Fiscalité : le régime BNC sur la sellette

337 – « Une nouvelle atteinte portée à l’exercice libéral par le Gouvernement ». C’est ainsi que la CSMF a dénoncé le projet de réforme fiscale que Bercy a pensé inscrire dans la loi de finances rectificative de fin d’année, et qui consistait à supprimer le régime des bénéfices non commerciaux (BNC) et celui des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) pour les fondre en un seul régime, dont on ignore à cette heure le contenu exact, mais qui s’inspirerait fortement du régime BIC.

Une comptabilité complexe…

En clair, cela signifierait que les professionnels en BNC, qui ont aujourd’hui une comptabilité simplifiée, basée sur les encaissements et les décaissements, devraient tenir demain une comptabilité d’engagements, plus complexe, nécessitant notamment de dresser un bilan des actifs et des passifs. « Les conséquences de cette mesure sont particulièrement lourdes pour les médecins libéraux qui devraient, si elle était votée, confier obligatoirement la gestion de leur comptabilité à un expert-comptable, ce qui ne manquerait pas de générer des frais supplémentaires », tempête la CSMF. Le ministère des Finances a décidé de ne pas inscrire ce projet dans le texte budgétaire de fin d’année, mais sans y renoncer pour autant.

« Il y a dix ans qu’on en parle, commente Michel Giordano, vice-président du Conseil supérieur de l’ordre des experts comptables ainsi que de l’UNAPL. Et de nombreux professionnels de santé ont déjà une comptabilité d’engagement, c’est le cas des médecins en SEL et des pharmaciens, et ce sera le cas de ceux qui se mettront en EIRL. C’est une tendance européenne qui vise à estomper nos particularités françaises et à aller vers un régime fiscal applicable à toutes sortes de professions. Mais je comprends parfaitement la réaction des médecins à cette annonce faite, sans aucune concertation préalable, par le ministère des Finances, qui n’a donné aucune précision sur le contenu de la réforme. C’est un procédé intolérable, mais c’est une réforme qui se fera et à laquelle on doit se préparer. »

…dans une version simplifiée

Michel Giordano explique que si cette réforme voit le jour, une version simplifiée est prévue qui consisterait en la tenue d’une trésorerie type BNC tout au long de l’année, avec la reprise par une écriture comptable des créances et des dettes au 31 décembre pour l’obtention du résultat. « Un peu plus compliquée, la comptabilité d’engagement peut avoir certains avantages. D’une part, elle permet de constituer des provisions. D’autre part, dans la comptabilité de commerce, une charge est déductible lorsqu’elle est utile, alors qu’en comptabilité de profession libérale, une charge n’est déductible que lorsqu’elle est nécessaire : la nuance est de taille ! »

Reste que le futur régime fiscal pourrait entraîner un lourd désavantage pour les médecins libéraux s’il devait supprimer les abattements spécifiques liés au conventionnement en secteur 1 comme l’évaluation forfaitaire de certains frais. « Cela reviendrait à supprimer un avantage conventionnel sans aucune contrepartie », souligne la CSMF, qui « s’élève contre cette mesure de complexification administrative, financièrement lourde et qui remet en cause les modestes avantages liés au contrat conventionnel. »




Pr Jacques Beaune : « Un plan coeur s’impose »

337 – Pour quelles raisons la Fédération française de cardiologie (FFC), que vous présidez, ainsi que la Société française de cardiologie (SFC), réclament- elles un « plan Coeur » ? _ Pr Jacques Beaune : Avec 147 000 morts par an et une dépense annuelle de 28 milliards d’euros, les maladies cardiovasculaires sont un fléau social et économique. Ces maladies représentent la première dépense de santé en France, loin devant le cancer qui ne représente que 11 milliards d’euros. Certes, la mortalité par cancer est plus forte – 30 % – mais la mortalité par maladie cardiaque arrive en seconde position avec un taux de 29 %, et laisse loin derrière les autres pathologies. Quant à la morbidité des maladies cardiovasculaires, elle est largement supérieure à celle de la pathologie cancéreuse. Loin de nous l’idée de remettre en question le plan cancer, mais nous estimons que la réalité que recouvrent ces chiffres justifie largement la création d’un plan cancer. Il faut absolument développer la recherche, notamment en épidémiologie et en prévention. En épidémiologie, nous ne sommes pas bons du tout. Par exemple, on ne connaît pas avec précision le nombre annuel d’arrêts cardiaques en France ; on l’évalue entre 40 000 et 50 000, mais sans certitude. Quant à la prévention, il faut absolument la développer. On sait qu’elle est utile. La prévention a un coût, certes, mais moindre que celui de la recherche dans les technologies de pointe. On sait que le rapport coût/efficacité est bon.

Quelles seraient les priorités de ce plan coeur en matière de prévention ? _ J. B. : Une des priorités est la prévention et la gestion de l’arrêt cardiaque. Pour l’instant, il est très mal géré en France, où le taux de survie est de l’ordre de 2 % à 3 % quand dans les pays scandinaves, en Suède, par exemple, il est de 7 %, ou de 30 % à Seattle, aux Etats- Unis. Pourquoi ? Parce que ces pays ont mis en oeuvre un véritable plan national de gestion des arrêts cardiaques avec une formation de la population et des défibrillateurs astucieusement répartis sur le territoire. Un véritable plan de santé publique, pas de soins !

Le tabagisme est la seconde motivation pour un plan coeur. C’est une véritable catastrophe : avec 14 millions de fumeurs réguliers et 6 millions de fumeurs occasionnels, 66 000 décès annuels, le tabac arrive en première position, en termes de morbidité cardiovasculaire. Contrairement aux pays qui ont décrété l’interdiction brutale de fumer, en France, où cette interdiction a mis des années à être totale, on ne peut pas dire qu’elle ait infléchi notablement la courbe des accidents cardiovasculaires. Enfin, une alimentation saine et l’exercice physique constituent la troisième priorité. C’est un enjeu majeur. Si l’on réduisait la consommation quotidienne moyenne par personne de sel en France, qui est actuellement de 8,5 grammes, à 6 grammes, on sauverait entre 10 000 et 15 000 vies et l’on éviterait un nombre considérable d’AVC. La FFC mène déjà beaucoup d’actions – les Parcours du coeur, Donocoeur, des actions de prévention en milieu scolaire, la formation de la population à la gestion de l’arrêt cardiaque en liaison avec la Croix-Rouge et les SAMU – mais c’est insuffisant au regard des besoins de prévention qui sont considérables, et doivent faire l’objet d’une politique générale qui mobilise toute la société. C’est pour cela qu’un d’un plan coeur fédérateur s’impose.

Dans ce plan coeur, quelle serait la place des cardiologues libéraux ? _ J. B. : Essentielle ! Il faut travailler avec eux, bien évidemment. La consultation de prévention que le SNSMCV a mise en place en collaboration avec trois compagnies d’assurance est une excellente initiative, que la FFC a d’ailleurs soutenue, et qui doit avoir toute sa place dans un plan coeur. ■(gallery)




Rapport Hubert : la feuille de route du Gouvernement

337 – « Ce rapport est un tout », souligne Elisabeth Hubert dans le préambule de son rapport à propos des mesures qu’elle préconise ; mesures immédiates, et mesures structurelles, à moyen et long terme (dont les effets seront acquis dans 8 à 10 ans). Parmi les mesures à moyen terme se range la reconstruction du mode de rémunération des médecins.

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Elisabeth Hubert propose un dispositif à trois étages. Le paiement à l’acte en constitue le socle, mais selon une grille tarifaire établie « selon la complexité des situations rencontrées », dont « les valeurs pourraient aisément s’échelonner de la valeur d’un demi C actuel à 69-70 euros pour une consultation longue et difficile », suggère Elisabeth Hubert. Les spécialités médicales autres que la médecine générale, et « dont l’apport est plus intellectuel que technique seraient soumises aux mêmes grilles tarifaires, l’usage en toute logique étant centré sur les situations les plus complexes ». Le second étage du dispositif proposé concerne la rémunération de certaines prises en charge pluridisciplinaires de patients, autrement dit, la rémunération « d’une activité comprenant temps de coordination et interventions de plusieurs professionnels », et qui ne concerneraient que les professionnels de maisons ou Pôles de Santé Pluridisciplinaires (MSP et PSP) signataires, via ces structures, d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens avec les ARS. Enfin, troisième étage du dispositif, le « financement structure » des MSP et PSP, dont le montant serait fonction de la population couverte et du nombre de professionnels inclus, et versé sous condition de respect du cahier des charges national des MSP et PSP et du CPOM. Ã moyen terme toujours, il convient de « recentrer les médecins sur leur coeur de métier et transférer certaines tâches à d’autres professionnels de santé ». Ces coopérations doivent s’appuyer sur la redéfinition des métiers à partir de référentiels, la clarification des responsabilités de chacun, et doivent, bien sûr, être rémunérées. Elles vont de pair avec le développement des MSP et des PSP qui doit être favorisé et harmonisé, selon « une méthodologie identique pour toutes les régions ».

Au chapitre des mesures à long terme, Elisabeth Hubert préconise la réforme de la formation initiale des généralistes, et le développement des systèmes d’information et de la télémédecine. Il constitue , selon elle, « le second enjeu des dix prochaines années », et appelle un « plan ambitieux rapidement mis en oeuvre ».

Enfin, réorganiser la PDS, dont le pivot doit être la régulation téléphonique, faciliter et sécuriser l’investissement des professionnels dans leur outil de travail, favoriser les évolutions de carrière des médecins, leur donner de l’autonomie pour assumer leur DPC, améliorer leur protection sociale et réformer durablement leur système d’Assurance Vieillesse, sont autant de mesures conjoncturelles à prendre immédiatement, et qui, selon Elisabeth Hubert, « témoigneraient d’une vraie prise de conscience de la situation délétère du monde de la santé ».

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Je vous ai compris…

Le Président de la République n’a guère attendu pour lancer un signal aux médecins. Quelques jours après la remise du rapport Hubert, lors d’une visite au pôle de santé d’Orbec (Calvados), Nicolas Sarkozy a précisé le plan du Gouvernement pour préserver une offre de santé en exercice libéral, annonçant plusieurs mesures concernant la formation des généralistes, la simplification administrative et la rémunération des médecins, reprenant pour cette dernière le système à trois étages préconisé par le rapport Hubert. Le chef de l’État a également annoncé pour le début de l’année prochaine un projet de loi instaurant « un nouveau véhicule juridique adapté à la situation des pôles de santé », avec, notamment, un guichet unique à tous les professionnels de santé au sein des ARS afin de faciliter la création de structures d’exercice regroupé.

« Vous n’aurez pas longtemps à attendre, a-t-il dit aux médecins. Nous n’aurons pas tout fait d’ici à la fin décembre, mais en 2011, si », a lancé Nicolas Sarkozy. Par quel miracle ce qui n’était pas possible économiquement depuis des années semble brusquement le devenir ? Le miracle de l’électoralisme ?|(gallery)




Gouvernement : la santé en tandem

337 – Ouf ! A quelques jours près, le Gouvernement Fillon remanié serait arrivé en même temps que le beaujolais nouveau ! Et d’aucuns n’auraient pas manqué de faire des rapprochements entre les deux événements, faisant remarquer, par exemple, que la nouveauté du breuvage célébré ne rime pas toujours avec qualité… Qu’en sera-t-il du nouveau Gouvernement, et en particulier du tandem qui remplace Roselyne Bachelot à la Santé ? Entre les mains d’un même ministre depuis 2002, voici la santé à nouveau scindée entre un ministre et un secrétaire d’État, Nora Berra.

Le premier, Xavier Bertrand, est un familier du secteur. Secrétaire d’État à l’Assurance Maladie en 2004-2005, c’est lui qui a assuré le « service après vote » et la mise en oeuvre de la réforme portée par son ministre de la Santé de tutelle, Philippe Douste-Blazy, auquel il a succédé avenue de Ségur jusqu’en 2007. Jovial, maniant volontiers l’humour, mais connaissant parfaitement ses dossiers, Xavier Bertrand ne ménage pas sa peine quand il s’agit de faire de la pédagogie pour faire accepter les choses. Il a ainsi réussi à faire passer en douceur l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Chez les médecins, il a plutôt laissé un bon souvenir. Il est vrai que c’est lui qui a initié la procédure de qualification de spécialiste en médecine générale puisqu’il s’était déclaré favorable au droit pour les généralistes à coter CS. Les syndicats médicaux le voient donc revenir aux commandes avec un a priori favorable, tout particulièrement la CSMF qui a fait ouvertement campagne en faveur de ce retour. Que le dialogue reprenne entre le ministre et les médecins, nul doute à cela. Qu’ils obtiennent satisfaction sur toutes leurs revendications, c’est moins sûr. On voit mal Xavier Bertrand mettre en pièce la loi HPST, et si les généralistes sont assurés de voir passer le C à 23 euros au 1er janvier prochain, les spécialistes n’ont, par voie de conséquence et en ces temps de disette, pas grand-chose à espérer en terme de revalorisation. Par ailleurs, en charge également du travail et de l’emploi, Xavier Bertrand sera sans doute moins disponible pour la Santé qu’il ne l’a été par le passé.

Hospitalière, ayant travaillé plusieurs années dans l’industrie pharmaceutique, Nora Berra, 46 ans, a commencé sa carrière politique à Lyon, avant d’être nommée en 2009 secrétaire d’État aux personnes âgées. Elle y a acquis une solide connaissance de… la dépendance, qui revient aujourd’hui dans l’escarcelle de Roselyne Bachelot ! Quant à sa marge de manoeuvre, il y a peu de chance qu’elle en ait plus que ses prédécesseurs au secrétariat d’État à la Santé. ■(gallery)




Marc Thomas, Champagne-Ardenne : « C’est l’insuffisance cardiaque qui représente le prochain défi de la cardiologie libérale »

337 – CardioNews – Le Cardiologue : Vous venez d’être élu à l’URPS (Union Régionale des professionnels de Santé-Médecins) sur la liste SML. Pour quoi y faire ?

Marc Thomas : La question se pose en effet dès lors que le rôle de l’URPS est encore un peu flou … J’ai le sentiment – même s’il s’agit d’une impression un peu diffuse – que cette structure est appelée à occuper un espace plus politique que les URML précédentes. Pour autant et à ce jour, nous récupérons leurs locaux et leur personnel et ma conviction est que ce sont les ARS qui, attelées à la construction des différents SROS (Schémas Régionaux d’Organisation Sanitaire) vont nous légitimer ou non dans la reconnaissance et la concertation !

Il y a 3 cardiologues sur 30 élus, vous devriez donc trouver un espace d’expression…

M. T. : Il y a deux raisons à cela. D’une part, Jean-François Thébaut nous avait exhorté à entrer dans le scrutin au motif qu’il vaut mieux « être dedans que dehors ». Et d’autre part, la cardiologie avait assez mal vécu l’initiative de l’ARH précédente de tirer un trait sur toute la rythmologie libérale. Le dossier est toujours en discussion – je le suppose jusqu’au prochain SROS – mais du moins sommes-nous désormais en situation de nous faire entendre ! La victoire du tandem CSMF-SML, assez fort dans la région, nous laisse augurer une meilleure écoute mais il faudra la valider dans les faits !

La tandem CSMF-SML c’est dans la région, aussi un tandem de cardiologue avec votre confrère Bernard Carette…

M. T. : On se connaît depuis le lycée et on ne s’est jamais vraiment quittés, y compris dans l’animation du Syndicat. Mais il faut bien être deux pour assumer …. Vous savez que le piège qui nous tendu est assez souvent d’organiser les réunions en plein milieu d’après-midi ! Contrainte qui s’ajoute à la distance, près de 400 km d’un bout à l’autre de la région.

Région dont on connaît aussi les problèmes démographiques. Sont-ils en voie d’aggravation ou de résorption ?

M. T. : D’aggravation en médecine générale, de résorption en cardiologie, du moins libérale à la suite du « passage au privé » de l’agrégé du CHU suivi par quelques copains. Dans mon propre groupe, à la clinique Saint-Vincent d’Épernay, nous étions initialement quatre avec deux départs en retraite a priori non remplacés. Or ca y est, un jeune va nous rejoindre au 1er janvier ; et j’espère bien qu’il sera suivi par d’autres ! Il n’empêche qu’en Champagne comme ailleurs l’avenir de la cardiologie libérale est très compromis dans les sous-préfectures de 30 à 50 000 habitants. Les jeunes ne sont paradoxalement plus trop tentés par l’exercice clinique mais bien plus par l’interventionnel. A mon avis à tort parce que le plus gros chantier à venir sera de gérer l’épidémie d’insuffisance cardiaque. C’est ce défi-là qui, malgré l’éventuel apport de la télémédecine, va devoir mobiliser l’essentiel des énergies.

Avez-vous pris connaissance du Rapport Hubert et qu’en pensez-vous ? _ M. T. : Je n’ai pas lu les 170 pages mais j’ai parcouru ce qu’en a rapporté la presse. Je suis évidemment déçu qu’elle n’ait eu aucun mot pour la médecine spécialisée qu’il faut évidemment qualifier « de proximité ». Car enfin, que serait la PdS sans notre contribution ? … J’avais écouté Elisabeth Hubert quand elle avait participé, l’an passé, à l’AG pour nous dire « Prenez-vous en mains » … Mais encore faut-il avoir un minimum d’audience et de relais. Pour l’instant le syndicalisme est surtout l’affaire des quinquas/sexas … Et paradoxalement c’est à nous qu’incombe de défendre l’avenir des jeunes. J’espère qu’ils rentreront dans la bataille si, comme on le dit, la chirurgie cardiaque est menacée à Reims… Public ou privé, l’enjeu est le même !




L’explosion du renoncement aux soins

337 – CardioNews – La Sécurité Sociale, instaurée en 1945, préconisait une égalité des soins pour tous, la liberté d’installation pour le médecin associée à une qualité des soins préservée.

Force est de constater actuellement une aggravation inquiétante du renoncement aux soins dans un contexte de crise financière et sociale.

En effet, selon une enquête élaborée par le cercle santé et Europe Assistance, 23 % des Français affirment avoir au moins une fois abandonné ou remis à plus tard la possibilité de se soigner pour des motifs économiques.

Ce chiffre, deux fois plus élevé qu’en 2009, représente près d’un quart de la population française.

Dans un registre proche ; 49 % des Français pensent que leur système de santé ne garantit pas l’égalité d’accès aux soins.

Pour autant, les indices sont quasiment stables sur les 4 dernières années ; 3 % jugent excellente l’organisation du système de soins, 12 % la disent très bonne, 46 % bonne, les autres ne se prononcent pas.

Dans cette même enquête, invités à classer les menaces qui pourraient peser au cours des prochaines années sur leur système de soins, les Français citent comme très importante : la pénurie des médecins généralistes devant le manque de financement public et les inégalités d’accès aux soins suivies de l’augmentation du financement personnel, des délais d’attente avant d’être soigné et de l’augmentation des prix des actes médicaux.

Concernant les mesures à entreprendre, 32 % sont favorables à une hausse des impôts ou des cotisations obligatoires, 28 % préfèrent l’option des franchises, 23 % penchent pour le recours aux assurances privés et aux mutuelles.

Quand on interroge les professionnels de santé, les radiologues, les médecins généralistes ou les chirurgiens, tous ont un avis convergent sur le besoin pressant des usagers de se renseigner sur le prix de la consultation.

Il en est de même actuellement pour nos patients.

En effet, nos patients ont tendance à espacer les rendez-vous et à se renseigner sur le remboursement Sécurité Sociale avec une exigence d’information croissante.

Une étude intéressante, publiée par l’IRDES, pose la problématique des changements de comportements des patients.

En effet, concernant les franchises sur les boîtes de médicaments et les transports sanitaires (un chiffre de 0,5 euro sur les boîtes de médicaments et de 2 euros sur les transports sanitaires), 12 % des patients interrogés ont modifié leurs achats de médicaments suite à la mise en place des franchises selon cette étude.

Ces résultats ont montré que l’objectif des pouvoirs publics lors de l’instauration de ces franchises était de responsabiliser le patient et les professionnels de santé.

Le but n’a pas été atteint ; en effet, les changements de comportements ont été plus fréquents chez les individus disposant de faibles ressources et ceux en mauvaise santé.

En effet, le principe de l’égalité des soins pour tous devrait être une priorité pour l’Assurance Maladie et nécessitera un travail de fond dans les mois et les années à venir dans ce contexte.

De plus, malgré l’aide de l’Etat, l’accès à une mutuelle santé reste difficile ; en effet, certaines personnes en situation de précarité n’ont pas le réflexe de se soigner ni le courage d’entreprendre des démarches administratives.

Il s’agit d’un problème qu’il conviendra de solutionner afin de pouvoir conserver une égalité des soins de qualité pour tous.




Que reste-t-il de la Convention médicale ?

337 – CardioNews – Le CAPI (Contrat d’Amélioration des Pratiques Individuelles) va donc faire son entrée dans la marmite conventionnelle. Ainsi en a donc décidé le Parlement. Lequel est, à l’inverse, resté sourd aux exhortes (exhortations, invites, appels…) de la profession qui aurait souhaité lui voir entamer « le nettoyage » de la loi HPST (Hôpital, Patients, Santé, Territoires) et des diverses LFSS (Loi de Financement de la Sécurité Sociale) qui ont accumulé les sédiments antilibéraux : stabilisateurs économiques (imposant un sursis de six mois à l’application de tout accord tarifaire), ONDAM de ville désespérément aligné sur l’hôpital, obligation humiliante de déclarer ses absences à l’institution ordinale, rôle de police exorbitant consenti aux directeurs de caisses … Et le même Parlement n’entend rien changer, pour l’heure, à la gestion de la RCP, qui mine les vocations en gynécologie, ni à celle de la retraite qui interpelle toute la profession… Disons-le nettement : c’est désormais dans la navette parlementaire entre le Palais Bourbon, qui héberge les députés, et le Palais du Luxembourg, siège du Sénat, que se décidé l’essentiel de la politique de santé, y compris dans sa composante conventionnelle censée pourtant reposer sur le dialogue du syndicalisme médical et des caisses.

Dans les premières années de la vie conventionnelle, dans le courant des années 70, les interlocuteurs discutaient, se mettaient éventuellement d’accord et – lorsqu’ils avaient paraphé un compromis – se tournaient ensemble vers l’État en lui demandant de consacrer – par le règlement, voire la loi – l’accord qui n’était encore que « conventionnel ».

Depuis quelques années – et à dire vrai, depuis la « grande fâcherie » des années 1995-2005 – c’est l’inverse qui se produit : le législateur balise le chemin que doivent emprunter les partenaires. La mécanique tourne dans l’autre sens ! Quand ce n’est pas le Président de la République en personne qui stipule pour tout le monde, partenaires et Parlement. Il a ainsi annoncé, personnellement, la réforme qu’il envisage pour la rémunération, à trois niveaux, des médecins libéraux même s’il consent à donner l’illusion d’une concertation confiée au ministre de la santé…

On parlait, par le passé de la « main invisible » de l’État sur toute la vie professionnelle médicale. Il faut rendre hommage à Nicolas Sarkozy pour avoir consenti à la transparence : il décide seul désormais, ou avec son entourage immédiat, mais sans faire grand cas des apparences conventionnelles. Quitte à se renier comme il avait dû s’y résoudre, au début de son quinquennat, quand il avait annoncé un peu vite la fin de la liberté d’installation … Une menace de grève des internes et des chefs avait suffi à le ramener au pragmatisme.

A s’exposer de la sorte en première ligne comme un vulgaire ministre, fut-il omnipotent, l’hyper Président a pris le risque de décevoir son électorat naturel. Et il n’est pas acquis que l’opération déséduction en cours lui ramène tous les suffrages médicaux dont il aura besoin dans 18 mois.

La situation a aussi, pour les médecins, un avantage inédit : ils sont convoqués pour négocier une convention, théoriquement sans calendrier précis vu que la dernière (2005-2010) est déjà en coma prolongé … C’est-à-dire qu’ils peuvent obtenir beaucoup de cette négociation à peine amorcée. Sous condition d’achever le processus avant le printemps 2012.

Sans signature avant cette échéance, ce qui reste de légitimité à la fiction conventionnelle aurait définitivement vécu !

Jean-Pol Durand




Marwan Abichacra : « A 53 ans, je suis presque le dernier installé de Cannes »

336 – CardioNews – Le Cardiologue : Les élections aux URPS sont passées. Avez-vous été surpris du résultat ? Pensez-vous que la régionalisation impulsée par la loi HPST sera susceptible d’impacter votre pratique quotidienne ?

Marwan Abichacra : Le syndicat des cardiologues des Alpes Maritimes est modeste et n’a pas d’élu ; les Provençaux, beaucoup plus nombreux que nous, en ont fait élire deux qui seront donc nos représentants … Notre région se singularisait par l’abondance de listes, d’origine syndicale mais aussi de collectifs plus ou moins représentatifs. On retient du scrutin que la CSMF a gagné, c’est-à-dire un vrai syndicat campé sur une ligne de défense de l’exercice libéral. Pour autant, nous sommes en périphérie extrême du territoire national et nous sommes un peu « décalés » par rapport à l’agitation parisienne. Personnellement, je ne pense pas que la régionalisation de la santé nous affectera particulièrement. Prise à Paris, à Marseille ou à Nice, une décision se mesure d’abord à la façon dont elle est appliquée. Quand il y a des dérives, généralement marginales mais connues de tous, ceux qui sont « dans les clous » apprécient peu de recevoir une mise en garde générale Lorsqu’on nous rappelle, par exemple, l’obligation d’afficher les tarifs, une majorité d’entre nous qui exerce en secteur 1 est irritée car nos tarifs sont publics. … Le médecin libéral reste génétiquement individualiste !

La majorité des cardiologues cannois est donc en secteur 1 ?

M. A. : Absolument ! Sur 20 cardiologues dans la ville, 3 seulement sont en secteur 2. Mais Cannes n’est rien d’autre, derrière sa façade « paillettes et cocotiers » qu’une ville ordinaire de 70 000 habitants avec des cardiologues qui, comme ailleurs, font leurs 10-12 heures de travail quotidien et s’inquiètent à la perspective du prochain départ en retraite non remplacé !

