Recertification des médecins, restons simples !

La ministre de la Santé a confié au Pr Serge Uzan une mission sur la conception d’un dispositif sur la recertification des médecins dont les conclusions sont attendues en septembre.

Portée par la Grande Conférence de Santé de 2016 et par le CNOM, mieux acceptée par les centrales syndicales que dans un passé récent, la recertification ne va pas pour autant soulever l’enthousiasme des médecins ! Et pour cause, après un long cycle d’études qui les conduit à un haut niveau de compétence, ils sont déontologiquement soumis à une obligation de formation à laquelle ils adhérent, bien conscients que les connaissances acquises pendant les études doivent être actualisées au fur et à mesure de leur carrière. Combien de cardiologues sont-ils restés au stéthoscope avec l’arrivée de l’échographie ? Ne tombons pas dans le mythe du médecin qui jamais ne se forme en trente ans de carrière.

En outre, les exemples étrangers nous montrent qu’aucun système de certification n’est le gage d’une médecine de qualité. Sans aller jusqu’à la caricature de ce médecin anglais « serial-killer » dans l’exercice même de sa profession et que le système britannique n’a pu démasquer, la recertification se heurte partout soit à la grogne voire au refus des médecins, soit aux difficultés d’identifier les bons critères dans un métier qui évolue de plus en plus vers un travail en équipe pluriprofessionnelle. 

Pour autant, on peut comprendre la demande de transparence de la société et, pour reprendre la lettre de mission de la ministre, le besoin du maintien d’un haut niveau de compétence pour les médecins et du renforcement de la qualité et de la sécurité des soins.  Il faut aussi craindre l’apparition ou le développement de notes ou classements sauvages des médecins qui feront les choux gras de la presse ou des réseaux sociaux à l’instar de ce qui se passe pour les établissements de santé.

La recertification ne pourra être acceptée par les médecins que s’il s’agit d’un mécanisme simple, non chronophage, ne faisant qu’officialiser l’existant. Elle doit tenir compte de l’inscription au Conseil de l’Ordre, des diplômes obtenus, du suivi d’actions de formation continue, d’évaluation des pratiques professionnelles et de DPC. Encore faudrait-il pour ce dernier arriver à un système pérenne dans ses modalités et son financement, ce qui n’est toujours pas le cas depuis les lois Teulade de 1993 !

La recertification doit être gérée par la profession pour en garantir la qualité et l’indépendance. Elle doit se traduire pour le médecin par une valorisation de son exercice et une évolution de carrière.

L’adhésion des médecins, la qualité de l’information portée à la population passent par le respect de ces grands principes et espérons que le législateur ait la sagesse de ne pas inventer une usine à gaz qui aboutirait à un fiasco de plus.

Le monde évolue et la médecine avec lui. Mais il n’est pas sûr que la société ait beaucoup à gagner de l’abandon du lien de confiance pour celui de la suspicion dans la relation patient médecin. 

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