10 février 2025
Plusieurs propositions ont été récemment faites en vue de faire évoluer la formation initiale et continue des médecins. Comment est-elle organisée aujourd’hui et quelles sont les pistes d’évolution ?

Autrice : Nathalie Zenou

Vous pouvez nous contacter au SNC – Tél : +33 1 45 43 70 76 ou par mail

La formation initiale des médecins en France est aujourd’hui structurée en plusieurs étapes qui se déroulent principalement au sein des universités et des établissements de santé.

 

L’accès aux études de médecine (1)

 

37 universités proposent un cursus de médecine.

Pour les lycéens, l’accès aux études se fait via deux parcours proposés par les universités : le PASS (parcours d’accès spécifique santé) ou une L.AS (licence avec option accès santé). L’admission s’effectue à partir des résultats obtenus lors de ces parcours et éventuellement d’épreuves complémentaires, selon les places proposées en 2e année.

 

Le 1er cycle : les bases du médical

Pour les étudiants admis en médecine, le 1er cycle (2e et 3e années) vise à apporter les connaissances scientifiques nécessaires à l’exercice d’une profession médicale et à étudier l’homme sain et l’homme malade.

Le programme porte notamment sur la sémiologie (étude des signes cliniques et des symptômes des maladies), la physiologie, l’anatomie et l’étude des agents infectieux (bactéries, virus, etc.). Les premières notions de pathologie et de pharmacologie apparaissent. S’y ajoutent de l’anglais médical et des enseignements comme l’histoire de la médecine.

La pratique commence avec un stage infirmier de 4 semaines à temps plein. Puis, au minimum 12 semaines de stage à l’hôpital sont prévues sur les deux ans. Tous les étudiants en médecine doivent réaliser un service sanitaire au cours de ce 1er cycle.
En fin de 3e année, les étudiants obtiennent le DFGSM (diplôme de formation générale en sciences médicales), reconnu au niveau licence.

 

Le 2e cycle : approfondissement et pratique clinique

Le 2e cycle ou externat (4, 5 et 6e années) de médecine permet d’acquérir une formation médicale complète, axée sur les pathologies, leur thérapeutique et leur prévention. Au programme : gériatrie, appareil locomoteur, neurologie, cancérologie, pédiatrie, etc. Les étudiants acquièrent les bases de chaque spécialité médicale.
Les externes sont à mi-temps en cours et à mi-temps à l’hôpital. Ils ont le statut d’étudiant hospitalier et touchent une rémunération variable selon l’avancée du cursus.

Certains stages sont obligatoires (par exemple médecine d’urgence, chirurgie à l’hôpital, etc.), d’autres libres. Par ailleurs, au minimum 25 gardes (la nuit, le dimanche ou les jours fériés) sont à effectuer sur les trois ans, principalement aux urgences.

L’admission en 3e cycle repose sur un concours national. Celui-ci comprend : une évaluation des connaissances sous forme d’épreuves écrites ; une évaluation des compétences via les examens cliniques objectifs structurés (ECOS) ; la prise en compte du parcours de l’étudiant et de ses projets personnels. Les étudiants choisissent ensuite une spécialité et un lieu d’exercice selon leur classement.

À la fin de la 6e année, les étudiants obtiennent le DFASM (diplôme de formation approfondie en sciences médicales), reconnu au niveau master.

 

Le 3e cycle : vers une spécialité de médecine

Il existe 44 spécialités de médecine : 13 spécialités chirurgicales (chirurgie vasculaire, gynécologie-obstétrique, etc.) ; 30 spécialités médicales (psychiatrie, pneumologie, radiologie et imagerie médicale, etc.) ; la biologie médicale. Selon les spécialités, le nombre de places ouvertes chaque année varie fortement : par exemple, en 2024-2025, il y avait 28 places en neurochirurgie, 509 places en anesthésie-réanimation, 3 645 places en médecine générale, etc.

Le 3e cycle ou internat de médecine dure 4 à 6 ans. Il est organisé en trois phases :
➊ la phase socle (1 ou 2 ans) au cours de laquelle l’interne acquiert les compétences de base propres à l’exercice de sa spécialité ;
➋ la phase d’approfondissement (2 ou 3 ans) où l’interne poursuit sa formation et commence à préparer sa thèse ;
➌ la phase de consolidation (1 ou 2 ans), où l’interne acquiert le statut de docteur junior, qui le place en autonomie supervisée par un senior.

