si n’existaient leurs pendants dans l’Union Européenne : îles anglo-normandes, île de Man… ou aux États-Unis, l’État du Delaware par exemple.

Cette spoliation des Nations par leurs élites est la marque d’une disparition progressive des valeurs qui ont fondées nos démocraties. La République Française n’échappe pas à cette désagrégation, la politique se résumant de plus en plus à de la communication et de l’affichage. Pour vous en convaincre, je vous engage à lire le rapport à l’IGAS (*) de l’ancien Secrétaire Général de la Conférence Nationale de Santé avant sa démission. Vous apprécierez en quelle estime la ministre de la santé et son cabinet tiennent la démocratie sanitaire. Dans le même esprit, a été révélé, il y a quelques jours, comment n’a été pas été prise en compte une expertise du CNRS sur les méfaits du diesel dès 1997 et, dans le même registre, comment notre ministre de l’écologie, il y a quelques semaines, a crié au scandale contre une décision de l’Union Européenne assouplissant les normes de pollution des moteurs diesels, alors que la France, par son ministère, a voté pour cette décision…

Les discussions conventionnelles sont malheureusement conduites dans le même état d’esprit : ce n’est pour l’instant qu’une présentation de chiffres, souvent invérifiables, pour imposer deux idées : il n’y a pas assez d’argent pour satisfaire les médecins et la pénurie médicale impose des mesures ciblées. Peu importe que chacun sache que le niveau du tarif des actes limite toute ambition d’amélioration des pratiques. Nous allons vers une convention qui ne sera qu’un rafistolage d’un système en bout de course. Il apparaît pourtant de plus en plus clairement que tout le système devrait être mis à plat à partir de constats simples : un modèle économique raisonnable pour la médecine libérale de demain ne passera que par une réflexion globale efficience/volumes/tarifs des actes. Cette réflexion ne pourra se mener qu’en parallèle à une régulation territoriale de l’offre de soins. Personne, et surtout pas les médecins libéraux, n’a intérêt à une pléthore de l’offre. Mieux vaut organiser cette offre, avec l’ensemble des professionnels, dans l’intérêt général.

Dans l’atmosphère crépusculaire actuelle, où le personnel politique manque à ce point de courage qu’il a peur de son ombre même la nuit, mettre en œuvre une vraie réforme peut paraître difficile. Sénèque au 1er siècle de notre ère écrivait déjà : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles », pas mieux…




L’avenir appartient…..

Le 15 mars, il y a eu un an que nous avons massivement manifesté à Paris contre la loi de santé en gestation…avec le succès que l’on sait. Quel contraste avec le résultat obtenu par « les jeunes » opposés à la modification du code du travail ! Ils ont imposé une réécriture du texte avant même que celui-ci ne passe en Conseil des ministres. Sur le fond, ils s’opposent à des mesures assouplissant les possibilités de licenciement, devant permettre aux entreprises d’embaucher plus facilement, en les libérant partiellement des textes en vigueur, qui font du licenciement un parcours du combattant décourageant. Bref, nous préférons sécuriser ceux qui ont un emploi plutôt que d’entrouvrir la porte aux millions de ceux qui en sont dépourvus… C’est la version moderne de Perrette et le pot au lait. C’est une marque de profonde défiance de l’entreprise, emblématique de l’état d’esprit de nos gouvernants, qui n’ont eu de cesse depuis plus de 40 ans que de mettre le secteur marchand sous tutelle administrative, avec les résultats que l’on connaît sur l’emploi, le pouvoir d’achat, la compétitivité, les déficits publics et la dette du pays.

Qu’attendre d’un personnel politique essentiellement issu des bancs de grandes écoles, puis de l’ENA ou de l’école de Rennes, qui après un parcours universitaire brillant, a intégré Cour des comptes, inspection des finances ou cabinets ministériels sans jamais avoir connu le monde de l’entreprise ? Comment donc le convaincre que la création de richesse est le préalable à toute redistribution équitable et que soutenir l’entreprise plutôt que de plomber son développement devrait être l’objectif prioritaire de l’Etat ?

Le secteur de la santé ne fait pas exception à la règle. Le modèle économique de l’entreprise médicale libérale où la valorisation de l’activité produite doit permettre de couvrir les charges d’investissement, de ressources humaines (par exemple affectées à la délégation de tâches), de logistiques et de fonctionnement, est en voie de destruction au profit d’aides diverses et variées forfaitaires, non pérennes et soumises à des contraintes bureaucratiques incompatibles avec la pratique libérale.

La Ministre de la Santé a imaginé un virage ambulatoire (les plus de 10 millions de citoyens atteints de pathologies chroniques en ALD passant, quand même, plus de temps dans l’année en dehors que dans les murs de l’hôpital), piloté par les ARS… autour de l’hôpital public, dans une organisation planifiée où les professionnels de santé libéraux ne seraient que des auxiliaires supplétifs taillables et corvéables à merci, n’est-ce pas Madame Dormont ?

Actuellement se déroulent les premières réunions de la négociation conventionnelle. Les syndicats représentatifs doivent refuser un nième marché de dupes et obtenir un espace de liberté tarifaire pour tous les médecins, unique moyen pour nos entreprises libérales, en dehors d’une remise à niveau du tarif des actes à laquelle personne ne croit, de conserver un modèle économique viable.

La voie est étroite. Cependant, la proposition n’est ni provocatrice ni folle. L’existence d’une offre publique de plus en plus étoffée et la démographie médicale, qui va mener à l’abondance après 2020, réguleront mécaniquement les niveaux de reste à charge, par le jeu de l’offre et de la demande.

Il reste peu de temps aux plus jeunes d’entre nous pour imaginer et promouvoir l’entreprise médicale libérale comme offreur de soins en capacité de conventionner avec les financeurs de la santé et mailler l’ensemble du territoire.




On prend les mêmes…

Madame la ministre de la santé, accompagnée du directeur général de la santé, a détaillé le 4 février, elle-même, le rapport d’étape de l’enquête de l’IGAS entreprise après l’accident mortel survenu lors d’un essai clinique sur volontaires sains le 18 janvier dernier.

« Trois manquements majeurs » ont été retenus à ce stade de l’enquête par l’institution. Est reproché à la société Biotrial, entre autres décisions malencontreuses, d’avoir attendu le jeudi 14 janvier pour informer l’ANSM de l’accident soit quatre jours après l’hospitalisation du premier volontaire, celui qui décèdera, et trois jours après décision d’interruption de l’essai.

Il est bon de rappeler qu’il a fallu près de 10 ans aux mêmes autorités pour décider de l’arrêt de commercialisation du Médiator en 2009, après la première alerte lancée par un cardiologue libéral en 1999. 10 ans, alors que la molécule avait progressivement été interdite dans la plupart des pays voisins. Il est instructif de voir la différence de traitement dans les deux cas. Il se vérifie qu’il est toujours plus facile de voir la paille dans l’œil du voisin que la poutre dans le sien.

De toute évidence, ce qui est indispensable à Madame la  ministre de la Santé, c’est d’apparaître aux journaux télévisés comme le censeur intransigeant d’agissements inappropriés. Quel dommage que tout, depuis sa nomination en 2012, nous montre qu’elle est plus à son affaire  dans la communication que sur le chantier de modernisation de notre système de santé.

Nous sommes plus que jamais dans la société du spectacle. Quel crédit aurait eu la personnalité désignée au ministère de l’écologie, après le renoncement de Nicolas Hulot, annoncé pourtant urbi et orbi comme le « transfert du siècle » ? Madame Royal a dû rempiler… avec quelques prérogatives supplémentaires.

Le casting gouvernemental s’avère de plus en plus, à chaque remaniement, un exercice qui n’a rien à envier aux superproductions hollywoodiennes construites autour des acteurs et actrices les plus « bankables ». A l’exception du remplacement de Laurent Fabius parti au Conseil constitutionnel, aucun ministère important n’a changé de titulaire ; la montagne a accouché d’une souris…

Ce dévoiement de notre démocratie n’augure rien de bon pour l’avenir. Nous risquons de le vérifier prochainement dès l’ouverture  des négociations conventionnelles. En effet,  le jeu des chaises musicales, perturbé par le refus de Monsieur Hulot, n’ayant probablement pas  libéré de  fauteuil suffisamment large, Madame Touraine conserve son portefeuille et nous une interlocutrice peu à l’écoute des inquiétudes de la médecine libérale.

Le front uni affiché par les 5 syndicats représentatifs lors des assises de la médecine libérale le 11 février convaincra-t-il Madame Touraine qu’on a rarement raison seul contre tous ?

Rien n’est moins sûr,

Soyons prêts à tout… ou à n’importe quoi, quel gâchis !

Eric Perchicot




Pas de trêve des confiseurs

Dans la deuxième quinzaine de décembre est paru au Journal Officiel le décret augmentant de 135 postes, répartis dans des académies en « zones défavorisées », le numerus clausus de la première année des études médicales. Cette parution est le prolongement du pacte Territoire Santé 2 présenté par la Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes le 19 novembre dernier. Hors l’effet d’annonce, que peut amener cette mesure aujourd’hui, quand on sait que les futurs professionnels entrant dans le cursus en 2017 ne seront opérationnels sur le terrain au mieux qu’en 2027, époque où la pléthore médicale sera le gros problème que nous aurons tous à gérer, si nous ne sommes pas capables de nous opposer au discours ambiant ? Quel aveuglement, quelle méconnaissance de la réalité, quel manque de lucidité. On ne fait pas de bonne politique qu’avec de la communication.

Dès les fêtes passées nous avons eu droit à une enquête montrant que les médecins, contrevenant à la réglementation en vigueur depuis le 1er janvier 2015, ne prescrivaient pas leur ordonnance en Dénomination Commune internationale ! Avec l’argument péremptoire, mais certainement pas vérifié, que cette prescription améliorait l’observance. Il est regrettable que les prometteurs de cette analyse n’aient pas précisé qu’elle avait été effectuée au printemps 2015 quelques semaines seulement après l’introduction de l’obligation pour un corps médical à la moyenne d’âge respectable qui n’a jamais prescrit qu’en noms de spécialités. Que, après quelques semaines seulement, 25 % d’entre nous prescrivent en DCI me paraît plutôt encourageant. Combien a-t-il fallu de temps aux Français pour parler en nouveaux francs au début des années 60 ? Quel est l’objectif recherché par ce type de présentation ? Montrer du doigt le corps médical, dans quel but ?

Cette année encore la cotisation ordinale que doit obligatoirement acquitter tout médecin exerçant une activité de soins sur le territoire français va augmenter. Qu’importe à cette vénérable institution que les tarifs des actes médicaux soient figés depuis des lustres et que l’ensemble de la profession médicale soit en souffrance. Plus de 200 000 médecins devant s’acquitter de plus de 300 euros chacun (et je ne compte pas l’imposition des sociétés d’exercice) représentent pourtant un budget annuel considérable, qui ne semble pas suffire à l’Ordre National des Médecins pour faire face à de nouvelles missions, dit-il lui-même, dont, pour certaines, il s’est pourtant autosaisi. Encore une institution qui, malgré des efforts remarqués pour apparaître à l’écoute du terrain, oublie le quotidien de ses assujettis quand il s’agit de gros sous.

Nous commémorons ce mois-ci les 20 ans de la disparition d’un Président de la République dont nous pourrions regretter que la 85e proposition, en tant que candidat à l’élection présidentielle de 1981, n’ait jamais été appliquée.

