Litige : Cotation de la MAPA

325 – Un exemple récent : Il y a peu de temps, une cardiologue a eu la surprise de recevoir la lettre suivante :

« La caisse primaire d’Assurance Maladie de… a diligenté un contrôle sur les actes que vous avez facturés.

Elle a pu relever un certain nombre d’anomalies ayant entraîné le paiement de sommes indues. En conséquence, je vous notifie par la présente les griefs qui sont retenus contre vous : Etablissement de feuilles de soins portant sur des actes non réalisés.

Les faits sont constitutifs d’un comportement abusif et permettent de considérer que la CPAM a subi un préjudice financier important. Elle est par conséquent en droit de s’appuyer sur les dispositions des articles 313-1 du code pénal et L114-13 du code de la Sécurité Sociale pour éventuellement mettre en oeuvre une procédure pénale. Un tableau joint détaille les actes litigieux, à savoir des Cs cotés deux jours de suite chez quarante patients. »

Notre collègue très étonnée répond que les cotations contestées ne correspondent pas à des actes non réalisés, mais à des holters tensionnels, puis, prend l’avis du Syndicat des Cardiologues.

Nous n’avons pas eu d’autre solution que de lui conseiller de rembourser ses cotations erronées et, pour éviter les sanctions dont on la menaçait, de plaider son ignorance, car elle était récemment installée.

La lettre qu’elle avait écrite à la caisse en toute bonne foi ne nous permettait d’ailleurs pas de voir si, dans l’ensemble des Cs contestés, quelques-uns ne remplissaient pas les éléments constitutifs d’une consultation au sens de la nomenclature (interrogatoire, examen clinique, propositions thérapeutiques éventuelles).

L’incompréhension de certains cardiologues

Nous rencontrons encore très régulièrement des cardiologues de toutes régions qui cotent ainsi leur MAPA deux fois Cs, en argumentant que les holters tensionnels sont indispensables et que leurs indications sont parfaitement justifiées.

De ce point de vue, ils ont raison, et les indications de MAPA sont bien codifiées par les différentes recommandations, et notamment celle de la HAS, mais, pour qu’un acte soit remboursé, il faut, d’une part, effectivement, qu’il soit médicalement justifié, mais, d’autre part, qu’il soit admis au remboursement par l’Assurance Maladie. Le plus souvent, heureusement, les actes médicalement justifiés sont remboursables, mais ce n’est pas le cas pour la MAPA (comme par exemple aussi, la surveillance du test au dipyridamole avant une scintigraphie myocardique).

La CCAM

La MAPA bénéficie d’un code CCAM (cf. ci-dessous extrait de la classification), mais il est notifié de façon très claire que l’acte est « non pris en charge ».

Extrait de la CCAM

|EQQP008 |Enregistrement ambulatoire discontinu de la pression intraartérielle par méthode non effractive pendant au moins 24 heures (MAPA) (Holter tensionnel) | 1 | 0 | Non pris en charge | ATM|

Utiliser de façon délibérée une lettre clef inappropriée, en l’occurrence le Cs, pour contourner la réglementation peut être assimilé à un faux en écriture, avec les sanctions qui en résultent.

C’est d’ailleurs ce que fait la caisse dans l’exemple cité ci-dessus.

Les textes dont elle menace l’application sont les suivants :Article 313-1 du code pénal : L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. L’escroquerie est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.

Article L114-13 du code de la Sécurité Sociale : Est passible d’une amende de 5 000 euros quiconque se rend coupable de fraude ou de fausse déclaration pour obtenir, ou faire obtenir ou tenter de faire obtenir des prestations ou des allocations de toute nature, liquidées et versées par les organismes de protection sociale, qui ne sont pas dues, sans préjudice des peines résultant de l’application d’autres lois, le cas échéant. Il faut savoir que des cardiologues ont déjà été condamnés pour ce motif, sans qu’il soit possible de bâtir une défense basée sur les textes réglementaires.

Comment procéder en pratique ?

Le cardiologue établit lui-même le montant de ses honoraires en fonction de ses frais et de la rémunération du temps médical.

Le patient devra être informé, avant la prise de rendez-vous, que l’acte ne sera pas pris en charge par la sécurité sociale. Les honoraires ne devront pas être mentionnés sur une feuille de soins (art. 4.1.1.3 de la convention: « Lorsque le médecin réalise des actes ou prestations non remboursables par l’Assurance Maladie, ce dernier n’établit pas de feuille de soins ni d’autre support en tenant lieu, conformément à l’article L 162-4 du code de la Sécurité Sociale. »)

Il est recommandé de rédiger une note d’honoraires qui pourra être adressée à la mutuelle, en sachant que beaucoup d’organismes complémentaires refusent également de rembourser la MAPA.

Si le holter tensionnel est branché au décours d’une consultation, celle-ci fera l’objet comme d’habitude d’une feuille de soins avec la cotation correspondante (C2+DEQP003, ou CSC, ou Cs suivant les cas), mais la MAPA devra être tarifée à part, là aussi sur une note d’honoraires séparée (art. 4.1.1.3 de la convention: « Dans les situations où le médecin réalise des actes ou prestations remboursables et non remboursables au cours de la même séance, il porte les premiers sur la feuille de soins et les seconds sur un support ad hoc. »)

Dans l’état actuel des intentions des caisses, il est peu probable que cette situation change. La MAPA peut donc être considérée pour le cardiologue comme un petit espace de liberté tarifaire.

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