La statue menhir de Nativu (Patrimonio)

324 – Christian Ziccarelli – Taillée dans du calcaire marin, la statue mesure 2, 30 m de hauteur, 30 cm d’épaisseur et a une largeur de 60 cm au niveau des épaules. L’endroit fut fouillé par J. Magdeleine et J.-C. Ottaviani, qui mirent en évidence l’existence d’un alignement aujourd’hui disparu. Outre le visage particulièrement explicite, elle présente des pectoraux carrés, en relief, qui évoquent le port d’une armure.

Ce mégalithe([Les monuments mégalithiques (du grec méga « grand » et lithos « pierre ») peuvent être ramenés à deux types principaux : le dolmen (plusieurs blocs, dressés et couverts par une table horizontale) et le menhir (simple pierre fichée verticalement dans le sol).)] appartient au groupe des statues menhirs, véritables idoles lapidaires en rond de bosse. Si on les retrouve en Espagne, dans le Caucase, en Abyssinie, en Bretagne, dans le Sud de la France, en fait aux quatre coins de la planète, c’est probablement en Corse où leur concentration est la plus importante. Comment ne pas évoquer le site de Filitosa en Corse du Sud ?

Cette sculpture anthropomorphe nous interpelle à plus d’un titre. De quand date-t-elle ? Par qui a-t-elle été édifiée ? Que pouvait bien être sa fonction ? Comment a-t-elle été façonnée ?

Les mégalithes ont commencé à « pousser » dès le Ve millénaire avant notre ère, mais les statues menhirs sont apparues plus tardivement vers le IIIe millénaire.

Le mystère de la statue de Nativu

En Corse l’apogée de l’art mégalithique est classée en plusieurs stades, depuis la simple évocation de l’image humaine jusqu’à la figuration du crâne, des épaules, des traits du visage d’un réalisme saisissant. Le dernier stade semble correspondre à un état de guerre, car ces statues commencent à porter la figuration des armes et permettent de mieux les dater. Leur fabrication s’étale du bronze moyen (1700-1300 av. J.-C.) au bronze final (1100-800 av. J.-C.).

|Le passage du Bronze Ancien (2200-1700 av.J.-C.) au Bronze Moyen reste encore aujourd’hui très mal expliqué. | |_ La théorie ancienne (Robert Grosjean) d’une invasion des peuples de la mer, les Sardhanes (représentés sur les bas reliefs de Médinet Habu en Egypte) à qui l’on attribue la construction des turri, d’où la culture dite torréenne-shardane, ne repose, selon François de Lanfranchi et Michel Claude Weiss, sur aucun matériel archéologique. Alors pourquoi ne pas considérer que ces avancées architecturales sont dues aux populations locales |

Les groupes humains qui les ont édifiées, sont organisés en village (casteddi), pratiquent l’agriculture et l’élevage, disposent d’un ensemble d’aires symboliques et funéraires. Leur art et leur artisanat s’expriment dans des domaines variés qui vont de la fabrication de vases en argile cuite à la fonte du bronze dans des moules en vue de la production d’outils et d’armes. Ces hommes du bronze moyen ont innové en construisant la Turra ([Turra, turri : monument(s) de forme tronconique à un ou deux étages, distant les uns des autres de 5 à 10 km.)].

La fonction de cette statuaire est loin d’être parfaitement définie : s’agit-il de totems figurant les divinités du panthéon mégalithique ou bien des sortes de cénotaphes ([Un cénotaphe (du grec kenos « vide » et taphos « tombe ») est un monument élevé à la mémoire d’une personne ou d’un groupe de personnes et dont la forme rappelle celle d’un tombeau, bien qu’il ne contienne pas de corps.)] représentant « l’ennemi vaincu et respecté par la fixation de son image », hypothèse séduisante évoquée par Roger Grosjean ?

Leur lieu d’implantation a probablement un sens, de même que leur disposition, isolée (par exemple la limite d’un territoire) ou en alignement (elles pourraient être l’expression de certaines croyances, de rapport avec des signes célestes perceptibles, tels le mouvement des astres, la succession du jour et de la nuit).

La décision de les sculpter, de les façonner, puis leur mise en place en un lieu significatif demandent l’intervention d’un groupe social organisé, sous l’autorité d’un seul (le chef de tribu ?) ou au contraire selon le souhait de l’ensemble du groupe.