Quel dommage que les promesses politiques ne se concrétisent que rarement…




Audi alteram partem*

 

Un mode de scrutin qui oscille entre majoritaire et proportionnel a accouché de résultats, qui dans certaines régions, ne laissent aucune place à la pluralité des convictions.

Dans la grande région Nord et en Provence toute sensibilité autre que de droite a disparu des assemblés nouvellement élues. Comment une société démocratique peut-elle en arriver à générer un mode de désignation aussi loin d’une représentation équilibrée de la population ? La volonté de stabilité institutionnelle, fondement de la Ve République, a engendré une organisation très peu propice à une réflexion plurielle dans l’intérêt général et un personnel politicien incapable d’entendre et d’écouter d’autre discours que le sien.

Les péripéties de la loi de modernisation du système de santé, qui ont rythmé toute l’année 2015, en sont un exemple caricatural. Au lieu d’une réflexion partagée, qui aurait dû permettre d’aboutir à un projet novateur de prise en compte du vieillissement dans l’organisation des soins, les représentants des professionnels de santé ont subi des simulacres de réunions de concertation, en réalité petites messes à objectif de communication, sans volonté d’aboutir à un projet équilibré. Tout était écrit, rien n’a été modifié.

2016 ne s’annonce pas sous des auspices plus propices. L’élan de la réunion unitaire du 4 novembre rassemblant l’ensemble des syndicats représentant la médecine libérale a bien du mal à se confirmer. Il a suffi à Madame la ministre de la santé de convoquer les présidents des syndicats représentatifs pour discuter de la future convention pour que chacun se précipite rue de Ségur avec sa liste de revendications… au Père Noël. N’aurait-il pas été plus cohérent de décliner poliment l’invitation, en arguant que la médecine libérale souhaitait d’abord, comme elle l’avait annoncé, élaborer une plate-forme commune d’organisation et de coordination des soins autour du patient en médecine de proximité, avant d’en discuter la faisabilité et les adaptations éventuelles avec les pouvoirs publics ?

Quand la société française arrivera-t-elle à sortir du : « je suis majoritaire, vous avez donc politiquement toujours tort » et accepter une cogestion des grands domaines d’intérêt général, où l’écoute de l’autre et l’élaboration d’un compromis sont les bases de la réussite politique ? C’est une culture, celle de l’écoute de l’autre, depuis longtemps acquise chez nos voisins germaniques et dans les démocraties scandinaves, où ses résultats ne sont plus à vanter.

Je suis convaincu que la médecine libérale peut donner l’exemple d’une concertation réelle entre l’ensemble des forces syndicales, malgré des diversités de positions qui ne sont pas à occulter, aboutissant à un projet commun qui aurait une force indéniable dans les négociations à venir.

La société civile peut montrer la voie à une classe politique qui doit s’interroger lucidement sur la déliquescence du dialogue démocratique et changer radicalement son comportement. Entendre l’autre partie, admettre des compromis dans l’intérêt général, voilà ce qui manque cruellement aujourd’hui à la communauté nationale.

 

*Audi alteram partem : « entends l’autre partie », vieil adage judiciaire sur l’importance d’écouter l’autre pour un jugement équitable.




Réflexions d’automne

La loi de Santé sera votée avant la fin de l’année. Il est curieux de constater que le tiers-payant généralisé, obligatoire à l’horizon 2017, a polarisé l’attention des médias qui ont largement abordé le sujet par le petit trou de la lorgnette. Qu’il ne change en rien la prise en charge de l’optique, de l’audioprothèse et des prothèses dentaires, ni n’améliore les délais de RDV, causes principales des renoncements aux soins de la population, est passé sous silence. Que la gestion de ce TPG soit un casse-tête tel, que le rapport demandé par le Gouvernement sur sa faisabilité soit reporté à plus tard, pas un mot. Enfin, qu’il mette le médecin libéral dans les mains du payeur et dénature la relation patient-médecin, que nenni !

Le 4 novembre dernier, tous les syndicats représentatifs des médecins libéraux se sont retrouvés pour dénoncer, d’une même voix, les dangers de la loi de santé et ont annoncé leur volonté de dégager ensemble de grands axes communs et partagés en vue de la négociation conventionnelle du printemps prochain. Même, s’il y a loin de la coupe aux lèvres et si le chemin est étroit et difficile, c’est une bonne nouvelle pour l’ensemble de la communauté médicale libérale. Il est indispensable que nous arrivions à définir le canevas de la prise en charge ambulatoire libérale de la population, seule voie raisonnable si l’objectif est de soigner au mieux et à moindre coût. Espérons que l’appétence pour les présidences des Unions Régionales des Médecins libéraux ne fragilise pas cette belle unanimité.

L’abstention a été la grande gagnante de ces élections. C’est malheureusement l’indicateur d’une démotivation et d’un découragement dont personne ne doit se réjouir. L’analyse de  cette abstention montre qu’elle a été de 20 % plus forte dans le collège 3, celui des spécialistes autres que ceux du bloc opératoire. On peut penser que les généralistes se reconnaissent peu ou prou dans MG France et que Le Bloc fédère chirurgiens et anesthésistes. A contrario, cette abstention record chez les spécialistes médicaux peut s’expliquer par la difficulté qu’ils ont à s’identifier à quelque syndicat que ce soit. Y a-t-il une plus-value pour les médecins spécialistes libéraux à faire confiance à un syndicat polycatégoriel ? L’avenir nous le dira.

8 357 étudiants se sont présentés aux Epreuves Classantes Nationales en juin 2014. Le nombre de postulants titulaires d’un second cycle européen a augmenté de 26 % par rapport à l’année précédente. Ils représentent plus de 10 % des inscrits. Cette proportion va continuer à augmenter dans les années à venir. Quand on sait par ailleurs que 25 % des médecins qui s’inscrivent à l’Ordre pour la première fois présentent un diplôme obtenu à l’extérieur de nos frontières, il est clair que le numerus clausus, outil de régulation, est non seulement inefficace mais de plus totalement inique, car empêchant nombre d’adolescents ayant la vocation médicale de l’assouvir dans nos facultés, sans aucun gain pour la collectivité. C’est un immense gâchis qu’il est urgent d’arrêter. Jusqu’à quand faudra-t-il encore supporter cette réalité inacceptable ?




Et maintenant ?

Deux enseignements émergent clairement des élections du 12 octobre pour le renouvellement des unions régionales des médecins libéraux.

L’abstention, de près de 60 %, progresse élections professionnelles après élections professionnelles. Elle s’explique par l’indifférence des plus jeunes, qui ne se reconnaissent pas dans le mode d’exercice libéral pour beaucoup d’entre eux, et des plus de 57 ans, qui représentent une part significative d’entre nous, qui se disent que l’avenir ne les concerne pas. Elle s’explique également par un sentiment de résignation générale en raison du contexte économique et de la conviction que la pratique libérale de la médecine n’a plus d’avenir.

L’autre enseignement est la très nette perte d’audience de la CSMF au profit de syndicats à l’image « plus contestataire » comme le proclame l’ensemble des médias.

Il est certain qu’aujourd’hui, aucune structure syndicale ne peut revendiquer un leadership incontestable, pour conduire les négociations qui vont prochainement s’ouvrir sur la future convention. Ce peut être un atout, car cela nous condamne à réfléchir ensemble aux propositions que nous pourrions faire pour améliorer les conditions d’exercice de la médecine libérale ; mais cela risque être un handicap rédhibitoire si CSMF, FMF, SML, Le BLOC et MG-France sont incapables de trouver une plate-forme commune comme base à la négociation.

Il va falloir beaucoup de courage aux responsables nationaux pour intégrer les réalités économiques dans cette réflexion pour l’avenir. Le tarif des actes est devenu totalement indigent et déconnecté des réalités ; tout le monde est d’accord sur ce fait.

Pour sortir de ce cul-de-sac, il va falloir courageusement se positionner sur : la démographie médicale, la régulation et l’organisation territoriale, la pertinence des actes qui doit déboucher sur un mécanisme augmentation de tarif-diminution des volumes, un espace de liberté tarifaire pour tous les praticiens, la délégation de tâches et les relations avec les autres professionnels de santé sans dépeçage de la pratique médicale, la place de la médecine libérale dans la permanence et la continuité des soins, la coordination avec la médecine hospitalière…

Le chantier est immense, mais nous devons le prendre à bras-le-corps sans a priori et en oubliant les dogmes d’un passé révolu.

J’appelle donc solennellement l’ensemble des syndicats représentatifs à se retrouver rapidement pour réfléchir à un front intersyndical libéral et travailler à imaginer l’architecture de la médecine libérale de demain. Il est urgent de sortir de postures électoralistes et d’agir pour le bien commun.

Eric Perchicot
Président du SNSMCV




Aux urnes, citoyens!

La croissance du PIB de notre pays a été nulle au deuxième trimestre 2015. Au mois de mai juin dernier l’inflation a été… négative, phénomène qui peut réjouir les consommateurs, moins les pouvoirs publics car, qui dit diminution des prix    sait que les recettes fiscales par la TVA sont moindres, ce qui va rendre très difficile l’exécution du budget de la Nation, toujours basé sur des hypothèses de croissance du PIB et de rentrées fiscales optimistes. Et pourtant, le Président de la République annonce urbi et orbi une baisse des impôts des ménages pour les années à venir. Personne de sensé ne peut y croire. Ce qui nous attend est une diminution des marges de manœuvre dans tous les domaines et, bien sûr, la Sécurité Sociale va, à nouveau, être mise à contribution.

C’est dans cette atmosphère très morose que s’approche le renouvellement des Unions Régionales des Professionnels de Santé. Ce scrutin aura une grande importance pour notre avenir. En effet, le résultat de cette élection servira de base à l’enquête de représentativité et assoira le poids de chaque syndicat pour le long round de négociations conventionnelles qui va s’ouvrir en 2016. Cette convention sera de tous les dangers pour la médecine ambulatoire, d’une part en raison des contraintes budgétaires que je viens d’évoquer et, d’autre part, à cause de la volonté affichée des politiques de diluer la pratique médicale dans l’ensemble des professions de santé. Il y a aujourd’hui, une volonté clairement affichée de modifier profondément les périmètres de l’ensemble des professionnels exerçant dans le monde du soin. Il va falloir y opposer une position claire de l’ensemble des syndicats médicaux sur le thème : les médecins ne sont pas des professionnels de santé comme les autres. Soyons fiers de notre différence.

Cette élection aura, dans le même esprit, une importance capitale en dessinant les nouvelles Unions Régionales qui seront les interlocuteurs privilégiés des Agences Régionales de Santé. Or, la loi de santé ambitionne de régionaliser la prise en charge médicale et la mise en place de la médecine coordonnée, qui se fera soit autour du médecin libéral soit autour de l’hôpital public. Il faut professionnaliser les Unions. L’objectif du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux est que, dans chaque région, soient élus des cardiologues issus de ses rangs. En effet, une réflexion nationale est souvent indispensable même dans le cas de problèmes locaux. La relation entre les unions régionales et l’échelon national devra être forte.

Cet éditorial est un appel à voter. Faites le dès que vous recevrez le matériel électoral début octobre, et choisissez les listes où figurent en position éligible les responsables régionaux et nationaux du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux. Nous allons être, cardiologues, en première ligne dans l’organisation des soins pour les maladies chroniques les plus fréquentes. Nous sommes les mieux à même de défendre notre place dans le système de santé.

Essayons de ne pas laisser à d’autres le soin de définir notre avenir.

Aux Urnes !

