Quel exercice veulent les jeunes cardiologues ?

358 – En ce début d’année et après les mouvements de contestation de la fin 2012 qui ont vu défiler dans la rue les étudiants en médecine et les jeunes praticiens aux côtés de leurs aînés, Le Cardiologue fait le point sur les desiderata des jeunes cardiologues.

Comment les aspirants cardiologues envisagent-ils leur futur exercice ? Globalement, la réponse à la question se trouve dans la dernière étude démographique du Conseil national de l’Ordre des médecins. la spécialité de cardiologie et maladies cardiovasculaires compte aujourd’hui, en France métropolitaine, 5 870 praticiens en activité régulière, dont 23 % sont des femmes. Globalement, 45,5 % des cardiologues exercent en libéral, 30,1 % sont salariés et 24,5 % ont une activité mixte. Mais si l’on examine la situation chez les jeunes cardiologues, les chiffres sont bien différents. L’atlas démographique 2012 de l’Ordre montre en effet que sur l’ensemble des jeunes médecins nouvellement inscrits au tableau ordinal, seuls 9,5 % ont choisi l’exercice libéral, plus des deux tiers (68,8 %) ayant opté pour le salariat. Ils sont peu nombreux à avoir un exercice mixte (1,2 %) et 20,5 % sont remplaçants. Mais la proportion des jeunes spécialistes de cardiologie et maladies vasculaires optant pour le libéral est encore plus faible : 4,23 % seulement l’ont choisi, encore moins que l’année précédente (4,7 %). Dans leur immense majorité (84,66 %), les jeunes cardiologues choisissent le statut de salarié et un peu plus de 1 % d’entre eux ont un exercice mixte.

Quel exercice veulent les jeunes cardiologues 2

Pour la profession et la population, cette disparition progressive de la cardiologie de ville est inquiétante : on imagine mal demain l’ensemble des pathologies cardiaques suivies dans les établissements hospitaliers. Pour tenter d’attirer les futurs praticiens vers la cardiologie de ville mal connue des internes, plusieurs université du Grand Ouest ont initié le « séjour de sensibilisation » en cabinet libéral. Les premiers résultats sont prometteurs : les candidats au séjour ont découvert une pratique plus intéressante que ce qu’ils pensaient (voir notre entretien avec Jean-Claude Daubert page 13). Que les cardiologues aspirant à la retraite ne se réjouissent pas trop vite, cela ne signifie pas qu’ils trouveront facilement une relève. Surtout s’ils exercent seuls. Car une chose est sûre : les jeunes médecins en général et les jeunes cardiologues en particulier, s’ils sont tentés par la pratique de ville ne la conçoivent en solitaire, comme leurs aînés, mais en groupe. A cet égard, les pouvoirs publics seraient avisés dans leur ardeur à promouvoir l’exercice regroupé de ne pas tout focaliser sur la médecine générale, mais de considérer qu’il est tout aussi important que la population puisse continuer de consulter en ville un certain nombre de spécialistes cliniques, en particulier des cardiologues. Enfin, on peut aussi légitimement penser que si la recherche et l’enseignement sortaient du monopole hospitalier et impliquaient les libéraux, l’attraction hospitalo-universitaire serait moins forte pour les jeunes médecins, ce qui permettrait un rééquilibrage bienvenu entre la ville et l’hôpital.

 




Best of des grandes études 2012 – 2e partie

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter




Questions posées par des cardiologues

358 – Notre syndicat est régulièrement interrogé sur des questions portant sur la réglementation ou les modalités d’exercice.
La plupart de ces points sont régulièrement traités de façon exhaustive dans notre revue, mais ces questions ont toujours une portée pratique et les réponses peuvent être utiles à d’autres.

Actes en établissement aux urgences cardiologiques (ex POSU)

Quelle cotation d’échocardiogramme puis-je appliquer ?

Si le malade doit être alité, il est possible de coder DZQM005 (111,71 Ä) dont l’application nécessite deux conditions :
examen au lit du malade ;
patient en salle d’urgences, réanimation, USI, USIC.

 

Lorsque je suis de garde aux urgences cardiologiques, puis-je appliquer systématiquement une majoration d’urgence ?

Réponse : non.

