Prévention, parcours de soins, démocratie sanitaire : la nouvelle trinité sanitaire

Happiness
(©ISO K/Dalaprod/Goodluz/Andres Rodriguez)

365 – Ainsi donc la Stratégie Nationale de Santé (SNS), idée phare du Gouvernement en matière de santé et qui doit « refonder notre système de santé, reposera sur trois piliers : la prévention, le premier recours et la démocratie sanitaire. Nul ne contestera la nécessité du premier, tant il est vrai qu’il est grand temps de rééquilibrer notre système de santé historiquement fondé sur le tout curatif. Jugeant la loi de santé publique de 2004 était “trop complexe” et ses actions – plus d’une centaine – “trop disséminées”, Marisol Touraine souhaite fonder son action sur “des indicateurs chiffrés” et des priorités en petit nombre ». La ministre en a définit cinq : la jeunesse de « 0 à 25 ans » ; la lutte contre les addictions, source de maladies chroniques qui y sont liées ; la lutte contre le cancer, pour laquelle le Président de la République annoncera un troisième plan l’année prochaine ; la santé mentale « trop négligée au cours des dernières années » ; les personnes âgées, qui « doivent faire l’objet d’actions spécifiques ».

C’est le médecin traitant qui sera identifié comme « le professionnel en charge de la prévention ». A cet égard, la ministre a annoncé l’extension du dispositif conventionnel de la Rémunération sur Objectifs de Santé Publique (ROSP) à l’échelon national, avec la possibilité d’indicateurs régionaux.

« La révolution du premier recours », second pilier de la SNS, promeut la notion de parcours de soins. « Aujourd’hui, je veux fixer une règle d’or, a déclaré Marisol Touraine. Lorsque le médecin prendra en charge un patient, il aura la responsabilité et les moyens de garantir un parcours de soins adapté aux différentes étapes de la prise en charge, avec l’appui de coordinateurs et d’animateurs de parcours. » La généralisation du tiers payant est annoncé pour faciliter l’accès aux soins de premiers recours, ce qui ne fait pas l’unanimité chez les professionnels de santé. Le médecin traitant est affirmé comme étant « le pivot  du parcours de soins, en lien avec l’hôpital et les soins spécialisés ». Pour améliorer le financement d’actions de coordination, le PLFSS 2014 prévoit de nouvelles mesures de soutien au travail en équipe. « J’espère que l’enveloppe de 20 millions d’euros prévu à cet effet sur le FIR sera vraiment affectée à la coordination, commente Jean-François Rey, le président des spécialistes confédérés. Je serai totalement rassuré quand nous aurons vu des mesures concrètes. Ce qui m’intéresse, c’est une réelle coordination entre tous les professionnels de santé, qui ne se limite pas à une coordination ville/hôpital dont seraient exclus les spécialistes de proximité. Le risque n’est pas écarté. » Il n’est pas le seul à le craindre (voir les réactions ci-dessous). Les expérimentations de nouveaux modes de rémunération vont être prolongées et étendus avec «  150 expérimentations de plus ». De nouveaux métiers et des « transferts de compétences » sont annoncés également. Avec un certain flou dans le vocabulaire d’ailleurs.

Pas de coordination sans un système d’information performant

Dans son discours de présentation, Marisol Touraine affirme : « nous accélérerons la délégation de tâches ». Ce n’est pas la même chose et si les médecins sont ouverts aux délégations de tâches, ils n’entendent pas déléguer leurs compétences (voir l’entretien avec Eric Perchicot page 13). Pas de coordination sans un système d’information performant : la ministre a annoncé qu’elle donnerait le « top départ » l’année prochaine du DMP de deuxième génération qui sera ciblé sur les personnes âgées et les malades chroniques. « La révolution du premier recours, ce n’est ni la revanche de la médecine de ville sur l’hôpital, ni l’étatisation de l’offre de soins ambulatoire », affirme Marisol Touraine. Les médecins libéraux ne sont pas rassurés quant au deuxième point et auraient apprécier que la Stratégie Nationale de Santé en dévoile plus sur la réforme de l’hôpital annoncée au moment du rapport Couty.

Avec le troisième pilier de la SNS, il s’agit « d’entrer de plain-pied dans le nouvel âge de la démocratie sanitaire », selon l’expression de la ministre pour laquelle « la qualité d’un modèle de santé publique se mesure désormais à la place qu’il accorde aux patients ». Etant donné le peu de place que les usagers occupent actuellement au sein des différentes instances où leur présence devrait aller de soi, beaucoup reste à faire. Outre l’annonce de la possibilité d’actions collectives en justice dans le domaine de la santé, Marisol Touraine a également affirmé la volonté gouvernementale de faire « progresser la représentation des usagers en permettant aux associations de mieux se former ». Pour l’instant en tous cas, les moyens financiers de le faire ne leur sont pas accordés, comme le constate avec regret le Collectif Interassociatif Sur la Santé (CISS).

Cette Stratégie Nationale de Santé s’inscrit dans la durée : dix ans, c’est le temps que ce gouvernement – qui ne sera plus au pouvoir d’ici là – estime nécessaire pour cette refondation de notre système de santé. Sa concrétisation doit s’amorcer l’année prochaine par une loi de santé publique. Pour la préparer, de novembre prochain à février 2014, des « forums régionaux de santé » vont se dérouler dans les régions, sous l’égide des ARS, mobilisant citoyens, professionnels de la santé, élus et parlementaires. Ce genre d’exercice a déjà eu lieu par le passé, qui n’a pas déboucher sur des textes qui ont satisfait les différents acteurs de la santé… « Nous avons un peu moins d’un an pour persuader Marisol Touraine de ne pas aller vers une étatisation de notre système de santé, commente Jean-François Rey. La ministre nous jure que telle n’est pas son intention, mais attendons la rédaction de la loi. »

 

Tiers payant généralisé l’arbre qui cache la forêt et inquiète

 Depuis le dévoilement de la Stratégie Nationale de Santé par Marisol Touraine, la mesure qui a fait l’objet de nombre de commentaires est celle de la généralisation du tiers payant d’ici à l’année 2017. Il faut dire que pour la présenter la ministre a usé d’un vocabulaire qui ne pouvait que polariser l’attention sur cette mesure qui est un des éléments du « deuxième pilier de la SNS », celui de la structuration de la médecine de parcours à partir des soins de premier recours. « Le fil d’Ariane de ma politique, c’est de lever les obstacles qui entravent l’accès aux soins de nos concitoyens. Voilà pourquoi je veux lancer la révolution du premiers recours. D’abord, en continuant de lever résolument les obstacles financiers aux soins » a déclaré Marisol Touraine. Après avoir souligné l’importance de l’avenant 8 qui permettra de réguler les dépassements d’honoraires, la ministre a révélé l’étape suivante  qui « relève d’une ambition plus ample, qui fait écho à l’immense avancée qu’a constitué la CMU en 1999. Il s’agit de la généralisation du tiers payant pour l’ensemble des soins de ville avant 2017. Concrètement, dans quatre ans, au plus tard, les Français n’auront plus à avancer de frais lorsqu’ils iront consulter un médecin. » On notera au passage que l’horizon 2017, année des présidentielles, n’a sans doute pas été choisi au hasard qui permettrait, dans le bilan du président sortant,  d’inscrire une mesure qui ne peut être que populaire chez les usagers de la santé.

La mesure est toutefois beaucoup moins populaire chez les médecins, comme en témoignent les nombreuses réactions négatives qu’elle a suscitées. « La Stratégie Nationale de Santé pour l’instant se résume surtout aux grands principes d’une politique que tout le monde ne peut qu’accepter, commente Jean-François Rey, président de l’UMESPE (la branche spécialiste de la CSMF). Le problème, comme toujours, ce sont les moyens qui seront mis pour a concrétiser. Et le premier moyen annoncé, c’est le tiers payant généralisé, dont il n’est pas certain vu le bas niveau des consultations chez les généralistes et les consultants spécialistes – qu’il soit vraiment le sésame de l’accès au soins, et qui pose des problèmes techniques qui sont loin d’être résolus. Je me refuse à imaginer quoi que ce soit tant que ces problèmes techniques ne sont pas réglés, et si cela prend autant de temps que le DMP, ce n’est pas pour demain ? Par ailleurs, la ministre doit bien avoir conscience que beaucoup de médecins sont fondamentalement opposés à la généralisation du tiers payant et que l’imposer pourrait cristalliser l’hostilité de praticiens de tous bords, ce qui n’augurerait rien de bon pour la mise en œuvre de l’ensemble de la Stratégie Nationale de Santé. »

« Ne comptez pas sur les médecins pour être des collecteurs de franchises. C’est non. » Lors de l’université d’été de la CSMF, son président, Michel Chassang, a prévenu Marisol Touraine. La CSMF « exige une garantie de paiement des consultations et actes médicaux, sans délai et sans aucun frais supplémentaire ». Par ailleurs, elle met en garde « ceux qui considèrent la généralisation du tiers payant comme la potion magique qui va guérir le système de santé de tous ses maux. Il ne fera pas diminuer les recours aux urgences ». Et surtout, la CSMF déplore que « le risque inflationniste réel consécutif à la démonétisation de la valeur des actes et des consultations » n’ait pas été évalué, pas plus que ses conséquences sur la maîtrise des dépenses de santé.

