Domaine Plageoles – Gaillac Prunelart 2017

C’est l’histoire d’une tribu poursuivant la même obsession : faire revivre à Gaillac les crus ancestraux. Tout débute milieu du XIXe siècle, lorsque Jules Plageoles commence à acheter des lopins de terre, pour planter de la vigne. Depuis 1970, Marcel, suivi de Robert, puis de Bernard ont été les pionniers de la défense des cépages oubliés et des techniques de vinification historiques.

La relève est maintenant assurée par les fils de Bernard : Florent et Romain (7e génération) qui défendent corps et âme les douze variétés de leur vignoble, dont le quatuor des Mauzac (vert, roux, rose, noir), l’ondenc, le duras, le délicieux prunelart, le rarissime verdanel. Hors des modes et des sentiers battus, alors que la plupart des viticulteurs privilégiaient les cépages internationaux, le domaine Plageoles continue de produire avec exigence des vins presque exclusivement en monocépages dotés de fortes personnalités dans une gamme de cuvées irréprochables de pureté et de droiture.

Le phylloxéra n’a fait qu’effleurer le vignoble gaillacois protégé par ses profonds sols argilocalcaires : ce qui explique la survie de ces cépages ancestraux.

Une méthode basée sur la nutrition des plantes

Toutes les plantations du domaine de 30 ha sont effectuées après une sélection massale rigoureuse (aucun clone). Les vignes sont travaillées selon les principes respectueux du terroir et selon des techniques de culture naturelles : pas de produits de synthèse, pas d’engrais chimiques, ni de désherbants, pas de levures sèches, ni de chaptalisation. Depuis plus de 20 ans, est appliquée la méthode « Cousinié » basée sur la nutrition des plantes : apports d’oligo-éléments, soit foliaires, soit dans le sol par engrais organiques. 

Toutes les vignes sont conduites en taille Gobelet non palissées, très adaptées aux conditions climatiques actuelles de réchauffement. Elles sont traitées par de faibles doses de soufre et de cuivre limitées grâce à des tisanes de prêle, de reine des prés, de consoude. Le domaine est certifié bio depuis 2010. Soulignons également l’importance du vent d’autan qui balaye et assainit la vigne.

Les vendanges sont manuelles en petites cagettes. La vinification des raisins rouges, notamment du prunelart, totalement égrappés, est précédée d’un pressurage, puis d’une macération précarbonique à froid. La fermentation en cuve béton, grâce à des levures indigènes, est courte de 10 à 15 jours en fonction de la vitesse de fermentation et du millésime avec 1 à 2 pigeages journaliers limitant les extractions. L’élevage en cuve ciment dure un an suivi d’un an encore en bouteille, dont la mise se fait le plus souvent sans filtration avec un sulfitage minimal. Il faut souligner que le prunelart, comme beaucoup de cuvées rouges des Plageoles, ne connaît pas le bois.

Un vieux cépage retrouvé

Le prunelart, très vieux cépage parent du malbec, avait quasi-disparu avant que Robert Plageoles n’en retrouve quelques pieds en 1993 chez un ami vigneron qui allait les arracher. Grâce à ses connaissances ampélographiques et une étude menée avec l’INRA, il a décidé de le replanter, pour le vinifier, choix particulièrement judicieux, puisque ce cépage donne, à son meilleur, des vins intenses en couleur remplis de saveurs bien mûres, « un vin au charme fou » selon les œnologues.

Ce prunelart 2017 du domaine Plageoles, illuminé d’une robe rubis scintillante aux nuances violines, tout en délicatesse et en précision, dévoile au nez des senteurs de fruits rouges (confiture de cerise) et noirs (mûre écrasée), de prune fraîche que viennent compléter des touches de réglisse, de graines de sarrasin, d’épices : poivre blanc. Riche, vive, salivante, la bouche ressent un beau jus frais et suave avec beaucoup de matière, mais des tanins souples plus intenses que denses avec des flaveurs d’eucalyptus et de menthol (parenté avec le malbec ?). La finale minérale et saline exacerbe cette sensation de tension et de pureté.

La richesse gustative de ce prunelart permet de nombreux mariages avec, en premier lieu, les produits carnés, telle une belle viande rouge maturée de bœuf juste saisie ou mijotée en sauce. 

Des accords régionaux privilégiés

Mais très logiquement les accords régionaux seront privilégiés, la cuisine du sud-ouest utilisant le piment d’Espelette appréciera le caractère épicé du vin : la côte de  cochon noir de Bigorre dorée au ras-el-hanout, l’agneau de lait des Pyrénées et pignons de pin, le mignon de porc et sa compotée de fruits d’automne, le pigeon farci aux olives, et à l’évidence les magrets de canard et tous les confits, qu’ils soient d’oie, de canard, de volaille ou de porc. 

Gardons un verre, pour déguster les fromages du sud-ouest qui, étonnamment, ne se déplaisent pas en la compagnie de ce vin rouge voisin : Cabécou, Rocamadour, Ossau-iraty, abbaye de Belloc, tomme des Gavachs ou des monts de Lacaune.

Ami Gaillacois qu’attendez-vous, pour ériger un monument à la gloire de la tribu Plageoles qui a réussi à faire sortir de l’anonymat votre région en marquant de son empreinte l’histoire récente du vin à Gaillac tout en restant particulièrement sage sur leurs prix malgré leur renommée croissante ?!

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Domaine Plageoles
81140 Cahuzac-sur-Vere

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