Pour pouvoir facturer une majoration d’urgence, il y a deux conditions :

il doit s’agir d’une urgence au sens des dispositions générales de la CCAM (Art. III-2) : Réalisation d’un acte non prévu 8 heures auparavant, pour une affection ou la suspicion d’une affection mettant en jeu la vie du patient ou l’intégrité de son organisme et entraînant la mobilisation rapide des ressources humaines et matérielles ;

Acte réalisé entre 20 heures et 8 heures (code U, 25,15 euros), ou un dimanche ou jour férié (code F, 19,06 euros).

Il ne faut pas confondre avec la majoration M pour soins d’urgence, qui ne concerne que les généralistes et les pédiatres.

 

Consultations en établissement sur des patients hospitalisés

Comment coter une consultation préopératoire ?

Le concept de consultation pré-opératoire n’existe pas dans la nomenclature.

Il s’agit de consultations qui relèvent des règles habituelles pour ce type d’acte  à savoir : CS08+DEQP003 (+MPC+MCS pour les cardiologues secteur 1).

Deux conditions néanmoins pour coder une MCS :
– le patient doit être en parcours de soins, c’est-à-dire qu’il doit avoir déclaré son médecin traitant, ce qui est maintenant la situation la plus courante ;
– le médecin traitant doit être tenu informé des conclusions de l’examen.

 

Est-il possible de coter un C2 sur un malade hospitalisé ?

« L’avis ponctuel de consultant est applicable, au cabinet ou en établissement, dès lors que la demande émane du médecin traitant. » (Circulaire CNAM 25/03/2011).

Le fait que le malade soit hospitalisé ne serait pas un obstacle au C2, mais il faudrait aussi que la consultation soit demandée par le médecin traitant, ce qui en pratique n’est pas habituel.

 

Est-il possible de coter CS seul en établissement ?

Oui quand, par exemple, un avis ne nécessitant pas d’ECG est sollicité par un autre médecin de l’établissement (le coefficient 0,8 est affecté au CS uniquement lorsqu’il est cumulé à l’ECG, et le C08 correspond à la surveillance quotidienne de son patient, ces notions n’étant pas toujours bien comprises par les caisses).

 

Est-il possible de coter une CSC en établissement ?

Non. L’article 15.1 des DG de la NGAP précise à propos de la cotation CSC : « Elle ne s’applique pas pour les examens concernant des malades hospitalisés ». C’est une consultation qui ne peut être cotée qu’en cabinet.

CSC

Y a-t-il un délai minimal à respecter entre deux cotations ?

Il n’y a pas dans le libellé de la CSC de notion de périodicité à respecter comme, par exemple, pour le C2. Néanmoins, lorsque cette lettre clef a été crée, il était convenu qu’il s’agirait d’un acte peu répétitif.

 

Rendez-vous de consultation au cabinet à un mois donné en fin d’hospitalisation pour un malade que l’on a suivi en établissement.

Le fait que le cardiologue ait fixé lui-même ce rendez-vous ne lui interdit pas de coter une CSC. Contrairement au C2, il n’y a pas en effet d’obligation d’adressage par le médecin traitant, qui par contre devra recevoir une lettre.

 

Je suis le médecin traitant de quelques malades. Puis-je leur coter des CSC ?

Cette éventualité est rare, mais il n’est pas interdit qu’un spécialiste soit désigné comme médecin traitant au sens de la convention.

Le plus souvent, il s’agit de membres de la famille, pour lesquels les actes sont gratuits.

Quand il s’agit de consultations faisant l’objet d’honoraires, la possibilité de coter une CSC est exclue de par son libellé : « La cotation CsC ne peut être appliquée dans le cadre du suivi direct du patient ». (Art. 15.1 des DG de la NGAP).

 

C2

Puis-je coter un C2 pour un malade que m’adresse chaque année son médecin traitant pour une pathologie chronique ?

Ce n’est pas interdit. Il suffit qu’il y ait une « demande explicite » du médecin traitant et que toutes les autres conditions du C2 soient remplies.

 

Puis-je coter un C2 et programmer une épreuve d’effort ?