Reproduisant des archétypes, avec toutefois de légères variantes, elles sont en général en granit. Cette roche très dure nécessite une exécution longue et d’autant plus difficile que les « artisans sculpteurs n’utilisaient que le ciseau en quartz et un galet percuteur en roche dure ». Cette affirmation reste hypothétique, car les expériences réalisées par Francois de Lanfranchi, avec des outils en pierre se sont révélées un échec, seul le métal, et notamment le fer, permet d’arriver à des résultats satisfaisants.(gallery)




Lettre ouverte à mon directeur de CPAM

324 – Monsieur le Directeur

Mes associés et moi-même, comme, je pense, l’ensemble des cardiologues, ont reçu votre courrier à propos des bénéficiaires de la CMU. Vous écrivez que le taux de refus de prise en charge par les spécialistes serait de 41 %. C’est la troisième fois que l’on nous assène ce chiffre fantaisiste : une première fois lors de la publication du rapport Chadelat en 2006, une seconde à l’occasion de la circulaire du 30 juin 2008 de la Caisse Nationale, et une troisième fois dans votre lettre. Croyez-vous sincèrement que 41 % des spécialistes relevant de votre caisse refusent de soigner les bénéficiaires de la CMU ?

J’ai appris que ce type de courrier serait envoyé aux médecins qui, d’après les statistiques des caisses, ne feraient pas suffisamment d’actes pour les bénéficiaires de la CMU. Pourtant, si j’en crois les TSAP établis par vos services, mon cabinet est régulièrement dans la moyenne régionale, et même souvent un peu au-dessus. Nos chiffres seraient d’ailleurs un peu plus élevés si tous les rendez-vous que nous donnons étaient honorés par les intéressés. En fait, les bénéficiaires de la CMU sont en général plutôt jeunes, et les clients des cardiologues plutôt âgés. C’est ainsi et nous n’y pouvons rien.

Je dois dire que, comme bon nombre de mes confrères, je commence à être lassé par ces assertions moralisatrices et bien-pensantes et par ce discours culpabilisant vis-à-vis des médecins. Ces accusations, qui font le bonheur des journaux, sont basées sur des « études » à la méthodologie douteuse et qui ne reflètent pas la réalité quotidienne.

Un exemple : une enquête parue en mai 2009 a fait grand bruit. En ce qui concerne notre région, les cardiologues sont très vertueux : 100 % de prise en charge. Cela représente bien, à mon avis la réalité, mais la méthode employée pour obtenir ce résultat fait sourire : si l’on regarde en détail le dossier de presse, ce taux de 100 % repose sur un coup de téléphone adressé à seulement deux cardiologues lillois. Par contre, honte aux Normands : 100 % de refus de prise en charge. Sur quoi est basé ce 100 % ? sur un coup de téléphone adressé à un seul cardiologue de Rouen, choisi et interrogé on ne sait d’ailleurs pas comment. Plus récemment, à partir de quelques coups de téléphones adressés à des cabinets des beaux quartiers parisiens, on titre qu’il y a 25 % de refus de soins. Sans doute y a-t-il quelques médecins qui refusent de suivre les bénéficiaires de la CMU et je condamne cette attitude. Personnellement, je n’en connais pas, mais je veux bien croire qu’il en existe. Pourquoi ne pas leur appliquer les sanctions prévues par la loi ? Pourquoi préfère-t-on jeter l’ostracisme sur l’ensemble de la profession ? Pourquoi vouloir faire croire, comme vous l’écrivez, que presque la moitié des spécialistes manquerait à ses devoirs ? _ On peut comprendre, sans l’admettre, les motivations d’une certaine presse qui pense surtout à ses ventes. Je suis étonné que l’Assurance Maladie se mêle à ce concert.

La véritable question est en fait la suivante : y aurait-il un problème de santé publique lié à une prise en charge médicale insuffisante des bénéficiaires de la CMU ? _ Un très beau travail (Prise en charge de l’infarctus du myocarde- 28 avril 2009) réalisé par le service médical de l’Assurance Maladie apporte une réponse. L’étude porte sur les conditions de prise en charge médicale de l’ensemble des assurés sociaux du régime général hospitalisés pour infarctus du myocarde pendant tout le premier semestre 2006, soit 14 000 dossiers, et se prolonge sur les six mois qui suivent le séjour hospitalier. Elle a un volet médical, mais aussi un volet social, avec une évaluation du suivi médical des bénéficiaires de la CMU.

Je vous en cite quelques conclusions :

– Selon les données de l’Assurance Maladie, la prise en charge médicale des patients CMU-C est similaire à celle des autres patients,

– Les patients bénéficiaires de la CMUC sont accueillis dans les mêmes proportions que les autres patients dans les différents types d’établissements de santé, y compris les cliniques privées.

– Les taux de coronarographie (91,8%) et de pose de stents (72,4%) sont également équivalents, témoignant du bon niveau de prise en charge médicale des malades relevant du dispositif de la CMU-C.

