Le courrier médical

Le courrier médical est un outil de communication ayant plusieurs fonctions. Entre autres, il reflète les compétences de son émetteur, il aide un patient à la compréhension du traitement et par là même à l’observance et il aide à l’application des recommandations.

Prenons un courrier médical comme on en reçoit régulièrement et dont le paragraphe conclusif serait le suivant : « En conclusion, Madame X. a une fibrillation atriale stable, elle va bien et je propose donc de continuer Irbesartan, Metformine, Esoméprazole, BisoCé, Pravastatine, Zyma D, Apixaban, Amlor et Insuline ».

Que penser de cette conclusion ?
Le courrier médical est un outil de communication qui reflète ce qu’est son émetteur

Parmi les manques évidents de la conclusion citée, il y a le fait que le traitement est dans un certain désordre, non hiérarchisé et qu’il manque les posologies. Ce courrier peut donc donner une mauvaise image du médecin qui l’a rédigé et laisser penser à certains qu’il manque de compétence, manque du sens de la communication, ne comprenant pas en quoi un courrier permet d’aider à la prise en charge médicale, voire qu’il est pressé, ce qui revient à dire qu’il ne sait pas gérer son temps.

Dans ce courrier, les traitements qui sont les plus à risque d’effets secondaires, ceux à marge thérapeutique étroite, sont noyés dans une liste peu cohérente alors qu’ils justifieraient d’être mis en avant. On ne devrait pas découvrir presque par hasard, entre la poire et le fromage, notamment après le colécalciférol, que la patiente reçoit un anticoagulant et la logique voudrait que ce traitement figure en première ligne. Les autres traitements à problème sont a priori l’insuline qui ne devrait pas apparaître en fin de liste et le bêtabloquant qui devrait voir sa place mieux mise en avant. De plus, les traitements ne devraient pas mélanger les groupes thérapeutiques, comme ici des antihypertenseurs au milieu d’antidiabétiques. Cette liste devrait être hiérarchisée par groupes thérapeutiques, et comme il s’agit d’un courrier fait par un cardiologue, les traitements à visée cardiologique devraient figurer parmi les premiers cités (c’est ce que demande le récepteur du courrier ayant adressé le patient au cardiologue) en mettant en premier ceux à marge thérapeutique étroite. 

Le courrier médical peut aider à rappeler quelques recommandations de bonne pratique

Le courrier doit préciser et rappeler, tant dans son corps que dans sa conclusion, que la fibrillation atriale de cette patiente justifie ou non, et pourquoi, un traitement anticoagulant et donc, le niveau de risque embolique, mais aussi hémorragique et donc les valeurs des scores CHA2DS2-VASc et HASBLED.

Personnellement, j’utilise un moyen simple à ce niveau : dans ces acronymes, j’écris en gras les facteurs spécifiques au patient et les recompte à chaque consultation pour les modifier si nécessaire. Ainsi, j’écris dans la conclusion « Madame X. a une fibrillation atriale permanente, non rapide et asymptomatique avec un score de risque embolique CHA2DS2-VASc à 4, justifiant les anticoagulants et un score de risque hémorragique HASBLED à 2, donc faible »

Le courrier médical peut aider à la bonne observance

Les patients sont sûrement perplexes lorsqu’en pharmacie, ils reçoivent un traitement dont le nom n’est pas celui inscrit sur l’ordonnance, et ce, parce qu’il s’agit d’un générique. Une des méthodes pouvant atténuer ce type de problème est de rédiger son courrier, comme ses prescriptions, en indiquant tout à la fois le nom de la Dénomination Commune Internationale (DCI) du traitement, ce qui est d’ailleurs obligatoire, et son ou ses noms commerciaux, en évitant de mélanger DCI et noms commerciaux. Regrouper les traitements selon les maladies qu’ils traitent et les hiérarchiser en faisant ressortir ceux qui peuvent poser problème indique que la prescription n’est pas un automatisme, mais est réfléchie.

Ainsi, pour cette patiente, tendre vers un idéal serait d’écrire l’anticoagulant en premier, les antihypertenseurs regroupés pour inscrire dès les premières lignes le bêtabloquant, puis le traitement du diabète regroupé, etc., libre d’y ajouter le matin, le midi ou le soir si nécessaire, et ainsi d’écrire :

  • APIXABAN 5 mg (Eliquis) : 1 cp matin et soir, sous surveillance semestrielle de la fonction rénale, afin d’adapter la dose le cas échéant.
  • BISOPROLOL 5 mg (BisoCé, Cardensiel, Détensiel, Soprol) :  1 cp/j.
  • IRBESARTAN 150 mg (Aprovel) : 1 cp/j.
  • AMLODIPINE 5 mg (Amlor) : 1 gl/j.
  • Insuline GLARGINE (Lantus, Toujéo, Abasaglar) : adaptée à la surveillance régulière de la glycémie.
  • METFORMINE 850 mg (Glucophage) : 1 cp matin et soir.
  • PRAVASTATINE 40 mg (Elisor, Vasten) :  1 cp/j.
  • ESOMEPRAZOLE 20 mg (Inexium) : 1 cp/j.
  • COLECALCIFEROL (Zyma D) selon ses indications.

Un exemplaire du courrier est à remettre au patient afin qu’il puisse le lire en lui indiquant qu’à chaque ligne de traitement, le premier nom est celui du générique et ceux qui suivent entre parenthèses sont ceux sous lesquels ces traitements sont aussi commercialisés. En lisant le courrier, le patient disposera d’une aide pour comprendre à quoi correspond le traitement remis en pharmacie s’il n’est en apparence pas identique à celui inscrit sur l’ordonnance.

François Diévart. Elsan clinique Villette, Dunkerque