C’est possible : « Lorsqu’un médecin spécialiste, dont le nombre annuel de consultations et d’avis ponctuels de consultant est de moins de 90 % de son activité totale (exprimée en nombre d’actes dans l’année civile), a besoin d’actes techniques complémentaires pour élaborer son avis ponctuel de consultant, il peut facturer les actes techniques strictement nécessaires à l’établissement de son diagnostic. Les résultats de ces actes techniques devront obligatoirement être transmis au médecin traitant. » (Circulaire CNAM 25/03/2011).

 

Puis-je rédiger une première ordonnance après avoir coté un C2 ?

C’est prévu par les textes : « Le médecin correspondant donnant un avis ponctuel de consultant ne donne pas de soins continus mais laisse au médecin traitant la charge de surveiller l’application de ses prescriptions. Il peut cependant faire une première ordonnance de mise en route du traitement ou de demande d’examens complémentaires. Il adresse par écrit au médecin traitant ses conclusions ainsi que ses propositions thérapeutiques et de suivi. » (Circulaire CNAM 25/03/2011).

 

Puis-je préciser dans mon courrier qu’un suivi semestriel ou annuel est souhaitable, et coter un C2 ?

Il n’y a aucune mention formelle dans les textes, mais cela ne paraît pas contradictoire avec le C2. Cette notion de périodicité apparaît d’ailleurs de plus en plus souvent dans les recommandations, ou les guides de parcours de soins édités par la HAS. Il s’agit donc d’informations de bonne pratique qu’un médecin consultant doit donner à son correspondant, ce dernier gardant ensuite la liberté de l’adressage.
Le cardiologue par contre, ne doit pas fixer lui même le rendez-vous, car il doit y avoir pour chaque C2 une « demande explicite » du médecin traitant.

 

Est-il il indispensable que le patient soit adressé avec une lettre du médecin traitant pour pouvoir coter un C2 ?

La lettre du médecin traitant n’est pas obligatoire pour coter un C2, mais il doit y avoir une « demande explicite ».
« L’avis ponctuel de consultant est applicable seulement si le patient est reçu sur « demande explicite » de son médecin traitant.

Exemples :
–  le malade prend un rendez-vous auprès du médecin correspondant donnant un avis ponctuel de consultant avec une lettre de demande de consultation de son médecin traitant. Ceci correspond à la situation la plus courante ;
–  le médecin traitant téléphone au consultant pour expliquer sa demande d’avis : ce cas de figure est possible.
Il est souhaitable que le médecin traitant expose par écrit sa demande d’avis au médecin consultant, l’objectif étant de valoriser la coordination entre le médecin traitant et le consultant. Toutefois cette demande écrite n’est pas obligatoire.

Quoi qu’il en soit, dans la lettre du consultant au médecin traitant, la notion d’adressage doit apparaître clairement. » (Circulaire CNAM 25/03/2011).




2013 ne doit pas être une année de transition !

358 – Christian Ziccarelli – Permettez-moi de vous souhaiter une excellente année 2013, tant sur le plan professionnel que familial. _ Celle-ci ne sera pas, à mon avis, syndicalement de tout repos. Les nouvelles mesures liées à l’avenant n° 8, dont nous vous avons montré tous les dangers, seront mises en application au mois de juillet prochain. Les consultations (hors des actes techniques) seront majorées de 5 euros pour les patients au-delà de 85 ans, une somme versée trimestriellement par votre CPAM. Le nouveau contrat d’accès aux soins est d’une telle complexité que nous attendons les réponses du Comité Paritaire National sur certains points particulièrement opaques, afin de permettre à ceux qui peuvent en bénéficier de prendre les bonnes décisions.

Beaucoup d’entre vous vont prendre une retraite bien méritée, mais sans successeurs. Notre activité étant à son maximum (proche de 55 h par semaine), les délais de rendez-vous vont s’accentuer. Les pouvoirs publics, complètement inconscients de cet état de fait, ne s’intéressent qu’aux médecins généralistes. Le « burn out », qui n’est pas une spécificité des internes et des médecins généralistes, gagne du terrain. Cette situation ne peut qu’empirer. Moins de 10 % des jeunes générations s’installent en cardiologie libérale. Pourtant, combien de fois n’ai-je pas souligné dans cet édito l’importance de la cardiologie libérale de proximité !

