FMC conventionnelle : deux poids, deux mesures ?

Alors que le dispositif réglementaire de la FMC obligatoire se met lentement en place, les promoteurs de FMC « traditionnelle » préparent, à l’instar de l’UFCV, leur plan d’action 2007. Deux sources de financement sont généralement mobilisées : – l’industrie pharmaceutique d’une part, désormais tenue au respect d’un code de bonne conduite signé avec le gouvernement et garantissant l’indépendance des promoteurs de formation. Son contenu n’est pas encore public mais ne suscite aucune inquiétude à l’UFCV déjà dotée d’une telle charte éthique et… d’une culture d’indépendance scientifique ; – les fonds de l’OGC (Organisme Gestionnaire Conventionnel) qui, dans le cadre de la FPC (Formation Professionnelle Conventionnelle), finance la formation indemnisée par l’assurance maladie. On se souvient que les spécialistes avaient eu accès à cette filière financière au lendemain de la signature de la Convention par la CSMF, Alliance et le SML. En 2005, 85 sessions avaient pu être organisées en moins de 4 mois mais avec succès puisque fréquentées par 1.222 praticiens différents. Pour 2006, le bilan ne sera connu qu’en cours d’année prochaine. _ Mais l’OGC – qui a donc la responsabilité d’organiser l’attribution des fonds – vient d’achever la procédure d’appel d’offres-2007, dont il a récemment présenté les grandes orientations. Or que constate-t-on ?

1. la répartition des budgets prévisionnels avantage considérablement les généralistes, dotés de la moitié (50 %) des autorisations de crédits, les spécialistes ne bénéficiant que de 11 % de l’enveloppe, le reste (39 %) allant à des associations « mixtes » (c’est-àdire comportant 30 % d’élus spécialistes au conseil d’administration) ;

2. à observer le détail des attributions, on constate que cinq associations nationales seulement dépassent le million d’euros d’autorisation de crédits : dans l’ordre alphabétique, l’ACFM (2 M€), l’AFML (4 M€), le Collège des Généralistes enseignants (1,5 M€), fmc- Action (2M€), Forcomed (1,3M€), le GEMA (2,8M€), MG-Form (près de 6 M€), la Société de formation thérapeutique du généraliste (1,5M€), l’UNAFORMEC (2,5 M€). Ã titre de comparaison, l’UFCV recoit 850.000 € ;

3. l’association MG-Form, liée au syndicat MG-France (non signataire de la convention), truste avec ses différentes filiales régionales 8,7 M€, soit… le double de toutes les associations réunies consacrées à la formation continue spécifique des spécialistes. Tout se passe comme si le besoin de formation conventionnelle devait privilégier les généralistes au motif qu’ils se retrouvent en première ligne de la maîtrise. _ Les organisations de spécialistes n’ont pas voulu laisser passer cette iniquité sans réagir. Jean-François REY, président de l’UMESPE (Union des Spécialistes de la CSMF) s’est récemment ému de la situation auprès de Frédéric VAN ROEKEGHEM, directeur de la CNAM. _ Il invoque deux arguments : – d’une part le scandaleux déséquilibre comptable qui ne laisse qu’un peu plus de 10 % des subsides à des actions portées par des organisations de spécialistes « alors même qu’on finance aux généralistes de la périphérie parisienne une formation anthropologique sur les minorités ethniques » ; – d’autre part la partialité du comité scientifique de l’OGC qui aurait refusé sa caution à des modules de formation soumis par des organisation de spécialistes avec le concours d’universitaires nationaux et internationaux. Recalés pour… « manque de pertinence pédagogique » ou encore – le Dr REY cite un cas survenu dans sa spécialité – parce que le référentiel servant de support didactique « n’était pas encore en ligne sur le site de la HAS ». _ Cette situation serait « dérisoire » s’emporte le président de l’UMESPE si n’étaient ainsi « dilapidés des fonds d’abord fléchés sur les objectifs conventionnels de maîtrise ».




Les principales dispositions prévues à la Loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2007

Deux-cent millions de plus _ Pour la première fois en dix ans, une proposition d’ONDAM du Gouvernement a été retoquée par le Parlement. Les députés ont octroyé 200 millions d’euros supplémentaires à la médecine de ville – sans rééquilibrer les autres enveloppes. En 2007, la ville disposera donc de 66,7 milliards d’euros (+ 1,1 % par rapport à 2006) ; les établissements hospitaliers de 65,8 milliards (+ 3,5 %) pour un ONDAM général de 144,8 milliards (+ 2,5 %). La deuxième étape de la CCAM clinique ne fait pas partie des priorités officiellement annoncées par le ministre.

