Secteur optionnel : les trois partenaires partagent la volonté d’aboutir avant mars

L’affaire du secteur optionnel est une vieille rengaine de la discussion conventionnelle. Il s’agit de créer, entre les actuels deux secteurs d’exercice, un espace ménageant à la fois les impératifs sociaux d’une certaine opposabilité tarifaire et l’aspiration des professionnels à un « espace de liberté ». La possibilité abandonnée aux spécialistes de secteur 1 de coter un dépassement légal en cas de dérogation du patient aux exigences du parcours a assez bien démontré la difficulté d’user pourtant de cette possibilité. Il n’empêche – question de principe – que la persistance du double secteur a attisé les ressentiments, notamment depuis que le blocage des honoraires en secteur 1 dix ans durant a accentué le différentiel de revenus.

Le conflit a été mis en exergue jusqu’à la caricature par les chirurgiens il y a deux ans et, même si les interférences sont nombreuses dans cette spécialité, tout le monde s’accorde à leur chercher une issue. Les progrès de la négociation sont, à cette heure, aussi ténus qu’indéniables, la menace d’intervention ministérielle, récemment confirmée sur le fond et la forme par le Conseil constitutionnel, n’y est sans doute pas pour rien. Ã la veille d’échéances politiques majeures, les trois partenaires se font comme un défi partagé de démontrer les vertus de la cogestion des problèmes. Chacun semble avoir fait un pas qui, même tacite, déverrouille la discussion.

Les syndicats médicaux, UMESPE en tête, qui, il y a peu encore, juraient leurs grands dieux qu’ils ne signeraient jamais un accord spécifique aux chirurgiens, conviennent aujourd’hui qu’ils sont sans doute prioritaires et, parmi eux, tous ceux qui « coincés en secteur 1 » peuvent se prévaloir du titre d’ancien chef de clinique assistant. Ceuxlà sont assez largement majoritaires en chirurgie, minoritaire dans les autres spécialités…, les apparences seraient donc sauves.

Réciproquement, les exigences des mutuelles et autres assureurs complémentaires, quant à la fermeture définitive du secteur 2 en contrepartie du secteur optionnel, se sont adoucies… Et c’est au moment précis où se dessinait ce possible consensus que la CSMF a choisi d’avancer la jurisprudence tarifaire de l’option conventionnelle : 30 % des actes au tarif opposable et des dépassements plafonnés (mais remboursables) à 15/20 %. Une idée qui, semble-t-il, ne fait fuir personne. Le chemin à parcourir est encore considérable, imputé pour partie à la Caisse nationale qui devra, à son tour, engager sa signature sur une plus grande participation aux cotisations sociales des optants. Comme chaque fois qu’il s’agit d’avantages sociaux à consentir aux médecins, la sensibilité des partenaires sociaux représentés au Conseil de l’UNCAM sera mise à l’épreuve mais, enfin, la CFDT à la tête de cette institution aurait sans doute des difficultés à assumer l’échec de cette négociation.

Voilà pour la première étape, le reste – et notamment les garanties de qualité qu’exigeront les complémentaires pour solvabiliser les dépassements – relève du subsidiaire. La Mutualité nourrit, sur le sujet, son vaste projet de « parcours de soins mutualiste » mais n’est, de toute évidence, pas prête à avancer sur ce terrain. Les syndicats médicaux peuvent également se montrer maximalistes en exigeant un calendrier où serait prévue, d’emblée, l’ouverture aux « non-ex CCA ».

En tout état de cause, pour Jean-François REY, le compromis social des parties signataire sera préférable à une intervention de l’État.

Dans cette affaire, les partenaires cultivent tout aussi bien leur crédibilité que leur légitimité. ❚

Jean-Pol Durand

|Remboursement des dépassements : _ ce que disent les organismes complémentaires| |Le monde de la protection complémentaire est assez divers. On connaît d’ordinaire les Mutuelles (qui détiennent 54 % du marché), on connaît les assureurs privés qui en représentent le quart. On connaît moins les Institutions Paritaires (IP) qui, venues de la prévoyance collective paritaire en entreprise, sont aujourd’hui les acteurs les plus dynamiques de ce marché. _ On n’avait, en revanche, qu’une piètre connaissance de la nature des contrats qui les lient à leurs assurés. Rappelons au passage que 85 % de la population disposent d’une mutuelle, dans le cadre individuel ou collectif d’entreprise, et que les 15 % restant se divisent précisément entre titulaires d’un contrat CMU et personnes non-couvertes ! Le chiffre n’est pas mince puisqu’un français sur quinze n’a aujourd’hui aucune assurance complémentaire. _ Beaucoup moins analysée ensuite, la nature des contrats révèle quelques surprises majeures : – 4 personnes couvertes sur 10 ont un contrat qui ne prévoit pas de remboursement de dépassements ; – 2 personnes sur 10 sont couvertes pour des dépassements inférieurs à 120 % du tarif opposable ; – 2 % seulement des contrats individuels garantissent des remboursements à 160 %. _ L’inflation des dépassements corroborée ces dernières années par l’ensemble des sources statistiques impacte donc directement sur les patients eux-mêmes. Ã en croire l’UNOCAM (Union des Organismes de protection complémentaire), deux tiers des dépassements resteraient définitivement à la charge des patients. Les mêmes intervenants du milieu, toutes « obédiences » confondues, conviennent qu’elles ont, ces dernières années, amorcé un recul simultané dans la couverture des dépassements à l’intiative, affirment-elles en choeur, des entreprises qui financent l’essentiel des contrats collectifs. Tout le problème est de savoir si ce mouvement a été concerté entre concurrents… Mais le résultat est le même : les trois familles de complémentaires opposent un front parfaitement univoque aux revendications médicales.|