La gouvernance de l’Assurance Maladie… !

La nouvelle était passée un peu inaperçue dans le tintamarre de rentrée et le débat du PLFSS : depuis le 3 septembre dernier, le ticket modérateur des malades vous consultant hors parcours de soins est désormais de 50 %. Cette disposition s’explique par le croisement de deux dispositions légales : – la loi de réforme de l’Assurance Maladie de 2004-2005 qui a instauré le parcours de soins. Le législateur avait prévu de faire varier le ticket modérateur des patients consultant un spécialiste en accès direct et un décret consécutif avait prévu d’en laisser l’initiative à l’Union des Caisses (UNCAM), dans la limite de 17,5 à 22,5 % du tarif de la consultation spécialisée. Cette augmentation de TM concerne tout autant les patients en ALD ; – l’arsenal réglementaire de l’été, à la suite de l’avertissement du « Comité d’alerte » de juin dernier, qui avait provoqué une série de dispositions diverses… dont l’augmentation de ce TM antérieurement calculé sur la base de 10 % du prix de la CS (soit 10 % X 23 € + 2 = 2,5 €). Une décision des directeurs de caisses publiée au J.O. du 1er septembre a porté à 20 % la clef de calcul de cette majoration de TM. Soit 20 % X 25 € (CS + MPC) = 5 €.

Ce chiffre de 5 € vaut de la même façon et à même niveau pour la CsC ou pour les actes techniques car il s’agit d’un plafond, calculé sur la consultation du médecin spécialiste de secteur 1. Seuls en sont exclus les actes dispensés en cas d’éloignement du domicile ou en cas d’urgence. Laquelle doit correspondre, selon la définition désormais admise, à « une situation non prévue plus de 8 heures auparavant pour une affection mettant en jeu la vie du patient ou l’intégrité de son organisme ».

Formellement, il s’agit d’une opération neutre pour le médecin puisque c’est ici le patient qui est pénalisé par un moindre remboursement. Hors parcours de soins, si d’aventure – ce que le Syndicat déconseille -, le médecin voulait tout de même appliquer le tiers-payant il doit demander 5 € supplémentaires. En cas d’hospitalisation, la même procédure doit être pratiquée par l’établissement.

Rappelons que ce surcoût exigé du patient n’est pas remboursable par les complémentaires.

Et un TM de 18 € sur les échographies

Autre nouveauté, plus récente celle-là puisqu’elle remonte au 12 décembre seulement mais qui ne touche pas les malades en ALD, les femmes enceintes, les ATMP : le nouveau TM sur les actes d’un tarif supérieur à 91 € (valeur de l’ancien K50). En cardiologie, cette disposition touche, par exemple, les échographies.

La LFSS-2006 avait prévu, il y a 2 ans, de les taxer d’un forfait de 18 €, abandonné à la charge des patients mais – à la différence du précédent – remboursable par les complémentaires. Cette mesure avait été adoptée par le législateur pour mettre un terme à une injustice antérieure qui voyait les actes à 90 € exposés à un TM quand ceux à 92 ne l’étaient pas… mais aussi pour verser un peu de suppléments de recettes dans les caisses de l’Assurance Maladie. Sa mise en oeuvre a été bien plus longue que prévu et, à vrai dire, tout le monde ou presque en avait oublié jusqu’à l’existence.

Il faut dire que la Sécu a rencontré – dans sa mise en oeuvre – quelques ennuis de tuyauterie de son système informatique de liquidation. On n’est d’ailleurs pas certain qu’ils aient trouvé une solution. Pour les cardiologues se faisant honorer par paiement direct, pas de problème particulier : c’est le malade qui se fait ultérieurement rembourser par sa mutuelle. Dans le cas du tiers-payant, il convient d’exiger la somme de son patient ou de… risquer le pari que sa mutuelle paiera la somme sans piper.

C’est d’ailleurs le cas de pratiquement toutes (y compris la CMU-C) à condition de porter dans son logiciel de télétransmission le code PAV (comme « Participation de l’Assuré en Ville ») après le code d’acte. Lequel est également à mentionner lorsque plusieurs actes sont cumulés dans la même séance.

Une seule mention suffit. Mais pour ce faire, il vaut mieux être doté de la dernière version de son logiciel de télétransmission 1.40 intégrant l’addendum 2 bis (à vérifier auprès de l’éditeur ou sur le site Sesam-Vitale). Qui a parlé de « simplification administrative » ?

2008 : année charnière

« Manquerait plus qu’au nom de “l’ouverture”, il nous mette Evin à la Santé ! La rupture serait alors totale »… Formulée par un confrère sur le ton de la plaisanterie, la sortie publique trahit pourtant bien le sentiment de malaise qui s’est installé, en quelques mois, entre la gouvernance- 7 et le corps médical. Le trouble s’était immiscé dès les premiers jours, à la suite de l’avertissement du Comité d’alerte particulièrement préjudiciable aux radiologues et cardiologues interventionnels. Il s’était conforté avec la présentation, la discussion, l’adoption d’un PLFSS particulièrement corrosif pour le moral médical. Il s’est établi à la porte de l’hiver qui s’annonce comme une période de « pré-glaciation » de la vie conventionnelle.

Négociée en 2004, signée pour 5 ans le 12 janvier 2005 et publiée au J.O. du 11 février consécutif, cette convention approche de son troisième anniversaire. Paradoxalement, c’est la tutelle politique qui la met plus à mal que ses opposants de la première heure, majoritaires dans les urnes des élections aux U.R.M.L. en 2006. Ã coups de « stabilisateurs économiques », contrats individuels et quelques dispositions assez humiliantes pour les médecins (paiement des feuilles de soins, devis exigé en secteur 2…), le Gouvernement semble manifester une surprenante défiance vis-à-vis des parties signataires de la Convention dont le champ de discussion est beaucoup plus balisé que par le passé.

