Qui est le plus riche du monde ?

Poutine ou Musk ?
Le prédateur ou le bonimenteur ?

Le classement des personnes les plus riches du monde en 2024 (1) indique qu’Elon Musk est encore premier, devançant Jeff Bezos de 2 milliards de dollars et Bernard Arnault de 5 milliards de dollars. Ce classement comporte cependant plusieurs oublis, dont l’un est de taille, Vladimir Poutine. Une bande dessinée retrace le parcours de Poutine et la méthode qu’il a utilisée pour se constituer ce qui pourrait être la première fortune au monde. Coïncidence, un autre livre révèle aussi la façon d’agir, ou plutôt certains aspects de la personnalité d’Elon Musk.

LA FORTUNE DE POUTINE

Evidemment, on ne sait pas et on ne peut pas savoir quelle est la fortune réelle de Vladimir Poutine. Les estimations variant de 75 à plus de 200 milliards de dollars, tout indique que cette fortune est considérable. Ainsi, Poutine pourrait bien être l’homme le plus riche du monde, ce d’autant que sa fortune serait en cash et non pas extrapolée à partir de participations dans des entreprises, ce qui la ferait dépendre de la capitalisation de celles-ci.
S’il est difficile d’en connaître l’ampleur, c’est que cette fortune est dissimulée dans un enchevêtrement de sociétés, derrière des prête-noms et dans divers paradis fiscaux avec la complicité de nombreuses banques de par le monde, notamment des banques des pays occidentaux… Un aperçu de ces montages a été fourni par l’analyse des Panama Papers, révélant un des prête-noms de Poutine mais aussi par diverses enquêtes, parfois officielles mais aussi conduites par des journalistes d’investigation.

Un entourage de prête-noms

L’enquête des Panama Papers a ainsi révélé qu’un ami intime de Vladimir Poutine, Sergueï Roldougine, violoncelliste, dont les revenus sont a priori modestes et qui déclarait ne posséder qu’un appartement, une voiture et une datcha, était crédité d’une fortune d’au moins 2 milliards de dollars dans au moins sept sociétés offshore gérées par le cabinet panaméen Monseck Fonseca, toutes sociétés alimentée par la banque Rossia.
C’est la divulgation des fichiers du groupe Monseck Fonseca qui fut à l’origine des Panama Papers.
Toutes les données disponibles par diverses enquêtes et divers livres d’investigation, sont donc synthétisées dans cette bande dessinée, dont le scénario est de Yvonnick Denoël, et les dessins de Gildas Java. Ils racontent comment a été constituée cette fortune débutée lorsque Vladimir Poutine, à la demande du KGB devenu FSB, a accédé au poste d’adjoint au maire de Saint-Petersbourg. Corruption à large échelle, alliance avec les mafias portuaires, détournements de fonds, meurtres… diffusion à la télévision d’une vidéo montrant le juge en charge d’une enquête sur la corruption à Saint-Petersbourg en « charmante compagnie » conduisant à une annulation du dossier… tout un catalogue rendant compte du caractère prédateur de Vladimir Poutine, de son entourage et du système mis en place, véritable cleptocratie.
Tout est clairement expliqué dans la postface : « Cette histoire est celle de la fusion entre un système KGB qui a survécu à la chute du communisme et un système mafieux qui a perduré sous tous les régimes. Ensemble, ils ont mené en Russie une entreprise de prédation économique sans précédent, avec de nombreuses complicités à l’Ouest. Les anciens du KGB ont adopté le capitalisme comme un moyen de prendre une revanche sur l’histoire. Leur obsession : accumuler du cash pour régner et vivre dans le luxe, mais surtout corrompre et déstabiliser les pays européens ».
Les dessins sont particuliers, sombres, caricaturaux, cet aspect majeur de l’histoire russe des trente dernières années est résumé en une centaine de pages, renforçant l’aspect caricatural du fait des raccourcis utilisés, mais le tout est documenté par de nombreuses sources concordantes et permet de comprendre clairement et simplement comment un système prédateur s’est mis en place pour servir des intérêts personnels et une idéologie, celle de la prédation.