On a du mal à vous croire !…

M. A. : Mais à 53 ans, je suis presque le dernier installé … Nous avons un confrère de 74 ans toujours au travail, et un autre de 71. Entre nous, ca nous arrange mais le vrai problème est sans doute là : l’exercice libéral se meurt, lentement mais sûrement ! Ma fille qui est en 2ème année de médecine m’a déjà prévenu qu’elle n’exercerait pas comme son père « qui ne l’a pas vue grandir » … Et aucun de ses compagnons d’amphi ne l’envisage non plus… Le « modèle » qui était le nôtre ne s’applique plus à la génération qui sort de fac. Mon seul espoir d’être remplacé au moment de partir en retraite réside dans un seul « profil » : le médecin du Nord, tenté de « lever le pied » à la cinquantaine et attiré par le climat ! Il s’en trouve encore quelques-uns. Mais les jeunes préservent leur qualité de vie et de travail à l’hôpital.

Tous n’y trouveront pas pour autant matière à s’employer. L’avenir de la cardio – car la spécialité reste « courue » au concours de l’internat – n’est-il pas à un exercice « mixte » conjuguant plateau technique hospitalier et pratique clinique en ville ?

M. A. : C’est déjà ce que nous pratiquons majoritairement. J’observe qu’à Cannes le secteur public a pris des parts de marché au privé qui riposte par des regroupements successifs en organisant des « pôles » généralement assez performants. C’est, chez nous, le cas à Mougins. Je ne doute pas, avec vous, de l’attractivité de la cardiologie à l’internat.

Y-a-t-il une question que j’aurais oublié de vous poser ?

M. A. : Oui, le problème de la retraite ! Je suis souvent questionné là-dessus et j’ai découvert, qu’un cardiologue retraité part avec 2 400 € en moyenne en libéral et le double pour peu qu’il ait été chef de service hospitalier public ! Il y a là, me semble-t-il, une profonde injustice dont le syndicalisme doit se saisir même si on est d’abord cardiologue par passion. J’en veux pour preuve les têtes blanches qu’on voit de plus en plus dans nos congrès, même internationaux !




Le Cheval de Troie de l’hôpital public dans le secteur libéral

336 – CardioNews – Le Journal officiel du 16 octobre a donc publié le texte du décret du recrutement de praticiens à l’hôpital en « super-CDD ». En quoi consiste donc ce statut de « CDD doré » comme le qualifie justement Le Quotidien ?

1/ Recrutement là où des postes de PH, à temps plein ou à temps partiel, sont encore vacants mais non pourvus après mise en fermeture des candidatures … Difficile à Paris sans doute mais accessible donc dans le Nord, à la Martinique ou même en Languedoc Roussillon ! 20 % des postes selon une estimation vieille de 2008. La liste des postes mis au concours est régulièrement publiée sur le site du CNG et c’est là, préférentiellement au chapitre des hôpitaux généraux, qu’on trouvera « chaussure à son pied ».

2/ Les modalités d’embauche ne sont pas si complexes ! Un contrat passé avec le directeur, sur avis du chef de pôle (dans le cas où c’est lui que recrute) ou du président de CME dans le cas où le poste à pourvoir est justement … celui d’un chef de pôle. Il faut pour postuler avoir un casier judiciaire vierge et être inscrit au tableau de l’Ordre. Rien que de très normal. Le contrat est signé pour une période de 3 ans, renouvelable une fois, et n’est donc accessible que pour 6 ans mais on peut penser que nombre de chefs de clinique, éconduits à la porte de la carrière hospitalo-universitaire, y trouveront un dérivatif bienvenu…

3/ … et rémunérateur ! Le décret détaille le mode de calcul fondé sur la grille de rétribution des PH (la dernière en vigueur porte la date du 12 juillet dernier) : 48 978,59 € au premier échelon et 88 939,41 € au 13e et dernier échelon (24 ans d’ancienneté). Ceci pour la partie fixe mais la pépite est ailleurs : une part supplémentaire variable « subordonnée à la réalisation d’engagements particuliers et d’objectifs » prévus au contrat. Au moins celles des PH titulaires peut-on penser, au moins en matière de PDS. Mais c’est cette part variable qui représente le plus intéressant gisement financier. En effet elle est plafonnée à …65 % du dernier échelon de la grille, soit 57 810 61 €… Si, si vous avez bien lu : le plafond accessible par ce statut, que serait fondé un cardiologue pouvant exciper de 24 ans d’ancienneté dans sa spécialité s’élève à 146 750 €. Bruts bien sûr … mais aboutissant à une rétribution nette mensuelle de l’ordre de 7 500 € par mois (déduction faite des charges sociales personnelles et patronales, selon nos calculs). De quoi s’interroger, quand même, sur la moralité du « mercenariat » et sur la solidité de sa vocation libérale ! On comprend les PH qui exigent désormais une augmentation de …65 %.

4/ On aura compris qu’il ne s’agit là que d’un plafond mais que les contrats seront négociés individuellement entre le candidat et le directeur d’établissement qui sera d’autant plus enclin à la générosité qu’il se désespère depuis longtemps de pourvoir un poste désespérément vacant. Ne vous attendez pas pour autant à d’autres avantages conséquents : pas droit aux RTT mais quand même les conditions ordinaires d’exercice public (24 heures de repos consécutifs à la garde). Pas le droit non plus d’accéder à un secteur hospitalier privé (privilège de PH, il faut bien qu’il leur en reste) mais quand même le droit de cumuler ce statut avec un exercice libéral en cas d’exercice sous ce statut à temps partiel (entre 4 et 9 demi-journées par semaines).

5/ Autant les conditions d’accès sont, à la porte d’entrée, réduites à leur plus simple expression…, autant celles de sortie le sont aussi et la clause des « objectifs qualitatifs et quantitatifs » inatteints peut vous être opposée pratiquement sans préavis. Mais l’exercice du droit syndical est néanmoins reconnu et on peut très logiquement postuler qu’un syndicat de ces nouveaux mercenaires verra le jour avant quelques mois !

Car si les PH sont « vent debout » contre ce statut de super-mercenaire hospitalier, les directeurs d’établissements sont aussi farouchement favorables … Joyeux échanges en perspective au sein des nouveaux « directoires » d’hôpitaux.




Alerte rouge dans le PLFSS 2011

336 – CardioNews – Cette pratique introduit une nouvelle règle de révision périodique de la nomenclature, plus particulièrement de la valeur des actes innovants.

Cette règle va totalement à l’encontre de la méthode elle même qui prévoit une commission de maintenance, laquelle devait justement apprécier les évolutions et proposer une réévaluation du coût de la pratique et de la valeur du point travail bloquée maintenant depuis près de 10 ans !

Rappelons que la classification commune des actes médicaux, dite CCAM, a été mise en place en 2005 à l’issue de plus de dix ans de travaux. Elle constitue en effet un énorme référentiel de plus de 7 500 actes techniques libellés, hiérarchisés et valorisés. Néanmoins, selon l’exposé des motifs de l’article n° 34 « une telle nomenclature, de par sa densité, est susceptible d’une obsolescence encore plus rapide que l’ancienne nomenclature NGAP ou d’une absence de modification des conditions de réalisation de l’acte ».

Ceci signifie que l’Assurance Maladie ne rembourserait que des actes qui ont un service médical rendu.

En effet, à ce jour, les conditions d’inscription d’un acte ou d’une prestation, leur inscription et leur radiation sont décidées par l’UNCAM après avis de la HAS et de l’Union nationale des organismes d’Assurance Maladie complémentaire.

Le Ministre de la Santé peut en effet procéder d’office à l’inscription ou à la radiation d’un acte pour des raisons de santé publique par arrêté.

Il existe une structure ad hoc, la commission de hiérarchisation des actes professionnels (CHAP), composée des partenaires conventionnels, qui pilote le travail de classement des actes.

La profession a donc directement son mot à dire sur la classification des actes et la grille tarifaire, nerf de la guerre.

De ce fait, avec la révision des nouveaux actes de la grille CCAM, le Gouvernement pourrait non seulement remettre en cause le travail de la CHAP, mais aussi adosser lui-même la valeur des actes à des objectifs comptables.

Le Gouvernement pourrait ainsi se passer des partenaires conventionnels pour fixer directement les tarifs.

C’est un signe, sans aucun doute, du retour des lettres clés flottantes totalement contraire à l’esprit même de la CCAM.

Devant cette alarme, le Syndicat va se montrer vigilant concernant l’article n° 34 du PLFSS et nous continuerons à nous battre pour conserver notre CSC, les cotations de l’écho et des actes de cardiologie interventionnelle.




Exercice libéral : Le programme commun de la CSMF et du SML

336 – Tout commence par une définition de l’exercice libéral « relookée », puisque n’y figurent plus les piliers du temple libéral de la charte de 1927, liberté d’installation, de prescription, etc., mais une référence à des qualifications professionnelles reconnues, la responsabilité personnelle financière et des actes, l’indépendance avec la liberté de s’organiser. L’entreprise médicale de demain doit avoir un statut juridique, déontologique et fiscal permettant un exercice collectif entre médecins et avec les autres professionnels de santé, avec « un nouveau cadre de rémunération pour une prise en charge coordonnée pluridisciplinaire » des patients.

La formation initiale doit comporter des modules d’enseignements spécifiques à l’exercice libéral, avec notamment la possibilité d’un internat en cabinet de ville ou en établissement privé, y compris pour les spécialités médicales et chirurgicales, et favoriser l’exercice mixte hospitalolibéral. Concernant la FMC et l’EPP, la CALM suggère un « séminaire fermé, réunissant le ministère, les Caisses et le syndicat avant la fin de l’année pour décider des mesures », et le financement du DPC par une part conventionnelle garantissant un fonctionnement paritaire. Oui à l’accréditation

périodique par la profession, « à condition de valoriser la démarche qualité et de créer de nouvelles passerelles permettant des évolutions de carrière ».

Un exercice collectif favorisé

Face à la judiciarisation croissante de la médecine, le DMP s’impose, ainsi qu’une messagerie professionnelle sécurisée, mais aussi le relèvement du plafond de garantie (3 à 10 millions d’euros) et l’extension de la couverture « assurancielle » des médecins au-delà des dix ans d’arrêt d’activité et l’interdiction de l’action récursive de l’ONIAM contre le praticien ou ses ayants droit au-delà de ce délai ou des garanties allouées. La Loi Kouchner doit être actualisée par la création d’un système « assurantiel » collectif mutualisé, et une procédure amiable préalable à tout contentieux doit être rendue obligatoire. Les référentiels doivent être professionnalisés avec une forte présence libérale au sein de l’HAS.

L’exercice collectif sera favorisé par un dossier médical interfaçable avec les logiciels métiers, le regroupement virtuel des pôles de santé libéraux, le développement des coopérations interprofessionnelles rémunérées et incitatives (rémunérations de la coordination, forfait structure…). Les projets de maisons médicales pluridisciplinaires doivent émaner des professionnels eux-mêmes, et se faire autour d’un projet de santé territorial « pour un aménagement du territoire concerté », et avant tout dans des zones à démographie médicale déficitaire.

Une rémunération adaptée

La rémunération doit être adaptée. Le paiement à l’acte reste « prépondérant » et doit être fortement réévalué, mais des compléments de rémunération s’imposent pour certaines missions : prévention, éducation thérapeutique, astreintes PDS pour tous, tâches administratives, missions de service public… La CALM réclame une CCAM qui prenne en compte la durée et la complexité de l’acte, l’atteinte de la valeur cible des actes gagnants en CCAM technique, avec une remise à niveau du point de travail, ainsi que le secteur optionnel pour tous. Le paiement à la performance, la CSMF et le SML n’y sont pas opposés, mais à condition que cela s’inscrive dans « un cadre conventionnel ». La réorganisation de l’offre de soins doit se faire selon trois niveaux de recours : un premier recours englobant toutes les spécialités de proximité, dont la médecine générale et les MEP, le deuxième recours étant celui de l’expertise clinique et médicotechnique, et le troisième, celui de l’hyperspécialisation.

Au chapitre de la démographie médicale, les deux syndicats demandent « sa prise en main par la profession », réclament la suppression du contrat Santé Solidarité, et optent pour un contrat volontaire pour s’installer dans les zones sous-dotées à titre transitoire, sous forme de cabinet secondaire financé par les communautés de communes. Ils se prononcent pour un numerus clausus régional par spécialité, un retour à l’internat régional et une limitation dans le temps de la durée d’exercice des primoremplacements exclusifs.

Concernant la couverture sociale du médecin, la CALM propose une couverture prévoyance obligatoire et aidée par l’État. Elle préconise aussi une hausse de la cotisation retraite complémentaire de 9,2 % à 11 % sur une période de cinq ans, et une cotisation transitoire d’ajustement de l’ordre de 2 % du revenu financé aux deux tiers par les Caisses et un tiers par les médecins pour apurer le passif de l’ASV. Et elle réclame pour les femmes médecins des prestations maternité identiques à celle du régime général.

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Sortira, sortira pas ?

| |Annoncé pour la fin septembre, puis remis à la mi-octobre pour ne pas troubler les élections aux URPS, le rapport d’Elisabeth Hubert tarde à paraître. Selon la rumeur, dans l’optique d’une succession pressentie à Roselyne Bachelot, la publication de son rapport sur l’avenir de la médecine de proximité pourrait n’intervenir qu’après sa nomination. Elle arriverait ainsi forte d’une popularité que n’aurait pas risqué d’ébranler la révélation de propositions qu’on imagine mal en totale opposition avec la politique menée jusqu’à présent par le Gouvernement en matière de santé… Autre hypothèse bien moins vraisemblable : les propositions seraient tellement « décoiffantes », qu’elles feraient l’objet d’un veto de Matignon !|

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Entretien avec Michel Chassang (CSMF) et Christian Jeambrun (SML) : « Une base de travail et de discussion »

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| On remarque que la définition de l’exercice libéral ne fait plus référence aux sacro-saints trois piliers de la médecine libérale, quel signe faut-il y voir ? _ Michel Chassang : Il faut y voir une adaptation à notre temps. Ces 100 propositions ne sont pas la Bible de l’exercice libéral, mais des mesures concrètes pour l’améliorer, des propositions de bon sens, très pratique. Elles s’adressent au Gouvernement et aux parlementaires, parce qu’il y a nécessité de changer la loi HPST. Elles s’adressent également à nos partenaires conventionnels. Et nous avons, bien évidemment, adressé ces 100 propositions ainsi que les 55 mesures du CNPS à Elisabeth Hubert.

Quels échos suscitent-elles ? Quelle suite en attendez-vous de la part de ces destinataires ? _ M. C. : Alors que plus de 60 % des médecins viennent de signifier clairement leur rejet de la loi HPST en votant pour la CSMF et le SML, et que le président de la République fait de la médecine libérale une priorité, je ne vois pas comment le Gouvernement pourrait prendre des mesures qui iraient à l’encontre de nos propositions. _ Christian Jeambrun : Ce travail en commun avec la CSMF s’est fait en réaction à la mission Legmann – et à sa composition – qui a été un coup d’épée dans l’eau, la messe étant dite à l’avance, ainsi qu’aux EGOS. Nous avons balayé tout le champ de la médecine libérale. Maintenant, nous avons gagné les élections, et le front du refus à la loi Bachelot est très largement majoritaire. Nous demandons une pause dans l’application de la loi HPST, et que nos propositions soient envisagées. C’est une base de travail. Nous avons travaillé pour produire ces propositions qui sont une plate-forme pour le réaménagement la loi HPST et les futures négociations conventionnelles. Nous sommes prêts à discuter sur cette base. ■|(gallery)




Revenus : 2009, année morose pour les libéraux

336 – Par les temps qui courent, peu de gens affichent leur satisfaction au regard de leurs revenus, les médecins pas plus que les autres. Les revenus de la plupart des praticiens libéraux en 2009 stagnent, quand ils ne régressent pas. Avec une très légère hausse, les cardiologues se situent à peu de choses près à la charnière entre les gagnants et les perdants. Selon les résultats de l’AGAPS (Association de Gestion Agréée des Professions de Santé), le résultat net (avant impôt) des cardiologues libéraux était, l’année dernière, de 93 244 euros, soit 46,8 % d’un chiffre d’affaires moyen de 199 020 euros. Le bilan des Associations de Gestion Agréées (AGA) de l’Union Nationale des Professions Libérales (UNAPL) donne des chiffres sensiblement différents, avec un bénéfice de 115 700 euros, soit 53,79 % d’un montant net de recettes de 215 100 euros. Une différence qui s’explique en partie par un pourcentage plus important de praticiens exerçant en secteur 2, et pratiquant donc des dépassements d’honoraires, dans les effectifs des AGA de l’UNAPL, ceux appartenant à l’AGAPS étant majoritairement en secteur 1.

Mais dans les deux cas, l’évolution du revenu imposable des cardiologues libéraux entre 2008 et 2009 est le même : + 0,6 %. Une faible croissance pour laquelle le président du SNSMCV, Jean-François Thébaut, avance deux explications. « Les cardiologues travaillent tous beaucoup, ils ne peuvent plus augmenter leur activité, ils sont “au taquet”. Les échographies cardiaques augmentent de 5 % tous les ans, mais pour autant, le revenu des cardiologues n’augmente pas. Les cardiologues ne multiplient pas les actes, ils agissent au mieux pour leurs patients et font une échographie plutôt que de faire une consultation. Par ailleurs, en l’absence de revalorisation tarifaire, l’effet volume ne joue plus. L’autre interprétation de cette faible progression de nos revenus se trouve dans un effet mécanique décalé dans le temps d’une augmentation que les cardiologues ont obtenu en 2007 ; ils ont de ce fait payé plus d’impôt l’année suivante, et l’année d’après, leur revenu stagne parce qu’ils payent l’augmentation de charges due aux années précédentes. »

Selon les résultats de l’AGAPS, et si l’on considère le niveau de résultat net, les cardiologues arrivent en septième position derrière les anesthésistes, les biologistes, les radiologues, les chirurgiens, les ophtalmologistes et les stomatologues. Ces spécialistes enregistrent tous cependant un recul par rapport à l’année 2008, à l’exception des chirurgiens qui avaient connu une évolution négative (-0,7 %) entre 2007 et 2008, et qui regagnent du terrain en 2009 par rapport à 2008 avec une évolution positive de 4,4 %. On remarque la présence persistante des spécialités cliniques dans le bas de l’échelle des revenus, dont certaines enregistrent une évolution négative par rapport à 2008, comme la rhumatologie (-5,8 %), les dermatologues (-2 %), les psychiatres (-1,9 %) ou les gynécologues (-2,1 %). Quant aux généralistes en 2009 la diminution de leur revenu s’accentue en 2009 (-1,4 %) par rapport à 2008 (-0,3 %).

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2 570 euros de retraite mensuelle

| |Selon la CARMF, au 1er juillet 2010, 39 333 médecins retraités ont perçu une retraite pour le deuxième trimestre dont le montant moyen s’est élevé à 7 707,73 euros, correspondant à 2 569,24 euros mensuels (avant prélèvements sociaux, CSG et CRDS). _ Avec 1 074 € par mois, c’est le régime complémentaire qui représente la plus grosse part (42 %) de la retraite CARMF versée au médecin. Le régime ASV s’élève en moyenne à 1 000 € mensuels (39 %) suivi du régime de base qui représente 495 €, soit 19 % de la retraite moyenne versée.|(gallery)




La nouvelle Alliance du Cœur

336 – Pour obtenir sa reconnaissance d’utilité publique et élargir le cercle de ses adhérents, la FNAMOC change de nom et de statuts. Sous sa nouvelle identité, elle va démarrer la mise en oeuvre d’un projet d’Education Thérapeutique du Patient (ETP) qui a été retenu par la DGS.

Après dix-sept ans d’existence, forte de 10 000 membres à travers vingt-sept associations adhérentes, la Fédération nationale des associations de malades opérés du coeur, la FNAMOC, devient l’Alliance du coeur. Trois raisons expliquent ce changement d’appellation. « Esthétiquement, d’abord, FNAMOC ne sonnait pas très joliment, et le déroulement complet de ce sigle était un peu long et compliqué », commente son président, Jean-Claude Boulmer. Mais hormis cette raison esthétique, et qui n’est pas si futile que cela au regard des impératifs d’une communication simple et claire, la nécessité de changer de statut – et donc de nom – s’imposait aussi : « Nous sommes en voie de demander notre reconnaissance d’utilité publique, et nous ne pouvions pas rester une fédération de fédérations, explique Jean-Claude Boulmer. Nous devenons donc l’Union nationale des fédérations et associations de malades cardiovasculaires, sous le nom plus simple et plus attractif d’Alliance du Coeur, qui joue, bien évidemment, sur le double sens du mot coeur, l’organe et le sentiment. Enfin, la troisième raison à ce changement est que nous souhaitons nous ouvrir aux personnes atteintes d’autres pathologies cardiaques, hypertendus, porteurs de stent, insuffisants cardiaques. Or, notre nom n’y incitait pas, les patients non opérés du coeur pensant de ce fait ne pas pouvoir adhérer à notre structure. »

Un heureux événement

Ce changement de nom coïncide avec un heureux événement pour la structure. Ayant répondu à l’appel à projets 2010 pour l’éducation thérapeutique du patient (ETP), la FNAMOC a vu son dossier retenu parmi les trente dossiers présentés (neuf dossiers au total ont été sélectionnés), et bénéficiera pour mener son projet d’une dotation de 75 000 euros (voir encadré ci-contre). Ce programme, qui se déroulera sur quinze mois, devrait vraisemblablement démarrer au début de l’année prochaine.

Sous sa nouvelle appellation, et forte de cette acceptation, l’Alliance du coeur prend un nouvel élan. « Nous avons de nombreux projets pour cette année et pour 2011, souligne Jean-Claude Boulmer. Nous voulons notamment créer un numéro vert afin de pouvoir répondre aux questions des patients. D’une façon plus générale, nous faisons le constat que, si nous sommes bien connus des professionnels de santé, nous ne le sommes pas assez du grand public. Et tous nos projets tendent à remédier à cela. »

Le projet ETP d’Alliance du Cœur

Il s’agit d’un projet d’implication de patients-experts atteints de maladies cardiovasculaires dans des programmes d’éducation thérapeutique existants. Il consistera à : |■ réaliser un état des lieux de l’offre d’ETP dans le champ de maladies cardiovasculaires (en option),| |■ élaborer une intervention éducative « patient-expert » de plusieurs modules| |■ recruter des représentants associatifs et les former pour qu’ils deviennent animateurs « patients-experts » d’ateliers d’éducation,| |■ proposer cette intervention aux équipes porteuses de programmes d’ETP| |■ mettre en oeuvre les programmes d’ETP incluant les patients-experts formés| |■ observer le processus d’implication de ces patients-experts formés dans des programmes d’ETP.| _ Le projet sera conduit par un comité de pilotage national et plusieurs comités de pilotage locaux, auxquels s’ajoutera un coordinateur. L’évaluation portera sur les conditions d’acceptabilité et de faisabilité de l’intervention de patients dans les programmes d’ETP menés par les équipes de soins, sur les prérequis et les compétences nécessaires aux patients qui souhaitent intervenir dans un programme d’ETP, sur les modalités de recrutement, de formation et de suivi, et enfin, sur l’utilité de ces interventions.(gallery)




Le Contrat d’Amélioration des Pratiques Individuelles (CAPI) est-il éthique ?

325 – La médecine ambulatoire a su, en France, garder une certaine autonomie à l’égard de l’Etat et de l’Assurance Maladie. Dans l’affrontement qui l’a opposée aux pouvoirs publics, se jouait, bien au-delà d’un intérêt corporatiste, un débat théorique sur le rôle de l’Etat en matière de santé. Devait-il s’immiscer dans la relation médecin/malade pour imposer au premier ses exigences et au second l’uniformité de la pratique médicale ? La survie du « colloque singulier » en dépendait. Pour ses défenseurs, la médecine « libérale » devait rester, au moins en tant qu’idéal, un espace de liberté pour le patient et le médecin.

Dans nos pays riches cependant, le champ de la santé s’est transformé. Chronicisation de la maladie, connaissance accrue des facteurs de risque et exigence d’efficience – ces trois évolutions étant étroitement liées – ont eu raison d’une politique de santé fondée sur la notion d’« accident ». C’est désormais un champ toujours plus vaste de facteurs de risque particuliers qui se présente aux pouvoirs publics.

Dans ces conditions, l’Etat, ou en l’occurrence l’Assurance Maladie, doivent sélectionner les risques qu’ils couvrent afin de garantir une juste allocation des ressources collectives. Or, ils peuvent le faire de deux manières : la première remet en cause l’existence de la médecine libérale et surtout, à travers elle, la liberté des citoyens ; la seconde tend à la préserver. Le CAPI semble relever de la première démarche. Celle-ci consiste, pour l’Assurance Maladie, à cibler son action sur les patients et sur les médecins pour en assurer l’efficience. En d’autres termes, à favoriser, par un système d’incitations, tout à la fois le bon comportement des médecins et celui des malades. Une telle politique, malgré ces bonnes intentions, peut s’avérer dangereuse à plusieurs égards.

CAPI, une course au résultat ?

D’une part, en incitant le médecin à prescrire les molécules les moins chères pour une même efficacité supposée, le CAPI récompense une pratique médicale pouvant contrevenir au principe de la bienfaisance hippocratique. Mais d’autre part, et peut-être plus gravement encore, en incitant le médecin à régenter les bonnes pratiques préventives des patients, le CAPI semble confirmer, comme d’autres évolutions des politiques de santé, le sombre présage de Tocqueville : c’est, écrivait l’auteur de la Démocratie en Amérique, à protéger l’individu contre lui-même que l’Etat s’emploiera dans les années à venir. C’est par l’intermédiaire du médecin contractant que le CAPI rend possible un tel paternalisme. Ce dernier a, en effet, tout intérêt à exiger de son patient une conduite exemplaire s’il veut atteindre les résultats les meilleurs et, donc, la rémunération la plus haute. A quoi pourrait s’ajouter, bien que nous n’en soyons pas encore là, une moralisation, voire une culpabilisation du patient : si, malgré les généreux conseils que le médecin lui donne, il s’entête dans des pratiques qui mettent en péril sa santé, pourquoi ne pas le réprimander ?

Le colloque singulier ne serait plus vraiment « singulier » tant le médecin, en jouant un rôle d’objecteur de conscience, deviendrait le relais de l’Assurance Maladie.