Le secteur 1 est aux abois, les actes n’ont pas été revalorisés depuis plus de 10 ans et pour certains depuis plus de 20 ans. C’est proprement scandaleux, alors que les charges ne cessent d’augmenter. Les conditions deviennent catastrophiques. De plus en plus de cabinets licencient leurs personnels et se posent la question du renouvellement de leurs matériels. Les conséquences risquent d’être dramatiques pour la qualité de la prise en charge des patients.

Le SNSMCV exige de l’Assurance Maladie : – une actualisation de la CCAM, et tout particulièrement une revalorisation du coût de la pratique ; – la non-remise en cause du paiement à l’acte, la forfaitisation ne devant être qu’exceptionnelle ; – la création d’un acte de télésuivi des stimulateurs cardiaques et des défibrillateurs implantables.

Le SNSMCV exige des directeurs d’ARS le respect, pour la cardiologie interventionnelle, d’une stricte équité entre le secteur libéral et le secteur public.

Chacun d’entre nous doit prendre conscience de la gravité de la situation, le Syndicat « providence » n’existe pas. Votre adhésion et votre soutien sont indispensables au succès de nos revendications.




Quel exercice veulent les jeunes cardiologues ?

358 – En ce début d’année et après les mouvements de contestation de la fin 2012 qui ont vu défiler dans la rue les étudiants en médecine et les jeunes praticiens aux côtés de leurs aînés, Le Cardiologue fait le point sur les desiderata des jeunes cardiologues. 

Comment les aspirants cardiologues envisagent-ils leur futur exercice ? Globalement, la réponse à la question se trouve dans la dernière étude démographique du Conseil national de l’Ordre des médecins. la spécialité de cardiologie et maladies cardiovasculaires compte aujourd’hui, en France métropolitaine, 5 870 praticiens en activité régulière, dont 23 % sont des femmes. Globalement, 45,5 % des cardiologues exercent en libéral, 30,1 % sont salariés et 24,5 % ont une activité mixte. Mais si l’on examine la situation chez les jeunes cardiologues, les chiffres sont bien différents. L’atlas démographique 2012 de l’Ordre montre en effet que sur l’ensemble des jeunes médecins nouvellement inscrits au tableau ordinal, seuls 9,5 % ont choisi l’exercice libéral, plus des deux tiers (68,8 %) ayant opté pour le salariat. Ils sont peu nombreux à avoir un exercice mixte (1,2 %) et 20,5 % sont remplaçants. Mais la proportion des jeunes spécialistes de cardiologie et maladies vasculaires optant pour le libéral est encore plus faible : 4,23 % seulement l’ont choisi, encore moins que l’année précédente (4,7 %). Dans leur immense majorité (84,66 %), les jeunes cardiologues choisissent le statut de salarié et un peu plus de 1 % d’entre eux ont un exercice mixte.

Pour la profession et la population, cette disparition progressive de la cardiologie de ville est inquiétante : on imagine mal demain l’ensemble des pathologies cardiaques suivies dans les établissements hospitaliers. Pour tenter d’attirer les futurs praticiens vers la cardiologie de ville mal connue des internes, plusieurs université du Grand Ouest ont initié le « séjour de sensibilisation » en cabinet libéral. Les premiers résultats sont prometteurs : les candidats au séjour ont découvert une pratique plus intéressante que ce qu’ils pensaient (voir notre entretien avec Jean-Claude Daubert page 13). Que les cardiologues aspirant à la retraite ne se réjouissent pas trop vite, cela ne signifie pas qu’ils trouveront facilement une relève. Surtout s’ils exercent seuls. Car une chose est sûre : les jeunes médecins en général et les jeunes cardiologues en particulier, s’ils sont tentés par la pratique de ville ne la conçoivent en solitaire, comme leurs aînés, mais en groupe. A cet égard, les pouvoirs publics seraient avisés dans leur ardeur à promouvoir l’exercice regroupé de ne pas tout focaliser sur la médecine générale, mais de considérer qu’il est tout aussi important que la population puisse continuer de consulter en ville un certain nombre de spécialistes cliniques, en particulier des cardiologues. Enfin, on peut aussi légitimement penser que si la recherche et l’enseignement sortaient du monopole hospitalier et impliquaient les libéraux, l’attraction hospitalo-universitaire serait moins forte pour les jeunes médecins, ce qui permettrait un rééquilibrage bienvenu entre la ville et l’hôpital.