 

Eric Perchicot (SNSMCV)

« Le paiement fait partie de l’acte thérapeutique »

Pour le secrétaire général du SNSMCV, le paiement de l’acte médical s’inscrit dans la relation médecin/patient et doit donc rester une option. 

PerchicotQuelles réactions vous inspire la Stratégie nationale de santé  présentée par Marisol Touraine ?

Eric Perchicot : C’est une jolie énumération de jolies choses, mais concrètement, on a du mal à voir sur quoi tout cela va déboucher. Parmi les éléments positifs figure évidemment la mise en avant de la prévention. Nous, médecins, lorsque nous sommes face à un malade, c’est très souvent être face à l’échec de la prévention, puisque la pathologie résulte souvent d’une mauvaise hygiène de vie, manque d’exercice, mauvaise alimentation, tabagisme, etc. On ne peut donc que souscrire à cette volonté affichée de faire de la prévention une priorité. Avec comme limite à cette annonce que la prévention coûte très cher et qu’il faudra donc y mettre les moyens nécessaires. Par ailleurs, l’expérience montre qu’expliquer aux gens qu’ils doivent changer leur mode de vie, cela prend du temps. Cette vision globale de la santé est positive, il faut maintenant passer des vœux pieux à la réalité. La page est blanche, nous partons de zéro et j’ai envie de dire « Chiche ! ».

L’idée de parcours de soins, de prise en charge coordonnée doit donc également vous satisfaire ?

E. P. : Bien sûr. Encore faut-il que les pouvoirs publics sortent du dogmatisme. Si le médecin généraliste peut être le coordonnateur du parcours de soins, il ne doit pas être forcément l’acteur tout puissant de l’équipe de soins. Par exemple, dans le cas d’une insuffisance cardiaque, c’est le cardiologue qui doit être le pivot. Donc, oui au parcours de soins coordonné, à condition de préciser la place du médecin généraliste, celle des spécialistes de proximité et celle de l’hôpital qui doit arriver après que l’organisation de ville a été sollicitée et non avant. Il ne peut pas y avoir de coordination efficace avec un cloisonnement ville/hôpital ou généralistes/spécialistes étanche. En outre, la coordination nécessite une fongibilité des enveloppes que l’hôpital redoute. Historiquement, l’hôpital dépend de l’Etat et la médecine libérale de l’Assurance Maladie. La dualité de la gouvernance doit être clarifiée, ce qui signifie souvent que l’Etat prend la gouvernance, et je ne suis pas sûr que l’Assurance Maladie ne soit pas pour nous, libéraux, meilleure alliée.

Que pensez-vous de la généralisation du tiers payant annoncée par la ministre pour favoriser l’accès aux soins ?

E. P. : C’est le type même d’une position dogmatique et qui repose sur une analyse erronée de la situation. Les études montrent d’une part que la première cause de renoncement aux soins est le trop long délai d’attente pour l’obtention d’un rendez-vous, d’autre part que ce renoncement concerne surtout les soins dentaires, les lunettes et l’audioprothèse, très peu les consultations chez les médecins. Gratuité ne signifie pas forcément accès aux soins. Le tiers payant peut être une bonne chose, à condition qu’il ne soit pas obligatoire. Vous remarquerez d’ailleurs que Marisol Touraine dit qu’il sera généralisé mais pas obligatoire. Pour beaucoup de patient, le paiement de l’acte est thérapeutique. Honorer son médecin fait partie de l’acte médical, vouloir généraliser le tiers payant c’est méconnaître la relation soignant/soigné. Le tiers payant doit rester une option inscrite dans cette relation soignant/soigné. Mais d’autres choses dans la stratégie nationale de santé sont potentiellement dangereuses.

A quoi faites-vous allusion ?

E. P. : Je pense au pouvoir donné aux Agences Régionales de Santé. je me méfie de la régionalisation. Laisser la main aux ARS, c’est risquer des applications délétères de la règle conventionnelle nationale qui doit s’appliquer partout de la même façon. En outre, il importe que la gouvernance soit équilibrée entre la ville et l’hôpital. Or, je n’oublie pas que les ARS sont issues des ex-Agences régionales de l’hospitalisation. Une autre mesure de la SNS part d’une analyse erronée. Le Gouvernement répond à la faible démographie médicale actuelle pour proposer des délégations de compétences. Cela n’a pas de sens : on peut déléguer des tâches mais pas des compétences. Par ailleurs, le numerus clausus ayant été relevé, nous connaîtrons une pléthore médicale à partir de 2023. Donc, attention de ne pas trop déléguer, car dans dix ans, nous risquons d’avoir trop de médecins généralistes et des compétences déléguées dans des conditions n’assurant pas forcément la qualité. Que des transferts de tâches s’effectuent pour la prévention vers des professionnels non-médecins formés pour cela, d’accord. Mais quand il s’agit de confier l’adaptation des doses d’anticoagulant à des non-médecins, je dis non ! Oui aux délégations de tâches, non aux transferts de compétences.

Globalement, comment jugez-vous la Stratégie Nationale de Santé ?

E. P. : Encore faut-il que la mise en musique soit bonne ! Et pour cela, il faut mettre autour de la table  tous les acteurs concernés pour une vraie concertation. Le tiers payant doit rester une option. Le travail en équipe, d’accord, à condition de préciser la place de chacun.

 

Les réactions sur la Stratégie Nationale de Santé (SNS)

 CSMF « Trop de questions sans réponse »

La confédération présidée par Michel Chassang note « quelques points positifs » dans la Stratégie Nationale de Santé. Rappelant qu’elle a soutenu la Rémunération sur Objectifs de Santé Publique (ROSP) introduite dans la convention de 2011, elle « se félicite de voir que la santé publique via la prévention et l’augmentation de la part des ROSP est désormais une priorité de la future réforme de notre système de santé ». De même, la CSMF trouve « logique » que dans le cadre de la généralisation de la complémentaire santé le Gouvernement « renforce les critères imposés aux contrats que proposeront les organismes complémentaires ». Elle souhaite pourtant que « le remboursement des compléments d’honoraires modérés par les praticiens adhérents au contrat d’accès aux soins fasse partie de la couverture minimale obligatoire qui sera offerte à tous les salariés, sans contrainte pour les médecins du secteur 2 ».

A côté de ces deux points positifs, la CSMF considère « plus nombreux  les points négatifs » de la SNS qui, pour elle, relèvent tous du même ver dans le fruit : « le fait que le Gouvernement veut élargir singulièrement les missions des ARS et leur donner tout pouvoir sur la médecine de ville ». « Révolution du premier recours », peut-être, mais « rétrécie et sous la coupe des ARS ». Le syndicat pluri-catégoriel estime en effet que « sans la médecine spécialisée », elle est « une aberration ». Des parcours de soins ? Soit, mais à condition qu’ils soient organisés par les médecins libéraux et « non des opérateurs institutionnels non médicaux, notamment, ceux de “plate-formes” d’appui des ARS dont la seule vocation serait d’orienter les parcours et de remplacer la décision médicale par une décision étatique ».

De même, la CSMF refuse que la rémunération des équipes des soins soit confiée aux ARS mais « exige qu’elle soit intégrée au cadre conventionnel ». Enfin, redoutant que « la future loi sur la SNS ne soit le véhicule d’une étatisation des soins de ville via les ARS », elle soupçonne le Gouvernement de ne pas réformer l’hôpital et de « tenter, une fois de plus, de pressurer la médecine de ville en la livrant aux soins de l’administration ».

SML « Une erreur stratégique »

Le Syndicat des médecins libéraux classe le tiers payant généralisé parmi les mesures de « nature inquiétante » de la SNS et la juge « contreproductive pour favoriser un accès aux soins ». Le SML condamne également le parcours de soins qui « fait abstraction des spécialistes et des autres professionnels de santé de proximité. « Le modèle organisationnel projeté qui place l’hôpital public au centre du dispositif avec des médecins territoriaux satellisés en accueil du premier recours constitue une erreur stratégique », estime le syndicat présidé par Roger Rua. Le SML « ne peut que se féliciter de la priorité donnée à la prévention sans pour autant partager les solutions proposées ».