Les internes effectuent des stages semestriels à temps plein à l’hôpital dans des services en lien avec leur spécialité, tout en conservant quelques enseignements théoriques. Membres de l’équipe médicale, ils acquièrent une autonomie qui augmente avec l’expérience, mais ils restent toujours sous la responsabilité des praticiens qui les forment. Par ailleurs, ils préparent une thèse d’exercice.

Après avoir validé stages, enseignements et thèse, les internes obtiennent le DE (diplôme d’État) de docteur en médecine, assorti du DES (diplôme d’études spécialisées) de la discipline suivie.

 

(1) Source : onisep.fr

L’internat de cardiologie

Après le DFASM, les étudiants en médecine choisissent leur future spécialité pour réaliser leur internat. Celui de cardiologie dure généralement de 4 à 5 ans et permet aux internes d’acquérir des compétences spécifiques grâce à :

• Des stages pratiques dans des services de cardiologie, où ils apprennent à diagnostiquer et traiter les maladies cardiaques.

• Des enseignements théoriques sur des sujets relatifs à la cardiologie, la physiologie cardiaque, les techniques d’imagerie, etc.

• Une formation en cardiologie interventionnelle (si applicable), qui peut nécessiter des stages supplémentaires.

 

Diplôme d’études spécialisées (DES)

À la fin de leur internat, les internes doivent obtenir un Diplôme d’études spécialisées (DES) en cardiologie, qui valide leurs compétences dans le domaine.
Celui-ci comprend des options tardives et facultatives : cardiologie interventionnelle de l’adulte, rythmologie interventionnelle et stimulation cardiaque, et imagerie cardiovasculaire d’expertise. 
Maquette du DES de médecine cardiovasculaire

 

Spécialisation et diplômes supplémentaires

Les médecins peuvent également choisir de suivre des formations complémentaires pour se spécialiser dans des domaines particuliers (diplômes interuniversitaires, formations spécifiques).

Depuis le 1er janvier 2013, le développement professionnel continu (DPC) constitue une obligation légale pour les professionnels de santé. Il réunit l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), la Formation professionnelle continue (FMC), et la gestion des risques (GDR) – cette dernière concernant essentiellement la cardiologie en établissements de santé – et vise à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. Il intègre également la prise en compte des priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

 

Les objectifs du DPC

l’évaluation et l’amélioration des pratiques professionnelles et de gestion des risques ;

le maintien et l’actualisation des connaissances et des compétences ;
la prise en compte des priorités de santé publique.

 

Les obligations des professionnels de santé

L’obligation de DPC concerne tous les professionnels de santé de France, tous modes d’exercice confondus (plus de 2 millions de professionnels de santé).

Chaque professionnel de santé doit suivre un parcours de DPC sur 3 ans.

Ce parcours comprend a minima la réalisation de deux des trois types d’actions de DPC (formation continue, analyse des pratiques professionnelles et gestion des risques), dont l’une doit répondre au moins à une des orientations prioritaires nationales fixées par arrêté ministériel.

Des « parcours de DPC » peuvent être définis par les Conseils Nationaux Professionnels (CNP) de chaque profession ou autres instances compétentes.

 

Quel est l’organisme en charge du DPC ?

L’Agence Nationale du DPC (ANDPC) assure le pilotage du DPC en collaboration avec ses instances décisionnaires et scientifiques.

Elle a pour principales missions :

– l’évaluation des organismes et structures ;

– la garantie de la qualité scientifique et pédagogique des actions et programmes de DPC proposés ;

– la mesure de l’impact du DPC sur l’amélioration et l’efficience du dispositif ;

– la promotion du dispositif de DPC (informer les professionnels de santé, les organismes et les employeurs) ;

– la participation au financement des actions de DPC pour les professionnels de santé pouvant être pris en charge par l’Agence.

 

Que recouvre le Développement professionnel continu ?

Via les organismes de développement professionnel continu (ODPC) tels que FormatCœur / UFCV, l’ANDPC met à disposition des professionnels de santé une offre de DPC composée d’actions et de programmes de DPC relatifs à trois thématiques :

– l’approfondissement des connaissances (actions cognitives) ;

– l’analyse des pratiques professionnelles, permettant de réfléchir à la démarche et aux caractéristiques de la pratique professionnelle effective du professionnel ;

– la gestion des risques, pour identifier, évaluer et prioriser les risques relatifs aux activités d’un métier ou d’une organisation.