Deux ultimatums aux signataires de la convention _ Les signataires de la convention ont jusqu’au 31 janvier 2007 pour ouvrir le secteur optionnel, prévu par l’accord chirurgie de 2004. Faute d’avenant, le ministre pourra créer par arrêté ce secteur, à dépassements encadrés et plafonnés, ouvert à « des médecins relevant de certaines spécialités » – formellement pas exclusivement des chirurgiens -, sur critères de formation, d’expérience ou de qualité. _ Même motif, même punition : sans conclusion par les signataires de la convention de l’avenant prévu sur la convergence du médecin référent et du médecin traitant avant fin janvier, le ministre pourra, toujours par arrêté, définir un « contrat » individuel à passer avec l’assurance maladie pour les généralistes qui s’engageraient sur leur volume d’activité, la qualité, la formation, la PDS et la dispense d’avance des frais.

Révision du droit d’opposition majoritaire _ Un amendement au Sénat a levé l’ambiguïté entre la loi de réforme et son décret d’application sur le droit d’opposition majoritaire à la convention. Comme pour les accords collectifs chez les salariés sur lequel il est calqué, seuls les syndicats « représentatifs » pourront prétendre à ce droit. Mais les parlementaires ont modifié la loi sur la représentativité syndicale pour inclure, comme critère formel, l’audience électorale.

Réforme de la RCP _ Si les syndicats médicaux, l’UNCAM, les compagnies d’assurances et le ministère ne concluent pas, sous deux mois, un accordcadre pour juguler les hausses des primes en responsabilité civile professionnelle, le Gouvernement pourra légiférer par ordonnance, par exemple en faisant prendre en charge par la collectivité les indemnisations les plus lourdes.

Trois aménagements du contentieux _ En cas d’urgence et de violation particulièrement grave ou financièrement préjudiciable des engagements conventionnels, les CPAM pourront déconventionner tout professionnel après qu’il aura pu présenter ses observations. Les recours des médecins contre les pénalités financières des caisses ne relèvera plus des tribunaux administratifs mais de ceux des affaires de Sécurité Sociale. Le défaut d’obligation d’EPP sera jugé par les chambres disciplinaires de l’Ordre et non plus par les sections des assurances sociales.

Deux nouveaux fonds _ Le Fonds d’amélioration des soins de ville (FAQSV) et la Dotation nationale des réseaux (DNDR) fusionnent dans le Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) national et décliné régionalement. Doté de 350 millions d’euros en 2007, le FIQCS reprend, entre autres, le financement des expérimentations, des réseaux, des maisons médicales de garde, des aides à l’installation ou au maintien des professionnels dans les zones déficitaires, du lancement du DMP. _ Autre création : le Fonds des actions conventionnelles (FAC) qui reprend les aides – formation, informatisation… – offertes aux professionnels sous convention, précédemment attribuées par le Fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale (FORMMEL) ou le Fonds national d’action sanitaire et sociale. Le FAC sera directement géré par les signataires des conventions.

Et encore… _ Octroi d’un droit de prescription limité aux infirmières (matériel médical) et aux opticiens (renouvellement ou adaptation de lunette) ; reconnaissance de la permanence des soins comme service public ; suppression de l’avis de la HAS pour modifier la seule hiérarchisation d’un acte ; instauration d’une consultation de prévention pour les personnes de 70 ans ; renforcement de la lutte contre les fraudes ; création d’un Observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée (T2A) ; instauration d’un Fonds de prévention des risques sanitaires ; création d’une Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux ; amélioration de l’aide à l’accès à la couverture complémentaire ; dispositions diverses relatives au DMP. _ Autre création : le Fonds des actions conventionnelles (FAC) qui reprend les aides – formation, informatisation… – offertes aux professionnels sous convention, précédemment attribuées par le Fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale (FORMMEL) ou le Fonds national d’action sanitaire et sociale (FNASS). Le FAC sera directement géré par les signataires des conventions et aura entre autres prérogatives le financement de la FPC et de l’EPP.

Jean-Pol Durand




Au travail, Monsieur le Président !

301 – En chaque chose, selon les philosophes chinois, il y a du bon mais aussi du mauvais.