FMF « Dix-huit mois pour ça ! »

Sous le titre « Marisol Touraine est la ministre des mesures phares pour éclairer en plein jour ! », la Fédération des médecins de France ne retient rien des propositions énoncées dans la Stratégie Nationale de Santé qu’elle commente aussi brièvement et qu’ironiquement. Le tiers payant généralisé ? Cela servira à quoi alors que « 95 % des médecins généralistes sont en secteur 1 et acceptent tous CMU, AME » et « pratiquent le tiers payant si nécessaire, malgré l’opposition de certaines caisses départementales ». Relancer le DMP ? En neuf ans, « 500 millions d’euros ont été engloutis pour un résultat nul alors qu’une messagerie sécurisée entre professionnels de santé serait possible en six mois et pour 24 millions ». Quant à la construction de 300 maisons médicales dans les déserts médicaux, le syndicat de Jean-Paul Hamon admet que c’est « une bonne nouvelle pour le bâtiment » mais s’interroge : « Avec quels médecins ? »

CISS « SNS : Du pain sur la planche »

Le Collectif interassociatif sur la santé « partage les constats présentés » par Alain Cordier et Marisol Touraine et la cohérence des trois axes retenus qui « nécessitent des évolutions puissantes ». Ainsi, le CISS estime que « faire le choix de la prévention, c’est offrir des financements adaptés à ce changement d’échelle » – quand actuellement « seulement 5 % à 6 % du budget des ARS y est consacré ! » – et passer de la prévention médicalisée à la promotion de la santé, donc « parier sur la société civile et ses organisations ». Pour le collectif, favoriser le parcours de soins implique une tarification autre que le paiement à l’acte, « sans quoi le service public territorial de santé ne sera qu’une appellation contemporaine pour des offres de soins juxtaposées et sans beaucoup de lien avec les offres sociales, comme par le passé ». Quant au renforcement du droit des patients, le CISS l’approuve, bien entendu, mais souligne qu’ « après l’échec du financement des associations des le cadre du FIR en 2013, le prochain PLFSS doit marquer le changement ».

Las ! A la lecture du PLFSS 2014 « déconnecté de la Stratégie National de Santé, le CISS a pu constaté qu’il ne contenait aucun financement pour la prévention et que le troisième pilier de la SNS était toujours « sans le sou ».




Zoé, la branchée et connectée

365 – Une fois n’est pas coutume, laissons de côté nos tablettes pour découvrir la révolution française qui aurait pu être une voiture revisitée façon apple.

avant-renault-zoe
(©Renault)

La Zoé, vous l’avez peut-être déjà vu dans les rues de votre ville, telle « un ange qui passe » (selon la formule de Renault), dans un son digne des films de science-fiction (1). Les premiers tours de roues faites à son volant nous font passer pour des novices de la route à chercher des repères qui ne sont plus là. Pas de vibration, un silence qui impressionne… et déroute. Devant soi, une platine version iPad et un compteur version soucoupe volante. On ne parle plus consommation en litre, mais en kilowatt. Le flux d’énergie devient presqu’une obsession : anticiper le réseau routier, géographier le terrain, localiser les bornes… On ne conduit plus une voiture, on pilote un « ORNI » (2). Les détracteurs vous parleront autonomie, liberté, vitesse. Vous, vous parlerez zénitude, silence, accélération, émission de CO2. Car la Zoé a son terrain de jeu : la ville (même si sa longueur est plus importante qu’une Clio et qu’il manque une vraie banquette rabattable). Déguisée en citadine, c’est une merveille qui rivalise d’habileté avec les petites voitures et d’accélération avec les grosses cylindrées… un vrai karting électrique qui se faufile partout avec un couple de 220 Nm dont on n’a pas l’habitude sur ce genre d’engin. Elle vous emmènera à allure soutenue durant 120 à 130 km avant de chercher une borne salvatrice qui vous fera revenir… ou continuer. L’ombre de la borne de recharge Toutes les personnes que nous avons croisées nous diront la même chose : « Vous allez jusqu’ou avec ? ». La peur de la Zoé est là : s’arrêter subitement sur le côté de la route sans énergie, même en sachant que Renault a prévu le coût du rapatriement gratuit, ça galvanise l’angoisse. Bien sûr qu’elle ne vous donnera pas l’idée de partir en vacances, même si certains l’ont déjà fait. C’est en seconde voiture qu’elle excelle dans notre vie de tous les jours… avec une nécessaire borne de recharge chez soi (3). Alors Zoé ? ou pas Zoé ? La Renault Zoé est – pour l’instant – la meilleure des citadines électriques. Elle apporte tous les avantages de la technologie actuelle avec une absence totale de bruit ou de vibration qui incite à conduire Zen et à jouer le jeu de la douceur avec l’accélérateur pour augmenter son champ d’action, surtout dans les bouchons où elle est la Reine (elle ne consomme rien à l’arrêt). L’autonomie est un enjeu crucial pour le développement du véhicule électrique. Avec une borne à la maison, votre vie d’automobiliste ordinaire ne souffrira d’aucune contrainte tant que vous restez dans une utilisation urbaine ou péri-urbaine.. Reste que les grands espaces ne sont pas encore pour elle, même si une révolution du développement des batteries est prévue dans les années à venir. Pascal Wolff

(1) Jusqu’à 30 km/h, La Renault Zoé émet un son particulier pour prévenir les personnes susceptibles de se trouver sur la chaussée (piétons, cyclistes…), mais peu de personnes entendent vraiment ce bruit, et il vaut mieux être extrêmement prudent en milieu urbain.
(2) Objet Roulant Non Identifié.
(3) Nous avons atteint les 140 km avec une autonomie restante de 7 km, mais il vaut mieux prévoir une borne de recharge dès les 20 km restants.

 

Bienvenue chez K 2000

Renault a axé sa communication autour de sa tablette R-Link (1) qui est intégralement relié au réseau mobile grâce à une connexion de type Edge (une connexion 3G n’est pour l’instant pas envisagée). Plusieurs applications y sont intégrées, dont la navigation TomTom Z.E. Live qui permet – entre autres – de visualiser le rayon d’action correspondant à l’autonomie du véhicule et sa capacité à l’atteindre et de gérer ainsi sa consommation énergétique. Le R-Store donne accès à un catalogue assez complet, mais les applications les plus intéressantes sont payantes. Sans cette tablette tactile, la Zoé n’aurait pas l’aura dont elle peut se prévaloir, car elle en est la pièce maîtresse. Tout le monde y trouve son compte, mais gare à la conduite, car on a une sacrée tendance à passer son temps à regarder l’écran plutôt que la route…  Enfin, il y a un certain nombre de bugs qui gâchent la fête, un bluetooth et une prise Usb bien châtouilleux, ainsi qu’une lenteur parfois désespérante des applications (due en partie au edge). Des mises à jour sont faites régulièrement (et sans manipulation de votre part). Espérons qu’elles viendront à bout de ces désagréments.

(1) R-Link a été consacré meilleur système embarqué par une étude indépendante devant les ténors du marché tels l’Audi Connect ou le ConnectedDrive de BMW.

 

La technologique

La récupération d‘énergie. Le freinage récupératif emmagasine l’énergie cinétique à la décélération et au freinage. Le moteur se transforme en un système de dynamo particulièrement efficace pour vous faire économiser de nombreux kilowatts. Climatisation/chauffage. La pompe à chaleur fonctionne comme une climatisation réversible pour rafraîchir ou réchauffer l’habitacle. Un principe nettement moins énergivore que les équipements traditionnels. Les pneus. La Zoé est le premier véhicule à être chaussé de pneus à haute efficacité énergétique lui permettant d’accroître son autonomie. Le chargeur. Il s’adapte à la puissance d’énergie disponible à la prise jusqu’à 43 kW (jusqu’à 80 % de sa batterie en 30 min). Le particulier peut se faire installer des bornes d’une puissance de 3 kW à 7 kW (6 à 9 heures de recharge).




Cardiologie pédiatrique pratique : du fœtus à l’adulte

365 – C’est un lieu commun de dire que la cardiologie pédiatrique s’est profondément modifiée ces dernières décennies : dans un premier temps, le développement de la chirurgie a justifié l’individualisation de la cardiologie pédiatrique en tant que discipline spécifique ; plus tard, l’essor de l’échocardiographie a permis de détecter et traiter les cardiopathies congénitales de plus en plus tôt  et d’étendre la cardiologie infantile jusqu’au fœtus.

generisches buch 1Cette spécialité dans la spécialité, qu’elle soit cardiologique ou pédiatrique, est en fait assez peu enseignée et du coup souvent ignorée, ce qui est d’autant plus regrettable que les malformations cardiaques sont fréquentes et le plus souvent curables, à condition que leur prise en charge soit précoce et adaptée.