– il n’existe pas de différence significative en matière de suivi spécialisé, par un cardiologue libéral notamment, entre les bénéficiaires de la CMU-C et les autres assurés. La qualité scientifique de ce travail est telle qu’il a été publié dans les Archives of cardiovascular diseuses. Il s’agit à ma connaissance de la seule publication sérieuse réalisée sur le sujet. Elle démontre parfaitement que dans « la vraie vie », pour une pathologie donnée, les bénéficiaires de la CMU reçoivent le même haut niveau de soins que le reste de la population.

Pourquoi, dans sa communication, l’Assurance Maladie occulte-t-elle cette très belle étude de son service médical et privilégie-t-elle les chiffres très douteux du rapport Chadelat ?  Il est certain que le suivi des bénéficiaires de la CMU est parfois un peu complexe, mais les critiques ne doivent pas être à sens unique. La circulaire du 30 juin 2008 de la Caisse Nationale, comme d’ailleurs vous le rappelez, énonce un certain nombre de situations où les professionnels de santé ont lieu d’être irrités, et notamment les retards injustifiés aux rendez-vous, les rendez-vous manqués et non annulés, les traitements non suivis ou interrompus, les exigences exorbitantes. C’est la première fois à ma connaissance qu’une circulaire de Sécurité Sociale détaille de façon aussi précise des faits qui relèvent habituellement du dialogue singulier entre le médecin et son patient. Même s’il ne faut pas généraliser, cela montre qu’il existe réellement des problèmes dont le corps médical n’est pas responsable.

Cette même circulaire insiste sur la nécessité pour les caisses de porter une attention particulière et de traiter en priorité les réclamations portées par les professionnels de santé relatives au remboursement des soins pratiqués avec dispense d’avance des frais. Faire cette recommandation, c’est admettre que, là aussi, il existe des difficultés. Il aura d’ailleurs fallu un avenant conventionnel (l’avenant n° 21), pour rappeler que « les professionnels qui assurent la dispense d’avance de frais ont droit à un remboursement rapide des soins assurés », ce qui, normalement, aurait dû aller de soi. La circulaire établit bien que l’on se trouve en présence de trois partenaires : les bénéficiaires de la CMU, l’Assurance Maladie et les médecins, chacun ayant des droits et des devoirs, et qu’il ne faut pas que les droits soient uniquement pour les uns et les devoirs uniquement pour les autres.

Les multiples réactions engendrées actuellement par la CMU sont souvent disproportionnées et excessives. Il n’est pas sûr que le foisonnement de textes législatifs et réglementaires la concernant contribue à la sérénité. Les diverses déclarations, et votre courrier en fait partie, donnent l’impression désagréable que toutes les difficultés ponctuelles sont instrumentalisées pour donner une image négative du corps médical. J’ai bien compris évidemment, Monsieur le Directeur, que vous appliquez des consignes nationales, et ma lettre ne s’adresse pas directement à vous. J’aimerais que la Caisse nationale comprenne que ce type de mise en garde, adressée à des médecins non concernés, risque finalement de se montrer contre-productif et d’entraîner des réactions de rejet.

Ce serait regrettable, car, dans mon expérience en pratique quotidienne, sur le plan médical, les choses se passent plutôt bien. Il y a évidemment de temps à autre des difficultés relationnelles avec des bénéficiaires de la CMU. Il s’agit en général de patients plutôt jeunes, en bonne santé, et dont on se demande ce qu’ils viennent faire dans un cabinet cardiologie. C’est heureusement une minorité. Pour l’immense majorité, et en particulier pour ceux qui nécessitent un suivi cardiologique, il n’est constaté aucun problème particulier, aussi bien pour le malade, pour trouver un cardiologue, que pour celui-ci, pour suivre son patient, ce que confirme le travail du service médical de l’Assurance Maladie évoqué précédemment.

Je vous prie, Monsieur le Directeur…




Dysfonctionnement fatal

324 – On se souvient que la fin de l’année 2008 avait été particulièrement riche en faits divers dans le domaine des urgences hospitalières. Au nombre des « dysfonctionnements » graves avait été rapportée l’errance, fatale, d’un patient pris en charge dans la nuit du samedi 27 au dimanche 28 décembre, à la suite d’un malaise survenu peu avant minuit à son domicile d’une commune de l’Essonne. L’homme, âgé de 56 ans, était finalement décédé peu après 6 heures du matin après un cinquième arrêt cardio-respiratoire… à son arrivée à l’hôpital parisien Lariboisière. L’enquête avait rapidement établi que son admission plus précoce en réanimation, le diagnostic de pneumopathie ayant été rapidement posé, n’aurait sans doute pas enrayé l’issue mortelle.