A noter que certains ODPC proposent des programmes intégrés, c’est-à-dire des formations combinant deux actions DPC, par exemple une analyse de pratiques en plus de la formation continue. Cette formule permet d’optimiser le temps consacré au DPC.

 

Où se former ?

Vous pouvez suivre une formation organisée par un organisme de DPC (ODPC) habilité à dispenser des actions de DPC par l’ANDPC.

Les actions proposées par les ODPC sont déposées pour validation et évaluation auprès de l’ANDPC.

 

FormatCoeur/UFCV, dédié à la cardiologie

FormatCoeur/UFCV (Union nationale de Formation Continue et d’évaluation en Médecine Cardiovasculaire) est une association indépendante créée sous l’égide du SNC en 1990. Elle a pour mission de renforcer et d’améliorer la formation médicale continue des cardiologues libéraux en France.

Principal organisme national de formation cardiovasculaire en France, FormatCœur/UFCV propose plus d’une centaine de formations dans toute la France et forme plus de 1 000 cardiologues chaque année. De nombreuses associations régionales de cardiologues adhèrent à FormatCœur/UFCV en tant que membres associés ; toutes les régions sont représentées.

Les actions nationales ou interrégionales se déroulent en collaboration avec les associations locales de cardiologues.

L’UFCV a créé le site FormatCoeur.fr sur lequel vous trouverez toutes les formations proposées.

L’inscription via le site FormatCœur.fr vous permet de bénéficier de l’intégralité des propositions de l’UFCV :

– inscriptions aux formations ;

– validation et gestion annuelle de votre DPC ;

– accès à tous les dossiers de l’Echothèque.

Cette inscription permet également à FormatCœur/UFCV de vous adresser vos documents par e-mail : attestations de formation, documents administratifs, questionnaires de satisfaction, etc.

A noter : certaines actions de formation auront lieu pendant les JESFC 2025 : l’occasion de faire d’une pierre deux coups !

L’évaluation des pratiques professionnelles est l’une des composantes du DPC. Elle permet au cardiologue d’évaluer ses pratiques et de les confronter à celles d’autres cardiologues ainsi qu’aux données les plus récentes de la littérature médicale. C’est un élément incontournable pour faire le point sur sa pratique et l’améliorer, le cas échéant.

 

Pour aller plus avant dans l’évaluation de vos pratiques, FormatCœur vous propose 2 modalités qui vous permettront en outre de valider votre DPC dans le cadre de l’Evaluation des Pratiques Professionnelles (EPP) : les staffs thématiques et les groupes d’analyse de pratique (GAP).

 

Les staffs thématiques

– Chaque staff réunit un petit groupe de cardiologues autour d’un thème (en 2021 l’insuffisance cardiaque, et d’autres thèmes en 2022).
– Les sessions se déroulent en visioconférence sur la plateforme ROFIM retenue pour sa qualité technique (visualisation de documents, de vidéos…), son haut niveau de sécurité et de confidentialité ainsi que pour sa simplicité d’utilisation.
– Les staffs sont calibrés pour permettre au cardiologue de valider son DPC : le cycle annuel (1er janvier – 31 décembre) comprend 4 séances de 2 heures en visioconférence en soirée. Les séances sont réparties tout au long de l’année.
– De plus, en suivant ces réunions avec assiduité, le cardiologue valide son DPC et bénéficie d’une indemnité forfaitaire de 540 euros pour l’ensemble du cycle.
– En 2022, FormatCœur/UFCV proposera un choix parmi deux thèmes pour ces staffs : insuffisance cardiaque et cardiologie du sport.

 

Les Groupes d’Analyse des Pratiques (GAP)

– Les GAP réunissent les cardiologues d’un même territoire au sein de petits groupes (entre 6 et 12 participants par groupe) qui se réunissent 4 fois par an.
– En amont de chaque réunion, le groupe choisit un thème.
– Lors de la réunion et à partir de ses propres dossiers, chacun présente ses modalités de prise en charge, énonce les points de difficulté et tente de les lever avec le groupe en s’appuyant sur la littérature médicale.
– Chaque participant d’un GAP valide son DPC et est indemnisé 540 €/an dès lors qu’il participe au cycle complet de 4 réunions en présentiel (ou à distance selon la situation sanitaire locale).

L’évaluation des pratiques professionnelles est l’une des composantes du DPC. Elle permet au cardiologue d’évaluer ses pratiques et de les confronter à celles d’autres cardiologues ainsi qu’aux données les plus récentes de la littérature médicale. C’est un élément incontournable pour faire le point sur sa pratique et l’améliorer, le cas échéant.