Le versant positif de l’élection du nouveau président de la République, ce devrait être la garantie de la continuité : la Santé ne devrait, sans doute, pas être le champ de la rupture fréquemment évoquée. On imagine mal la nouvelle équipe remettre en question profondément l’esprit de la réforme de l’Assurance Maladie, d’autant qu’il devrait, quoi qu’on en dise, persister une certaine complicité entre le directeur général de l’Assurance Maladie, qui fut l’un des artisans de cette réforme, et le futur cabinet ministériel. _ De nombreuses pistes, qui ne sont pas pour nous déplaire, ont été tracées dans le programme du candidat élu : – responsabilisation de tous les acteurs avec remises à plat des franchises – espérons que l’abolition du fameux forfait de 18 €, décidé sur l’écho-cardiographie mais jamais appliqué, fera partie de ce train de mesures ; – espaces de liberté tarifaire et de valorisation des efforts de FMC et d’EPP, ce qui rappelle fortement le secteur d’excellence proposé par le deuxième Livre Blanc de la Cardiologie ; – amélioration du parcours et de la coordination des soins, sans que soit sacrifiée la médecine spécialisée de proximité ; – triplement du budget sur la prévention ; – incitation « énergique » au regroupement comme solution à la désertification médicale. _ Gageons enfin que le DMP retrouvera le deuxième souffle dont il a tellement besoin.

Mais corollaire du réalisme économique, cela signifiera aussi à n’en pas douter : – un renforcement des politiques de contrôles avec un objectif affiché de 10 milliards d’euros. Espérons que les médecins ne seront pas seuls à faire les frais de cette lutte contre les abus, les fraudes et les gaspillages ; – une politique budgétaire rigoureuse dont on redoute un ONDAM de ville trop étriqué qui ne permette pas d’assumer les échéances tarifaires annoncées. Les conclusions du prochain comité d’alerte seront à ce titre très instructives. Enfin au chapitre des craintes : – il faut toujours redouter un hospitalo-tropisme des orientations budgétaires, surtout dans l’état de désordre affiché des hôpitaux et compte tenu des propositions contradictoires faites par certains porte-parole officieux, allant jusqu’à prôner la réorganisation des soins locaux autour d’hôpitaux de proximité ; – le découplage du ministère de la Santé de celui des Comptes Sociaux, qui retirerait du poids aux négociateurs et nous renverrait aux affres de la maîtrise comptable. Le vote, semble-t-il majoritaire, des médecins libéraux en faveur du candidat élu, ne les met pas pour autant à l’abri du pragmatisme économique le plus technocratique. Souvenons-nous du plan Juppé !

Nous devons rester vigilants, même si certaines mesures vont, à n’en pas douter, dans le sens du maintien des grands principes de notre système de soins, comme, par exemple, l’expérimentation d’une TVA sociale destinée à le financer de façon efficace et pérenne.

Docteur Jean-François Thébaut, le 9 mai 2007




Ordonnances : des risques pour le patient et son médecin !

301 – Contexte de la prescription

La première règle à laquelle tout médecin doit se conformer est de rédiger des ordonnances qu’en connaissance optimale de son patient et donc idéalement après une consultation ou à la fin d’une hospitalisation. Dans cette logique, lorsque un médecin est sollicité par des amis, celui-ci doit exiger le formalisme minimum d’une consultation avant de prescrire.

Les ordonnances de sortie après une hospitalisation sont une source fréquente d’accidents et de plaintes. En effet, pour des questions d’organisation, les ordonnances sont parfois rédigées la veille de la sortie. Sous la pression des patients désirant sortir au plus vite, il peut arriver que les dernières adaptations du traitement (anticoagulation, tolérance hémodynamique ou allergie…) ne soient pas retranscrites sur l’ordonnance, avec les conséquences délétères que l’on peut imaginer.

En-tête du médecin et bénéficiaires des ordonnances

Comme nous le rappelait monsieur de la Palisse, les prescriptions rédigées sur une ordonnance doivent être destinées au bénéficiaire de l’ordonnance ! En effet, certains confrères ayant dérogé à cette règle élémentaire ont vu leur responsabilité mise en cause. Un généraliste, face à un patient connu pour une psychose hallucinatoire et qui refusait tout traitement, avait convenu avec l’épouse le stratagème suivant : il prescrivait un psychotrope sur l’ordonnance de son épouse, destiné à l’époux. Celle-ci versait quotidiennement dans l’alimentation de son mari psychotique, les gouttes du traitement, à son insu. Ã l’occasion d’une discorde familiale, le scénario a été révélé au patient par un tiers qui n’a pas manqué de poursuivre son épouse et le médecin.

