Le réquisitoire hospitalier contre les ARS

364 – Catherine Sanfourche – Devant le Sénat, les présidents des conférences de CME de CHU et de centres hospitaliers n’ont pas ménagé leurs critiques à l’encontre des Agences Régionales de Santé (ARS).

 La Mission d’Evaluation et de Contrôle des lois de financement de la Sécurité Sociale (MECSS) du Sénat, qui prépare un bilan d’activité des ARS, a auditionné au début de l’été les présidents des conférences de CME de CHU et de CME de centres hospitaliers, respectivement Guy Moulin et Frédéric Martineau. Les sénateurs ont pu constaté qu’entre l’hôpital et les ARS, rien ne va vraiment. Les deux présidents se sont en effet livrés à une critique qui ressemble fort à un réquisitoire. Première critique : le manque d’autonomie des ARS qui ne sont, selon Guy Moulin, que « le bras armé du ministère » chargé d’imposer « des objectifs comptables aux établissements ». « On observe des injonctions venant d’en haut, que les ARS doivent appliquer en exerçant un rôle de tutelle et en gommant toute notion d’autonomie des établissement de santé », a renchéri Frédéric Martineau. Il juge que « l’organisation régionale et territoriale de la santé est délaissée, tout comme l’aide à la réflexion stratégique et à la transversalité de l’offre de soins », les ARS ne jouant pas « le rôle d’interface » qu’elles sont sensées jouer. D’ailleurs, la politique des ARS, singulièrement en ce qui concerne la création de Communautés Hospitalières de Territoire (CHT), pose « un problème de compréhension », selon les deux présidents, en raison de positionnements variables des agences qui balancent entre « incitation » et « injonction ».

Au catalogue des critiques figure aussi la « forte lourdeur bureaucratique » qui se manifeste notamment dans des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) « imposés avec des délais contraints et un nombre d’indicateurs démesuré » dans des projets régionaux de santé avoisinant les mille pages (!) et dans « une culture de la réunion décourageante », dont il est difficile d’obtenir un retour et qui débouche rarement sur des actions concrètes. Quant au décloisonnement attendu de la création des ARS, il est inexistant à l’heure actuelle, s’il faut en croire Frédéric Martineau. « Nous recherchons avec les ARS un véritable dialogue stratégique, voire des initiatives dans le but de favoriser la coopération, les réseaux et le décloisonnement entre les différents acteurs de santé », affirme-t-il, tout en constatant que les agences s’occupent essentiellement de l’hôpital, sur lequel « elles ont un levier d’action », et très peu de la médecine libérale et du secteur médico-social.

La dénonciation par Guy Moulin des contrôles de codage de la T2A « réalisés de manière hétérogène entre régions mais aussi à l’intérieur d’une même région » et prenant souvent « un aspect inquisitorial » parachève ce réquisitoire des hospitaliers contre les ARS. Auditionné à leur suite, le Directeur Général de l’Offre de Soins (DGOS), Jean Debeaupuis, s’est fait l’avocat de la défense, écartant les critiques et soulignant que quelques cas « d’interventionnisme » ne devaient pas cacher que « dans l’écrasante majorité, les relations sont tout à fait satisfaisantes, apaisées, professionnelles et respectueuses de chacun ». Aux hospitaliers et aux cliniques privées d’apprécier la justesse de la plaidoirie…

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