 

La certification périodique constitue un dispositif applicable depuis le 1er janvier 2023 pour 7 professions de santé à ordre. Il vise à garantir 

– le maintien des compétences de professions ciblées ;

– la qualité des pratiques professionnelles et pluriprofessionnelles ;

– l’actualisation et le niveau des connaissances.

 

Les professionnels de santé visés doivent pour répondre à cette obligation, suivre et réaliser des actions de certification dans un cadre de référence préétabli portant sur les quatre axes : 

– actualiser les connaissances et les compétences ;

– renforcer la qualité des pratiques professionnelles ;

– améliorer les relations avec leurs patients ;

– mieux prendre en compte sa santé personnelle.

L’agence du numérique en santé, en lien avec la DGOS, accompagne les professionnels de santé dans leur parcours de certification avec le téléservice de gestion des comptes individuels apportant toujours plus d’efficience et de simplicité d’utilisation et favorisant ainsi la bonne appropriation de ce nouveau dispositif.

 

A qui s’adresse cette certification ?

Ce dispositif s’adresse à tous les professionnels de santé dotés d’un ordre, en exercice : chirurgien-dentiste, infirmier, masseur-kinésithérapeute, médecin, pharmacien, pédicure-podologue, sage-femme.

Il permet à ces sept professions de santé à ordre professionnel de bénéficier ainsi d’un référentiel de certification en fonction de leur pratique professionnelle. Libre choix au professionnel des actions à suivre parmi ce référentiel pour mener son parcours de certification.


A noter que ce nouveau dispositif prend notamment en compte les actions réalisées au titre du DPC, de la formation continue et de l’accréditation des spécialités médicales à risque.

 

Chaque professionnel de santé doit justifier de ces obligations de certification périodique : 

– tous les 9 ans pour les professionnels déjà actifs puis tous les 6 ans ;

– tous les 6 ans pour ceux qui commenceront à exercer après le 1er janvier 2023.

Les Ordres professionnels contrôlent le respect de l’obligation de certification périodique pour chaque professionnel de santé via leur compte individuel retraçant les actions de certifications qu’il a menées. 
Source : CNPCV

 

Réformer la formation initiale des médecins


Le député Guillaume Garot a annoncé le prochain dépôt d’une proposition de loi pour lutter contre les inégalités dans l’accès aux soins.

Celle-ci comprend plusieurs mesures concernant la formation initiale des médecins, notamment la déconcentration des lieux de formation sur le territoire en permettant une première année de médecine dans chaque département, avec des cours en distanciel. Le groupe de travail ayant rédigé la PPL préconise également la création d’un CHU en Corse afin d’en avoir au moins un dans chaque région (à l’heure actuelle, les jeunes Corses doivent se rendre sur le continent pour poursuivre leurs études en santé). Enfin, les 237 signataires de la PPL veulent démocratiser davantage l’accès aux études de médecine, développer les stages dans les déserts médicaux et expérimenter des prépas passerelles vers la première année d’études en santé. 


Parallèlement à cette PPL des députés, la Commission aménagement du territoire et développement durable du Sénat propose (1) de mener un choc de massification et de territorialisation des études de santé à travers treize mesures :


Proposition n° 26 : Renforcer l’attractivité des carrières hospitalo-universitaires et d’enseignement et favoriser l’exercice mixte.

Proposition n° 27 : Charger la Drees d’une étude sur les besoins futurs de chaque profession de santé.

Proposition n° 28 : Lutter contre le manque d’attractivité récent de certaines filières de santé, notamment en envisageant l’ouverture d’une voie directe post-baccalauréat pour les études de pharmacie.

Proposition n° 29 : Assouplir la validation des enseignements de la mineure « hors santé » pour les étudiants qui ont validé leur majeure « santé » à l’issue de leur année de Pass.

Proposition n° 30 : Prendre en compte, parmi les critères de sélection, le lieu de résidence des étudiants qui habitent dans les zones médicales sous-denses lors de leur entrée en première année de Pass ou de LAS.

Proposition n° 31 : Expérimenter l’ouverture de classes préparatoires « talents médicaux » (sur le modèle des classes préparatoires talents du service public) afin d’accompagner des étudiants répondant à des critères cumulatifs de faible ressource économique et de provenance d’une zone sous-dense.