Il faut bien entendu se garder, face à des patients n’ayant pas de couverture sociale, de faire les prescriptions sur l’ordonnance d’un proche, assuré social. En cas d’accident médical du patient sans couverture ou du proche, le médecin pourrait avoir des difficultés pour expliquer qu’il a soigné le patient sans couverture, ou bien dans le cas du proche de se justifier face à une ordonnance un peu longue (et sûrement incohérente !). Enfin, la sécurité sociale, souvent « partie » lors des procédures civiles, ne manquerait pas de demander une sanction face à ces malversations !

Lisibilité et posologie

La lisibilité est la pierre angulaire de la prévention des risques iatrogènes. La rédaction manuscrite présente l’avantage d’être commode en « tous terrains » : facile à remplir en visite ou quand l’ordinateur est éteint. Elle comporte en revanche un risque d’une compréhension parfaitement aléatoire à la fois du pharmacien, du patient ou de son entourage. Une écriture se rapprochant dangereusement de la ligne isoélectrique lue par une stagiaire en pharmacie a toute les chance de se solder par la remise d’une molécule à la place d’une autre.

Il va sans dire que la rédaction du dosage et de la posologie doivent bénéficier d’une attention soutenue. Quel cardiologue n’a jamais écrit concernant un anti-vitamine K : « 3/4, 3/4, 1/2 » en pensant en toute logique à une alternance de ces trois dosages sur trois jours. Cette logique n’a pas été celle d’un patient, qui a pris pendant plusieurs jours : 3/4 de comprimé le matin, le midi et 1/2 comprimé le soir, avec des conséquences qui ne se sont pas fait attendre et ayant abouti à la condamnation de son prescripteur pour négligence. Si l’informatique apporte un atout majeur dans la lisibilité et dans le formalisme des explications des prescriptions, elle n’est pas pour autant exempte de complications. Il suffit d’un clic distrait sur la ligne de dessous dans un menu déroulant ou dans une case voisine pour qu’une dose inadaptée du médicament choisi soit délivrée au patient.

Une relecture de l’ordonnance avec explication orale au patient constitue l’ultime barrage de prévention des accidents iatrogènes. Non seulement, le médecin peut découvrir la coquille dans sa prescription, mais il lève en plus les sources de malentendu ou d’incompréhension du patient sur ses écrits.

Durée de traitement et renouvellement

Ce qui est évident pour le cardiologue ne l’est pas autant pour son patient. Il convient donc de toujours expliquer que le traitement de toute cardiopathie est habituellement à vie, et que le patient doit par conséquent se soumettre à un suivi régulier, en coordination avec son généraliste et que toute ordonnance doit être perpétuellement renouvelée. Les accidents coronariens par arrêt du traitement à la fin de l’ordonnance ne sont pas exceptionnels. Pour se prémunir d’une éventuelle mauvaise foi de la part de son patient en cas d’accident, il n’est pas inutile de noter sur l’ordonnance de façon systématique « à renouveler » ou sur la première ordonnance « traitement à vie » pour lui faire comprendre la chronicité de sa maladie.

Lors du renouvellement, un certain nombre d’accident ont été répertoriés. L’existence de plusieurs prescripteurs (cardiologue, généraliste, diabétologue) est souvent source d’erreurs de compréhension de la part du patient.

Parmi elles, il est arrivé que le patient, se fiant à l’ordonnance du cardiologue et pensant que celle-ci faisait la synthèse de tous ses traitements, ait donc interrompu le traitement (non cardiologique) prescrit initialement par le généraliste.

La répartition des rôles de chacun doit être bien expliqué au patient

Premier scénario : le cardiologue peut faire ses recommandations au généraliste par courrier, et c’est ce dernier qui rédige l’ordonnance globale (cardiologique et non cardiologique). Bien évidement, le cardiologue doit directement faire les ordonnances si les modifications s’imposent d’urgence.

Deuxième scénario : le cardiologue rédige lui-même ses prescriptions, mais il doit veiller à la compréhension de son patient sur la poursuite des autres traitements.