Pourtant, l’Etat peut faire face d’une autre manière à la multiplicité des facteurs de risque : en limitant son rôle en matière de santé pour préserver tout à la fois l’inconditionnalité de l’assistance – l’aide s’applique à tous et de manière identique – et la liberté des citoyens.

Cette voie, qui est aussi celle d’une préservation de la médecine libérale, est cependant difficile à tracer. Elle impose notamment de trouver, pour corriger les inégalités sociales de santé qui ne cessent de se creuser, d’autres moyens qu’une prévention ciblée orchestrée par l’Etat. Que penser, par exemple, de la distribution sous forme monétaire d’une allocation dédiée à la santé et indexée sur le revenu ? Cette solution présenterait le double avantage de concilier la préservation des libertés individuelles et le souci, à travers un financement socialisé pérenne, d’une correction des inégalités sociales de santé.

En cela réside un des grands enjeux des années à venir. ■

Paul-Loup Weil-Dubuc _ (Doctorant en philosophie politique à l’Université Paris IV- Sorbonne)




Eric Perchicot (Syndicat de PACA) : La victoire de la CSMF et de son allié, le SML, est assez probante !

335 – CardioNews – Le Cardiologue : Le Cardiologue : D’abord, félicitations pour votre élection à l’URPS-PACA, où vous ne vous ne serez, en outre, pas le seul représentant des cardiologues…

Éric Perchicot : En PACA, les cardiologues comptent 2 élus sur les 29 du collège des spécialistes. C’est le résultat d’une réunion du Bureau du SNSMCV il y a quelques mois où nous nous étions dit que le meilleur moyen de défendre la spécialité auprès des ARS était d’envoyer le maximum des nôtres dans les URPS. A l’époque, on se disait « dans le doute, mieux vaut ne pas s’abstenir » ; aujourd’hui, on peut rétrospectivement considérer que nous avons eu raison, même si l’éclatement de la représentation en 3 collèges va nous pourrir la vie, … et me fait personnellement nourrir quelque inquiétude sur la force de représentation des URPS.

Quelle conclusion tirez-vous du scrutin, en région PACA d’une part, au plan national d’autre part ?

E. P. : Au plan national d’abord, la victoire, probante, de la CSMF et de son allié du SML constitue un signal politique fort adressé aux pouvoirs publics et aux ARS : le corps médical libéral est disposé à la réforme mais entend bien se faire respecter. Je suis convaincu de leur implication croissante dans la vie de la médecine libérale, ne serait-ce qu’avec la PDS. Mais la coordination des soins, la délégation de tâche, l’ETP, la télémédecine apparaissent comme autant de domaines de compétences des ARS qui nous impactent directement. Dans ces conditions les SROS (Schémas Régionaux d’Organisation Sanitaires), les CPOM (Contrats Pluriannuels d’Objectifs et de Moyens), les CAQCS (Contrats d’Amélioration de la Qualité et de la Coordination des Soins) et autres acronymes ne sont plus seulement des instruments réservés à l’hôpital. Comme travaillent dans ces agences des gens intelligents, je suis également persuadé – au risque de me tromper – que ce sont eux qui vont demander sous peu la fongibilité des enveloppes de dépenses de ville et hospitalière, seul levier en capacité de leur permettre de réaliser les économies demandées par le Gouvernement.

Qu’est-ce qui vous fait penser cela ?

E. P. : Notre expérience dans le Sud-Vaucluse où les libéraux font littéralement « tourner » la cardiologie hospitalière. C’est, de toute évidence, l’intérêt de tout le monde et la solution la plus efficiente pour conserver un maillage opérationnel dans les villes moyennes, en gros de moins de 100 000 habitants. Il n’y a, à cela, qu’une seule condition, c’est la capacité d’organisation et de regroupement des libéraux mais on en trouve beaucoup plus de partisans et d’avocats dans les agences régionales que chez nos confrères, notamment hospitaliers.

Sur un autre sujet d’actualité, le PLFSS est maintenant connu avec son objectif d’évolution des dépenses libérales à 2,9 % comme en 2010. Les cardiologues s’en sortent-ils avantageusement ?

E. P. : Ils ne sont pas nommément désignés, comme les radiologues ou les biologistes, comme victimes expiatoires des prochaines baisses d’honoraires. Pour autant, il faudra être attentif à voir l’issue du débat parlementaire où nous ne comptons pas que des amis. Pour ma part, j’observe – pour le regretter – que la médecine libérale n’a aucun autre dividende à attendre que l’euro symbolique qui lui est promis depuis 3 ans sur le C, alors qu’elle a parfaitement tenu ses objectifs de maîtrise en 2010. Comment faire passer le message de la maîtrise si le respect des objectifs ne vaut aucune considération, c’est tout à fait désolant ? Mais je suis aussi hospitalier public et quand je vois les coupes sombres auxquelles sont soumis les hôpitaux généraux, je me dis que les pouvoirs publics vont finir par « étrangler aussi leurs danseuses »

Sinon dans l’actualité prochaine, il y a aussi le remaniement ministériel annoncé…

E. P. : Très franchement, le sort de Mme Bachelot m’est complètement indifférent. Quant au prochain titulaire du poste, je suppose qu’il sera là pour mettre en œuvre la politique de « refondation » souhaitée par M. Sarkozy qui a promis d’en faire « la grande affaire » de la fin de son quinquennat. Soyons pragmatiques, on verra bien !




PLFSS 2011 : l’ordonnance de l’Assurance Maladie

335 – CardioNews – De nouvelles économies seront nécessaires pour réduire le déficit 2011 de la Sécurité Sociale en grande partie lié à une diminution des recettes dans le cadre de la crise économique. En effet, celui-ci est confronté à un déficit record (23,2 milliards d’euros en 2010 dont 11,5 milliards pour la branche maladie). De ce fait, le Gouvernement a programmé une batterie de mesures dans le cadre du PLFSS 2011 ; ces mesures sont envisagées pour une économie de 2,5 milliards d’euros. L’objectif est de permettre de limiter la hausse des dépenses maladies à 2,9 % en 2011. Le PLFSS renonce à augmenter le ticket modérateur en médecine de ville.

1. En ville : les médecins, l’industrie et les patients sont mis à contribution – Maitrise médicalisée : 550 millions d’euros d’économies prévues (efforts sur de nombreux outils tels que le CAPI, kinésithérapie, réadaptation et incitation à prescrire des génériques chez les médecins) – Baisse de prix des médicaments : 500 millions d’euros – Radiologues et biologistes : 200 millions d’euros – Remboursement des vignettes bleues (35 % passant à 30 %) : 165 millions d’euros d’économies – L’industrie pharmaceutique : 50 millions d’euros – Le forfait « actes coûteux » s’alourdit : 95 millions d’euros. _ Le seuil de déclenchement de la participation forfaitaire des assurés de 18 euros pour les actes coûteux en ville et à l’hôpital passerait de 91 euros à 120 euros avec un ticket modérateur de 24 euros.

2. A l’hôpital : économies à réaliser – Remboursements, tarifs et médicaments coûteux : 355 millions d’euros – Convergence (T2A + performances) : 150 millions d’euros – Rationalisation des achats : 145 millions d’euros.

3. Le secteur médico-social : 300 millions d’euros touchant principalement le secteur des personnes âgées handicapées.

4. Les mesures concernant les ALD – L’HTA isolée sort du régime : 20 millions d’euros d’économies – L’autocontrôle du diabète forfaitaire : 35 millions d’euros d’économies – Les transports sanitaires sous contrôle : 20 millions d’euros d’économies

Soit un total de 2,5 milliards d’euros.

Qu’en est-il pour la cardiologie ? Notre combat continuera sur le plan de la défense : – de la CCAM clinique et de la CSC – de l’échocardiographie (un AcBUS en partenariat avec la SFC est préparé) – pour le paiement des astreintes dans les centres cardiologiques privés.

Seule bonne nouvelle annoncée par le Gouvernement : du fait du respect de l’ONDAM 2010, le règlement arbitral a prévu la hausse de 1€ de la consultation des médecins généralistes au 1er janvier 2011 entraînant le passage du C2 à 46 €.

Dans tous les cas, il nous faudra rester vigilants en 2011, l’année de tous les dangers…




En attendant Elisabeth Hubert

355 – CardioNews – La formule ressemblait à un signe indien, énoncé pour la première fois un soir de septembre 1999 par le directeur d’alors de la CNAMTS et hôte de l’Université d’été de la CSMF. Sous forme de boutade, Gilles Johanet avait énoncé une vérité d’évidence : « Le signataire d’une convention s’expose inévitablement à… perdre les élections consécutives ». De fait, la CSMF avait validé cette malédiction en 1995, MG-France en 2000 puis la CSMF à nouveau en 2006…

D’où le dilemme imposé en 2010 aux confédérés : comment gagner les élections en ayant signé et largement « porté » la Convention de 2005. En un mot, comment contourner la malédiction de Johanet ? La solution fut vite trouvée : il suffit d’inverser le paradigme en dénonçant les soutiens de… la loi HPST. Opération réussie et même au-delà : le tandem CSMF-SML s’est assuré, à la faveur de l’élection aux URPS, une majorité confortable dans la quasi-totalité des 26 régions administratives et peut même nourrir l’espoir légitime d’un grand chelem, à la tête de toutes les URPS !

Voilà pour l’essentiel, car on ne saurait ignorer – et Éric Perchicot (PACA) en témoigne dans l’entretien qu’il nous a accordé – que la loi HPST sera peut-être « nettoyée » de ses dispositions les plus provocatrices selon le vœu de Michel Chassang, mais ne sera ni révisée ni sans doute amendée autrement qu’à la marge ! Les ARS sont là pour mettre en œuvre une amorce de planification, avec les fameux SROS « ambulatoires », et faire valoir qu’elles ont besoin d’un minimum de « fongibilité » entre les enveloppes de ville et hospitalière pour réaliser les économies que l’exécutif attend d’elles dans le cadre de sa politique de « nationalisation déconcentrée ».

Et leurs directeurs seront obligés de composer avec des présidents d’URPS, confortablement élus et naturellement dépositaires de la « légitimité des urnes ». Mais il y a aussi l’accessoire et, dans le cas de ce scrutin, il le dispute à l’objet même de l’élection : la portée « politique » du vote des médecins. Le désaveu est cinglant pour le Gouvernement et les soutiens syndicaux de la loi HPST : la FMF qui avait réalisé, il y a 4 ans, un score littéralement historique, revient à son étiage ordinaire, aux environs de 10-20 % selon les collèges. Et disons-le tout net aux limites de la représentativité : dans le collège des généralistes où elle prétendait au leadership, sa déconvenue est sévère. Il lui faudra plus qu’un lifting doctrinal pour espérer retrouver un semblant d’influence … sinon dans les manœuvres de coulisses sur l’air de « Tout sauf la CSMF » !

La « claque » est enfin sonnante pour Roselyne Bachelot qui avait épuisé dans une affligeante campagne anti-H1N1 le capital de sympathie dont elle était créditée à son arrivée au ministère. Ce serait une authentique provocation de la part de Nicolas Sarkozy que de la maintenir dans son maroquin. Il s’y risquera d’autant moins que François Fillon, « mentor » de la dame, ne verra pas renouveler son bail à Matignon.

Et puis, il y a surtout l’avenir. Pour l’heure, suspendu aux propositions qu’est censée formuler Elisabeth Hubert aux environs du 20 octobre en l’état de nos informations. Abordera-t-elle le problème de la médecine spécialisée « de proximité » ? On l’espère. Nicolas Sarkozy a promis de faire de la médecine libérale « la grande affaire » de la fin de son quinquennat. Il reste 18 mois aux acteurs – tous ne sont pas encore connus mais du moins les élus de la profession le sont-ils – pour réconcilier les médecins avec la société civile.

Jean-Pol Durand




Élections aux URPS : Le non des médecins libéraux au Gouvernement

335 – Les urnes ont parlé ! Et si les résultats ne changent pas radicalement le paysage syndical, ils disent en tout cas très clairement au Gouvernement que les médecins refusent catégoriquement sa politique en matière de santé, puisque la CSMF et le SML, qui ont fait leur campagne sur le rejet de la loi HPST « liberticide », font un tabac. Tous collèges confondus, la CSMF conforte sa place de « premier syndicat médical français » avec 33,6 % des suffrages, suivi du SML avec 22,32 % des suffrages, les deux centrales totalisant ainsi 669 sièges sur le 1124 au total.

Chez les spécialistes, la CSMF enregistre une forte poussée par rapport au scrutin de 2006, passant de 38 % à 51 % des voix, le SML doublant quasiment son score dans ce collège avec 31 % des voix contre 16 % quatre ans plus tôt. Si MG France conforte son leadership chez les généralistes en pourcentage de voix exprimées, avec un résultat (30 %) un point en deçà de celui de 2006, la répartition des sièges à la plus forte moyenne place la CSMF en tête en termes de sièges, la Confédération en remportant 175, et MG France 164. Quant à la FMF, malgré la fusion avec Union Généraliste, elle apparaît comme la grande perdante de cette élection, particulièrement chez les spécialistes où elle ne remporte que 15 % des suffrages, quand elle en avait obtenu 36 % en 2006.

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Enfin, dans le nouveau collège Chirurgiens, Anesthésistes, Obstétricien (CAO), Le Bloc, ovni dans la sphère syndicale, composé de l’Union des chirurgiens de France, du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France et de l’Association des anesthésiologistes libéraux, il rafle e la mise avec 57 % des voix, quand la CSMF n’en fait que 18,89 % et le SML 14,79 %. Un résultat que relativise cependant le président de la Confédération, Michel Chassang, qui fait observer que Le Bloc ne remporte jamais que les voix de 3 755 médecins libéraux, quand la CSMF en remporte 18 000…

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« C’est une grande victoire pour l’UMESPE, se félicite son président, Jean-François Rey. Un médecin spécialiste sur deux a voté pour l’UMESPE et, si l’on additionne le collège spécialistes et le collège CAO, totalise les voix de 9 500 votants (cela représente plus de 44 % de tous les spécialistes ndlr). C’est une défaite pour Roselyne Bachelot, et le début d’un nouveau combat syndical. Le Gouvernement va être obligé de changer de politique et ne va pas pouvoir continuer de s’appuyer sur les seuls généralistes de premier recours en excluant les spécialistes. J’espère que le Gouvernement va enfin écouter nos demandes pour les spécialistes de premier recours. Car la revalorisation des spécialités cliniques est une priorité. » L’arrivée du Bloc dans les rangs des négociateurs ? « Soit Le Bloc rentre dans la négociation et comprend que les spécialistes à plateaux techniques lourds font partie intégrante de la médecine libérale, soit il pense, comme la FMF, que le Gouvernement va les soutenir, et ils vont vers de grandes désillusions. Le Bloc, comme MG France, soutient une revendication catégorielle ; mais on ne fait pas une politique de santé en menant une politique catégorielle. La porte est ouverte pour une convention avec le plus grand nombre possible de signatures.»

|Le cardiologue tête de liste CSMF| |Seul cardiologue confédéré tête de liste en Auvergne, Jean-Pierre Binon est heureux ! « La CSMF reste le premier syndicat des médecins français, et en votant pour elle et le SML, les médecins ont confirmé le rejet de la politique gouvernementale. » _ Dans sa région, la CSMF gagne un siège, passant de 13 à 14 sièges : « nous frôlons la majorité absolue ! » Mais au-delà la satisfaction de ces bons résultats, Jean-Pierre Binon pense déjà à demain : « Maintenant, il va falloir faire fonctionner les URPS, les positionner vis-à-vis des ARS, des syndicats, et définir une méthodologie de travail. C’est un grand chantier qui s’ouvre ! ».|(gallery)




Gérard de Pouvourville : « Un plan pas si drastique que cela »

335 – Que pensez-vous du plan d’économie gouvernemental pour la Sécu ? _ Gérard de Pouvourville : Dans le contexte défavorable actuel, ce n’est pas un plan si drastique que cela. L’évolution de l’ensemble des dépenses de santé se situe un point au-dessus de l’évolution du PIB en volume, et l’on poursuit sur un même rythme d’évolution. L’ONDAM à 2,9 % est un ONDAM de crise, mais qui maintient néanmoins une augmentation des dépenses d’Assurance Maladie que n’atteignent pas d’autres secteurs d’activité, et, relativement à la dureté des temps, ce n’est pas le système de santé qui est le plus mal loti. Depuis trois, quatre ans, on est dans une progression modérée du rythme des dépenses due essentiellement au démantèlement progressif de la couverture sociale pour le « petit risque ». Manifestement, la volonté du Gouvernement est de maintenir la pression, voire de l’augmenter en fonction de l’évolution du PIB, mais à côté d’autres ministères franchement à la diète, la santé est un secteur qui reste prioritaire.

Pour contenir l’évolution des dépenses, on fait toujours appel aux mêmes « rustines »… _ G. de P. : A court terme, il est vrai que l’on reste dans une gestion comptable. Mais la loi HPST a introduit une vision à plus long terme, même si l’on ne sait pas encore quel sera l’incidence de cette loi sur l’hôpital en particulier. Parallèlement, une réfl exion est en cours sur la restructuration de la médecine de ville. L’action publique ne recourt pas uniquement aux rustines, et tente d’aller au-delà. Le vrai problème, qui reste entier, étant celui du financement de l’Assurance Maladie.

A ce propos, l’augmentation des prélèvements obligatoires serait-il tellement plus périlleux que le grignotage de la couverture de l’Assurance Maladie au fil du temps ? G. de P. : Sans doute pas. D’ailleurs, une récente enquête réalisée pour la Générale de Santé montre que plus de 50 % des Français sont prêts à payer plus. Mais pour le Président de la République, ce serait revenir sur des promesses fiscales, c’est la peur d’entraver la consommation… Par ailleurs, le système de cotisation sociale français est assez faiblement progressif : certes, les riches payent plus, mais moins en proportion que les pauvres. Il faudrait donc revoir le système fiscal, comme le veut le Parti socialiste. Mais ce sont des boîtes de Pandore que personne ne veut ouvrir.(gallery)




De la rigueur pour pas grand chose

335 – Depuis que le Président de la République l’avait annoncé au printemps, on savait à quoi s’en tenir en ce qui concerne l’ONDAM 2011. Il avait dit 2,9 %, ce sera 2,9 %. Avec un taux de progression identique pour la médecine de ville et l’hôpital (2,8 %). Certes, c’est un taux de crise, mais qui représente tout de même presque 5 milliards d’euros supplémentaires pour les dépenses de santé. Certains secteurs doivent se soumettre à une diète autrement sévère, comme le fait remarquer l’économiste Gérard de Pouvourville (voir son entretien). Et pas question de dépasser cet ONDAM comme d’habitude ! Pour rester dans les clous, et contenir le déficit de l’Assurance Maladie en 2011 au niveau de 2010, soit -11,6 milliards d’euros, il n’y a pas de secret, il va falloir économiser 2,5 milliards d’euros.

Rester dans les clous

Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) présenté le 28 septembre dernier devant le Parlement reprend donc les vieilles recettes. Envisagée un moment, la baisse du taux de remboursement de 70 % à 69,5 % pour les consultations médicales, les analyses biologiques et les séances de kiné a été abandonnée. Trop compliquée à mettre en oeuvre, puisqu’elle nécessitait notamment une mise à jour des logiciels de l’Assurance Maladie, et d’un coût politique qui risquait d’être beaucoup plus élevé que l’économie escomptée : 200 millions d’euros par an…

Pas d’augmentation du ticket modérateur donc, mais les usagers de la santé vont payer quand même. Les médicaments à vignette bleue, considérés comme offrant un service médical rendu « modéré », seront dorénavant remboursés à 30 % au lieu de 35 %. Ces produits de représentant que 7 % des remboursements, l’économie générée par cette mesure sera « modérée » elle aussi : un peu moins de 100 millions par an. Les affections longues durées seront aussi ciblées : limitation des transports et des bandelettes pour les diabétiques de type 2 ainsi que l’exclusion de l’HTA modérée devraient rapporter 75 millions d’euros. A l’hôpital aussi, le patient est mis à contribution avec le relèvement de 91 euros à 120 euros du seuil en-deçà duquel il s’acquitte d’un TM de 20 %, et au-delà duquel, il paye un forfait de 18 euros. Le rendement annuel attendu de cette mesure est de 95 millions d’euros.

Reprendre d’une main ce qu’on a donné de l’autre

L’industrie pharmaceutique est aussi mise à contribution par des déremboursements de médicaments (500 millions), les tarifs des radiologues et des biologistes sont revus à la baisse afin de gagner 200 millions. Et si le C à 23 euros est bien budgété dans cet ONDAM (260 millions), les généralistes vont devoir en quelque sorte le « payer » par une modération de leurs prescriptions dont l’Etat attend 550 millions d’euros d’économie. Cela s’appelle reprendre d’une main ce qu’on a donné de l’autre. Une « logique » qu’on observe aussi s’agissant du relèvement du plafond d’accès à l’aide à l’Acquisition d’une Complémentaire Santé (ACS) fixé à 26 % en 2011 – au lieu de 20 % actuellement – au-dessus du plafond de bénéfice de la CMU. Environ 80 000 personnes supplémentaires pourraient être ainsi couvertes. Oui mais, dans le même temps, les mutuelles ont annoncé qu’une augmentation de leurs cotisations de 8 % à 10 % était inéluctable pour faire face aux taxes qu’on leur impose, et aux transferts toujours plus fréquents de l’Assurance Maladie vers les complémentaires santé. Cherchez l’erreur…




Henri Bricaud n’est plus

334 – La mort subite mercredi dernier du professeur Henri Bricaud met fin à une vie exemplaire consacrée avec acharnement au service des malades et du progrès médical. Élève de prédilection du professeur Pierre Broustet, il fut pour commencer, l’âme et l’artisan du développement du service de cardiologie de l’hôpital du Tondu : il était tout à la fois, le chercheur scientifique, le clinicien exemplaire et l’enseignant rigoureux.

Un précurseur

Il lança à Bordeaux le cathétérisme cardiaque qui a été le préalable à la chirurgie cardiaque, les unités de soins intensifs, les épreuves d’effort, l’informatique appliquée à l’hémodynamique et aux dossiers médicaux, la coronarographie, la réadaptation des cardiaques. Dans tous ces domaines, il était un précurseur. Son tempérament, associant pugnacité et courage, lui fi t accepter d’être élu doyen de la faculté de médecine après mai 1968. Il créa et établit l’université de Bordeaux II et ses trois facultés de médecine, il en assurera la présidence jusqu’en 1976. Le niveau où il avait porté l’école de cardiologie bordelaise la conduisit à son accomplissement, par la conception et la réalisation de l’hôpital cardiologique du Haut-Lévêque dont il fut le maître d’oeuvre. Avec un acharnement inlassable, il mobilisa toutes les administrations et obtint en un temps record dès 1978, l’ouverture de cet hôpital qui fut le deuxième en France après celui de Lyon. Avec ses malades, l’empathie, le sourire, le dévouement, la disponibilité, tranchaient avec la sévérité de ses exigences avec ses équipes.

Sa vie professionnelle a été portée par le courage ; il lui en fallut beaucoup plus encore pour lutter contre la maladie. Il supporta avec stoïcisme et discrétion les souffrances et le handicap de ses dernières années. Il laisse un grand vide dans le coeur de ceux qui l’aimaient.

Ses obsèques ont eu lieu le 7 septembre dernier à Bordeaux.




EIRL : un statut intéressant pour les médecins

334 – La loi relative à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) est parue au Journal Officiel du 16 juin dernier. Elle crée un statut qui permet aux entrepreneurs individuels, qu’ils soient commerçants, artisan ou professionnel libéral, de créer un patrimoine professionnel distinct de son patrimoine personnel, sans pour autant devoir créer une société. Ce dispositif, qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain, et qui peut intéresser un certain nombre de médecins, a l’avantage de protéger les biens personnels en cas de faillite. Seul le patrimoine professionnel étant affecté à l’exercice de l’activité professionnelle, en cas de problème, l’entrepreneur n’a plus à répondre de ses dettes sur la totalité de son patrimoine, comme auparavant, mais uniquement sur son patrimoine professionnel. Vice-président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts comptables ainsi que de l’UNAPL, Michel Giordano souligne que « pour la première fois, la loi range sous le même régime fiscal les commerçants, artisans et professionnels libéraux », qui ont la possibilité de choisir entre l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés, moins taxé. « Mais les médecins spécialistes, dont l’activité nécessite des financements importants, comme les radiologues ou les cardiologues, ont intérêt a opté pour l’impôt sur les sociétés », indique Michel Giordano. Cet expert insiste sur le fait que l’EIRL impose la tenue d’une comptabilité d’engagement enregistrant créances et dettes, et sa publication auprès du tribunal de commerce. Il insiste également sur la nécessité d’une séparation nette entre patrimoine professionnel et patrimoine personnel. « C’est toute une culture à mettre en place chez les professionnels libéraux, pas toujours très stricts à cet égard. »

S’il considère que cette loi est « intéressante », Michel Giodano précise cependant qu’elle « n’est pas la panacée que d’aucuns voudraient faire croire ». « Cette loi limite la responsabilité de gestion du professionnel, mais le problème de la responsabilité de l’acte professionnel reste entier, les textes concernant les professions réglementées ne posant aucune limite à cet égard pour l’instant. Une vraie réflexion reste à mener, particulièrement en ce qui concerne les médecins, dont la remise en cause de l’acte est actuellement disproportionnée par rapport à leur solvabilité. Cette loi sur l’EIRL peut servir de pivot, mais il faut aller plus loin. »




Le temps de travail des médecins à la loupe

334 – « En définitive, la tonalité du discours sur l’activité et le temps de travail n’est pas directement liée à une quantité de temps passé au travail. Elle est au contraire fortement liée au sentiment de réussir ou pas ce qu’on peut faire en médecine et à la manière dont ce projet s’articule avec la vie personnelle. » Telle est la conclusion d’une étude qualitative sur « l’emploi du temps des médecins libéraux » réalisée par la DREES à partir d’entretiens effectués auprès de 48 praticiens, dont 21 généralistes et 27 spécialistes, hommes et femmes, d’âge et de secteur conventionnel différents, exerçant en zones urbaine et rurale. Les médecins interrogés se classent selon trois cas de figure : ceux qui travaillent à temps partiel (moins de cinq jours par semaine, avec éventuellement de longues journées, au moins une demi- journée non travaillée) ; ceux qui travaillent cinq jours par semaine avec éventuellement une demi-journée non travaillée compensée par le samedi matin ; ceux qui travaillent cinq jours en semaine et le samedi matin, toutes les semaines ou une sur deux. A de très rares exceptions, tous les médecins travaillent le lundi – la journée la plus chargée pour tous – et le vendredi. Les journées de travail sont longues, commençant le plus souvent entre 8 heures et 9 heures, plus tôt pour les généralistes que pour les spécialistes. La plupart du temps les journées de travail se terminent au-delà de 20 heures, en particulier pour les généralistes. Les journées de 10 à 12 heures de travail sont fréquentes. Les médecins interrogés déclarent travailler entre 24 et 70 heures par semaine.

