La Dame d’Auxerre

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Statuette féminine dite «Dame d’Auxerre ». © Musée du Louvre

367 – La Dame d’Auxerre est un des chefs d’œuvre de l’art grec archaïque conservé au Musée du Louvre. Une sculpture de petite dimension (75 cm) remontant entre 640 et 620 avant notre ère, donc à l’époque dite archaïque.

Une découverte rocambolesque

Cette statue était utilisée comme décor d’opérette, le concierge du théâtre d’Auxerre l’ayant acquise en 1895. Disposée dans les réserves du musée local, elle est finalement repérée par Maxime Collignon, archéologue, un grand spécialiste l’art grec. En 1897, elle intègre le musée du Louvre en échange d’un tableau d’Henri Harpignies (1819-1916), peintre de l’Ecole de Barbizon. Par contre, nous n’avons aucun document sur son origine et sa présence à Auxerre.

Le contexte historique

Il est de nouveau favorable à l’apparition d’une sculpture monumentale. Les cités états (la ville et son territoire adjacent) sont une réalité, le pouvoir politique est aux mains de l’aristocratie. Athènes, Sparte, Corinthe sont de grandes métropoles. L’iliade et l’Odyssé sont les livres « de chevet » de l’élite. Apprise par cœur, l’œuvre d’Homère était la base de l’éducation des Grecs. La Théogonie d’Hésiode, poète de Béotie vers le VIIe siècle avant notre ère, raconte dans un long poème, les origines du monde et des dieux. La religion, la mythologie impactent chaque acte de la vie quotidienne de la cité et des individus.

Une stricte frontalité, une représentation hiératique

La Dame d’Auxerre, œuvre majeure de l’art dédalique archaïque, est une des rares sculptures de cette époque reculée où la Grèce venait d’émerger d’une période qualifiée par les historiens de « Dark Age ». C’est une sculpture en calcaire gris jaunâtre, de petite taille, en parfait état, seuls manquent le nez et le côté gauche du visage.
Debout sur un socle quadrangulaire, le bras gauche tombe verticalement le long du corps, le bras droit est replié sur la poitrine. Couverte par une sorte de pèlerine retombant sur les épaules, elle est vêtue d’une longue robe étroite, une ceinture à large boucle enserrant la taille. Le haut de la poitrine laisse apparaître son anatomie. Les pieds nus et joints, dépassent du bas de la robe. Le dos de la statue a fait l’objet d’une grande attention de la part de l’artiste, une ronde-bosse pouvant être vue de tout côté.
Caractéristique de l’art dédalique, le visage en U est souligné par un léger sourire, le nez est épais, la bouche charnue, au-dessus d’un menton saillant. La chevelure parfaitement symétrique tombe de chaque côté du visage sur les épaules, en boucles striées horizontalement, évocatrice des perruques de l’Egypte. Le front est bas, les deux paupières ourlées contiennent un globe oculaire assez aplati. Les mains, avec de longs doigts, sont disproportionnées, sans doute de façon conventionnelle.
La robe est incisée par une large bande médiane avec des carrés inscrits. Des traces de couleur rouge sur le buste sont le témoin qu’elle était peinte de couleurs vives. 

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Statue en marbre avec dédidace de Nicandre de Naxos 640 av J.-C. © Musée Archéologique national d’Athènes

« C’est probablement en Grèce que le style dédalique naît et connaît un développement rapide avant de se répandre dans le Péloponnèse, où Corinthe, Argos et Sparte constituent les principaux centres de production jusqu’à la fin du VIIe siècle ». Une origine qui a la faveur actuelle des historiens d’art, du fait de la matière (calcaire crétois) et des œuvres très proches artistiquement retrouvées à Dedros, à Gortyne, Printas en Crète. Une ressemblance encore plus frappante avec la statue en marbre dédiée à Artémis par Nicandré retrouvée à Naxos et aujourd’hui au musée archéologique d’Athènes.
Quant à l’image représentée, elle reste hypothétique. Le geste rituel du bras droit replié sur le sein droit, évoque le geste d’adoration des déesses de la fécondité en particulier de l’Astarté syrienne. Ce serait un ex-voto offert à cette déesse.

Bibliographie

[1] L’art grec, Roland Martin. Encyclopédies d’aujourd’hui, La Photothèque. 1994
Histoire de l’art antique : l’art grec, Be [2] rnard Holtzmann, Alain Pasquier. Petits manuels de l’école du Louvre. 2011. Réimpression de l’édition de 1998.
[3] Mer Egée Grèce des Iles. Catalogue exposition 1979. Editions de la Réunion des Musées Nationaux. 
[4] Naissance de l’Art Grec, Pierre Demargne. L’univers des Formes. 1985.
 

L’art dédalique du nom de Dédale, artiste mythique, marque le passage de la petite statuaire géométrique aux premières manifestations de la grande sculpture. Diodore de Sicile nous apprend que cet artiste de grande renommée vivait à Athènes. « Il excellait dans la fabrication de statue, un inventeur de bien des techniques qui firent progresser son art ; la légende rapporte que toutes les statues faites de sa main étaient tout à fait semblables à des êtres vivants ; elles conservaient si bien toutes les dispositions du corps naturel que l’image faite par lui pouvait recevoir un souffle de vie ». Selon André Chastel « belle définition des progrès réalisés dans la période suivante, qui a crée la grande statuaire avec les types célèbres du couros et de la coré ». En fait une notion, inventée au début du XXe siècle pour qualifier les créations plastiques du VIIe siècle av. J.-C.

 

 

Chronologie

– Age du bronze (ca 3250-1100) Disparition du système palatial mycénien (1200). Abandon de l’usage de l’écriture. Très peu de nécropoles.

– Age du fer : Proto-géométrique : 1050-900, Géométrique : 900-720/700.
Période sans documentation « The Dark Ages ».

– Époque archaïque :

700/720 – 490 (fin de la 1ère guerre médique), 480 (fin de la seconde guerre médique – ou 479 – l’année véritable de la fin des guerres médiques)
720-600 : période orientalisante.
Réorganisation de la Grèce avec l’apparition des cités qui marque l’éclosion de la période archaïque. Renouveau artistique.

– Époque classique (479-338 ou 323) : âge d’or de l’art grec.
Apogée de la cité d’Athènes autour du stratège Périclès. La période classique s’achève à la mort d’Alexandre, en 323.

– Époque hellénistique (323-146 ou 31).

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