 

Clinique, recherche, enseignement : les trois atouts (attractifs) de l’hôpital

Catherine Szymanski est chef de clinique à l’hôpital d’Amiens. Elle a été présidente du Groupe des cardiologues en formation de la SFC (*). Sans nier les attraits de l’exercice libéral, elle souhaite pourtant travailler en CHU afin de pouvoir mener la triple activité de clinicienne, de chercheuse et d’enseignante. 

Après un externat à Lille, c’est à Amiens que Catherine Szymanski (33 ans) a effectué ses quatre années d’internat de cardiologie. C’est au cours de son internat que son goût et sa motivation pour la recherche l’ont conduite un an à Paris, un an à Boston, aux Etats-Unis, et un an à Liège, en Belgique. Elle est actuellement chef de clinique à l’hôpital d’Amiens. « J’ai fait un master et une thèse de science pendant mon internat; et actuellement, je considère que la recherche et l’enseignement sont aussi indispensables que la clinique pour moi et je souhaiterais vivement pouvoir travailler plus tard en CHU pour continuer cette triple activité ; néanmoins, je reste bien consciente que les places sont rares dans les hôpitaux universitaires ». Par rapport aux générations précédentes, le changement essentiel intervenu lui semble être la féminisation de la profession médicale. Une féminisation qui n’est pas neutre, puisque pour la grande majorité des femmes médecins, le fait d’être femme détermine grandement le choix d’une carrière. « On peut choisir l’hôpital et éventuellement la possibilité d’y travailler à temps partiel ou l’exercice libéral avec une certaine liberté d’organiser son temps en fonction de sa vie familiale. »

Une chose est certaine, Catherine Szymanski, comme aujourd’hui beaucoup de ses jeunes confrères, ne se voit pas s’installer seule en cabinet de ville. Elle reconnaît que « l’exercice libéral en cabinet de ville nécessite une très grande disponibilité. Aujourd’hui, les jeunes médecins, tout en étant très investis dans leur métier, ne veulent pas y consacrer toute leur vie, comme leurs aînés. Quand on interroge les internes, ceux-ci veulent soit rester à l’hôpital, soit ils ne savent pas quelle voie choisir. Mais quasiment aucun ne cite spontanément l’exercice libéral en cabinet de ville comme la voie à privilégier. On a un peu l’impression, à écouter les opinions de différents internes, que cela serait un choix par défaut, au cas où cela ne marcherait pas à l’hôpital ou en clinique. Outre l’impossibilité lorsqu’on exerce seul d’avoir à sa disposition les plateaux techniques adéquats pour des raisons financières, l’exercice solitaire fait un peu peur. On voit d’ailleurs bien aujourd’hui la difficulté des praticiens qui ont exercé seuls, à trouver un successeur lorsqu’ils prennent leur retraite. L’exercice en groupe ou en clinique, de manière collective et pluridisciplinaire offre un « confort » indéniable tant du point de vue financier que du point de vue de l’exercice médical. Exercer seul en cabinet de ville dissuade beaucoup d’entre nous à s’orienter vers un exercice et une prise de décision solitaire, sans la possibilité d’échanger avec des confrères. Au niveau technique, la pratique en cabinet reste aussi relativement limitée. Compte tenu de la lourdeur des investissements, en général, dans un cabinet de ville, on se limite souvent à l’ECG et à l’échographie cardiaque. Un cardiologue de CHU ou des structures privées de grande envergure avec des plateaux techniques conséquents va être compétent dans un domaine particulier et de hauts niveaux : l’échocardiographie, la rythmologie, la coronarographie, la cardiologie congénitale et pédiatrique. En cabinet, l’activité est plus souvent globale avec la nécessité d’adresser les patients aux correspondants hospitaliers dès qu’on se trouve un peu limité. Certes, l’exercice libéral donne une certaine liberté puisqu’on demeure son propre « patron », mais les contraintes ne sont pas négligeables tant financières (notamment les charges qui en découlent) que du point de vue de l’exercice médical.» n

(*) Créé en octobre 2007 par la Société Française de Cardiologie, le groupe des cardiologues en formation (GCF) a pour principal objectif de promouvoir des activités scientifiques et des actions pédagogiques directement menées par ses membres. Tous les internes du DES de cardiologie et maladies vasculaires, chefs de clinique et assistants de cardiologie peuvent en être membres. L’inscription se fait directement en ligne sur le site de la SFC.