Mais l’affaire ayant, légitimement, ému l’opinion publique, Roselyne Bachelot, ministre de la santé, avait mandaté une enquête de l’IGAS, rendue en mars dernier mais jamais publiée depuis. C’est, assez paradoxalement, l’AMUF (Association des Médecins Urgentistes de France) qui vient de la mettre en ligne sur le site de l’organisation. Paradoxalement car les médecins urgentistes ne sont pas ménagés dans ce travail, au grand dam du Dr Pelloux, charismatique président de l’AMUF, qui n’y voit qu’un « rapport politique permettant à Mme Bachelot de s’en sortir à bon compte » sans porter remède au vrai problème abruptement formulé par la vedette des médias : « Le diagnostic aujourd’hui, c’est que le système des urgences est dépendant de ceux qui veulent travailler. N’importe quel réanimateur, s’il ne veut pas prendre les malades, n’aura aucun compte à rendre. »

On se demande ce qu’en penseront ses mandants, mais la reconstitution chronologique de l’enchaînement funeste laisse peu de place au doute : le régulateur du SAMU-91 qui cherchait une place en réanimation pour le malade, a donné une trentaine de coups de fil avant de trouver une place… conditionnée à la réalisation préalable d’une coronarographie quand bien même l’indication, posée par un chef de clinique et relayée par l’interne de garde, était-elle discutée… En fait une suite interrompue d’errements et autres dysfonctionnements auxquels il convient d’ajouter les maux « courtelinesques » inhérents à l’hospitalisation publique : sonnerie sans réponse au standard ici, fléchage défaillant des urgences ailleurs, carence du système CAPRI (Capacité de Réanimation sur Internet) supposé recenser « en temps réel » les capacités de réa disponibles sur les 8 départements d’Ile-de-France… Cruel enchaînement disséqué, minute par minute, par les deux limiers de l’IGAS qui formulent, en conclusion, une dizaine de recommandations, un peu platoniques, dont l’échéancier s’étale de fin 2009 jusqu’à 2011 pour celle consistant à « décloisonner » l’organisation des urgences en Ile-de-France. Mission dévolue au futur directeur d’ARS (Agence régionale de la Santé) dont la nomination est attendue incessamment sous peu.

Un regret cependant : l’enquête fait grand cas de la cascade d’erreurs et problèmes survenus dans la chaîne des établissements publics sollicités dans ce cas malheureux mais ne dit mot de la clinique privée où avait pourtant été identifié un lit de réanimation et où avait été précédemment accueilli, en 9 minutes (!), un autre patient en situation critique.




Les propositions iconoclastes de Rocky

324 – Disons au passage que ce « mandat » est assez parfaitement virtuel, l’essentiel du champ de la négociation étant déjà balisé. Du moins peut-on en attendre, de manière enfin explicite, la clause mise par l’Assurance Maladie à sa signature au bas du parchemin constitutif de cette arlésienne ayant nom « secteur optionnel ». On sait que les caisses et les mutuelles étaient disposées à accorder aux actuels médecins du secteur 2, opérant sur plateau technique lourd (c’est-à-dire chirurgiens, anesthésistes, obstétriciens), le bénéfice d’un dépassement plafonné mais remboursé sur un quota d’actes en échange d’un abandon en rase campagne du secteur 2. Le « deal » est aussi cynique que cela et, évidemment, difficilement accessible aux syndicats médicaux qui n’entendent pas sacrifier cette partie de leurs mandants. De leur côté, et de manière à peu près unanime, ils défendent un accès plus large au secteur optionnel, notamment aux spécialités non chirurgicales, y compris venues du secteur 1… Les deux positions sont assez éloignées mais le champ du compromis est large, affaire de volonté politique partagée.

 

Un chantier considérable

A cet égard, le sort fait à cette question récurrente depuis trop longtemps sera décisif sur la capacité de conclure une nouvelle convention avant le début de l’année prochaine. Car le chantier apparaît déjà considérable. Devant ses interlocuteurs conventionnels, mais surtout devant M. Eric Woerth, son (vrai) ministre de tutelle à qui il souhaitait apporter un catalogue de 2 milliards d’économies putatives pour élaborer le PLFS-2010 (Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale), M. Van Roekeghem a listé les nouvelles dispositions qu’il souhaiterait insérer à la prochaine convention.

C’est à un véritable « changement de paradigme » que se retrouvent conviés les syndicats de médecins libéraux.