Proposition n° 32 : Envisager la possibilité que le cursus de masso-kinésithérapie soit universitaire pour lever les contraintes financières pesant sur le choix de cette spécialité.

Proposition n° 33 : Lancer un plan d’ouverture d’urgence de facultés et d’antennes de facultés de médecine dans des villes de taille moyenne à proximité des zones médicales sous-denses.

Proposition n° 34 : Adapter les modalités de stage des étudiants en santé pour qu’ils soient effectués fréquemment et sur toute la durée des études en médecine de ville, de façon privilégiée dans les zones sous-dotées.

Proposition n° 35 : Définir un cadre spécifique permettant aux maisons de santé pluriprofessionnelles d’être reconnues comme lieu de stage pour les étudiants.

Proposition n° 36 : Revaloriser les indemnités de déplacement et de logement des étudiants en santé en stage dans les zones sous-denses éloignées de leur lieu de formation.

Proposition n° 37 : Étendre les missions des guichets uniques départementaux d’accompagnement à l’installation des professionnels de santé à l’accompagnement des stagiaires en études de santé dans les zones sous-denses en coopération avec les collectivités territoriales.

Proposition n° 38 : Appliquer la loi en ce qui concerne les stages des internes en 4e année de médecine générale en lançant un plan d’urgence pour qu’ils aient lieu prioritairement en médecine de ville dans les zones sous-denses.

 

Réformer la formation continue

Saisie par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, la Cour des comptes a rendu récemment un rapport (2) dans lequel elle évalue la pertinence et l’efficience de l’organisation de la formation continue des médecins et sa capacité à garantir la qualité des soins.

 

Deux dispositifs se cumulent
La formation continue des médecins juxtapose deux dispositifs obligatoires : le développement professionnel continu (DPC), qui concerne la quasi-totalité des professions de santé, et la certification périodique, qui se limite à celles disposant d’un ordre professionnel. DPC et certification s’imposent aux 234 000 médecins aujourd’hui actifs exerçant en libéral ou au sein d’établissements privés ou publics (101 000 médecins généralistes et 133 000 médecins d’autres spécialités).

 

Le DPC : une obligation méconnue

Le DPC impose aux médecins de suivre des actions de formation prédéfinies dans un référentiel établi pour chaque spécialité, et à les mentionner dans un document de traçabilité hébergé dans un compte individuel.

Lors du cycle triennal 2020-2022, seul un médecin sur sept a satisfait à cette obligation.

 

L’attente des décrets d’application de la certification : une opportunité

Les décrets d’application nécessaires à la mise en œuvre de la certification périodique ne sont toujours pas pris. La Cour des comptes propose de profiter de ce retard pour réfléchir à l’ensemble du dispositif, arguant que DPC et certification périodique ont les mêmes objectifs et mobilisent les mêmes moyens.

Unifier pour simplifier, renforcer et homogénéiser

La Cour des comptes estime que le maintien des deux offres aboutirait à une complexification des décisions contradictoires. Elle préconise donc d’unifier les deux dispositifs en supprimant l’obligation de DPC au profit de la certification périodique.

Le rapport propose d’autres pistes d’amélioration, par exemple l’harmonisation des 48 référentiels de certification pour chaque spécialité médicale et l’amélioration du contrôle de la certification périodique par une définition plus étroites des responsabilités des acteurs de la formation continue.

Les formations doivent être totalement indépendantes de l’industrie de la santé.

Enfin, la Cour insiste sur la nécessité de redéfinir des modalités de financement de la FMC pour en maitriser les coûts et améliorer l’efficience.

 

(1) Rapport d’information n° 137 (2024-2025), déposé le 13 novembre 2024 – Inégalités territoriales d’accès aux soins : aux grands maux, les grands remèdes

(2) ccomptes.fr/sites/default/files/2024-09/20240925-Formation-continue-medecins.pdf

Que peut-on dire aujourd’hui de la formation des étudiants en médecine en France ?

