Intelligence artificielle – La santé au cœur du futur

L’intelligence artificielle (IA) permet à des machines d’apprendre par l’expérience, l’adaptation des données et la réalisation de tâches humaines. Elle fait intervenir des systèmes d’auto-apprentissage (machine et deep learning) utilisant l’exploration des données (data science), la reconnaissance de schémas et le traitement du langage naturel, afin de reproduire une forme d’intelligence réelle. Au cœur de la médecine du futur avec les opérations assistées, le suivi des patients à distance, les prothèses intelligentes, les traitements personnalisés,… l’IA est regroupée dans des catégories bien distinctes, de l’hôpital à la médecine de ville.

Pascal Wolff – Le Cardiologue n° 438 – Janvier-février 2021

L’aide au diagnostic

L’intelligence artificielle a fait des progrès considérables dans l’interprétation du diagnostic médical. Elle peut aujourd’hui, et dans certains domaines, être plus précise qu’un être humain sans toutefois occulter l’expertise métier des médecins spécialistes de la maladie étudiée et des spécialistes de la donnée. 

En pratique, l’IA aidera le spécialiste, un radiologue par exemple, à faire le tri entre des milliers d’images et lui permettra ainsi de gagner du temps en pointant les anomalies sur lesquelles il doit davantage se pencher.

Le système établira ainsi des scores qui seront beaucoup plus efficaces et plus intelligents.

Cette interprétation grandissante du diagnostic de l’IA est due à ses technologies (voir encadré)  de machine-learning et de son sous-domaine le deep-learning qui dépendent elles-mêmes de la data-science.

La précision diagnostique

La valeur prédictive dépend de la sensibilité et de la spécificité des tests. La sensibilité est la capacité à détecter un maximum de malades (avoir le moins de faux négatifs) et la spécificité à ne détecter que les malades (avoir le moins de faux positifs). L’hypothèse diagnostique repose tout de même avec plus ou moins de certitude car tout dépend des niveaux de référence dûment introduits dans la machine qui, n’en doutons pas, organisera dans le futur ses propres conclusions grâce au machine-learning.

En 2018, IDx-DR, un logiciel lié à l’Intelligence artificielle, a été capable de détecter une rétinopathie diabétique et d’établir un diagnostic grâce à son analyse sur des clichés de la rétine du patient.

Ce dispositif, premier approuvé par la FDA (Food and Drug Administration), (1) s’était basé sur une étude clinique portant sur les images rétiniennes de 900 patients diabétiques. Dans près de 90 % des cas, le IDx-DR a réalisé le bon diagnostic, que le patient soit ou non atteint d’une rétinopathie diabétique.

Dans le domaine de la cardiologie, une IA totalement autonome serait capable de détecter de potentielles maladies cardiovasculaires en analysant la pression sanguine.

C’est dans cette optique que des chercheurs ont eu l’idée d’utiliser l’angiographie rétinienne afin de déceler la présence d’une hypertension au niveau des vaisseaux sanguins. Ils ont entraîné une intelligence artificielle à l’aide de 70 000 images provenant de personnes d’origines diverses pour qu’elle puisse faire sa propre comparaison, comprendre d’elle-même les risques de maladie cardiovasculaire. Ces images se concentraient notamment sur les marqueurs communs à identifier dans le système vasculaire rétinien.

La chirurgie robotique

La chirurgie robotique existe depuis plus de trente ans. Il s’est passé en fait peu de temps entre l’utilisation d’une simple adaptation d’un robot industriel à un robot spécialisé en chirurgie. Juste avant l’an 2000, le robot chirurgical Da Vinci (de l’entreprise américaine Intuitive Surgical) a exécuté le premier pontage coronarien, et la société en a depuis vendu plus de 3 000 dans le monde. L’AP-HP a récemment équipé ses hôpitaux de robots Da Vinci de dernière génération. L’hôpital Henri-Mondor, de son côté, opère environ 350 patients par an de cette manière. L’avantage premier est celui du patient (moins de morbidité avec des complications réduites) et le désavantage sont les investissement et surcoût d’une opération robotisée, ainsi que la position dominante de l’entreprise américaine. Il existe bien des starts-up, notamment françaises, qui développent des dispositifs robotisés (Robocath ou Axilum Robotics), sans toutefois être en concurrence directe avec Intuitive Surgical.

