Sale temps pour les honoraires libres !

318 – Ce texte modifie donc le fond de l’article L162-1-4, que les médecins méconnaissent à tort car c’est celui qui régit l’ensemble des cas où un Directeur de Caisse peut leur infliger une amende. Observons donc la nouvelle définition réglementaire du « tact et mesure ». Il s’apprécie, nous dit le troisième paragraphe de l’article 1 : « Au regard de la prise en compte dans la fixation des honoraires de la situation financière de l’assuré, de la notoriété du praticien, de la complexité de l’acte réalisé et du temps consacré, du service rendu au patient ainsi – grande nouveauté ! – que du pourcentage d’actes avec dépassement et du montant moyen de dépassement pratiqués, pour une activité comparable par les professionnels de santé exerçant dans le même département ».

Cette définition ne déroge pas, dans sa première partie à l’article 53 et à ses commentaires ordinaux, du Code de déontologie médicale. L’un et l’autre parlaient de « situation de fortune du malade et éventuellement de circonstances particulières », « de la nature, de la durée et de l’importance de l’acte médical, mais également des possibilités de soins et des conditions économiques ». Les commentaires faisaient explicitement référence à la densité médicale sous la nuance suivante : « lorsque l’offre de soins est raréfiée dans un secteur donné, voire s’impose sans choix alternatif ».

Mais jamais, jusqu’à présent, aucun texte législatif ou réglementaire ne faisait de référence aux pratiques « moyennes » du même département… Ce qui n’ira pas sans difficulté d’interprétation là où les praticiens du secteur 2 sont si peu nombreux que leur tarification « moyenne » perd toute signification statistique.

C’est un problème comme est un problème le fait que le Directeur de la CPAM puisse, avant de sévir, s’affranchir de toute autre avis préalable que celui d’une commission issue de son propre Conseil d’administration. Mais ni l’instance locale de l’Ordre, ni même la Commission conventionnelle paritaire ne sont censées donner d’avis.

Ce pouvoir exorbitant abandonné au Directeur de Caisse n’est pas franchement une nouveauté ; il était connu depuis septembre dernier quand le ministère avait organisé la « concertation » sur ce dispositif. Le SML, notamment, avait refusé de s’y rendre au motif que le principe et les modalités de ces pénalités unilatérales venaient en contradiction avec la climat d’apaisement entretenu à l’époque par le Gouvernement. Il affirmait qu’il prendrait pour une « provocation » la publication du décret dans les termes prévus… Ceux-là mêmes qui sont employés aujourd’hui. A l’heure de mettre ce numéro sous presse les autres centrales n’avaient pas (encore) réagi.

Cette mesure radicale – humiliante pour les médecins – doit évidemment être rapprochée de deux autres dispositions mises en oeuvre en début d’année : – une mesure de « transparence » de la Caisse qui, depuis le 7 janvier, met à disposition de ses affiliés – sur une « hot-line » téléphonique aussi bien que sur son internet (http://www.ameli.fr) – les tarifs « moyens » des praticiens, aussi bien pour leurs consultations que désormais, pour les actes techniques les plus souvent pratiqués ; – une autre mesure, beaucoup plus humiliante encore, obligeant les mêmes praticiens du secteur 2 à une « information préalable écrite » (le mot de « devis » a été banni mais le sens est le même) pour tout acte dépassant, a priori, 70 €… Ce qui recouvre sensiblement toute la nomenclature des actes techniques. On notera que la CNAM qui aurait du livrer des informations pratiques sur la faisabilité de ce dernier dispositif avant le 1er février, date de son opposabilité, n’a toujours pas communiqué à son propos…

Il n’empêche qu’en quelques semaines – et la concomitance de ces annonces n’est sans doute pas fortuite – la liberté des honoraires a vu son exercice écorné comme jamais. Sans que quiconque puisse accuser d’autre fautif que le Gouvernement. Que restera-t-il à négocier aux interlocuteurs conventionnels ?

|Une lettre-type suggérée par le Conseil de l’Ordre| |Pour faire face à cette nouvelle obligation en vigueur au 1er février, le Conseil National de l’Ordre suggère aux médecins concernés la lettre-type que vous trouverez à télécharger ci-dessous. Pour l’application de cette disposition, on se reportera utilement au communiqué publié par l’institution le 20 janvier dernier.