Les médecins prennent leurs vacances le plus souvent sous la forme de semaines entières, concentrées sur la période estivale, surtout en août. Les médecins interrogés prennent entre zéro et douze semaines de vacances annuelles, soit une moyenne de cinq à six semaines, conformément à une étude quantitative antérieure (Le Fur, 2009). Sur ses bases déclaratives, et en assimilant les semaines de formation à de l’activité, l’étude de la DREES situe le nombre annuel d’heures de travail des médecins libéraux entre 1 100 et 3 500. A titre de comparaison, un cadre « d’état major d’entreprise » déclare travailler 2 130 heures par an, un cadre 1 870 heures, et un médecin hospitalier 2 180 heures (enquête Emploi de l’INSEE, 2007).

Une « paperasse » envahissante _ Le travail administratif influe beaucoup sur la perception que les médecins libéraux ont de leur temps de travail. Dans la hiérarchie des temps, ils distinguent nettement ce qui est médical et ce qui ne l’est pas, et disqualifient radicalement la « paperasse » qui envahit, non seulement le temps médical, mais aussi le temps personnel. La confrontation aux difficultés du corps social, le sentiment de n’être pas « justement » rétribué, la figure montante du patient « consommateur de soins » sont autant d’éléments qui influent sur la perception que les médecins libéraux ont de leur temps de travail. Ce qui fait conclure aux auteurs de l’étude : « L’investissement en temps n’est pas la bonne mesure de l’effort consenti et ressenti par le médecin. C’est davantage l’investissement choisi et réussi dans une certaine médecine, jugé suffisamment rétribué tant économiquement que symboliquement, qui donne la mesure subjective de l’effort. »(gallery)




Jean-François Rey : « Voter, c’est un devoir civique »

334 – Le Cardiologue En quoi les élections aux URPS sont-elles un événement important ? _ Jean-François Rey : Parce que, comme toutes élections, elles sont un moyen d’expression démocratique de la représentativité de la profession, et parce que les politiques sont très sensibles à la mobilisation des libéraux. Habituellement, un médecin sur deux participe à ces élections. Notre mot d’ordre aux médecins libéraux est donc : « Votez ! ». Plus ils seront nombreux à voter, plus leurs représentants auront de force pour discuter face aux tutelles. Ce n’est pas difficile, et c’est un devoir civique.

Le C. Quel est l’enjeu de ces élections ? _ J.-F. R. : L’enjeu en est extrêmement important, car nous avons changé de paradigme dans notre système de santé. Nous étions dans un système conventionnel. Les conventions ont du bon et du mauvais, mais il s’agit d’un pacte négocié. Or, actuellement, avec la loi HPST, le Gouvernement a la volonté de mettre les médecins libéraux sous la tutelle des ARS, véritables préfets sanitaires. Jusqu’à présent, les ARH avaient en charge la gestion hospitalière, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle n’est pas exempte de critique en termes d’efficacité. Et c’est à ceux qui ont échoué à gérer l’hôpital que l’on veut confi er la gestion de la médecine de ville ! La loi HPST est un mauvais coup porté à la médecine libérale, et les élections aux URPS permettent aux médecins de donner aux syndicats opposés à cette loi la possibilité de les défendre. Les ARS, qui ont déjà tous les pouvoirs de par la loi, pourraient aussi récupérer les données concernant l’activité individuelle des médecins. C’est ce que souhaite le ministère, et c’est inadmissible. Il est normal que l’Assurance Maladie accède à ces données dans le cadre conventionnel, mais si c’est l’Etat, ce n’est que pour exercer son pouvoir régalien. Que les ARS disposent des données concernant l’activité médicale globale d’une ville, d’un département, ou d’une région, soit, mais qu’elle puisse disposer des données individuelles des médecins, c’est inadmissible. C’est un argument de plus pour que les médecins libéraux votent massivement le 29 septembre.

Le C. Que souhaitez-vous principalement pour la prochaine convention ? _ J.-F. R. : Il faut avant tout que la future convention comporte des avancées tarifaires, et que l’avenant 23 bloqué par MG France et la FMF s’applique. Les tarifs des médecins libéraux sont bloqués depuis trois ans, et cela ne peut continuer. Des pénalités ont lourdement touché certaines spécialités, l’anesthésie notamment, et d’autres sont à craindre. Il faut une fongibilité des enveloppes entre la ville et l’hôpital, et un ONDAM réaliste, qui corresponde aux missions des uns et des autres. Il est inadmissible que 20 % des prescriptions médicamenteuses initiées par l’hôpital soient finalement imputées à la médecine de ville, on ne peut pas continuer comme cela !

Le C. Et vous pensez voir aboutir ces revendications ? _ J.-F. R. : Les élections aux URPS vont coïncider avec le remaniement ministériel annoncé. Les relations avec un nouveau gouvernement sont toujours plus faciles, c’est une opportunité à saisir. Nous disons donc aux médecins : « Votez ! Votez pour les syndicats qui ont résisté à la loi HPST, et votez pour ceux qui veulent un équilibre financier entre la ville et l’hôpital. » ■(gallery)




Elections aux URPS : aux urnes, médecins !

334 – Cette année, la rentrée est d’importance pour les médecins libéraux qui vont élire ce moi-ci leurs représentants dans les Unions Régionales des Professions de Santé (URPS) créées par la loi HPST en remplacement des Unions Régionales de Médecins Libéraux (URML). Malgré les tergiversations autour de la constitution du troisième collège – celui des spécialistes à plateau lourd, obstétriciens, chirurgiens, anesthésistes-réanimateurs – qui a retardé la parution des décrets, la date du 29 septembre a été maintenue. C’est la date limite à laquelle les médecins devront envoyer leur bulletin de vote, le cachet de la poste faisant foi. Ils auront reçu le matériel de vote avant le 22 septembre, dernière limite. La campagne officielle se déroule du 15 au 27 septembre non inclus. « Pour assurer l’égalité des moyens aux listes et candidats en présence », le décret précise que la commission d’organisation électorale fixe « de la même manière » pour tous les candidats, le nombre d’exemplaires, les formats et la qualité du papier de la circulaire, du bulletin de vote et des affiches envoyés aux électeurs, ainsi que le contenu des bulletins de vote. Pendant la campagne officielle, il est interdit d’utiliser des documents autres que ceux qui sont prévus. Le dépouillement aura lieu le 4 octobre, et les résultats seront proclamés par la commission de recensement des votes, et seront affichés à l’ARS, dans les préfectures des départements et au siège des URPS.

Bien évidemment, les syndicats n’ont pas attendu la campagne officielle pour mener la leur. A commencer par la CSMF qui, dès le 2 juin, était « en ordre de bataille », selon le mot de son président Michel Chassang, sur le thème « Stop au massacre de la médecine libérale ». La CSMF présente des candidats dans toutes les régions et dans les trois collèges. Un seul cardiologue, Jean-Pierre Binon, est tête de liste en Auvergne, et le président de l’UMESPE, Jean-François Rey (voir entretien) conduit la liste de spécialistes confédérés en PACA.

Le Président de la CSMF confiant dans le résultat des élections

Ce n’est pourtant pas que la CSMF approuve la création du troisième collège et la « balkanisation de la profession » qu’elle entraîne. D’autant que ce « tronçonnage du corps médical » aboutit à quelques aberrations. Outre qu’il écarte du scrutin des jeunes praticiens n’ayant pas accompli les 50 actes requis pour siéger dans le troisième collège, il en exclut aussi certains chirurgiens ayant une activité libérale à l’hôpital public en consultation. Ainsi, le président du Syndicat national des chirurgiens orthopédiques et celui de la Société française de chirurgie orthopédique et traumatologique se retrouvent dans le collège des spécialistes médicaux… Pourtant sûre d’obtenir l’annulation de ces « dispositions scélérates », la CSMF a finalement renoncé à faire un recours, souhaitant que « le processus démocratique aille jusqu’à son terme, sans entrave ni retard ». Michel Chassang est confiant dans le résultat de ces élections « qui permettront aux médecins libéraux de sanctionner directement la politique dévastatrice du Gouvernement en votant massivement pour les listes CSMF ».

|La représentativité dans la foulée| |Si les décrets sur les URPS se sont fait attendre, le Gouvernement n’a en revanche pas perdu de temps pour publier un avis au Journal Officiel du 21 juillet dernier ouvrant la procédure d’enquête de représentativité nationale qui permettra de désigner les syndicats libéraux habilités à négocier la prochaine convention. Les syndicats ont eu six semaines à compter du 21 juillet pour constituer et transmettre leur dossier de représentativité à la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de Sécurité Sociale (MNC). Il s’agit de documents permettant d’attester de leur autonomie financière, des effectifs d’adhérents à jour de cotisation et de leur audience. L’appréciation de ce dernier point devra attendre les résultats des élections aux URPS. Pour être représentatif, un syndicat doit obtenir au moins 10 % des suffrages exprimés au niveau national.|




L’ordonnance amère de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie

334 – CardioNews – La préparation du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS 2011) sera sans nul doute un exercice difficile à réaliser.

Ce projet va s’inspirer des propositions de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) qui ont été remises au Gouvernement au début du mois de juillet 2010.

Cet exercice prend un relief particulier dès lors que le Président la République a annoncé que l’ONDAM progresserait de 2,9 % en 2011.

La CNAM identifie des gisements d’économies dans le cadre des « marges d’efficience » du système de soins.

Soulignant les disparités dans les pratiques médicales et les modes de recours aux soins, elle propose une vingtaine de mesures susceptibles d’économiser 2,2 milliards d’euros dont 500 millions au titre de la maîtrise médicalisée en ville et 150 millions d’euros au titre de la lutte contre la fraude.

Objectif : les patients atteints de maladie chronique

La CNAM souhaite intensifier l’information et développer l’accompagnement des patients souffrant de maladie chronique.

A cet effet, le programme SOPHIA mis en place pour les patients diabétiques pourrait être étendu aux patients souffrant de maladie respiratoire et de maladie cardiovasculaire.

Elle souhaite refondre en une seule ALD les 4 affections cardiovasculaires actuelles et surtout sortir du régime à 100 % certains patients hypertendus (à faible risque cardiovasculaire).

Alternatives à l’hospitalisation

La CNAM souhaite s’investir plus largement dans la médecine de proximité. En effet, le rythme de croissance des soins de ville devrait dépasser celui des dépenses hospitalières au sein de l’ONDAM.

Elle vise à privilégier l’hospitalisation à domicile, favoriser la chimiothérapie à domicile et diversifier les modalités de prise en charge de l’insuffisance rénale chronique (sous-utilisation de la dialyse péritonéale).

Son souhait est de développer les centres autonomes ambulatoires avec tarifs régulés.

Par ailleurs, une première expérimentation pourrait concerner l’intervention sur la cataracte.

Variabilité des pratiques

L’objectif de la Caisse est de réduire les disparités dans les pratiques médicales.

A cet effet, elle souhaite développer des référentiels notamment dans le domaine de la rééducation et des arrêts de travail.

Elle propose de réduire la variabilité des pratiques notamment en matière d’écart de prescription médicamenteuse, de mieux faire respecter les référentiels de transports et de généraliser le CAPI qui devrait être proposé dans la nouvelle convention et, enfin, de tester la rémunération à la performance pour les établissements.

Par ailleurs, elle souhaite mettre sous entente préalable les admissions qui paraissent peu adéquates dans les structures de soins de suite et de réadaptation.

Tarifs et arrêts de travail

Elle suggère aussi de baisser à nouveau les tarifs de biologie, de rendre plus homogènes les tarifs des médicaments à efficacité équivalente, de réduire les marges réalisées sur certains dispositifs médicaux (bandelettes d’autocontrôle du diabète) et par ailleurs de plafonner les dépassements sur les actes d’orthodontie.

Deux mesures sont enfin proposées concernant les arrêts de travail : favoriser, lorsque la situation médicale l’autorise, l’arrêt de travail à temps partiel indemnisé (lorsque l’état et le traitement du patient ne nécessitent pas d’arrêt complet) et uniformiser les réglementations sur la mise en invalidité à la suite d’un arrêt de travail.

Patrick Assyag




Hypothèques et certitude

334 – CardioNews – La rentrée est traditionnellement féconde pour l’actualité, de bon ou de mauvais augure. Traditionnellement, le Gouvernement y livre ses intentions appelées à se concrétiser dans le PLFSS (Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale) qui occupera l’ordre du jour du Parlement pendant quelques semaines d’octobre et novembre. Cette année, l’ONDAM, objectif prévisionnel d’évolution des dépenses d’Assurance Maladie, sera plus volontariste que jamais à 2,9 % fixé par le Président de la République en personne avant 2,8 en 2012 ! Au final rien de très racoleur pour le corps médical qui devra attendre l’an prochain pour redevenir une « cible » électorale.

Mais cette année, plusieurs hypothèques grèvent l’horizon pour faire de 2010 une année authentiquement singulière.

– D’une part la promesse d’un profond remaniement ministériel en octobre. C’est peu de dire que Mme Bachelot a battu un record d’impopularité médicale… une sorte de Doménech au féminin – par son déni d’avoir commis quelque erreur tactique ou stratégique dans l’affaire de la grippe. Il est temps pour elle d’au moins « changer de portefeuille » et une nouvelle tête au ministère de la santé contribuera un peu à désarmer les procureurs de la politique gouvernementale.

– D’autre part une autre promesse, présidentielle celle-là, de faire de la médecine libérale « la grande affaire » de la fin de l’année, réitérée juste au début de l’été par Nicolas Sarkozy. Il compte, pour cela, sur une « boîte à idées » du nom d’Elisabeth Hubert, devant rendre ses devoirs de vacances début octobre. Comme l’intéressée a des compétences et de l’expérience, les généralistes y trouveront sans doute « du grain à moudre ». Mais abordera-t-elle le sort des spécialistes ? Et notamment des spécialistes « de proximité », catégorie dans laquelle se rangent évidemment les cardiologues ? Ce n’est ni sûr ni exclu !

– Enfin cette rentrée comporte, pour le corps médical, un rendez-vous électoral décisif. Les médecins sont appelés aux urnes le 29 septembre pour désigner leurs futurs représentants au sein des URPS, « Unions » dont le risque est d’abord de provoquer… la division. Les généralistes le savent déjà pour avoir vu leur revendication du C à 23 € sombrer dans les remous d’une concurrence syndicale exacerbée ! Derrière cet enjeu électoral, c’est toute la représentativité du corps médical qui se joue et, avec elle, le poids respectif des formations appelées à discuter la prochaine convention, … si convention il doit y avoir, ce qui est loin d’être acté depuis que M. Van Roekeghem a imposé son CAPI… contre l’avis de tous les syndicats pour une fois unanimes.

Sur ces trois sujets, tout pronostic serait rigoureusement prématuré et largement infondé. Il n’y a qu’un sujet sur lequel on peut s’avancer sans grand risque d’être désavoué par les faits. Le sujet du financement de la Sécu – qui est le seul vrai sujet du moment maintenant que la maîtrise des dépenses est acquise mais que la crise économique en annihile la lisibilité – sera renvoyé à l’après-2012, décidemment trop inflammable en période pré-électorale.

Jean-Pol Durand




Thierry Mouhat (Franche-Comté) : s’organiser pour éviter un « plan cancer » en cardiologie

334 – CardioNews – Le Cardiologue : Comment se présente la rentrée dans votre région de Belfort-Montbéliard pour une année politiquement chargée (nouvelle convention et échéances électorales) ?

Thierry Mouhat : Vous savez, il y a quelques années déjà qu’en tous cas en Nord-Franche-Comté, les cardiologues sont un peu démotivés, ils ont du mal à croire qu’une élection quelle qu’elle soit puisse changer radicalement leurs conditions de vie et d’exercice. Ce qui nous fait le plus défaut en ce moment, c’est le temps et serait donc bienvenue toute innovation qui permettrait d’en « récupérer un peu », au bénéfice de nos relations avec les patients, les correspondants, les confrères hospitaliers et de notre formation médicale continue.

Votre région est en pointe dans le domaine de la télécardiologie…

T. M. : J’ai déjà des malades sous télésurveillance. C’est évidemment une promesse à laquelle les cardiologues sont spontanément ouverts. Mais la question de la rémunération reste encore sans réponse. Pareil pour l’organisation collective – la Franche-Comté a vu naître les premières « Maisons de santé »- et apparemment les généralistes s’en portent bien. Personnellement, j’exerce dans un cabinet de 4 cardiologues ; nous pourrions « muscler » le secrétariat mais le projet se heurte, entre autre, au problème des charges sociales et donc à la rentabilité du cabinet. Nous ne sommes pas assez nombreux pour nous obliger aux contraintes des grosses structures et l’horizon démographique n’incite pas à l’optimisme. Malgré notre exercice diversifié et intéressant, nous avons un peu de peine à fidéliser les remplaçants ; deux confrères sont partis en retraite depuis 10 ans sans trouver de successeur. Je suppose que le surcroît d’activité a été absorbé par l’activité privée des confrères hospitaliers mais tout le monde travaille en ce moment « en flux tendu », comme l’industrie automobile notre « mère nourricière » avec les incertitudes actuelles.

Mais comment voyez-vous votre avenir dans les prochaines années ?

T. M. : En ce moment, la vague est clairement porteuse pour le salariat hospitalier mais il viendra bien un moment où tous les postes encore ouverts finiront par être pourvus. Dans ces conditions, c’est assez difficile de faire de la prospective à 10 ans : je m’en avise avec mon fils, étudiant de 4ème année qui s’interroge, et m’interroge, sur ses choix. Ma génération n’était pas confrontée à autant d’états d’âme. Je crois que ce qu’il nous faut préserver c’est, à la fois et comme tous les spécialistes, un lien avec le plateau technique et, parce que nous sommes cardiologues, avec l’organisation collective de la spécialité : les urgences, la continuité des soins… Tout cela est une réalité chez nous à laquelle nous devons apporter une réponse si l’on ne veut pas se la faire imposer par la nouvelle ARS… Pour moi, le pire qui pourrait nous arriver serait l’équivalent d’un « Plan Cancer » en cardiologie.

Pourquoi ?

T. M. : Parce qu’étant à 90 km du CHU, nous avons mis en place des réseaux informels avec les confrères libéraux et hospitaliers dans les domaines où nous sommes les plus régulièrement sollicités. Pour la cancéro, cela fonctionnait en bonne intelligence et sans arrière-pensée mais dont la réalité a été complètement niée sous couvert de « réorganisation ». De même, j’ai gardé une activité de coronarographie à l’hôpital – il n’y a pas d’hospitalisation privée sur la zone de Belfort-Montbéliard, du moins en cardiologie alors qu’elle est puissante à Mulhouse, à 60 km d’ici – et je vois bien que les confrères se plaignent de la pression qu’ils subissent de plus en plus de la part de leur administration. La T2A a plus ou moins imposé une politique de quotas d’activité pas évidente à déjouer. En tout cas, je crois de plus en plus à une forme d’exercice mixte qui, dans l’intérêt du patient, permettra au système français de préserver une alternative au « tout public ».




Patrick Arnold (Alsace) : l’ETP est un vrai métier que les cardiologues n’ont ni le temps ni les capacités de faire

333 – CardioNews – A 54 ans, Patrick Arnold, déjà trésorier du Syndicat national, vient de prendre la présidence du Syndicat régional d’Alsace. Au sein du réseau Asprema de Mulhouse, puis à l’origine d’une expérience singulière d’ETP, il tire les conséquences d’une récente session organisée par l’UFCV sur le sujet.

Le Cardiologue : Vous participiez il y a quelques jours sous l’égide de l’UFCV à une réunion d’échange sur les expériences d’Éducation Thérapeutique du Patient. Quelles conclusions en tirez-vous ?

Patrick Arnold : J’ai été surpris par la diversité des expériences rapportées dans de nombreuses régions. Mais, avant d’exposer ma propre expérience, je me suis permis un « coup de gueule » à constater que trois des expériences les plus probantes disposaient toutes d’un financement de l’industrie pharmaceutique que l’administration nous présente comme le « grand méchant loup », mais sans nous autoriser de financement alternatif… C’est très hypocrite, et finalement assez vulgaire de sa part, que de nous laisser financer cet ETP par l’industrie comme on a dû le faire depuis des années de la FMC alors que l’une et l’autre sont inscrites dans la loi et devraient donc bénéficier de financements publics. J’ai trouvé Christian Saout, coauteur du rapport qui a amené à cette définition légale, assez désabusé et franchement pessimiste sur le financement public. Il reste, et pour revenir sur cette réunion, qu’il est à la fois rassurant de trouver des gens-moteurs, dans toutes les régions ou presque et… inquiétant, quand le temps devrait être à une généralisation IN-DIS-PEN-SA-BLE.

Un mot sur votre expérience personnelle ?

P. A. : Très peu reproductible parce que reposant sur la reconversion et le travail bénévole d’une collaboratrice, bénéficiaire du plan social de son ancienne entreprise qui l’a rétribuée à ce titre pendant 18 mois. Dans ce cadre, elle a donc pu acquérir une formation initiale à l’éducation des adultes puis suivre des modules spécifiques de l’institut IPCEM : maladie cardiovasculaires, AVK, surpoids/obésité, diabète. J’ai la chance d’avoir pu, dans mon cabinet, la doter d’un bureau modulaire où elle peut à la fois recevoir en individuel, organiser des réunions en petits groupes, organiser des projections, … L’idée est d’identifier des groupes homogènes de patients confrontés au même problème : malades sous AVK maîtrisant mal leur traitement. Je cite cet exemple parce c’était le cas d’un patient sur deux dans ma journée d’hier ! Il lui faut donc successivement mesurer leur niveau de connaissance, ou de méconnaissance, de leur traitement, les regrouper pour une formation « de base » sur le fondement des « 7 règles d’or » de l’AFFSAPS ; les suivre individuellement, de les reprendre éventuellement, pour évaluer par post-test ce qu’ils ont finalement retenu. Elle est en train de développer le module HTA/automesure et mettra l’été à profit pour finaliser celui sur l’insuffisance cardiaque. Ma conviction est que cet investissement, même subventionné, est évidemment hors de portée d’un cabinet individuel ou même d’un groupe « habituel » à trois ou quatre praticiens. Mais je suis également persuadé qu’en revanche, il y a place pour une mutualisation au sein d’une petite structure desservant les besoins d’une dizaine de médecins, cardiologues et, pourquoi pas, médecins généralistes. L’outil doit être mobile, en capacité de passer d’un cabinet à l’autre… Il y a là une voie à explorer parce qu’il est fondamental que cet ETP soit organisé au cabinet du médecin pour bien signifier qu’il s’agit d’une composante de l’acte médical et pas d’une prestation accessoire.

Mais on pourrait aussi bien imaginer que l’ETP soit dispensé par du personnel formé qui deviendrait l’auxiliaire direct du médecin avec qui il pourrait même travailler en binôme … C’est un des enjeux de la mission sur les « nouveaux métiers de la santé » que le ministère vient de confier au député Hénart…

P. A. : Un personnel formé, c‘est évidemment un pré-requis. En tandem avec le médecin, j’ai un peu plus de peine à l’imaginer : à Mulhouse, les neurologues partagent une technicienne qui réalise tous les tests-mémoire qu’ils n’ont pas le temps de pratiquer quand ils en ont évidemment besoin ; les ophtalmologistes sont en voie de faire de même avec des orthoptistes… Les cardiologues ont évidemment besoin de « techniciens en ETP »… 1/ Parce qu’il s’agit d’un vrai métier dont – j’en suis le témoin privilégié – ils n’ont ni le temps ni les capacités de le faire, 2/ C’est un métier utile dès lors qu’il contribue à la prévention des complication et de la iatrogénie générée chez les patients par leur méconnaissance de leur traitement. Le seul problème du cardiologue quand il revoit son patient doit être d’évaluer la connaissance qu’il a de son traitement et de mesurer l’opportunité d’une formation complémentaire, plus ciblée. Je n’ai plus aucun doute sur la nécessité, et l’urgence, de cette réforme !




Michel Legmann, Elisabeth Hubert, merci de tenir compte des spécialistes

333 – CardioNews – L’ordonnance Legmann avait pour but de proposer des pistes de travail dans le cadre de la médecine de proximité. Les 3 pistes de travail étaient les suivantes :

La formation des médecins : – redonner goût aux médecins à partir d’une meilleure adéquation entre le profil des étudiants et la nature du métier médical – intégrer l’enseignement de la médecine générale dès le 2ème cycle – présenter des perspectives d’évolution du médecin libéral installé

L’installation : – mettre en place un guichet unique facilitant l’installation – favoriser les capacités d’initiatives : conduction de projet,… – présenter des incitations fortes : avantages financiers, suppression du contrat santé solidarité, suppression des déclarations d’absence

Les conditions d’exercice : – favoriser toutes formes de regroupement – créer une plate-forme de services – regagner du temps médical avec la mise en place d’un assistant de santé et favoriser la coordination des soins – développer la télémédecine et favoriser la protection sociale des médecins – diversifier les rémunérations

La concertation de Mme Elisabeth Hubert

 Après la « pilule ordinale », le président de la République s’est vite orienté vers une autre concertation demandant ainsi à Elisabeth Hubert de donner un nouvel élan au dialogue avec les médecins. Mme Hubert va ainsi devoir être à l’écoute des Syndicats de Médecins, des médecins de terrain et autres professionnels de santé, des élus, des patients et faire des propositions modifiant l’exercice libéral en souhaitant qu’elle se rapproche des médecins spécialistes et qu’elle fasse preuve d’une plus grande ouverture d’esprit.

