Exercice libéral : Le programme commun de la CSMF et du SML

336 – Tout commence par une définition de l’exercice libéral « relookée », puisque n’y figurent plus les piliers du temple libéral de la charte de 1927, liberté d’installation, de prescription, etc., mais une référence à des qualifications professionnelles reconnues, la responsabilité personnelle financière et des actes, l’indépendance avec la liberté de s’organiser. L’entreprise médicale de demain doit avoir un statut juridique, déontologique et fiscal permettant un exercice collectif entre médecins et avec les autres professionnels de santé, avec « un nouveau cadre de rémunération pour une prise en charge coordonnée pluridisciplinaire » des patients.

La formation initiale doit comporter des modules d’enseignements spécifiques à l’exercice libéral, avec notamment la possibilité d’un internat en cabinet de ville ou en établissement privé, y compris pour les spécialités médicales et chirurgicales, et favoriser l’exercice mixte hospitalolibéral. Concernant la FMC et l’EPP, la CALM suggère un « séminaire fermé, réunissant le ministère, les Caisses et le syndicat avant la fin de l’année pour décider des mesures », et le financement du DPC par une part conventionnelle garantissant un fonctionnement paritaire. Oui à l’accréditation

périodique par la profession, « à condition de valoriser la démarche qualité et de créer de nouvelles passerelles permettant des évolutions de carrière ».

Un exercice collectif favorisé

Face à la judiciarisation croissante de la médecine, le DMP s’impose, ainsi qu’une messagerie professionnelle sécurisée, mais aussi le relèvement du plafond de garantie (3 à 10 millions d’euros) et l’extension de la couverture « assurancielle » des médecins au-delà des dix ans d’arrêt d’activité et l’interdiction de l’action récursive de l’ONIAM contre le praticien ou ses ayants droit au-delà de ce délai ou des garanties allouées. La Loi Kouchner doit être actualisée par la création d’un système « assurantiel » collectif mutualisé, et une procédure amiable préalable à tout contentieux doit être rendue obligatoire. Les référentiels doivent être professionnalisés avec une forte présence libérale au sein de l’HAS.

L’exercice collectif sera favorisé par un dossier médical interfaçable avec les logiciels métiers, le regroupement virtuel des pôles de santé libéraux, le développement des coopérations interprofessionnelles rémunérées et incitatives (rémunérations de la coordination, forfait structure…). Les projets de maisons médicales pluridisciplinaires doivent émaner des professionnels eux-mêmes, et se faire autour d’un projet de santé territorial « pour un aménagement du territoire concerté », et avant tout dans des zones à démographie médicale déficitaire.

Une rémunération adaptée

La rémunération doit être adaptée. Le paiement à l’acte reste « prépondérant » et doit être fortement réévalué, mais des compléments de rémunération s’imposent pour certaines missions : prévention, éducation thérapeutique, astreintes PDS pour tous, tâches administratives, missions de service public… La CALM réclame une CCAM qui prenne en compte la durée et la complexité de l’acte, l’atteinte de la valeur cible des actes gagnants en CCAM technique, avec une remise à niveau du point de travail, ainsi que le secteur optionnel pour tous. Le paiement à la performance, la CSMF et le SML n’y sont pas opposés, mais à condition que cela s’inscrive dans « un cadre conventionnel ». La réorganisation de l’offre de soins doit se faire selon trois niveaux de recours : un premier recours englobant toutes les spécialités de proximité, dont la médecine générale et les MEP, le deuxième recours étant celui de l’expertise clinique et médicotechnique, et le troisième, celui de l’hyperspécialisation.

Au chapitre de la démographie médicale, les deux syndicats demandent « sa prise en main par la profession », réclament la suppression du contrat Santé Solidarité, et optent pour un contrat volontaire pour s’installer dans les zones sous-dotées à titre transitoire, sous forme de cabinet secondaire financé par les communautés de communes. Ils se prononcent pour un numerus clausus régional par spécialité, un retour à l’internat régional et une limitation dans le temps de la durée d’exercice des primoremplacements exclusifs.

Concernant la couverture sociale du médecin, la CALM propose une couverture prévoyance obligatoire et aidée par l’État. Elle préconise aussi une hausse de la cotisation retraite complémentaire de 9,2 % à 11 % sur une période de cinq ans, et une cotisation transitoire d’ajustement de l’ordre de 2 % du revenu financé aux deux tiers par les Caisses et un tiers par les médecins pour apurer le passif de l’ASV. Et elle réclame pour les femmes médecins des prestations maternité identiques à celle du régime général.

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Sortira, sortira pas ?

| |Annoncé pour la fin septembre, puis remis à la mi-octobre pour ne pas troubler les élections aux URPS, le rapport d’Elisabeth Hubert tarde à paraître. Selon la rumeur, dans l’optique d’une succession pressentie à Roselyne Bachelot, la publication de son rapport sur l’avenir de la médecine de proximité pourrait n’intervenir qu’après sa nomination. Elle arriverait ainsi forte d’une popularité que n’aurait pas risqué d’ébranler la révélation de propositions qu’on imagine mal en totale opposition avec la politique menée jusqu’à présent par le Gouvernement en matière de santé… Autre hypothèse bien moins vraisemblable : les propositions seraient tellement « décoiffantes », qu’elles feraient l’objet d’un veto de Matignon !|

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Entretien avec Michel Chassang (CSMF) et Christian Jeambrun (SML) : « Une base de travail et de discussion »

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| On remarque que la définition de l’exercice libéral ne fait plus référence aux sacro-saints trois piliers de la médecine libérale, quel signe faut-il y voir ? _ Michel Chassang : Il faut y voir une adaptation à notre temps. Ces 100 propositions ne sont pas la Bible de l’exercice libéral, mais des mesures concrètes pour l’améliorer, des propositions de bon sens, très pratique. Elles s’adressent au Gouvernement et aux parlementaires, parce qu’il y a nécessité de changer la loi HPST. Elles s’adressent également à nos partenaires conventionnels. Et nous avons, bien évidemment, adressé ces 100 propositions ainsi que les 55 mesures du CNPS à Elisabeth Hubert.

Quels échos suscitent-elles ? Quelle suite en attendez-vous de la part de ces destinataires ? _ M. C. : Alors que plus de 60 % des médecins viennent de signifier clairement leur rejet de la loi HPST en votant pour la CSMF et le SML, et que le président de la République fait de la médecine libérale une priorité, je ne vois pas comment le Gouvernement pourrait prendre des mesures qui iraient à l’encontre de nos propositions. _ Christian Jeambrun : Ce travail en commun avec la CSMF s’est fait en réaction à la mission Legmann – et à sa composition – qui a été un coup d’épée dans l’eau, la messe étant dite à l’avance, ainsi qu’aux EGOS. Nous avons balayé tout le champ de la médecine libérale. Maintenant, nous avons gagné les élections, et le front du refus à la loi Bachelot est très largement majoritaire. Nous demandons une pause dans l’application de la loi HPST, et que nos propositions soient envisagées. C’est une base de travail. Nous avons travaillé pour produire ces propositions qui sont une plate-forme pour le réaménagement la loi HPST et les futures négociations conventionnelles. Nous sommes prêts à discuter sur cette base. ■|(gallery)

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