« Ma santé 2022 » : des ordonnances qui inquiètent et des sujets qui fâchent

Après son adoption en première lecture par les députés, ce sont les sénateurs qui vont examiner le projet de loi santé au mois de mai. Les syndicats médicaux attendent d’eux qu’ils rectifient un texte auquel les députés ont ajouté de nombreux amendements, dont certains leur déplaisent fort. Quant aux ordonnances, qui doivent régler le sort de sujets aussi cruciaux que la recertification ou les hôpitaux de proximité, ils en redoutent une rédaction sans réelle concertation avec les libéraux.

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




« Ma santé 2022 » : Entretien Jean-Paul Ortiz (CSMF)

« Les hôpitaux de proximité doivent être ouverts sur la médecine de ville »

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




Le jugement des syndicats

Pour le président  du Syndicat des Médecins Libéraux (SML), l’approche des élections européennes pollue le débat sur le projet de loi « Ma santé 2022 », qui devient, selon lui « le grand défouloir préélectoral ». Il en veut pour preuve « la foire aux promesses » concrétisée dans plus de 1 500 amendements déposés lors du passage du texte devant l’Assemblée, « dont certains ont franchement un caractère démagogique ». Ainsi le « wagon d’amendements » visant à contraindre l’installation des médecins. 

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




La loi de Santé adoptée par les députés

Le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé est en cours d’examen au Parlement. Le 26 mars dernier, les députés ont adopté le texte en première lecture.

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




L’essentiel du projet de Loi

Le texte relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, dont l’examen est en cours à l’Assemblée nationale, comporte 23 articles répartis en 5 grands titres.

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




Les missions des hôpitaux de proximité se précisent

L’article 8 habilite le gouvernement à recourir à des ordonnances relatives aux missions et aux modalités de gouvernance des hôpitaux de proximité, dans le but de labelliser 500 à 600 établissements d’ici à 2022.

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




Plus de numerus clausus, mais un système alternatif encore flou

Les députés ont acté la suppression du numerus clausus et son remplacement par un système de régulation toujours exigeant où le nombre d’étudiants autorisés à poursuivre leurs études sera déterminé par les universités, après avis des ARS, au regard des besoins des territoires et des capacités de formation.

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




Une saisine probable du Conseil constitutionnel

Il est plus que probable que les parlementaires de l’opposition (Les Républicains) vont saisir le Conseil constitutionnel après le vote de la loi de santé. Et la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) a bien l’intention d’en faire autant, profitant de l’occasion pour utiliser le mécanisme de « la porte étroite », qui permet à des personnes morales ou physiques, autres que des parlementaires, d’adresser des contributions sur un projet de loi. La FHP entend ainsi expliquer comment es articles 26 (sur le SPH), 27 (sur les GHT), 27 ter (sur le contrôle des établissements de santé privés par la Cour des comptes) et 27 quinquies (sur le service d’intérêt économique général et la captation des bénéfices dits « non raisonnables ») contreviennent aux principes d’égalité ou de liberté d’entreprendre.




Le nouveau DPC entrera en vigueur en même temps que la loi

L’article 28 réformant le Développement Professionnel Continu a été adopté avec quelques modifications : elle entrera en vigueur le lendemain de la parution de la loi au Journal Officiel et la réforme du GIP-OGDPC attendra la création de la future Agence National du DPC (ANDPC).

Lors de la nouvelle lecture du projet de loi de santé à l’Assemblée Nationale, les députés ont apporté quelques retouches à l’article 28 relatif au Développement Professionnel Continu (DPC). Ainsi, un amendement du rapporteur pour le titre III, Jean-Louis Touraine (PS, Rhône), a supprimé la date de prise d’effet de la réforme, initialement prévue pour le 1er janvier 2016. Ce qui revient à prévoir son application dès la parution de la loi au Journal Officiel, début janvier 2016. Le même Jean-Louis Touraine a également fait voter un report de six mois, soit au 1er juillet 2016, de la date limite de modification de la convention constitutive du Groupement d’Intérêt Public (GIP) « Organisme Gestionnaire du DPC » (OGDPC), afin de tenir compte de la création de la future Agence Nationale du DPC (ANDPC). Les députés ont également adopté un amendement présenté par Gérard Bapt (PS, Haute-Garonne) qui précise que cette agence contribuera « à la gestion financière des programmes et actions s’inscrivant dans le cadre des orientations prioritaires pluriannuelles » du DPC.

Rappelons que, à la suite d’une concertation qui s’est déroulée à l’automne 2014 entre le ministère et les professionnels, le Gouvernement a présenté un amendement réformant en profondeur le dispositif de DPC. Cette réforme prévoit notamment une obligation triennale et non plus annuelle du DPC. La démarche de DPC devra comporter « des actions de formation continue, d’analyse, d’évaluation et d’amélioration de ses pratiques et de gestion des risques et le texte précise que « l’engagement dans une démarche d’accréditation vaut engagement dans une démarche de DPC ». Un arrêté ministériel définit « les orientations pluriannuelles prioritaires » de DPC qui comportent des orientations définies par profession ou spécialité sur la base des propositions des Conseils Nationaux Professionnels (CNP), des orientations « s’inscrivant dans la cadre de la politique nationale de santé » et des orientations relevant du dialogue conventionnel entre les professionnels et l’Assurance Maladie. Les CNP devront proposer pour chaque profession ou spécialité « un parcours pluriannuel de DPC qui permet à chaque professionnel de satisfaire à son obligation ». Les professionnels libéraux pourront choisir librement les actions qu’ils souhaiteront suivre. Un « porte-folio », dont le contenu et les modalités d’utilisation seront définis par chaque CNP, retracera « l’ensemble des actions réalisés par les professionnels au titre de leur obligation de DPC ».

Au grand dam des libéraux, la réforme prévoit aussi que « l’Université participe par son expertise pédagogique dans le domaine de la formation initiale et continue des professionnels de santé à la dimension scientifique du DPC ». C’est aux instances ordinales que reviendra le contrôle du respect de l’obligation de DPC des professionnels, dans des conditions qui seront fixées par décret en Conseil d’Etat.

C’est aussi un décret en Conseil d’Etat qui définira les modalités de présentation d’actions ou de programmes de DPC par les organismes ou structures de DPC, les modalités de leur évaluation préalable, ainsi que les modalités de sanctions à caractère financier ou administratif » en cas de « manquements constatés dans la mise en œuvre des actions et programmes ».

Enfin, la réforme prévoit la transformation de l’actuel Organisme de Gestion du DPC (OGDPC) en une Agence Nationale du DPC (ANDPC) qui « assure le pilotage du dispositif » pour l’ensemble des professionnels, et qui contribuera donc également à la gestion financière du DPC.




Après le vote de la loi de santé : Et maintenant, que vont-ils faire ?

La loi de « modernisation de notre système de santé » a été définitivement adoptée par l’Assemblée Nationale qui a réintroduit dans le texte les mesures supprimées ou modifiées par le Sénat, dont le tiers-payant généralisé et le Service Public Hospitalier, et les conditions pour en faire partie qui excluent, de fait, les établissements d’hospitalisation privée. La prochaine « épreuve » des médecins libéraux est maintenant celle des négociations qui devraient s’ouvrir au printemps prochain. Leurs représentants syndicaux ont affiché, il y a peu, leur volonté de l’affronter unis. Mais l’union qui a prévalu contre le projet de loi de santé survivra-t-elle quand il s’agira pour chacun d’obtenir le mieux -ou le « moins pire »- pour ses adhérents ?

Sans surprise de dernière minute, la loi de « modernisation de notre système de santé » a été définitivement votée par l’Assemblée Nationale le 17 décembre dernier. Quelques jours auparavant, les députés avaient adopté le texte en nouvelle lecture après y avoir rétabli l’essentiel des mesures modifiées ou supprimées par le Sénat. Le texte compte désormais 227 articles (contre 57 initialement), dont la majorité (118) a été adoptée conformes par les deux chambres.

Parmi les mesures confortées par les députés, on trouve les mesures les plus emblématiques du texte, celles qui ont déclenché la contestation des médecins. Les députés ont ainsi conforté la généralisation du tiers-payant à l’horizon 2017 et rétabli leur propre version de l’article 26 qui refonde le Service Public Hospitalier (SPH) en le définissant comme un bloc et non plus sous la forme de plusieurs missions de service public, instaurées par la loi HPST de 2009 et qui pouvaient être contractualisées. L’absence de dépassements d’honoraires fait donc partie des caractéristiques du SPH et il n’est plus question de dérogations limitées que la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) a cru un moment obtenir. Les cliniques privées dans lesquelles des médecins pratiquent des dépassements d’honoraires ne pourront donc prétendre au SPH, mais les praticiens hospitaliers pourront continuer de le faire dans le cadre de leur secteur privé au sein du service public…

 

Prévention et incohérence parlementaire

Rejeté à une très large majorité au Sénat, l’article instaurant un paquet de tabac neutre à compter du 20 mai 2016 avait été rétabli par la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale. Pour autant, son adoption par les députés l’a été de justesse. Lors d’un scrutin public et par 56 voix contre 54, ils ont rejeté huit amendements identiques de suppression de l’article sur le paquet neutre émanant des groupes UDI, des radicaux de gauche, mais aussi d’une trentaine de députés socialistes. L’article a finalement été adopté par 54 voix contre 39. Les lobbies alcooliers ont sans doute pesé plus lourd que le réseau des buralistes, car l’article du projet de loi assouplissant les conditions de la publicité sur l’alcool a été lui adopté à une large majorité par les députés, à l’issue d’un débat de plus d’une heure au cours duquel on a pu entendre des arguments assez ahurissants. « Il ne s’agit pas d’autoriser de nouveaux supports ou de nouvelles formes de publicité, mais d’apporter une sécurisation juridique et d’éviter que l’on assimile un contenu journalistique, oenotouristique, culturel ou artistique à de la publicité », a ainsi déclaré Bernard Perrut (LR, Rhône), qui semble ignorer la très, très mince frontière qui sépare souvent le reportage du publi-reportage… « Je trouve plus que regrettable, triste même, que ce soit à l’occasion d’un texte de santé publique que la loi Evin soit défaite », a déploré Marisol Touraine, qui n’est pas parvenue à convaincre : les députés ont adopté l’article par 102 voix par, 29 voix contre et 4 abstentions.