Quid des spécialistes

Ils sont une fois de plus ignorés… Faudra-t-il fermer nos cabinets ou cliniques pour obtenir gain de cause ? Sera-t-il nécessaire d’organiser des journées portes ouvertes pour démontrer, s’il en était nécessaire, l’utilité des spécialités notamment de la cardiologie ou sinon défiler toutes spécialités confondues pour démontrer que les spécialistes sont également des médecins de proximité et que la profession sera bientôt sinistrée de la même manière que nos collègues généralistes. Les différents décrets de la loi HPST distillés au jour le jour ainsi que les mesures du texte de transition du règlement arbitral ne font qu’accroître la tension : absence de revalorisation en dehors du C2 à 46 euros et absence également de réévaluation de la pratique de la CCAM… Il est temps de réagir tous ensemble…




Pourquoi le C à 23 euros sera la dernière augmentation conventionnelle

333 – CardioNews – Les comptables ont rendu leur verdict : en 2009, la Sécurité Sociale accuse donc, tous régimes confondus, un nouveau déficit de 20,3 milliards d’euros qui finiront un jour prochain dans le tonneau des Danaïdes des déficits sociaux, promis au remboursement par la génération de nos petits-enfants !

L’Assurance Maladie représente un peu plus de la moitié de cette somme à 10,6 milliards d’euros, à comparer aux 14,5 milliards attendus cette année. Les raisons sont connues : un petit dérapage (700 millions) par rapport aux prévisions et un immense « manque à gagner » au niveau des dépenses. La CSG qui apporte l’essentiel du carburant de la solidarité a carrément diminué de 2,4 %… Pour éviter tout nouveau « dérapage » en 2010 et alors même que le Comité d’alerte n’avait pas sonné le tocsin, un plan d’économies de 600 millions est décrété à coup de mesurettes de poche : nouvelle baisse de prix de médicaments, de la tarification de l’anesthésie pour opération de la cataracte, « bidouillage » des modalités de calcul des IJ, gel de crédits votés pour la modernisation des maisons de retraite, …

Juste pour se donner une idée des sommes en jeu : l’ONDAM pour 2010 a été voté à 162,4 milliards d’euros, soit à peu près 450 millions par jour. C’est-à-dire que le Gouvernement légifère en ce moment sur 1 jour ouvrable … quand le déficit porte à peu près sur un mois ! Qui peut croire un instant qu’on va sauver le système avec des tels cautères ? Nicolas Sarkozy nous affirme compter désormais sur les ARS … en ignorant semble-t-il qu’eux-mêmes n’ont la main que sur 1 % environ des dépenses… soit quelques jours d’ONDAM !

Soyons donc clairs : le débat du moment n’est pas à l’échelle de la question posée. Essayons d’élever un peu le niveau : avec une inflation spontanée de l’ordre de 3/3,5 % les dépenses de santé sont peu ou prou maîtrisées ! Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’une dépense normalement incompressible si l’on tient compte de tous les effets mécaniques cumulés : augmentation de la population, vieillissement et « effet-ALD ». Chaque année en effet, la prise en charge des 100 % équivaut à une croissance automatique 2,6 points de la dépense, sous le double effet de l’augmentation du nombre de personnes prises en charges de plus en plus longtemps et du coût unitaire de leur prise en charge …

C’est-à-dire que lorsqu’il annonce que l’ONDAM voté le sera à 2,9 % en 2011, à 2,8 en 2012, etc., le Président de la République prévient d’ores et déjà les professionnels qu’il n’y a plus aucune marge de manœuvre possible à législation constante … Et les syndicats ont raison de s’inquiéter de la garantie du C à 23 € au 1er janvier 2011.

Sans doute cette promesse sera-t-elle tenue, sinon légèrement reportée. Pour deux raisons au moins : _ 1/ il s’agit d’une décision politique et, disons le mot, électoraliste à quelques encablures de l’échéance majeure de 2012 ; _ 2/ il s’agit d’une goutte d’eau dans le paysage financier : 250 millions d’euros environ, soit … une demi-journée de la dépense annuelle.

Mais disons aussi clairement : cette augmentation sera sans doute aussi la dernière d’un système conventionnel à bout de souffle. Une sorte de « solde avant inventaire » ! Signe des temps : ce ne sont d’ailleurs pas les partenaires habituels, mais leur tutelle commune et en l’occurrence l’hyperprésident, qui l’ont décidée.

Si la Convention est exsangue, que dire alors du système de financement sinon que celui-ci est déjà en coma dépassé ? On le savait avant le télescopage de la crise de l’euro avec la crise économique et sociale, antérieure. La seule question qui vaille aujourd’hui est de savoir si la réforme du financement de la protection sociale pourra encore attendre 2012 !




Elections aux URPS : le compte à rebours a commencé

333 – Les élections aux Unions Régionales Professionnelles de Santé (URPS) auront bien lieu le 29 septembre prochain, comme prévu, et malgré le retard pris dans la parution du décret les concernant. Retard du notamment au casse-tête que constitue l’établissement des critères d’appartenance au troisième collège créé par la loi HPST, celui des chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens, mais que pourraient également intégrer les ORL, les ophtalmologistes et les stomatologistes ayant une activité chirurgicale. Mais à partir de quel volume d’activité chirurgicale un praticien peut-il appartenir à ce collège ? Le nombre de 50 actes chirurgicaux par an a finalement été retenu. Conséquence absurde: certaines spécialités vont être clivées dans les deux collèges par exemple : les obstétriciens 1 700 sur 3 600 les ORL 1 400/2 300 les ophtalmos 2 500/4 800, les stomatos 120/800 et même certains anesthésistes 200 des 3 400 diplômés ne font pas 50 actes d’anesthésiologie par an et ne voteront ni ne siègeront avec leurs collègues. Une chose est sûre, aucun cardiologue interventionnels ne sera dans ce fameux collège. Mais d’autres problèmes sont contingents! En effet, l’année de référence étant 2009, dans quelle « case » fait-on rentrer les praticiens de ces spécialités qui ont commencé leur exercice cette année et auront pourtant effectué au moins 50 actes chirurgicaux ? Et ceux qui se sont installés en 2009, mais n’avaient pas encore atteint ce quota au 31 décembre dernier ? A l’heure de notre bouclage, la question n’était toujours pas tranchée. En revanche, la répartition de la représentativité entre les trois collèges est définitivement établie : 50 % pour les médecins généralistes pour environs 63 000 médecins (MG, MEP, Urgentistes…), 14 % pour le collège des spécialistes à activité chirurgicale soit environ 15 000 médecins, et 36 % pour les autres spécialistes soit environ 43 000 médecins. De même, le nombre de sièges dans les URPS par région a été fixé :

_ ■ 10 membres dans les régions où le nombre de médecins exerçant à titre libéral dans le régime conventionnel est inférieur ou égal à 500 ; _ ■ 30 membres entre 3 001 et 5 000 ; _ ■ 60 membres entre 5 001 et 10 000 ; _ ■ 80 membres au-delà de 10 000.

Les diverses échéances du processus électoral figure dans le calendrier ci-contre et, de source syndicale, aucun retard n’a été pris jusqu’à présent dans leur succession… sauf la publication des décrets et arrêtés qui auraient du être publiés avant le 26 mai 2010 !

Ajoutons que devant une telle complexité des répartitions au sein des différents collèges le ministère n’est pas à l’abri d’une contestation en Conseil d’Etat. ■

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Jean-François Rey : « Le règlement arbitral ne pouvait être qu’à minima »

333 – Etes-vous déçu par le règlement arbitral ?

Jean-François Rey : Non, je ne suis pas déçu, le règlement arbitral ne peut être qu’à minima. L’arbitre ne pouvait reprendre des éléments en cours de négociation, il ne pouvait que reprendre des grandes lignes. Il a repris la convention, en y ajoutant un élément tarifaire annoncé par le Président de la République, et le volet sur la télétransmission. Si le règlement arbitral avait donné plus de place pour la négociation, cela aurait constitué un pas de plus vers l’étatisation du système.

 

Certains espéraient que règlement arbitral marquerait une avancée concernant le secteur optionnel, pas vous ?

J.-F. R. : C’est avant que l’on a perdu du temps ! Après que le Président de la République nous a interpellés sur les honoraires, il y a deux ans, nous avons perdu un an sur cette question des dépassements, qui, je le rappelle, ne pose un réel problème que pour quelques spécialités et à certains endroits, essentiellement dans les grandes villes, Paris, Lyon notamment, en ville mais aussi à l’hôpital : les dépassements les plus importants sont pratiqués dans hôpitaux publics parisiens. Je pense que la solution pour certains praticiens très renommés qui pratiquent des dépassements exorbitants serait de se déconventionner : quand on prend onze fois le tarif opposable, on n’a plus sa place dans la convention. Et c’est l’arbre qui cache la forêt, car dans 90 % des cas, les dépassements ne posent pas de problème. L’expérimentation du secteur optionnel était d’autant plus intéressante à mener qu’elle était limitée à trois spécialités, chirurgie, anesthésie-réanimation et obstétrique, et qu’elle aurait permis ensuite à toutes les spécialités d’en profiter.

 

Selon vous, pourquoi cette expérimentation n’a-t-elle pas eu lieu ?

J.-F. R. : De l’aveu même du conseiller social de Nicolas Sarkozy, le Gouvernement a cédé à la pression de certains corporatismes chirurgicaux – émanant d’un syndicat minoritaire – et qui rêvent d’un secteur unique pour tous, et d’un secteur à honoraires totalement libre pour quelques-uns. C’est complètement illusoire ! Dans le contexte économique actuel, aucun Gouvernement n’accordera une liberté tarifaire. Selon moi, un tarif unique accompagné d’un secteur optionnel pour tous me semblerait une évolution qui irait dans le bon sens. n

 




Jean-François Rey : « Le règlement arbitral ne pouvait être qu’à minima »

333 – Etes-vous déçu par le règlement arbitral ? _ Jean-François Rey : Non, je ne suis pas déçu, le règlement arbitral ne peut être qu’à minima. L’arbitre ne pouvait reprendre des éléments en cours de négociation, il ne pouvait que reprendre des grandes lignes. Il a repris la convention, en y ajoutant un élément tarifaire annoncé par le Président de la République, et le volet sur la télétransmission. Si le règlement arbitral avait donné plus de place pour la négociation, cela aurait constitué un pas de plus vers l’étatisation du système.

Certains espéraient que règlement arbitral marquerait une avancée concernant le secteur optionnel, pas vous ?

J.-F. R. : C’est avant que l’on a perdu du temps ! Après que le Président de la République nous a interpellés sur les honoraires, il y a deux ans, nous avons perdu un an sur cette question des dépassements, qui, je le rappelle, ne pose un réel problème que pour quelques spécialités et à certains endroits, essentiellement dans les grandes villes, Paris, Lyon notamment, en ville mais aussi à l’hôpital : les dépassements les plus importants sont pratiqués dans hôpitaux publics parisiens. Je pense que la solution pour certains praticiens très renommés qui pratiquent des dépassements exorbitants serait de se déconventionner : quand on prend onze fois le tarif opposable, on n’a plus sa place dans la convention. Et c’est l’arbre qui cache la forêt, car dans 90 % des cas, les dépassements ne posent pas de problème. L’expérimentation du secteur optionnel était d’autant plus intéressante à mener qu’elle était limitée à trois spécialités, chirurgie, anesthésie-réanimation et obstétrique, et qu’elle aurait permis ensuite à toutes les spécialités d’en profi ter.

Selon vous, pourquoi cette expérimentation n’a-t-elle pas eu lieu ?

J.-F. R. : De l’aveu même du conseiller social de Nicolas Sarkozy, le Gouvernement a cédé à la pression de certains corporatismes chirurgicaux – émanant d’un syndicat minoritaire – et qui rêvent d’un secteur unique pour tous, et d’un secteur à honoraires totalement libre pour quelques-uns. C’est complètement illusoire ! Dans le contexte économique actuel, aucun Gouvernement n’accordera une liberté tarifaire. Selon moi, un tarif unique accompagné d’un secteur optionnel pour tous me semblerait une évolution qui irait dans le bon sens.




Règlement arbitral : télétransmettez, vous êtes cernés !

333 – A peine paru, le règlement arbitral a fait l’objet des critiques unanimes de la part des syndicats médicaux qui n’y ont pas trouvé ce qu’ils attendaient. Même le C à 23 euros, attendu depuis 2007, n’a pas calmé la colère des médecins, qui n’apprécient pas de le voir encore repoussé au 1er janvier prochain, surtout après les annonces répétées de rigueur budgétaire. Pas de quoi mettre fin à la fronde tarifaire qui se poursuit à l’appel de la CSMF et de MG France, et au mot d’ordre de grève de la télétransmission du SML. Le ministère a eu beau préciser que cette revalorisation aura aussi un impact sur la rémunération des médecins qui assurent la régulation des appels téléphoniques dans les centres 15, le tarif des avis ponctuels donnés par les spécialistes dans le cadre du parcours de soins (C2 = 46 €), et sur la contribution de l’Assurance Maladie au financement du dispositif de retraite complémentaire des médecins (ASV), et même si le coût complet de cette revalorisation est estimé à 290 M€ pour l’Assurance Maladie, « le compte n’y est pas » pour les médecins. Pour le président de la CSMF, « la montagne a accouché d’une souris ». Ce texte qui « ne propose rien pour les spécialités cliniques, qu’il laisse entièrement de côté », qui « oublie les engagements conventionnels pour la rémunération de la PDS des spécialistes en établissements et laisse de côté le secteur optionnel », ce texte donc, « se borne à expédier les affaires courantes ».

Mais au fait, n’est-ce pas son rôle justement ? Entré en vigueur le 5 mai dernier, le règlement arbitral est bien le dispositif prévu en cas de non-reconduction d’une convention, pour assurer la transition avec la suivante. Et comme le fait remarquer le président de l’UMESPE (les spécialistes confédérés), plus de place pour la négociation dans le règlement arbitral aurait été « un pas de plus dans l’étatisation » (voir entretien ci-contre).

Sans compter qu’il n’aurait pas manqué de provoquer l’ire des syndicats qui ont fait des élections aux URPS et de l’enquête de représentativité qui s’en suivra un préalable à la négociation d’une nouvelle convention.

Reste que les affaires courantes que traite le règlement arbitral concernent de très près les praticiens, et qu’en attendant la prochaine convention, les « travaux continuent » : maîtrise médicalisée, télétransmission, PDS, DPC…

Le contenu du règlement arbitral

Majoration de 20 % _ En attendant l’entrée en vigueur du Schéma Régional d’Organisation des Soins (SROS), la majoration de 20 % des honoraires des médecins exerçant en zones sous-médicalisées est prorogée. Ce dispositif sera remplacé par un autre dans la future convention. Mais le règlement arbitral prévoit le maintien des avantages consentis durant deux ans même si la zone dans laquelle exercent les médecins n’est plus classée « défi citaire » par le SROS.

La PDS _ Le dispositif actuel est prorogé avec le maintien pur les médecins effecteurs des 50 euros d’astreinte par tranche de quatre heures aux horaires de la PDS. Les majoration d’honoraires de nuit restent les mêmes pour les actes régulés. La rémunération forfaitaire des médecins régulateurs reste de 3 C de l’heure.

Secteur 2 ouvert aux assistants spécialistes des CHU _ Pas trace de secteur optionnel dans le règlement arbitral, mais le secteur à honoraires libres s’ouvre pour les 400 assistants spécialistes nommés ces deux dernières années dans les CHU, qui en raison d’un hiatus réglementaire n’y avaient pas accès comme leurs collègues des CHG !

FPC en attendant le DPC _ La formation professionnelle conventionnelle (FPC) est maintenue jusqu’à l’entré en vigueur du développement professionnel continu (DPC) prévue pour le 1er janvier 2012, date à laquelle la contribution annuelle des caisses d’Assurance Maladie sera alors versée à l’organisme gestionnaire du DPC (OGDPC).

543 millions d’euros de maîtrise médicalisée _ Dans son article 12, le règlement arbitral fixe les objectifs de maîtrise médicalisée pour 2010. Au total ce sont 543 millions d’euros d’économies qui sont attendus des « programmes d’amélioration de la qualité et de l’efficience des prescriptions », dont 289 millions sur les médicaments. A l’exception de deux nouveaux (les antalgiques et les médicaments antidiabétiques), les thèmes sont les mêmes que l’année dernière : – antiagrégants plaquettaires (38 millions d’euros), – antibiotiques (17 millions d’euros), – statines (75 millions d’euros), – anxiolytiques et hypnotiques (7 millions d’euros), – inhibiteurs de la pompe à protons (35 millions d’euros), – inhibiteurs de l’enzyme de conversion et sartans (51 millions d’euros), – ostéoporotiques (11 millions d’euros), – antidépresseurs (2 millions d’euros), – antalgiques (26 millions d’euros), – antidiabétiques (27 millions d’euros), – indemnités journalières (88 millions d’euros), – transports (95 millions d’euros), – respect de l’ordonnancier bizone pour les patients en affection de longue durée (59 millions d’euros), – prescriptions d’actes (12 millions d’euros). ■

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|Télétransmission : la carotte et le bâton| |L’aide de 0,07 centime d’euro par FSE est maintenue, et non 0,04 centime comme cela a été envisagée à la fin de l’année dernière. Mais cette aide ne sera perçue par le praticien que s’il s’équipe d’un matériel informatique conforme à la dernière version du cahier des charges du GIE Sésam-Vitale. Un forfait annuel supplémentaire de 250 euros est prévu pour les médecins qui télétransmettent au moins 75 % de leurs feuilles de soins électroniques (FSE), ainsi qu’un forfait annuel de même niveau pour ceux qui établiront les nouveaux protocoles ALD par voie électronique. La même mesure s’appliquera également pour un taux d’au moins 75 % de transmissions électroniques des arrêts de travail. Au total, ces mesures incitatives coûteront 30 millions d’euros ; c’est le prix que l’Assurance Maladie est prête à payer pour « booster » un dispositif source de grandes économies pour elle. Mais outre ces carottes, le « bâton » est prévu pour les médecins qui ne seraient pas sensibles aux incitations financières contraignantes. Donc, à compter du 1er janvier prochain, les praticiens qui télétransmettront moins de 75 % de FSE devront s’acquitter d’une taxe de 50 centimes d’euros par feuille de soins papier.|




La télémédecine entre dans la pratique quotidienne !

333 – La sortie du décret « télémédecine » est tellement imminente que les agences de presse en ont eu copie officieuse. Le Cardiologue ne pouvait être en reste et vous en livre les grands axes. Ce décret qui met en musique l’article 78 de la Loi HPST a fait l’objet de multiples ajustements particulièrement pertinents. D’abord il restitue précisément cette pratique dans le cadre d’un acte médical. Ce qui implique qu’un acte de télémédecine ne pourra être réalisé que par un médecin habilité à exercer en France ou titulaire d’une autorisation ordinale. Cette précision réglementaire devrait éviter les délocalisations exotiques comme cela a pu se voir notamment en neuroradiologie, aux Etats-Unis par exemple. Ainsi des clichés de scanner ou d’IRM pouvaient être interprétés quasiment en temps réel, dans des centres sous-traitants en Inde. En Europe on a beaucoup évoqué des circuits similaires avec l’Europe de l’Est ou le Maghreb. Au fi nal, il appartiendra aux utilisateurs de s’assurer de la conformité réglementaire du centre appelé ou sous-traitant.

Ce texte précise en outre le cadre rigoureux de chaque type d’intervention : téléconsultation, téléexpertise, télésurveillance et téléassistance. Le suivi des urgences par les centres 15 se trouvent ainsi rattachés à la télémédecine.

Les actes de télémédecine devront répondre à un cahier des charges bien notifi é dans le décret, qui ne fait que reprendre les caractéristiques d’un acte médical : authentification du professionnel, identification, information et accord du patient, traçabilité, disponibilité, intégrité et accessibilité au dossier médical, c’est ici que le DMP prendra toute sa place Pas de télémédecine sans système d’information partagé !

En ce qui concerne le financement, ce décret entrouvre les portes : toutes les sources actuelles de financement sont théoriquement accessibles, depuis les différentes nomenclatures des actes prestations et dispositifs jusqu’aux contrats nationaux ou régionaux de structures (contrat pluriannuel d’objectif et de moyens) ou de professionnels (contrat d’amélioration de la qualité et de la coordination des soins).

Deux points importants : tout contrat national s’imposera aux régions et les expérimentations en cours auront dix-huit mois pour se mettre en conformité.

« L’innovation technologique _ au service des patients souffrant _ de maladies chroniques » Le ministre de l’Industrie, Christian Estrosi, vient d’annoncer le lancement d’un appel à projet doté de 3 millions d’euros, visant à favoriser l’émergence de solutions innovantes pour la prise en charge des maladies chroniques au domicile (www.telecom. gouv.fr/ticsante). Cet appel d’offre a été réalisé en association avec le Ministère de la Santé. Il vise préférentiellement trois type de pathologies : le diabète, les maladies respiratoires chroniques et l’insuffisance cardiaque. Bien entendu la cardiologie se doit d’y répondre. Mais les critères d’éligibilité sont très contraignants. Il s’agit d’un projet qui doit être porté par un consortium industriel comprenant au moins 20 % de PME et qui vise le développement d’un système intégrant des dispositifs médicaux qui répondent précisément à une prise en charge à domicile. Ils doivent présenter une chaîne de valeur complète depuis le financeur, les industriels jusqu’aux praticiens de ville. Et surtout proposer un modèle économique viable, alors même que les moyens de financement ne sont pas opérationnels dans l’attente de la publication du décret sus-cité et ce d’autant que les taux d’aide ne sont que de 45 % pour les PME et 25 % pour les autres entreprises. Il ne reste donc qu’à trouver entre 55 et 75 % du budget ailleurs ! Tâche quasi impossible tant que les ARS ne sont pas réellement opérationnelles ! ■

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Le Professeur André Vacheron Académicien

332 – La Société Française de Cardiologie est fière de saluer la remise de l’épée d’Académicien au Professeur André Vacheron. En présence de la ministre de la Santé, du Chancelier de l’Institut, de plusieurs Secrétaires perpétuels, de nombreux confrères de l’Académie de Médecine et de l’Académie des Sciences Morales et Politiques, Monsieur Yvon Gattaz, président de l’Académie des Sciences Morales et Politiques, a rappelé la brillante carrière médicale du Professeur André Vacheron. Foi, espérance et persévérance, tel est le message que nous délivre le Professeur Vacheron lors de son discours d’investiture à l’Académie des Sciences Morales et Politiques.




Le Gouvernement dit « demain », les médecins « tout de suite » !

332 – Le mois d’avril a été riche en rebondissements de toutes sortes pour les médecins libéraux, qui ne seront pas plus riches pour autant, du moins pas tout de suite. A peine la Cour de Cassation avait-elle rendu une décision négative sur la possibilité pour les généralistes à coter en CS, que le Président de la République, en visite dans un groupe médical pluridisciplinaire de Livry-Gargan, emblématique du « modèle » promu par le ministère de la Santé, annonçait le C à 23 euros et la cotation en CS pour les spécialistes de médecine générale pour le 1er janvier prochain. « La décision est prise » a dit Nicolas Sarkozy. La déconfiture aux régionales – et la perspective des présidentielles de 2012 -, ainsi que la fronde tarifaire engagée auparavant, et selon des formes diverses, par les syndicats médicaux, ne sont sans doute pas étrangères à cette décision présidentielle.

La mission « Hubert »

Dans la foulée, le président de la république a également annoncé la tenue d’une grande concertation sur la médecine de proximité qui sera menée sous la houlette de l’ancienne ministre de la Santé, Elisabeth Hubert (ci-dessous). Les propositions de la mission « Hubert », qui s’achèvera en septembre, pourront avoir une traduction législative à l’automne ou trouver leur traduction dans la future convention. Sans préjuger de ses conclusions, on s’interroge tout de même sur la nécessité de cette nouvelle concertation qui arrive après les EGOS, le rapport Vallancien sur les maisons de santé à l’automne dernier, et la mission Legmann… Si on ne sait pas comment restructurer l’offre des soins de premiers recours dans notre pays, on ne le saura jamais ! Cela laisse une impression de disque rayé, et surtout d’un gouvernement qui gagne du temps et… de l’argent !

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Les médecins libéraux ne sont d’ailleurs pas dupes, qui ne prennent pas comme un cadeau mais comme un dû, un C à 23 euros qu’ils attendent depuis 2007, et la possibilité de coter en CS pour les généralistes alors que la reconnaissance de la médecine générale comme spécialité à part entière date de 2004. Et pour ce dû, ils n’entendent pas attendre encore jusqu’à l’année prochaine. « Les médecins généralistes n’attendront pas jusqu’à Noël », prévient MG France, qui, avec ses alliés SNJMG, Union Collégiale et Union Généraliste-FMF, appelle à une grève totale de la télétransmission, à une manifestation le 20 mai prochain devant les ARS, et à une « journée d’action » pour « la reconnaissance immédiate et entière de la spécialité médecine générale le 18 juin ». La CSMF ne se laisse pas amadouer non plus par « des promesses incertaines car trop lointaines », et maintient son mouvement de contestation tarifaire « unitaire », appelant les généralistes à prendre 23 euros pour la consultation en cabinet et 33 euros pour la visite, et les spécialistes à appliquer le C2 consultant à 46 euros, le tout conformément à l’avenant conventionnel n° 23 signé le 29 mars 2007. Elle appelle aussi « tous les médecins en cabinet et en établissement à exiger la rémunération des gardes et astreintes comme le prévoit le texte conventionnel signé en 2005 avec le paiement des astreintes, dès lors qu’un médecin, y compris spécialistes en établissement, est inscrit sur le tableau des gardes ». Quant au SML, en retrait de la contestation tarifaire, il durcit néanmoins le ton face à « une vexation supplémentaire inutile avec le report de ces mesures au 1er janvier 2011 ». Il appelle à ne grève totale de la télétransmission depuis le 21 avril dernier, et demande l’inscription du C à 23 euros dans le règlement arbitral.

