Réduire le sinus coronaire pour améliorer la perfusion coronaire

Depuis novembre 2021, une nouveau traitement interventionnel de l’angor réfractaire est autorisé en France (l’avis de la HAS précisant toutefois que c’est à titre transitoire), le réducteur du sinus coronaire. Il est commercialisé par la société Néovasc et disponible dans quelques centres de cardiologie interventionnelle. Son indication est « Angine de poitrine stable réfractaire de classe 3 ou 4 selon la société canadienne de cardiologie (CCS, voir tableau), malgré un traitement pharmacologique bien conduit, chez des patients contre-indiqués ou à haut risque de revascularisation par pontage aortocoronarien ou par intervention coronarienne percutanée ».
RÉDUIRE LE SINUS CORONAIRE
POUR AMÉLIORER LA PERFUSION CORONAIRE
Julien Adjedj. Institut Arnault Tzanck, Saint-Laurent-du-Var
François Diévart. Elsan Clinique Villette, Dunkerque
L’ANGOR RÉFRACTAIRE
Malgré les progrès de la cardiologie interventionnelle en matière de revascularisation coronaire, jusqu’à 10 % des patients ont un angor réfractaire. (1) L’angor réfractaire est associé à une mauvaise qualité de vie, à des hospitalisations fréquentes et à un haut niveau d’utilisation des ressources. (2)
L’angor réfractaire est défini comme des symptômes persistants (3 mois ou plus) dus à une ischémie réversible établie en présence d’une maladie coronarienne obstructive, qui ne peut être contrôlée par un traitement médical croissant ou une revascularisation. (2)
UN NOUVEAU TRAITEMENT
Le réducteur du sinus coronaire (voir figure ci-dessous) est un traitement interventionnel récent et innovant. On pourrait dire qu’il vient compléter les moyens thérapeutiques potentiels de l’angor réfractaire, notamment lorsque ces moyens sont en échec, mais comme l’on parle d’échec, de fait, il constitue un réel nouveau traitement en l’absence d’autres options thérapeutiques.
Le réducteur du sinus coronaire est un dispositif métallique en forme de sablier monté sur un ballon permettant de déployer la prothèse en maintenant cette forme de sablier générant une réduction du sinus. Ce dispositif s’implante de façon percutanée par voie veineuse jugulaire droite (avec un cathéter de 9F) sous anesthésie locale sous scopie.
D’après l’ensemble des études, la procédure est simple, sure et efficace.
Une double anti-agrégation plaquettaire pendant 6 mois est recommandée dans les suites de l’implantation.
La réduction du sinus coronaire génère un gradient de pression en amont qui entraîne la redistribution du flux sanguin de l’épicarde le moins ischémique vers l’endocarde ischémique. (3) L’équipe de l’Institut Arnault Tzanck a montré dans une série de cas que la mise en place de ce réducteur du sinus coronaire entraînait une augmentation du flux coronaire et une diminution des résistances microvasculaires. (4)
Figure. Réducteur du sinus coronaire en haut. Coupe scannographique sagitale en A. Reconstruction 3D en B et C.
BÉNÉFICE CLINIQUE
Il a été démontré que la réduction du sinus coronaire apporte un bénéfice symptomatique comme traitement de l’angor réfractaire : elle permet en moyenne de réduire l’angor réfractaire de 1 à 2 classe CCS dans 80 % des cas. (4)
L’obtention de l’agrément en France du réducteur du sinus coronaire a principalement reposé sur trois études dont l’une est randomisée et les deux autres sont des registres prospectifs (études REDUCE et REDUCER-I). L’étude REDUCE est donc une étude observationnelle, multicentrique, non comparative, avec collecte rétrospective des données, conduite en vie réelle chez 141 patients, avec un suivi médian de 14 mois. L’étude observationnelle REDUCER-I, est encore en cours. Elle est multicentrique, non comparative, avec une collecte prospective et rétrospective des données et elle prévoit un suivi de 5 ans. Son rapport intermédiaire portait sur 260 patients.
Pour l’étude contrôlée dénommée COSIRA, il y a eu une procédure simulée dans le groupe contrôle. Cette étude internationale, randomisée, multicentrique, de phase II, a donc été réalisée en double aveugle et a inclus 104 patients, avec un suivi à 6 mois. Ses résultats sur le critère de jugement principal montrent que la proportion de patients avec une amélioration d’au moins 2 classes d’angor CCS est significativement plus importante dans le groupe ayant eu une réduction du sinus coronaire que dans le groupe contrôle (35 % versus 15 %, p = 0,02), avec un fort effet placebo.