 

Et maintenant, que vont-ils faire ?

Si l’opposition au projet de loi de santé a suscité un front uni de la profession, on peut s’interroger aujourd’hui sur la pérennité de cette union affichée au lendemain des élections aux URPS lors d’une conférence de presse commune au cours de laquelle la CSMF, le SML, la FMF et Le Bloc ont affirmé leur volonté de constituer un front uni pour aborder les futures négociations conventionnelles et d’élaborer des propositions communes qu’ils présenteront ensemble le 11 février prochain, jour où devrait se tenir la « grande conférence de santé » voulue par le Premier ministre – après l’adoption de la loi de santé – et boudée par la profession.

Depuis, il semble que l’unité se fissure quelque peu. Trois syndicats de généralistes, MG France, l’UNOF et la FMF, ont tenu une conférence de presse et lancé une concertation commune en ligne pour savoir quels types d’actions les généralistes sont prêts à mettre en œuvre (contestation tarifaire, refus de télétransmission ou de recours aux téléservices de l’Assurance Maladie) pour poursuivre leur mobilisation. Mais le SML avait décliné l’invitation lors d’une réunion de son assemblée générale…

Enfin, si les responsables des cinq organisations syndicales représentatives ont bien prévu de se revoir à deux reprises d’ici février 2016 pour préparer leur plate-forme commune en vue des négociations conventionnelles, c’est bien un par un qu’ils ont défilé dans le bureau de Marisol Touraine pour égrener leurs desiderata à la ministre, à qui la loi de santé confie la mission de cadrer les négociations conventionnelles avant leur ouverture (la lettre de cadrage devant parvenir à la l’UNCAM avant le 15 décembre !). L’unité, le dialogue syndical perdureront-t-ils autour de la table des négociations conventionnelles ?




Projet de loi de santé : entretien avec Patrick Gasser (UMESPE)

Pour le président de l’Union des MEdecins SPEcialistes (UMESP-CSMF), le projet de loi de santé, qui ne fait aucune place à la médecine spécialisée de ville, est inacceptable. Les spécialistes confédérés appellent leurs confrères à refuser de pratiquer le tiers-payant généralisé obligatoire. 

Gasser encadré 600
© Pascal Wolff

381 – Après le vote du projet de loi de santé par les députés, la mobilisation des médecins libéraux est-elle toujours forte ?

Patrick Gasser. La mobilisation reste totale et sur le terrain nos confrères en attendent beaucoup de notre lutte contre cette loi défavorable aux médecins en général et au médecins spécialistes en particulier, au sujet de laquelle on ne trouve pas un mot dans le texte.

Comment peut-on faire du soin sans la médecine spécialisée ? Le grand virage ambulatoire est à prendre, pas seulement avec les médecins généralistes, mais aussi avec les spécialistes de proximité.

Ce qui est mis en place par ce projet de loi, sous des prétextes d’organisation de parcours et de proximité, c’est un système de gatekeeper. Mais on ne fait pas de l’efficience uniquement avec de la proximité, mais avec un lien fort entre le médecin généraliste et le spécialiste. On définit une prise en charge de la population dans la loi, mais on ne parle que du généraliste, pas du deuxième recours de proximité qu’est le spécialiste de ville. Il y a là, soit la volonté d’écarter les spécialistes du parcours de soins, soit une méconnaissance du rôle fondamental des spécialistes, ce qui revient à se priver de l’expertise des trois quarts des spécialistes.

Alors, oui, la mobilisation n’est pas terminée, parce que le débat sur le texte n’est pas terminé. Il est discuté au Sénat et nous ne manquerons pas de faire comprendre aux sénateurs les enjeux de cet oubli majeur de la médecine spécialisée.

Par ailleurs, la généralisation du tiers-payant a focalisé le mécontentement des médecins, mais d’autres points sont tout autant critiquables. Celui du Service Public Hospitalier (SPH), par exemple : la possibilité de dépassement d’honoraires existe dans le public, mais pas dans le privé dès lors que le privé prétend au SPH, c’est aberrant ! Si cela reste en l’état, l’UMESPE accompagnera un recours en Conseil d’Etat.

Certains syndicats appellent à un « blocage sanitaire ». L’UMESPE accompagnera-t-elle ce mot d’ordre ?

P. G. Je suis pragmatique : cela ne marchera pas. L’UMESPE ne s’associera pas à un tel mot d’ordre, pas plus qu’elle ne s’associera à un mot d’ordre de déconventionnement. En revanche, nous appelons les médecins à la désobéissance civile, c’est-à-dire à ne pas appliquer le tiers-payant obligatoire, sauf le tiers payant social, que nous pratiquons déjà et auquel nous sommes favorables.




Projet de loi de santé : la mobilisation ne faiblit pas après le vote à l’Assemblée

Après l’adoption du projet de loi de santé par l’Assemblée Nationale, le texte a été transmis au Sénat ou son examen pourrait avoir lieu lors de la session extraordinaire de juillet. En attendant, les médecins, toujours aussi hostiles à ce texte malgré les amendements apportés par le Gouvernement, continuent la lutte. 

381 – Les députés ont adopté le projet de loi de santé – rebaptisé projet de loi « de modernisation de notre système de santé » – assez profondément amendé par le Gouvernement à la suite de la concertation engagée avec les représentants des médecins à la mi-janvier, mais sans que ces modifications satisfassent pour autant les médecins libéraux qui restent radicalement opposés au texte en général et à certaines mesures clés, en particulier portant sur le tiers-payant généralisé, le service territorial de santé au public, le Service Public Hospitalier (SPH) et les pratiques avancées. Le texte va maintenant être examiné par le Sénat, et les syndicats médicaux comptent sur les sénateurs pour l’amender fortement dans le sens de ce qu’ils souhaitent. Ils ont pour cela exercer un lobbying adéquat.

Une radicalisation de la mobilisation

Reste que la procédure d’urgence ayant été décrétée par le Gouvernement sur ce projet de loi, c’est la Commission Paritaire Mixte qui aura le dernier mot, et les médecins savent bien que l’essentiel du texte passera en l’état. Aussi la mobilisation ne faiblit-elle pas. Chez certains même, elle se radicalise. Ainsi, trois syndicats – le SML, la FMF, Le BLOC –, l’Union Française pour une Médecine Libérale (UFML) et des organisations du Mouvement Pour la Santé de Tous (MPST) ont-ils annoncé au cours d’une conférence de presse tenue devant l’Assemblée Nationale quelques heures avant qu’elle ne vote le texte, leur volonté d’organiser un « blocage sanitaire » national dans les prochaine semaines, qui consisterait en un arrêt complet d’activité sans régulation ni PDS. Le recours au déconventionnement a également été évoqué. Pour l’instant, les autres syndicats ne les ont pas suivis sur cette voie du « blocage sanitaire ».

MG France a lancé un mot de boycott du tiers-payant, quelques jours avant que la CSMF n’appelle les médecins libéraux à la « désobéissance civile », c’est-à-dire à refuser le futur tiers-payant généralisé obligatoire (voir page suivante notre entretien avec Patrick Gasser, président de l’UMESPE). La Confédération incite également les médecins à « interpeller leurs élus », en particulier les sénateurs, à poursuivre la politique de la chaise vide dans les commissions conventionnelles locales ou régionales « tant que des négociations tarifaires urgentes ne sont pas entamées » et à « informer leurs patients, la population » sur « cette mauvaise loi pour leur santé ».




Les points majeurs du projet de loi de santé

381 – Les « communautés professionnelles de territoire »

© Andres Rodriguez
© Andres Rodriguez

L’article 12 du projet qui instaurait un « service territorial de santé au public », avait suscité les plus vives critiques des médecins libéraux qui redoutaient la main mise des ARS sur leur exercice. Après amendements, l’article 12 adopté par les députés traite désormais de l’équipe de soins primaires de premier recours définie comme « un ensemble de professionnels de santé constitué autour de médecins généralistes de premier recours, choisissant d’assurer leurs activités de soins de premier recours sur la base d’un projet de santé qu’ils élaborent. Elle peut prendre la forme d’une structure d’exercice coordonnée ». L’équipe « contribue à la structuration des parcours de santé des usagers » ; son projet de santé a pour objet « par une meilleure coordination des acteurs, l’amélioration et la protection de l’état de santé de la population, ainsi que la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé ». Pour cela, des professionnels de santé « peuvent décider de se constituer en communauté professionnelle territoriale de santé », prévoit  l’amendement sur ces communautés qui devient un nouvel article à la suite de l’article 12. A défaut d’initiative des professionnels, c’est l’ARS qui peut prendre « en concertation avec les URPS, les initiatives nécessaires à la constitution » d’une telle communauté.

Pour « répondre aux besoins identifiés dans le cadre des diagnostics territoriaux » et « sur la base des projets de santé des équipes de soins primaires et des communautés professionnelles territoriales de santé », l’ARS peut conclure des « contrats territoriaux de santé ». Ce contrat « définit l’action assurée par ses signataires, leurs missions et engagements, les moyens qu’ils y consacrent et les modalités de financement, de suivi et d’évaluation ». Pour leur réalisation, l’ARS peut attribuer des crédits du Fonds d’Intervention Régional (FIR).