à la suite d’une épreuve d’effort de surveillance s’avérant positive, un cardiologue a donc décidé d’augmenter la dose de l’inhibiteur calcique bradycardisant. Sachant que son confrère généraliste était un fervent prescripteur de génériques et après une confirmation à mi-mot du patient sur le nom du générique, le cardiologue a donc rédigé l’ordonnance avec augmentation de dose du fameux inhibiteur calcique générique et a ajouté la mention suivante : « reste du traitement idem ». Malheureusement, dans le reste du traitement, il y avait l’inhibiteur calcique avec son nom commercial (non générique). Le patient a donc pris à la fois la molécule princeps et le générique entraînant un surdosage et un bloc conductif fatal. Une réécriture complète des ordonnances est donc préférable, surtout si les capacités intellectuelles ou linguistiques du patient sont limitées.

Si la prescription de génériques est nécessaire pour la maîtrise des coûts de la santé, elle exige cependant un certain nombre de précautions et de coordination entre le cardiologue, le généraliste et le pharmacien.

Pour lever tout risque de confusion, une rédaction des molécules sous leurs noms DCI ou la rédaction conjointe du nom commercial et DCI réduit ce risque. Bien entendu, la responsabilité des pharmaciens est également engagée sur ce plan. Toute substitution automatique et non expliquée au patient expose à un risque iatrogène. Ils ont un devoir important de contrôle et de conseil.

Les antivitamines K

En raison du risque iatrogène majeur de ce traitement, il est indispensable que le patient bénéficie d’une véritable leçon de la part du médecin lors de son introduction, avec des « injections de rappels » lors du suivi. La remise d’un carnet de suivi doit être associée à une parfaite explication de la gestion du suivi (fréquence des dosages, interlocuteurs…). Une mise en garde sur les risques de l’automédication ou des interactions est également nécessaire. Enfin, les risques d’une interruption, qu’elle soit décidée ou non par un médecin, doivent être expliqués au patient. En cas d’accidents par surdosage même non fautif, les avocats ne reculent jamais pour revendiquer un défaut d’information ! Pour cette raison, la mention sur le dossier d’une délivrance d’informations spécifiques et du carnet de suivi est utile sur le plan juridique.

Conclusion

L’ordonnance est l’aboutissement de la démarche intellectuelle du praticien vis-à-vis de son patient. C’est donc une pièce médico- légale capitale, raison pour laquelle les médecins doivent systématiquement en garder une copie (ou une sauvegarde informatique). De façon corollaire, toute erreur de prescription validée par la signature du médecin est comme scellée dans du marbre et laisse peu de place à la contestation !

Pour sa sérénité future, le cardiologue doit observer scrupuleusement les règles de prescription et faire abstraction du stress environnant. En prenant le temps d’expliquer sa prescription à son patient, cela lui permet de prévenir une incompréhension et surtout de dépister ses éventuelles erreurs de rédaction.




Actes cardiologiques et hospitalisations de courte durée

301 – Un cardiologue a récemment interrogé le Syndicat sur ses obligations dans la situation suivante : il réalise des échographies de stress dans une clinique. Ã la demande de l’établissement, les examens se pratiquent dans le cadre d’une hospitalisation de courte durée, ce qui permet de facturer une journée d’hospitalisation, l’opération étant neutre pour le praticien.

On peut comprendre les motivations de la clinique, car de tels examens nécessitent un environnement de sécurité qui a un coût. Nous avons néanmoins déconseillé à notre adhérent de poursuivre cette pratique qui n’est pas conforme aux dispositions réglementaires.

On se souvient qu’au décours de la mise en place de la T2A, un certain nombre d’établissements, publics et privés, à partir de leur interprétation des textes, avaient facturé des GHS pour des actes qui jusqu’alors étaient faits en consultations externes. La Sécurité Sociale avait dénoncé cette façon de faire qui avait pour conséquence de renchérir considérablement le coût de ces actes.

Les établissements concernés ont plaidé l’ambiguïté de la réglementation.

Une clarification a été apportée par la circulaire n° DHOS/F1MTAA/2006/376 du 31 août 2006 relative aux conditions de facturation d’un GHS pour les prises en charge hospitalières en zone de surveillance de très courte durée ainsi que pour les prises en charge de moins d’une journée.

La circulaire fait d’abord le constat que les prises en charge de moins d’une journée sont en général sans ambiguïté en termes de facturation lorsqu’elles correspondent à une simple consultation, ou qu’à l’inverse elles s’étalent sur la journée entière ou bien encore nécessitent une anesthésie, autorisant dans ces deux derniers cas, la facturation d’un GHS.