On sait qu’il y sera depuis que Nicolas Sarkozy l’a dit. Mais à la fin avril, c’est tout ce que l’on connaissait du texte que l’arbitre conventionnel, Bertrand Fragonard, avait remis le 20 du mois à Roselyne Bachelot, et qui fera office de convention, jusqu’à la nouvelle… l’année prochaine ! ■(gallery)




Interview de Dalil Boubakeur : « La médecine nous fait voir le monde sans œillères »

332 – Jean-François Thébaut et Catherine Sanfourche – Qu’est-ce qui vous a amené à la médecine ? _ Dalil Boubakeur : Je suis né à Alger où mon père était professeur. Des évènements familiaux ont fait que nous avons eu affaire à la médecine pendant la guerre. Or, l’occupation allemande a persécuté des médecins, dont beaucoup étaient juifs. Moi, né en 40, je n’en ai pas souffert, mais ma soeur, née en 42, a failli mourir par manque de soins, de médicaments, et ce sont des médecins juifs qui l’ont sauvée. Pour mon père, la médecine était donc ce qu’il y avait de mieux ! Toute mon enfance a été bercée par la célébration de ces médecins !

Votre formation médicale vous fait-elle voir les choses différemment de vos prédécesseurs non-médecins à la Mosquée ? _ D. B.: Je suis musulman, religieux, je connais la doctrine, mais je ne peux pas m’empêcher d’être médecin ! Cela se traduit par un réflexe d’analyse de tous les événements, spirituels, théologiques, de la foi, de la croyance, de la raison. On est formaté à avoir une analyse qui va dans le plus fin du détail. A l’époque de mon PCB, j’avais un patron, Raoul-Michel May, célèbre biologiste, collègue de Jean Rostand, qui nous obligeait à voir les faits de la vie sous l’angle de la science, l’expérience et de l’observation, et nous a orientés vers Darwin, Lamarck : tout évolue « panta rei » ! Ensuite, étudiant à Sainte-Anne, ce fut la découverte de Freud : l’essentiel chez nous est l’inconscient et nous avons des pulsions primaires contre lesquelles nous ne pouvons que fortifier notre surmoi ! Cette découverte m’a bouleversé. Puis ce fut la découverte du fonctionnement du cerveau : tout l’être humain fonctionne sur ces synapses libératrices de substances chimiques, les neurotransmetteurs, qui vont déterminer une contraction, une dilatation, mais surtout, un plaisir ou une souffrance. Le sentiment du plaisir ou de la souffrance, voyez le rôle des endorphines ! C’est le bon Dieu qui a créé tout ça, mais quel bon Dieu ! Nous sommes finalement programmés ! Cette complexité de la structure humaine nous fait appréhender différemment le religieux. La médecine abolit les limites et nous enlève toutes les oeillères pour voir les choses telles qu’elles sont dans une raison claire.

A l’inverse, votre religion vous amène-t-elle à voir les concepts médicaux sous un angle différent ? _ D. B.: Je n’explique pas le besoin de religieux. Je me garde de toute théorie. Et pourtant, le sens d’une transcendance se retrouve dans toutes les civilisations et à toutes les époques, cela m’a toujours frappé. Pour moi, cela doit conduire à une tolérance absolue. Mes fidèles ici connaissent mes idées d’ouverture et de tolérance, mais c’est une tolérance qui est humaniste et scientifique. En faisant mon métier de médecin, je n’ai pas vu un millimètre de différence entre un Noir, un Blanc, un Arabe, un Européen…

L’évolution très technologique de la médecine vous inquiète-t-elle ? _ D. B.: Non, au contraire, je fonde de grands espoirs dans cette évolution. Les greffes d’organes sont une de ces grandes espérances. Mais le plus grand espoir réside peut-être dans les promesses offertes par les cellules souches. Je suis passionné par les découvertes potentielles à partir des cellules embryonnaires ou des cellules souches d’adultes dans certains tissus totipotents, qui peuvent devenir de la rétine, et d’autres structures organiques. C’est extraordinaire, surtout en cardiologie ! Le muscle cardiaque régénéré par ces cellules semble être une promesse pour demain.

On bute en ce moment sur le hiatus entre le progrès médical et les possibilités de les financer. Pensez-vous qu’on doive privilégier l’individu au détriment de l’intérêt du plus grand nombre, ou l’inverse ? _ D. B.: L’être humain aspire légitimement à vivre le mieux possible, et la médecine est un extraordinaire facteur de progrès humain. Si la médecine peut rendre à quelqu’un une fonction ou une capacité perdue, c’est formidable. Mais se pose le problème de l’éthique et de la démocratisation de ce progrès. Nous ne sommes pas différents les uns des autres, et aucun être humain ne peut accepter sa propre déchéance. Et nous sommes tenus de donner aux malades des soins « éclairés », le meilleur de la médecine à un moment T. Malheureusement, c’est souvent une utopie. La déontologie médicale évoluera-t- elle et le médecin ne sera-t-il plus tenu de donner les meilleurs soins à tous, en raison des contingences économiques ou de la démographie ? C’est une grave question. ■




HPST : La loi qui fait peur en public comme en privé

332 – Les médecins ne sont plus les patrons à l’hôpital

_ _ «La réforme de la gouvernance, qui a été faite de façon très dogmatique, est de type très entreprenarial, commente le Dr Michel Hanssen, responsable de pôle et chef du service de cardiologie interventionnelle de l’hôpital d’Haguenau (Bas-Rhin), et président du collège national des cardiologues des hôpitaux généraux (CNCHG). En préalable, j’estime très dommageable que la réforme Mattei, qui commençait à porter ses fruits, qui satisfaisait beaucoup de directeurs d’hôpitaux et de médecins, n’ait fait l’objet d’aucune évaluation avant l’élaboration de la loi HPST. Mais ça, les hospitaliers en ont l’habitude qui ont vu défiler presque autant de réformes que de ministres de la Santé ces dernières décennies… » Pour lui, le défaut majeur de la nouvelle gouvernance réside dans ce pouvoir quasi-exclusif donné au directeur, « personnage patronal tout à fait majeur, qui aura toutes les rênes en main ». Certes, le président de la CME garde quelques pouvoirs non négligeables, mais « beaucoup de choses dépendront des rapports entre les deux hommes ».

Des exemples ? « Trois noms seront proposés au directeur par la CME pour sa représentation au sein du directoire, en conseil d’administration. S’ils les refusent, trois autres noms seront proposés, et s’ils ne conviennent toujours pas, c’est le directeur qui nommera les représentants de la CME. Le même mécanisme aura cours pour la désignation des chefs de pôle qui étaient jusqu’à présent élus par leurs pairs. Les confrères pressentis pour travailler dans l’hôpital ne passeront plus en CME, mais par les responsables de pôle. La CME devient une instance relativement virtuelle, une instance d’information mais qui n’aura pas beaucoup son mot à dire. Tout privilégie le binôme directeur-président de CME. Les optimistes disent qu’il faudra bien qu’ils s’entendent, mais tout va reposer sur les relations entre deux hommes… »

De toute évidence, la nomination des médecins par le directeur de l’hôpital a du mal à passer. Et soulève une interrogation particulière chez les PUPH. Cardiologue à l’hôpital Georges Pompidou (Paris), chercheur à l’INSERM, le Pr Albert Hagège est aussi vice-président de la Société Française de Cardiologie, mais s’exprime ici en son nom propre : « Le pouvoir renforcé du directeur, qui peut nommer ou pas les médecins, rend les choses compliquées. Comment cela se passera-t-il pour la nomination des hospitalo-universitaires ? Que deviennent le conseil consultatif et la CME, puisque le directeur pourra se passer de leur avis ? La loi HPST suit une logique purement économique, avec une volonté respectable d’améliorer la gestion hospitalière dans l’intérêt collectif, mais la centralisation des pouvoirs ne va pas faciliter les choses, sans compter qu’elle peut être aussi source de dépenses. Comment cette logique économique va-t- elle pouvoir s’harmoniser avec la logique médicale ? L’incertitude plane sur l’avenir des CHU qui forment les médecins, ce qui, comme chacun le sait, ne rapporte pas d’argent mais en coûte ! »

C’est aussi l’avenir qui préoccupe Michel Hanssen, et en particulier la perte d’attractivité de l’hôpital pour les jeunes générations. « Dans le cadre de la fonction publique, l’hôpital na pas été le plus arc-bouté contre les réformes, souligne-t-il. Mais on est en train de charger la barque un peu trop et cela n’est pas bon dans le contexte actuel de la démographie médicale. » En outre, la clause de nonconcurrence, qui interdit à un PH ayant exercé cinq ans dans un hôpital de s’installer en privé dans le territoire d’influence de l’établissement pendant les deux ans qui suivent son départ. « Il va être difficile de faire venir des jeunes à l’hôpital, commente Michel Hanssen. Ils risquent de ne pas y entrer de peur de ne pouvoir en sortir, et cette mesure de protection de l’hôpital public risque d’être contreproductive. »

La portion congrue du secteur privé auprès des ARS

Parmi les huit collèges qui composent la conférence régionale de santé (CRS), celui des « offreurs des services de santé » comprendra notamment cinq représentants des hôpitaux publics désignés par le directeur de l’ARS, dont au moins deux présidents de CME de centres hospitaliers et de CHU, ainsi que deux représentants des établissements privés à but lucratif, dont au moins un président de CME. Ces représentants sont désignés « sur proposition » de leur fédération respective, la FHF pour le public, la FHP pour le privé. Et les libéraux ne sont guère mieux lotis par la composition des conférences de territoire. Sur les cinquante membres au plus qui les composent, dix au plus représenteront les établissements de santé, soit cinq représentants « des personnes morales gestionnaires », et cinq au plus présidents de commission médicale ou de conférence médicale d’établissement, également désignés sur proposition des fédérations hospitalières. Pour les médecins libéraux, le bât blesse deux fois, par la sous-représentation du secteur privé, et la désignation de cette représentation par la FHP. Selon le président de la conférence nationale des présidents de CME du privé, Jean-Luc Baron, cette représentation « réduite à sa portion congrue » est très inquiétante. « Cela signifie que pour faire entendre notre voix sur certains dossiers, nous devrons développer des stratégies d’alliances au sein de la CRS, qui compte un nombre exorbitant de représentants, une centaine. On demande l’avis de tout le monde, mais je crains qu’en fin de compte le seul décideur ne soit le directeur de l’ARS. Quant à la désignation de nos représentants de CME par la FHP, c’est choquant. Nous n’avons aucun problème avec la structure nationale, mais les délégations régionales de la FHP sont des instances autonomes et tout peut arriver, y compris que telle délégation régionale décide de se passer de l’avis des CME ! » Jean-Luc Baron a donc demandé au président de la FHP d’adresser un courrier à leurs représentations régionales respectives les incitant à désigner ensemble les représentants à la CRS. Concernant les conférences de territoire, Jean-Luc Baron souligne, outre là encore une faible représentation des CME, un problème de désignation. Le décret dit en effet que la répartition des sièges tient compte des différentes catégories d’établissements implantés dans le territoire de santé. « Dans nombre de territoires, il n’y a pas de tissu hospitalier diversifi é, avec CHU, CHG, CAC, etc. Dès lors, à qui donnera-t-on la représentation au sein de la conférence de territoire ? »

Cardiologue à Tours, président de la conférence régionale des CME du privé et membre du conseil d’administration de la conférence nationale des présidents de CME du privé, Olivier Bar juge ces décrets « catastrophiques, qui traduisent une tendance apparemment irréversible à la non-reconnaissance des médecins des établissements privés ». « Les tutelles considèrent que les seuls interlocuteurs sont leurs directeurs, analyse Olivier Bar. Cela traduit la volonté d’imposer aux établissements privés des contraintes, dans l’intérêt général, mais sans respect pour l’indépendance des médecins libéraux qui se retrouvent dans la situation complexe où ils sont à la fois libéraux, non représentés auprès des tutelles, responsables individuellement et contraints par les engagements pris par leurs établissements ! » Pour Olivier Bar, tout cela trouve une traduction « scandaleuse » dans le fait que les CME d’établissements privés n’ont aucun statut juridique. Il veut cependant voir une lueur d’espoir : « Le ministère de la Santé a récemment indiqué qu’il allait allouer une enveloppe à la conférence national des présidents de CME du secteur privé, c’est peut-être un début de reconnaissance… »(gallery)




Jean-Pierre Cébron (Pays de la Loire) : Les ARS auront besoin de nous autant que nous aurons besoin d’elles

332 – CardioNews – Le Cardiologue : Quelqu’un de chez vous, en la personne d’Élisabeth Hubert, vient d’être mandaté par Nicolas Sarkozy pour « réconcilier » avec sa majorité un corps médical sérieusement dérouté. Sera-t-elle ponctuelle au rendez-vous ?

Jean-Pierre Cébron : Je la connais bien pour l’avoir fréquentée depuis les bancs de l’Université. J’ai suivi son parcours politique, admiratif de sa capacité d’engagement. Il me semble que sa nomination, aujourd’hui, constitue un signal intéressant pour les médecins car sa personnalité est unanimement reconnue. Pour autant, le problème dont elle hérite est complexe et c’est quelque part une nouvelle « mission impossible » dès lors qu’elle ne maîtrise pas l’aspect financier des choses ! On verra bien …

Le C à 23 € des généralistes ?

J.-P. C. : Ce n’est pas cela qui va régler les problèmes d’organisation ou de démographie de la médecine mais qu’au moins soit restauré le respect de l’engagement pris ! Mon exercice personnel est de type plutôt hospitalier et je suis plus sensible à la mise en œuvre de la loi HPST qui m’apparaît de nature à avoir un effet authentiquement structurant sur l’offre. Evidemment en établissement mais également en cabinet de ville par le biais des SROSS ambulatoires, même s’ils ne restent non opposables dans un premier temps… Ces ARS, on sent bien que c’est une armée qui se met en route !

Faites-vous partie de ceux qui s’en réjouissent ou que ça inquiète ?

J.-P. C. : Ces Agences seront forcément structurantes même si ce n’est pas pour l’immédiat. Pour ou contre me semble donc un faux problème. Comment aller contre un effet structurant ? On n’est pas, non plus, condamnés à l’opposition et on peut même y trouver des partenaires. Il me semble, pour rester au niveau du constat du jour, qu’elles auront nécessairement, en matière de démographie par exemple, du mal à faire pire que les anciennes structures : c’est quand même le prototype du sujet qu’il était possible d’anticiper ! Un peu plus de cohérence ne sera donc pas difficile …

Avez-vous déjà eu l’occasion de rencontrer Mme Desaules, votre directrice d’ARS ?

J.-P. C. : Personnellement non, mais le président de l’URML l’a déjà rencontrée à plusieurs reprises. Il nous a rapporté des audiences avec une personnalité ouverte, « communicante ». Je n’ai pas le sentiment que les syndicats de verticalité aient vocation à avoir un accès direct avec elle. Le dialogue transitera donc forcément avec les URPS, Unions Régionales de Professions de Santé où il est évidemment important de siéger. Les discussions sont en cours et on essaie, nous, d’avoir deux cardiologues en position éligible, …

Vous avez une expérience en ETP (Éducation Thérapeutique du Patient), vous avez une expertise également en télécardiologie … Autant de sujets qui vous mettent quand même en première ligne du dialogue avec cette nouvelle institution…

J.-P. C. : En ETP, nous avons commencé en septembre, en télécardiologie, nous avons déjà une centaine de patients implantés sous télésurveillance … Tout cela marche bien et intéresse visiblement les observateurs. Nous en reparlerons dans une réunion organisée dans le cadre du cycle sanofi-aventis. Pour autant ces initiatives intéressent-elles tous les cardiologues d’exercice libéral ? Confusément, tous savent bien que c’est là un mouvement qui se met en route, inexorable. Et qu’il vaut toujours mieux, parce qu’il a une forcément une « prime à l’innovation », être dans les projets qu’en dehors. Je me dis aussi que, de ce point de vue et parce que ni la télémédecine ni l’ETP ne se décrètent, les ARS ont autant besoin de nous, de notre expérience, que nous avons besoin d’elles. Mais tant en matière d’ETP que de télécardiologie, on en parle beaucoup sans trop voir arriver de financements pérennes. J’ai l’habitude, depuis 20 ans, d’ouvrir des chantiers sans disposer toujours de la visibilité théoriquement nécessaire, mais j’ai aussi des scrupules à y engager trop de monde. Ces sujets sont terriblement chronophages et requièrent beaucoup de bonne volonté ; or tout le monde n’a pas vocation à faire du bénévolat ! Qui plus est, j’ai quelques inquiétudes à voir, parfois, des interlocuteurs trop enclins à penser que ces innovations auront un retour sur investissement forcément favorable à l’économie de la santé, à l’égalité d’accès aux soins, à l’efficience du système. Je n’ai aucun doute pour l’avantage en termes de qualité des soins mais j’en ai sur la rentabilité en terme d’impact budgétaire !




Les vrais défis d’Élisabeth Hubert

332 – CardioNews – On se souvient que pour renouer avec le corps médical passablement dérouté après le Plan Juppé de 1995, Jacques Chirac avait dû renvoyer au créneau le même Alain Juppé pour faire amende honorable sur le registre « J’ai peut-être commis une erreur ». L’affaire fut rondement menée dans la torpeur du début d’été 2000 soit deux ans avant l’échéance de 2002… du moins le maire de Bordeaux jouait-il « sur du velours », Lionel Jospin étant, à Matignon, et Martine Aubry, aux affaires sociales, très occupés l’un et l’autre à rompre tous les ponts avec le corps médical…

Pas de cohabitation cette fois et un hyperprésident en première ligne, en tout cas sans fusible, dans un nouveau conflit ouvert avec le corps médical. Il lui fallait donc un « médiateur » et ce sera, encore mieux… une médiatrice, Elisabeth Hubert, actuelle présidente de la FNEHAD, dont on avait cru comprendre – parce qu’elle l’expliquait à qui voulait l’écoute r- qu’elle avait pris un peu de distance avec la politique depuis qu’elle s’était fait proprement « virer » avec quelques autres « Juppettes ».

Le choix de Nicolas Sarkozy est d’autant plus pertinent que la Dame n’a pas d’ennemis dans le corps médical : elle a été CSMF en 1981 – c’est même là qu’elle a commencé sa carrière politique, repérée par un proche d’Olivier Guichard, un des barons du gaullisme – et elle avait participé aux premiers combats identitaires de la médecine générale avec Richard Bouton qui allait ultérieurement fonder MG-France ! Elle était enfin amie de Dinorino Cabrera, ex-patron-toujours-charismatique du SML et donc de son successeur… Il n’y a guère qu’à la FMF où elle n’ait pas d’appui… Il sera en tout état de cause difficile aux centrales de « casser » un plan que sa feuille de route nous promet pour… fin septembre.

Fin septembre, c’est justement le grand rendez-vous que les mêmes centrales ont avec le suffrage universel chargé de désigner les futurs négociateurs de la Convention et les administrateurs des futures URPS (Unions Régionales de Professions de Santé). Mme Hubert se gardera donc d’interférer dans la campagne électorale en y révélant trop d’aspects de son projet, éventuellement appelé « programme » si elle devait être appelée à le mettre elle-même en œuvre. L’hypothèse ne peut évidemment être écartée a priori puisque « le grand remaniement » est promis dans les mêmes eaux, une fois arrêtées les grandes lignes de la réforme des retraites.

Voilà donc pour le calendrier, idéal aux acteurs, les propositions de la « démineuse » étant appelées à trouver place soit dans le PLFSS ou, par voie d’amendements, pendant sa navette parlementaire, soit dans une loi ad hoc à débattre avant la fin du quinquennat, soit encore – au gré des négociateurs – dans le texte conventionnel à élaborer … sans échéance précise, le « règlement minimal » n’étant pas forcément voué à la précarité. _ Reste à trouver les éléments de fond susceptibles de ramener à la bergerie les médecins-électeurs égarés et à l’exercice libéral quelques vocations défaillantes. Paradoxalement et quoiqu’en disent les centrales, il y a dans le Rapport Legmann largement de quoi jeter les fondations d’une authentique réforme : diversification des modes de rémunération, incitation au regroupement, invention d’un authentique métier d’assistant, … Les auteurs du dernier Livre Blanc de la Cardiologie y retrouvent leurs petits… _ En fait, le véritable rendez-vous assigné à Mme Hubert est ailleurs, et sans doute directement à l’Élysée : on lui demande de dessiner un peu plus précisément le concept de « médecine de proximité » – est-ce là, comme on le soupçonne, un simple artifice sémantique pour (re)parler de médecine « de premier recours », de médecine générale en fait où la médecine spécialisé technico-clinique y trouve-t-elle place ? – et, surtout, de trouver du « grain à moudre », des financements ! _ Dans l’enveloppe constante où la Crise nous assigne à résidence, on sait assez précisément où ils se trouvent : dans les gains de productivité à traquer à l’hôpital, dans la refonte de l’ALD, dans la réforme du financement (TVA sociale) … Mais ce sont-là autant de terrains politiques minés à moins de deux ans de 2012. _ Dans ses missions accessoires, Elisabeth Hubert devra donc savoir aussi exhorter le corps médical à la patience. Pas dans la poche ! En attendant, on rappellera ici les conseils qu’elle délivrait à l’AG de décembre du SNMSCV dont elle était l’hôtesse: « Soyez porteurs de projets, mais soyez-le vite ! » (Revue Le Cardiologue n° 330 de mars dernier)




URPS : chance ou piège pour la médecine libérale ?

332 – CardioNews – Chronologiquement le premier acte est la création des ARS. Leur mise en place effective depuis le 1er avril 2010 n’est pas un simple remodelage du Meccano administratif de la santé mais bien la naissance d’une nouvelle administration. Que l’on en juge : disparition du paysage de 8 administrations dont les DDASS, DRASS, URCAM, CRAM, refondation de tous les organigrammes, cohabitation d’agents de culture et statuts différents auxquels sont confiés de nouvelles missions. Il suffit de fréquenter (un peu) les nouveaux locaux pour saisir l’ampleur du changement.

Le deuxième acte sera la constitution des URPS, en remplacement des URML. Créées à l’initiative de la CSMF, les URML ont été conçues comme un outil technique au service de la profession. Certes pour bon nombre de médecins ces Unions sont restées un peu nébuleuses mais il faut dire que le législateur n’a rien fait pour les aider. Ainsi il aura fallu attendre 13 ans pour voir sortir le décret sur la télétransmission des données des Caisses, aucun moyen ne leur a été attribué pour mener l’EPP des médecins libéraux dont elles étaient un des acteurs désignés. Pourtant elles ont su, petit à petit, s’imposer comme un interlocuteur incontournable au niveau régional, s’emparer de dossiers comme ceux de la démographie médicale et de la PDS, s’investir dans des réseaux communicants entre médecins, etc.

Les URPS, tout comme les URML, seront composées de médecins élus au terme d’un scrutin professionnel dont la date est fixée au 29 septembre prochain. Ces élections ont en elles-mêmes un fort enjeu puisqu’elles contribueront à établir la représentation de chaque syndicat. En outre leur résultat ne manquera pas non plus d’être interprété par le Gouvernement, comme l’a été celui des récentes élections régionales, comme un message d’encouragement ou de défiance selon le score qu’obtiendront les syndicats qui, soit, ont soutenu la loi HPST (MG France, FMF), soit l’ont combattu (CSMF, SML). Elles influenceront également directement les futures négociations conventionnelles fixées après leur déroulement.

Les nouvelles URPS auront des missions élargies. En effet elles participeront : – à l’élaboration du schéma régional d’organisation des soins – à l’organisation de l’exercice professionnel, de la PDS, de la continuité des soins et des nouveaux modes d’exercice – à l’amélioration de l’offre de soins et l’accès aux soins des patients – à l’éducation thérapeutique, la gestion des crises sanitaires et à la veille sanitaire – à la mise en œuvre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens des services de santé et – à celles des contrats sur la qualité et la coordination des soins – au déploiement des systèmes de communication et d information partagées – au DPC – à l’analyse des données du système national interrégime de l’Assurance Maladie – à la représentation des professionnels auprès de l’ARS. _ L’objectif affiché est celui d’une large concertation au niveau régional entre professionnels de santé, clairement identifiés et légitimés par des élections (toutes les professions de santé médicales et paramédicales auront leurs propres URPS), et une ARS, recouvrant tout le champ du médical (hospitalier et ambulatoire) et médico-social. _ Mais on est aussi en droit de s’interroger si ne se cache pas un piège pour la profession, le Gouvernement et le législateur ayant (volontairement ?) laissé des zones d’ombre : – quel sera le degré d’autonomie régionale de l’ARS quand on sait que son Directeur est nommé en Conseil des ministres, qu’il est lui-même sous la coupe du Préfet de région et qu’une agence nationale coiffera toutes les ARS ? – ne s’agit-il pas plus d’une « déconcentralisation » que d’une réelle régionalisation ? – n’a-t-on pas sciemment voulu paralyser les URPS en les divisant en 3 collèges : généralistes, spécialistes et chirurgiens-anesthésistes-obstétriciens ? – et par là-même balkaliniser la profession pour mieux l’amoindrir ? – les URPS et les ARS ne sont-elles pas un moyen de contourner les Syndicats pour mieux les affaiblir, ce qui ne manquerait d’ailleurs pas de soulever un problème de droit, par exemple en leur permettant de conclure des accords régionaux type CAPI hors du champ conventionnel ? – quel sort sera réservé à la médecine libérale de spécialité, grande oubliée des débats depuis des années comme si on voulait la voir disparaître pour cantonner les spécialistes en établissement de santé ?

Une page vierge s’ouvre qu’il revient aux URPS et ARS d’écrire. Pour un syndicaliste l’enjeu est évidemment passionnant. L’avenir dira sans doute vite si cet enjeu est de trouver des voies d’amélioration de l’exercice de la médecine, avec un partenaire loyal à l’écoute d’une profession qu’il connaît mal, ou résister à une étatisation de la médecine libérale dont la loi HPST porte les gènes. Dans tous les cas il conviendra d’être vigilant, de respecter une cohérence syndicale.

C’est pourquoi il est important que les cardiologues, appuyés par une structure syndicale forte que bien d’autres spécialités leur envient, s’engagent dans ces élections pour porter la voie de la cardiologie libérale. Cet engagement est d’autant plus important que notre spécialité, du fait de l’implication en termes de santé publique des maladies cardiovasculaires, ne manquera pas d’être concernée par les programmes des ARS.

L’enjeu est de taille. Du vote des médecins vers des syndicats monocatégoriels ou démagogues ou vers des syndicats responsables et transversaux seuls capables de défendre l’ensemble de la profession, de la faculté d’entente des élus et du degré d’écoute des ARS découlera la capacité de transformer un piège en une chance pour la médecine libérale.

