« Cocorico », la France sur la plus haute marche du podium

Les Américains réfléchissent, ces jours-ci à l’occasion des caucus qui désigneront les deux finalistes de l’élection présidentielle du 4 novembre prochain, au meilleur moyen d’améliorer un système de santé qui laisse effectivement 47 millions d’entre eux sans assurance maladie. Et ils se documentent. Dans le domaine cardiovasculaire, la France sera pour eux une bonne source d’inspiration.
Ils se donneront une idée un peu plus précise des progrès qu’il leur reste à accomplir à observer les niveaux où en sont parvenus des pays plus solidaires et/ou mieux organisés en analysant les résultats d’une enquête passionnante commanditée par l’équivalent de notre HAS. Leur Agence pour la Recherche et la Qualité en Santé (AHRQ) avait en effet mandaté deux chercheurs britanniques, Ellen Nolte et Martin McKee, tous deux de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, pour travailler sur les scores comparés de l’indice de mortalité prématurée évitable.

Ce marqueur, inventé dans les années 70 et soutenu en France par un organisme comme le Haut Comité de Santé Publique, correspond au taux de personnes dont le décès avant 75 ans aurait pu être évité grâce à une prise en charge rapide et/ou des soins adaptés. En matière de cardiopathies ischémiques, les auteurs considèrent que 50 % de la mortalité pourraient être évités.

C’est la performance pure du système de soins qui est ici mesurée à ne pas confondre avec l’efficience qui prend en compte les coûts de production. Mais ce critère est d’autant plus intéressant qu’il représente, pour les États, un bon marqueur du « retour sur investissement » de ses dépenses. Du moins pour ceux qui disposent d’un instrument statistique en état de fournir des données fiables et précises sur les motifs de décès. Les deux chercheurs britanniques ont puisé leurs sources dans les datas de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) et l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économique).

La France championne « toutes catégories »

Deux grandes leçons peuvent être extraites du rapport, d’ailleurs évoquées dans une récente livraison du Quotidien du Médecin(Karine Piganeau, Le Quotidien du Médecin n° 8287 du 11 janvier 2008, p. 4.)], d’après l’article publié dans Health Affairs(Ellen Nolte et C. Martin McKee, Measuring the Health of Nations : Updating en Earlier Analysis, Health Affairs, numéro de janvier/février 2008, p. 58-71.), revue de référence de l’économie de santé internationale.

Cocorico : la France est donc championne du monde de la mortalité prématurée évitée. Devant des candidats huppés comme le Japon, l’Espagne, l’Australie, la Suède… L’Irlande est lanterne rouge, juste précédée par le Royaume-Uni et, quelques encablures devant, par les États-Unis. Mieux, la France était maillot jaune en 1997/1998 qui avait marqué la première vague de mesures. Et elle l’est restée à l’occasion de la seconde mesurée sur la mortalité des années 2002- 2003. Pour étalonner cette performance, il faut savoir que la moyenne de la mortalité évitable masculine (avant 75 ans) était de 23 % dans les 19 pays observés, de 15 % en France, contre 27 % au Royaume-Uni. Chez les femmes, la moyenne internationale est de 32 %, 25 en France, 36 en Grèce ou au Portugal, lanternes rouges.

– Plus intéressant encore pour les cardiologues, l’exercice auquel se sont livrés les deux auteurs, consistant à mesurer les performances respectives de 3 pays – États-Unis, Royaume-Uni et France – dans plusieurs pathologies potentiellement létales lorsque le système de soins est défaillant. Figurent dans ce palmarès les cancers, cardiopathies ischémiques, affections respiratoires…

Deux conclusions s’imposent ici : 1. les trois pays ont chacun réalisé, en cinq ans, des progrès substantiels ;

2. la France détient, sur tous les objets de comparaison, une palme d’or incontestable à la seule exception de la mortalité par cancer où les États-Unis apparaissent plus performants, dans les deux vagues chronologiques, du moins chez les hommes… Tribut à payer, sans doute, à la mortalité féminine par cancer du poumon qui a littéralement explosé chez nous plus tard qu’aux États-Unis.

Concernant plus spécifiquement les cardiopathies ischémiques la supériorité de la France sur l’Angleterre et les USA est avérée dans les deux vagues et dans les deux sexes. Dans un ratio moyen de 1 à 3 par rapport aux États-Unis, supérieur à 4 par rapport à la Grande-Bretagne.

Les modalités de prévention/prise en charge ne sont évidemment pas étrangères à cette performance. C’est ainsi que s’expliquent les différences d’espérance de vie à 60 ans dans les statistiques internationales.

|En France, les maladies cardiovasculaires tuent désormais moins que le cancer… chez les hommes, pas encore chez les femmes| |L’événement est passé relativement inaperçu dans l’actualité de la dernière rentrée politique et pourtant il est d’une portée majeure puisqu’il oblige à réviser ce postulat épidémiologique selon lequel les maladies cardiovasculaires tuaient plus que le cancer. Depuis 2004, c’est l’inverse qu’il convient de professer. Parce que la mortalité par MCV a chuté quand celle des cancers restait pratiquement étale. L’information détaillée figure au BEH (Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire), numéro thématique 35-36 du 18 septembre 2007 (*). _ Depuis le début des années 1980, l’Unité INSERM, qui collige les causes nationales de décès, publie une analyse de ses données dans le BEH. Grande nouveauté de la dernière livraison : sur les 509.408 décès survenus en 2004, le cancer est, pour la première fois depuis 1980, devenu la cause de décès la plus fréquente devant les maladies cardiovasculaires. En tout cas chez les hommes, car chez les femmes l’inversion de tendance n’est pas encore survenue mais la tendance apparaît nette. _ Une seule cause suffit à expliquer ce renversement de tendance : la mortalité cardiovasculaire a régressé trois fois plus (- 15 %) de 2000 à 2004 que la mortalité par tumeur (- 5 %). 2004 a vu une accélération du processus mais les auteurs de l’étude l’imputent à « l’effet canicule » (15.000 décès prématurés) qui avait, en 2003, artificiellement « gonflé » les statistiques de la mortalité cardiovasculaire.|

L’évolution ds taux de décès ci-dessous est téléchargeable sur le site internet de l’INVS (Institut National de Veille Sanitaire ([http://www.invs.sante.fr)

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