C’est dire l’intérêt d’un tel écrit dans lequel les auteurs abordent tous les aspects de la question.

L’ouvrage peut globalement se scinder en trois parties

La première, intitulée tout bonnement « cardiologie pédiatrique », passe en revue les différentes méthodes d’exploration et décrit les différentes cardiopathies congénitales de façon exhaustive et claire, grâce à un texte simple et direct et de très nombreux schémas faciles à déchiffrer, ce qui n’est pas toujours le cas dans cette pathologie aux circuits souvent compliqués.

La deuxième partie est surtout consacrée à l’échocardiographie TM initialement, et progressivement enrichie du doppler continu, pulsé, couleur et enfin du tridimensionnel ; la cardiologie fœtale fait l’objet d’un développement particulièrement intéressant et accessible, faisant bien comprendre l’intérêt majeur qu’il y a à dépister avant la naissance les cardiopathies complexes, ne serait-ce que pour individualiser la prise en charge ou, quand c’est possible, rassurer les familles en cas d’antécédents graves.

Dans un dernier chapitre, les auteurs s’attachent à rappeler qu’il se trouve de plus en plus d’adultes porteurs de cardiopathies congénitales opérées mais non guéries, posant au contraire des problèmes spécifiques, le plus souvent liés à leurs interventions. Plus de 80 % des enfants naissant aujourd’hui avec une cardiopathie congénitale atteindront l’âge adulte, et l’on peut déplorer (comme on pourra le lire un peu plus loin à la rubrique « dernières nouvelles ») qu’il n’existe pas en France, à une exception près, de structure dédiée à ces patients.

L’iconographie, remarquable comme on l’a dit plus haut, est enrichie d’une imagerie abondante et détaillée consultable sur internet.
Les auteurs, Alain Batisse, Laurent Fermont et Marilyne Lévy, sont cardiopédiatres et exercent à Paris.
Cet ouvrage s’adresse à tous ceux qui peuvent être confrontés à ces situations dans leur pratique quotidienne, internes, cardiologues, pédiatres, obstétriciens, bref, il est à mettre entre toutes les mains.

Auteurs : Alain Batisse, Laurent Fermont, Marilyne Lévy
Editeur : Doin
Prix : environ 48,00 €
Pagination : 330 pages



Finances hospitalières : un équilibre fragile et circonstanciel

365 – Parmi les facteurs de fragilité de la situation financière des hôpitaux, la Cour des Comptes souligne l’insuffisance des efforts de maîtrise de la dépense.

Businessman showing empty pockets to doctors
Un équilibre financier dû à des facteurs « non reconductibles » ou « strictement comptables ». (©Mauricio Jordan)

Au chapitre « maîtrise des dépenses hospitalières », le rapport annuel de la Cour des Comptes sur l’application des lois de financement de la Sécurité Sociale analyse la situation financière des hôpitaux et constate, au vu des premiers résultats fournis en mai dernier, que les hôpitaux ont retrouvé l’équilibre avec un résultat global consolidé net (somme des déficits et des excédents) qui serait excédentaire de 143,6 millions d’euros après un déficit de 304,6 millions d’euros en 2011, pour un total de produits de 70,3 milliards d’euros. Pour autant, les magistrats de la Cour des comptes soulignent que cet équilibre est « largement circonstanciel ». Il est dû en effet à des facteurs « non reconductibles » ou « strictement comptables ». L’augmentation de plus-values sur cessions d’actifs (+ 97 millions d’euros) et surtout celle des aides d’urgence attribuées aux hôpitaux les plus fragiles constituent les « facteurs non reconductibles ». Ces aides d’urgence ont atteint 400 millions d’euros l’année dernière alors qu’elles n’avaient été que de 275 millions d’euros en 2011. Du côté des « facteurs strictement comptables », plusieurs modifications intervenues en 2012 ont eu « pour effet d’améliorer les résultats de cet exercice » relève la Cour des Comptes, comme, par exemple, le fait de demander aux établissements d’enregistrer au compte d’exploitation et non au bilan les aides exceptionnelles accordées en cas de difficultés de trésorerie. Par ailleurs, l’endettement hospitalier a poursuivi sa progression : la dette aurait augmenté de 2,6 milliards d’euros entre 2011 et 2012, atteignant plus de 28 milliards d’euros.

Enfin, le rapport de la Cour des Comptes souligne sur le caractère « limité » de la maîtrise des dépenses hospitalières accentuant la fragilité de la situation financière des hôpitaux. « Alors même que le retour à l’équilibre de l’Assurance Maladie nécessitera des efforts encore accrus de maîtrise de la dépense, une résorption durable des déficits hospitaliers impose une accentuation des réorganisations pour dégager les gains de productivité et d’efficience qui la conditionnent », insistent les magistrats de la rue Cambon. Ils préconisent pour ce faire de « recentrer le dispositif contractuel unissant les ARS aux établissements sur les hôpitaux présentant les plus forts enjeux financiers » et de « conditionner l’attribution d’aides exceptionnelles à l’exploitation à la réalisation d’efforts structurels ».

 




L’exception française

365 – Chaque année, selon les sources, les AVK sont responsables de 4 à 5 000 décès.
Ils sont de ce fait largement sous-utilisés, notamment chez les personnes âgées, et le nombre d’AVC évitables dans cette population reste consternant.
Pourtant les AVK possèdent un antidote.
Les nouveaux anticoagulants oraux, que des générations entières de médecins appelaient de leurs vœux, font, tous, pour une efficacité équivalente, moins saigner que les précédents. Ce sont les études et les registres, tous concordants, qui le disent, en tout cas pour l’instant, et on peut les croire puisque le Professeur Even lui-même ne les a pas démentis.
Mais, pour l’instant, ils n’ont pas d’antidote spécifique.
Et c’est au fabricant de l’un d’entre eux que quatre familles font un procès pour complications hémorragiques majeures.
Il faut dire qu’un syndicat de « jeunes » biologistes , sans doute plus éclairés ou plus altruistes que leurs aînés qui n’ont pas jugé utile de s’associer à leur cri d’alarme, avait alerté le pays pour tenter d’éviter, disaient-ils, un désastre sanitaire inéluctablement provoqué à brève échéance par ces NOACs.

Il en a fallu beaucoup moins pour que les autorités sanitaires françaises déremboursent le Multaq, victime apparente de deux cas d’hépatites non prouvées et d’une étude négative dans une indication non validée.
Il en a fallu encore moins pour qu’elles mettent au placard un antihypertenseur récent, issu d’une nouvelle famille thérapeutique.
Gageons qu’au premier accident médiatisé survenu avec un antiagrégant plaquettaire, pour peu qu’il y ait une action judiciaire retentissante, nos gouvernants remettront en cause leur commercialisation.

Alors, adieu les stents ?
On reviendrait au bon vieux temps où l’on soignait les syndromes coronaires aigus par le repos au lit.
On traitera les phlébites des survivants par les bons vieux AVK.

Au fait, qu’attend-on pour rembourser et promouvoir l’appareil d’automesure de l’INR qu’utilisent, sans difficulté apparente, la plupart des pays limitrophes ?
Il paraît (on prétend que ce sont les jeunes biologistes qui l’affirment) que le procédé n’est pas à la hauteur…

Vive l’exception française

Vive la médecine à la Française.

 

Christian Aviérinos
Directeur de la publication

 




DPC  hospitalier : un « fiasco » ?

Selon une enquête menée par deux syndicats, une majorité de praticiens hospitaliers ne connaissent pas le dispositif du DPC.

La Confédération des Praticiens Hospitaliers (CPH) et Avenir hospitalier, ont effectué une enquête sur le DPC. Les réponses obtenues des 5 500 praticiens qui y ont participé font dire aux deux syndicats que le DPC est « un vrai fiasco ». En effet, l’enquête montre que 60 % des PH interrogés ignorent tout du dispositif, que 70 % disent ne pas avoir été informés par leur établissement et 72 % par leurs organisations professionnelles, que plus des trois quarts (77 %) n’ont pas réfléchi à leur DPC et que 84 % ignorent tout des recommandations de la HAS en la matière. En outre, 66 % des PH ne savent pas si leur établissement est agréé pour le DPC et 74 % ne savent pas non plus s’il adhère à l’Association Nationale pour la Formation du personnel Hospitalier (ANFH) chargée de collecter et de gérer le financement du DPC hospitalier. Quant à la confiance que les praticiens hospitaliers ont dans le financement prévu, elle est très, très relative… Selon l’enquête « la moitié des personnes interrogées pense que le forfait national par PH consacré au DPC sera de moins de 500 euros, 18 % de 750 euros, 20 % de 1 000 euros ». Or, les deux syndicats rappellent qu’en 2010-2011, « 80 % des PH se sont formés durant cinq à dix jours et y consacrant en moyenne 2 360 euros ».