Par contre, il existait des situations qui donnaient lieu, d’un établissement à l’autre, à des comportements différents en termes de facturation, d’où la nécessité d’une unification.

Conditions de facturation d’un GHS lors d’un passage dans une zone de surveillance de très courte durée

Un GHS ne peut être facturé que si l’état du patient remplit les trois caractéristiques suivantes : – un caractère instable ou un diagnostic qui reste incertain ; – la nécessité d’une surveillance médicale et d’un environnement paramédical qui ne peuvent être délivrés que dans le cadre d’une hospitalisation ; – la nécessité de la réalisation d’examens complémentaires ou d’actes thérapeutiques.

En revanche, ne relèvent pas de la ZSTCD les cas où les symptômes observés au service des urgences imposent de réaliser d’emblée quelques examens complémentaires diagnostiques, sans que l’état du patient ne nécessite une surveillance en hospitalisation.

Conditions de facturation d’un GHS lors d’une prise en charge hospitalière de moins d’une journée, hors zone de surveillance de très courte durée

Principes généraux _ Le principe est que ne doit pas donner lieu à facturation d’un GHS, toute prise en charge qui peut habituellement être réalisée soit en médecine de ville, soit dans le cadre des consultations ou actes externes dans les établissements de santé. _ Ce principe peut être nuancé si l’état du patient nécessite des moyens particuliers, pouvant justifier une hospitalisation de moins d’une journée pour des actes habituellement pratiqués « en externe ».

Conditions autorisant la facturation d’un GHS _ Un GHS ne peut être facturé que dans les cas où sont réalisés des actes qui nécessitent : – une admission dans une structure d’hospitalisation individualisée disposant de moyens en locaux, en matériel et en personnel, et notamment des équipements adaptés pour répondre aux risques potentiels des actes réalisés ; – un environnement respectant les conditions de fonctionnement relatives à la pratique de l’anesthésie ou la prise en charge par une équipe paramédicale et médicale dont la coordination est assurée par un médecin ; – l’utilisation d’un lit ou d’une place pour une durée nécessaire à la réalisation de l’acte ou justifiée par l’état de santé du patient. _ Ces trois conditions doivent être remplies.

On distingue deux types de prise en charge permettant de facturer un GHSLes prises en charge nécessitant un environnement technique particulier. _ Tous les actes qui, au sens de la CCAM, acceptent un code activité 4 peuvent, lorsqu’ils sont réalisés en hospitalisation, donner lieu à facturation d’un GHS. _ Sont cités à titre d’exemples les actes de chirurgie ambulatoire, ceux nécessitant une anesthésie, ou un milieu stérile (par exemple les coronarographies).

Les prises en charge de type médical. -* Bilans diagnostiques ou thérapeutiques : un GHS ne peut être facturé que si la prise en charge comporte plusieurs examens (à l’exclusion des examens uniquement biologiques) réalisés par des professionnels de santé médicaux et paramédicaux différents, sur des plateaux techniques différents et qu’une synthèse diagnostique ou thérapeutique en est réalisée par un médecin. -* Surveillances médicales prolongées : un GHS ne peut être facturé qu’en cas de surveillance médicale prolongée à la suite d’un acte diagnostique ou thérapeutique qui ne requiert pas une telle surveillance chez un patient habituel. Il s’agit donc d’une surveillance prolongée en raison par exemple du caractère fragile du patient.

Conditions n’autorisant pas la facturation d’un GHS pour une prise en charge hospitalière de moins d’une journée

La circulaire donne à titre d’exemple une liste non exhaustive d’actes, parmi lesquels les tests d’effort cardiaques.

Au total

Le principe essentiel est de ne pas facturer indûment des GHS, pour des prises en charge qui relèvent de l’activité « externe » et donc d’une facturation à l’acte selon les règles de la CCAM ou de la NGAP.




Interview de Patrick Joly – Le médecin habilité : « Nous sommes des stimulateurs, pas des censeurs »

301 – Le Cardiologue – Qu’est-ce qui conduit à devenir médecin habilité ?

Patrick Joly – La curiosité du système et une certaine dose d’optimisme pour considérer qu’il pourrait aller mieux. La Haute Autorité de Santé m’a proposé de devenir médecin habilité, j’ai rempli les papiers et j’ai tenté l’expérience.

Comment s’est passée la formation ?

