Recherche sur le net – l’heure des données a sonné

La protection des données personnelles dans la zone euro est devenue un sujet bien sensible depuis l’apparition du RGPD (1). Une réelle prise de conscience s’est opérée ces dernières semaines auprès des utilisateurs (nous le savons bien avec les demandes que nous avons eues sur lecardiologue.com), mais qu’en est-il réellement de leurs utilisations dans les moteurs de recherche ? L’écrasante domination de Google n’arrange pas le traitement des données, même si des challengers commencent à fourbir leurs armes, notamment le français Qwant, soutenu par la Banque Européenne d’Investissement (BEI).

Google : le mastodonte

Google, c’est tout d’abord 90 % des recherches mondiales, autant dire quasiment tout. Ecorné par plusieurs scandales (notamment le projet Maven [2]), qui visent également les GAFAM en général, Google applique, tout comme Facebook, l’adage on ne peut plus clair : « Gratuit c’est, produit tu es ». L’activité de l’utilisateur sur le web est non seulement fichée, mais également classée et répertoriée afin de cibler les résultats et les annonces publicitaires. 

Le fichage, nerf de la guerre

Ce fichage publicitaire atteint des proportions qui dépasse la recherche web pour s’immiscer dans tous les produits de la marque : Gmail, Google Maps, calendrier, sites web… Toutes les données sont ainsi dispersées dans les intérêts de la régie publicitaire de Google. Vous avez sûrement dû remarquer à quel point cette invasion est devenue une épidémie (jusqu’à sept annonces par page de résultats), à tel point qu’il est devenu difficile de distinguer les résultats naturels de la recherche.

L’efficacité, la pierre angulaire

Malgré tout, Google reste le moteur de recherche le plus populaire. Sa pertinence des résultats, grâce aux algorithmes du moteur de recherche utilisant un module d’intelligence artificielle, est particulièrement efficace. Le catalogue d’indexation des pages est également le plus vaste. Souvent, la réponse que vous cherchez se trouve dans la première page de résultat. Quant à l’autosuggestion, c’est un modèle du genre.

Enfin, l’interface de Google a relativement peu dévié depuis ses débuts : le moteur de recherche reste fidèle à un design minimaliste qui a fait école.

Qwant : l’ANti-google

Peut-on vivre sans la suprématie américaine sur le net ? Oui, c’est possible. Qwant en est une bonne illustration. Depuis plus de cinq ans, la start-up française Qwant essaie de prouver qu’un moteur de recherche peut être efficace et rentable tout en respectant la vie privée et l’anonymat des utilisateurs. 

Un air de liberté

En effet, le moteur de recherche ne traque pas ses utilisateurs avec des cookies, ne collecte aucune donnée personnelle de navigation ou de localisation et n’effectue aucun profilage. Le code source a d’ailleurs été mis à disposition de la CNIL pour prouver les bonnes intentions de ses concepteurs. Si la publicité est présente, elle est sans ciblage des utilisateurs. Nous avons fait le test sur des recherches identiques entre Google et Qwant et le résultat est bluffant. Un peu comme si l’on retrouvait un air de liberté…

Encouragée par la Banque Européenne d’Investissement qui a financé le projet à hauteur de 25 millions d’euros, Qwant est un moteur de recherche aussi européen qu’ambitieux. Il surfe sur le rejet du moteur de recherche américain en faisant de la protection des données privées son étendard. Jusqu’à mars dernier, sa croissance était de 20 % par mois, mais l’affaire Cambridge Analytica passant par là, la valse des chiffres a pris une autre tournure avec une augmentation de près de 20 %… par jour.

Les utilisateurs avant tout

Qwant se décline en trois versions : Qwant, Qwant Lite (destiné aux anciens navigateurs et connexions à faible débit) et Qwant Kids (pour les 3-12 ans). Vous pouvez même choisir une langue régionale directement dans votre navigateur (Corsu, Brezhoneg, Català, Euskara).

et les autres ?

Il existe bien d’autres moteurs de recherche, notamment DuckDuckGo, le site au canard anti-fichage, Bing, le concurrent propulsé par Microsoft et titillant Google quant au niveau de la qualité de ses résultats, Lilo, le moteur de recherche qui la joue collectif en finançant des projets de développement et de solidarité et Ecosia, solidaire comme Lilo, mais qui se charge de « planter des arbres pour vous ».
Pascal Wolff

(1) Règlement Générale sur la Protection des Données.

(2) Maven est le nom de code de l’un des projets du département de la défense américaine qui consiste à utiliser l’IA et le « deep learning » pour permettre aux drones militaires de reconnaître les images qu’ils filment. Ce projet nécessite donc de grandes compétences dans le domaine de la « vision par ordinateur » – domaine d’excellence de Google.