En révisant le dogme du paiement à l’acte exclusif. _ Depuis la Charte libérale de 1927, le paiement à l’acte apparaît consubstantiel du libéralisme en médecine. M. Van Roekeghem propose d’y substituer un système à trois étages : – le paiement à l’acte pour une part centrale mais évidemment appelée à évoluer ; – le système du forfait, très précisément fléché sur le suivi des maladies chroniques, – enfin le système d’intéressement individuel, type CAPI que le directeur de l’UNCAM apparaît disposé à ramener dans le giron de la négociation conventionnelle .fort de l’incroyable succès rencontré auprès de 7 000 généralistes en quelques semaines !

En revendiquant un rôle d’opérateur de soins à l’américaine ! Rocky, puisque c’est son surnom ostensiblement assumé, ambitionne de généraliser le programme Sophia de « Disease Management » . dont le succès est pourtant beaucoup moins avéré que celui du CAPI (7 000 signatures de généralistes fin juillet). Il souhaite élargir son expérience à l’ensemble du territoire (10 départements sont aujourd’hui concernés) et surtout à deux autres types de pathologies : les maladies respiratoires (asthme) et « l’ensemble des pathologies cardiovasculaires ». Pour satisfaire cette ambition, l’homme a besoin du concours plus pro-actif des médecins, dont les cardiologues (qui affichent la même ambition, pour leur propre compte dans le dernier Livre Blanc). Et il apparaît, dans cet état d’esprit, assez disposé à réviser les modalités de suivi des ALD entre le premier et le second recours dans une démarche d’« optimisation » du parcours de soins des malades chroniques. C’est que M. Van Roekeghem sait, mieux que quiconque, que l’évolution « spontanée » de l’incidence et du coût des ALD obère chaque année . 84 % de l’enveloppe qui lui est concédée par le Parlement !

En ne cédant rien, bien au contraire, sur sa légitimité d’« acheteur de soins » : sur le sujet il revendique rien moins qu’un « droit de veto » sur l’inscription au remboursement de médicaments dont l’ASMR serait classé faible ou insuffisant, en mettant en concurrence les producteurs de génériques, en jouant la carte du privé dans la querelle de la tarification, en soutenant la chirurgie ambulatoire en centres autonomes, en tenant compte des « gains de productivité » dans l’élaboration des marges des radiologues, biologistes, etc.

Les mêmes ambitions pour un nouveau mandat

En un mot, le patron de l’UNCAM se pose cette année en éclaireur de la « gestion du risque », dont il revendique – surtout aux yeux du Gouvernement – l’exclusivité de la mission. On aura compris que le message est aussi (et surtout) destiné aux futurs directeurs d’ARS qui, demain sur le terrain, seront fondés à formuler les mêmes ambitions. Lui-même voit son mandat remis sur le métier dans les prochaines semaines et n’a pas, malgré les divergences qui l’opposent au cabinet de Mme Bachelot, renoncé à prétendre à sa propre succession ! Il a, pour ce faire, un impérieux besoin d’aboutir au niveau conventionnel, de sortir de l’impasse du secteur optionnel et de jeter les bases, avant la fin de l’année avec un maximum de syndicats médicaux, d’une authentique réforme de structure. Il dispose, pour aboutir à ses fins, d’une sorte de « bombe atomique » : en suggérant de plafonner à 100 000 € de revenus annuels la participation des caisses aux cotisations sociales des médecins du secteur 1, il remet également en cause la pacte qui, en 1971, avait présidé à la signature de la première convention nationale.

Une véritable révolution, on vous dit !




Rentrée 2009 : Rénovation ou refondation ?

324 – Cette rentrée 2009 est le théâtre de bouleversements législatifs et réglementaires qui contiennent les germes d’une véritable refondation du partenariat conventionnel, voire d’une révolution, devenue indispensable pour certains, après 40 ans d’une existence controversée.

De bipartite entre l’Assurance Maladie et les Médecins, elle est devenue tripartite avec l’intégration des assureurs complémentaires regroupés au sein de l’UNOCAM.

Cette intrusion, dans le colloque singulier entre les médecins et la CNAMTS n’est pas seulement une figure de style d’autant que le ticket d’entrée était cher – 1 milliard d’€ dans le PLFSS 2009- et que l’enjeu de la future convention s’articulera autour du secteur optionnel, au moins pour ce qui concerne certaines spécialités. Or il faut constater que les bases de ce secteur optionnel sont d’ores et déjà très controversées.

Pour les syndicats de médecins, ce nouveau secteur devrait concerner toutes les spécialités et être ouvert à tous les médecins volontaires secteur 1, sans obérer pour autant le secteur 2.

