« Maladie française »

Les cardiologues ont toutes les raisons d’apprécier  Philippe Douste-Blazy ; d’abord parce qu’il est lui-même cardiologue et qu’il a exercé la cardiologie avant de devenir professeur de médecine à Toulouse ; surtout parce qu’au cours de l’un de ses passages au ministère de la Santé, il a reçu une délégation de notre syndicat national, fait rarissime pour un syndicat de spécialité, ce qui nous a apporté, entre autres, poids et notoriété.

 connait son parcours politique particulièrement riche : maire de Lourdes puis de Toulouse, il fut à quatre reprises ministre de la Santé ; il fut aussi ministre de la Culture, ministre des Affaires Etrangères, puis secrétaire général adjoint des Nations Unies, avant de présider à l’heure actuelle un fonds de l’ONU Unitlife, consacré à la lutte contre la malnutrition chronique.

Si l’homme politique est connu et reconnu, l’écrivain l’est sans doute un peu moins ; il a  pourtant publié plusieurs ouvrages, dont « Pour sauver nos retraites » ou « La solidarité sauvera le monde » sont peut-être les plus emblématiques ; il a également à son actif de très nombreux articles qui portent sur des sujets divers et pas forcément médicaux.

Dans « Maladie Française », ouvrage consacré à l’épidémie de Covid, on se doute, rien qu’en lisant le titre, que l’auteur se promet d’être avare de compliments.

Grâce à des démonstrations qu’il veut indiscutables, faits et chiffres à l’appui, Il va fustiger l’impréparation Française devant l’épidémie, on pourrait même parler à ses yeux d’impéritie, puisque tout ou presque était écrit d’avance ; d’ailleurs, selon ses dires, par lui-même dès octobre 2004, quand, ministre de la Santé, il présenta à Jacques Chirac et au gouvernement son plan anti pandémie, qui n’aurait rencontré que doute et indifférence malgré le soutien du chef de l’état.

L’ancien ministre stigmatise ensuite « des années d’erreurs successives » ; son successeur Xavier  Bertrand, assisté de son directeur de cabinet, un certain Jean Castex,
avait pourtant pris la mesure du danger potentiel en créant une structure spécifique de lutte contre les urgences sanitaires (Eprus) ; il en fut de même pour la ministre suivante confrontée à la pandémie virale d’avril 2009  mais c’est là que tout a basculé : après que l’épidémie a heureusement tourné court, elle fut accusée de gaspillage des deniers publics voire de soumission aux lobbys de l’industrie pharmaceutique ; de fil en aiguille, les structures existantes furent démantelées et les fameux stocks de masques détruits un peu plus tard sous l’impulsion de Marisol
Touraine sous le mandat de François Hollande ; pour l’auteur, le désengagement de l’état était définitivement dicté par le seul impératif comptable !

Pour autant, on comprend que Philippe Douste-Blazy n’exonère en rien les gouvernements d’aujourd’hui de leur part de responsabilité face à l’épidémie  de Covid : pénurie de masques, de gants, de surblouses, vols de matériels de protection dans les hôpitaux, et bien d’autres erreurs,  avec comme première conséquence la contamination des soignants et des forces de sécurité, bien évidemment en première ligne en période de confinement.

Improvisation et temps de retard permanent ont caractérisé selon lui l’action gouvernementale ; il dénonce au passage « l’hystérie collective » à propos du traitement par l’Hydroxychloroquine, les lobbys de tous ordres, et le refus de suivre les exemples de pays tels que l’Allemagne ou la Corée du Sud qui ont pratiqué dès le début une politique de dépistage massif.

Il plaide en terminant pour une véritable culture de la prévention et la mise en place d’une politique de santé publique qui mérite son nom.

On l’aura compris, l’ouvrage prend souvent la tournure d’un réquisitoire, mais il est assorti de très nombreuses références  et s’appuie sur des faits précis. Il est écrit dans un style alerte et clair, qui en rend la lecture agréable alors même que nombre des thèmes traités sont d’un abord parfois très  technique. 

Bref, il est très intéressant à lire, d’autant qu’il éclaire d’un jour nouveau la personnalité de son auteur, souvent présenté à tort comme un adepte du consensus mou.

Réel atout pour certains, écueil rédhibitoire pour d’autres, ce livre est préfacé par Didier Raoult qui, d’ailleurs, une fois de plus, n’y va pas de main morte. 

  • Auteur : Philippe Douste-Blazy, Didier Raoult (Préface)
  • Editeur : Editions de l’Archipel
  • Pagination : 321 pages
  • Prix public : Livre : 20,00 € – Format ePub (e-book) : 14,99 €