Président de l’ANFH, Fernand Brun ne conteste pas l’insuffisance de moyens financiers pour le DPC, mais relativise la méconnaissance des PH du DPC, dispositif nouveau et dans la construction duquel « l’ANFH est pour rien ». Que ce dispositif soit complexe et pose des questions à ce jour sans réponse, c’est certain. Ainsi, le CPH et Avenir Hospitalier se demandent ce qui se passera si un praticien hospitalier – libre de choisir son action de DPC – en choisit une hors du plan de DPC que chaque CME est tenue de mettre en place. Pour les deux syndicats, un moratoire sur le DPC des hospitaliers pourrait être envisagé, le temps de clarifier les choses et de diffuser l’information auprès des PH. Un rapport de l’IGAS sur la mise en œuvre du DPC est en cours, à la demande de Marisol Touraine. Il sera intéressant de voir si les conclusions seront aussi sévères que les résultats de cette enquête syndicale.

 




Terrazas De Los Andes Malbec Reserva 2010 – Mendoza – Argentina

Les Argentins se plaisent à raconter qu’ils vénèrent 3 dieux : le tango, Evita Peron et Maradona. Un récent voyage dans ce pays magnifique m’a également permis d’apprécier 2 demi-dieux épicuriens : l’inégalable viande de bœuf et leurs puissants vins rouges.

La remarquable progression qualitative des vins argentins depuis 20 ans est expliquée par divers facteurs : l’arrivée d’investisseurs et œnologues du monde entier, la rénovation et la création de bodegas (caves), la plantation de la vigne à des altitudes de plus en plus élevées, en moyenne 1 000 mètres jusqu’à 3 000 dans la province de Salta ! A de telles hauteurs, les températures sont suffisamment basses, la nuit, pour permettre des cépages rouges aux arômes intenses et à la couleur profonde.
La région de Mendoza est incontestablement la vedette de la viticulture argentine grâce au cépage emblématique malbec introduit au XIXe siècle à partir de plants bordelais. Le goût des malbecs argentins est fort différent de celui des vignobles cadurciens, d’autant qu’il s’est adapté au climat de l’hémisphère sud, avec des baies plus petites et plus denses.
Terrazas de Los Andes, créée en 1999 dans la région de Mendoza sur le haut plateau de Lujan de Cuyo par la bodega Chandon, spécialiste des vins effervescents, filiale de LVMH, s’est développée sur un vignoble implanté fin XIXe siècle sur une série de terrasses à une altitude variant de 800 à 1 500 mètres. La région bénéficie d’atouts importants pour la viticulture. Sise au pied de la Cordillère des Andes, dont les hautes cimes stoppent les vents humides du Pacifique, elle réalise une oasis de verdure au sein d’un désert semi-aride. Malgré une latitude quasi tropicale, l’altitude procure des hivers froids favorisant la dormance de la vigne, un soleil intense, avec un air sec, dans la journée, des nuits froides avec des amplitudes thermiques importantes. Le problème est la sécheresse, car l’eau peut devenir rare, du fait de la faiblesse des précipitations, si bien que de nombreux vignobles sont irrigués. Terrazas utilise le système traditionnel indien d’inondations par canalisations alimentées par la fonte des neiges.
Les maladies de la vigne étant rares grâce à l’air froid des montagnes, nombreuses vignes sont franches de pied, non greffées, en particulier pour Terrazas sur la parcelle de Las Compuestes. Le soleil intense stimule la photosynthèse et favorise la maturation naturelle des phénols.
La bodega Terrazas de Los Andes a optimisé l’implantation des cépages, chacun, trouvant à une altitude différente, l’expression du maximum de ses qualités, le malbec étant implanté à plus de 1 000 mètres sur un sol sableux, alluvionnaire et graveleux.
Les vignes, plantées à une densité de 5 500 pieds/ha en taille Guyot, sont marcottées, les manquants étant vite remplacés, pour obtenir un âge moyen élevé. Les vendanges, manuelles avec un double tri sélectif, se déroulent tardivement vers la 2e ou 3e semaine d’avril après une longue maturation des baies durant 75 jours (45 en moyenne dans le Bordelais).

Un cheval prestigieux

La bodega dispose d’une grande winery moderne, mais dont les murs et colonnes de brique gardent un certain charme suranné. Sa réputation n’est plus à faire, d’autant que le propriétaire LVMH a largement répandu en France, ses meilleures productions. La marque a établi avec Pierre Lurton de Cheval Blanc, une association donnant naissance à un vin argentin prestigieux : Cheval des Andes plus fougueux et plus coloré que son cousin libournais.
La vinification, assurée par Roberto De la Motta, passe par une macération en cuves avec pigeage manuel s’étendant sur 3 semaines, un élevage durant 12 mois avec soutirage tous les 3 mois, en barriques de chêne pour 80 % d’origine française avec 30 % de bois neuf.
Le Malbec Reserva 2010 Terrazas de Los Andes, habillé d’une robe sombre grenat foncée avec quelques nuances de pourpre, est un vin complexe, long en bouche, riche et crémeux, sans lourdeur malgré ses 14,5°.
Le nez est envahi par les fruits noirs, cassis, myrtille, les épices douces, muscade, paprika, le graphite, avec des touches boisées de vanille et chocolat. La bouche ressent une légère sucrosité aux arômes de prunes et pruneaux, avant que n’apparaissent des notes plus typiques du malbec, réglisse et violette. On est charmé par l’intensité du fruit, la suavité et le velouté des tanins. La finale, toute en longueur entre puissance et raffinement, retrouve une pointe d’acidité équilibrant le fruité.
Ce Malbec se confirme être le compagnon idéal des belles grillades de bœuf bien saignantes, vuelta y vuelta, fierté des Argentins, tel le baby beaf (500 à 800 g/personne tout de même !), mais aussi entrecôtes, côtes de bœuf, T-bone, bavettes, etc., qu’elles soient cuites classiquement sur gril ou barbecue ou selon la technique « al asador », en position verticale. Ce vin, par son intensité aromatique, épousera avec plaisir les autres classiques de la gastronomie argentine : en entrée, empanadas à la viande, puis choripanes (saucisses), chiporro (agneau patagon), carrés d’agneau sauce chimichurri. Il ne se déplaira pas en compagnie d’un fromage à pâte dure : comté, beaufort, tommes diverses.
La beauté des paysages, la richesse culturelle de Buenos-Aires, la musique de Carlos Gardel, l’accueil chaleureux des Argentins (si on ne parle pas de foot), le parfait mariage du bœuf et du malbec ne peuvent que nous faire clamer : Hasta luego ! Vaya Argentina ! n




Encore plus, toujours plus, ça suffit !

365 – Christian Ziccarelli – Il n’y a pas une semaine où l’Etat-pieuvre, sous l’œil gourmand de nos dirigeants et hauts fonctionnaires, ne dévore sournoisement des pans entiers de la médecine libérale. Entre les discours, où fleurissent les mots « décloisonnement, rapprochement public-privé, hôpital-ville », et les faits le fossé est immense. Combien de fois n’ai-je dénoncé dans ses lignes les actions « tout public » de certains directeurs d’ARS.  Et que dire des  directeurs d’hôpitaux, tout dernièrement celui de  Montbrison, où les cardiologues libéraux, devenus non indispensables à la bonne marche du service de cardiologie, sont congédiés par simple lettre recommandée, en leur supprimant en plus l’accès aux plateaux techniques.  Il est vrai que les établissements publics, sous une image d’humanité, ne se privent pas d’exploiter nos collègues étrangers, avec des salaires de misères et des durées de travail hebdomadaire nous attirant les foudres des autorités européennes, tout en leur faisant miroiter une future qualification de spécialité après un certain temps passé dans un service. Dans le même temps, on exige de nos étudiants désirant obtenir une qualification de spécialité, des connaissances et une technicité de très hauts niveaux. Difficile à accepter ?