 

ELON MUSK, LE BONIMENTEUR

Revers de la biographie récente de Walter Isaacson, plutôt élogieuse envers Elon Musk, celle publiée cette année par Boris Manenti est sans concession sur l’inconsistance, la vantardise et le délire d’un homme officiellement crédité d’être le plus riche du monde via les participations qu’il a dans les diverses sociétés qu’il dirige comme Space X et Tesla.
Pour Boris Manenti, Musk a construit une partie de l’histoire contée dans ses biographies : il ne s’est pas fait seul et contre un père qui ne l’aurait pas ou peu aidé, mais grâce à l’apport financier initial de celui-ci, il n’a que peu d’idées propres, hormis ses obsessions de conquête de la planète Mars et son idéologie libertarienne de plus en plus assumée, mais a largement repris les idées des autres faisant de lui un faux visionnaire.
Et d’ailleurs, tous les chapitres de cette biographie sont dénommés par un substantif auquel est accolé l’adjectif faux : faux persécuté, faux visionnaire, faux politique, faux écologiste, faux magnat… il n’y a qu’à puiser pour se faire une idée un peu plus équilibrée du personnages que celle qu’il tente de faire diffuser.
Un exemple parmi de nombreux autres. Elon Musk déclare « Je suis pro-environnement, mais je suis partisan de résoudre les problèmes avec de meilleurs produits, plutôt que par la privation ». Il est tentant de penser que la création d’une voiture électrique est une solution aux problèmes du réchauffement climatique et que Musk est un visionnaire humaniste… Mais n’est-ce pas plutôt un homme d’affaires pour lequel l’environnement n’est qu’un prétexte et la voiture électrique un moyen de bousculer un marché sur lequel il est difficile de concurrencer les « majors » ?

Musk l’écolo

Alors, quel est l’apport ou plutôt la vision de Musk en matière de résolution des problèmes écologiques ? C’est simple « Rien qu’en 2022, d’après les données recueillies par Jack Sweeney, il a émis 1,9 milliard de tonnes de CO2, soit une pollution plus de trois fois plus importante que celle de toute la France ! Rien qu’avec les cent trente quatre vols de son jet, il pèse sur les émissions de gaz à effet de serre deux cent treize fois plus qu’un français moyen. Il faut dire qu’Elon Musk est tellement accro à son avion qu’il n’hésite pas à l’utiliser pour des sauts de puce ridicules, à l’image, le 28 décembre 2022, d’un vol de 16 minutes pour relier les aéroports de Los Angeles et de Long Beach, distants de 34 kilomètres – un trajet qui dure une vingtaine de minutes en voiture ». Et pourtant il existe une importante flotte de voitures électriques dans cette région, en location ou en voiture avec chauffeur…
Le « visionnaire » Musk n’a pas eu l’idée de coloniser Mars (si tant est que cela constitue une solution au réchauffement climatique) mais elle lui a été inspirée par la lecture de livres de Science-fiction et par la fréquentation d’un « évangéliste », celui d’une « Mars Society », Robert Zubrin.
Dans l’objectif de conquérir la planète Mars, la société Space X, devait au départ utiliser des missiles balistiques intercontinentaux russes, mais leurs possesseurs ont traité le « génie » comme un illuminé, et Musk a dû se résoudre à construire des fusées.
Et sa société Space X vit pour grande partie des commandes d’une autre de ses sociétés, Starlink, fournisseur d’accès à internet par satellite, mais aussi sur des fonds de la NASA et de l’armée de l’air américaine. La société Tesla n’a pas été imaginée et créée par Musk, mais par un entrepreneur, Martin Eberhard et un ingénieur, Marc Trapenning. L’avantage de Musk a été de flairer la bonne affaire et de pouvoir répondre à un appel de fonds de 6,5 millions de dollars, et en l’abondant de 6,35 millions de dollars cela l’a propulsé « Président » de la société.
Ce sont ces divers éléments et bien d’autres encore que l’on apprend, découvre ou confirme en lisant cette biographie, constituant le revers d’une médaille d’un être revendiquant le statut d’autiste de génie, l’autisme étant censé excuser ses « dérapages ».

(1) fr.statista.com/statistiques/660183/milliardaires-les-plus-riches-monde/

EN SAVOIR PLUS…

 

Auteurs : scénario de Yvonnick Denoël
et dessins de Gildas Java
Editeur : Nouveau Monde
Parution : mai 2024
Pagination : 128
Prix broché : 22,90 euros

 

 

 

Auteur : Boris Manenti
Editeur : Editions du Rocher
Parution : mai 2024
Pagination : 256
Prix broché : 18,90 euros
Prix Numérique : 13,99 euros

 

 

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