Maîtrise médicalisée, vous avez dit… rigueur !

313 – Le 24 juin dernier, dans une interview du journal Les Échos, Frédéric Van Roekeghem annonce un plan de redressement d’une exceptionnelle ampleur de 3 milliards d’euros, dont 2,3 milliards d’économies et 700 milliards de recettes supplémentaires. Il répond ainsi à une injonction du ministre du Budget et des Comptes Publics, qu’il avait « appelée de ses voeux » pour ne pas dire exigée, afin de ramener le déficit de l’Assurance Maladie à 4,1 milliards cette année et 2,8 milliards en 2009 pour un équilibre en 2011, perspective présidentielle oblige.

La forme et le contenu de ce plan appellent plusieurs commentaires :

1. à l’évidence le pouvoir décisionnel est repassé de Ségur à Bercy, rompant ainsi avec l’avancée majeure des trois ministres de la Santé précédents qui avaient obtenu la responsabilité de la gestion de l’Assurance Maladie. L’organisation reste à Ségur, mais le nerf de la guerre retourne à Bercy. La messe est dite !

2. la maîtrise médicalisée, toujours mise en avant par le DG de l’UNCAM, pour un quart des économies attendues (500 millions) change de logique. Un exemple : les contrats de bonnes pratiques individuelles qui sont passés d’une obligation de moyens à une obligation de résultats. Sujet cher à notre ministre de la Santé qui confond ainsi les groupes de pairs avec les fameux groupes de « progrès » de Groupama, initiative mutualiste en dehors de toutes références scientifiques et dont l’objectif principal était l’économie de prescriptions et non la qualité de celles-ci !

3. les vieilles recettes sont donc toujours à la mode : – baisse des prix de certains médicaments et surtout spectre du TFR (Tarif Forfaitaire de Remboursement) qui met le prix du princeps au prix du générique, – menace de baisse de certains actes au nom de la productivité : encore une fois la biologie et la radiologie, et cela au mépris des pré-négociations conventionnelles…, – report des revalorisations tarifaires gagées par de nouvelles exigences comme par exemple la mise en oeuvre de mesures de régulation démographique !

4. les propositions de mesures concernant les hôpitaux sont nombreuses et en particulier sur ceux qui sont les plus mal gérés ou caractérisés par une évolution d’activité « anormale » ! Là aussi la révolte des administrés est assurée. Rappelezvous la maternité de Paimpol ou la chirurgie de Saint-Affrique !

5. mais surtout pour la première fois le sanctuaire des ALD est attaqué. La première mesure de non prise en charge à 100 % des vignettes bleues des médicaments dits de confort a déjà déclenché les hurlements de certaines associations de patients.

Et pourtant c’est sur ces deux derniers postes que se trouvent les seules solutions pérennes. L’un pèse 50 % du budget de l’Assurance Maladie et l’autre progresse selon un taux de croissance de plus de 6 % quasi mécanique du fait du vieillissement de la population et de l’augmentation régulière de plus de 4 % par an du nombre des patients concernés, et ce qui allége d’autant les remboursements complémentaires des mutuelles, d’où la volonté de transfert des fameuses vignettes bleues !

Et pour conclure très brièvement sur les conséquences induites à notre endroit : – à n’en pas douter, nous risquons cette année encore un ONDAM de misère ! – et l’encadrement des dépassements d’honoraires sera la concession offerte aux associations de toutes sortes, à titre d’apaisement, sur le dos des praticiens ! ■

Docteur Jean-François Thébaut, le 25 juin 2008

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