Nous allons vers une étatisation de la médecine libérale, une fonctionnarisation de notre statut, le tout géré par des politiques dont l’incompétence au fil des années est criante, le déficit abyssal de l’Etat, se creusant inéluctablement depuis bientôt quarante ans, en étant le meilleur exemple. Un comité des « sages », sans médecin libéral (hormis un médecin  généraliste « salarié » déguisé en médecin libéral) a rédigé un rapport, repris par la Ministre de la Santé sous le titre pompeux de « Stratégie nationale de santé », sensé orienter la politique de santé dans les années à venir. Une fois de plus, le médecin spécialiste de proximité est le grand oublié de ce rapport, prônant entre autre la démocratie sanitaire, le « tiers payant généralisé », une aberration de plus. Un combat dépassé me dit-on, il faut vivre avec ton temps.  Les dépenses n’ont pas fini de progresser ! La rémunération à l’acte fondement de la médecine libérale va-t-il devenir une exception ?

Plusieurs articles dans Le PLFSS 2014 confirment l’obstination de l’Etat : le FIQCS (Fonds d’Intervention pour la Qualité et la Coordination des Soins) dédié à la médecine de ville est fondu dans le FIR (Fonds d’Intervention Régional) géré par les ARS et donc destiné aussi aux établissements publics, nous redoutons déjà les arbitrages futurs ! Pour réduire le déficit (dont on veut nous rendre responsable), lié en grande partie à l’effondrement de recettes du à la diminution de la masse salariale (3,5 % en 2 ans), il suffirait entre autres de diminuer le tarif des actes des biologistes, des radiologues ! Pourtant c’est grâce aux soins de ville que l’ONDAM est respecté pour la troisième année de suite et sous-exécuté d’environ 500 millions d’euros.

Non à la disparition de la médecine libérale…

Christian Ziccarelli




Prise en charge pluridisciplinaire : chaque médecin doit assurer le suivi de ses prescriptions

365 – (A propos d’un arrêt de la Cour de Cassation)

(©dedMazay-Pascal Wolff)
(©dedMazay-Pascal Wolff)

Article 64 du code de déontologie (Article R. 4127-64 du code de la santé publique)

Lorsque plusieurs médecins collaborent à l’examen ou au traitement d’un malade, ils doivent se tenir mutuellement informés ; chacun des praticiens assume ses responsabilités personnelles et veille à l’information du malade.
Chacun des médecins peut librement refuser de prêter son concours, ou le retirer, à condition de ne pas nuire au malade et d’en avertir ses confrères.
Les cardiologues, notamment en établissement, sont régulièrement confrontés à la prise en charge pluridisciplinaire de patients.
Cette pratique nécessite un certain nombre de précautions, rappelées par un arrêt récent de la Cour de Cassation, et concernant un obstétricien et un anesthésiste.

Les faits à l’origine de l’arrêt de la Cour de Cassation

Une patiente avait présenté dans les suites de son accouchement une phlébite cérébrale.
Elle avait été suivie à la fois par son obstétricien et par l’anesthésiste réanimateur, qui avait pratiqué l’anesthésie péridurale.
Ce dernier, constatant le lendemain d’importantes céphalées, lui, prescrit une injection de TIAPRIDE pour la soulager.
La phlébite cérébrale sera diagnostiquée tardivement, et responsable d’une hémiplégie séquellaire.

Parcours judiciaire

Après expertise collégiale, l’obstétricien est condamné à réparer le préjudice de sa patiente pour retard fautif de diagnostic.
Un premier renvoi en garantie contre l’anesthésiste devant une Cour d’appel confirme que le retard fautif de diagnostic est le fait du seul obstétricien et dégage la responsabilité de l’anesthésiste. Les juges ont suivi l’avis des experts qui avaient estimé que la phlébite cérébrale, qui s’était manifestée par des céphalées initiales, était une complication classique du post-partum, dont le diagnostic relevait de la compétence de l’obstétricien, sans que l’on puisse admettre que ce diagnostic devait être posé par l’anesthésiste, sous prétexte qu’on lui avait signalé ces céphalées qu’il avait soulagées par l’administration de TIAPRIDE.

Cet arrêt est cassé par la Cour de Cassation.
L’affaire est renvoyée vers une deuxième Cour d’appel et celle-ci, de nouveau, conclut que seul l’obstétricien est fautif.
Dans un deuxième arrêt, la Cour de cassation vient de nouveau de casser ce jugement.

Arrêt du 16 mai 2013 de la Cour de Cassation

En se référant à l’article 64 du code de déontologie, la Cour conclut que l’on ne peut pas exclure la responsabilité conjointe de l’anesthésiste : « Qu’en statuant ainsi, quand elle avait constaté que M. Z. (NDLR : l’anesthésiste ) avait été appelé au chevet de Mme Y. en raison de la survenance de céphalées et lui avait prescrit un neuroleptique pour les soulager, de sorte qu’il lui incombait de s’informer de l’effet de ce traitement, notamment aux fins de déterminer, en collaboration avec le gynécologue obstétricien, si ces troubles étaient en lien avec l’anesthésie ou avec l’accouchement, ce qui aurait pu permettre un diagnostic plus précoce, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses constatations au regard des textes susvisés.»

Arguments de la défense de l’obstétricien, qui avait engagé cette action en garantie contre son confrère : 

« … que la C our d’appel ne pouvait écarter la responsabilité du docteur Z. qui avait pris en charge le traitement des céphalées en prescrivant lui-même un traitement au lendemain de l’accouchement…
… que l’anesthésiste qui prescrit un traitement à la suite d’un accouchement pour céphalées, doit assurer le suivi de ce traitement et notamment s’assurer de ce que la réaction du patient confirme le diagnostic qui l’a conduit à prescrire ce traitement. »

 

Commentaires

Attaquer un de ses confrères, pour essayer de restreindre sa responsabilité, comme dans cette affaire, n’est pas du meilleur effet. Il vaut mieux, dans l’intérêt à la fois des malades et des médecins,  prévenir ce type de situation, qui résulte souvent d’un manque de communication entre les différents intervenants. C’est simple à dire, mais pas toujours facile à mettre en pratique pour différentes raisons, notamment de disponibilité et il est d’autant plus important d’en être conscient.
Les cardiologues exerçant en établissement interviennent régulièrement en dehors du service de cardiologie, en particulier en chirurgie, à la demande de confrères d’autres spécialités. Même s’il s’agit de demandes d’avis considérées comme ponctuelles, les suites, comme on le voit dans cet exemple peuvent engager leur responsabilité.
C’et une contrainte qui, sur le plan pratique, n’est pas toujours aisée  à assumer, notamment lorsque l’on est de garde en USIC et que l’on est appelé dans un autre service. En effet, les gardes se font habituellement par roulement au sein d’une équipe, par périodes de 24H, et le cardiologue n’est pas forcément présent à la clinique les jours suivants, quand il consulte à son cabinet. D’où l’importance de l’inscription des consignes dans le dossier de soins et de leur  transmission lors de la « relève », même après une nuit blanche, voire deux s’il s’agissait d’une garde de week-end.

Le commentaire de l’Ordre des médecins, sur son site internet, résume bien les précautions à prendre en cas de prise en charge pluridisciplinaire : « Chaque intervention correspond aux compétences particulières de chaque médecin qui en informera au fur et à mesure le patient mais gagnera souvent à échanger son point de vue avec celui de ses confrères. Les relations bilatérales n’excluent pas des rencontres à plusieurs dans un cas compliqué. Il reste souhaitable que la conclusion de ces échanges soit enregistrée par écrit dans le dossier du patient. »




Médicaments remboursables : recul historique du marché en 2012

365 – L’année dernière, les laboratoires ont versé près de 330 millions d’euros de remises à la Sécurité Sociale, essentiellement pour des dépassements de vente en volume de leurs produits par rapport au taux « autorisé ». Mais il n’y a pas eu de régulation collective puisque, pour la première fois, le marché des médicaments remboursables a reculé.

coût de la santé
Les médicaments génériques ont enregistré une progression de 17,9 % en 2012. (©Aurélien Pottier)

Première historique, selon les données du Groupement pour l’Elaboration et la Réalisation de Statistiques (GERS), le marché des médicaments remboursables en prix fabricant a baissé de 2,2 % à 25,18 milliards d’euros, avec une chute de 3,4 % à 18,86 milliards en ville et une croissance de 4,2 % à 6,32 milliards à l’hôpital. Les antirétroviraux, les antirhumatismaux, les traitements de la DMLA, les antidiabétiques et les anticoagulants sont les classes thérapeutiques qui ont le plus contribué à la croissance du marché. A l’inverse, les classes qui ont enregistré les plus forts reculs sont les modificateurs du système rénine-angiotensine, les hypocholestérolémiants, les IPP, les anti-ostéoporotiques, les vasodilatateurs et les nootropiques.