Jean-Pierre Binon




Les relations difficiles de l’ARH Nord-Pas de Calais avec les cardiologues libéraux

331 – En raison de la progression soutenue du nombre d’indications de DAI, le directeur de l’ARH a révisé en novembre 2009 le SROS actuel (SROS 3), et a autorisé de façon anticipée l’agrément à partir de février 2010 de trois nouveaux centres. Cette démarche était louable en termes de santé publique, compte tenu du retard de la région.

Aucun établissement privé n’a pu bénéficier de cette autorisation.

A ce jour, dans la région, cinq centres sont agréés pour l’implantation des DAI, mais il n’y figure aucune structure privée, de sorte qu’aucun rythmologue libéral formé ne peut pratiquer sa technique dans sa clinique.

La rédaction du projet du futur SROS pour la rythmologie interventionnelle, qui fi xera la carte hospitalière jusqu’en 2017, vient d’être présentée. Il n’a pas été tenu compte des propositions des cardiologues libéraux au COTER. Si ce projet était adopté tel quel, il risquerait de facto, pour les sept ans qui viennent, d’interdire pour un certain nombre de rythmologues libéraux la pratique de leur spécialité dans leur établissement, ceci même avant le dépôt des demandes d’agrément.

Des règles équitables

Le Syndicat des Cardiologues n’a pas à porter de jugement de valeur sur les établissements concernés qui devront être évalués sur la qualité de leurs projets, et leur conformation à la réglementation.

Nous demandons par contre que les règles soient équitables, et que certains candidats ne soient pas dans la situation d’être éliminés avant même d’avoir pu concourir. Il y avait jusqu’à présent dans la région, en ce qui concerne la cardiologie interventionnelle en général, une répartition équilibrée public-privé, qui laissait à la population le libre choix. Dans plusieurs bassins de vie, la bonne entente entre cardiologues libéraux et hospitaliers publics, avait permis d’établir des partenariats, notamment pour les astreintes.

Cette politique est-elle remise en cause ?

L’ARS va relayer l’ARH, et le nouveau directeur va offi ciellement prendre très prochainement ses fonctions. C’est de lui, à qui le Syndicat Régional des Cardiologues a adressé ce courrier, que dépend désormais la réponse.

Le champ d’action de l’ARS s’étend également à la médecine ambulatoire. Au-delà de ce problème ponctuel de la rythmologie, qui fait quand même suite en peu de temps à celui des angioplasties coronaires en urgence, la véritable interrogation est la suivante : quelle place l’ARS compte-t-elle donner à la cardiologie libérale dans l’organisation des soins de la région? ■ _ _ _ _ |Monsieur Daniel LENOIR _ Directeur ARS Nord – Pas de Calais

_ _ Monsieur le Directeur _ _ Différents événements de la période récente et actuelle à propos de la rythmologie interventionnelle nous amènent à nous interroger sur la politique des autorités sanitaires régionales vis-à-vis de la cardiologie libérale. _ _ Quelques faits : La révision anticipée, prenant effet en février dernier, de la carte des établissements autorisés à implanter des défi brillateurs automatiques cardiaques implantables (DAI). Tous les établissements où exercent des cardiologues libéraux ont été écartés. Actuellement, aucun rythmologue libéral ne peut pratiquer l’ensemble de sa spécialité dans son établissement. _ _ Le projet de SROS. Ce projet va de facto interdire, ou rendre plus hypothétique, la pratique de la rythmologie interventionnelle dans leur établissement pour les cardiologues libéraux de plusieurs bassins de vie Réunion du CROS du 8 mars dernier. D’après nos informations, le représentant de l’ARH aurait présenté son projet comme étant celui du COTER, sans tenir compte de l’avis différent des membres libéraux de ce COTER (cf. notamment compte-rendu de la réunion du 26 janvier 2009 à propos du bassin de vie du littoral).

_ _ La directrice d’un centre hospitalier a déjà tiré les conséquences de cette politique et considère que les jeux sont faits puisqu’elle vient de faire des propositions d’exercice dans son établissement à un rythmologue interventionnel travaillant dans la clinique voisine. _ _ Nous étions habitués dans la région, en ce qui concerne la cardiologie interventionnelle en général, à un équilibre public-privé, qui avait permis un partenariat constructif entre cardiologues libéraux et hospitaliers dans plusieurs bassins de vie. _ _ Ce changement de politique de l’ARH nous préoccupe au plus haut point. _ _ Actuellement, dans le Nord-Pas de Calais, les libéraux ne représentent plus que 37 % de l’ensemble des cardiologues (Source : document ARH). Cherche-t-on à les inciter à exercer dans des régions plus accueillantes ? _ _ Notre syndicat souhaite connaître votre position sur ce problème, et d’une façon plus générale, sur la place de la cardiologie libérale dans le système de soins régional. _ _ Je reste à votre disposition pour en parler avec vous. _ _ Je vous prie, Monsieur le Directeur, d’agréer mes salutations distinguées. _ _ Dr Vincent Guillot _ _ PJ : Note sur les propositions de notre syndicat sur le projet du SROS de rythmologie interventionnelle. _ _ | _ _ _ _ |Glossaire| |ARH. Agence Régionale de l’Hospitalisation. _ _ _ ARS. Agence Régionale de Santé. L’ARS succède à l’ARH, avec des compétences plus étendues, touchant à la fois l’hospitalisation et les soins de ville. _ _ _ SROS. Schéma Régional d’Organisation Sanitaire. _ _ _ COTER. structure composée de professionnels désignés par l’ARH, consultés pour l’élaboration du projet de SROS. _ _ |




UFCV : Enquête sur le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS)

331 – Soixante treize questionnaires ont pu être analysés sur la pratique quotidienne des cardiologues face au SAOS.

Sur la première étape, face au dépistage proprement dit, les cardiologues répondent présents, puisque la recherche en cours de consultation est faite : souvent pour 59 % d’entre eux, de temps en temps pour 38 % ; seuls 2 % ignorent encore son dépistage.

Les efforts effectués depuis quelques années pour améliorer la connaissance cardiologique face à ce syndrome, fréquemment présent dans leur « patientèle », et source connue d’évolutivité péjorative sur les pathologies cardiovasculaires qu’ils ont à prendre en charge, a donc porté ses fruits.

Une réponse importante dans cette étape de dépistage a été la recherche, via le conjoint, de la présence ou non d’un ronflement dans le cas particulier du syndrome métabolique : il est frappant de constater que 78 % des cardiologues effectuent cette recherche, prouvant leur bonne compréhension de la physiopathologie mise en jeu dans l’élaboration de ce syndrome ou l’obésité abdominale, témoin de l’augmentation de la graisse viscérale (figure 3) est un des signes majeurs du syndrome ; or il a été démontré que l’index d’apnées hypopnées (IAH) caractérisant le SAOS et sa gravité est en relation linéaire non seulement avec l’index de masse corporelle, mais aussi avec la masse graisseuse viscérale déterminée par scanner.

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Dans le dépistage du SAOS, la recherche de « clefs » simples se poursuit : outre la somnolence diurne excessive (SDE) déterminable par le questionnaire d’Epworth, critiquable car non corrélé à l’IAH, ou son évaluation plus rapide par l’interrogatoire déterminant une somnolence légère, moyenne (ne survenant qu’en situation passive), ou sévère (survenant en situation dite « active »), rappelons la recherche d’un tour de cou pathologique (> à 45 cm chez l’homme, > à 42 cm chez la femme), facile à mesurer et qui, lui, est corrélé à l’IAH, le ronflement, et les pauses respiratoires signalés par le conjoint qui sont d’excellents indicateurs de SAOS ; pour terminer une question simple et rapide : celle du délai d’endormissement, lorsqu’il est de quelques minutes… le conjoint vous met rapidement sur la bonne piste !

La suite de l’enquête est intéressante à plusieurs points de vue car elle s’est intéressée à l’estimation « cardiologique » de la prévalence du SAOS dans la population générale ; les réponses montrent : – une surestimation de cette prévalence dans la population masculine : 70 % répondent qu’elle se situe à 8 %, alors qu’elle se situe à 4 %, cette surestimation s’expliquant probablement par le fait que les patients dits « cardiologiques » sont déjà présélectionnés par leur pathologie, sortant du groupe population générale , avec une prévalence du SAOS nettement supérieure la surestimation du SAOS chez la femme est moins grande : 41 % répondent avec justesse 2 %, 41 % donnent l’estimation de 4 %… la bonne nouvelle est que cette pathologie trop longtemps considérée comme exclusivement « masculine » est aujourd’hui bien reconnue par les cardiologues comme concernant également les femmes.

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Pathologies par pathologies, l’enquête s’est penchée sur :

1. L’estimation de la prévalence du SAOS chez l’hypertendu tout venant (figure 1) : seuls 15 % répondent le chiffre de 45 %, la majorité estimant cette prévalence à 20 % ce qui est en dessous de la réalité ; sachant que le groupe des hypertendus est très hétérogène : dans l’HTA résistante 49 % sous estiment fortement cette prévalence à 45 % alors qu’elle atteint 80 % (chiffre reconnu par seulement 8 % des cardiologues interrogés) ; les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) sont donc connues, ce groupe est considéré à juste titre comme ayant une prévalence nettement supérieure aux hypertendus tout venant, mais avec encore une sous-estimation notable ; rappelons à ce sujet le travail récent d’une équipe française qui s’est intéressée à un autre sous-groupe d’hypertendus : ceux qui sont hospitalisés et qui montre une prévalence du SAOS dans ce groupe dépassant les 50 %.

2. La recherche du SAOS en cas d’HTA résistante : la réponse confirme le bon suivi des recommandations de la HAS puisque 98 % des cardiologues interrogés estiment qu’ils faut rechercher un SAOS dans cette situation.

3. La recherche du SAOS en cas d’insuffisance cardiaque : 47 % répondent par l’affirmative ; toute la difficulté actuelle est de positionner correctement cette recherche : – sur une insuffisance cardiaque optimisée en terme de prise en charge (traitement médical aux objectifs, resynchronisation comprise pour certaines insuffisances cardiaques) – avec la limitation due en partie à l’absence de plainte spécifique : l’asthénie majeure étant au premier plan, l’âge avancé de ce groupe de patients et l’absence de preuves irréfutables concernant l’amélioration de la FEVG, preuves attendues par la grande étude en cours SERVE HF effectuée avec une ventilation adaptée aux insuffisants cardiaques, à 2 niveaux de pressions en BIPAP, qui devrait confirmer la preuve du service médical rendu indispensable pour convaincre la communauté cardiologique ; actuellement seule l’amélioration de la qualité de vie est prouvée ce qui est loin d’être négligeable sur la tranche d’âge concernée. Rappelons que la présence d’un SAOS associée à une dilatation de l’oreillette gauche est un facteur de pronostic très péjoratif (figure 5).

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4. La recherche du SAOS en cas de trouble du rythme atrial est effectuée par 59 % des cardiologues de l’enquête, prouvant que l’étude ayant démontré un risque de récidive de FA multiplié par deux en cas de SAOS non traité est connue ; après une réduction de FA , pour réduire le risque de récidive, il faut être sûr de ne pas avoir méconnu un SAOS.

5. La recherche d’un SAOS en cas de dysfonction érectile (DE) n’est effectuée que par 25 % des cardiologues : chacun sait que la DE est le témoin précoce d’une dysfonction endothéliale ; le SAOS est peut-être aussi un marqueur de dysfonction endothéliale ; actuellement des études expérimentales ont montré le lien entre les troubles du sommeil et la DE chez l’animal ; aucune étude chez l’homme, à ma connaissance, n’a établi de lien formel entre les 2 pathologies.

6. La recherche du SAOS en cas de syndrome coronaire aigu (SCA) (fi gure 4) n’est effectuée que par 15 % des cardiologues ce qui est surprenant.

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De nombreuses études ont été publiées sur l’amélioration de la morbimortalité dans ce groupe de patients et ceci à partir d’un SAOS avec un IAH > à 15/h considéré comme un SAOS modéré ; certes les études sont critiquables, effectuées sur de petits effectifs, avec des groupes témoins non strictement superposables, mais la prévalence du SAS de 30 % chez le coronarien tout venant est bien supérieure dans le SCA avec une évolutivité plus rapide de l’athérosclérose lorsqu’au décours d’une angioplastie on laisse un SAOS évoluer avec des épisodes incessants de désaturation nocturne suivis de coups de butoir tensionnels sur une paroi endothéliale en cours de cicatrisation ; la population cardiologique attend avec impatience des études de plus grande envergure sur ce type de population, sachant que la prise en charge de ce facteur de risque évolutif est sûrement une des voies de la recherche actuelle sur l’optimisation de la prise en charge des coronariens.

Le coronarien apnéique est particulier, car souvent non somnolent, en simple surcharge pondérale, avec une histoire coronarienne de poussées évolutives itératives qui doit mettre le cardiologue sur la voie du dépistage du SAOS.

7. La recherche du SAOS en cas de syndrome métabolique est effectué par 82 % des cardiologues, confirmant ce que leur réponse sur le dépistage du ronflement en cas de syndrome métabolique apportait : le lien étroit existant entre le SAOS et le syndrome métabolique en terme de physiopathologie et de complications, avec de nombreux facteurs confondants ; à ce sujet la dernière étude effectuée sur des patients diabétiques de type 2 porteurs d’un SAOS et traités pour leur SAOS comparativement à ceux non traités et montrant une amélioration de l’HbA1c de l’ordre de 1 % va faire réfléchir s’il en était besoin la communauté des endocrinologues comme celle des cardiologues qui connaissent parfaitement le niveau de risque de cette population.

8. Enfi n, la dernière question concernait la recherche d’un SAOS en cas d’accident vasculaire cérébral (AVC) : seuls 34 % effectuent cette recherche, sachant que la prévalence est très variable selon les études mais approche des 50 %, que la présence d’un SAOS est un facteur de mauvais pronostic, qu’enfi n en cas de bilan étiologique négatif sur un AVC, cette recherche aura un intérêt particulier pour prévenir une récidive éventuelle.

Conclusion

Cette enquête ponctuelle effectuée par l’UFCV le 14 décembre 2009 sur le SAOS a l’énorme avantage de confi rmer l’intérêt de la communauté cardiologique pour ce syndrome, sa conviction sur le rôle qu’elle doit jouer dans le dépistage de ce syndrome particulièrement prévalent dans sa salle d’attente, sa compréhension physiopathologique grandissante et la nécessaire collaboration avec les pneumologues qui vont devoir assurer la prise en charge et le suivi de nos patients diagnostiqués comme étant porteurs confi rmés de SAOS, une réfl exion particulière sur le fait que les patients porteurs d’un syndrome métabolique ne sont pas les seuls à être porteurs d’un SAOS, ceci est particulièrement vrai pour les coronariens (figure 2). ■

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Analyse centrée sur les statines : rapport de la HAS sur l’efficacité et l’efficience des hypolipidémiants

331 – Les hypolipidémiants sont restés pendant très longtemps des médicaments évoluant strictement dans le domaine de la lipidologie. En 1994, avec l’étude 4S, les statines sont entrées par la grande porte dans la cardiologie. Depuis cette date, de très nombreux essais thérapeutiques ont été publiés et les indications des statines en pathologie cardiovasculaire se sont élargies. De manière parallèle, les coûts liés à la prescription des statines se sont envolés et l’Assurance Maladie a, en France, créé une série de mesures pour limiter cette croissance. En novembre 2009, la Haute Autorité de Santé a mis en consultation publique un rapport très intéressant sur les hypolipidémiants. Nous allons dans un premier temps en décrire les principales conclusions puis nous discuterons la portée de ce document lorsqu’il sera consulté par l’ensemble des médecins français.

Le rapport de la Haute Autorité de Santé

1. Le cadre général du rapport

Selon les termes mêmes de la HAS, ce rapport est une recommandation en santé publique qui vise à évaluer la place des statines dans le traitement de l’hypercholestérolémie et dans la prévention cardiovasculaire. Ce travail n’est pas une recommandation de bonnes pratiques cliniques. Cependant, le groupe de travail a émis le besoin de faire évoluer la recommandation de mars 2005 sur la prise en charge des lipides.

D’emblée, la HAS a mis la barre très haute dans la mesure où le critère d’efficacité clinique des traitements hypolipidémiants est, selon cette institution, la mortalité toutes causes. Dans un deuxième temps, la HAS a reconnu que l’évaluation du LDL-cholestérol selon les thérapeutiques pouvait être une approche secondaire intéressante. Ce travail a été l’occasion de la mise à plat de toute une série de données disponibles en France.

2. Analyse des données françaises

Les données épidémiologiques françaises, en particulier l’étude MONA LISA, montrent la très grande prévalence de l’hypercholestérolémie. Chez l’adulte, la prévalence de l’hypercholestérolémie a été évaluée à 37 %. Par ailleurs, l’étude de l’évolution de l’hypercholestérolémie en France à travers les différentes enquêtes représentatives a permis de montrer une amélioration de la situation avec une baisse de la prévalence de l’hypercholestérolémie et une baisse du LDL-cholestérol au cours des dix dernières années.

Si la prise en charge est meilleure dans les études les plus récentes, il n’en reste pas moins vrai que les sujets à haut risque restent insuffisamment traités. C’est ce qui a été démontré dans les études REALITY I et II et dans l’étude CEPHEUS. Dans cette dernière étude, 55 % des patients à haut risque ont un LDL-cholestérol supérieur à 1 g/l. En population générale, la situation est pire puisque seuls 27,7 % ont un taux de LDLcholestérol inférieur à 1 g/l.

3. Avis de la commission de la transparence pour les statines

L’analyse des avis émis par la commission de la transparence au sujet des statines montre clairement que la simvastatine et la pravastatine sont très bien évaluées par cette commission. La fl uvastatine, la rosuvastatine et l’atorvastatine ont une autorisation pour réduire l’hypercholestérolémie mais présentent des ASMR moins performantes par rapport à la simvastatine et à la pravastatine. En particulier, l’atorvastatine a une ASMR 1 en rapport avec l’étude CARDS et une ASMR 2 en rapport avec l’étude ASCOT.

4. Analyse des bases de données nationales françaises

Trois grandes bases de données ont été analysées dans ce rapport, la base EPPM/IMS, la base Thalès/ Cegedim et la base de données de l’Assurance Maladie appelée SNIIR-AM. En 2007, environ 19 millions d’actes de consultation ayant conduit à des prescriptions de statines ont été observés en France. Alors que 7 % des prescriptions de statines étaient réalisées par les cardiologues libéraux, c’est environ 93 % des prescriptions qui sont faites par les médecins généralistes. En initiation de traitement, l’atorvastatine représente 33 % des prescriptions puis vient la rosuvastatine (20 à 25 %), puis la prescription de pravastatine et de simvastatine (environ 18 %). En prévention primaire, ce sont l’atorvastatine et la rosuvastatine qui représentent plus de 55 % des prescriptions. En prévention secondaire, c’est l’atorvastatine qui est la première molécule prescrite. D’après la HAS, les AMM et les avis de la commission de la transparence ne sont pas suivis dans la pratique médicale courante.

5. Méta-analyses des statines en termes de mortalité toutes causes

Dans le cadre de ce rapport de la HAS, c’est probablement la réalisation d’une méta-analyse originale qui constitue la partie la plus importante de ce rapport. Bien qu’une analyse similaire ait été publiée dans le même temps dans le BMJ par Brugts, les spécialistes de la HAS ont réalisé une méta-analyse originale à partir de l’ensemble des études publiées. Les résultats font état d’un risque relatif à 0,90 pour la mortalité totale lorsque l’on prescrit des statines. Le test d’hétérogénéité qui a été réalisé ne permet pas de différencier les statines selon leur efficacité sur la mortalité totale. Dans le même temps, les statines occasionnent une baisse de 15 % de la mortalité cardiovasculaire, de 23 % des événements cardiovasculaires et de 19 % des accidents vasculaires cérébraux. Toutes ces baisses sont significatives. Dans l’interprétation de ce travail, la HAS admet qu’il existe un effet classe sur le critère de mortalité toutes causes et qu’il n’est pas possible de distinguer les différentes statines sur ce critère. Cette méta-analyse est donc un élément très fort du travail qui a été réalisé puisque au moins sur ce point, les experts sont d’accord pour affirmer un effet classe des différentes statines utilisées en pratique quotidienne.

6. Analyse médico-économique du rapport de la HAS

Un travail important a été réalisé pour apprécier les ratios coût/ efficacité des différentes statines. Le coût a été mis en regard de la réduction du LDL-cholestérol selon les statines. De la moins efficace à la plus efficace, on passe de la pravastatine 10 mg génériquée jusqu’à l’atorvastatine 80 mg. On retrouve dans l’analyse de la HAS des données classiques montrant une hétérogénéité des statines sur le LDL-cholestérol et une variation de prix liée à cet effet différent. Des conclusions sont tirées par les experts de ce rapport. Jusqu’à une baisse de 30 % du LDL-cholestérol, c’est la prescription de simvastatine génériquée de 10 mg qui est économiquement la plus pertinente puisqu’elle permet d’assurer une baisse de 27 % du LDL-cholestérol pour un coût annuel par point de baisse de LDL-cholestérol de 3,5 €. Entre 31 et 40 % de baisse du LDL-cholestérol, trois molécules sont compétitives ; il s’agit de la simvastatine génériquée à 20 mg, de la simvastatine génériquée à 40 mg et de la rosuvastatine 5 mg. Entre 41 et 50 % de baisse du LDL-cholestérol, c’est la rosuvastatine 10 mg qui offre le rapport coût/efficacité le plus faible pour 8 € par point de baisse du LDL-cholestérol. L’atorvastatine 40 mg et la rosuvastatine 20 mg permettent d’atteindre des objectifs supérieurs (48 à 49 %) pour un coût également supérieur (de l’ordre de 11 € par point de baisse du LDL-cholestérol). Pour une réduction supérieure à 50 %, c’est l’atorvastatine 80 mg qui présente le meilleur rapport coût/efficacité avec un coût de 10 € annuels par point de baisse du LDL-cholestérol.

7. Synthèse du rapport de la HAS

Dans la partie synthèse du rapport de la HAS, on retrouve les éléments qui ont été cités plus haut ainsi que deux phrases qui auront probablement des conséquences non négligeables. La première assertion a trait à l’effet classe dans le cadre des événements cardiovasculaires. Le rapport indique que les données disponibles semblent indiquer l’absence d’un effet classe sur le critère de la réduction de la survenue d’événements cardiovasculaires. Plus loin, on relève que les experts affirment que le critère biologique de la réduction du LDL-cholestérol a été accepté comme permettant d’appréhender l’efficacité des statines en morbidité cardiovasculaire. Dans une deuxième phrase lourde de conséquences, les experts affirment que le maintien de la prescription de la molécule princeps n’est jamais une stratégie rationnelle sur le plan économique quand sa forme générique existe. Cette dernière phrase est isolée dans la synthèse et n’a pas donné lieu à des commentaires supplémentaires.

Discussion

Le rapport de la HAS était très attendu dans la mesure où on retrouve dans ce rapport l’ensemble des données récentes ainsi qu’une vision critique de la prise en charge des malades. Certaines conclusions sont des avancées thérapeutiques certaines alors que d’autres interprétations sont plus difficiles à accepter. Personne ne remettra en cause le fait que l’hypercholestérolémie est un facteur de risque tellement fréquent qu’une certaine régulation de sa prise en charge doit être discutée. Il est probable que les hypercholestérolémies dans le cadre d’un faible risque cardiovasculaire soient à traiter en priorité avec des mesures hygiénodiététiques. Ceci est probablement une posture de santé publique car les analyses de l’étude JUPITER semblent montrer qu’à partir d’un certain âge, le risque cardiovasculaire est suffisamment grand à long terme pour justifier un traitement par statines. La gestion du bas risque cardiovasculaire est probablement plus un débat de société qu’un débat propre à la cardiologie. Le fait que la plupart des patients à haut risque ne soient pas aux objectifs thérapeutiques recommandés est reconnu comme une vérité dans ce rapport. Ceci autorise donc les cardiologues à intensifi er le traitement hypolipidémiant chez leurs patients dès lors que l’absence d’atteinte des objectifs est constatée. Ceci autorise probablement l’augmentation des doses de statines ou la prescription d’associations thérapeutiques hypolipidémiantes. Par ailleurs, le rapport reconnaît que des élévations majeures du LDL-cholestérol autorisent la prescription de médicaments puissants permettant une baisse conséquente du LDL-cholestérol et favorisant probablement ainsi une meilleure observance à long terme. La mortalité totale a été choisie comme critère d’évaluation principal dans ce rapport. Cette approche est hautement critiquable dans la mesure où on se situe dans le domaine de la prévention cardiovasculaire et non pas dans l’insuffisance cardiaque terminale ou l’insuffisance rénale avancée. Néanmoins, ce critère est objectif et il ne dessert pas les statines puisqu’un effet classe est montré pour ces hypolipidémiants dans cette indication. Néanmoins, il serait franchement malhonnête de ne pas reconnaître le fait que cette mortalité totale est favorablement infl uencée parce que les événements et la mortalité cardiovasculaire baissent dans toutes ces études. Le fait de ne pas être allé jusqu’à cette constatation nous paraît un manque de lucidité.

Le dernier problème est représenté par l’obsession maladive vis-à-vis des génériques. La HAS se trouve ainsi dans une situation intenable où la pravastatine a une ASMR de niveau 1 et où le coût n’est pas en rapport avec la baisse du LDL-cholestérol observée. On en vient donc à écarter cette magnifique molécule de la stratégie médico-économique alors que l’on aimerait la voir en première position. Ceci aurait dû faire réfl échir les experts de la HAS sur la pertinence des génériques dans une approche médico-économique de la gestion des malades. Même si la HAS ne veut pas reconnaître un effet classe pour la morbidité et la mortalité cardiovasculaire, les cardiologues ne sont pas dupes et l’ensemble de la bibliographie plaide en faveur d’un tel effet. Nous parions même que les cardiologues seraient prêts à jouer le jeu si on leur disait d’utiliser les statines les moins chères pour une baisse donnée du LDL-cholestérol. Une des simplifications de ce rapport aurait donc été de dire que le prix du princeps doit s’aligner sur le générique et que le cardiologue ne veut pas voir apparaître des génériques éventuellement plus chers que les molécules princeps. Ce débat vis-à-vis du prix nous dépasse et ce sont les patients qui nous rapportent des histoires invraisemblables sur le prix des génériques dans les pharmacies.