Eric Perchicot

Président du SNSMCV




Paroles, paroles, paroles…

Chères Consœurs,
Chers Confrères,
Chers amis,

À l’approche des élections, il apparaît que les syndicats de médecins libéraux ne font pas mieux que les partis politiques. La campagne est faite essentiellement de promesses improbables et d’invectives envers les structures concurrentes. Nous sommes bien loin d’un débat d’idées ou chacun exposerait sa vision de la médecine libérale dans le contexte politique, sociologique et économique de 2015.

Le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux va se garder participer à ce spectacle désolant. Je me contenterai de rappeler quelques idées, qui devront, de façon incontournable, structurer la réflexion sur l’avenir, car je crois à l’avenir, de la cardiologie libérale.

Nous allons devoir prendre en compte, pêle-mêle :

– le changement sociologique du corps médical et l’évolution de sa démographie,

– la part croissante dans les dépenses de santé des maladies chroniques et du vieillissement dont la prise en charge est malheureusement mal adaptée au paiement à l’acte,

– la nécessaire évolution des modes de rémunération du médecin libéral,

– la nécessité d’un travail collaboratif avec les autres professionnels de santé libéraux pour limiter le recours à l’hospitalisation et imaginer l’entreprise médicale libérale,

– la réingénierie des métiers et des compétences, enjeu majeur que le corps médical doit prendre à bras-le-corps pour éviter le dépeçage du métier de médecin…

Voyez que les idées ne manqueraient pas à un vrai débat démocratique et transparent.

Un élément positif : dans les pays que le personnel politique, de droite comme de gauche, nous donne en exemples : la Grande-Bretagne et l’Allemagne, les revenus des médecins sont très significativement plus élevés que chez nous, aussi réfléchir à une politique des revenus ne doit pas être un tabou.

Dans l’immédiat, les cardiologues libéraux doivent suivre une consigne simple : voter pour les listes où sont, en position éligible, vos responsables régionaux et nationaux, partant du principe simple que personne mieux que les cardiologues ne pourra défendre la place de la cardiologie libérale.

N’hésitez pas à vous rapprocher du Syndicat, au niveau régional ou national, pour prendre les renseignements nécessaires car il est fort probable que sur les listes que vous recevrez, dans la majorité des régions, la spécialité des candidats ne sera pas précisée.

Faire élire des cardiologues est indispensable, dans un premier temps pour professionnaliser les futures unions régionales et, dans un second temps, pour peser sur les négociations conventionnelles de 2016, qui vont dessiner le futur paysage de la médecine libérale.

Soyez vigilants et, début octobre, dès que vous recevrez le matériel électoral faite le nécessaire et idéalement renvoyer votre vote par retour de courrier.

Grâce à nous tous, la cardiologie doit participer à l’émergence d’une pratique médicale adaptée à ce siècle tout en gardant des caractéristiques d’entreprise libérale.

Très amicalement.

Docteur Eric Perchicot,
Président.




Finies les vacances…

Chères Consœurs,
Chers Confrères,
Chers amis,

C’est la rentrée ! Comme tous les ans, la remise en route est plus ou moins facile, d’autant que les échéances qui nous attendent sont importantes et ne doivent pas être négligées.

La première échéance, chronologiquement, est liée à la loi sur l’accessibilité des locaux recevant du public qui nous impose, je vous le rappelle à nouveau, de déposer avant le 27 septembre prochain un Agenda D’Adaptation Programmée (AdAp) qui décrit les travaux à effectuer pour être en conformité avec la loi, et vous octroie trois ans au plus pour les effectuer. L’ensemble des syndicats médicaux a demandé un moratoire aux pouvoirs publics, légitime car beaucoup d’institutions publiques ont jusqu’à 2020 pour respecter la loi, mais pour l’instant la date du 27 septembre reste valide et, théoriquement, dès le lendemain des pénalités peuvent s’appliquer aux établissements n’ayant pas respecté la réglementation. En pratique, remplissez le formulaire ((http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Guide_Reussir_accessibilite.pdf ou http://www.e-lettre.developpement-durable.gouv.fr/dma–la-lettre-de-la-dma-/annee-2015/lettre-de-l-ad-ap-n–5—16-juin-2015/rubrique26735.html et www.lecardiologue.org) et déposez-le en mairie ou en préfecture avant le 27 de ce mois.

La deuxième échéance, c’est le 12 octobre, date des élections pour le renouvellement des Unions Régionales des médecins, étape qui ne doit pas être négligée car, la loi de santé, qui va être votée, donne des prérogatives et des pouvoirs très importants aux Agences Régionales de Santé pour organiser la prise en charge médicale dans les territoires. Les URPS seront donc en première ligne pour défendre les intérêts de la médecine libérale ambulatoire. Il faut voter, le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux a obtenu que nombre de nos responsables régionaux soient en bonne position sur les listes. En effet, il faut impérativement professionnaliser les URPS pour qu’elles puissent faire face efficacement aux fonctionnaires des ARS. Or, je ne le répéterai jamais assez : seuls les cardiologues libéraux sont à même de défendre notre pratique et nos intérêts. L’objectif est simple et clair : il faut que dans chaque région, au moins un cardiologue ayant une sensibilité syndicale soit élu. Quand début octobre vous recevrez le matériel électoral, comme moi, vous scruterez les listes pour trouver des noms connus. N’en restez pas là, votez pour la liste où vous verrez un cardiologue issu du SNSMCV en bonne position. C’est ainsi que le Syndicat national, informé dans chaque région, pourra au mieux défendre l’intérêt de tous. En pratique, dès que vous recevrez le courrier (a priori, la première semaine d’octobre), ne le mettez pas de côté, votez par retour de courrier.

Enfin, troisième échéance : l’obligation au 1er janvier 2016, d’avoir proposé à vos salariés (à temps plein comme à temps partiel) une complémentaire santé. Une fois encore, n’attendez pas le dernier moment car, pour chaque salarié déjà en place, liberté est laissée d’accepter ou pas. Il vous faut donc, en tant qu’employeur, bien éclairer ce choix et il n’est pas certain que tous vos salariés souhaitent adhérer à ces contrats groupe.

N’hésitez pas à contacter vos responsables régionaux ou le Syndicat national en cas de difficultés ; nous ferons tout notre possible pour vous aider.

Il est loin le temps où nous occupions la quasi intégralité de notre temps, à soigner nos patients…

Bonne rentrée à toutes et tous,
Très amicalement.

Docteur Eric Perchicot,

Président.




La médecine libérale survivra-t-elle à la loi de santé ?

383 – Répondre à cette interrogation nécessite que l’on s’entende sur le terme « médecine libérale ». Si c’est celle décrite par Jules Romains dans Docteur Knock en 1923 très certainement pas. Les jeunes générations de médecins ne se reconnaissent pas dans ce mode d’organisation et de fonctionnement. C’est un phénomène générationnel qui n’est pas simplement lié à la féminisation du métier. Le paiement à l’acte « avec tact et mesure » n’est pas pour les jeunes médecins un dogme tel qu’il l’était au premier quart du vingtième siècle et l’activité isolée les rebute.

Le vieillissement de la population et la part prépondérante des maladies chroniques dans l’activité médicale ont progressivement montré les limites du paiement à l’acte qui pâtit de la même faiblesse que son pendant hospitalier, la tarification à l’activité, il est inflationniste et peu efficient pour la prise en charge de la population.

Si on y réfléchit un tant soit peu lucidement, il y a incompatibilité entre le contrôle de la masse des honoraires médicaux et l’affirmation qu’il y a pénurie de médecins. Comment accroître la densité médicale sans augmentation des honoraires ? Nous devons choisir entre Charybde et Scylla : soit une lente paupérisation de la profession, soit une réflexion courageuse sur un mécanisme de régulation à l’installation, qui réglerait le problème, et d’un numerus clausus, devenu totalement obsolète, et des contraintes de la réglementation européenne. Comment justifier que la densité en cardiologues libéraux soit plus de 4 fois plus importante dans les Bouches-du-Rhône qu’en Mayenne ?

Plus de 180 milliards d’euros sont consacrés tous les ans à la santé, il est évident qu’une amélioration réelle de l’efficience permettrait que toute la population, quel que soit son lieu de résidence, ait accès à une offre médicale de qualité, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui.

Toutes ces données, non contestables, doivent nous aider à dessiner le futur paysage du monde de la santé où la coordination et la collaboration interprofessionnelles auront une place centrale.

« Il faut que tout change pour que rien ne change », déclare cyniquement Tancrède dans Le Guépard, le célèbre roman de Lampédusa. Pour le paraphraser je dirais : il va falloir que toute l’organisation médicale change pour que l’activité libérale perdure.

Eric Perchicot




Bonnes vacances

Chères Consœurs,
Chers Confrères,
Chers amis,

La trêve estivale est là. Rarement le terme de trêve n’aura été aussi juste que cette année. A la rentrée deux dossiers chauds attendent la médecine libérale :

la loi de santé qui après son passage au Sénat, très probablement en septembre sera votée avec tous ses aspects négatifs, n’en doutons pas, par l’Assemblée nationale. Madame Marisol Touraine a promis que les décrets d’application suivraient rapidement…

les élections pour renouveler les URPS des médecins qui vont se dérouler le 12 octobre. Ce scrutin ne doit pas être pris à la légère, car les nouvelles assemblées seront confrontées à la déclinaison régionale de certains articles de la loi de santé loin d’être anodins pour la pratique médicale libérale ambulatoire et en hospitalisation. L’objectif affiché des pouvoirs publics est de mettre en place une organisation territoriale coordonnée et (idéalement) graduée de la prise en charge des urgences, des pathologies chroniques et/ou complexes. La cardiologie libérale est grandement concernée par ces projets, parce que notre spécialité est au centre des pathologies aiguës et chroniques les plus fréquentes, et que la part de marché de l’hospitalisation privée, en cardiologie interventionnelle, est importante.

Sur ces deux dossiers la cardiologie libérale doit faire entendre sa voix pour imposer sa place dans le parcours de soins et exiger le principe de la subsidiarité pour l’intervention de l’hôpital public dans l’organisation future.

La médecine libérale doit être reconnue comme maître d’œuvre de l’organisation de la médecine de proximité et ses initiatives en ce sens confortées par les Agences Régionales de Santé. L’ensemble des sensibilités de la médecine libérale a légitimité à participer à ce travail de construction que personne ne doit faire à notre place : au boulot !

Le chantier est immense, la cardiologie y participera d’autant plus efficacement qu’elle sera bien représentée dans les futures unions qui seront en première ligne face aux ARS. Je vous appelle, dès maintenant, à voter le moment venu pour les listes où seront présents en bonne positions vos représentants régionaux.

C’est parce que le climat actuel n’est pas favorable à la pratique libérale de la médecine qu’il faut garder la tête haute, affirmer la qualité de notre pratique, traiter avec indifférence l’image caricaturale véhiculée régulièrement par les média, et poursuivre le combat.

Bonnes vacances.

Très amicalement.

Docteur Eric Perchicot,
Président.




Avant l’été

Chères Consœurs,

Chers Confrères,

Chers amis,

L’effervescence du printemps dissipée, juin nous amène vers la trêve estivale. Après les manifestations d’opposition à la loi de santé et le vote de celle-ci en première lecture à l’Assemblée nationale la fièvre est retombée. La mécanique parlementaire suit son cours, le projet de loi sera débattu au Sénat en septembre pour un vote probablement début octobre puis, en raison de la procédure accélérée, saisine de la commission mixte paritaire, enfin retour à l’Assemblée pour un vote définitif.