Le futur de la robotique passe par une miniaturisation des machines (nanos robots) et la reproduction des gestes chirurgicaux, « basiques » ou complexes. La pratique médicale, qui va être profondément modifier dans le futur, n’est pas à l’heure actuelle organisée, tant dans le soin lui-même que dans la formation et la prise en charge financière.

Les réalités virtuelle (RV) et augmentée (RA)

La réalité virtuelle et la réalité augmentée font partie du même concept, l’une (augmentée) consistant à ajouter un contenu numérique dans un environnement réel, l’autre (virtuelle), consistant à ajouter un contenu physique dans un environnement virtuel. Dans ce contexte, la réalité augmentée en chirurgie permet de reconstruire en 3D ce que l’on appelle « le clone digital » du malade. Cette copie virtuelle du patient aura l’immense davantage d’obtenir des facilités de compréhension et d’identification des solutions thérapeutiques ainsi qu’une sécurisation et une réduction du temps de l’acte.

On se souvient de la première intervention très suivie d’une implantation de prothèse de l’épaule assistée par un casque de réalité augmentée qui avait eu lieu à l’hôpital Avicenne (Bobigny) en décembre 2017. Cette opération de « routine » a montré en quoi l’utilisation d’un casque 3D est une révolution. Le chirurgien, Thomas Grégory, projette à travers son casque des modélisations. Il a ainsi pu visualiser l’image du squelette de l’épaule pour accéder, selon ses termes, à « la partie immergée de l’iceberg ». Cette opération a été diffusée en direct via Skype avec trois chirurgiens situés aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Corée du Sud, qui ont ainsi pu visualiser les actions du chirurgien et lui donner des conseils en temps réel.

Egalement, et en dehors de l’expertise chirurgicale, la RV et la RA sont utilisées dans le traitement des phobies, de stress post-traumatiques ou encore dans le soulagement des douleurs fantômes. 

(1) fda.gov (lien sur notre site, en anglais).

L’IA et ses technologies

L’Intelligence Artificielle, « qui n’a pas de définition possible » selon Cédric Vallini, (*) repose sur une suite d’instructions permettant d’aboutir à un résultat à partir de données fournies en entrée. Ce sont les fonctions d’apprentissage et la data-science qui se chargent de la faire évoluer. 

LE MACHINE LEARNING (apprentissage automatique) est un sous-domaine de l’IA. Le principe est un système capable d’apprendre, à partir d’exemples, à résoudre un problème (contrairement à la programmation qui ne fait qu’exécuter). En d’autres termes, il est auto-apprenant en créant des algorithmes à partir de ses données et porter ainsi des jugements et prendre ses propres décisions. C’est grâce à cette technologie que l’IA étend ses capacités et accroit ses performances.

LE DEEP LEARNING (apprentissage en profondeur) est un sous-domaine du machine learning. Il s’appuie sur un réseau de dizaines voire de centaines de « couches » de neurones artificiels s’inspirant du cerveau humain.

Chaque couche reçoit et interprète les informations de la couche précédente. Plus on augmente le nombre de couches, plus les réseaux de neurones apprennent des choses compliquées, abstraites. Mais à l’heure actuelle, la mise au point de ces mécanismes d’apprentissage pour être efficace pour chacune des couches intermédiaires est extrêmement complexe. Selon certains  scientifiques, le deep learning va se généraliser dans la prochaine décennie dans toute l’électronique de décision, comme les voitures (autonomes) ou les avions.

LA DATA SCIENCE (science des données) est une méthode de tri et d’analyse de données de masse et de sources plus ou moins complexes ou disjointes de données, afin d’en extraire des informations utiles ou potentiellement utiles.

(*) mathématicien et député (LREM) chargé par le gouvernement d’une mission sur le sujet.

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