La vente des médicaments génériques a enregistré une forte progression de 17,9 % à 3,1 milliards d’euros. Leur taux de pénétration (en volume) était en 2012 de 71 % au sein du répertoire, contre 66 % en 2011. Sur le marché de ville, la part des génériques atteint aujourd’hui 27,5 % en volume et 16,5 % en valeur.

A l’hôpital, le chiffre d’affaires des médicaments de la liste en sus a augmenté de 3,3 % à 2,5 milliards d’euros. Les médicaments inclus dans les GHS sont restés stables et représentent 2 milliards d’euros. Les médicaments orphelins ont progressé de 8,6 % (1,2 milliard d’euros), et représentent 5 % du marché.

330 milliards versés à l’ACOSS

Selon le dernier rapport du Comité Economique des Produits de Santé (CEPS), les laboratoires pharmaceutiques ont versé 327,5 millions d’euros de remises à l’Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale (ACOSS) au titre de l’année 2012. Le CEPS souligne que les industriels n’ont eu à verser des remises qu’au titre de leurs produits, pour ceux qui étaient concernés. En effet, la régulation financière collective n’a pas eu à s’appliquer puisque le marché a reculé de 2,4 % l’année dernière alors que le taux K au-delà duquel des remises sont versées (encadré ci-dessous) avait été fixé à + 0,5 %. Le montant total des remises versées au titre des clauses par produits s’est élevé à 459,6 millions d’euros, une énorme majorité (377 millions d’euros) pour des dépassements en volume, loin devant la clause sur le chiffre d’affaires plafond des médicaments orphelins (46,4 millions d’euros), celle du coût du traitement journalier (32,5 millions d’euros) et celle de posologie (3,5 millions d’euros). A titre indicatif, en 2011, les laboratoires avaient versé 310,5 millions d’euros.

Le CEPS souligne également que les baisses de prix des médicaments de ville ont généré une économie de 924 millions d’euros, dont 600 millions pour les médicaments sous brevet.

 

Remises conventionnelles et clauses de sauvegarde

Chaque année, le PLFSS fixe un taux d’évolution « autorisé » dit « taux K » du chiffre d’affaires des médicaments remboursables et rétrocédables, sur la base duquel sont évaluées les contributions dues par l’industrie pharmaceutique. Pour les calcul des ces contributions versées à l’ACOSS, les laboratoires ont le choix entre passer convention avec le CEPS ou se voir appliquer le mécanisme de clause de sauvegarde. Cette dernière consiste en un versement d’une contribution par un laboratoire quand son chiffre d’affaires hors taxe s’est accru, par rapport à celui de l’année précédente, d’un pourcentage excédant le taux K fixé par la LFSS. Le taux de la contribution varie en fonction du dépassement du taux K. 

Les laboratoires qui optent pour la convention avec le CEPS sont exonérés de la clause de sauvegarde mais doivent s’acquitter de « remises conventionnelles ». Il existe trois types de remises conventionnelles :

• Au niveau des produits : le laboratoire s’engage sur les prix et/ou volumes de ventes de ses produits remboursables. En cas de dépassement, une partie du dépassement est reversée à l’ACOSS ou alors, le prix du produit est baissé.

• Au niveau des agrégats thérapeutiques (regroupement de classes thérapeutiques : le CEPS définit annuellement des agrégats thérapeutiques et détermine pour chacun un taux d’évolution « autorisé ». La somme pondérée des taux d’évolution de chaque agrégat doit être égale aux taux K. Si le taux d’évolution est dépassé pour un agrégat, une partie du dépassement devra être reversée par les laboratoires commercialisant des médicaments de cet agrégat.

• Au niveau du chiffre d’affaires : un laboratoire peut être redevable, le cas échéant, d’une remise assise sur l’écart éventuellement constaté entre son chiffre d’affaires et un seuil fixé annuellement par avenant à la convention.




Menace d’étatisation sur les caisses de retraite des libéraux

365 – Un article du projet de réforme des retraites pourrait aboutir à une mise sous tutelle de l’Etat des caisses autonomes de retraite des libéraux en général et des médecins en particulier.

L’allongement de la durée de cotisation prévue par le projet de réforme de la retraite a polarisé les débats sur le sort des salariés. D’ailleurs, rien dans le projet de loi gouvernemental ne devait a priori concerner les professions libérales. Mais voilà qu’en prenant connaissance du texte, les responsables syndicaux et les gestionnaires de la CARMF ont découvert un article 31 qui concerne bel et bien les professions libérales et les médecins libéraux en particulier. Ledit article 31 prévoit la désignation par arrêté ministériel du directeur de la Caisse NAtionale de Vieillesse des Professions Libérales (CNAVPL), la transformation de son conseil d’administration en un simple conseil de surveillance, l’obligation pour la CNAVPL de contracter avec l’Etat une convention d’objectifs pluriannuels sur la gestion et le fonctionnement. Il fait aussi obligation aux sections professionnelles de conclure des contrats de gestion avec la CNAVPL et prévoit la modification des statuts de ces sections pour les rendre conformes à des statuts-types approuvés par décret soumis à l’approbation du conseil d’administration de la CNAVPL.
La CSMF a immédiatement dénoncé « cette étatisation des régimes de retraite des médecins sans concertation » et jeté une nouvelle pierre dans le jardin du président de la CARMF, Gérard Maudrux, estimant que « la mauvaise gestion de la CARMF, récemment dénoncée par un rapport de l’IGAS, tout comme sa gouvernance jugée opaque, sont pour beaucoup dans la décision du Gouvernement de vouloir l’encadrer ». Pour Gérard Maudrux, le fameux rapport de l’IGAS est le cheval de Troie qui permet au Gouvernement de décider aujourd’hui d’imposer un système unique : « J’avais prévu ce qui arrive depuis quatre mois ». L’UNAPL, présidée par Michel Chassang, le patron de la confédération, a également dit haut et fort qu’elle refusait cette étatisation, mais poursuit dans la critique implicite de la gestion actuelle de la CARMF. « L’UNAPL peut envisager certaines modifications de gouvernance, si elles sont nécessaires, notamment par une harmonisation du fonctionnement, une amélioration de la gestion et de la transparence du système, à condition de pouvoir y participer et surtout de pouvoir écarter le scénario du pire, celui de l’étatisation ».
On rappellera qu’à la suite des critiques émises par l’Inspection générale des affaires sociales à l’encontre de la CARMF et qui portaient, notamment, sur des placement jugés hasardeux, la CSMF avait demandé aux autorités de tutelle « que soit diligenté un audit interne (de la CARMF) et que les responsables de cette mauvaise gestion soient écartés au plus vite ». Si la réforme des retraites passe avec son article 31, ces responsables pourraient bien en effet être « écartés », mais la CARMF disparaître…




Un hôpital virtuel pour apprendre à soigner

365 – A l’université Paris-Descartes, les professionnels de santé peuvent effectuer des interventions virtuelles sur une plate-forme pédagogique de simulation.

00/03/2011. Des patients (mannequins) numeriques pour former les futurs medecins.

Un hôpital virtuel d’entraînement a été récemment inauguré à l’université Paris-Descartes de Paris. Réalisée par iLumens (Laboratoire Universitaire Médical d’Enseignement Numérique et de Simulation), cette plate-forme de pédagogie médicale propose sur 600 m2 une salle « 3D expérience », développée en collaboration avec Dassault Systèmes, permettant de simuler en temps réel  et en trois dimensions un arrêt cardiaque ou un accouchement, cinq salles de simulation et trois salles de débriefing.
Toutes les catégories des professions de santé peuvent y accéder, médicales et paramédicales, en formation initiale comme en formation continue. Une session commence par un briefing de quelques minutes. Les participants entrent ensuite dans une salle de simulation où un scénario médical est mis en place (arrêt cardiaque, accouchement, coronarographie, endoscopie bronchique, etc.).

Analyse réelle après intervention virtuelle

Les participants passent ensuite en salle de debriefing où ils peuvent visionner et analyser leur intervention qui a été filmée par trois caméras. « L’objectif est de mettre les participants en situation réaliste, en conservant une dimension d’équipe », explique le Dr Antoine Tesnière, qui dirige cet h

ôpital virtuel avec le Pr Alexandre Mignon. Il souligne également que les simulations  permettent de « travailler à la fois sur les aspects techniques et non techniques des prises en charge des patients ».
Le coût de cette plate-forme pédagogique médicale frôle les 2 millions d’euros d’investissement. Son financement a été assuré par l’université Paris-Descartes, la formation continue, la recherche et des partenariats privés. On estime que 5 000 à 10 000 personnes pourraient y être formées chaque année.