Les pratiques avancées

© Endostock
© Endostock

L’article 30 définit « l’exercice en pratique avancée ». Craignant la remise en cause de leur rôle, les médecins avaient fortement contesté cet article. Un amendement gouvernemental précise donc que les professionnels paramédicaux peuvent exercer en pratique avancée « au sein d’une équipe de soins primaires coordonnée par le médecin traitant ou au sein d’une équipe de soins en établissement coordonnée par un médecin ». De même, le terme de « diagnostic » a été ôté des activités du professionnel en pratique avancée et remplacé par celui de « conclusion clinique ». L’article stipule qu’un futur texte d’application devra détailler « les conditions et les règles de l’exercice en pratique avancée », texte d’application qui devra être élaboré après avis de l’Académie de médecine et « des représentants des professionnels de santé concernés ».

Tiers-payant généralisé

médecine,consultation,argent,soins,business,crise,dépression
© Fotolia

L’article 18 relatif à la généralisation du tiers-payant dans sa nouvelle mouture, détaille le calendrier de sa mise en œuvre progressive. Il prévoit la rédaction d’un rapport commun par l’Assurance Maladie et les complémentaires santé « au plus tard le 31 octobre 2015 », qui devra présenter les solutions techniques pour la mise ne place du dispositif. « Il détermine les solutions techniques permettant d’assurer aux professionnels de santé la simplicité de l’utilisation, la lisibilité des droits et la garantie du paiement ».

Le rapport devra mentionner les « calendriers et modalités de test des solutions envisagées au cours de l’année 2016, en vue de parvenir à ouvrir à tous le bénéfice effectif du tiers-payant à compter du 1er janvier 2017 ». Pour ce qui est du calendrier, il est le suivant : à partir du 1er juillet 2016, les professionnels libéraux pourront pratiquer le tiers-payant pour l’ensemble des assurés pris en charge à 100 % par l’Assurance Maladie, en plus des bénéficiaires de la CMU et de l’ACS. Ils auront l’obligation de le faire à compter du 31 décembre 2016.

Dès le 1er janvier 2017, ils pourront proposer le tiers-payant à l’ensemble de leurs patients et seront obligés de le faire à partir du 30 novembre 2017, quand cela deviendra un droit pour le patient. Si l’article 18 dans sa nouvelle rédaction ne prévoit aucune sanction à l’égard des professionnels récalcitrants – comme s’y était engagée Marisol Touraine – en revanche, il rend impérative pour le médecin l’application du tiers-payant généralisé alors que la version initiale renvoyait les modalités de sa mise en œuvre à la négociation conventionnelle.

Le service public hospitalier

Doctors
© Serguei Kovalev

Un amendement à l’article 26 édicte les conditions d’habilitation et d’association au SPH. Elles sont conformes à celles qu’avait indiquées Marisol Touraine fin décembre et qui avaient conduit la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) à suspendre son mouvement de grève des cliniques. Les établissements privés sont habilités, sur leur demande, par le directeur général de l’ARS « s’ils s’engagent, après avis favorable conforme de la CME et dans le cadre de leurs négociations contractuelles à exercer l’ensemble de leur activité dans les conditions énoncées ».

Peuvent être « associés » au SPH les établissements privés, autres que les ESPIC et les cliniques habilités à assurer le SPH, qui sont autorisés à exercer une activité de soins prenant en charge des patients en situation d’urgence. « L’ensemble des cliniques disposant d’une activité d’urgences » peuvent donc être associé au SPH mais « uniquement pour cette activité spécifique ». L’autorisation et l’association au SPH peuvent être « suspendues ou retirées » en cas de manquement aux obligations du SPH, et une pénalité financière peut être prononcée.

En outre, l’amendement précise qu’il n’existe aucun lien entre le SPH et le droit des autorisations, ce qui était une inquiétude des cliniques privées. En revanche, l’article 26 s’en tient à la stricte absence de dépassements d’honoraires pour prétendre au SPH. Il n’est plus question  de possibles « dérogations limitées » évoquées en fin d’année 2014 par la ministre lors des négociations avec la FHP.

 

Le Sunshine Act à la française renforcé

En application de la loi « Bertrand » de décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, à ce jour, les groupes pharmaceutiques ont l’obligation de rendre publiques les conventions passées, notamment avec les professionnels de santé, mais pas le détail des rémunération versées. Un amendement gouvernemental au projet de loi de santé « autorise la publication des rémunérations perçues par les professionnels de santé dans le cadre des conventions signées avec les laboratoires pharmaceutiques ». Marisol Touraine a expliqué qu’il s’agissait d’aller « jusqu’au bout de la logique de transparence » et de « mettre fin aux soupçons en permettant la mise en ligne des rémunérations versées dans le cadre de collaborations entre industries et professionnels de santé ». Cet amendement intervient après la révélation de Mediapart concernant le Pr François Lhoste qui, alors qu’il était membre du Comité Economique du Médicament (CEM), devenu Comité Economique des Produits de Santé (CEPS) en 2000, a perçu des rémunérations du groupe Servier.

 

Le gouvernement pourra réformer l’Ordre par ordonnance

Dans ce vaste fourre-tout qu’est devenu au fil des mois le projet de loi de santé, quelques mesures sont passées inaperçues. Ainsi cet amendement du gouvernement, adopté par le commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale et voté par les députés, l’autorisant à réformer par ordonnance le fonctionnement et l’organisation des ordres de professions de santé. les modifications envisagées pour les ordres professionnels visent notamment à faire évoluer les compétences de leurs organes ainsi que leur composition, à alléger les procédures qu’ils mettent en œuvre, à renforcer leurs moyens « afin de veiller au respect de la législation relative aux avantages consentis par les entreprises ». Ces évolutins « prendront notamment en compte les recommandations faires par la Cour des Comptes s’agissant des pharmaciens et des médecins ». S’agissant de ces derniers, le rapport annuel de la Cour des Comptes de 2012 sur l’application des Lois de Financement de la Sécurité Sociale s’était montré sévère, jugeant « peu efficace » la prévention des conflits d’intérêts assumée par l’Ordre des médecins et qualifiait sont rôle de « très décevant » en termes de contrôle du respect de la déontologie médicale.




Loi de santé : MIG – le Gouvernement mis face à ses contradictions

La commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale a adopté un amendement de la députée Dominique Orliac (RRDP, Lot) demandant au Gouvernement de remettre au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la loi de santé, un rapport sur les conditions de mise en œuvre d’une MIG pout tout établissement de santé, public ou privé, s’organisant pour fonctionner sans aucun dépassement d’honoraires. Dans son amendement, la députée rappelle que les établissements publics ou privés «  qui fonctionnent avec une activité libérale de PH ou de médecins libéraux bénéficient de ressources additionnelles substantielles, avec la perception d’une redevance au titre de l’exercice libéral ». Pour elle, cet état de fait rend « particulièrement délicat » le « fait pour un établissement de santé privé fonctionnant avec des médecins libéraux de s’engager sur les critères actuels de l’habilitation au SPH, puisque l’habilitation de droit des établissements publics de santé ne comporte pas d’obligations concernant l’éventuelle activité libérale du PH ou de PUPH ». Et pan sur le bec du Gouvernement qui est resté sourd à l’argumentation des médecins libéraux qui, dès le début, ont souligné que les dépassements d’honoraires existent à l’hôpital public sans que soit mis en cause sa participation au SPH. Et l’on les souvient que c’est à l’hôpital public que l’on constate les dépassements les plus forts dépassements…

380




Loi de santé : Jean-Paul Ortiz – « La mobilisation continue »

La grande manifestation du 15 mars dernier n’a guère changé la donne et vous estimez toujours que les médecins ne sont pas entendus par le Gouvernement ?

380 – Jean-Paul Ortiz. Il faut d’abord souligner le caractère historique de cette manifestation, qui a été un grand succès. Mais face à cette mobilisation, la seule annonce que le Premier ministre nous a faite lorsqu’il nous a reçus, c’est l’organisation d’une conférence nationale de la santé, de surcroît après l’adoption de la loi ! Ce n’est pas une réponse à la hauteur des revendications et des enjeux de santé et la CSMF considère cette proposition comme une insulte à tous les médecins de terrain. Certes, certaines des propositions émises dans les groupes de concertation ont été reprises dans les amendements, mais les points de blocage majeurs demeurent : l’obligation du tiers-payant est inscrite dans la loi, les petits pas faits concernant le service public hospitalier ne garantissent toujours pas l’égalité de traitement des cliniques par rapport à l’hôpital public. Quant à la médecine spécialisée libérale, on ne voit toujours pas bien sa place, et cela constitue un problème majeur. Le rapport Decalf contient des pistes intéressantes et même des propositions qui auraient pu être intégrées dans la loi. Mais la ministre n’y a fait aucune allusion, c’est comme si ce groupe de travail n’avait pas existé ! Bref, tout cela alimente notre colère et la CSMF a donc décidé d’appelé à une journée Santé Morte le 31 mars, jour où commence l’examen du projet de loi à l’Assemblée Nationale.

 

La mobilisation est donc toujours à l’ordre du jour ?

J-P. O. Bien sûr ! Il est important de souligner que nous n’en sommes qu’au début du processus parlementaire. La CSMF mène le combat sur le terrain parlementaire en soumettant à des élus de tous bords des amendements pour modifier le projet de loi sur des points essentiels. Il sortira de l’Assemblée nationale un texte qui sera ensuite examiné par le Sénat et je ne doute pas que les sénateurs le modifieront en profondeur. Et ensuite, le texte sera examiné en commission mixte paritaire. Nous sommes donc partis pour de longues semaines, voire plusieurs mois de mobilisation, malgré la procédure accélérée décidée par le Gouvernement. La mobilisation vase poursuivre sous des formes diverses.




