Innovations organisationnelles : les projets abondent

Un rapport du Conseil stratégique de l’innovation en santé au Parlement livre un premier état de l’engagement des différents acteurs dans le dispositif d’expérimentations organisationnelles permises par l’article 51 de la LFSS 2018 pour une durée maximale de cinq ans. 

Ce rapport souligne « l’importante mobilisation des pouvoirs publics et des acteurs de santé » et indique que « moins d’un an après l’ouverture de ce droit à l’expérimentation », près de 450 porteurs de projets potentiels se sont déjà engagés. Ce qui représente 270 lettres d’intention sur des projets déposés « à l’initiative des acteurs de santé », dont 250 auprès de ARS et une vingtaine auprès de la rapporteure générale du Conseil stratégique de l’innovation en santé, Natacha Lemaire. Les ARS ont transmis à cette dernière sept cahiers des charges correspondant à des projets finalisés. Selon le rapport, « les thèmes les plus fréquemment proposés par les porteurs de projets portent sur la prise en charge de l’obésité, la prise en charge du cancer et la santé mentale ». A ces 270 lettres d’intention s’ajoutent 170 porteurs de projets potentiels qui ont répondu aux trois Appels à Manifestation d’Intérêt (AMI) lancés par les pouvoirs publics pour le financement de l’Episode De Soins en chirurgie (EDS), pour l’Incitation financière à la Prise En charge Partagée (IPEP) et pour le Paiement en Equipe de Professionnels de Santé en ville (PEPS).

Après l’ouverture, en juillet dernier, d’une plateforme pour le dépôt des projets, une plateforme informationnelle est en cours de développement par l’Assurance-maladie pour le versement des rémunérations des professionnels de santé et organisations de soins. Elle concerne les fonctionnalités de base, mais chaque expérimentation portant son propre modèle économique et ses règles de facturation, nécessitera un développement spécifique sur la base du cahier des charges précis de l’expérimentation. 

Concernant le financement, les projets d’expérimentations et leur évaluation seront financés par le Fonds d’Innovation du Système de Santé (FISS), qui a été doté de 20 millions d’euros pour cette année. Et quant aux projets régionaux, ils pourront être financés par le Fonds d’Intervention Régional (FIR), géré par les ARS, qui a reçu une première dotation de 5 millions d’euros en avril dernier.

Une trentaine d’expérimentations lancées début 2019
Le rapport du Conseil stratégique de l’innovation en santé précise l’objectif des projets. Pour ce qui est des 270 lettres d’intention, les projets portent sur la prévention, l’accès aux soins, la coordination des acteurs et des secteurs, l’appui au numérique, l’intégration du patient acteur de santé et des modalités de financement diversifiées. 

Les sept cahiers des charges transmis par deux ARS concernent l’obésité, la prise en charge de proximité des addictions, les parcours des personnes en situation de handicap, la prévention des plaies chroniques, la prise en charge des lymphoedèmes et la prévention des récidives et de complications des maladies cardio-neuro-vasculaires. Le projet de cahier des charges le plus avancé dans son instruction a trait à la prise en charge des patients ayant subi un AVC ou un infarctus du myocarde, et vise à mettre en place un suivi intensif par des professionnels ville-hôpital afin de prévenir et dépister les complications et récidives grâce à des infirmières cliniciennes, l’implication des pharmaciens au plus tôt dans le parcours post-épisode aigu et l’organisation de relais entre professionnels hospitaliers et professionnels de ville (infirmiers et pharmaciens).

Dans son rapport, Natacha Lemaire estime que « les expérimentations vont pouvoir rapidement être mises en œuvre » dans des conditions « garantissant leur pertinence, leur maturité, leur rigueur et leur transférabilité » et conciliant « la créativité des acteurs sur le terrain et les enjeux stratégiques nationaux ». Elle indique que l’ambition pour 2019 est de mettre en œuvre « dès le début de l’année, une trentaine d’expérimentations relatives aux trois modes de financement dérogatoires, objets des Appels à Manifestation d’Intérêt » et de démarrer « rapidement des expérimentations proposées par les acteurs de terrain qui couvrent tous les secteurs d’activité, toutes les régions, toutes les priorités de santé publique et un large éventail de nouvelles modalités de financement et d’organisation de prise en charge ». 

Un objectif ambitieux mais qui nécessite un certain nombre de conditions. Ainsi, il faudra adapter l’accompagnement des promoteurs dans la rédaction de leur cahier des charges et l’instruction des dossiers. Il faudra aussi construire des modèles médico-économiques permettant la généralisation des expérimentations dans un cadre financier maîtrisé, de disposer d’une offre d’évaluation capable de suivre un grand nombre de projets et de transformer effectivement les pratiques, les organisations et les cultures. A cet égard, il est prévu de co-construire le cahier des charges des trois nouveaux modes de financement (EDS, IPEP et PEPS).4

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