Personne ne se fait d’illusions : les grandes lignes de la loi de santé seront adoptées telles qu’elles et le vote sera un succès pour le Gouvernement.

Ceci dit, la mobilisation continue, nous aurons l’occasion de reparler en septembre.

Dans l’immédiat cette circulaire a pour but de vous rappeler deux dates à ne pas négliger :

• le 27 septembre au plus tard vous aurez à déposer en préfecture votre agenda programmé d’adaptation de vos locaux pour qu’ils soient accessibles aux handicapés de toutes sortes :

– Guide – Les locaux professionnels de santé : réussir l’accessibilité

– La lettre de la DMA

• Le 1er janvier 2016, vos salariés doivent bénéficier d’une complémentaire santé (le décret n°2014-1374 du 18 novembre 2014 précise les nouvelles règles des contrats de santé dits responsables)

– A lire

 

Ces deux dossiers nécessitent une réflexion qui mérite un peu de temps, je vous engage à ne pas les négliger.

Par ailleurs, nous sommes responsables de nos choix et parfois les faits laissent penser que certains confrères oublient cette notion de responsabilité.

Toute opinion est respectable, on peut se méfier des génériques et ne pas souhaiter les prescrire. Il faut alors être conscient que l’Assurance Maladie peut demander des justifications.

Dans le même esprit, la prescription d’un transport médicalisé est un acte médical qui engage votre responsabilité.

Dans les deux cas, votre signature n’est pas anodine et ne doit pas être apposée à la légère.

Important : s’il vous arrive d’être en butte à un contentieux la première des réactions que vous devriez avoir est d’en informer votre structure syndicale pour qu’elle puisse au mieux vous conseiller et vous accompagner.

Enfin, la défense de notre métier et de nos intérêts est de plus en plus exigeante, les réunions avec les multiples structures administrant la santé sont toujours en augmentation de fréquence. L’activité syndicale a besoin de moyens : aussi je vous rappelle que s’acquitter de sa cotisation syndicale, auprès de son syndicat régional, est un acte indispensable pour votre protection et celle de la cardiologie libérale. N’attendez pas, pour partir en vacances l’esprit un peu plus libéré…

Profitez tous de la période estivale pour retrouver de l’énergie. Nous en aurons bien besoin.

Bien amicalement.

Docteur Eric Perchicot,

Président




Pacte d’irresponsabilité

Le résultat des récentes élections législatives outre-Manche peut laisser songeur. Les Britanniques ont choisi le candidat qui prônait la poursuite d’une rigueur budgétaire que l’ensemble de la population, ou du moins la part la moins nantie, endurait pourtant durement depuis déjà quatre ans. Quelle leçon, pour nous, Français, qui sommes très régulièrement abusés par des promesses mirifiques qui permettent à de brillants tribuns de se succéder à la tête de l’Etat.

Qui pouvait sérieusement croire en 1983 que ramener l’âge de la retraite à 60 ans était une mesure, bien que séduisante, un tant soit peu raisonnable alors que les évolutions démographiques et de l’espérance de vie étaient parfaitement prévisibles ?

Qui pouvait imaginer au passage de l’an 2000 que ramener la durée légale du travail à 35 heures dans une économie mondialisée se ferait sans perte de compétitivité pour notre pays ?

Qui peut penser aujourd’hui, que le tiers-payant généralisé obligatoire va régler le problème du renoncement aux soins alors qu’il ne changera rien aux coûts des prothèses dentaires auditives et de la lunetterie ?

Qui peut croire que ce tiers-payant ne risque pas dissimuler un transfert du poids de l’Assurance Maladie vers des complémentaires de plus en plus onéreuses pour chacun ?

Le Français !

Qui, raisonnant régulièrement à courte vue, aveuglé par les miroirs aux alouettes, est incapable de discerner que, à terme, c’est toujours lui qui paye les pots cassés.

En 2014, le déficit public a été de 84,8 milliards d’euros et les prélèvements obligatoires ont encore augmenté à 44,9 % du PIB. Malgré une chute historique des taux d’intérêt des emprunts, la dette du pays (2 037 milliards d’euros fin 2014) n’a toujours pas commencé à diminuer, les économies sur le remboursement de cette dette ayant alimenté des dépenses nouvelles. Les régimes de retraite complémentaire AGIRC (pour les cadres) et ARRCO (pour l’ensemble des salariés du privé) auront épuisé leurs réserves en 2018 et 2027… Mais 47,5 % seulement des foyers fiscaux ont payé un impôt sur le revenu.

D’un personnel politique, qui, de droite comme de gauche, fait preuve d’une constance dans l’impéritie consternante, ou d’une population, progressivement déresponsabilisée, au sens critique abyssalement bas, qui est le plus à blâmer ?

Charles De Gaulle aurait dit, probablement avec irritation, que les Français étaient des veaux, le personnel politique actuel le pense en silence, mais avec satisfaction.




Alea jacta est…

381 – Les dés sont jetés. L’Assemblée Nationale a adopté mardi 14 avril le projet de loi de modernisation du système de santé par 311 voix contre 241. Les députés UMP, UDI et communistes ont voté contre.

Le tiers-payant sera généralisé à toute la population au 30 novembre 2017. Ce sera alors un droit pour tous et une obligation pour les patients en ALD dès le 31 décembre 2016. Pourtant, la faisabilité technique simple et sûre pour le médecin n’existe pas. Il n’est pas envisageable  que nous soyons dans l’obligation de contrôler l’ouverture des droits des patients. Quant au problème de fond : la modification radicale de la relation patient-médecin, elle a été balayée d’un revers de main, sous prétexte que « ça marche ailleurs ». Il n’est pas nécessaire d’être sociologue pour apprécier que les Français ne sont ni anglo-saxons ni scandinaves. La sensation erronée de gratuité de l’acte médical va profondément modifier le comportement des patients, de la même façon que jouer au poker avec des haricots ou de la vraie monnaie change totalement la donne.

Le projet de loi montre une volonté d’ostracisme antimédecin libéral spécialiste, autre que de médecine générale, révélateur de l’état d’esprit étroit, partisan et détestable des rédacteurs de cette loi.

Deux exemples :

• l’article 30 sur l’exercice en pratique avancée précise que les auxiliaires médicaux le feront sous la responsabilité du « médecin traitant » en ville ou « d’un médecin » en établissement de santé ;

• l’absence de dépassement d’honoraires est impérative pour les établissements privés souhaitant être habilités au Service Public Hospitalier alors que ce statut est automatique pour les établissements publics où, pourtant, les praticiens hospitaliers ayant une activité libérale continueront à toucher des honoraires en plus de leur salaire. Cette pratique a rapporté près de 32 millions d’euros aux PH de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris en 2013.

Deux poids, deux mesures, tel est l’état d’esprit de cette loi inique. Pas d’angélisme, les ARS, arbitres des choix en régions, ne pèseront pas à la même balance les demandes d’autorisation d’activité des hôpitaux et des cliniques. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, les cardiologues libéraux nantais, auvergnats ou bressans peuvent en témoigner, ce ne sera pas le cas demain.

Enfin, l’article 12 bis prévoit la création de communautés professionnelles territoriales de santé, au mieux des usines à gaz ingérables, au pire le début de l’évolution vers un système de Gatekepper à l’anglaise.

Au total une loi inéquitable et dangereuse, bien loin de l’objectif de la stratégie nationale de santé de recentrer la prise en charge de la population, que nous devons continuer à dénoncer.

Pour finir, une pensée pour les dizaines de milliers d’étudiants recalés, depuis 1972 à la fin de la première année des études médicales, par un cursus élitiste qui les a écartés de leur vocation ; l’article 30 quater autorise les étudiants à diplômes étrangers (quel que soit le lieu d’obtention de celui-ci) en troisième cycle en France, à un plein exercice sur l’ensemble du territoire…

Les dés sont certes jetés, mais ils n’ont pas fini de rouler. Le combat doit continuer au Sénat et auprès de la population.

Ne lâchons rien.

Eric Perchicot

Président du SNSMCV




Lendemains de fête

40 000 personnes (19 000 pour la police, à quand une réflexion sur les conflits d’intérêts de cette institution ?) ont arpenté dimanche 15 mars le centre de Paris pour manifester leur opposition à un projet de loi de Santé délétère.

380 – Le danger est réel pour la population au travers de la mesure la plus médiatisée : le tiers-payant généralisé. Derrière le côté séduisant de « l’acte médical gratuit » se cache une réalité bien plus désagréable : le transfert invisible et progressif du coût de l’Assurance Maladie de la solidarité nationale vers des organismes d’assurance complémentaire, dont le poids va peser de plus en plus lourd pour le budget de chaque Français.

Bien sûr, la communication de masse largement contrôlée par les pouvoirs publics fait une présentation complètement malhonnête d’un service annoncé comme simple, ce qui ne sera pas le cas avant longtemps, et sans retentissement sur la relation patient-médecin, ce qui est le témoin d’une méconnaissance complète de la pratique médicale.

Nous devons poursuivre la mobilisation et le combat en martelant que seul un retrait du projet de loi actuel de l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale est acceptable. À nous de faire preuve d’imagination pour mettre à nos côtés l’ensemble de la population et montrer du doigt les élus du peuple qui jouent contre l’intérêt général.

Ce n’est pas parce que le réveil, lundi 16 mars, après un dimanche d’espoir a été difficile qu’il faut baisser les bras. Restons fiers de notre métier et dépensons notre énergie pour que les générations futures partagent ce sentiment.

Est parue au Journal Officiel de la République française début mars la composition de la commission des « stratégies de prise en charge » de la HAS présidée par Alain Cordier. Elle comprend 14 médecins presque quasiment tous hospitalo-universitaires à l’exception de deux spécialistes en médecine générale. N’y figure aucun représentant de la médecine spécialisée libérale. Probablement que les heureux élus ont été choisis en raison de leur expertise dans la stratégie de carrière. Quand on lit qu’une des missions de la commission sera de proposer des recommandations sur les bonnes pratiques et dans l’organisation des soins, on peut s’interroger sur la pertinence de ces choix. Autant demander à une assemblée de prêtes intégristes de réfléchir aux problèmes de la vie conjugale… Bel exemple d’une institution de la République dont on peut s’interroger sur la pertinence.

La médecine libérale ne doit rien attendre du monde politique et des élites autodéclarées. À nous de faire preuve d’imagination et de détermination pour imposer notre place dans la future organisation de la santé.

Ne lâchons toujours rien !

Eric Perchicot




Ides de Mars

Tous à Paris le 15 mars, pour une manifestation de force pacifique.

379 – Dans la Rome antique, les Ides de Mars étaient une journée festive où l’on honorait le Dieu de la guerre. C’était dans le calendrier romain le… 15 mars. Certes ce n’est qu’une coïncidence et, bien sûr, nous ne sommes pas en guerre. Cependant, le projet de loi de santé mérite que l’ensemble des médecins libéraux s’élève contre lui, et le 15 mars sera une date capitale dans cette lutte. Ne soyons pas naïfs : les tentatives récentes de la ministre pour amadouer le corps médical ne sont malheureusement que de la gesticulation médiatique. La chronologie est implacable, le projet de loi a été  présenté le 19 juin 2014. A la stupéfaction générale du monde médical, il ne reprenait absolument pas l’esprit de la Stratégie Nationale de Santé. Pire, il ne faisait qu’aggraver un hospitalocentrisme, pourtant inefficace et coûteux, dénoncé régulièrement par des rapports institutionnels. La Cour des Comptes dernièrement, l’IGAS il y a quelques années, qui, dans une étude détaillée sur l’hôpital public, écrivait noir sur blanc que le niveau du tarif des actes pratiqués en ambulatoire n’était pas suffisant pour couvrir les mêmes activités en consultation hospitalière externe !

