Pacte de refondation des urgences : les chantiers sont ouverts

La ministre de la Santé a récemment lancé trois ateliers pour la mise en œuvre du pacte de refondation des urgences et une équipe-projet chargée de faire des propositions sur le futur Service d’Accès aux Soins (SAS) d’ici deux mois.

Dans la foulée de l’annonce du « pacte de refondation des urgences », Agnès Buzyn a lancé trois ateliers réunissant des représentants du monde de la santé pour élaborer des organisations-cadres inspirées de modèles existants. Devant une quarantaine de représentants des professionnels et des organisations du monde de la santé, la ministre a indiqué que ces trois ateliers concerneront les parcours des personnes âgées et les filières d’admission directe, la fluidité en aval des urgences « notamment par le recrutement d’équipes de gestion des lits dans les GHT », et les protocoles de coopérations infirmiers.

« Vous êtes des professionnels de terrain, c’est vous qui agissez directement, en ville comme à l’hôpital, a déclaré Agnès Buzyn ; vous agissez pour que les Français qui ont recours aux urgences voient rapidement les choses s’améliorer dans leur vécu quotidien, c’est ce qui vous est demandé dans les réunions d’aujourd’hui. »

Parce qu’ « il y a beaucoup d’initiatives de terrain » et que « ces initiatives sont toujours les plus intelligentes et les plus adaptées aux besoins locaux », la ministre ne doute pas que cette démarche pragmatique puisse permettre « de décliner de façon opérationnelle » d’ici deux mois les organisations-cadres retenues.

Chacun de ces trois ateliers rassemble une vingtaine de professionnels. Hormis des représentants institutionnels (ARS, DGOS, DGCS, HAS), leur composition est très majoritairement hospitalière : seuls le président de MG France, Jacques Battistoni, et celui du SML, Philippe Vermesch feront entendre la voix des libéraux…

Peu après le lancement de ces ateliers, Agnès Buzyn a installé l’équipe-projet chargée de la préfiguration du futur Service d’Accès aux Soins (SAS), dont la composition pour le coup, respecte la parité : deux libéraux Alain Porchasson, médecin libéral à Metz et président de l’Association départementale de permanence des soins de Moselle, Laurent Bréchat, médecin à la Maison de Santé Pluridisciplinaire d’Avoine (Indre-et-Loire), et deux hospitaliers, Patrick Goldstein, médecin chef du SAMU du Nord, et Vanessa Solviche, cadre de régulation au SAMU de Moselle et infirmière de formation.

Cette équipe mènera une concertation de deux mois auprès des professionnels de santé pour proposer les différentes organisations possibles du SAS, dont la ministre souhaite la mise en œuvre à l’été 2020. Agnès Buzyn a rappelé que le SAS devrait permettre « à toute heure du jour et de la nuit, à tous nos concitoyens, quelle que soit la distance, de pouvoir accéder à ce service qui sera branché sur leur territoire, qui connaîtra l’offre de service sur le territoire et qui va permettre de rassurer les Français, de mieux les orienter et les conseiller pour accéder à des soins urgents ». Rappelons que le financement annoncé pour le SAS est de 340 millions d’euros, soit le premier poste de dépense des 12 mesures clés du pacte de refondation des urgences.

Les clés syndicales de la réussite du SAS
Dans un communiqué commun, la CSMF, la FMF, MG France, Le Bloc et le SML, après avoir été auditionnés par cette équipe-projet, « rappellent les deux clés de la réussite » de ce SAS, dont 80 % des appels qu’il recevra « auront vocation à trouver une réponse grâce à la médecine de ville qui est le premier offreur de soins du pays avec, pour la médecine libérale, près de 300 millions d’actes par an ».

La première clé est « la réorganisation de la médecine de ville pour que des créneaux de consultation soient libérés ou ouverts aux demandes de soins non programmés ». Le SAS devra « être en mesure de proposer des rendez-vous sur ces plages dédiées ou non, selon les organisations territoriales, sous réserve de conditions à définir ». Le SAS devra donc « être administré avec une composante libérale forte », ce qui implique « une réelle gestion paritaire du service entre médecine ambulatoire et services de l’Etat ».

La deuxième clé de la réussite « est un mode d’emploi du Service d’Accès aux Soins lisible par la population » et pour la lisibilité du SAS, il importe donc qu’il soit accessible par « un numéro dédié à la continuité des soins par les médecins de ville », estiment les cinq syndicats qui plaident depuis longtemps pour la généralisation du 116 117. Il importe en outre, selon eux, que ce mode d’emploi du SAS soit « appuyé par une vaste campagne pédagogique grand public et une valorisation des actes de soins non programmés et/ou une astreinte garantie ».

Sur cette généralisation du 116 117, il n’est pas sûr que les libéraux aient gain de cause. Lors d’une récente séance de questions au gouvernement, le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur, Laurent Nunez, a annoncé que des expérimentations sur un numéro unique de secours, le 112, seraient conduites en 2020 « dans un certain nombre de départements, notamment ceux qui ont déjà lancé quelques ébauches de plateformes uniques ».

Cependant, au cabinet d’Agnès Buzyn, on souligne que le rapport de la mission interministérielle Intérieur-Santé, confiée au lieutenant-colonel des sapeurs-pompiers, Romain Moutard et au Dr Yann Penverne (SAMU Loire-Atlantique), sur la simplification des appels d’urgence n’était pas attendu avant le mois de novembre, et qu’il était par conséquent « un peu tôt pour parler d’expérimentation ».

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