Tarifs hospitaliers : on dégraisse !

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Dans un esprit de solidarité, les établissements qui produisent plus redonnent à ceux qui n’ont pas une activité suffisante. Dans un esprit financier, le Gouvernement vise une économie de 55 millions d’euros… © Olly

367 – Pour réguler les « effets inflationnistes » de la T2A, le PLFSS 2014 instaure un mécanisme de dégressivité des tarifs hospitaliers au-delà d’un certain volume d’activité pour une prestation ou un ensemble de prestation. Le Gouvernement  en attend 55 millions d’économies l’année prochaines. Les fédérations hospitalières dénoncent une mesure « inappropriée et dangereuse ».

Le PLFSS 2014 adopté définitivement par le Parlement le 3 décembre dernier comporte en son article 41 une réforme de la T2A en instaurant un mécanisme de dégressivité des tarifs hospitaliers en cas de trop fort volume. L’article prévoit que lorsque le taux d’évolution ou le volume d’activité d’une prestation ou d’un ensemble de prestations d’hospitalisation d’un établissement de santé est supérieur à un certain seuil, les tarifs nationaux applicables à cette prestation ou ensemble de prestations « sont minorés par la part d’activité réalisée au-delà de ce seuil par l’établissement ». C’est un décret en Conseil d’Etat qui fixera les modalités d’application du dispositif, « notamment les critères pris en compte pour fixer les seuils, les modalités de mesure de l’activité et de minoration des tarifs ainsi que les conditions de mise en œuvre des minorations après constatation du dépassement des seuils ». 

L’article a fait l’objet d’une longue discussion à l’Assemblée nationale, la mesure ne faisant pas l’unanimité, comme on s’en doute. Le député UMP du Loiret, Jean-Pierre Door, a notamment jugé « incohérent de pénaliser par la dégressivité des tarifs un établissement dynamique uniquement parce qu’il serait le seul à réaliser telle ou telle activité de soins ». Plusieurs amendements de l’UDI et de l’UMP qui visaient la suppression de l’article ont été rejetés. Tout comme ceux présentés par le Front de Gauche et qui visaient à intégrer des critères de pertinence des actes dans la décision d’appliquer une dégressivité des tarifs.
Marisol Touraine en a justifié le refus en arguant du fait que des travaux sont en cours qui portent précisément sur la définition de critères de pertinence des actes. En revanche, « la mesure de l’activité tient compte des situations de création ou de regroupement d’activités », précise l’article 41 du PLFSS adopté. Une nuance apportée par un amendement présenté par Christian Paul (PS, Nièvre), rapporteur du PLFSS pour l’Assurance Maladie, « pour ne pas pénaliser les créations ou les regroupements d’activités qui, par leur nature même, ont automatiquement pour effet de conduire à un dépassement des seuils ».

Une vive opposition

Cette mesure a rencontré une vive opposition de la plupart des fédérations hospitalières. Outre la Fédération des Etablissements Hospitaliers et d’Aide à la personne Privés non lucratifs (FEHAP) et UNICANCER, la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) s’y est montrée particulièrement hostile. Faisant référence au coefficient prudentiel et aux CPOM, son président, Jean-Loup Durousset, a dénoncé l’inutilité de ce dispositif s’ajoutant à la régulation nationale et régionale et qui pourrait, en outre, s’avérer « contre productif en matière de santé publique ». Par ailleurs, les trois fédérations ont dénoncé le fonctionnement du Comité de réforme de la T2A et affirment que, contrairement aux dires du Gouvernement , le projet de dégressivité des tarifs hospitaliers n’est pas issu de ce comité au sein duquel il n’a jamais été débattu.

La Fédération de l’Hospitalisation Publique favorable

Seule la Fédération de l’Hospitalisation Publique s’est déclarée favorable à ce principe de dégressivité. Pour son délégué général, Gérard Vincent, « il n’est pas anormal » dans le cadre d’un ONDAM contraint que, dans un esprit de solidarité, les établissements qui produisent plus redonnent un peu de la plus-value tirée de leur activité, « au-delà d’un certain volume, quand les charges fixes sont couvertes », à ceux qui n’ont pas une activité suffisante.
Mais s’il est d’accord sur ce principe de solidarité, Gérard Vincent refuse que la dégressivité serve à « faire des économies par rapport à l’ONDAM qui a été voté au Parlement ». C’est pourtant bien pour cela que le Gouvernement  a décidé la mise en place de la dégressivité tarifaire ! Il table sur une économie de 55 millions d’euros en 2014, dans l’hypothèse d’une inflexion progressive de la tendance en cinq ans à 2 %, selon les annexes du PLFSS.