 

Jean-Claude Daubert
« Des internes bretons sensibles à la cardiologie de ville »

Une première expérience de sensibilisation des internes de cardiologie à l’exercice en cabinet libéral a démarré au début de 2012 dans deux villes du Grand Ouest, Rennes et Nantes, et débutera cette année à Poitiers. Cardiologue au CHU de Rennes et président du Collège national des enseignants de cardiologie, Jean-Claude Daubert en est l’un des initiateurs et dresse un premier bilan de cette intitiative.

Pouvez-vous rappeler dans quel contexte a été décidé cette initiative et en quoi elle consiste ?

Jean-Claude Daubert : La cardiologie de cabinet a du mal à recruter. Les jeunes n’en ont pas une vision très positive. Contrairement à leurs aînés, qui effectuaient de nombreux remplacements, ils remplacent de moins en moins, n’étant d’ailleurs autorisés à le faire qu’en 3e année d’internat. De ce fait, ils connaissent mal cet exercice de la cardiologie. Le constat est déjà ancien et l’idée de pallier cette méconnaissance par des « séjours de sensibilisation » remonte à deux ans maintenant. Si les présidents du syndicat, Christian Aviérinos et Jean-François Thébaut, y ont été d’emblée favorables, elle a mis un peu plus de temps à s’imposer à leur conseil d’administration. Aujourd’hui, l’ensemble du syndicat est très demandeur.

Il s’agit de proposer aux internes d’effectuer un séjour de trois à cinq jours à temps plein dans un même cabinet – pas en clinique – et si possible sous la responsabilité d’un même cardiologue. Ils doivent être inscrits en DES de cardiologie, ce qui se fait en fin de 2e année. Ce séjour s’effectue en 3e année – au cours du 5e ou du 6e semestre – plutôt qu’en 4e, parce qu’il importe que cette rencontre avec la cardiologie de ville se fasse le plus tôt possible. Les cardiologues qui les accueillent le font volontairement. En Bretagne, une quinzaine se sont portés volontaires et ils sont une douzaine en Pays de Loire. Une convention est passée entre le directeur du CHU, le doyen de la faculté, le cardiologue libéral et l’interne. Le séjour est suivi d’un rapport rédigé par le cardiologue « accueillant » ainsi que d’un rapport de l’étudiant. Je précise qu’il ne s’agit en aucun cas d’un stage, mais bien d’un séjour de sensibilisation en cabinet libéral. Ce n’est pas un remplacement non plus, même si ce séjour peut ouvrir à cela ultérieurement.

Quel est le résultat de ce début d’expérience ?

J-C. D. : Très encourageant ! A Rennes, les cinq internes du DES ont été volontaires pour le séjour de sensibilisation, et à Nantes, quatre sur cinq étudiants concernés. Contrairement à ce qu’on pouvait penser, nos internes ne se sont pas précipités dans les grandes villes : en Bretagne, deux seulement ont effectué leur séjour à Rennes, tous les autres ont choisi de le faire dans des petites villes comme Auray ou Lorient. Les rapports des étudiants au coordonnateur sont extrêmement positifs, ils disent avoir vécu ce séjour comme une ouverture et la découverte d’une activité qu’ils jugent plus intéressante que ce qu’ils pensaient au départ, et pas seulement concernant la clinique, mais aussi l’organisation du cabinet libéral. Le bilan pour les internes est donc très positif. Croisés avec les rapports transmis par les cardiologues au président du syndicat régional –très positifs eux aussi- permet de conclure à la satisfaction de tous pour l’apport de cette expérience.

Cela est de bon augure pour la généralisation du séjour de sensibilisation. Est-elle à l’ordre du jour ?

J-C. D. : Le concept a été introduit dans le règlement intérieur national du DES, et c’est important. Il ne s’agit pas d’une obligation, mais d’une recommandation très forte. On ne peut pas l’imposer, il faut une volonté partagée de le mettre en œuvre. Mais aujourd’hui, tout le monde en est informé et je pense que cela va se diffuser petit à petit. Dans le Grand Ouest, après Poitiers, Brest, Angers et Tours devraient suivre, et dans l’Est, Nancy pense le mettre en place cette année. Par ailleurs, en Bretagne, d’autres spécialités l’envisagent, notamment la pneumologie et la pédiatrie. Je crois que l’expérience aura le soutien des ARS, très preneuses de ce genre de coopération entre la ville et l’hôpital.