Or, depuis le 19 juin malgré le tollé général, notre ministre n’a rien changé. Le texte présenté au Conseil des Ministres le 15 octobre a été copie conforme de celui de juin. Ce n’est que dans les dernières semaines de l’année qu’une concertation a été concédée, mais dans des délais qui ne laissent aucune chance à une réécriture sérieuse d’un texte de 92 pages.

Aujourd’hui, la seule vraie solution pour sortir de l’impasse et d’un rejet généralisé est le retrait du projet de loi  actuel de l’ordre du jour du Parlement. Dans l’urgence, il est illusoire d’espérer trouver l’équilibre nécessaire entre l’hôpital public et la médecine ambulatoire pour refonder notre système de santé autour de la prévention, de l’éducation en santé publique et de la prise en charge ambulatoire des pathologies chroniques et de celles liées au vieillissement.

Le 15 mars, la manifestation parisienne se doit d’être une réussite complète. Il faut qu’elle soit massive pour imposer ce que le ministère nous refuse depuis bientôt neuf mois. Dieu sait, si les organisations syndicales ont fait preuve de sens des responsabilités, en essayant jusqu’au bout de convaincre la ministre du caractère déséquilibré de son texte. Probablement que le dogmatisme rend aveugle et que seule une épreuve de force réussie pourra imposer un rééquilibrage du texte de loi.

C’est aux Ides de Mars, celles de 44 avant J.C. que Jules César a été assassiné sur les marches du Sénat romain. Pas de malentendu, j’ai le plus grand respect pour notre ministre, sa fonction ainsi que pour les idées qu’elle défend, c’est à son texte que je ne veux que du mal, dans sa version actuelle.

Tous à Paris le 15 mars, pour une manifestation de force pacifique.




Feux de paille ?

378 – Une bouffée d’oxygène, voilà ce qu’a été la mobilisation spontanée et générale de la population se dressant contre la barbarie. Nous ne pouvons qu’espérer que le personnel politique se hisse à la hauteur du peuple. L’avenir nous le précisera rapidement. C’est la liberté d’expression, fondement de la démocratie, qui a été attaquée, or son usage dans nos sociétés complexes n’est pas simple. Au cinéma, un film, une fois produit et réalisé, a encore besoin d’être distribué dans les salles pour exister. De la même façon, notre liberté de parole doit pouvoir accéder aux médias, or dans cet exercice, sous toute les latitudes, c’est le pouvoir qui impose, plus ou moins subtilement, ses règles.

Comment proclamer sur la place publique que le tiers-payant généralisé obligatoire ne changera rien aux renoncements aux soins, essentiellement liés aux  coûts des prothèses dentaires auditives et de l’optique? Comment affirmer en prime time, que c’est sur l’hôpital public surdimensionné que les marges d’économies sont les plus considérables ? Comment dénoncer, dans les quotidiens nationaux et régionaux,  les liens d’intérêt puissants qui interdisent aux hommes politiques d’avoir une position lucide et d’intérêt général sur les hôpitaux publics, souvent premiers employeurs de leurs circonscriptions ? Comment se faire entendre sur l’indigence du tarif de nos actes médicaux ? Comment convaincre que les rafistolages proposés par la loi de santé ne sont pas à la hauteur des enjeux ? Comment proclamer que seul une réécriture complète de la loi de santé est acceptable ? De la réponse à ces questions dépend la refondation de notre système de santé.

Arriverons-nous à nous faire entendre ou bien la vague de l’émotion nationale va-t-elle engloutir le combat de la médecine libérale ?  La « Société du spectacle », si bien orchestréé par notre personnel politique, réussira-t-elle, en monopolisant l’ensemble des médias, à reposer une chape de plomb sur l’exaspération de tous ?

Wolinski, Cabu, Charb, Reiser, disparus trop tôt mais de la même trempe, ont bercé ma jeunesse puis mes années d’études. Ils ont participé à la formation de mon sens critique et de mon ironie (parfois contestable, je l’admets), jusqu’au bout ils nous auront rappelé que la liberté est un combat permanent.

Continuons et ne lâchons rien !

Eric Perchicot

Président du SNSMCV




L’impasse

Madame Marisol Touraine a réussi le tour de force de fédérer contre sa politique la totalité syndicats de médecins libéraux.

377 – Le mouvement de grève qui s’annonce est la conséquence de la présentation d’une loi de santé totalement déséquilibrée, adossée à de la maladresse et un peu de suffisance.

Cependant les racines de l’exaspération sont plus profondes et relèvent d’une ancienne et lente déviance de notre système de santé. La création d’un secteur à honoraires libres, proposé par l’Assurance Maladie bien que refusé par la CSMF, était en contradiction avec la philosophie conventionnelle du tarif unique des actes. Le manque d’anticipation des conséquences, les pouvoirs publics supputant une régulation des dépassements en raison de l’importance de l’offre, faisait fi de l’introduction en 1971 du numerus clausus qui, en raréfiant cette offre, a entraîné une augmentation d’autant plus forte des compléments d’honoraires que la création du secteur 2 a totalement fait décroché le tarif des actes, devenu aujourd’hui indécent. L’ambition de la loi de santé, qui malgré les dénégations récentes, est de mettre sous tutelle l’activité ambulatoire et l’hospitalisation privée n’a été que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

Nous en avons assez de l’arbitraire des directeurs d’ARS, d’être montrés comme coupables du trou de la Sécurité Sociale alors que celle-ci souffre essentiellement d’un déficit des recettes lié à la crise économique, au chômage et au choix des gouvernements successifs. Les faits sont têtus et les chiffres incontournables : l’hôpital public, formaté à la fin des années 50, n’a pas suffisamment évolué et est aujourd’hui largement surdimensionné. C’est essentiellement là que se trouvent les marges de manœuvre pour prendre le tournant de l’ambulatoire. Encore faudrait-il, que le personnel politique, derrière chaque élu de la nation se cache un lien d’intérêt avec un hôpital ou autre structures d’hospitalisation publique dans une circonscription ou une commune, prenne en compte l’intérêt général et accepte la fermeture des établissements inutiles, non efficients et parfois dangereux.

Dans le même temps la médecine libérale doit accepter de réfléchir à l’évolution des modes de rémunérations contre la remise à niveau du tarif des honoraires pour revenir, à terme, au tarif unique, base de la logique conventionnelle. Elle doit également se pencher sur le problème de la régulation géographique pour proposer une alternative à l’envahissement par une main-d’œuvre médicale européenne. Nous n’avons rien à gagner à une densité médicale excessive qui conduit automatiquement à l’appauvrissement du médecin.

La refondation du monde de la santé passera par la responsabilisation des acteurs aussi bien les politiques que les représentants de la médecine libérale.




Allons-y !

Frédéric Van Roekeghem a quitté la direction générale de la CNAMTS sur l’échec des laborieuses négociations sur la coordination du parcours de soins. Le rejet massif de l’organisation imaginée par l’Assurance Maladie s’explique par son caractère complexe, loin des réalités du terrain et sans budget significatif pour rémunérer les professionnels acteurs de cette coordination autour du patient. C’est d’abord un constat d’échec d’un type de gouvernance pyramidal dans lequel les acteurs de terrain ne peuvent qu’accepter ou rejeter un projet ficelé par la haute fonction publique de la santé. Il est plus que temps que les médecins libéraux et les autres professionnels de santé se réunissent pour proposer ensemble une organisation de la prise en charge ambulatoire adaptée au vieillissement de la population et au lourd fardeau des maladies chroniques. A nous d’imaginer des parcours de soins coordonnés limitant les hospitalisations au strict nécessaire et tenant comptes des réalités sociales de notre pays. La continuité des soins, les consultations non programmées et la dimension territoriale de l’organisation libérale font partie des sujets qui doivent être traités par l’ensemble des professionnels de santé. Je suis convaincu que des propositions consensuelles issues du terrain pourraient être acceptées par les pouvoirs publics si nous faisons preuve d’imagination et de courage pour sortir de schémas devenus obsolètes. Il est urgent que les médecins se libèrent de leur individualisme atavique et s’attèlent à la conception d’une structuration moderne du monde de la santé ambulatoire. Ils pourront, ainsi, proposer aux responsables politiques, de droite comme de gauche, une réflexion sur la fongibilité des enveloppes entre la ville et l’hôpital, seul moyen de trouver des marges de manœuvres suffisantes pour financer la coordination des soins ambulatoires.

Cette dynamique doit également soutenir le rejet du projet de loi de santé tel qu’il est écrit à ce jour. La transcription législative de la stratégie nationale de santé est à contresens de son ambition : proposer une nouvelle organisation du monde de la santé en privilégiant la prévention et la prise en charge ambulatoire de la population. Derrière la mobilisation de tous les professionnels de terrain doit émerger un projet alternatif à l’hospitalo-centrisme effréné. Nous devons tous ensemble y travailler, allons-y !

Eric Perchicot

Président du SNSMCV




La coupe est pleine

375 – Droite dans ses bottes, Madame Marisol Touraine a présenté en Conseil des ministres son projet de loi de santé sans aucune modification significative par rapport au texte dont nous avions connaissance. Le tiers-payant généralisé obligatoire à partir du 1er janvier 2017 reste la mesure emblématique que tous les médias reprennent à l’unisson. Nous y sommes totalement opposés, car cette mesure changerait fondamentalement la relation avec nos patients, malheureusement cette notion est incompréhensible pour les technocrates mal conseillés qui nous gouvernent.

La même loi organise la prise en charge de la médecine ambulatoire autour de l’hôpital public sous l’emprise féodale des directeurs généraux des ARS. Elle limite clairement, malgré les dénégations de la ministre, les possibilités d’installation des jeunes confrères. Subrepticement, ce texte  inacceptable tend à essayer de diluer le médecin dans un « melting pot » de professionnels de santé, flatteur peut-être pour ceux-ci, mais au risque majeur d’un nivellement par le bas de la prise en charge de la population. Répétons-le avec force : le médecin n’est pas un professionnel de santé comme les autres ; c’est une tromperie que de faire croire le contraire.

Comme nous le redoutions depuis des mois, le budget alloué, sans concertation, par les pouvoirs publics au DPC se révèle insuffisant car sous-dimensionné de façon criante dès sa conception. Exemple caricatural du danger pour les médecins du regroupement des professions de santé dans le même pot, c’est le dépassement des budgets d’autres professionnels de santé que les médecins qui nous met dans la situation actuelle où la seule alternative proposée par le ministère est de réduire le DPC à un seul programme annuel par médecin. Qui peut croire qu’un programme annuel peut résumer le besoin de formation ?

Par ailleurs, les discussions sur la coordination des soins en médecine de premier recours se sont déroulées sans que, à aucun moment, la place de la médecine spécialisée de proximité n’ait été ne serait-ce qu’évoquée. Pourtant, parmi les sujets prioritaires on retrouve la prescription des  anticoagulants et la prise en charge de l’insuffisance cardiaque…

Trop c’est trop, l’exaspération est générale et ne demande qu’à s’exprimer. J’espère, et j’appelle de tous mes vœux une convergence de tous les syndicats médicaux polycatégoriels et de spécialités, laissant de côté leurs intérêts propres, pour, tous ensemble, se lever et faire barrage à une politique guidée par un dogmatisme d’un autre temps et qui ne peut que se solder par une dégradation sévère de la prise en charge de la population et la disparition de la médecine libérale.