Loi de santé : les (vaines) propositions de la mission Decalf

Dans le cadre de la concertation sur le projet de loi de santé, le groupe de travail piloté par Yves Decalf sur la médecine spécialisée libérale a émis un certain nombre de propositions pour amender différents articles. 380 – Concernant le parcours de soins coordonné, la mission estime « nécessaire de définir ce parcours avec plusieurs niveaux et en particulier la place du médecin traitant et du médecin spécialiste » et propose un article spécifique sur les missions du médecin de deuxième recours, dont les principales sont :

. « Une analyse approfondie diagnostique, thérapeutique et de suivi, propre aux compétences de chaque discipline. Il peut être médecin correspondant dans le suivi conjoint, l’élaboration du projet de soins, ou médecin consultant pour un avis d’expertise, en liaison avec le médecin traitant. »

. « Une participation à l’offre de soins ambulatoires de proximité, à la DS dans le domaine qui le concerne, en fonction des besoins de santé du territoire, et à l’optimisation des hospitalisations. »

. « Une contribution à la prévention, à l’éducation des patients et à la formation médicale initiale et continue. »

L’Union de MEdecins SPEcialistes (UMESPE-CSMF) déplore que la ministre de la Santé ait passé sous silence ce rapport et que la nouvelle rédaction du projet ne porte aucune trace de ses propositions. Pour l’UMESPE, « le Gouvernement reste sur des schémas pensés par la technostructure d’Etat : le médecin généraliste porte d’entrée et régulateur du parcours du patient, l’hôpital offreur de soins et seul lieu d’expertise des prises en charge de la maladie ». Les spécialistes confédérés voient là « la volonté de ce Gouvernement et de Madame la Ministre d’écarter la médecine spécialisée du soin de proximité ».




Loi de santé : les médecins ne lâchent pas prise

« Historique ». C’est ainsi que la profession a qualifié la grande manifestation du 15 mars dernier à Paris qui a vu défiler environ 40 000 (19 000 selon la préfecture de police !) médecins libéraux, internes et étudiants en médecine sous la bannière « Tous unis pour la santé de demain, non au projet de loi de santé ». FullSizeRender 300Mais l’ampleur de cette manifestation n’a guère fait bouger les lignes et Marisol Touraine est restée inflexible sur un certains nombres de mesures contenues dans le projet de loi de santé, qui sont précisément les plus inacceptables pour les médecins. L’entrevue des principaux syndicats médicaux avec le Premier ministre quelques jours après la manifestation n’a pas été de nature à faire changer les médecins d’avis quant à « l’autisme » gouvernemental. Manuel Valls leur a bien assuré que « les médecins peuvent, doivent avoir confiance dans le Gouvernement », juste avant de leur confirmer que le tiers-payant généralisé est « évidemment maintenu » mais de promettre « un système simple ». Et d’annoncer d’une conférence nationale sur la santé qui se tiendrait à l’automne prochain ou en 2016 sur « l’avenir du métier médical et paramédical » et « l’exercice du métier ». On croit rêver : une fois que la messe est dite, on réfléchit aux intentions ! Les syndicats médicaux n’ont pas apprécié. A l’issue de la rencontre, la CSMF a annoncé une nouvelle journée de grève le 31 mars et réclame désormais « l’abandon total » du projet de loi. Et l’unité syndicale ne faiblit pas. Pour la FMF, « cette journée doit être une nouvelle journée de protestation unitaire pour nous, les médecins libéraux », et appelle « à Paris à un rassemblement de protestation devant l’Assemblée Nationale de 13 h à 16 h les 31 mars et 1er avril » et « à la réalisation d’actions de protestation dans toutes les régions de France ». Quant au SML, il participera à toutes les actions menées ce jour-là, au sein du Mouvement pour la Santé Tous, qui regroupe 45 syndicats de professionnels des santé et organisations étudiantes.

La commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale a adopté le 19 mars dernier le projet de loi de santé -rebaptisé projet de loi « de modernisation de notre système de santé »- à l’issue d’un marathon durant lequel les députés ont adopté 358 amendements (sur les 1 688 déposés sur le texte), dont 57 étaient des amendements gouvernementaux. Le texte est donc passé de 57 à 132 articles, les députés ayant voté 77 articles additionnels et en ayant supprimé deux, dont celui relatif à la vaccination par les pharmaciens. Certains articles adoptés par la commission avaient été profondément remaniés par le Gouvernement à la suite de la concertation engagée avec les représentants des médecins à la mi-janvier. Ils portent sur des mesures clés, fortement contestées par les professionnels : le tiers-payant généralisé, le service territorial de santé au public, le service public hospitalier (SPH) et les pratiques avancées.

 

Tiers-payant généralisé

L’article 18 relatif à la généralisation du tiers-payant dans sa nouvelle mouture, détaille le calendrier de sa mise en œuvre progressive. Il prévoit la rédaction d’un rapport commun par l’Assurance Maladie et les complémentaires santé « au plus tard le 31 octobre 2015 », qui devra présenter les solutions techniques pour la mise ne place du dispositif. « Il détermine les solutions techniques permettant d’assurer aux professionnels de santé la simplicité de l’utilisation, la lisibilité des droits et la garantie du paiement ». Le rapport devra mentionner les « calendriers et modalités de test des solutions envisagées au cours de l’année 2016, en vue de parvenir à ouvrir à tous le bénéfice effectif du tiers-payant à compter du 1er janvier 2017 ». Pour ce qui est du calendrier, il est le suivant : à partir du 1er juillet 2016, les professionnels libéraux pourront pratiquer le tiers-payant pour l’ensemble des assurés pris en charge à 100 % par l’Assurance Maladie, en plus des bénéficiaires de la CMU et de l’ACS. Ils auront l’obligation de le faire à compter du 31 décembre 2016. Dès le 1er janvier 2017, ils pourront proposer le tiers-payant à l’ensemble de leurs patients et seront obligés de le faire à partir du 30 novembre 2017, quand cela deviendra un droit pour le patient. Si l’article 18 dans sa nouvelle rédaction ne prévoit aucune sanction à l’égard des professionnels récalcitrants –comme s’y était engagée Marisol Touraine- en revanche, il rend impérative pour le médecin l’application du tiers-payant généralisé alors que la version initiale renvoyait les modalités de sa mise en œuvre à la négociation conventionnelle.

 

Les pratiques avancées

L’article 30 définit « l’exercice en pratique avancée ». Craignant la remise en cause de leur rôle, les médecins avaient fortement contesté cet article. Un amendement gouvernemental précise donc que les professionnels paramédicaux peuvent exercer en pratique avancée « au sein d’une équipe de soins primaires coordonnée par le médecin traitant ou au sein d’une équipe de soins en établissement coordonnée par un médecin ». De même, le terme de « diagnostic » a été ôté des activités du professionnel en pratique avancée et remplacé par celui de « conclusion clinique ». L’article stipule qu’un futur texte d’application devra détailler « les conditions et les règles de l’exercice en pratique avancée », texte d’application qui devra être élaboré après avis de l’Académie de médecine et « des représentants des professionnels de santé concernés ».

 

Le service public hospitalier

Un amendement à l’article 26 édicte les conditions d’habilitation et d’association au SPH. Elles sont conformes à celles qu’avait indiquées Marisol Touraine fin décembre et qui avaient conduit la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) à suspendre son mouvement de grève des cliniques. Les établissements privés sont habilités, sur leur demande, par le directeur général de l’ARS « s’ils s’engagent, après avis favorable conforme de la CME et dans le cadre de leurs négociations contractuelles à exercer l’ensemble de leur activité dans les conditions énoncées ». Peuvent être « associés » au SPH les établissements privés, autres que les ESPIC et les cliniques habilités à assurer le SPH, qui sont autorisés à exercer une activité de soins prenant en charge des patients en situation d’urgence. « L’ensemble des cliniques disposant d’une activité d’urgences » peuvent donc être associées au SPH mais « uniquement pour cette activité spécifique ». L’autorisation et l’association au SPH peuvent être « suspendues ou retirées » en cas de manquement aux obligations du SPH, et une pénalité financière peut être prononcée. En outre, l’amendement précise qu’il n’existe aucun lien entre le SPH et le droit des autorisations, ce qui était une inquiétude des cliniques privées. En revanche, l’article 26 s’en tient à la stricte absence de dépassements d’honoraires pour prétendre au SPH. Il n’est plus question de possibles « dérogations limitées » évoquées en fin d’année 2014 par la ministre lors des négociations avec la FHP.

 

Les « communautés professionnelles de territoire »

L’article 12 du projet qui instaurait un « service territorial de santé au public » avait suscité les plus vives critiques des médecins libéraux qui redoutaient la main mise des ARS sur leur exercice. Un premier amendement gouvernemental le renomme donc un des chapitres du projet « Promouvoir les soins primaires et favoriser la structuration des parcours de santé ». Deux autres amendements gouvernementaux visent à créer les « communautés professionnelles territoriales de santé » et à définir la notion d’ « équipe de soins primaires ». Cette dernière « est un ensemble de professionnels de santé constitué autour de médecins généralistes de premier recours, choisissant d’assurer leurs activités de soins de premier recours sur la base d’un projet de santé qu’ils élaborent. Elle peut prendre la forme d’une structure d’exercice coordonnée ». L’équipe « contribue à la structuration des parcours de santé des usagers » ; son projet de santé a pour objet « par une meilleure coordination des acteurs, l’amélioration et la protection de l’état de santé de la population, ainsi que la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé ». Pour cela, des professionnels de santé « peuvent décider de se constituer en communauté professionnelle territoriale de santé », prévoit l’amendement sur ces communautés qui devient un nouvel article à la suite de l’article 12. A défaut d’initiative des professionnels, c’est l’ARS qui peut prendre « en concertation avec les URPS, les initiatives nécessaires à la constitution » d’une telle communauté.