 

Coralie Lecoq

« Il ne faut pas passer à côté de sa vie »

Coralie Lecoq, 25 ans, interne de 2e année de cardiologie à Tours, compte s’installer en libéral, mais en groupe et en gardant un pied à l’hôpital pour ce qui lui semble être l’équilibre idéal.

Comment envisagez-vous votre futur mode d’exercice, à l’hôpital ou en ville, en libéral ?

Coralie Lecoq : Je souhaite plutôt exercer en libéral, dans mon pays d’origine, à Marseille ou du moins dans la région PACA. Pour moi, c’est un choix de vie. En effet, j’ai des activités en dehors de la médecine – je pratique le sport de façon intensive- qui sont assez incompatibles avec l’hôpital. En libéral, j’aurai davantage la possibilité de gérer mon temps, mes horaires. L’hôpital est en sous-effectif, le résultat est que les heures travaillées hebdomadaires ont augmenté pour atteindre un niveau aberrant. Il ne faut pas passer à côté de sa vie ! Certains peuvent choisissent sans doute la carrière hospitalière pour la sécurité qu’elle représente ? Pour moi en fait, l’idéal serait d’avoir une activité mixte. Je souhaiterais exercer en cabinet de ville et garder une activité à l’hôpital public pour avoir accès aux plateaux techniques et ne pas être déconnectée de ce milieu. Je ne souhaite pas exercer en clinique privée, car ces établissements me semblent trop souvent avoir comme objectif de faire du chiffre.

En ville, opterez-vous pour l’exercice solo ou en groupe ?

C. L. : Je n’imagine pas d’exercer seule ! Je souhaite exercer au sein d’un groupe, soit un groupe de plusieurs cardiologues, soit un groupe pluridisciplinaire. Les deux sont sans doute intéressants, mais il me semble que la pluridisciplinarité est une bonne chose pour les patients et permet de ne pas rester entre spécialistes d’une même discipline. Les médecins entre eux ont tendance à ne parler que de médecine, et les cardiologues entre eux ne parlent que de cardiologie ! Moi, je veux être un bon cardiologue, mais ne pas perdre de vue les autres aspects médicaux. Je ne veux pas devenir la technicienne d’un seul organe car il me semble que l’on n’est plus vraiment un médecin dans ce cas. Pour moi, l’idéale serait la synthèse entre la cardiologie de ville, plus généraliste, et la cardiologie hospitalière, plus technique.

En quoi votre génération vous paraît-elle différente des précédentes dans la façon d’appréhender la profession ?

C. L. : Ils ont en général consacré leur vie à leur spécialité et ils sont souvent passé à côté de choses essentielles, leur vie privée, leur famille. Pour moi, il n’en est pas question. Ma mère est magistrat, et elle a réussi à concilier une vie professionnelle pourtant très prenante avec sa vie de famille, et j’avoue qu’elle est un modèle pour moi.

En quel secteur pensez-vous vous installer ? Que vous inspire le débat sur les dépassements d’honoraires ? Suivez-vous l’actualité professionnelle et pensez-vous vous engager syndicalement dans le futur ? 

C. L. : Je compte m’installer en secteur 2. Les abus de dépassements ne concernent en fait qu’une minorité de médecins. Je trouve le prix de la consultation chez un spécialiste qui a fait dix ans d’études plutôt dérisoire, comparé aux 50 euros ou plus que les gens acceptent de payer chez le coiffeur. Cela m’énerve beaucoup ! Comme m’énerve beaucoup de constater que les gens sont capables de faire des kilomètres pour aller faire les soldes, mais rechignent à en faire moins pour aller consulter un médecin. Je m’intéresse à l’actualité professionnelle et je serai sûrement syndiquée lorsque j’exercerai. A cet égard encore, je suivrai les conseils maternels !