Pour les complémentaires, il ne devrait concerner que les trois spécialités chirurgicales, obstétricale et anesthésiologique et s’accompagner d’un encadrement strict du secteur 2 de toutes les autres spécialités, voire même se substituer à celui-ci.

Dialogue de sourds ou positions inconciliables ?

L’Etat menace de trancher par voie d’arrêté autoritaire si les partenaires ne sont pas arrivés à un accord le 15 octobre… 2009 !!! Mais les menaces ne s’arrêtent pas là : le directeur général de l’UNCAM va plus loin. Il met sur la table de nombreuses orientations polémiques que détaille plus loin Jean-Pol Durand en pages 6 et 7.

– L’accès aux soins, comportant un volet sur la régulation de la démographie, avec des mesures contraignantes contre les médecins des régions « surdotées » et un volet sur l’encadrement des dépassements des médecins secteur 2. – L’extension du tiers payant obligatoire. – L’adaptation des avantages sociaux des médecins secteur 1 – doux euphémisme pour annoncer une diminution de la participation des caisses à l’ASV et voire même un plafonnement de sa participation aux cotisations URSSAF. – L’amélioration de la pratique médicale, DPC oblige. – L’accroissement de l’efficience, CAPI oblige. – Et surtout une rénovation des modes de rémunération des médecins combinant une part forfaitaire « administrative », une part principale de paiement à l’acte et une part dépendant de la performance type CAPI des généralistes.

Bien sûr il est coutumier en France d’outrer ses positions avant toute négociation. L’Assurance Maladie n’y fait pas exception. Mais cette fois le Directeur Général pousse vraiment le bouchon très loin. C’est manifestement un indicateur pronostique de négociations difficiles pour ne pas dire inacceptables.

Un grand merci à l’équipe éditoriale d’avoir réalisé cette nouvelle maquette du Cardiologue. N’en doutons pas, cette mise en page moderne et attrayante vous rendra la lecture plus agréable en cette période d’actualité morose.




« Gisements d’économie » : la cardiologie libérale sera-t-elle épargnée ?

I- Les branches de la Sécurité Sociale en déficit

Le système de protection sociale a subi la crise économique. _ Si l’année 2008 s’est terminée sur un déficit du régime général proche de l’objectif voté par le Parlement (- 10 ?2 milliards contre – 9 ?3 milliards d’euros), c’est un déficit prévisionnel historique qui menace la Sécurité Sociale en 2009. En effet celui-ci pourrait atteindre 20,1 milliards d’euros au lieu de 10,5 milliards prévus avant la Crise. _ Au cours du premier semestre, la branche maladie n’aurait dérapé que de 300 à 500 millions d’euros par rapport à l’objectif national des dépenses d’Assurance Maladie. Au point que le comité d’alerte, réuni en mai dernier, n’a pas jugé opportun de demander aux caisses de mettre en place des mesures de redressement. _ Néanmoins Mme Bachelot n’a pas caché qu’un certain nombre d’entre elles figureraient au projet de loi de financement de la Sécurité Sociale en 2010 dont le détail est attendu dans les jours à venir.

II – Les arrêts de maladie et le dérapage des indemnités journalières

En effet, le dérapage, souligné par le comité d’alerte des dépenses de l’Assurance Maladie. serait lié essentiellement à 2 postes : les indemnités journalières et les transports sanitaires. _ Concernant les indemnités journalières, le poste a augmenté de + 6,7 % sur les 4 derniers mois de l’année contraignant la CNAM à renforcer ses contrôles. _ Parallèlement et dans le cadre de maîtrise médicalisée, Mme Bachelot a demandé à la CNAM de diffuser le plus largement possible des référentiels validés par la Haute Autorité de Santé d’arrêts de travail sur les pathologies les plus courantes. Sont déjà concernées, les lombalgies, les troubles anxio-dépressifs et les suites d’intervention chirurgicale. _ Enfin le projet de loi de financement de la Sécurité Sociale de PLFSS 2010 va généraliser l’expérimentation en cours dans une dizaine de départements concernant l’usage de la contre-visite patronale unique déclenchant en cas d’arrêt injustifié la suspension du versement des indemnités journalières. _ Selon la Ministre qui n’a pas livré d’explications, de nouveaux processus d’autorégulation pourraient également voir le jour.

III – La cardiologie libérale

Dans le parcours de soins, il ressort que le cardiologue libéral est très peu prescripteur d’arrêts de travail, laissant souvent le soin au médecin traitant généraliste de les mettre en place et de les renouveler le cas échéant. _ Les procédures interventionnelles coronaires ou de stimulation cardiaque facilitent le plus souvent une reprise du travail précoce ou sont génératrices d’arrêts de travail de courte durée. _ Cet état de fait souligne l’extrême pondération des cardiologues libéraux en matière de prescriptions d’arrêts de travail.