380




Projet de loi de santé : les médecins continuent le combat

Malgré un mouvement de grève largement suivi quoi qu’en dise la ministre de la Santé, Marisol Touraine, campe sur ses positions et n’accorde que des promesses verbales au gré de ses rencontres avec les différents représentants des médecins. En l’absence d’engagement ministériel pour une réécriture globale du texte, les médecins ne désarment pas et annoncent même un durcissement de leur mouvement de protestation. 

grève378 – « Circulez, il n’y a rien à voir ! ». C’est à peu près ainsi que l’on pourrait résumer l’attitude de Marisol Touraine confrontée à la grève des médecins libéraux de la fin de l’année 2014. Une grève qui a été largement suivie, avec 50 à 80 % des cabinets fermés voire 100 % de fermetures dans certaines zones. Une grève qui a eu un impact certain sur la régulation des centres 15, qui ont enregistré un afflux d’appels, et suscité des tensions dans plusieurs services d’urgence, comme en ont témoigné certains titres de la presse régionale et le président de Samu-urgences France, le Dr François Braun, qui a confirmé « un nombre d’appels très supérieur ». Qu’importe : pour la ministre de la Santé « aucune affluence anormale dans les services d’urgence n’a été observée ».

Minimiser la portée de la grève

Très habilement, Marisol Touraine s’est ingéniée à minimiser le mouvement des médecins libéraux dans ses déclarations, à interrompre la grève des urgentistes hospitaliers par la signature d’un protocole dont le coût est estimé à 90 millions d’euros par  la Fédération Hospitalière de France (FHF) et à déminer celle, à venir, des cliniques privées en négociant avec la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) qui, contre quelques promesses concernant les conditions de leur participation au service public hospitalier, a levé son mot d’ordre de grève illimitée prévu pour le mois de janvier, au grand dam des spécialistes de bloc et des syndicats engagés dans le conflit qui ont été mis devant le fait accompli.

Réécrire intégralement le projet de loi

Cette stratégie ministérielle, qui consiste à éteindre un feu après l’autre, est bien connue et en cache souvent une autre : diviser pour mieux régner. Un piège dans lequel les médecins libéraux sont déterminés à ne pas tomber. Reçus les uns après les autres par la ministre, aucun syndicat n’est sorti satisfait de l’entrevue. Le mouvement de protestation est donc entré dans sa deuxième phase avec la grève administrative : grève de la télétransmission et de l’accès à l’espace pro du site Ameli.

L’Assurance Maladie n’a pas caché qu’elle n’avait plus les effectifs suffisants pour faire face à un flot important de feuilles de soins papier et annoncé jusqu’à un mois de délai pour le remboursement des assurés. Selon les dernières indications de la CNAMTS, la télétransmission serait en baisse de 12 %.

Outre la poursuite de cette « guérilla administrative », d’autres actions sont envisagées. MG France annonce une nouvelle journée de grève pour le 5 février prochain. La CSMF et le SML organisent des actions de protestation la semaine du 26 au 31 janvier et lancent un mot d’ordre de grève de la PDS pour le week-end du 31 janvier au 1er février. Les deux centrales ont également décidé d’appeler à une grande manifestation nationale en mars prochain, avant l’examen du projet de loi de santé au Parlement.

Et la constitution de huit groupes de travail avec les professionnels de santé (encadré ci-dessous) n’est pas de nature à désarmer la profession, la ministre ne cédant rien concernant la généralisation du tiers-payant et renvoyant à la négociation conventionnelle une très hypothétique revalorisation tarifaire. Dans la mesure où l’examen du projet reste fixé au début avril et fera l’objet d’une procédure accéléré, la profession subodore que cette ouverture sur la réécriture de la loi de santé sera « probablement une concertation en trompe d’œil », selon l’expression de la CSMF.

Les libéraux restent donc mobilisés. Les hospitaliers aussi. Inquiets quant à l’évolution possible du projet de loi, ils attendent de Marisol Touraine des garanties écrites, qui ne sont pas les mêmes, on s’en doute, que celles des libéraux. Mais faute de cet engagement écrit, la communauté hospitalière pourrait, elle aussi, donner du fil à retordre à la ministre en demandant le retrait du projet (notre rubrique « Hôpital » 378).

 

Quatre groupes de travail plus deux

Marisol Touraine a annoncé la constitution de quatre groupes de travail destinés à faire évoluer certaines mesures clés du projet de loi. Le premier, piloté par Anne-Marie Brocas, la présidente du Haut Conseil pur l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM), se penchera sur la généralisation du tiers-payant. Le second planchera sur « l’organisation des soins de proximité dans les territoires » sous la houlette de Jean-François Thébaut, membre du Collège de la HAS (et ex-président du SNSMCV) et de Véronique Wallon, directrice générale de l’ARS Rhône-Alpes. Ancien directeur de l’ex-Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé (ANAES, absorbée par la HAS), le Pr Yves Matillon dirigera les travaux du troisième groupe qui concerneront l’évolution de l’article portant sur les fameuses « pratiques avancées ». Le quatrième groupe devra « finaliser » l’article relatif au service public hospitalier « afin de permettre, de façon limitée, à certains établissements privés d’être habilités service public hospitalier », tout en préservant « l’identité » de ce dernier. Il abordera aussi la place des spécialistes libéraux dans ces établissements. Il sera piloté par le président de la conférence des CME de l’hospitalisation privée, Jean-Luc Baron, le directeur de la Sécurité Sociale (DSS), Thomas Fatome, et le directeur général de l’Offre de Soins (DGOS), Jean Debeaupuis.

Deux autres groupes ont été constitués pour une réflexion sur le rôle des médecins libéraux. Pour le premier, piloté par Pierre-Louis Druais, président du Collège de la Médecine Générale, cette réflexion visera à « donner au médecin généraliste et au médecin traitant toute leur place dans notre système de soins et à améliorer le parcours des patients en ville ». Le second groupe, dirigé par Yves Decalf, cadre de la CSMF et ancien président de la Commission de Hiérarchisation des Actes et Prestations (CHAP), mènera sa réflexion sur « le rôle de la médecine spécialisée libérale ».




Projet de loi de santé : entretien de Jean de Kervasdoué

Pour le spécialiste en économie de la santé et ex-directeur des Hôpitaux le projet de loi de santé évite les réflexions de fond sur le ticket modérateur, la répartition entre régime obligatoire et régime complémentaire et les inégalités, non d’accès aux soins, mais des soins eux-mêmes.

Kervasdoue300378 – Vos diverses déclarations témoignent d’un jugement négatif sur le projet de loi de santé ?

Jean de Kervasdoué. En effet. Les quelques bonnes choses qu’il contient ne relevaient pas forcément d’un texte de loi, comme par exemple les mesures concernant la prévention. Elle prévoit la généralisation du tiers-payant en considérant le partage entre régime obligatoire et régime complémentaire comme acquis alors qu’il n’en est rien. Aucune réflexion n’est engagée sur ce point pourtant crucial, pas plus que sur le ticket modérateur, qui ne modère rien du tout.

Quant à l’aspect technique de la mise en place du tiers-payant généralisé, les obstacles techniques sont loin d’être surmontés et il ne faut pas oublier que les pharmaciens qui le pratiquent depuis longtemps rencontrent des problèmes sur 15 % des paiements, ce qui est loin d’être négligeable.

Enfin, on oublie que l’inégalité la plus lourde est moins l’inégalité d’accès aux soins que l’inégalité de la qualité des soins sur le territoire. Pour schématiser, on peut dire qu’un clochard qui est accidenté devant un bon établissement sera parfaitement soigné sans débourser un sou, alors qu’un cadre accidenté à proximité d’une offre médicale de médiocre qualité a moins de chance !

Sur les données de santé, c’est dramatique, le projet est très régressif. En gros, on dit : « C’est la liberté que de réduire l’accès aux données » ! Le déficit de l’Assurance Maladie, il n’en est pas question et la solidarité se traduit par la dette qu’on laisse aux générations à venir. En fait, on raisonne toujours sur le modèle implicite de 1945, époque où en gros, la vie se divisait en trois périodes, une qui allait de la naissance à l’adolescence, puis une longue période de travail et enfin, la retraite. C’est oublier qu’aujourd’hui vient s’ajouter une période allant de l’adolescence à environ 27 ans, âge d’entrée dans la vie active, et qu’à partir de 57 ans en moyenne, la moitié des gens ne travaille plus. Il serait donc temps d’asseoir les cotisations sur autres choses que les salaires. Bref, la loi passe à côté de l’essentiel : la qualité des soins, le contrôle des pratiques et la stabilisation des bases financières de la protection sociale en cette période très particulière de vieillissement des « baby-boomers ».

Les médecins dénoncent un pouvoir excessif donné aux ARS. Qu’en pensez-vous ?

J de K. Nicolas Sarkozy a dit qu’il fallait un chef à l’hôpital et il a décidé que ce serait lui, enfin, l’Etat. La loi HPST est une loi soviétique de ce point de vue : l’hôpital est intégré dans l’Etat et les cliniques sont devenues les « fermiers » – au sens du fermage – des ARS. Et la gauche, qui n’aurait jamais pu faire la loi HPST, en est ravie et n’a rien changé !




Projet de loi de santé : entretien de Claude Le Pen

Pour l’économiste de la santé, professeur à l’université Paris-Dauphine, le projet de loi de santé est une accumulation de mesures qui pouvaient se prendre par simples décrets et arrêtés. Un texte qu’il juge très en retrait des ambitions de la Stratégie Nationale de Santé.

Le Pen300378 – Quelle est votre analyse du projet de loi de santé ?

A l’heure actuelle, le projet est un peu à la dérive sans que l’on sache vraiment ce qu’il y aura dedans in fine, puisque des négociations sont en cours avec divers partenaires, dont l’issue est assez aléatoire. Ce que l’on peut dire du texte en l’état, c’est qu’il est assez fourre-tout, manquant de cohérence et d’ensemble et s’apparentant davantage à ce qu’on appelait un DMOS (Diverses Mesures d’Ordre Social).

