Quel est le pire système de santé ?

Par Marc Villacèque
Président du Syndicat national des cardiologues

– Le système de santé français est en grande difficulté avec des professionnels de plus en plus en souffrance. Sommes-nous le seul pays dans ce cas ? Est-ce pire ou mieux ailleurs ? Revue de la littérature.

Les chiffres de l’OMS montrent que 40 % des médecins ont plus de 55 ans dans un tiers des pays d’Europe et d’Asie centrale. Elle estime qu’il manquera 15 millions de professionnels de santé dans le monde d’ici 2030. Les causes sont bien connues : vieillissement de la population, augmentation des maladies chroniques et, en parallèle, un renouvellement insuffisant des professionnels avec une capacité de formation limitée et une évolution sociologique et comportementale profonde. 

Suite à la pandémie, dans certains pays, 80 % des infirmier(e)s ont fait état de troubles psychologiques et 90 % évoquent leur intention de quitter leur emploi.

En Allemagne : 35 000 postes de professionnels sont inoccupés, alors qu’un médecin sur 5 est né à l’étranger, et qu’un tiers des aide-soignant(e)s et infirmier(e)s
dans les EHPAD et maisons de retraite sont d’origine étrangère. Au-delà des effectifs, les autorités allemandes considèrent qu’il faut maintenant 1,2 médecin pour remplir les fonctions d’un seul médecin « temps plein », salarié ou libéral, suite à l’engouement pour le temps partiel. En 2021, près d’un médecin sur trois travaillait moins de 30 heures par semaine, contre 4 % seulement en 2009 ! Pour la vice-présidente de l’Ordre fédéral allemand, « le choix du temps partiel est une tendance lourde, surtout chez les jeunes, qu’il serait illusoire de chercher à inverser, d’autant que beaucoup de médecins abandonnent la profession parce qu’ils estiment ne plus avoir assez de temps pour leur vie personnelle ».

En Angleterre : il manque 12 000 médecins (diminution des effectifs de 5 % en 7 ans) et jusqu’à 50 000 infirmier(e)s malgré les 14 % de professionnels de santé étrangers. Résultat : 6,5 millions de britanniques doivent attendre  des semaines à des mois avant de pouvoir consulter un spécialiste.

En Espagne : malgré plusieurs grèves et manifestation des professionnels de santé, selon les chiffres du ministère de la santé, 700 000 espagnols sont en attente d’une opération avec un délai moyen de 123 jours.

En Grèce : la crise économique a provoqué le départ d’environ 20 000 médecins entre 2010 et 2018, le salaire d’un médecin hospitalier reste toujours bas entre 1 200 € et 1 900 € et la densité des IDE est de 4 pour 1 000 habitants versus 11,9 pour 1 000 en France

En Italie : la société de médecine d’urgence annonce qu’il manque 4 200 urgentistes avec 45 % des services d’urgences du pays en crise.

En observant notre système de santé et les autres, comme aurait dit Talleyrand, « quand je me regarde, je me désole ; quand je me compare, je me console ». Néanmoins, en ces temps troublés par une pandémie, une inflation galopante, une crise énergétique et écologique, je préfère partager avec vous cette citation de Prévert :
« il faudrait essayer d’être heureux, ne serait-ce que pour donner l’exemple ». 

Bon courage à tous.

© Katarzyna Bialasiewicz

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