Jean-Pierre Binon (Auvergne) : la coopération public/privé en pratique

Le Cardiologue : De quoi parle-t-on en ce moment chez les cardiologues auvergnats ?

Jean-Pierre Binon : On a évidemment entendu parler de la Loi HPST mais pas dans le détail ; il s’agit d’une réforme de structure, une de plus, qui finit par laisser les gens un peu blasés. Ce sont les textes d’application qui la rendront plus lisible : les réactions ne manqueront pas le jour, par exemple, où les médecins devront prévenir l’Ordre de leurs dates de vacances, le jour où le directeur d’ARS exigera d’eux plus d’implication dans les urgences, le jour où sera publié le SROS ambulatoire … Le gens ont besoin, pour mesurer la portée d’un tel texte, d’en « toucher du doigt » les conséquences concrètes dans leur exercice quotidien. Le problème du secteur optionnel, peut-être parce qu’il s’agit d’un sujet ancien, leur est plus familier. Ils savent maintenant que le dossier est censé être clos le 15 octobre, et ils attendent …

Le C. : … Attendent quoi, plus précisément ?

J.-P. B. :… Son ouverture à tous les médecins, et pas seulement à ceux qui travaillent en salle d’opération. Il y a une grande ambiguïté dans ce dossier : nos partenaires voudraient en profiter pour « éteindre » le problème du secteur 2, et les syndicats pour … débloquer la situation du secteur 1, figée depuis des années. Si la solution retenue est de n’ouvrir cette option qu’aux seuls secteur 2, sans rien offrir aux médecins de secteur 1, alors on s’expose à des problèmes. Syndicalement, il convient d’y être attentifs sauf à s’exposer à « des lendemains qui déchantent » ! Vous imaginez dans le même établissement un médecin qui aurait eu le droit au secteur optionnel et un autre pas ? Un médecin dont les dépassements seraient solvabilisés et l’autre qui en serait interdit. Je trouve la situation potentiellement plus injuste que l’actuelle.

Le C. : La démographie cardiologique est-elle, en Auvergne, spécialement « tendue » ?

J.-P. B. : Pas fondamentalement aujourd’hui mais sous quelques mois peut-être ! Les départs en retraite sont prévisibles à court terme et personne ne voit de candidat à l’installation ! Ce qui va bien finir par poser des problèmes, moins aux urgences sans doute, que dans la prise en charge des soins chroniques. A Montluçon, nos rendez-vous sont à 2 mois ! C’est sans doute l’agglomération en situation la plus fragile de la région !

Le C. : A Montluçon, vous avez notamment anticipé sur la Loi en créant, avant l’heure, un de ces GCS (Groupement de Coopération Sanitaire) justement promu par la loi HPST. Expliquez-nous en l’histoire et la finalité.

J.-P. B. : A Montluçon cohabitaient par le passé deux USIC dans deux établissements, l’un privé et l’autre public. Jusqu’au jour où l’hôpital a perdu ses forces vives. Pour sauver l’outil et, il faut bien le dire, garantir la pérennité de la cardiologie dans cette ville, il nous a fallu consentir un mariage « de raison », sous la forme d’un GCS (Groupement de Coopération Sanitaire). Qui, c’est original, est constitué de 3 composantes à égalité : la clinique, l’hôpital et les cardiologues ! Aujourd’hui, les urgences fonctionnent avec 7 cardiologues, 5 privés et 2 publics que l’hôpital a réussi à recruter sur la base de cette astreinte allégée. Je pense que l’USIC (installée dans le privé) fonctionne à la satisfaction générale mais l’élaboration des plannings reste toujours complexe … Il n’est pas si facile d’effacer une génération de concurrence.

Le C. : En fait, avec cette synergie public/privé dans la gestion des urgences, vous avez pris une longueur d’avance sur ce que l’on aurait fini par vous imposer…

J.-P. B. : Innover oui, en ce sens que tout le monde a parfaitement compris que c’était la voie obligée pour pérenniser l’outil de travail. Comment raisonner autrement aujourd’hui qu’en termes de territoires, de besoins à identifier, de moyens à mobiliser, … Pour autant, nous n’avons réalisé que la moitié du chemin, car les deux services fonctionnent indépendamment, sans cardiologie interventionnelle qui sera le deuxième étage de la fusée, à négocier avec le futur directeur d’ARS.