Suite à l’obtention d’une prise en charge en France (voir encadré), notre expérience est suivie par un registre de la Societé française de cardiologie qui est en cours. Nos premières impressions confirment les données de la littérature avec un dispositif simple qui permet de traiter efficacement l’angor réfractaire chez les patients coronariens stables qui avaient une preuve d’ischémie myocardique et étaient non revascularisables.
Tableau. classification de l’angor selon la société canadienne de cardiologie (ccs).
Classe I |
L’activité physique ordinaire (marcher ou monter des escaliers) ne provoque pas d’angor. L’angor apparaît à l’occasion d’un effort important, rapide ou prolongé, au travail ou pendant les loisirs. |
Classe II |
Légère limitation de l’activité ordinaire : marcher ou monter des escaliers rapidement, marcher en côte, marcher ou monter des escaliers après un repas, au froid ou dans le vent, ou pendant un stress émotionnel ou au cours des premières heures suivant le réveil. Marcher plus de 100 à 200 mètres en terrain plat et monter plus d’un étage à un rythme normal et dans des conditions normales. |
Classe III |
Limitation marquée de l’activité physique ordinaire : marcher 100 à 200 mètres en terrain plat et monter un étage dans des conditions normales et à un rythme normal. |
Classe IV |
Impossibilité d’effectuer toute activité physique sans ressentir de gêne. L’angor peut être présent au repos. |
RÉDUCTEUR DU SINUS CORONAIRE ET IRM
La notice indique qu’il ne faut pas effectuer d’examen par IRM chez un patient ayant eu une pose de réducteur du sinus coronaire lors des 8 semaines précédentes.
Au-delà de 8 semaines après l’intervention, « des tests non cliniques ont démontré que le dispositif était compatible IRM sous les conditions suivantes :
- champ magnétique statique de 1,5 Tesla et 3,0 Tesla uniquement ;
- champ magnétique à gradient spatial de 1 000 Gauss/cm (extrapolé) maximum ;
- débit d’absorption spécifique (DAS) moyen maximum pour le corps entier indiqué par le système RM de 2,0 W/kg pendant 15 minutes d’examen (par séquence d’impulsions) lors du fonctionnement normal du système RM.
LA NOTE SYNDICALE
Codification de l’acte telle que rapportée par l’avis de la HAS de novembre 2021 : le champ des options est large
Aucun acte spécifique n’est décrit dans la Classification Commune des Actes Médicaux (CCAM – version 66.10, 02/01/2021). Cet acte associé est spécifique de l’utilisation du SYSTEME NEOVASC REDUCER. L’intitulé de l’acte proposé est le suivant : « Réduction intraluminale du sinus coronaire par pose d’endoprothèse, avec angiographie du sinus coronaire, par voie veineuse transcutanée ».
Il existe trois actes sur la CCAM qui pourraient s’en approcher :
DDAF008. Dilatation intraluminale d’un vaisseau coronaire avec artériographie coronaire, avec pose d’endoprothèse, par voie artérielle transcutanée (NB : 526,49 €) ;
DASF074. Fermeture de l’appendice atrial (auricule) gauche par dispositif par voie veineuse transcutanée et voie transseptale avec guidage échographie-doppler par voie trans-œsophagienne (NB : 1 510,21 €) ;
DASF005. Fermeture d’un foramen ovale perméable, par voie veineuse transcutanée (NB : 819,46 €)
Ces actes diffèrent cependant de l’acte d’implantation du dispositif REDUCER par leur localisation anatomique, leur voie d’abord, leur mode d’action ou leur indication.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
(1) Mannheimer C, Camici P, Chester MR, et al. The problem of chronic refractory angina: Report from the ESC Joint Study Group on the treatment of refractory angina. Eur Heart J. 2002;23:355-70.
(2) Knuuti J, Wijns W, Saraste A, et al. 2019 ESC Guidelines for the diagnosis and management of chronic coronary syndromes. Eur Heart J. 2020;41:407.
(3) Syeda B, Schukro C, Heinze G, et al. The salvage poten- tial of coronary sinus interventions: meta-analysis and pathophysiologic consequences. J Thorac Cardiovasc Surg. 2004;127:1703.
(4) Giannini F, Cuenin L, Adjedj J. Impact of the coronary sinus reducer on the coronary artery circulation cases report. Eur Heart J Case Rep. 2022 Apr 26;6(6):ytac159.
(5) Verheye S, Jolicoeur EM, Behan MW et al. Efficacy of a device to narrow the coronary sinus in refractory angina. N Engl J Med. 2015;372:519527.
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Le Cardiologue n° 449 – novembre-décembre 2022