Marisol Touraine : des débuts ministériels remarqués

353 – Personne n’a vraiment été surpris de l’arrivée de Marisol Touraine avenue de Ségur, ni du périmètre élargi de son ministère, qui englobe les affaires sociales, la santé, le handicap et les personnes âgées. La secrétaire nationale du PS à la solidarité et à la protection sociale n’avait pas ménagé sa peine ces derniers mois pour défendre le programme santé de François Hollande qu’elle a très largement inspiré devant la presse et les professionnels du secteur. Pas de surprise non plus lors de sa première allocution publique à Hôpital Expo. Fidèle aux engagements du nouveau Président de la République, Marisol Touraine a réaffirmé la volonté socialiste d’encadrer les dépassements d’honoraires, et par d’autres moyens que le secteur optionnel, qui n’aura vécu que le temps de la parution d’un décret au JO. Les déserts médicaux, le renforcement du parcours de soins, une meilleure coordination entre la ville et l’hôpital sont aussi des dossiers prioritaires pour elle. Côté hôpital, Marisol Touraine a confirmé la réintroduction dans la loi de la notion de « service public hospitalier » et la fi n de la convergence tarifaire entre secteur public et secteur privé.

Ses premières rencontres ont été pour les syndicats de médecins libéraux, dans l’ordre MG France, SML, FMF et CSMF. L’entrevue avec MG France s’est déroulée dans une « bonne ambiance », selon son président, Claude Leicher. Le patron de la CSMF, Michel Chassang, a parlé d’un entretien « franc et direct » et le président de la FMF, Jean- Paul Hamon, a trouvé la ministre animée d’une « volonté réelle de discuter ». Mais il est vrai que les relations sont toujours bonnes avec un nouveau ministre de tutelle ; ce n’est qu’après que généralement le climat se charge d’électricité…

La ministre a rassuré les médecins en affirmant que la suppression du secteur 2 n’était pas à l’ordre du jour. Sur l’épineux sujet des dépassements, la CSMF et le SML ont dit leur opposition à leur encadrement par spécialité et par région et, selon Michel Chassang et Christian Jeambrun, Marisol Touraine serait disposée à abandonner ce mode de régulation. Une négociation doit s’ouvrir avec l’Assurance Maladie, les représentants des médecins libéraux et les organismes d’assurance complémentaire – dont la Mutualité – sans lesquels rien ne peut aboutir. Mais Marisol Touraine a prévenu : la négociation « ne pourra excéder quelques mois ». Et « à défaut de résultat, le Gouvernement assumera ses responsabilités » lors du prochain PLFSS. Une chose est sûre, les partenaires conventionnels devront inventer un nouveau dispositif, celui du secteur optionnel étant abandonné par les socialistes, qui ont toujours douté de sa capacité à réguler sérieusement les dépassements.

Du côté de l’hospitalisation privée, le dialogue risque d’être plus rude. Les représentants du secteur ont en effet peu apprécié les déclarations de Marisol Touraine sur l’arrêt de la convergence tarifaire et les missions de l’hôpital public différentes de celles de l’hospitalisation privée. « Si ces orientations se concrétisaient, a déclaré le président de la FHF, Jean-Loup Durousset, elles constitueraient un changement important du modèle d’organisation des soins hospitaliers français qui, jusqu’alors, entendait faire travailler ensemble les secteurs public et privé. » De son côté, le président de la conférence nationale des CME de l’hospitalisation privée, Jean-Luc Baron, a fait part de la vive inquiétude des médecins de ce secteur quant à l’encadrement des dépassements et l’arrêt d la convergence. Quant à Lamine Gharbi, le président du syndicat MCO de la FHP, c’est avec moins de nuance dans ses propos qu’il a réagi : « A présent, cela va être : Hôpital, silence, on dépense ! ».

Petites phrases de campagne

En mars dernier, le CNPS avait convié les responsables santé des principaux partis politiques à s’exprimer, dont la nouvelle ministre des affaires sociales et de la santé. Morceaux choisis.

“Le système de soins français existe avec des salariés et des libéraux. Nous n’avons aucune volonté de changer cela. Si la réponse est apportée aux besoins de santé d’une population, le problème du libéral ou non ne se pose pas. Nous n’avons pas d’approche idéologique.”

“Nous ne croyons pas aux méthodes coercitives.”

“Les conventions sont des instruments utiles : tout ne passe pas par la loi. La façon dont elles peuvent fonctionner pourrait être repensée, mais la négociation conventionnelle est incontournable. Le Parlement doit intervenir parfois, et intervenir en cas d’échec de la négociation. Le politique a la légitimité d’indiquer un cap.” “Certaines ressources aujourd’hui affectées aux urgences hospitalières pourraient être employées en ville, notamment pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en ville.”

“Nous ne sommes pas opposés aux ARS, mais elles sont aujourd’hui des machines administratives peu porteuses de projets. C’est un bon instrument qui fonctionne mal et beaucoup de choses doivent être revues. Aujourd’hui, elles se sont très peu écartées de ce que faisaient les ARH alors qu’elles ont été créées pour faire s’articuler l’hôpital et la ville.”

“Il faut être très prudent sur l’instauration éventuelle d’ORDAM. Qui dit ORDAM dit péréquation : on doit être soigné partout de la même façon.”

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