Eric Perchicot




Avis de tempête

374 – Le pays attend toujours l’inversion de la courbe du chômage, la croissance a été nulle au deuxième trimestre 2014 rendant caduques les hypothèses optimistes d’élaboration du budget 2015 de la nation et reportant encore le début de diminution des déficits et le respect de nos engagements européens ; si les politiques étaient évalués sur l’atteinte de leurs objectifs…

La loi sur l’accessibilité des locaux ouverts au public, dont nous attendons les ordonnances d’application en septembre, est un exemple caricatural de l’inconséquence de nos gouvernants. Pas de malentendu : médecins, nous ne pouvons qu’y adhérer, mais comment financer les travaux de mise aux normes (qui peuvent être très onéreux), alors que l’on ne peut répercuter ce coût sur nos actes aux tarifs figés  à la différence des autres professionnels hors le domaine de la santé ?

Les soubresauts politiques de l’été vont peut-être infléchir les choix  économiques du Président, le domaine  de la  santé risque de rester alors la dernière caution de gauche du Gouvernement. Le projet de loi de Marisol Touraine sur la santé qui doit être présenté en conseil des ministres en septembre est, en l’état, une arme de destruction massive de la pratique médicale libérale : prééminence totale de l’hôpital public, mise sous tutelle de l’hospitalisation privée, outils de régulation à l’installation des médecins entre les mains des ARS, déclinaisons régionales de la convention, tiers-payant obligatoire… Entre le discours : il faut organiser la médecine ambulatoire pour limiter le recours à l’hôpital et l’esprit du projet de loi le grand écart est total. La médecine ambulatoire libérale est au bord de l’abîme, soit elle saura se battre soit elle fera un grand pas en avant.




Editorial

Le tiers-payant généralisé est la mesure phare, reprise à la une de tous les médias, du projet de loi de santé présenté le jeudi 19 juin par Marisol Touraine.

Peu importe que les renoncements aux soins pour motif financier soient essentiellement dus à la dentisterie, à l’optique et à l’audio prothèse ; peu importe que 10 millions de Français bénéficient déjà de ce tiers-payant en raison de leurs difficultés sociales et financières et que l’immense majorité des actes coûteux soit systématiquement en tiers-payant. En ces temps difficiles, cette mesure démagogique est un choix purement idéologique ignorant totalement qu’honorer directement son médecin fait partie de l’acte médical et que sa disparation en change profondément la nature. Nous y sommes totalement opposés dans l’intérêt de la pratique médicale libérale dont, comme le libre choix de son médecin, c’est un des fondements.

Le décret de loi relatif aux procédures de contrôle de l’insuffisance professionnelle est paru au Journal Officiel le 28 mai 2014. Il permettra à l’avenir à l’Ordre des Médecins de vérifier les compétences professionnelles. Espérons que cet outil soit utilisé pour canaliser l’afflux de professionnels aux diplômes extracommunautaires, dont la qualité est pour le moins irrégulière et qu’il ne serve pas au contrôle d’un DPC obligatoire, mais au financement très insuffisant.

Enfin, la loi sur l’accessibilité des lieux publics a été définitivement adoptée par le Parlement ; les médecins libéraux sont totalement concernés par ce texte dont ils ne doivent pas ignorer la portée. Il est indispensable que chacun d’entre nous fasse l’évaluation des travaux à engager éventuellement pour respecter la loi et ce avant le 31 décembre prochain. Les pénalités prévues en cas du non-respect de la réglementation ne sont pas anodines.

Toujours plus de contraintes, c’est malheureusement notre lot ; cependant, le pire n’est jamais sûr et l’efficience de la médecine libérale ambulatoire est un atout majeur au moment où le parcours de soins est en réflexion dans l’objectif de diminuer le coût de la prise en charge des maladies chroniques et du vieillissement. Ne désespérons donc pas ; bonnes vacances à tous.

Amicalement.




Impéritie

Le rapport de l’IGAS sur la gestion du DPC a été enfin rendu public la semaine dernière. On peut comprendre le retard à sa divulgation quand on en analyse ses conclusions : la gouvernance du projet a été « désastreuse » en partie en raison de l’intrusion maladroite dans celle-ci du ministère. Le rapport pointe du doigt une évidence : il est impossible que l’obligation réglementaire de chaque professionnel de santé à un programme de DPC annuel soit respectée avec le budget alloué par les pouvoirs publics. Pour l’IGAS il manque au minimum 400 millions €. Cette évidence, affirmée dès les premières réunions des commissions de l’OGDPC, avait, semble-t-il, échappé à notre ministre. Le rapport note un autre  point d’achoppement : le refus de certains syndicats d’adhérer à la nouvelle architecture pour des raisons évidentes de perte de financement de leur activité syndicale. Le rapport précise clairement que tant que la vie syndicale  sera assurée, au moins en partie, par les fonds de la formation continue il n’y aura pas de solution satisfaisante à celle-ci. Il est malheureusement probable  que, une fois de plus, nous allons assister à un rafistolage pour maintenir le système en l’état. Une des pistes avancées est que l’obligation de formation devienne trisannuelle. Un seul programme de DPC tous les trois ans suffirait donc à assurer la mise à niveau des connaissances nécessaires pour la pratique médicale…

Pendant ce temps le ministère a présenté le calendrier des réunions sur  la coordination des soins dans le cadre de la stratégie nationale de santé. Quelle place sera réservée aux médecins spécialistes de proximité dans cette organisation où leur position est défendue par des syndicats polycatégoriels à la liberté de manœuvre limitée par ce caractère polyvalent ?

Les cardiologues vont devoir faire preuve d’une grande vigilance car ils sont directement concernés par la prise en charge des pathologies chroniques  les plus coûteuses pour la collectivité. Le poids de notre syndicat ne relève, outre la pugnacité de ses responsables, que de son niveau de syndicalisation. J’en appelle donc à chacun d’entre vous, vous avez déjà reçu (et vous recevrez des rappels prochainement) l’appel à cotisation 2014 de vos syndicats régionaux. Ce geste solidaire est indispensable à la défense de notre spécialité. Il est, de plus, à ce jour notre seule source pérenne de revenus pour assurer la défense et la place  de la cardiologie libérale, de même que l’abonnement à notre journal Le Cardiologue est aujourd’hui indispensable à sa survie. Seuls les combats que nous ne mènerons pas sont perdus d’avance.

Eric Perchicot




50 Milliards…

371 – 50 milliards d’économies, 21 pour la Sécurité Sociale dont 10 pour l’Assurance Maladie; derrière les chiffres annoncés, la réalité relativise l’importance de l’ambition affichée. Les dépenses totales de santé représentaient en 2011 en France 11,6 % du PIB,  niveau le plus élevé de l’Union Européenne, et même avec un ONDAM ramené à 1,75 % d’augmentation annuelle, cette part de PIB continuera à progresser à moins d’un taux de croissance au-dessus de… 1,75 %, ce qui n’est pas espéré dans un avenir proche. Les mesures proposées ne sont que de nouveaux « coups de rabot » qui, par le passé, n’ont amené que de très médiocres résultats. Nous n’en sommes pas encore à l’ébauche des réformes structurelles et d’une remise à plat d’un système coûteux, de plus en plus inégalitaire pour la population, peu rémunérateur pour le corps médical par rapport à nos confrères anglais ou allemands et  dont les  indicateurs  de qualité de santé publique ne sont pas meilleurs que ceux de nos voisins !

Les bases de réformes structurelles, s’appuyant sur l’expérience des pays qui ont pris le problème à bras le corps, Canada, Suède, Allemagne…, sont connues : définition d’un « panier de soins » totalement couvert pour tous, décentralisation des caisses d’Assurance Maladie gérant des budgets régionaux avec une large autonomie de pilotage et de contractualisation de l’offre de soins, dans un objectif d’efficience maîtrisée. Le chantier sur le parcours de soins et la coordination autour du patient en perte d’autonomie ou atteint de pathologies chroniques s’inscrit dans cette logique d’efficience : le meilleur soin au moindre coût par une prise en charge coordonnée limitant les actes non pertinents et les hospitalisations.

Notre pays a autant de lits d’hospitalisation complète que l’Allemagne avec près de 20 millions d’habitants de moins. C’est là le principal gisement d’économie, sous réserve que les pouvoirs publics ferment les hôpitaux vidés par le succès du nouveau parcours de soins…

Pour affronter ces transformations inévitables et peu favorables à l’activité médicale libérale, le regroupement des cardiologues dans chaque territoire de santé est un préalable incontournable pour espérer pouvoir contractualiser  positivement avec les financeurs et les établissements de santé et garder une place dans un système de santé refondé. Seule l’union de raison des professionnels libéraux leur donnera le poids et les moyens suffisants pour répondre aux appels d’offre et résister aux pressions. L’avenir n’appartient à personne, les facultés d’imagination, d’innovation et d’adaptation que nous serons capable de développer, nous permettront, ou pas, de nous y inscrire. « Ne pas prévoir c’est déjà gémir »*.

Eric Perchicot

* Léonard de Vinci




Quo usque tandem…*

370 – Les faits et les chiffres sont têtus : malgré des promesses maintes fois réitérées, en 2013 encore, les dépenses de l’État ont continué à augmenter, certes moins que les années précédentes, mais la baisse annoncée n’a pas eu lieu. La diminution du déficit ne s’explique que par une augmentation des recettes due à l’accroissement des prélèvements fiscaux. En 2013 toujours, l’ONDAM de ville a été sous-exécuté d’un milliard d’euros ; l’économie est en réalité de 1,7 milliard d’euros car le résultat ne tient pas compte d’une économie de 700 millions d’euros déjà effectuée l’année précédente. Et pourtant, nos gouvernants, incapables de donner l’exemple, évoquent toujours la lutte contre les abus et fraudes dans le monde libéral alors que les chiffres montrent que les regards devraient se porter sur le système hospitalier public qui a dépassé son ONDAM de 700 millions d’euros en 2013, en grande partie en raison d’un système de financement par la T2A inflationniste et d’une structuration datant du début des années 60, inadaptée au vieillissement de la population. La mise en place de la pertinence des parcours de soins et des actes ainsi qu’une convergence tarifaire équitable auraient le mérite de s’attaquer au vrai problème sans dévaloriser aucun acteur du système de santé.

Malgré ces évidences, notre ministre s’obstine à promouvoir la mesure phare de sa stratégie nationale de santé : le tiers-payant généralisé, évidemment inflationniste et générateur de dépenses. L’exemple qu’elle nous donne de la Suède, où cette mesure n’aurait pas modifié la consommation de soins, ignore complètement les aspects sociologiques. Penser que le civisme et le sens de l’intérêt général scandinave et de nos concitoyens sont les mêmes est une insulte au bon sens. Que notre chère ministre et ses condisciples commencent par appliquer les règles déontologiques de leurs alter ego scandinaves, l’exemple venant toujours d’en haut nous pourrons alors en reparler.

Jusqu’à quand, fort de son impunité et aveuglé par son dogmatisme, le personnel politique pourra-t-il se moquer de la société civile ? Quo usque tandem…

Eric Perchicot

* Cicéron, extrait de la Première Catilinaire.




3 ans déjà…

368-369 – Christian Ziccarelli – Cela fait effectivement trois ans que j’ai été élu à la Présidence du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux. Une charge, acceptée dans l’urgence, que j’ai essayé d’assumer en tenant compte de vos avis et de ceux de vos représentants au sein du Conseil d’Administration. De trésorier de l’UFCV, je suis devenu Secrétaire Général, puis Président et en même temps Secrétaire Général du Syndicat. Aujourd’hui l’heure de la retraite a sonné.