 

Yannick Roder (1) : Elle est aujourd’hui inadaptée et injuste ou… inadaptée parce qu’injuste. Nous formons autant de médecins qu’en 1970 avec 15 millions de compatriotes supplémentaires, un boom des maladies chroniques et du vieillissement de la population. Nous ne comblons toujours pas les départs en retraites de médecins ! Nous ne pouvons même pas nous reposer sur une politique ambitieuse de prévention qui permette de réduire les facteurs de risques cardiovasculaires (on rappelle que deux tiers des dépenses de l’Assurance-maladie sont liées à des maladies chroniques surreprésentées par des maladies neurocardiovasculaires) !
Pour aller plus loin et rénover en profondeur le numerus apertus, j’ai notamment fait adopter il y a presque un an, à travers ma proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par la territorialisation et la formation, le principe d’une priorisation des besoins en santé de nos territoires. Si nos universités fixent des objectifs pluriannuels d’admission en 2e année du premier cycle des études de santé, ce système plein de bonnes intentions est biaisé et dépend toujours des objectifs de l’État. Les récentes réformes (R2C et PASS LAS) ont montré leur inefficacité face aux défis sanitaires qui se dressent devant nous notamment en poussant les étudiants désireux de suivre leur vocation hors de nos frontières (Roumanie, Belgique et Portugal). Dans le même temps nous facilitons l’exercice des Padhue ! Cherchez l’erreur…

 

Des évolutions sont-elles attendues dans les années à venir ? Si oui, lesquelles ?


Yannick Roder : Si nous en restons là, il faudra se contenter d’augmentations du numerus au compte-gouttes proposées par succession de ministres de tutelle (huit ministres de la santé depuis l’arrivée d’E. Macron à l’Elysée).
Si nous décidons de prendre cet enjeu à bras le corps, il faut définitivement en finir avec toute forme de numerus, rapatrier nos étudiants refoulés par ce système inique et prendre en compte les besoins en généralistes et spécialistes par bassin territorial pour former.
Il faut aussi mettre en musique ville et hôpital, faire confiance aux deux jambes du système pour travailler ensemble et enfin poser les jalons du virage domiciliaires. Le « aller vers » ne se décrète pas, il a besoin de femmes et d’hommes qui se retroussent les manches, de moyens et surtout de décisions politiques courageuses !

 

Comment la cardiologie se situe-t-elle par rapport aux autres spécialités en termes d’attractivité ?


Yannick Roder : Aux côtés de l’ophtalmologie, la dermatologie et d’autres, la cardiologie reste parmi les spécialités les plus prisées ces dernières années. Cependant, selon une étude de la Société française de cardiologie, le nombre de cardiologues actifs est passé de 6 438 en 2010 à 7 460 en 2022, soit une augmentation annuelle moyenne de 1,3 %. Cette croissance est insuffisante pour répondre à l’augmentation de la demande (+2,5 % par an entre 2016 et 2020 en raison des maladies cardiovasculaires).
On observe également un phénomène propre à toutes les spécialités avec une projection de l’exercice vers une cardiologie de plus en plus salariée à l’avenir selon une étude de la SFC.   La problématique de l’attractivité affecte toutefois toutes les spécialités médicales et plus largement l’ensemble des professionnels de santé : manque d’incitation à l’installation des libéraux, contraintes toujours plus pesantes en matière de normes et de procédures, formation verrouillée et décourageante sans compter toutes les problématiques liées à la sécurité des soignants.
Un travail de fond doit être mené pour restaurer l’attractivité des professions médicales. Selon la même étude de la SFC, 54 % des cardiologues font état de symptômes d’épuisement professionnel, en raison de la charge de travail et des contraintes liées à la pénurie de personnel. L’épuisement est plus prononcé chez les praticiens en établissement public.
La profession fait face à un vieillissement avec une augmentation des départs en retraite prévue, ce qui accentue le besoin de nouveaux cardiologues pour répondre à la demande croissante due au vieillissement de la population et à la prévalence accrue des maladies cardiovasculaires. Nous avons donc un défi majeur de restauration de l’attractivité à l’avenir, car les mesures actuelles ne permettent pas de répondre aux besoins des Français, ni à court-terme, ni à moyen / long-terme.

 

Comment la France se situe-t-elle par rapport à ses voisins européens sur le plan de l’attractivité de la profession ?


Yannick Roder : La France partage avec d’autres pays européens des défis démographiques en cardiologie, notamment le vieillissement des praticiens et les départs à la retraite. En France, l’âge moyen des cardiologues est de 51,6 ans, avec 33,9 % ayant plus de 60 ans. Cette tendance est similaire en Allemagne, où une étude de 2021 indique que 30 % des cardiologues ont plus de 60 ans. Au Royaume-Uni, le Royal College of Physicians rapporte que 28 % des cardiologues ont dépassé les 55 ans.

 

(1) Le Dr Yannick Neuder est cardiologue et député de la 7e circonscription de l’Isère.

Le Cardiologue n° 460 – novembre-décembre 2024

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