La profession refuse l’étatisation de la PDS

365 – Très coûteuse, fragile, instable : le jugement de la Cour des comptes est sans appel. Pour remédier à cet état des choses, l’institution propose de placer la PDS sous la coupe des ARS. Une « étatisation » que dénonce la profession. 

La Cour des Comptes préconise de confier aux ARS la responsabilité générale de l’organisation des gardes de tous les professionnels de santé (©Dalaprod)
La Cour des Comptes préconise de confier aux ARS la responsabilité générale de l’organisation des gardes de tous les professionnels de santé (©Dalaprod)

Chaque année, le rapport de la Cour des Comptes comporte son lot de critiques à l’endroit du domaine de la santé et de ses comptes. Dans sa cuvée 2013, la Permanence Des Soins Ambulatoires (PDSA) fait l’objet d’une véritable volée de bois vert. En résumé, l’abandon en 2002, à la suite de la grande grève des médecins généralistes, de l’obligation des gardes et astreintes et le passage au volontariat a entraîné « une explosion » des dépenses d’Assurance Maladie liées à la rémunération des gardes et astreintes, qui se sont étendues aux pharmaciens et aux transports sanitaires.
Ainsi, la Cour des Comptes relève que de 220,5 millions d’euros en 2001, les dépenses de PDSA pour les médecins sont passées à 393,5 millions d’euros cette somme recouvrant les forfaits, actes majorés et subventions diverses). Parallèlement, les dépenses des gardes pharmaceutiques sont passées de 8,5 à 54,5 millions d’euros. Les dépenses liées à la PDS des soins de ville (hors urgences et établissements de santé) sont passées de 250 millions d’euros à près de 700 millions d’euros entre 2001 et 2012, alors que pendant le même temps l’activité s’est réduite, passant de 7,34 à 5,2 millions d’actes.
La critique ne s’en tient pas à ce bilan comptable. La Cour des Comptes dénonce aussi la diminution tendancielle du nombre de généralistes sur lequel repose la PDSA et l’érosion continue du volontariat, l’inefficacité du droit à réquisition des préfets, des « difficultés persistantes » dans la régulation libérale des appels et l’hétérogénéité dans les réponses apportées aux appelants, et la coordination défaillante entre le volet libéral et le volet hospitalier de la régulation.

Mettre de l’ordre dans le dispostif

Les solutions des magistrats de la rue Cambon sont tout aussi radicales que leurs critiques. Ils recommandent au ministère de la Santé de recentrer son action sur « le pilotage global et la régulation du système, notamment en définissant sans délai les modalités d’une meilleure articulation des urgences et de la PDSA ». Pour remettre un peu d’ordre dans le dispositif, ils préconisent de confier aux ARS « la responsabilité générale de l’organisation des gardes de tous les professionnels de santé » – autrement dit les gardes médicales, pharmaceutiques et ambulancières – ainsi que leur financement sous la forme d’enveloppes régionales fermées incluant la rémunération des actes médicaux.
Au passage, ils souhaitent également voir les ARS utiliser à meilleur escient le levier du FIR pour réguler les dépenses de la PDS qui s’élèvent aujourd’hui à 1,9 milliard d’euros (dont 630 millions pour la PDSA, les transports et les gardes pharmaceutiques, 530 millions pour les urgences et 723 millions pour la PDS des établissements de santé).
En outre, les ARS hériteraient aussi du pouvoir de réquisition des préfets. La mise en ordre selon la Cour des comptes ne s’arrête pas là. Pour harmoniser les pratiques, elle suggère de subordonner les majorations applicables aux actes médicaux effectués dans le cadre de la PDSA au respect par les associations de PDSA « d’un corps de règles garantissant l’homogénéité et la qualité de leur mode de régulation », de généraliser les protocoles de renvoi des patients entre les services d’urgences et les Maisons Médicales de Garde (MMG). Enfin, la Cour des Comptes invite les pouvoirs publics à « engager une action vigoureuse d’information et de sensibilisation du public aux nouveaux modes d’organisation de la DPS ».

Une étatisation du dispositif

Cette information du public sur l’utilisation de la PDS est sans doute la seule recommandation que pourraient approuver les professionnels. La CSMF rappelle en tout cas qu’elle le réclame « depuis de nombreuses années ». Pour le reste, la profession s’est étranglée de rage à la lecture du rapport de la Cour des Comptes. Le SML « ne décolère pas » et la CSMF dénonce des propositions dans lesquelles elle voit « une étatisation » du dispositif. Le ton de la confédération se fait très ironique pour s’étonner que « la Cour des Comptes découvre, avec plus d’une décennie de retard, que les médecins libéraux sont désormais rémunérés pour leurs gardes et astreintes et que celles-ci sont donc passées d’un coût nul en 2001 à un coût significatif ». Enfin, la CSMF voit derrière la préconisation de la Cour des Comptes d’intégrer le budget de la PDS dans une enveloppe régionale fermée le retour de l’idée d’un ORDAM et « la volonté d’engager une maîtrise purement comptable du dispositif ».