En conclusion

Le rapport de la HAS sur les statines est probablement une avancée importante dans le résumé des connaissances actuelles. Les statines sont des médicaments majeurs, essentiels à la pharmacopée du patient cardiovasculaire. Les indications thérapeutiques étant tellement larges, il est licite de se poser la question de la stratégie médico-économique. Quand on se perd dans une forêt, il faut faire simple, c’est-à-dire sortir une boussole et éteindre le GPS. A la lecture de ce rapport très intéressant, on s’aperçoit que faire simple, c’est vraiment trop compliqué ! ■

Pr Jean Ferrières – Service de cardiologie B et INSERM U558, CHU de Toulouse




Développement Professionnel Continu (DPC) : où va-t-on ?

331 – Chaque maître d’ouvrage, HAS pour l’EPP et trois CNFMC pour la FMC étant très soucieux de leurs prérogatives respectives, la synthèse de ce qui naturellement procède de la même intention « la qualité des soins » était quasi irréalisable.

Les méthodologistes et autres pédagocrates de tout poil glosaient à l’infini sur les concepts d’évaluation des connaissances, des performances, des compétences ou des pratiques aussi bien que sur ceux éculés du savoir, savoir faire, savoir être ou faire savoir, apanages des sciences cognitives.

Autant de débats qui passaient largement au dessus de la tête du médecin moyen, du cardiologue et surtout des patients !

|Loi HPST Article 59| |I – Le chapitre III du titre III du livre Ier de la quatrième partie du code de la santé publique est intitulé : « Développement professionnel continu ». _ Il se substitue à tous les articles concernant la FMC, la FPC et l’EPP. _ « Art. L. 4133-1 – Le développement professionnel continu a pour objectifs : – l’évaluation des pratiques professionnelles, – le perfectionnement des connaissances, – l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, – ainsi que la prise en compte des priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. _ Il constitue une obligation pour les médecins. »|

Le législateur et ceux qui le conseillent ont voulu redonner du sens et du pragmatisme à tout cet édifice chancelant qui n’a jamais été réellement opérationnel depuis la fameuse ordonnance Juppé rendant la FMC obligatoire dès… avril 1996. Heureusement pour nos patients, les médecins n’ont pas attendu les textes réglementaires pour se former et s’évaluer ! Voici ce que schématiquement prévoit le nouveau dispositif (et qui avait été préfiguré dans le rapport établi par l’IGAS en novembre 2008) :

1. Tous les concepts FMC, EPP, accréditation sont globalisés dans une volonté de définir des méthodes mixtes ayant vocation à s’inscrire dans l’exercice quotidien : le développement professionnel continu, qui n’est rien d’autre que le Continuing Professional Development anglo-saxon : évaluation => mise en évidence des déficits => formation => mesure d’impacts. Une nouveauté néanmoins et non des moindres : l’implémentation de la notion d’efficience des coûts dans les objectifs.

2. L’architecture du dispositif reposerait sur quatre piliers :Un Conseil national du DPC (CN-DPC) qui édictera les règles générales et conseillera le ministère : tous les acteurs y sont représentés ; ce sera donc une structure pléthorique consultative, non opérationnelle. – Une Commission Scientifique Indépendante (CSI), composée de représentants des conseils nationaux professionnels de spécialités et proposés par la fédération des spécialités médicales (FSM). Notons au passage la clairvoyance de la cardiologie qui a su anticiper en créant dès avril 2009 un conseil du même nom (www.cnpcardio.org). Les missions de cette CSI seront de préciser les méthodes, éligibles au DPC spécialité par spécialité, avec l’appui de la HAS, et d’évaluer les organismes, les programmes et les actions. – Le contrôle du respect de l’obligation, devenue annuelle et non plus quinquennale, sera effectué par les conseils départementaux de l’Ordre, sans doute par sondages. On ne parle plus d’un système d’information national d’un coût démesuré par rapport à l’objectif. – Un Organisme de Gestion (OG-DPC), composé par l’Etat et l’Assurance Maladie (exit les syndicats signataires !) aura pour mission de financer les programmes et actions prioritaires proposée en réponse à des appel d’offre nationaux (voire régionaux) par les organismes « enregistrés », nous reviendrons sur ce terme. Seuls les programmes prioritaires, définis par le ministère après avis du CN-DPC et des conseils nationaux professionnels, auraient vocation à être financés sans doute de manière forfaitaire sur « la capacité des organismes à réaliser ces programmes ». Mais tous les programmes prioritaires ne pourront pas être financés par cet organisme et surtout la masse considérable de programmes non prioritaires ne sera éligible à aucun financement institutionnel.

|Unanimité contre le dispositif de DPC| |En l’état, les projets de décrets sur le développement professionnel continu font l’objet d’un rejet massif des médecins. _ « Les responsables professionnels libéraux, hospitaliers et salariés, des syndicats ou des associations de formation ou d’évaluation qui composent les CNFMC sont unanimes pour dénoncer la vision réductrice des décrets d’application de la loi HPST sur le DPC ». Les versions des projets de décrets sur le DPC se succèdent sans satisfaire les médecins qui continuent d’y voir une étatisation du DPC entièrement géré par un OGDPC dont la profession est exclue. « Tel qu’il est aujourd’hui, l’organisme gestionnaire du DPC a tous les pouvoirs, le conseil national du DPC n’en a aucun, et la commission scientifique indépendante non plus, malgré les apparences », estime _ Bernard Ortolan, président du CNFMC des médecins libéraux. _ Parallèlement, les CNFMC estiment que la suppression de l’agrément des organismes de formation au profit d’un simple enregistrement, en application de la directive européenne 2006/123 sur les services, ouvre la porte à toutes les dérives possibles. « Au nom de cette directive, on ouvre le champ du DPC à tous les opérateurs quels qu’il soient, s’insurge Bernard Ortolan. On aurait donc d’un côté des thèmes, des méthodes et un financement entièrement décidés par l’Etat, et en parallèle, un dispositif financé par de l’argent privé, libre de tous critères et de toutes contraintes de qualité du fait de la suppression de l’agrément. Ce n’est pas admissible. » Les CNFMC réclament donc qu’ « un organisme enregistré ne puisse être reconnu comme opérateur de DPC que si et seulement s’il bénéficie d’une évaluation positive de la CSI ». Par ailleurs, les CNFMC ont décidé de recourir au service d’un avocat au Conseil d’Etat pour analyser la directive Services et voir si une lecture moins rigide de ce texte est possible.|

Discussion

Qui sont les perdants ? En premier lieu, les syndicats horizontaux et surtout les syndicats signataires qui avaient pour mission de gérer les enveloppes de la contribution conventionnelle au sein de l’organisme de gestion conventionnel (OGC) et du Conseil Paritaire National de la formation professionnelle conventionnelle (CPN-FPC) dont votre serviteur est l’actuel président. Les organismes agréés ne font plus partie directement des instances, alors qu’ils occupaient une place stratégique dans les CNFMC actuels. L’Assurance Maladie est mise sous la tutelle de la toute puissante nouvelle DGOS et risque de se voir court-circuiter en région par les ARS.

En position intermédiaire, la HAS perd son rôle de maître d’ouvrage de l’EPP (qu’elle n’avait d’ailleurs aucune capacité financière à mettre en œuvre). En revanche elle conserve la responsabilité de définir, en concertation avec les conseils professionnels, les méthodes et les modes d’exercice qui permettront aux professionnels de s’engager dans le DPC.

Qui sont les gagnants ? L’Etat qui délègue à la DGOS et à la DSS une grande partie du dispositif. La FMC et l’EPP avait-elle un réel besoin de cette nouvelle tutelle ? Même si la légitimité de l’Etat n’est pas à remettre en doute, très sincèrement, on peut en douter quant on voit la faible capacité opérationnelle et la lourdeur technocratique de certains de ses services. L’Ordre des médecins revient dans ce dispositif aux deux extrémités: la présidence du CN-DPC lui serait confiée ainsi que le contrôle individuel de satisfaction des médecins à ces obligations. Les professionnels, via leurs conseils, représentant toutes les composantes de chaque spécialité et la FSM se voient confier un rôle très important scientifique et pédagogique, mais sans capacité financière.

Je voudrais terminer sur trois considérations actuellement sans réponse, mais qui pour autant paraissent fondamentales pour la réussite de ce nouveau dispositif :

I. Qui va arbitrer l’attribution des financements institutionnels ? A ce jour, les arbitrages sont réalisés paritairement entre les représentants des caisses et des syndicats. Bien sûr les arbitrages sont toujours d’autant plus contestés que les sommes à répartir sont de plus en plus réduites par rapport aux demandes. Demain en l’absence de modification des textes, l’arbitrage serait autoritaire et administratif, pour ne pas dire arbitraire ! C’est dire la suspicion qui va s’emparer de tous les exclus. Il serait impératif de réintroduire une parité professionnelle (syndicats) / Etat-AM dans une structure d’arbitrage à définir..

II Directive Européenne sur les services oblige, les organismes seront enregistrés et non plus agréés ! _ Ce qui signifie que les avis de la CSI ne seront pas opposables. Tous les organismes prétendant répondre aux critères généraux du CN-DPC devront être enregistrés par l’OG DPC. Certes le financement ne sera pas pour autant automatique, mais cela nécessitera de la part des usagers du dispositif une information très précise sur la réalité et la qualité des opérateurs. N’en doutons pas, nous allons revoir fleurir des officines de tous poils promptes à vendre des programmes qui n’auront de labellisé que le nom ! Au mieux ce seront des sous-traitants, certes de qualité, des industries de santé. Au pire des structures commerciales sans exigence scientifique ni pédagogique offrant le service minimum pour permettre aux médecins de satisfaire à leurs obligations au moindre effort, sinon au moindre coût.

III. Enfin the last but not the least : qu’elles vont être les réactions des médecins ? Après vingt années de errements, de modifications réglementaires parfois contradictoires et souvent incompréhensibles, auront- ils une fois encore l’appétence de cette nouvelle obligation ? Nous avons vu la majorité d’entre eux, ces dix dernières années, s’engager avec bonne volonté dans toutes ces procédures nouvelles et complexes. Ainsi plus de 30 % des cardiologues libéraux se sont engagés avec l’UFCV, au moins une fois dans un programme d’EPP. La moyenne d’âge s’élevant, la quantité de travail et la pression administrative augmentant, auront-ils encore la volonté de s’impliquer ? Encore faudra-t-il leur démontrer l’existence d’une relation établie entre l’engagement dans ce nouveau DPC et une amélioration de la qualité des soins et de leurs conditions d’exercice ! ■

| Pr Olivier Goeau-Brissonnière ([Président de la FSM (Fédération des spécialités médicales))] : « A nous de nous approprier le DPC »| | Les CNFMC s’alarment de la disparition de l’agrément des organismes de formation au profit d’un simple enregistrement, en application de la directive européenne 2006/123 sur les services. Quel est votre sentiment ?

Olivier Goeau-Brissonnière : Je partage leur inquiétude sur la disparition de l’agrément. J’ai soulevé le problème auprès du ministère, mais sans parvenir à montrer que cette directive européenne n’était pas applicable.

Ils estiment que l’organisme de gestion du DPC, dont est exclue la profession, a tous les pouvoirs. Est-ce votre avis ?

O. G.-B. : Ce sont les syndicats qui sont exclus de l’OGDPC, mais ils sont dans le dispositif d’une autre façon. Ils entrent dans la composition des conseils nationaux professionnels de spécialité. Le SNSMCV sera présent via son conseil national. Que les syndicats n’aient plus le plus grand rôle, c’est une évidence. Les CNFMC en l’état disparaissent, cela ne signifie pas que leurs responsables n’auront pas des rôles prépondérants dans le futur dispositif. Je ne suis pas sûr que l’OGDPC ait tous les pouvoirs.

Pensez-vous, comme eux, que le rôle de la CSI doit être renforcé ?

O. G.-B. : Dans l’état actuel des choses, la CSI est composée de représentants de tous les conseils nationaux professionnels de spécialité sur une liste proposée par la FSM, et élabore son règlement intérieur. Elle doit pouvoir faire une vraie évaluation des organismes de formation, et il importe que l’organisme de gestion du DPC tienne compte de ses avis, ce qui devra être vérifié. La commission de coordination interprofessionnelle est là pour veiller à ce que l’OGDPC paye selon des règles qui ne bafouent pas la CSI. Et j’ose espérer que la commission de coordination puisse jouer pleinement son rôle. C’est à nous, les médecins, de nous approprier le dispositif. |




COG 2010-2013 : l’Etat et l’UNCAM traquent l’efficience

331 – Le conseil de la CNAM a adopté le 11 mars dernier les orientations pour la Convention d’objectifs et de gestion (COG) 2010-2013 qui doit être conclue entre l’Etat et la CNAM, et qui sont la déclinaison, pour le régime général, des orientations adoptées précédemment par l’UNCAM dans son contrat d’objectifs pluriannuels de gestion du risque passé avec l’Etat, conformément à l’article L. 182-2-1-1 du code de la Sécurité Sociale issu de la loi HPST.

Le document adopté par la CNAM s’articule autour de cinq grands axes : « garantir l’accès aux soins et réduire les inégalités de santé », « aider les assurés à être acteurs de leur santé », « améliorer la qualité de la prise en charge », et « rembourser les soins utiles au juste prix ».

Une meilleure offre de soins

Pour garantir l’accès aux soins, il faut en premier lieu « inciter à une meilleure répartition de l’offre de soins sur le territoire », il faut favoriser l’installation dans le zones « sous-denses », par l’information des étudiants en médecine et le développement de mesures incitatives, et « mettre en oeuvre avec les ARS le contrat santé solidarité et le contrat d’engagement de service public ». Une meilleure répartition des équipements lourds et des établissements de soins de suite et de réadaptation est aussi à l’ordre du jour, ainsi que l’expérimentation de la téléconsultation et du téléexamen dans les zones sous-denses. L’accès aux soins dépend aussi de la régulation des tarifs. Le COG 2010-13 prévoit donc la « mise en oeuvre effective » du protocole signé le 15 octobre 2009 sur le secteur optionnel, la mise en oeuvre des outils de contentieux de lutte contre les dépassements abusifs, et l’information, via le site Ameli Direct, des assurés « sur la qualité des soins et le coût de tous les acteurs, y compris établissements publics et privés ».

Pour aider les assurés à être acteurs de leur santé, le COG prévoit notamment l’extension du programme SOPHIA à l’ensemble du territoire et son expérimentation à d’autres pathologies chroniques (cardiovasculaires, respiratoires, etc.).

Pour aider les professionnels à mieux prendre en charge leurs patients chroniques, le CAPI devrait être généralisé et son champ étendu à l’ensemble des généralistes. « Il pourra être enrichi par de nouveaux indicateurs dans les différents champs, prévention, dépistage et suivi des pathologies chroniques ». Mais, « le même type de contrat pourra être proposé aux autres spécialités médicales et aux autres professionnels de santé ». Le COG préconise aussi d’expérimenter la télésurveillance et le télésuivi des patients, en premier lieu pour les insuffisants cardiaques. Le renforcement du « caractère discriminant de la certification des établissements et des professionnels » pourrait passer, si nécessaire, par des « incitations financières à l’engagement des établissements dans le processus ». A cet égard, l’Assurance Maladie encouragera la publicité auprès des assurés des résultats des établissements et des professionnels de santé en matière de certification.

Le bon usage du soin sera intensifié par l’approfondissement des programmes de maîtrise médicalisée et « la création de référentiels sur l’ensemble des soins et/ou parcours de soins » diffusés auprès des professionnels et dont les assurés seront informés. Le développement de la chirurgie ambulatoire pourrait être accéléré par des incitations financières « par rapprochement des tarifs d’hospitalisation complète et de chirurgie ambulatoire », et l’accroissement de la dialyse péritonéale et de la chimiothérapie à domicile est souhaité.

Une rémunération à la performance

Enfin, la création d’une « nouvelle structure de rémunération en lieu et place du paiement à l’acte » est (ré)affirmée : forfaits correspondant à l’engagement des professionnels dans certains domaines (pathologies chroniques, PDS, regroupement…), paiement à l’acte et rémunération à la performance « qui permettrait la généralisation et l’extension du CAPI ». A noter que l’usage des nouvelles technologies de l’information pourrait être intégré dans la rémunération à la performance. Pour la promotion de la pratique collective, le COG prévoit l’évolution du cadre réglementaire et conventionnel « pour permettre de rémunérer non pas des individus mais un groupe de professionnels », et la définition d’un CAPI pour les groupes de généralistes pourrait être une première étape. Un « niveau de rémunération à la performance » est également prévu pour les établissements, ainsi qu’une révision de la tarification actuelle « pour mieux différencier la tarification dépendant de l’activité du financement des contraintes spécifiques de service public ».

Enfin, pour accroître l’efficacité et l’étendu du contrôle, le COG prévoit la création d’un référentiel de risque « assurés » et « professionnels » afin de catégoriser les uns et les autres en fonction de leur comportement en matière d’abus et de fraude. ■




Rocky, marchand de CAPI

331 – CardioNews –  Au bal des hypocrites, Rocky tient évidemment sa place. Mais il convient, en l’espèce, de lui reconnaître que la comparaison avec le système anglais trouve rapidement ses limites dans l’exercice des comparaisons.

1/ Des deux côtés de la Manche, le statut du médicament est très différent. Pendant que notre pays les accepte pratiquement tous sur le marché, doté d’une note de 1 à 5 en fonction de leur « amélioration du service médical rendu » (ASMR) mais elle-même sans rapport avec le prix négocié par l’industriel ; les Britanniques ont sur le sujet une position plus pragmatique : ils adoptent ou rejettent une molécule candidate sur une base purement comptable de coût de l’année de vie gagnée… Partant, les prix des médicaments y sont libres dans le cadre contractuel du PPRS (Pharmaceutical Price Regulation Scheme) qui régule surtout … les profits annuels des laboratoires. Le boycott organisé d’un produit peut, du même fait, rester sans effet sur les profits de l’industriel.

2/ Les médecins, et singulièrement les généralistes, y exercent sous un statut radicalement différent du nôtre. Nul besoin, au Royaume-Uni, d’une convention individuellement signée par des prescripteurs, tous fonctionnaires. Les contrats d’intéressement, assimilable à nos CAPI, sont donc conclus avec des « trusts », regroupements de généralistes et les primes sont fléchées sur le fonctionnement collectif du groupe, sans effet sur les revenus individuels de ses membres déjà confortablement nantis. Ces deux points de contexte étant précisés, reste le problème éthique du CAPI. Celui qui pose, heureusement, débat. Or, contrairement à ce que soutenait Christian Saout à la même tribune selon lequel « 14 000 médecins (signataires du « french CAPI », Ndlr) ne peuvent se tromper en même temps », ceux-là l’ont fait sous la pression « amicale » de DAM venus leur expliquer que c’était là un moyen d’augmenter son revenu sans risque ni grand effort. Et en ce sens, les 14 000 signataires se trompent lourdement – ou, ce qui est plus grave, trompent leurs patients laissés dans l’ignorance de leur propre conflit d’intérêt : « ma prime contre ma liberté individuelle de prescription ». Le problème du CAPI, souligné ici même par le jeune philosophe Paul-Loup Weil-Dubuc, est de ceux qui méritent de mobiliser les avocats sincères de la médecine libérale : le doute ne peut en effet s’insérer dans le colloque singulier. Si le patient est fondé à s’interroger sur la question : « mon médecin me met-il ce médicament pour me soigner moi, ou sa prime de fin d’année »…. alors il y a vraiment quelque chose de pourri au royaume du CAPI.

Le dilemme n’est pas différent de celui qu’ont connu il y a quelques années les pharmaciens, littéralement rétribués pour substituer les princeps par du générique. Du moins les potards avaient-ils l’argument (l’alibi ?) d’y être conviés dans un cadre conventionnel collectif, négocié et signé par leurs syndicats représentatifs, ce qui n’est pas le cas du CAPI. Si, comme il est probable, le CAPI fait son entrée dans la prochaine « boîte à outils » conventionnelle, ce ne pourra donc être qu’à titre collectif. Et sur des objectifs dûment négociés et signés par des syndicats représentatifs. Lesquels étaient (avec l’Ordre) à peu près unanimes à s’opposer au contrat individuel ! Le débat n’est pas clos ; et avec ou sans humour, Rocky aura au moins réussi à l’imposer dans la « feuille de route » et le calendrier des négociateurs. Impensable il y a quelques années encore ! On peut tirer son chapeau à l’artiste !

Jean-Pol Durand




Et si on parlait d’efficience ?

331 – CardioNews – La notion d’« efficience » va-t-elle se substituer à celle de « maîtrise médicalisée » ? C’est ce qu’on peut penser à la lecture de la convention d’objectifs et de gestion du risque 2010-2013 en cours de conclusion entre l’Etat et l’Union des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM). Les Caisses souhaitent, entre autres, développer des outils plus pertinents pour favoriser « le développement de la qualité et de l’efficience », tout un programme. On ne peut qu’être d’accord …sous bénéfice de s’accorder préalablement sur le sens des mots, et notamment celui d’« efficience ». Qu’est-ce donc que l’« efficience » ? Cette notion se définit par le rapport qualité des soins/coût, généralement vu par l’assurance à l’aune de ses seuls remboursements et sur la seule base de leur seuls impact budgétaire global (lire, à ce propos la lettre de l’UFCV-Cidecar de mars 2010). C’est ainsi que l’Assurance Maladie souhaiterait ne plus prendre en charge, dans les prochaines années, que les seuls soins qualifiés par elle d’« efficients », c’est à dire coûtant le moins cher à efficacité présumée semblable (rappelez vous la polémique entre IEC et sartans !).

Mais il y a bien d’autres choses dans le projet de convention d’objectif Etat/UNCAM. Notamment un axe fondateur consistant à (re)mettre les assurés au cœur de leur prise en charge, pour lequel la convention promeut donc quatre leviers d’action à conduire auprès des assurés sociaux : – favoriser leur accès aux soins et réduire les inégalités de santé, – aider les assurés à devenir « acteurs de leur santé », – améliorer la qualité de leur prise en charge – leur rembourser les soins au « juste prix ». Comment être contre ? Comment être contre le fait que l’Assurance Maladie mette le cap sur la qualité et le renforcement de la coordination « des acteurs et des actions », chez un patient doté d’un accompagnement, en utilisant des outils modernes d’échange d’informations et en encourageant enfin la prise en charge « à domicile » ?

La cardiologie libérale serait évidemment hostile si, derrière cette explication technocratique, la même phrase se lisait en filigrane : devenu pivot officiel du processus de soins, le médecin généraliste est préposé du système d’information (DMP) et manageur de l’accompagnement thérapeutique du patient chronique (ETP) et le chef d’orchestre du maintien à domicile.

Mais quelle serait, dans cette hypothèse, la place du spécialiste et singulièrement du cardiologue ? Qui peut lui nier un rôle fondamental dans cette prise en charge multidisciplinaire où son travail mériterait aussi d’être valorisé ?

La dernière version du Livre Blanc de la cardiologie formule en effet des propositions, incitant les cardiologues à se regrouper au sein de « Maisons du cœur et des vaisseaux » pouvant, sur un même site articulé avec d’une part des cabinets de cardiologie de proximité et, d’autre part, avec des médecins généralistes, associer un plateau technique opérationnel et des professionnels paramédicaux spécialement formés.

Ceci suppose qu’un outil informatique devra faire appel à des logiciels communicants dans l’attente du dossier médical personnel universel promis par la puissance publique. Enfin la démarche des cardiologues libéraux postule que les référentiels de bonne pratique devront être portés par le Conseil National Professionnel de Cardiologie, permettant d’intégrer dans la pratique quotidienne des méthodes validant le nouveau Développement Professionnel Continu (DPC).

Les deux démarches – celles de la spécialité et celle des caisses – sont-elles compatibles ?

L’exemple de l’échographie-doppler transthoracique (ETT) est à cet égard intéressant. L’Assurance Maladie veut, sur le sujet, des résultats concrets, rapides, … et évidemment à la baisse. La mise en place de la CCAM technique a en effet permis de souligner la fréquence des actes d’ETT au nombre de 2,6 millions en 2008 et surtout leur augmentation au rythme de 5 % de 2007 à 2008 ; « beaucoup trop » selon l’interprétation coutumière de la CNAM, qui s’affiche illico déterminée à « rationnaliser » l’efficience de cette pratique à travers un AcBUS (Accord de Bon Usage des Soins). Il y manque, à nos yeux l’analyse qualitative régionale des pratiques. C’est le travail que peuvent facilement produire les experts de la représentation professionnelle sur la base du nouveau référentiel de la HAS publié en décembre 2009 avec des indications clarifiées lors du bilan initial et de l’acte de suivi. C’est à cette condition que l’« efficience » de cet acte pourra être garantie dans le cadre d’un AcBUS.

Un autre concept sur lequel les Caisses et la spécialité auront à confronter leur conception de l’efficience est celui des réseaux de santé ville-hôpital, notamment dans la prise en charge des patients insuffisants cardiaques. Structures multidisciplinaires de coordination, facilitant la communication entre les différents acteurs de santé dans l’objectif prioritaire de réduire le nombre et la durée des réhospitalisations, d’améliorer la qualité de vie des patients en privilégiant leur maintien à domicile, ils sont déjà – selon nous – des vecteurs d’efficience. La caisse nous oppose que leur réalité ne couvre pas l’ensemble des patients cardiaques chroniques ; il reste qu’ils pourraient utilement servir de modèle à développer. Ne serait-ce qu’avec la plate-forme téléphonique de suivi éducatif des patients insuffisants cardiaques et coronariens en prévention secondaire que l’UFCV va prochainement mettre en place en Ile de France avant de la décliner en régions.

Il semble donc bien que cette notion d’efficience puisse prétende à devenir le nouveau paradigme de la prise en charge « globale » des patients. Discours légitime en temps de crise mais néanmoins largement insuffisant à nos yeux. D’accord pour en faire un marqueur économique mais pas un indicateur, exclusif et universel, de la qualité du service médical rendu.

Patrick Assyag