Quelle est votre position à l’égard du tiers-payant généralisé qui fait l’unanimité contre lui chez les médecins ?

C. L P. Ses conséquences économiques et sociales sont exagérées d’un côté comme de l’autre : c’est une mesure qui n’est pas aussi sociale qu’il y paraît, ce n’est pas la médecine gratuite. Mais c’est une mesure hautement politique – pour  ne pas dire démagogique – et qui ne coûte rien : on fait du social à bon compte ! Il faut beaucoup relativiser son effet inflationniste qui n’a jamais été absolument démontré. Il n’existe aucun tiers-payant aux Etats-Unis où les dépenses de santé sont pourtant bien plus importantes que dans certains pays où la généralisation du tiers-payant est la règle.

En revanche, il est vrai qu’il va être très compliqué à mettre en place, chronophage pour les médecins qui vont devoir vérifier les remboursements et avec des délais de remboursement variables selon les diverses mutuelles et assurances. Son bon fonctionnement nécessite une importante logistique qui n’existe pas ; il va falloir la mettre en place et qu’elle marche ! Enfin, le Gouvernement a largement sous-estimé la portée symbolique de la disparition du paiement direct de l’acte par le patient au médecin et, le moins que l’on puisse dire, c’est que cette décision aurait pu être mieux gérée, de façon plus participative. La réaction négative des médecins est d’autant plus forte que le projet de loi contient d’autres dispositions, notamment celles concernant l’encadrement du pouvoir conventionnel par les ARS, qui annoncent un changement de système.

Les conditions de participation des cliniques privées au Service Public Hospitalier (SPH) sont un autre point de contestation. Qu’en pensez-vous ?

C. L P. On revient sur la définition de la loi HPST, on revient à une conception très juridique du Service Public Hospitalier : c’est le statut qui fait le service public plus que les missions. C’est une vision conception rétrograde et l’on pourrait avoir une vision un peu plus moderne du service public. Mais le projet de loi fait montre d’une vision très idéologique de l’hôpital public. Forcer les hôpitaux à se regrouper entre eux, par exemple, ne me semble pas très pertinent ; ils ont parfois plus de difficultés à se regrouper entre eux qu’avec des établissements privés. C’est une vision très régalienne.

Au total, vous êtes très critique vis-à-vis de ce projet de loi ?

C. L P. Effectivement. Par rapport à ce qu’annonçait la Stratégie Nationale de Santé, on est loin du compte. Où est la « révolution des soins primaires » ? La médecine de proximité est très absente du projet. Concernant les données de santé, on n’a pas l’impression de s’acheminer vers un dispositif à la hauteur des enjeux, avec notamment une crainte excessive de la possible ré-identification des patients. C’est la même chose concernant la partie sur la prévention : les mesures annoncées ne nécessitaient pas une grande loi. Il s’agit de mesures qui pouvaient se suffire de décrets ou d’arrêtés. Sans anticiper sur ce que sera le contenu du projet qui sera débattu en avril, il semble quand même que toute cette effervescence actuelle va accoucher d’une loi compliquée, une « loi patchwork » contenant une kyrielle de mesures déconnectées les unes des autres, après quelques concessions accordées aux uns et aux autres, mais qui ne satisferont personne. Encore une fois, une loi en rupture totale avec les ambitions affichées dans la Stratégie Nationale de Santé. Et c’est sans parler du curieux processus d’élaboration de ce projet, sans concertation ni négociation préalable.




Mobilisation générale contre la loi santé

Le report de l’examen du projet de loi en avril et la concertation annoncée n’entame pas la détermination des médecins libéraux à combattre un texte qu’ils refusent en l’état.

D’autant que les rares évolutions possibles évoquées par Marisol Touraine lors des entrevues avec les responsables syndicaux restent verbales et superficielles. Tant que rien dans la rédaction du projet de loi ne changera, les médecins maintiendront la pression et, passée la grève de cette fin d’année qui sera sans doute très largement suivie, ils n’hésiteront pas à durcir leurs actions.

377 – La ministre de la Santé se souviendra sans doute de son Noël 2014 et du gros « cadeau » déposé sous le sapin par la profession médicale sous forme d’un mouvement de grève qui touche la quasi-totalité des catégories de médecins : après les généralistes et les spécialistes libéraux, les urgentistes privés ont suivi, ainsi que les urgentistes du secteur public de l’AMUF, les anesthésistes-réanimateurs du SNPHAR et les cliniques qui prendront le relais courant janvier ! Les hospitaliers publics pour des motifs différents : le temps de travail et l’attractivité de leurs carrières.

Du côté des libéraux, le projet de loi de santé que le ministère a sorti tout écrit de sa boîte sans qu’aucun syndicat ne retrouve la moindre trace de souhaits exprimés lors de vrais-faux échanges avec le cabinet de Marisol Touraine a cristallisé les mécontentements et a uni l’ensemble de la profession dans une contestation unitaire pas vue depuis longtemps.

Trois sujets du projet fâchent particulièrement et unanimement les libéraux : le tiers-payant généralisé et obligatoire, les pleins pouvoirs donnés au ARS qui seront les arbitres de l’activité, des installations, voire demain du conventionnement des médecins, et les « pratiques avancées », autre terme pour désigner des transferts de tâches qui font aujourd’hui partie intégrante de l’exercice des médecins et qui seront demain dévolues aux pharmaciens, aux sages-femmes ou aux futures infirmières cliniciennes.

Face à cette contestation générale, Marisol Touraine a commencé par jouer la montre, en annonçant le report de l’examen du projet de loi –initialement prévu fin janvier-début février- au mois d’avril prochain, après les élections aux conseils généraux. Puis elle a reçu les syndicats auxquels elle a prodigué un discours rassurant, qui ne les a pas rassuré du tout, car, pour l’instant, pas une ligne du texte n’a été réécrite, et les responsables syndicaux ont appris à se méfier furieusement des « paroles verbales » ministérielles. « Rien ne change concrètement, commente Philippe Gasser, le président de l’Union des MEdecins SPEcialistes (UMESPE) de la CSMF. C’est à peine si quelques avancées sont envisagées : le terme de « service territorial de santé au public » pourrait disparaître, mais pour l’instant, ces éventuels changements restent verbaux, rien n’est écrit. Concernant le pouvoir donné aux ARS, avec les menaces de conventionnement sélectif que cela sous-tend, aucune évolution n’est envisagée. Pas plus que sur le tiers-payant généralisé et obligatoire, qui est une mesure politique et qui ne réglera pas les problèmes d’accès aux soins. On nous évoque le cas des étudiants, mais leur problème n’est pas celui du tiers-payant mais plutôt celui de la mise à jour de leurs droits qui peut parfois prendre une année. Le tiers-payant généralisé ne réglera pas ce problème ! « Quant aux pratiques avancées, en l’état, il n’est pas question pour nous de les accepter. Nous ne sommes absolument pas opposés à l’évolution des métiers, mais cela doit venir du terrain de la profession, pas d’en haut, par voie législative ». L’UMESPE, qui a organisé avec succès les états généraux de la médecine spécialisée début décembre, travaille maintenant à la rédaction de son « cahier de doléances et de propositions pour la réécriture du projet de loi » qu’elle entend présenter à la ministre de la Santé en début d’année.

Après avoir été reçu par Marisol Touraine, le président de la CSMF, Jean-Paul Ortiz, a déclaré n’avoir perçu aucune « écoute réelle ». Réunie en assemblée générale extraordinaire, la Confédération « considérant que le signes d’ouverture exprimés par la ministre n’ont, pour l’instant, aucune traduction concrète et, compte tenu de la stratégie gouvernementale d’évitement de tout dialogue et d’écoute des médecins libéraux, » a décidé de maintenir son mot d’ordre de grève. Et par-delà de la réécriture de la loi, la CSMF a d’autres exigences : « l’ouverture d’une négociation tarifaire urgente permettant de redonner une valeur décente aux actes médicaux », en commençant par le C qui « doit être porté à 25 euros », « la mise en œuvre de la CCAM clinique et l’actualisation de la CCAM technique prévues par la convention médicale » et « l’extension de la ROSP à toutes les spécialités ».

Car le projet de loi de santé, s’il a mis le feu aux poudres, est loin d’être le seul grief des médecins libéraux. Bien d’autres ont entretenu ces derniers temps la combustion sous le couvercle de la cocotte qui explose aujourd’hui : absence de revalorisation des actes, obligation de mettre leurs cabinets aux normes d’accessibilité pour les personnes handicapées sans aucune aide financière, l’obligation de prescrire en DCI au 1er janvier prochain sans les outils logiciels adéquats et certifiés opérationnels, le « harcèlement des caisses » sur le prescription des génériques et, le dernier en date, cerise sur le gâteau, l’annonce d’un budget DPC en baisse de 25 % pour l’année 2015…

Certes, les quelques mois de délai qu’offre le report du projet de loi par le Parlement peuvent faire espérer une réécriture du texte. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que les entrevues des diverses organisations syndicales avec le ministère ne laissent pas entrevoir des négociations constructives. On souvient que Marisol Touraine avait répliqué sèchement à la revendication des généralistes de voir leur C porté à 25 euros que ce n’était « pas d’actualité ». Elle reste intraitable sur le tiers-payant généralisé, mesure populaire, sauf auprès des médecins. Quant aux cliniques, elles n’ont pas trouvé chez la ministre une plus grande ouverture à des évolutions possibles : l’obligation faite aux établissements privés désireuses d’intégrer le service public de faire respecter les tarifs opposables à tous leurs praticiens n’est apparemment pas négociable. La Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) maintient donc son préavis de grève illimitée à partir du 5 janvier prochain. Et la Conférence Nationale des présidents de Commissions Médicales d’Etablissements privés soutient le mouvement, comme elle soutient celui des médecins en appelant à la grève de fin d’année les médecins exerçant en cliniques (voir l’entretien avec Jean-Luc Baron). Quand à la FMF, estimant qu’ « il n’y a rien à négocier », elle a fait savoir qu’elle ne se rendrait pas au rendez-vous de la ministre. Avec le SML et le Boc, elle fait partie des organisations qui demandent un retrait pur et simple du projet de loi de santé.

