Francis Dujarric : « La CSI n’est pas une simple chambre d’enregistrement »

367 – Le président de la section des représentants de CNP de spécialité proposés par la FSM, l’une des deux composantes de la CSI des médecins, fait le bilan de la première année de fonctionnement de cette commission.

Quel bilan dressez-vous de la première année de fonctionnement de la Commission Scientifique Indépendante des médecins?

Francis Dujarric : La CSI a été installée officiellement à la fin de 2012 et a commencé à se réunir en janvier 2013. Très vite, des différends se sont fait jour avec les médecins généralistes qui souhaitaient voir modifiés les critères ministériels pour la validation des organismes de DPC, en particulier ceux concernant l’indépendance financière de ces organismes. A cet égard, les deux critères d’évaluation fixés par arrêté ministériel stipulent qu’en cas de financement, même partiel, ou de prestations indirectes issus de l’industrie, le CSI devait analyser les procédures et les moyens mis en œuvre par l’organisme pour préserver l’indépendance du contenu des programmes. Ces critères sont conformes à une directive européenne sur les services.
Une grande majorité de la CSI était d’accord avec cette exigence de transparence et non d’exclusive, comme le souhaitaient la plupart des généralistes, qui refusaient, en outre, le recours éventuel à un organisme sous-traitant pour assurer une partie d’un programme de DPC, arguant du fait que le sous-traitant n’était pas obligé de se déclarer auprès de l’OGDPC et pourrait donc de pas être validé par la CSI.
En septembre, au moment de commencer l’examen des dossiers déposés par les organismes de DPC, les généralistes, dans une grande majorité, ont décidé de suspendre leur participation aux travaux de la CSI. Nous avons cependant eu le quorum suffisant pour démarrer l’examen des dossiers. A ce jour, nous avons évalué 52 dossiers. Bien évidemment, travaillant quasiment « sur une jambe », nous ne pouvons examiner autant de dossiers qu’il serait souhaitable.
Nous n’avons examiné que des dossiers concernant des spécialistes et certains qui concernaient à la fois des spécialistes et des généralistes. Nous n’avons pas été provocateurs et nous nous sommes abstenus d’analyser des dossiers strictement généralistes.

Comment se fait cette analyse ?

F. D. : Des binômes sont constitués pour examiner les dossiers en amont des séances collectives. Nous faisons en sorte d’éviter tout conflit d’intérêt dans la constitution de ces binômes. Non, qu’un cardiologue, par exemple, ne puisse examiner un dossier concernant un programme de DPC de sa spécialité, mais il ne le pourra pas s’il est partie prenante d’une façon ou d’une autre dans l’organisme concerné.

Quelles remarques vous inspirent ces premières évaluations ?

F. D. : Sur les 52 dossiers que nous avons examinés, nous avons été amenés à refuser la validation à 17 d’entre eux, soit un tiers, ce qui n’est pas rien et démontre que la CSI n’est pas, comme l’insinuaient certains généralistes, une simple chambre d’enregistrement ! Les dossiers refusés l’ont été principalement en raison d’un manque de la partie analyse des pratiques professionnelles que doit comporter un programme de DPC.
Beaucoup d’organismes de FMC traditionnelle n’ont pas encore pris le tournant du DPC et n’ont donc pas modifié leur démarche. Certains organismes ont été recalés parce qu’il ne comportaient qu’une personne, il s’agissait de quasi « autoentrepreneurs » de DPC. Enfin, nous avons rejeté un organisme dont la part de financement par l’industrie était supérieure à 30 %.

Selon vous, des améliorations sont-elles souhaitables dans la validation des ODPC ?

F. D. : Il faudra effectuer des contrôles a posteriori pour éviter que certains organismes ayant obtenu la validation sur un seul programme-témoin, en quelque sorte, ne s’autorise après coup à prendre des libertés avec le cahier des charges. Je crois que, comme la crainte des radars sur la route, la menace du contrôle a posteriori est important.

Que souhaitez-vous pour l’année 2014 ?

F. D. : Je souhaite évidemment que nos amis généralistes reprennent leur participation aux travaux de la CSI. Nous attendons les conclusions du rapport demandé cet été par Marisol Touraine à l’IGAS sur les conditions de déploiement du DPC et les décisions que prendra la ministre : une totale remise en cause – ce qui serait dramatique – des ajustements à la marge ou des modifications plus profondes.
L’accord intervenu récemment entre les syndicats de salariés et le patronat et qui semble régler le problème du financement des syndicats via la formation professionnelle a été salué comme une avancée décisive. Une déclinaison de cet accord pour les professionnels de santé serait la bienvenue ! Mon vœux pour 2014 ? Que le DPC réussisse avec une offre de programmes plus importante, plus variée, des méthodes plurielles, le développement du e-learning.

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