Le chiffre du mois : où sont les dépassements ?

Pas sûr que les négociateurs de la Convention parviennent à conclure, avant le 15 octobre comme le leur demande désormais le législateur à travers la loi HPST, le nouveau statut conventionnel popularisé sous le nom de « secteur optionnel » et consistant à rembourser des dépassements plafonnés. On sait qu’un des (nombreux) points d’achoppement réside dans « l’exclusivité » que les Caisses et mutuelles entendent réserver aux chirurgiens, anesthésistes et gynécologues quand la profession organisée demande son ouverture, progressive, à toutes les spécialités des deux secteurs actuels, 1 et 2 ! _ Les syndicats pourront amener à leurs interlocuteurs … la preuve qu’ils se trompent avec ce tableau faisant état des masses financières concernées. Sur un montant de 1,9 milliard d’euros de dépassements du secteur 2, les trois spécialités concernées « pèsent » 28,9 % (et 2,6 % de plus avec les dépassements imputables aux confrères hospitaliers publics à secteur privé) … Ce qui laisse donc 68,4 % de l’enveloppe sur laquelle les mutuelles semblent s’autocensurer, se priver en tout cas, d’un levier de maîtrise intelligente.

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Veillée d’armes

Ainsi en va-t-il en ces premiers jours de septembre 2009 ! Deux événements donnent à penser que les lignes peuvent bouger, un peu. D’une part, il y a la loi HPST, publiée au JO du 22 juillet et disséquée dans la prochaine livraison du Cardiologue (dans vos boîtes à lettres sous quelques jours). On y trouve le meilleur et le pire. Le pire, on commence à le voir avec, à l’instruction, un premier décret d’application consacré aux… billets d’absence qu’il faudra maintenant aller quérir auprès de l’Ordre ! Un peu, comme si, avant même de donner l’emploi du temps, on commençait à parler aux élèves de la discipline en cour de récréation ! Et le meilleur c’est à la fois l’opportunité ouverte aux cliniques de prétendre aux mêmes missions de « service public » que l’hôpital éponyme. C’est un cadre juridique pour les « pôles de santé » où pourraient s’insérer les « Maisons du Cœur » préconisées par le dernier regroupement… En fait « HPST » n’est qu’une boîte à outils où la future gouvernance, mieux partagée entre Paris et les régions, pourra puiser ses propres leviers de changement. _ Dans quelques jours seront donc nommés les Directeurs d’ARS, du moins de leur instance « de préfiguration ». Encore une fois qu’on ne s’y trompe pas, ces préfets sanitaires auront « la bride sur le cou », tenue de main ferme par un de ces hauts fonctionnaires aussi anonymes qu’influents. Celui dont il est question ici s’appelle Jean-Marie Bertrand, secrétaire général du ministère, un poste créé « sur mesure » pour celui qui a la charge du « service après-vote » de la Loi. Les directeurs d’ARS seront en liberté très surveillée mais enfin, à coté de leur mission principale consistant à remettre de l’ordre dans l’hospitalisation publique, ils auront aussi un peu de marge de manœuvre, notamment pour tout ce qui relève de « l’interface » entre la ville et l’hôpital avec quelques outils qui ne sont pas forcément désavantageux pour les libéraux. Sous réserve d’inventaire évidemment. _ L’autre grand rendez-vous, non moins important , est pour les semaines à venir avec la négociation d’une « nouvelle » convention. A en juger par les déclarations, tonitruantes, de M. Van Roekeghem, également commentées dans le prochain numéro du Cardiologue, ce ne sera pas un simple lifting avec, au programme, une diversification des modes de rétribution : forfaits et rémunération « à la performance » sont au menu … Ce qui ne suppose pas que les interlocuteurs de la profession, pour l’instant les Caisses et les mutuelles, abandonnent le principe et les modalités du paiement à l’acte. Mais ce qui veut dire aussi clairement que le C à 23 € sera sans doute la dernière augmentation de lettre-clef jamais concédée ! A l’avenir, il faudra aller chercher « ailleurs » les futures revalorisations. _ Pour gagner son pari, Rocky -tel est le surnom (assumé) de M. Van Roekeghem – a évidemment besoin de partenaires pour signer avec lui. Et là, autant le dire, la balkanisation du syndicalisme médical lui est d’un précieux secours. Mais il a aussi son talon d’Achille : son mandat arrive à terme en octobre prochain. Et il n’est donc pas encore sûr de conduire la négociation conventionnelle. Lui-même a aussi besoin d’alliés pour convaincre sa tutelle qu’il est le mieux placé pour postuler à sa succession ! _ Une veillée d’armes, on vous dit !