Si la ministre de la Santé ne veut pas voir se perpétuer et se durcir le mouvement de contestation des médecins, elle ferait bien d’assouplir un peu son attitude et d’entamer un réel dialogue avec eux. A moins que le report de l’examen du projet de loi en avril ne soit qu’une tentative pour laisser pourrir la situation. Mais c’est une tactique que les médecins ont déjà expérimentée aussi et il n’est pas sûr qu’ils tombent dans le piège.




Loi santé : critiques tous azimuts

377 – Le moins qu’on puisse dire est que le projet de loi de santé et la façon dont il a été assené aux professionnels trouve peu de défenseurs. Même dans son camp, Marisol Touraine n’est pas épargnée par les critiques. Ainsi, sans remettre en cause l’intégralité du texte, le secrétaire national du PS en charge de la protection sociale, Pascal Terrasse, incite-t-il « Marisol Touraine, ses équipes, à rencontrer le plus largement possible ceux qui peuvent s’opposer à la loi », estimant notamment que « l’inquiétude de la FHP doit être écoutée ». Il a fait part au Premier ministre de ce « qu’une mission parlementaire pourrait contribuer à débloquer la situation ». « Une société ne se réforme pas à coups de hache », a déclaré le député PS de l’Ardèche lors d’une rencontre des Asclépiades, organisée par notre confrère Décision Santé. Ainsi concernant le tiers-payant penche-t-il plutôt pour le volontariat ; « Peut-être faudrait-il laisser la possibilité à ceux qui le souhaitent de la pratiquer et aux autres non ». Ce qui revient à peut près à signifier qu’on pourrait laisser les choses en l’état…

Ancien Directeur des hôpitaux d’un gouvernement socialiste, Jean de Kervasdoué s’est « lâché » lors d’un débat organisé par la FHP et Décision Santé. Pour lui, cette loi « n’est pas une loi majeure ». Elle témoigne d’une « absence de réflexion sur le ticket modérateur, le rôle des complémentaires, les inégalités de traitement ». « La loi HPST a aggravé l’étatisation du système de santé : cela continue. Ce Gouvernement est dans la continuité du gouvernement précédent », estime l’économiste de la santé pour qui la généralisation du tiers-payant n’était pas une priorité.

Rappelons que de façon plus policée, l’Académie de Médecine et le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) ont émis de sévères commentaires sur le texte. Le CNOM, qui plaide inlassablement pour le dialogue, salue avec satisfaction le report de l’examen du projet pour laisser du temps à la concertation, demande cependant qu’ « aucun préalable ne limite sa portée et donc la réécriture du texte de loi ». Il réclame de la ministre la publication rapide d’un calendrier de concertation « pour permettre la réécriture des points incontournables notamment l’hyperadministration, le service territorial de santé au public, les risques qu’il entraîne, le périmètre des contenus des métiers, les modalités de mise en place du tiers payant généralisé et les contre-pouvoirs dans les territoires ».




Loi santé : entretien Jean-Luc Baron (CME)

La Conférence nationale des présidents de Commissions Médicales d’Etablissements (CME) de l’hospitalisation privée soutient le mouvement de grève des médecins libéraux de fin d’année. Que signifie exactement ce « soutien » ?

377 – Jean-Luc Baron. Cela signifie très clairement que la Conférence des présidents de CME appelle les médecins qui exercent dans les établissement privés à cesser leur activité entre le 24 et le 31 décembre prochain, en se laissant réquisitionner, bien sûr, pour les urgences et en maternité. Les CME étant garantes de la qualité et de la sécurité des soins des patients, il ne saurait en être autrement. Nous soutenons également le mouvement de la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) de janvier prochain, mais le mouvement des médecins est celui de fin décembre.

Quelles mesures du projet de loi de santé motivent principalement votre opposition à ce texte et votre décision de faire grève ?

J-L. B. En premier lieu, les conditions imposées aux établissements privés pour participer au service public hospitalier. Tel que le texte est écrit, et malgré les tentatives du Gouvernement pour rassurer oralement ce secteur, il est inacceptable. Nous ne pouvons pas accepter qu’on impose aux praticiens exerçant en établissements privés d’effectuer la totalité de leur activité en secteur 1, sans même tenir compte du Contrat d’Accès aux Soins (CAS) auquel un grand nombre de médecins a adhéré et compte tenu que les missions de service public dans les établissements privés sont assurées aux tarifs opposables. Les médecins qui travaillent au sein des CME bénévolement ne le feront plus dans ces conditions. L’autre point du projet de loi a trait aux installations régulées par les ARS auxquelles sont donnés les pleins pouvoirs. Nous travaillons en équipe : si demain, on nous refuse d’embaucher un confrère sous je ne sais quel prétexte de planification, comment pourrons-nous travailler ?

Le report de l’examen du projet de loi et les tentatives d’apaisement de Marisol Touraine ne vous font-ils pas entrevoir une négociation possible ?

J-L. B. Absolument pas. La Conférence nationale des présidents de CME a rencontré la ministre en mars dernier pour lui faire part de ses vœux. Le projet de loi tel que nous le connaissons aujourd’hui devait déjà être écrit, et depuis, rien n’a changé d’un iota. Du côté du ministère de la Santé, c’est autisme le plus complet ! Le mouvement unitaire de contestation et la mobilisation sur le terrain n’ont donc rien d’étonnant.




Loi de santé : le projet de tous les dangers

Le projet de loi de santé devrait être bientôt présenté en Conseil des ministres par Marisol Touraine avant d’être discuté au Parlement au printemps prochain. Mais sans attendre, les médecins libéraux, mais aussi les hospitaliers, s’y opposent farouchement. Les premiers le juge liberticide pour la médecine libérale, les seconds dénoncent la toute puissance de l’administration dans la gouvernance de l’hôpital. 

374 – Tel qu’il a été transmis au Conseil d’Etat, le projet de loi de santé comporte 54 articles répartis en cinq grands titres :

Titre I Renforcer la prévention et la promotion de la santé.

Titre II Faciliter au quotidien les parcours de santé.

Titre III Innover et garantir la pérennité de notre système de santé.

Titre IV Renforcer l’efficacité des politiques publiques et la démocratie sanitaire.

Titre V Mesures de simplification et d’harmonisation.

Le premier titre, concernant la prévention et l’éducation thérapeutique, énonce une série d’intentions plus que de mesures, qui vont de l’inscription dans la loi de la promotion de la santé en milieu scolaire aux informations sur la santé nutritionnelle sur les denrées alimentaires, en passant par la lutte contre les addictions et l’expérimentation des salles de shoot. Il n’y a là rien de vraiment dérangeant, et, dans le concert de critiques autour du projet de loi, il n’est pas question de cette partie du texte. Les professionnels de santé qui attendent depuis des années les moyens financiers nécessaires à un réelle développement de l’Education Thérapeutique du Patient (ETP) savent à quoi s’en tenir sur ces (bonnes) intentions qui resteront lettres mortes sans moyens suffisants pour les mettre en œuvre. 

C’est l’important titre II du projet de loi qui retient toute l’attention des médecins libéraux et contient, selon eux, tous les dangers. Malgré une nuance sémantique, le Service Territoriale de Santé au Public (STSP) – et non plus le Service Territoriale de Santé – les inquiète grandement par le pouvoir quasi sans limite que les Agences Régionales de Santé (ARS) exerceront sur lesdits territoires. Ainsi, « le directeur de l’ARS peut subordonner l’attribution de subventions » (dépenses liées aux examens de biologie médicale, Fonds d’Intervention Régional) ou « subordonner une autorisation » de création d’un établissement ou d’un service de santé ou médico-social « à la participation du bénéficiaire à un contrat territorial de santé ». Ce qui pour les médecins libéraux revient à supprimer la liberté d’installation et à ouvrir la porte à la régionalisation de la convention médicale nationale. « Ainsi, non seulement les candidats à l’installation devront visser leur plaque là où l’ARS l’aura décidé, mais surtout, les médecins installés seront ficelés et ne pourront plus déménager pour changer de quartier et ouvrir de nouveaux locaux ou changer de ville selon leur choix personnels sans l’autorisation de l’ARS », souligne Jean-Paul Ortiz, le président de la CSMF.

Le titre II contient également la généralisation du tiers-payant, autre grand sujet de colère des médecins. le texte précise que « les conditions de la généralisation de la pratique de la dispense d’avance de frais tendant à éviter à l’assuré social de payer directement les honoraires aux professionnels de santé » devront être inscrites dans la convention médicale. Moins polémique, le titre II prévoit aussi un numéro unique pour la Permanence Des Soins. La PDSA est accessible par un numéro de téléphone pour l’Aide Médicale Urgente (AMU) et par un numéro national. Les associations de PDS locales, qui ont leur propre numéro, participent également à la régulation et « les modalités d’accès à la régulation médicale libérale propres à chaque région sont précisées par le directeur de l’ARS ».

La manifestation d’un hospitalocentrisme affirmé

C’est encore et toujours de l’ARS que dépendra la possibilité pour un établissement hospitalier privé d’assurer le service public hospitalier. « Ces établissements sont reconnus comme assurant le service public hospitalier après examen de leur demande par le directeur général de l’agence régionale de santé au regard de la situation de l’offre hospitalière dans le territoire de santé et particulièrement de celle relevant du service public hospitalier », précise le projet de loi. Pour pouvoir adhérer au service public hospitalier, les cliniques privées doivent en remplir le cahier des charge : garantir un délai de prise en charge « raisonnable », un « égal accès à des soins de qualité » et l’absence de facturation au patient de dépassements de tarifs ». Et lorsque l’adhésion au service public hospitalier est acceptée par le directeur général de l’ARS, « le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens de l’établissement de santé concerné est révisé pour préciser les engagements nouveaux pris par l’établissement pour respecter les obligations du service public hospitalier ». Les hospitaliers privés trouvent le
ticket d’entrée un peu cher et n’y voient que la manifestation d’un hospitalocentrisme affirmé. Mais ils ne sont pas décidés à se laisser faire (voir les réactions de la FHP). Avec la pratique du testing légalisée, la coupe du titre II est pleine pour les médecins libéraux.