P. J. – C’est assez contraignant : trois ou quatre week-ends à Paris. Mais c’est intéressant. C’est bien fait, très formaliste, un peu rigide. Ils nous font passer le message qu’il faut avoir, certes, de la méthodologie mais aussi beaucoup de souplesse et beaucoup d’évolutivité. Les règles sur la HAS se modifient en permanence, elles ont déjà changé trois fois depuis que je suis habilité : il faut savoir s’adapter.

Comment intervient-on lorsque l’on est médecin habilité ?

P. J. – Ã la demande d’un groupe de médecins, par exemple dans une clinique, à la demande de l’URML ou d’une association agréée comme l’UFCV. On nous demande si l’on veut animer une EPP individuelle ou collective. Nous sommes là pour aider les médecins, théoriquement motivés – de manière obligatoire ou volontaire – dans leur démarche. En les conduisant dans une voie, en expliquant où la méthodologie pêche, en les encourageant surtout.

Quelles sont les demandes les plus courantes des médecins évalués ?

P. J. – Assez basiques au départ : satisfaire à leur évaluation obligatoire. Les autres demandes viennent progressivement, quand ils découvrent. Quand ils s’aperçoivent qu’ils faisaient déjà de l’évaluation sans le savoir, sans la bonne méthodologie. Le problème est de faire passer l’idée que cette pratique répond désormais à un besoin d’organisation, dans le cadre d’une évaluation globale et de certification.

Le message est-il si difficile à faire passer ?

P. J. – Oui, parce qu’il existe des médecins qui adhèrent spontanément et ceux qui traînent les pieds. Dans un groupe, je dirais qu’il y a au moins 30 % de perte. Dans le meilleur des cas, ils ne viennent plus, ne font pas ce qu’on leur demande. Sinon, c’est le mauvais esprit, ils crient au flicage… On apprend à gérer.

Avez-vous participé à de nombreuses EPP ?

P. J. – J’ai aidé à une EPP individuelle, trois dans le cadre d’établissements privés et quatre EPP collectives : un groupe de cardio, un de rhumato, un de généralistes, un d’endocrino. Vous savez que l’on n’intervient pas seulement dans sa discipline. Cela renforce l’idée selon laquelle le médecin habilité n’intervient pas en juge et censeur de sa spécialité mais bien pour porter une méthodologie inter-spécialités.

Le C. – Pensez-vous qu’il faut améliorer l’EPP ?

P. J. – Non, l’EPP est un mouvement en cours pour sensibiliser les médecins au fait que rien n’est figé et qu’ils peuvent s’améliorer quel que soit leur âge – fort heureusement une majorité de la population médicale fait de la FMC – mais il n’y a pas que cela. Dans le cabinet médical, dans la gestion des dossiers… on peut aussi s’améliorer. Quand on propose des idées, des trucs, les médecins s’accrochent. Écrire sur écran plutôt qu’à la main pour que le remplaçant ou le successeur lise les dossiers, c’est aussi de l’EPP ! L’évaluation, c’est de la sensibilisation, surtout au moment où les médecins, avec la surcharge de travail et le ras-le-bol actuel, ont davantage envie de loisirs que de travailler deux fois plus que la population générale au risque de se faire reprocher de gagner trop. Il faut donc marcher sur des oeufs, mais le but est qu’à chaque réunion d’EPP chacun ait un élément qui le stimule. Il faut donc des piqûres de rappel régulières.

On fait comment ?

P. J. – Pour les spécialistes qui travaillent en clinique, c’est assez simple : les staffs sont de gros moteurs. Pour les autres, je pense qu’il faut incorporer des séances d’EPP dans la FMC, que l’évaluation devienne une composante comme l’EPU. On va à une réunion d’EPP, comme à une réunion de FMC, sur un sujet particulier où chacun est sensibilisé.

Vous supprimez donc définitivement les frontières entre EPP et FMC ?

P. J. – La première est une stimulation à l’organisation et à la meilleure pratique de tous les jours, souvent par du formalisme. La seconde est une stimulation à une meilleure pratique en connaissant mieux les choses. Même si c’est un peu différent, la base est la même.

