L’IGAS plaide pour un programme d’évaluation national

L’Inspection Générale des Affaires Sociales recommande l’élaboration d’une stratégie nationale en médico-économie et d’étendre l’évaluation médico-économique, au-delà des produits de santé, aux stratégies de santé et à l’organisation des soins.

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« Se fixer des principes » et « se doter d’une politique » dans l’évaluation médico-économique. © Angel M. Varandela

379 – « L’évaluation  médico-économique n’est pas faite pour trancher le dilemme auquel est confronté le décideur, elle est faite pour ne pas décider en aveugle » et elle est nécessaire dans un objectif d’ « allocation optimale des ressources ». C’est sur cette « définition » que s’ouvre un rapport de l’IGAS sur « L’évaluation médico-économique en santé » publié au début de février. Partant de là, les auteurs du rapport estiment qu’il est nécessaire de « fixer des principes » et de « se doter d’une politique » dans ce domaine. Pour l’essentiel, le rapport plaide pour l’extension des évaluations médico-économiques dont l’utilisation est actuellement cantonnée à la fixation des prix des produits de santé et l’élaboration des stratégies vaccinales. « Mais dans plusieurs pays européens, elles sont également utilisées pour définir le panier de soins pris  en charge par la collectivité », remarque l’IGAS, qui estime qu’elles pourraient aussi servir à déterminer la prise en charge de certains traitements à des sous-groupes de patients ou les « parcours de soins les plus efficients ». Concernant cet élargissement de l’utilisation de l’évaluation médico-économique, l’IGAS fait un certain nombre de propositions. Ainsi concernant les dispositifs médicaux qui y échappent majoritairement en raison de chiffres d’affaires peu élevés, elle suggère d’abaisser à 10 millions d’euros de CA le seuil au-dessus duquel un examen de l’efficience est effectué par la Haute Autorité de Santé (HAS). Elle préconise aussi d’ « équilibrer au sein de la HAS les moyens à consacrer aux évaluations médico-économiques du médicament et à celles qu’il convient de développer pour d’autres interventions en santé, notamment dans le domaine des recommandations de bonnes pratiques et de prévention ».

Une expertise selon l’évaluation d’un médicament

Pour cause de limitation des moyens, l’IGAS propose de « cibler les évaluations médico-économiques sur les grands enjeux de santé ». Ainsi, selon elle, l’évaluation par la Commission Evaluation Economique et de Santé Publique (CEESP) ne devrait pas être étendue aux médicaments à ASMR IV, l’expertise médico-économique étant « surtout pertinente pour les innovations majeures qui revendiquent un niveau de prix élevé ». L’IGAS estime en effet que le Comité Economique des Produits de Santé (CEPS) « dispose d’autres outils, moins consommateurs de ressources, pour réguler le prix et l’impact budgétaire des innovations mineures ». De même, l’évaluation d’un médicament lors de sa primo-inscription manquant de fiabilité puisqu’elle n’est fondée sur aucune donnée en vie réelle, cette évaluation devrait, selon les auteurs du rapport, être « centrée sur l’identification des marqueurs d’efficience » et « des zones d’incertitude » qu’il conviendra de clarifier. A cette étape-là, on fixerait donc « un prix assorti de conditionnalités donnant lieu à la réévaluation de l’efficience et de l’impact budgétaire réel », ainsi qu’une « clause de revoyure ferme ». Le rapport cite la Suède où « la réévaluation des médicaments permet de valider des hypothèses posées au moment de la première évaluation en fonction de données en vie réelle et peut conduire à sortir des produits du remboursement ».

Les auteurs du rapport estiment que l’élaboration d’une stratégie nationale en médico-économie devrait passer par l’établissement d’un « programme d’évaluation partagé au niveau national », dont les priorités pourraient être élaborées par la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) et qui serait complété par les programmes régionaux décidés par les ARS. Enfin, pour structurer une offre académique dans le domaine de l’évaluation médico-économique, ils recommandent, entre autre, la constitution d’ « équipes de recherche et d’évaluation de taille critique » et une meilleure valorisation des travaux effectués pour le compte d’organismes publics dans les carrières universitaires.

Elaborer un référentiel

Pour l’interprétation des évaluations médico-économiques, l’IGAS juge nécessaire d’ « élaborer un référentiel », mais qui ne devrait pas être basé sur un « seuil d’efficience fixé à l’avance » qui amènerait à écarter d’office une intervention dont le rapport coût/bénéfice dépasserait ce seuil. Un tel système arbitraire serait « difficile à justifier », selon l’IGAS qui est plutôt favorable à des « comparaisons avec des travaux de référence » apportant au décideur des éléments de comparaison utiles. La HAS « pourrait être chargée de constituer et de tenir à jour un référentiel d’efficience » qui consisterait en une base de données rapportant les valeurs coût-efficacité incrémentaux de produits évalués antérieurement afin de « faire émerger des valeurs de référence ».