Vers un consensus international sur la définition de la mort cérébrale

Medscape – Comment faire accepter dans le monde entier la notion de mort cérébrale et ses conséquences ? Un premier pas avec une définition unanimement acceptée peut permettre de faire évoluer les systèmes législatifs.

Avec le soutien de 35 sociétés savantes de réanimation et de neurochirurgie

Alors que le concept de mort cérébrale a vu le jour à la fin des années 1960, formalisant la notion de coma dépassé décrit pour la première fois en 1959, il n’existait pas jusqu’à la publication de l’équipe du Dr Gene Sung (Los Angeles, Etats-Unis) de définition internationalement admise. Il faut dire qu’outre la spécificité clinique et para-clinique de cet état, la mort cérébrale fait l’objet de débats juridique et religieux véhiculant des idées parfois fausses sur l’une des questions les plus controversées eet fondamentales de la médecine.

L’article, publié récemment dans le Journal of the American Medical Association (JAMA), expose les normes cliniques minimales de mort cérébrale chez les adultes et les enfants, assorties de directives claires répondant à différentes situations cliniques [1]. Fondé sur une analyse documentaire approfondie et la contribution d’experts multidisciplinaires internationaux, ce travail a reçu le soutien de 35 sociétés savantes de réanimation et de neurochirurgie. Cette réflexion peut servir à élaborer des lois qui ne seront jamais identiques selon le pays, puisque les bases législatives, qui ont pour finalité de défendre les citoyens, diffèrent avec la tradition, la jurisprudence, les lois fondamentales, le pouvoir législatif…

Les auteurs insistent avant tout – en raison des conséquences possibles du diagnostic – sur la nécessité de reconnaître un état clinique possible de mort cérébrale. D’une part, il est essentiel d’analyser l’histoire clinique, l’étiologie et d’éliminer des états qui peuvent mimer un état de mort cérébral (hypothermie, hypotension, utilisation de certains médicaments..). Lorsqu’ils sont réalisables (dans les pays qui disposent d’un équipement suffisant, des examens de neuro-imagerie (mettant en évidence une hypertension intracrânienne, un œdème cérébral ou une déviation des structures médianes) ou une mesure de la pression intracrânienne (PIC équivalente ou supérieure à la pression artérielle moyenne PAM) doivent être proposés.

Apprécier les réflexes neurologiques indispensables à la vie

Après un délai variable (d’au moins 24 h en cas d’anoxie cérébrale), il faut réaliser une série de tests cliniques destinés à apprécier les réflexes neurologiques indispensables à la vie et qui démontrent l’existence d’un coma, d’une aréflexie du tronc cérébral et d’une non-réponse à l’apnée :

  • Absence de preuves d’éveil ou de reprise de conscience après application d’une stimulation externe maximale (nociceptive, visuelle ou auditive) ;
  • Pupilles intermédiaires ou en mydriase aréactives à la lumière ;
  • Absence de réflexes cornéens, occulo-céphalogyres et occulo-vestibulaires ;
  • Absence de mouvements à la stimulation douloureuse du nerf facial ;
  • Absence de réflexe de bâillement à la stimulation pharyngée postérieure bilatérale ;
  • Absence de reflexe de toux à l’aspiration trachéale profonde ;
  • Absence de reflexe moteur à la stimulation douloureuse des extrémités des membres ;
  • Pas de reflexe de respiration aux tests d’apnée (pH < 7,30 et PaCO2 > 60 mmHg).

En l’absence de possibilité de tester tous les signes cliniques de mort cérébrale, il est aussi possible de pratiquer des mesures du débit sanguin cérébral (artériographie, angiographie avec utilisation de radio-nucléotides scintigraphie de perfusion, doppler transcrânien, angiographie numérisée, IRM injectée) ou des tests électrophysiologiques (EEG, potentiels évoqués somesthétiques, potentiels évoqués auditifs ou visuels).

Un chapitre détaillant les spécificités de la mort cérébrale des patients sous ECMO complète le travail d’analyse de la littérature.

Identifier un cadre commun minimal

L’existence de critères stricts de la mort cérébrale ne garantissent pas une transposition uniciste dans les différents cadres légaux. La loi, les règlements ne vont pas de soi : ils sont le fruit d’une évolution historique et de conditions sociales particulières. A l’échelle mondiale, on comprend que les variations culturelles, les sources juridiques d’origines différentes, rendent difficile une unification dans la législation. Tout l’enjeu de cette réflexion est donc d’identifier un cadre commun minimal à partir duquel, dans un premier temps, il sera possible de poser des principales applicables sans conflits et, dans un deuxième temps, de proposer un droit commun indiscutable.

[1] Greer D, Shernie S, Lewis A et coll. Determination of Brain Death/Death by Neurologic Criteria The World Brain Death Project. JAMA. doi:10.1001/jama.2020.11586

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