Dès mon élection, j’ai été confronté à l’affaire « benfluorex ». Les cardiologues bien que non prescripteurs sont devenus rapidement les boucs émissaires. Notre présence au Comité de suivi et notre intervention à l’Assemblée Nationale a, je pense, participé pour une bonne part à diminuer le discrédit dont faisait l’objet notre spécialité.  En faisant face rapidement au surcroît de demandes d’échocardiographies vous avez démontré que la cardiologie libérale était incontournable en termes de santé publique par sa faculté à répondre au besoin dans l’urgence.

Avec la nouvelle convention, signée en 2011, est apparue la Rémunération sur Objectif de Santé Publique (ROSP) avec ses partisans et ses adversaires. Le Syndicat ne pouvait pas en faire l’impasse. La cardiologie a été la spécialité choisie par la CNAMTS. Nous avons dû trouver des indicateurs notamment d’efficience qui satisfassent à la fois la profession et la CNAMTS. Comme pour toute innovation,  nous avons dû « essuyer les plâtres » et corriger au fil du temps les imperfections.

La création d’un organisme commun de Développement Professionnel Continu (DPC), l’ODP de cardiologie ou ODP2C, réunissant toutes les instances de la cardiologie, le SNSMCV et la SFC en étant les membres fondateurs, est également pour notre spécialité une grande avancée. Là encore nous avons été les novateurs et aujourd’hui suivis par toutes les autres spécialités. Le DPC dont tous les décrets sont parus associe une phase cognitive et une phase évaluative. C’est une obligation annuelle pour tous les médecins.

Le site moncardio.org, un site d’information du patient, après une longue phase de constitution, devrait rapidement voir le jour. Vous en serez informés par mailing.

Nous avons refusé d’apposer notre signature à l’avenant n° 8 car il signe la fin à terme du secteur 2 sans contrepartie significative sur la valeur des acte. Il sanctionne une nouvelle fois la cardiologie interventionnelle (diminution de 12 % des forfaits d’imagerie) ainsi que les cardiologues pratiquant des échographies vasculaires (diminution des actes de 7 %). Nous n’avons pas souhaité intervenir sur le choix du contrat d’accès aux soins car il s’agit d’un choix personnel.

Mon échec majeur : l’absence de valorisation des actes. Devant l’absence de revalorisation du coût de la pratique, le Conseil d’Administration s’est abstenu lors de la signature de la nouvelle convention. L’avenant n° 8 ne donne qu’une faible compensation au secteur 1 (5 € par consultation pour les patients de plus de 85 ans depuis le 1er juillet 2013, puis pour les plus de 80 ans au 1er juillet 2014). Le tarif de l’ETT a progressé de 83 cts et celui de l’ECG de 25 cts… La ROSP a permis à certains d’entre vous une compensation très partielle d’honoraires (les écarts sont effectivement importants entre celui qui a reçu moins de 200 € et celui qui a obtenu plus de 4 000 €). Le C2 (+ DEPQ003) de consultation, hors suivi habituel, est désormais cotable tous les 4 mois.

Je vous souhaite une excellente nouvelle année personnelle et professionnelle, et « bon vent » au nouveau Conseil d’Administration et à son Président.




Mise au point…

367 – Christian Ziccarelli – Le Parlement vient d’adopter en deuxième lecture le financement de la Sécurité Sociale 2014. L’ONDAM progressera pour les soins de ville de 2,4 % et pour les soins hospitaliers de 2,3 %, une première ! Une mesure somme toute logique mais largement insuffisante, les économies réalisées par la médecine ville atteignent près de 2 milliards d’euros (y compris les 300 millions prévus en 2013) alors que les dépenses hospitalières ne montrent aucun signe de ralentissement. Pour quels avantages ? Certains actes techniques et forfaits d’imagerie ont vu leurs tarifs revus à la baisse et la CSC stagne depuis le 1er janvier 2008. Les actes de télémédecine vont enfin faire l’objet d’un financement, mais toujours dans un cadre expérimental, pour couvrir les zones désertifiées et selon le bon vouloir des ARS. Depuis plus de trois ans le Conseil National Professionnel de Cardiologie a déposé un dossier pour la création d’actes de télésuivi des PM et des DAI, toujours « au point mort », malgré nos nombreuses demandes. Les expérimentations sur la qualité et la coordination des soins de ville qui étaient l’objet d’une enveloppe spécifiques sont désormais intégrées dans un fonds à vocations multiples, là encore géré par les ARS. Des forfaits vont être distribués aux structures pluridisciplinaires, un des axes de la stratégie nationale de la santé, toujours selon le bon vouloir des ARS. Si cela n’est pas une étatisation de la médecine libérale, que l’on m’en fasse la démonstration !

L’orientation majeure de la politique de santé pour les deux prochaines années sera, à n’en point douter, l’édification technocratique du parcours de soins. Les députés souhaitent tester de nouveaux modèles d’organisation et de financement des soins dont les modalités seront définies en Conseil d’Etat. Toujours dans l’esprit de la médecine de parcours, la tarification à l’activité (T2A) sera réformée dans les établissements de soins avec une dégressivité des tarifs pour les établissements en cas de trop forte activité !… La HAS en est le maître d’œuvre. Les premiers écrits sont édifiants. Elle imagine des organigrammes de parcours de soins où systématiquement les spécialistes sont absents. Les groupes de travail sont constitués de telles façons que les spécialités concernées sont minoritaires, ou ignorées. La HAS semble méconnaître, comme souvent, la réalité du terrain. En cardiologie, le parcours de soins est une réalité ancienne, les patients sont adressés dans la grande majorité des cas par leur médecin traitant qui assure le suivi après avis du consultant.

La Rémunération sur Objectifs de Santé Publique (ROSP) a permis, en 2012, en moyenne un complément d’honoraires proche de 1 400 € par cardiologue. Chiffre qui devrait progresser cette année du fait d’une meilleure prise en compte des indicateurs d’organisation du cabinet. Je vous rappelle que la ROSP a été introduite dans la convention médicale 2011 à la suite du succès remporté par le CAPI chez les généralistes.

Le Contrat d’Accès aux Soins (CAS), pour ceux qui en bénéficient, est désormais opérationnel, après quelques difficultés techniques.

Un dernier point, l’ODP2C, l’organisme de DPC pour tous les cardiologues, vient d’être validé par la Commission Scientifique Indépendante de l’organisme de Gestion du DPC. Dès le mois janvier, des actions de DPC seront proposées par les différentes structures de la cardiologie libérale et hospitalière.

Enfin, une victoire syndicale, certes modeste, mais témoin de notre acharnement, dès le 27 décembre vous pourrez à nouveau coter lors d’un bilan de chimiothérapie un ETT+ECG/2.




Une nouvelle ère s’annonce…

Dr ZICCARELLI 5366 – Christian Ziccarelli – Pour la première fois de son histoire, notre périodique Le Cardiologue paraît uniquement par voie informatique. Il n’y a donc pas, au mois de novembre, de journal « papier ».

L’origine de cette décision est liée à l’évolution des modes de communication. Internet est  un outil qui prend chaque jour une place plus importante dans notre société. Les jeunes générations ont tendance à abandonner le papier pour l’Ipad ou autre tablette…  Nous ne pouvons pas en faire abstraction.  Pratiquement tous les grands quotidiens de la presse écrite sont publiés sur un site dédié.

Bien entendu, ce passage ne se fera pas du jour au lendemain,  Le Cardiologue paraîtra désormais sur les deux supports « papier et informatique ».

Le Cardiologue continuera à paraître mensuellement, comme la Newsletter. Il nous semble indispensable de vous apporter régulièrement une information socioprofessionnelle utile, non seulement à votre exercice mais aussi pour comprendre les enjeux de la santé d’aujourd’hui et de demain.

 




Encore plus, toujours plus, ça suffit !

365 – Christian Ziccarelli – Il n’y a pas une semaine où l’Etat-pieuvre, sous l’œil gourmand de nos dirigeants et hauts fonctionnaires, ne dévore sournoisement des pans entiers de la médecine libérale. Entre les discours, où fleurissent les mots « décloisonnement, rapprochement public-privé, hôpital-ville », et les faits le fossé est immense. Combien de fois n’ai-je dénoncé dans ses lignes les actions « tout public » de certains directeurs d’ARS.  Et que dire des  directeurs d’hôpitaux, tout dernièrement celui de  Montbrison, où les cardiologues libéraux, devenus non indispensables à la bonne marche du service de cardiologie, sont congédiés par simple lettre recommandée, en leur supprimant en plus l’accès aux plateaux techniques.  Il est vrai que les établissements publics, sous une image d’humanité, ne se privent pas d’exploiter nos collègues étrangers, avec des salaires de misères et des durées de travail hebdomadaire nous attirant les foudres des autorités européennes, tout en leur faisant miroiter une future qualification de spécialité après un certain temps passé dans un service. Dans le même temps, on exige de nos étudiants désirant obtenir une qualification de spécialité, des connaissances et une technicité de très hauts niveaux. Difficile à accepter ?

Nous allons vers une étatisation de la médecine libérale, une fonctionnarisation de notre statut, le tout géré par des politiques dont l’incompétence au fil des années est criante, le déficit abyssal de l’Etat, se creusant inéluctablement depuis bientôt quarante ans, en étant le meilleur exemple. Un comité des « sages », sans médecin libéral (hormis un médecin  généraliste « salarié » déguisé en médecin libéral) a rédigé un rapport, repris par la Ministre de la Santé sous le titre pompeux de « Stratégie nationale de santé », sensé orienter la politique de santé dans les années à venir. Une fois de plus, le médecin spécialiste de proximité est le grand oublié de ce rapport, prônant entre autre la démocratie sanitaire, le « tiers payant généralisé », une aberration de plus. Un combat dépassé me dit-on, il faut vivre avec ton temps.  Les dépenses n’ont pas fini de progresser ! La rémunération à l’acte fondement de la médecine libérale va-t-il devenir une exception ?

Plusieurs articles dans Le PLFSS 2014 confirment l’obstination de l’Etat : le FIQCS (Fonds d’Intervention pour la Qualité et la Coordination des Soins) dédié à la médecine de ville est fondu dans le FIR (Fonds d’Intervention Régional) géré par les ARS et donc destiné aussi aux établissements publics, nous redoutons déjà les arbitrages futurs ! Pour réduire le déficit (dont on veut nous rendre responsable), lié en grande partie à l’effondrement de recettes du à la diminution de la masse salariale (3,5 % en 2 ans), il suffirait entre autres de diminuer le tarif des actes des biologistes, des radiologues ! Pourtant c’est grâce aux soins de ville que l’ONDAM est respecté pour la troisième année de suite et sous-exécuté d’environ 500 millions d’euros.

