Les déterminants à l’installation selon les jeunes

Exercice groupé, inscription dans un territoire, équilibre vie privée/vie professionnelle, tels sont les déterminants qui conditionnent l’installation selon les internes et les jeunes médecins.

La commission jeunes médecins du Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) vient de publier les résultats d’une enquête qu’elle a menée sur les déterminants à l’installation pour les internes et les jeunes médecins. 

Au total, plus de 15 300 professionnels y ont participé, dont 70 % de médecins déjà installés, 16 % d’internes et 14 % de médecins remplaçants. Lancée début janvier de cette année, cette étude évalue les conditions de l’exercice professionnel et éclaire les attentes et craintes des jeunes et futurs médecins. 

Le premier constat qui frappe est le décalage entre l’aspiration à s’installer et la concrétisation de l’installation. On sait, grâce à l’atlas démographique du CNOM, que 62 % des nouveaux inscrits au tableau ordinal en 2018 ont choisi le salariat quand seuls 12 % ont opté pour l’exercice libéral. 

Et pourtant, l’étude de la commission jeunes médecins révèle une véritable aspiration à l’installation en libéral, puisque 75 % des internes envisagent ce mode d’exercice et que 19 % seulement penchent pour l’activité salariée plein temps. « Ce décalage entre volonté et réalité s’explique par une multitude de facteurs qui peuvent s’avérer dissuasifs », commente l’Ordre. Autrement dit, c’est faute de pouvoir réunir les conditions qu’ils jugent nécessaires que les jeunes se détournent de l’exercice libéral.

Quels sont donc les déterminants à l’installation pour eux ? En premier lieu, « le territoire et la proximité familiale ». Pour les internes comme pour les médecins remplaçants, l’installation est étroitement liée à la dimension territoriale. Ils sont respectivement 62 % et 57 % à considérer que la qualité des services publics est un facteur essentiel dans leur décision de s’installer dans un territoire. 

D’abord le cadre de vie

La dimension familiale est également primordiale à leurs yeux, 61 % et 60 % affirmant que la proximité familiale pèse fortement dans leur choix. Les médecins déjà installés, eux, placent en tête des facteurs favorisant l’installation les services publics, puis les équipements culturels et sportifs, devant les transports. 

Cette recherche d’un cadre de vie non isolé n’est guère étonnante si l’on considère que lorsqu’ils sont en âge de s’installer, les jeunes médecins sont souvent accompagnés d’un conjoint – qui travaille le plus souvent – voire d’enfants. Chez les internes ayant un conjoint, 86  % d’entre eux confirment que ce dernier influence le projet d’installation. 

D’ailleurs, la recherche d’un équilibre vie professionnelle/vie privée est très affirmée chez les internes et les remplaçants. Pour respectivement 82 % et 87 %  d’entre eux, les horaires et le rythme de travail ont un impact sur la décision du lieu et du mode d’installation. 

Chez les médecins installés, l’expérience aidant sans doute, cette attente est plus en retrait (46 % estiment ce point « tout à fait » ou « plutôt déterminant »).

S’installer en groupe

Sans surprise – et sans doute en lien avec le désir d’équilibrer vie privée et vie professionnelle – si les jeunes médecins envisagent de s’installer en libéral, c’est en groupe. Les internes plébiscitent (72 %) l’exercice groupé, dans le cadre d’une activité mixte, en groupe libéral ou en maison de santé pluridisciplinaire. Seuls 3 % d’entre eux envisagent l’exercice libéral en solo. 

Les jeunes médecins ne veulent pas seulement exercer en groupe, ils souhaitent aussi pouvoir disposer d’un réseau de professionnels de santé territorial sur lequel ils puissent s’appuyer. C’est là un point déterminant pour 81 % des internes et pour 87 % des remplaçants. 

« Enseignement majeur de l’étude », souligne le CNOM, 59 % des internes et 43 % des remplaçants affirment craindre l’échec économique d’une installation. Et les aides financières à l’installation ne semblent pas suffire à endiguer cette appréhension. Si elles sont perçues comme importantes, 48 % des internes et 47 % des remplaçants les considèrent comme « peu ou partiellement déterminantes ». Les auteurs de l’enquête en déduisent que « les solutions à apporter aux problèmes de démographie médicale dépassent donc largement les mesures financières ».

En conclusion, l’étude esquisse quelques pistes pour faciliter l’installation des jeunes médecins. « Sans céder à l’appel des mesures coercitives qui seraient totalement contre-productives », il conviendrait pour les aider à passer de l’intention de s’installer à l’action de les accompagner. A cet égard, 68 % d’entre eux souhaiteraient pouvoir être guidés par un confrère ou une consœur, 53 % par les collectivités territoriales, 48 % par l’Ordre des Médecins et 47 % par l’ARS. En outre, « une formation précoce au management de “l’entreprise médicale”, ainsi que l’idée d’un incubateur de projets d’installations mettant à leur disposition toutes les compétences nécessaires, seraient également bénéfique ».

Pour le CNOM, les résultats de cette enquête démontrent qu’ « il est urgent de changer de paradigme : pour les jeunes médecins, il ne suffit plus de s’installer dans un cabinet, mais il s’agit de s’insérer dans un territoire, à l’image des 81 % de répondants qui affirment s’être installés après avoir été remplaçants », dont 41 % dans le territoire où ils avaient effectué leurs remplacements.

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