Mieux vivre avec l’apnée du sommeil

358 – Construit comme un traité médical classique, l’ouvrage en suit le plan habituel : définition du Syndrome d’Apnée du Sommeil (SAS), physiopathologie, facteurs de risque précèdent les étapes de son diagnostic, l’énoncé de ses effets métaboliques et ses répercussions sur l’appareil cardiovasculaire, avant d’aborder, en détail, la partie consacrée au traitement.

Ce faisant, l’auteur assène parfois quelques affirmations dont le niveau de preuve peut laisser perplexe. C’est ainsi que l’apnée du sommeil serait la conséquence d’un mode de vie sédentaire, que le stress professionnel ou familial se traduirait par « une difficulté à respirer », ce qui reste à démontrer ; de même certains conseils thérapeutiques (une heure de marche rapide quotidienne, apprendre à jouer de la trompette (!), etc.), dont l’efficacité risque d’être en plus toute relative, ne sont pas à la portée de tous.

Qu’importe…

Au-delà de quelques approximations et petits parti pris, le livre fourmille d’encouragements et de recettes qui aideront le patient à accepter cette maladie ; plus précisément, elles lui feront prendre conscience de la nécessité d’accepter les contraintes d’un traitement prolongé ; car la difficulté de cette affection réside d’abord dans cette prise de conscience : au début du moins, c’est plus le ronflement qui fatigue le ou la conjoint(e) que la somnolence diurne qui fatigue le patient.

A cet égard sont particulièrement utiles les explications, pas trop techniques, que l’auteur énonce avec soin pour faire comprendre combien le SAS peut être pernicieux, sans pour autant être une maladie bénigne.

La partie thérapeutique est fort bien étayée, énonçant les diverses interventions chirurgicales possibles, les soins adjuvants, insistant naturellement sur le traitement princeps qu’est la ventilation en pression positive continue. Ce qui est intéressant et utile, c’est que l’auteur insiste à juste titre sur les difficultés d’acceptation de la technique par le patient, ses principales causes et, de son point de vue, les moyens d’y remédier.

Au passage, certains conseils, tel celui de faire tenir au patient lui-même le masque en s’endormant pour éviter la gêne de la fixation, manquent de réalisme ; mais dans l’ensemble, les « recettes » sont claires et astucieuses et contribueront sans nul doute à améliorer singulièrement l’observance.

Mais au-delà du catalogue complet et argumenté des possibilités thérapeutiques et de leurs indications, l’originalité de l’ouvrage tient à cette foule de détails pratiques qui rendront service au patient comme au médecin soucieux d’être efficace dans sa démarche d’éducation thérapeutique. Tous les cas de figure ou presque y sont abordés, de l’équipement minimum indispensable au patient qui voyage à la composition des repas du sujet en surpoids, en passant par les recommandations habituelles, mais bien argumentées sur le rôle de l’activité physique et la nécessité de l’arrêt du tabac.

Plus inattendu encore est ce chapitre sur « l’environnement du soir » où l’auteur aborde de façon presque touchante la préparation de la nuit et les rituels du coucher avant lequel « l’apnéique » est invité, dans une chambre aménagée avec attention, à la relaxation au moyen de techniques diverses et variées dont le training autogène éventuellement associé à l’écoute de la musique classique.

« Le sommeil est pour l’ensemble de l’homme ce que le remontage est à la pendule » ! Cette phrase de Schopenhauer, l’auteur la reprend à son compte pour bien rappeler en terminant combien sont cruciales les fonctions du sommeil dont la perturbation peut dérégler de ce fait tout l’organisme y compris souvent le psychisme.

C’est dire quelle importance il faut accorder à améliorer ce sommeil, source de réconciliation avec soi-même et au-delà de lutte contre la violence et le ressentiment !

Le cardiologue, de plus en plus confronté à l’apnée du sommeil pour peu qu’il s’y intéresse et pense à la rechercher, ne pourra se contenter de ce livre pour faire le tour de la question ; en revanche, l’ouvrage lui sera fort utile pour prodiguer à son patient tous les conseils avisés qu’il aurait quelque difficulté à se rappeler de son propre chef ; en fait, le plus simple, c’est qu’il le montre à ses patients en leur conseillant de l’acquérir. ■

Mieux vivre avec l’apnée du sommeil

Auteur : Michel d’Anielo
Editeur : Grancher
Pagination : 163 pages
Prix public : 15,00 €




Anciens numéros – 2012

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter