Le chantier de la FMC/EPP à nouveau embourbé !

316 – Depuis pratiquement quinze ans – et plus précisément depuis les Ordonnances-Juppé de 1995- 1996 – on parle de formation continue obligatoire. Mais aucun cadre fiable n’a jamais pu être durablement installé, pérennisé au-delà de quelques années, chaque ministre voulant laisser son empreinte… nominative sur un sujet finalement assez consensuel. On n’aura ainsi pas trop de mal à prendre le deuil du dernier cadre opérationnel qui distinguait, sans doute abusivement, l’obligation de FMC (Formation Médicale Continue) et l’obligation d’EPP (Évaluation des Pratiques Professionnelles). Leur inscription commune au « barème » individuellement opposable à chaque médecin – 150 crédits à cumuler en FMC et 100 en EPP – donnait finalement de la cohérence méthodologique au dispositif opposable et sa publication au Journal Officiel lui avait conféré une évidente lisibilité politique. Dans le même temps, les deux acteurs semblaient se partager, presqu’harmonieusement, le champ des agréments : à la HAS celui de l’EPP, au nom de la juste évaluation des changements de comportements, et aux trois Conseils Nationaux de FMC, parfaitement « synchrones », la définition des objectifs et les agréments d’acteurs de FMC. L’attelage était certes un peu baroque mais finalement équilibré entre ce qui ressort de la responsabilité de la profession organisée et de la légitimité des tutelles.

2009 : voter la loi avant d’élaborer son décret d’application

Pour des raisons qui échappent encore au commun, Mme Bachelot a donc voulu l’amender. Elle avait prévenu de ses intentions et les responsables de la profession étaient tous suspendus aux préconisations qu’elle avait demandées à une mission de l’IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) pour éclairer sa stratégie. Patatras, « la crise » a tout remis en cause en bousculant le calendrier parlementaire, et le projet de loi HPST, formellement inscrit au calendrier de novembre du Parlement, se retrouve reporté au… début 2009 ! Le rapport de l’IGAS, lui-même annoncé pour la deuxième quinzaine d’octobre, n’était toujours pas (officiellement) rendu dans la première quinzaine de novembre… De toute évidence, le dossier s’embourbe. Et avec lui l’élaboration d’un cadre enfin fiable !

Dans une des premières versions du projet de loi, le Conseil national de FMC semblait ainsi promis à se pérenniser, dans une nouvelle composition et selon des missions revues et corrigées dans le sens de la… dévaluation, mais enfin il perdurait. Ce n’était plus du tout le cas dans la version adoptée en Conseil de ministre le 22 octobre dernier. Le texte, qu’on dit « bleu » dès lors que, nanti de l’avis préalable du Conseil d’État, il n’a plus vocation à changer avant transmission au Parlement, ne comporte plus aucune référence à un quelconque organisme rappelant de près ou de loin le CNFMC. Quelques éléments seulement apparaissent comme des fondations fiables du nouveau dispositif : _ 1. la double obligation perdure, même si on parle désormais de « formation évaluative », ce nouveau concept ouvrant vraisemblablement la voie à une fusion des deux obligations réglementaires de FMC et EPP ; _ 2. un organisme voit son périmètre élargi, l’établissement « gestionnaire » des ressources financières issus à la fois des fonds publics, ministère et caisses, et privés (cotisation obligatoire des médecins) ; le projet de loi reste muet quant à d’autres sources possibles ; _ 3. un autre – le Conseil national de l’Ordre – connaît une promotion avec la responsabilité totale et directe de la validation par les médecins de leur double obligation reconduite de FMC/EPP. Cet aspect du problème a largement pollué le débat antérieur puisque cette responsabilité incombait par le passé à des Conseils régionaux de FMC, adossés au Conseils régionaux de l’Ordre.

Un sujet toujours soumis à l’aléa d’une éventuel remaniement

Mais pour le reste, prière de patienter, au moins jusqu’à ce que l’IGAS produise le résultat de ses investigations et le catalogue de ses propositions dans lequel le cabinet de Mme Bachelot n’aura qu’à puiser pour écrire les clauses du futur décret d’application. Car, et c’est là que le bât blesse, le cadre législatif n’est rien tant qu’il n’est pas complété de son décret d’application. C’est de lui notamment qu’on attend la future mécanique des différentes instances en charge des différentes pièces du puzzle. L’inquiétude manifestée par les responsables du CNFMC sortant (et dont le mandat s’achève fin janvier prochain) est, très explicitement, de voir la HAS investie de la plus grande responsabilité, évidemment à son propre détriment…

Réponse sous quelques semaines sans doute. Mais l’observateur impartial a d’ores et déjà des motifs de s’inquiéter du nouveau retard pris dans la gestion de ce dossier qui l’expose à de nouveaux aléas au cas où un nouveau gouvernement devrait reprendre le dossier après un éventuel remaniement.