Gare au dépeçage de la formation !

328 – Dans leur rédaction actuelle, les quatre projets de décrets relatifs au Développement Professionnel Continu (DPC) font l’unanimité… contre eux ! En résumé, les médecins y voient la mainmise de l’Etat sur leur formation qui se retrouve ficelée dans un modèle unique de mise en oeuvre, sans que la profession ait son mot à dire. Président de l’Union Nationale de Formation et d’évaluation en médecine CardioVasculaire (UFCV), Christian Ziccarelli y voit « l’étatisation complète du système, avec un organisme de gestion dirigé par l’Etat et l’UNCAM, en l’absence de tout professionnel de santé. » La version actuelle des projets de décrets signe un véritable holdup de l’argent conventionnel par l’organisme de gestion, sans qu’aucun professionnel de santé n’intervienne dans la redistribution de cet argent. Par ailleurs, cet organisme de gestion pourrait enregistrer des organismes de DPC sans l’avis du Conseil scientifique indépendant (CSI) ! Et le Conseil national de DPC, constitué de 27 membres, à quoi servira-t-il, à part se réunir deux fois par an et évaluer le dispositif ?

La profession réagit également à une double filière, nationale et régionale. « Les ARS pourront faire des appels d’offres, en toute indépendance, et sans obligation pour elles de prendre l’avis du CSI, s’insurge Christian Ziccarelli. Comment jugeront-elles de la qualité scientifique des projets qui leur seront soumis ? » Quant à l’obligation pour les praticiens, pour valider leur DPC, de constituer des groupes dans un même territoire d’organisation des soins, outre qu’elle réduit la formation à une modalité « taille unique », elle ne paraît pas très réaliste : « Des groupes de territoire peuvent sans doute se concevoir assez facilement pour les médecins généralistes, commente Christian Ziccarelli. Mais pour les spécialistes, moins nombreux et plus disséminés, la constitution de tels groupes est irréaliste. La ministre de la Santé avait annoncé une réorganisation de la FMC/EPP pour plus de simplicité : mais où est la simplicité dans le dispositif qui nous est proposé ? » Un seul point semble positif à Christian Ziccarelli dans le futur dispositif : « Les appels d’offre seront examinés par le CSI composé d’une majorité de médecins qui pourront sans doute mieux apprécier la qualité scientifique des actions que ne le fait l’actuel organisme scientifique de l’OGC, qui a parfois des difficultés à juger de cette qualité quand il s’agit d’actions portant sur des sujets très pointus de spécialité. »

Enfin, un dernier point inquiète le président de l’UFCV : « Que va devenir l’accréditation des équipes à risque qui se fait aujourd’hui sous l’égide de la haute autorité de santé (HAS) ? Actuellement, elle vaut EPP ; demain, elle vaudra DPC. La HAS dans le nouveau dispositif n’ayant plus qu’un avis méthodologique, quelle part prendra-t-elle dans tout cela, et va-t-on vers une nouvelle mouture complète du dispositif d’accréditation ? »

Alors que l’UFCV affiche un bilan qui témoigne de la richesse de son activité de formation et d’une participation importante des praticiens, son président s’interroge amèrement : « Cette dynamique va-t-elle être balayée par le futur dispositif du DPC ? »

|La messe n’est pas dite !| |Et c’est Bernard Ortolan, président du Conseil national de FMC des médecins libéraux qui le dit : « Il semblerait que le cabinet de Roselyne Bachelot soit disposé à apporter des amendements substantiels à ces projets de décrets. » _ Pour lui, comme pour ses homologues des deux autres CNFMC, celui des médecins salariés et celui des hospitaliers, trop de pouvoir est laissé à l’organisme de gestion du dispositif. Les CNFMC demandent donc qu’il travaille en interface avec le CSI. _ « D’autre part, l’existence d’une filière régionale complètement autonome du niveau national n’est pas admissible, et il faut réintroduire la voix de la profession dans les arbitrages », souligne Bernard Ortolan qui indique qu’une nouvelle version des projets de décret devrait voir le jour courant janvier pour un passage en Conseil d’Etat en février.|