Non à la disparition de la médecine libérale…

Christian Ziccarelli




Mesdames, Messieurs les directeurs d’ARS, respectez l’équité…

364 – Christian Ziccarelli – Selon la loi HPST, les directeurs d’ARS ont pour missions essentielles d’assurer un pilotage unifié de la santé en région et d’accroître l’efficacité du système de soins. Ils devraient agir en toute objectivité en prenant en compte l’existant. Malheureusement, depuis la création des ARS c’est loin d’être le cas, les dérives existent, les mesures sont prises le plus souvent en faveur des établissements publics, au détriment des structures de soins privés. Le dernier en date, un récidiviste en la matière, Daniel Lenoir, directeur d’ARS du Nord-Pas-de-Calais, a supprimé, sans aucune concertation, de façon purement arbitraire, la totalité des forfaits nécessaires au bon fonctionnement des POSU. Le motif invoqué : la baisse de l’enveloppe FIR. Or la circulaire ministérielle définit clairement que les ex-POSU doivent être financés sur cette enveloppe ! A l’heure où les établissements publics ont toutes les peines du monde à assurer les urgences, il est difficile de comprendre une telle initiative, si ce n’est la volonté délibérée de supprimer, purement et simplement, une activité de la cardiologie libérale qui rend des services majeurs aux patients.

En 2014, la chirurgie cardiaque de la clinique Belledonne à Grenoble est menacée de disparaître pour se fondre dans un site unique au sein du CHU. Ainsi en a décidé Christophe Jacquinet, directeur de l’ARS Rhône-Alpes.

Depuis plus d’un an, l’ancien directeur de l’ARS de Lorraine, Jean-François Benevise, voulait délocaliser, fin d’année 2013, la chirurgie cardiaque de la clinique Claude Bernard à Metz sur le site du nouvel hôpital Mercy. La nécessité d’avoir un seul service de chirurgie cardiaque était le prétexte avancé. En fait, le but était tout bonnement de supprimer la chirurgie cardiaque d’un établissement privé répondant aux normes de bonnes pratiques et dont les résultats étaient excellents, pour la « transférer » à l’hôpital, dans un service fantôme depuis la révocation de son chef de service, Pierre-Michel Roux. Claude d’Harcourt, le nouveau directeur de l’ARS, vient de redonner l’agrément pour 5 ans à la clinique Claude Bernard considérant le dossier excellent ! Autre exemple surprenant : l’autorisation d’exercer la rythmologie interventionnelle avait été retirée à la clinique du Colombier à Limoges, en décembre 2012, par le nouveau directeur de l’ARS alors que son prédécesseur avait, lui, donné son accord et que le Schéma Régional de Santé évoquait deux sites pour la rythmologie interventionnelle !

De tels revirements interpellent sur les décisions imposées par certains directeurs d’ARS. Prises unilatéralement, sans concertation, sans aucune objectivité ni équité, elles sont le témoin d’un hospitalo-centrisme inacceptable. Citons, pour dernier exemple, l’action délétère du Directeur de l’ARS de la région Auvergne qui s’emploie à supprimer l’USIC de la polyclinique Saint François à Montluçon au profit de l’hôpital.

Mesdames, Messieurs les directeurs d’ARS vous devez respecter l’équité et ne pas oublier que les structures libérales sont un atout essentiel dans l’organisation de notre système de santé.




Avis à nos technocrates…

362-363 – Christian Ziccarelli – Il n’est pas inintéressant de se plonger dans les rapports des technocrates de la santé, même si parfois les termes utilisés sont très loin du terrain et difficilement compréhensibles.

Prenons l’exemple des derniers avis de la Conférence Nationale de la Santé. On y apprend que pour limiter la crise, avant toute décision, il est nécessaire d’en étudier la valeur ajoutée (une « lapalissade » !). Il faut mailler les acteurs de terrain en faisant la promotion d’équipe territoriale (?) de santé incluant les aidants, en fait créer un comité d’alerte réunissant professions de santé et patients pour détecter les inégalités de soins. Il faut associer solidarité des financements et des pratiques (explication : si votre voisin prend des antibiotiques, il faut lui expliquer qu’une telle prescription augmente les résistances : cherchez le fautif !). Il faut récompenser les professionnels qui acceptent la régulation de leur installation (comment ?).  Les « usagers »  ne sont pas oubliés.  S’ils respectent le parcours de soins, ils doivent pouvoir bénéficier de tarifs opposables ou de dépassements maîtrisés.  A ce propos, il n’y a pas un mois où les droits des usagers ne font pas l’objet d’un rapport.  Ne l’oubliez pas, Messieurs les rapporteurs, nos patients ont aussi des devoirs (combien de rendez-vous ne sont pas honorés alors que nous avons des délais de rendez-vous de plus en plus longs !).

 

Sujet particulièrement brûlant, comment faire face à la désertification ? Nos politiques ont trouvé la solution. Il suffit de construire dans le moindre village des maisons de santé aboutissant parfois à des « gabegies » financières, souvent sans tenir aucun compte de l’avis des professionnels de terrain. Encore faut-il qu’il y ait des médecins !  Pas de problème on augmente le numerus clausus, bel effet d’annonce, mais inefficace dans l’immédiat.  Il y a plus de 20 ans ces grands devins avaient imaginé qu’en le fermant la Sécurité Sociale allait faire des économies. On voit aujourd’hui les résultats d’une telle décision (une ville du Centre de la France – un bassin de vie de 50 000 habitants – n’a plus un seul cardiologue hospitalier ou libéral).   Trouver un emploi pour le conjoint d’un médecin est l’une des raisons majeures de cette désaffection pour les villes de moyenne importance. La réponse n’est pas évidente, pour notre spécialité, la création de maisons pluridisciplinaires avec cabinets secondaires est certainement l’une des solutions. Des financements sont possibles via les ARS, encore faudrait-il une réflexion commune avec les professionnels de santé de terrain pour proposer des solutions souples pragmatiques et adaptées à la vraie vie.




Le spécialiste de proximité, le grand oublié

361 – Christian Ziccarelli – Il n’y a pas une semaine où l’on ne voit poindre un rapport, la naissance d’un comité ou d’une mission. Connaissant parfaitement leur sujet, les experts fournissent une information de qualité. Même si les propositions conclusives dépendent souvent de l’appartenance politique de leurs auteurs, il est rare qu’elles ne soient pas intellectuellement pertinentes. Restons pragmatiques, ces rapports sont-ils tous d’un grand intérêt ? La réponse est évidente, car nombre d’entre eux sont classés « sans suite », ou traitent un thème identique ou très proche (efficience et financement des hôpitaux : Igas, Sénat…), etc. Même en les sélectionnant, leur densité est telle qu’il est le plus souvent impossible de tous les lire entièrement. Depuis le début de l’année, la primeur revient aux dossiers sur les établissements. La mission Laurent sur l’encadrement de l’activité libérale à l’hôpital préconise une régulation limitée. En effet, les dépassements des médecins libéraux sont forcément abusifs, car ils ne sont pas fondés sur une forte plus-value intellectuelle ! Nous apprenons de l’Igas la place et le rôle, enfin reconnus, des cliniques privées dans l’offre de soins. Le rapport Couty sur « le pacte de confiance à l’hôpital » réaffirme sa mission de service public, la nécessité de corriger les effets délétères de la T2A et de renforcer la place des usagers, avec une place pour le moins congrue pour les établissements privés. Marisol Touraine l’a confirmé, il faut tourner la page de la loi HPST. Cela signifie-t-il que l’on doit séparer le bon grain de l’ivraie ?

L’Igas, en 2012, avait alerté les pouvoirs publics sur le chevauchement des travaux des agences. Par exemple l’ANAP, la HAS et l’ANESM interviennent toutes les trois dans la production de recommandations communes, la HAS et l’ANSN réunissent des commissions sur des sujets identiques ou très voisins. Si la réorganisation totale de l’Afssaps était des plus nécessaires depuis la révélation de son manque de vigilance, on voit depuis un an se multiplier les commissions et autres comités (comités de suivi, de sécurité, conseil de surveillance…). Comment ne pas s’interroger sur leur bien fondé ! A l’heure où tout doit être évalué, il ne serait peut-être pas inutile d’apprécier leurs efficiences.

Les spécialistes libéraux de proximité, qui jouent pourtant un rôle majeur dans l’offre de soins, sont aujourd’hui l’objet d’un déni de ce Gouvernement. Avez-vous entendu une seule fois la Ministre s’inquiéter de la désertification de nos spécialités ? La progression exponentielle des charges, le blocage des actes au même tarif depuis plus de 20 ans mettent en péril nombre de nos cabinets médicaux à l’origine de licenciements.

Un conseil, Madame la Ministre, lisez la dernière publication de la Mutualité Française sur le guide des « bonnes pratiques » des centres de santé. Une véritable révolution : pour rentabiliser ces centres, la rémunération des médecins devra être fonction du pourcentage des actes et de la performance de la structure. Un cardiologue, par exemple, devra faire un minimum de 4 consultations par heure (on est loin de notre pratique actuelle : 30 minutes en moyenne par consultation). Efficience, efficience…




Cafouillage à grande échelle !

359-360 – Christian Ziccarelli – Il devient aujourd’hui difficile de trouver une ligne directrice en termes de politique de santé. Malgré l’annonce par le Premier Ministre, à grand renfort de médiatisation, d’une réforme du système de santé en présentant une nouvelle stratégie nationale de santé, la cacophonie règne à tous les niveaux. Le parcours de soins en est la priorité, on peut s’en réjouir. Toutefois le groupe de réflexion ne compte aucun spécialiste de proximité !

Marisol Touraine est déstabilisée par les critiques venues de toute part. La signature de l’avenant n° 8 obtenu à l’arracher est loin d’être historique. Le Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Coeur et des Vaisseaux, en dénonçant dès le lendemain cet accord, est aujourd’hui rejoint par l’un des signataires principaux, le SML, condamnant la progression de la forfaitisation et la disparition programmée du secteur 2.

Le manque de clairvoyance des agences nationales est dénoncé. L’ANSM se réorganise avec difficultés et réagit toujours avec un temps de retard. La HAS n’arrive plus à trouver d‘experts exempts de tout lien d’intérêts. Le DMP est aux abois, le DPC est dans la tourmente. L’OGDPC peine à trouver « ses marques ». La CSI, dont la Ministre vient de modifier la composition, risque de devenir ingérable. L’Assurance Maladie a détourné les fonds conventionnels pour n’attribuer que ceux provenant de la taxe de l’industrie. Pourtant le politique de tout bord s’insurge contre le moindre centime d’euro dont pourrait bénéficier un professionnel de santé !

Les médias mettent de « l’huile sur le feu » privilégiant les effets d’annonce, à l’écoute d’individus, dont les propos provocateurs sont un déni de la science et des progrès de la médecine. Nos patients doutent de l’efficacité des médicaments, se posent des questions sur les réels progrès de la médecine. Le principe de précaution paralyse chaque jour un peu plus notre activité, la judiciarisation progresse.

Pendant ce temps-là, nos délais de rendez-vous et nos journées de travail s’allongent (en moyenne 55 h/semaine). La désertification s’installe à grands pas dans de nombreuses régions. Notre spécialité va connaître dans les toutes prochaines années de massifs départ en retraite. Le burn out s’installe, même chez nos internes : 15 % abandonnent leurs études, le double doute de son choix professionnel. Il est vrai qu’on ne leur offre pas un avenir réjouissant ! Les propositions coercitives des sénateurs ne peuvent qu’aggraver une situation de plus en plus incertaine.

La cardiologie libérale de proximité est une profession passionnante. Elle exige disponibilité, qualification et une remise à niveau quotidienne. Les pouvoirs publics doivent en tenir compte et ne pas jeter l’opprobre sur une spécialité qui a permis en 15 ans de diminuer la mortalité coronaire de plus de 50 %.

La médecine doit rester un art au service du patient, un être humain avec lequel chacun de nous a des relations privilégiées. L’enfermer dans une série d’équations et d’organigrammes n’est certainement pas la panacée, même si la qualité de notre pratique doit être l’objectif primordial.

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