Voir aussi l’article complet « L’EPP selon la méthode UFCV : évaluation largement positive par ceux qui l’ont vécue« 




Interview de Pierre-Antoine Ayrivié – Le médecin évalué : « S’évaluer, c’est évoluer »

301 – Le Cardiologue Comment se lance-t-on dans une démarche d’évaluation de sa pratique ? _ Pierre-Antoine Ayrivié – La première fois, il y a deux ans, c’était une EPP dans le cadre de l’URML. Il y avait un côté pionnier, et c’est toujours agréable d’être parmi les premiers à fouler un sentier, à le défricher. Quand on m’a proposé cette forme d’évaluation, j’ai donc accepté l’expérience. C’était pour voir si c’était réalisable, pour faire le point sur mon activité : on a toujours quelque chose à modifier.

Les vingt premiers patients à l’aune de deux référentiels.

Le C. – Quel type d’EPP avez-vous suivi ? _ P.-A. A. – Nous étions cinq ou six réunis pour les explications méthodologiques des médecins habilités puis nous avions des formulaires à remplir, au cabinet, pour les vingt premiers patients vus sur deux référentiels : le dossier médical et l’HTA… je crois.

Le C. – Vous n’avez donc pas été marqué au point de vous souvenir précisément du second référentiel ? _ P.-A. A. – Non, on apprend tellement au jour le jour. J’ai suivi le protocole, j’ai fait mon référentiel, voilà. Et j’ai vu ce que je pouvais en retirer. Une modification de la manière de travailler sur deux points bien précis. Sur le dossier médical, avoir systématiquement l’adresse et le numéro de téléphone actualisés des patients. Je croyais le faire, mais je me suis aperçu que la secrétaire ou moi pouvions oublier de demander si les numéros avaient changés. Sur l’HTA, je ne précisais pas suffisamment, dans les conclusions, les objectifs à atteindre par le patient.

Le C. – Comment se sont passées les réunions avec les médecins habilités ? _ P.-A. A. –Dans la réunion qui suivait notre travail sur chacun des deux référentiels, c’étaient les réponses du groupe qui étaient évaluées. Personne n’était donc montré du doigt en cas d’écart avec le référentiel. Pourtant j’ai remarqué que chaque fois que l’un de nous était « en faute », entre guillemets, il cherchait toujours une mauvaise raison pour se justifier. Personne n’accepte facilement d’être surpris en dehors des clous. De ne pas être parfait.

Le C. – Est-ce que cette pratique d’évaluation vous a semblé naturelle ? _ P.-A. A. – Non, pas du tout. Comme les confrères, j’ai même trouvé cela déstabilisant au départ. Je trouve aussi que la finalité de la chose c’est en outre d’uniformiser les tendances. Est-ce parce que la médecine est devenue de plus en plus technique ? On s’aperçoit que l’on est obligé d’avoir des consensus pour être en mesure de dire : je soigne bien mon patient puisque que je suis dans les règles. On peut évidemment en sortir avec de bonnes raisons, mais avec le risque d’être très ennuyé si ça ne marche pas. Finalement, c’est peut-être cela l’EPP : un rappel des règles. Je crois d’ailleurs que c’est utile à tous, même à ceux qui sortent avec un diplôme tout neuf parce que l’on ne travaille pas de la même manière à l’hôpital, en formation ou en cabinet.

Lorsque l’on a pris de mauvaises habitudes, elles sont difficiles à perdre .

Le C. – Êtes-vous décidé à poursuivre l’évaluation ? _ P.-A. A. – J’en ai déjà fait une autre. Comme l’UFCV m’a proposé la même EPP, j’ai recommencé après avoir vérifié que je ne prenais la place de personne et avec pour autre motivation de voir ce qui me restait de la première. Je me suis aperçu qu’il y avait des choses que je faisais moins bien, que j’avais déjà oubliées. C’est la preuve que lorsque l’on a de mauvaises habitudes, elles sont difficiles à perdre ! C’est cela l’EPP : s’évaluer pour évoluer. Inversement, j’ai vérifié que je fais des choses depuis ma première évaluation que je ne faisais pas auparavant. Je vais aussi, dans le cadre de mon activité d’expert auprès des tribunaux, suivre un groupe de pairs. Ce n’est pas obligatoire mais je suis sûr que cela va m’aider de voir comment font les autres.

Le C. – Pas d’évaluation en ligne ? _ P.-A. A. – Je suis juste allé voir le site de l’UFCV, au début, quand les cas cliniques ont été mis en ligne. J’ai fait deux cas, c’était sympa. Je trouve cependant que c’est très tolérant. J’aurais préféré parfois que l’on me dise : « là, tu t’es trompé ».

Voir aussi l’article complet « L’EPP selon la méthode UFCV : évaluation largement positive par ceux qui l’ont vécue«