Lesdites parties signataires ne sont au demeurant pas obligées d’obtempérer. Une foultitude de dispositions législatives sont ainsi passées subrepticement aux poubelles de l’histoire. D’autres n’arrivent pas – l’instar de la FMC obligatoire – à s’extraire des sables mouvants où les ont plongé deux alternances politiques et une poignée de changements de gouvernement dans le cadre d’une même majorité. Il n’empêche : à la lecture de la loi de financement 2008, les électeurs médecins de Nicolas Sarkozy ressentent un début de gueule de bois.

Or, qu’ils soient prévenus, il y aura trois textes législatifs majeurs en 2008 ! :

■ d’une part, le même projet de financement – désormais classique – discuté par le Parlement lors de sa session d’automne et qui définira la politique 2009. Mais également simultanément ou juste avant…

■ une réforme du financement de l’Assurance Maladie. C’est moins l’urgence comptable qui en impose l’opportunité que la cohérence politique : la France présidera en effet l’Union européenne à compter du 1er juillet 2008. Si elle prétend faire bonne figure dans ce leadership, elle doit se débarasser de son « bonnet d’âne » de mauvais élève de la classe euro. C’est-à-dire « se caler » durablement sur les critères de convergences de la monnaie unique et cesser de flirter avec le « carton rouge » des déficits publics… L’exercice n’est pas de pure forme. En macro-économie de santé, un point de CSG supplémentaire c’est 10 milliards de recettes supplémentaires (dont 8 pour l’Assurance Maladie), 1 point de cotisation, c’est 6 milliards et un point de TVA, 5 milliards… Sachant que le déficit récurrent – et naturel, compte tenu que la santé progresse naturellement plus vite que le PIB – est de l’ordre de 6 milliards l’an, l’équation n’est pas si complexe… mais quelle que soit la formule retenue, sa pérennité dépasse rarement un an ou deux, au delà duquel il faut « bisser ». Tous les gouvernements sont dans ces conditions à la recherche de la pierre philosophale produisant chaque année une recette en croissance de + 1,5 point par rapport à la richesse produite.

Avant son élection, Nicolas Sarkozy avait cru la trouver avec la TVA sociale qui pénalise d’abord les importations (effectivement en hausse à un rythme supérieur à la croissance économique… Une façon de faire payer (un peu) aux Chinois leur distorsion de concurrence sociale. Las, des économistes – et ces jours-ci le Conseil économique et social – l’en dissuadent au motif que ce serait surtout un moyen de relancer… l’inflation ! Il faudra pourtant bien trouver une formule politiquement et socialement acceptable pour faire meilleure figure communautaire. Inéluctable, un nouveau recours au portefeuille sera donc au programme de 2008… après les municipales ;

■ un troisième texte enfin est d’ores et déjà annoncé par François Fillon pour l’été : la loi sur l’offre de Santé, consécutive des États généraux éponymes. Convoquée en février prochain, ceux-ci seront placés sous la double autorité du Doyen Yvon Berland, président de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé et de Mme Annie Podeur, patronne de la DHOS (Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins). Difficile d’envisager ne serait-ce qu’un ordre du jour consensuel à ces États généraux : les internes en grève à l’automne veulent y trouver confirmation qu’il ne sera pas porté atteinte à leur future liberté d’installation ; les médecins ne savent pas précisément si l’on y parlera seulement du « premier recours » ou (un peu, beaucoup, à la folie…) des autres sujets « qui fâchent »… Et notamment des spécialités cliniques, grandes perdantes du parcours de soins. Les associations de patients voudront y stigmatiser les dépassements, sujet que les médecins ont justement l’intention d’éviter… Au final, le pire est à craindre : des palabres sortent rarement des consensus fiables et pérennes.

Sans compter que l’essentiel est peut-être ailleurs, dans cette reconfiguration syndicale que le Gouvernement semble appeler de ses voeux : toutes les formations reconnues représentatives sont conviées aux États généraux : CSMF, SML et modeste formation Alliance, négociatrices et signataires de la convention. Mais aussi les autres : MG-France et Espace Généraliste chez les généralistes, la FMF et l’UCDF chez les spécialistes qui peuvent tous se prévaloir de « la légitimité des urnes » et demandent la renégociation de la Convention. Elle ne peut être formellement exclue.

Non plus que des avancées significatives sur les autres thèmes de la vie professionnelle, l’éternelle réforme de l’hôpital qu’il faudra bien finir par engager, les Agences régionales de santé, inscrites au calendrier de 2009, le secteur optionnel ou la CCAM des actes cliniques, la refonte du mécanisme d’ALD, le tandem FMC/EPP que le Gouvernement aurait intérêt à désembourber s’il veut préserver la crédibilité des institutions en place…

En vérité, un calendrier chargé comme jamais : la vraie rupture serait déjà d’honorer les rendez-vous obligés.

|L’exemple des 18 € dans l’échographie| |Selon que la dernière mise à jour de votre logiciel de télétransmission de FSE a intégré ou non l’addendum 2 bis (version Réforme) de SESAM Vitale 1.40, le simple fait d’ajouter le code « PAV » au code d’acte diminue – ou non – de 18 € le « montant remboursable » par l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO). Soit 95,16 € – 18,00 € = 77,16 € (pour un logiciel intégrant l’addendum 2 bis) dans le cas de l’acte DZQM006 (échographie-doppler transthoracique du coeur et des vaisseaux intrathoraciques). Quelle que soit cette version de FSE, l’important est de bien porter la mention PAV (Participation Assuré en Ville), immédiatement après de la code d’acte ; il signifie que vous avez bien perçu les 18 € de la part de l’assuré.|

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