Le titre III leur offre deux  autres motifs d’inquiétude. Au sujet du DPC d’abord, avec l’apparition des universités qui « contribuent par leur expertise scientifique dans le domaine de la formation initiale et continue des professionnels de santé à la dimension pédagogique de la démarche ». Les médecins libéraux n’entendent pas voir le DPC sous la coupe des universitaires. Tout comme ils n’entendent voir leurs compétences déléguées à des auxiliaires médicaux dans le cadre de l’« exercice en pratique avancée » qui peut comporter « la formulation d’un diagnostic, la réalisation d’une analyse clinique, l’établissement de prescription ou l’accomplissement d’activité d’orientation ou de prévention ». Pour Eric Perchicot, le président du SNSMCV, il ne faut surtout pas « ouvrir cet boîte de Pandore (voir entretien de Eric Perchicot).

Mais ce qui alerte sans doute le plus les médecins libéraux, c’est le projet de régionalisation de la convention médicale nationale qui s’exprime on ne peut plus nettement dans l’article 40 du texte où l’on peut lire : « Le directeur général de l’ARS arrête l’adaptation régionale des contrats types nationaux, sous la forme de contrats types régionaux. » Depuis la création des ARS, c’est ce que les libéraux redoutent le plus. Roselyne Bachelot y était favorable mais n’a pu l’imposer, un rapport de la Cour des Comptes dénonçait récemment l’échec de la politique conventionnelle dans la maîtrise des dépenses. Les médecins libéraux « conventionnistes » ont en effet du souci à se faire, car à force…




Les PH appellent à la grève…

374 – Avenir Hospitalier, la Coordination Médicale Hospitalière (CMH), la Confédération des Praticiens des Hôpitaux (CPH), l’Intersyndicat National des Praticiens Hospitaliers (INPH) et le Syndicat National des Médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des Hôpitaux Publics (SNAM-HP) appellent à une journée de grève pour « défendre la démocratie » au sein des établissements et « la place des praticiens dans la prise des décisions importantes ». Les intersyndicales déplorent en effet que « le directeur conserve la totalité des pouvoirs de nomination des responsables médicaux des pôles et des services » dans le projet de loi de santé. Elles revendiquent « une organisation en pôle facultative sur décision médico-administrative et non plus uniquement directoriale ». 

…que les internes n’excluent pas

L’interSyndicat National des Internes (ISNI) n’exclut pas de recourir eux aussi à la grève pour dénoncer « la perte d’indépendance pratique du médecin dans sa formation, en ville et à l’hôpital » qu’engendrerait le projet de loi santé. Estimant « la liberté d’installation menacée », l’ISNI craint aussi la restauration du service public hospitalier dont les cliniques seront exclus sauf à accepter des mesures contraignantes et l’impact que cela pourra avoir sur les 70 % des internes de chirurgie qui partent travailler dans le privé à l’issu de leur postinternat. 




Tous contre le projet de loi

374 – C’est sous cet intitulé on ne peut plus clair que le président de la Confédération des Syndicats Médicaux Français, Jean-Paul Ortiz, a tenu sa conférence de presse de rentrée. Il n’a pas eu de mots assez durs pour dénoncer « la main mise de l’Etat sur l’organisation du système de santé, le financement de la médecine libérale via les ARS et le démantèlement de la convention nationale ». 

« On assiste à un glissement sournois vers une nationalisation du système de santé », estime Jean-Paul Ortiz. Pour le président de la confédération, le Service Territorial de Santé au Public (STSP) « vise à supprimer la liberté d’installation ». « Sous la coupe des ARS, va-t-on devoir leur demander l’autorisation de visser sa plaque ? Nous serons toujours opposés à cette atteinte à la liberté d’installation, on va droit vers les conventions individuelles. »

« Tout le projet de loi va dans le sens d’une étatisation de la santé que nous refusons et nous demandons au Gouvernement de renoncer à ce projet », affirme Jean-Paul Ortiz, qui prévient : « Comme en 1996 pour le plan Juppé, comme pour la loi Bachelot, la CSMF est prêt à se mobiliser contre ce projet de loi funeste ».

« Fervent défenseur de l’exercice libéral », le Syndicat des Médecins Libéraux (SML) « regrette que la ministre de la Santé n’ait pas tenu compte de l’offre libérale de santé et persiste dans sa vision dogmatique d’une médecine étatique ». L’organisation présidée par Roger Rua « condamne fermement l’étatisation de notre système de santé que la ministre souhaite mettre en place, en instaurant un Service Public Territorial de Santé, dont les libéraux seraient soit exclus soit prisonniers des ARS ». Le SML rappelle son opposition résolue à la généralisation du tiers-payant, « mauvaise réponse à la vraie question de l’accessibilité aux soins » et « signal de déresponsabilisation ».

Si le syndicat généraliste présidé par Claude Leicher voit dans le projet de loi de santé « des avancées », il reste circonspect sur les moyens qui seront octroyés à « la révolution du premier recours ». MG France « attend donc de la discussion sur le projet de loi des engagements financiers répondant aux attentes des médecins généralistes ». 

Pour le syndicat « la préparation du PLFSS 2015 dira si la volonté de mettre en œuvre ce qui est annoncé est réelle ». Il réitère la réticence des généralistes à l’égard du tiers-payant généralisé et demande à la ministre « des garanties, notamment qu’il n’y ait pas de vérification des droits, que les paiements soient garantis et que le payeur soit unique ».

La Fédération de l’Hospitalisation Privée « maintient son opposition totale au volet du projet de loi de santé prévoyant le rétablissement du service public hospitalier, dont seront exclus de droits les cliniques et hôpitaux privés. Elle dénonce une politique publique de retour à un hospitalo-centrisme rétrograde, une volonté d’éviction de l’hospitalisation privée sur des critères arbitraires et une réforme contraire à l’intérêt des patients ».

Lors de la journée de rentrée de la fédération au début du mois, son président, Lamine Gharbi a appelé à une mobilisation générale contre le projet de loi. Aux présidents de la CSMF, du SML, du Bloc et de la FMF présents, il a dit qu’il souhaitait « une action concertée » pour « bâtir ensemble des mouvements d’ampleur ». En accord avec eux, le président de la Confédération Nationale des Présidents de CME de l’Hospitalisation Privée (CNPCMEHP), Jean-Luc Baron, a déploré que l’élaboration du texte se soit fait sans les médecins libéraux « laminés et exclus ».




Entretien Eric Perchicot : « Ce projet de loi n’est pas négociable »

P13 Perchicot 2 300
Le médecin n’est pas un professionnel de santé comme les autres, dont on peut déléguer les compétences à d’autres professionnels et c’est une duperie que de le laisser penser.

374 – Quelles sont vos critiques à l’égard du projet de loi de santé ?

Eric Perchicot. Je constate tout d’abord un grand écart entre la Stratégie Nationale de Santé (SNS) telle que Marisol Touraine l’a présentée et ce projet de loi de santé. Selon la SNS, la prise en charge du patient devait ête organisée de façon à éviter les recours inutiles à l’hospitalisation, et le problème était bien posé. Or, le projet de loi est entièrement centré sur l’hôpital. C’est le principal reproche que l’on peut formuler : le projet organise toute la prise en charge autour de l’hôpital public. En outre, il donne aux ARS les moyens d’imposer un cahier des charges inacceptable aux établissements d’hospitalisation privés pour participer au service public hospitalier qui, s’ils le refusent, seront privés de tout moyen. Il contient aussi des éléments qui laissent à penser que, à terme, les ARS pourraient faire obstacle à l’installation des médecins. On irait ainsi progressivement vers un conventionnement individuel et une contractualisation régionale par la régionalisation de la convention nationale. Or, il faut avoir à l’esprit que ce projet de loi ne sera effectif que dans quatre ou cinq ans quand il y aura pléthore de médecins. Et dans cette situation de pléthore, il se trouvera toujours des médecins pour accepter cette contractualisation avec l’ARS.

De même, le texte actuel dans son chapitre II et sous le titre « Exercice en pratique avancée » ouvre la porte à une très large délégation de tâches qui serait une catastrophe. Le médecin n’est pas un professionnel de santé comme les autres, dont on peut déléguer les compétences à d’autres professionnels et c’est une duperie que de le laisser penser. Les infirmières cliniciennes, cela fonctionne bien dans les pays anglo-saxons, où leur pratique est d’ailleurs très encadrée, mais nous ne sommes pas un pays anglo-saxon. Mettre le doigt dans cet engrenage, c’est ouvrir la boîte de Pandore.

Vous ne retenez donc rien de ce projet de loi ?

E. P. : En l’état, ce projet n’est pas à négocier mais à rejeter totalement. Outre les dangers dont j’ai déjà parlé, il introduit également le tiers-payant généralisé auquel les médecins sont opposés et dont tout le monde s’accorde à penser qu’il est inapplicable, il officialise la pratique inacceptable du testing, il détricote le DPC en confiant la responsabilité de la pédagogie aux universitaires. Bref, il est une attaque frontale de la médecine ambulatoire. Il devrait être présenté dans quelques semaines en Conseil des ministres et débattu à l’Assemblée Nationale au printemps. Mais il est inutile d’attendre pour dénoncer un projet en complète contradiction avec la Stratégie Nationale de Santé et liberticide pour la médecine libérale.