Vigilance et bon usage du médicament : réorganisation générale en 2014

365 – Marisol Touraine a annoncé que la réorganisation des dispositifs de vigilance sanitaire fera partie de la loi de santé publique qui sera présentée l’année prochaine. Elle s’inspirera du rapport de Jean-Yves Grall et de celui des Prs Bégaud et Costagliola

 « Le système de surveillance sanitaire a été essentiellement construit par strates successives parfois en réaction à des crises, de fait sans cohérence globale. » C’est le constat, sévère mais juste, que fait Jean-Yves Grall, le Directeur général de la santé dans le rapport qui lui a été commandé en janvier dernier par Marisol Touraine et qu’il a remis depuis peu à la ministre. Et les épisodes de crises sanitaires plus récents – sur-radiations, Médiator et prothèses PIP – auraient pu ajouter de nouvelles strates… Mais la volonté gouvernementale a penché pour une refonte globale du système, d’où la mission confiée à Jean-Yves Grall et qui porte donc sur la pharmacovigilance, la matériovigilance, mais aussi sur la vigilance en matière d’infection, notamment nosocomiale, et sur la radioprotection.

De cette construction en strates de notre système résulte que « le partage des compétences en matière de vigilances est éclaté entre plusieurs agences nationales » et qu’une organisation « en tuyaux d’orgue » avec « des circuits très cloisonnés » ne peut que présenter « une inadaptation à la déclaration des citoyens et des professionnels de santé », conclut Jean-Yves Grall. C’est donc très logiquement qu’il prône « une organisation cible clarifiée dans une stratégie nationale de sécurité sanitaire », qui doit d’abord passer par la création d’un « portail commun multicanal de déclaration, ouvert aux professionnels de santé, à la population, aux industriels et aux structures notamment de vigilance sur un périmètre large de signaux sanitaires (ensemble des événements indésirables dans le champ sanitaire) ». Une déclaration simplifiée des effets indésirables devrait accompagner la création de ce portail commun, ainsi qu’une « rétro-information » des déclarants.

Des GRAVES en région

Pour améliorer et simplifier le dispositif de surveillance en région, Jean-Yves Grall préconise de faire des ARS les pilotes de la sécurité sanitaire et « de regrouper les multiples entités régionales actuellement impliquées dans la surveillance sanitaire et dans la sécurité-qualité au sein d’un Groupement Régional d’Appui à la Veille et à l’Evaluation Sanitaire (GRAVES) ». Au niveau national, il recommande une « agence pivot de sécurité des produits, l’ANSM élargie, une agence vigie, l’InVS, et une Haute Autorité sous contrat avec l’Etat pour des objectifs de pertinence et d’analyse des prises en charge ». La gouvernance nationale reviendrait à la DGS. Jean-Yves Grall estime que le chantier du portail commun pourrait s’ouvrir dès l’année prochaine tout comme celui des GRAVES qui pourraient être rodés dans quelques régions pilotes, pour un déploiement du dispositif achevé en 2016. « L’organisation cible, avec notamment les logiques de dématérialisation », et la « mutualisation importante des missions » en région devraient permettre « une organisation à moyens en ressources humaines constants », estime l’ex-DGS, puisque Jean-Yves Grall est, depuis le 1er octobre, le directeur de l’ARS Nord-Pas-de-Calais.

 

Médicament : le bon usage n’est pas évalué en France

En parallèle au rapport de Jean-Yves Grall, les Prs Bernard Bégaud (1) et Dominique Costagliola (2) ont rédigé le leur sur « la surveillance et la promotion du bon usage du médicament en France ». Dans ce domaine, leur constat n’est pas tendre non plus, puisque, si aucune étude « d’envergure et rigoureuse » ne permet de chiffrer le mésusage des médicaments, ils estiment qu’il coûte plus de 10 milliards d’euros chaque année, cette estimation incluant les remboursements non justifiés, les consultations et actes biologiques induits et les dépenses consécutives aux maladies mal prises en charge et la iatrogénie évitable. Les auteurs du rapport citent l’exemple des psychotropes pour lesquels, outre une surconsommation évidente, on observe des durées de prescription deux à sept fois plus longues que celles recommandées. Ils citent également celui des statines dont le niveau de consommation « interroge » car elle semble majoritairement en prévention primaire, indication pour laquelle « la prescription par excès semble patente ».

Bernard Bégaud et Dominique Costagliola recommandent « d’agir sur deux leviers qui constituent des préalables essentiels : la création, indispensable, d’une structure organisant et facilitant l’accès, pour les autorités sanitaires et les chercheurs (dont le rôle d’appui méthodologique et de lanceurs d’alerte est essentiel), aux différentes sources de données en santé pertinentes en ce domaine et une meilleure formation et information des professionnels de santé et du grand public, bien mal préparés en France aux principes de base de la bonne prescription et du bon usage des produits de santé ». Ils préconisent notamment que l’usage rationnel des produits de santé fasse partie intégrante des prérequis à valider lors de l’examen classant nationale (ECN) de fin d’études médicales.

(1) INSERM U657, université Victor Segalen Bordeaux II.
(2) INSERM UMR S 943, université Pierre et Marie Curie, Paris.



La profession refuse l’étatisation de la PDS

365 – Très coûteuse, fragile, instable : le jugement de la Cour des comptes est sans appel. Pour remédier à cet état des choses, l’institution propose de placer la PDS sous la coupe des ARS. Une « étatisation » que dénonce la profession. 

La Cour des Comptes préconise de confier aux ARS la responsabilité générale de l’organisation des gardes de tous les professionnels de santé (©Dalaprod)
La Cour des Comptes préconise de confier aux ARS la responsabilité générale de l’organisation des gardes de tous les professionnels de santé (©Dalaprod)

Chaque année, le rapport de la Cour des Comptes comporte son lot de critiques à l’endroit du domaine de la santé et de ses comptes. Dans sa cuvée 2013, la Permanence Des Soins Ambulatoires (PDSA) fait l’objet d’une véritable volée de bois vert. En résumé, l’abandon en 2002, à la suite de la grande grève des médecins généralistes, de l’obligation des gardes et astreintes et le passage au volontariat a entraîné « une explosion » des dépenses d’Assurance Maladie liées à la rémunération des gardes et astreintes, qui se sont étendues aux pharmaciens et aux transports sanitaires.
Ainsi, la Cour des Comptes relève que de 220,5 millions d’euros en 2001, les dépenses de PDSA pour les médecins sont passées à 393,5 millions d’euros cette somme recouvrant les forfaits, actes majorés et subventions diverses). Parallèlement, les dépenses des gardes pharmaceutiques sont passées de 8,5 à 54,5 millions d’euros. Les dépenses liées à la PDS des soins de ville (hors urgences et établissements de santé) sont passées de 250 millions d’euros à près de 700 millions d’euros entre 2001 et 2012, alors que pendant le même temps l’activité s’est réduite, passant de 7,34 à 5,2 millions d’actes.
La critique ne s’en tient pas à ce bilan comptable. La Cour des Comptes dénonce aussi la diminution tendancielle du nombre de généralistes sur lequel repose la PDSA et l’érosion continue du volontariat, l’inefficacité du droit à réquisition des préfets, des « difficultés persistantes » dans la régulation libérale des appels et l’hétérogénéité dans les réponses apportées aux appelants, et la coordination défaillante entre le volet libéral et le volet hospitalier de la régulation.

Mettre de l’ordre dans le dispostif

Les solutions des magistrats de la rue Cambon sont tout aussi radicales que leurs critiques. Ils recommandent au ministère de la Santé de recentrer son action sur « le pilotage global et la régulation du système, notamment en définissant sans délai les modalités d’une meilleure articulation des urgences et de la PDSA ». Pour remettre un peu d’ordre dans le dispositif, ils préconisent de confier aux ARS « la responsabilité générale de l’organisation des gardes de tous les professionnels de santé » – autrement dit les gardes médicales, pharmaceutiques et ambulancières – ainsi que leur financement sous la forme d’enveloppes régionales fermées incluant la rémunération des actes médicaux.
Au passage, ils souhaitent également voir les ARS utiliser à meilleur escient le levier du FIR pour réguler les dépenses de la PDS qui s’élèvent aujourd’hui à 1,9 milliard d’euros (dont 630 millions pour la PDSA, les transports et les gardes pharmaceutiques, 530 millions pour les urgences et 723 millions pour la PDS des établissements de santé).
En outre, les ARS hériteraient aussi du pouvoir de réquisition des préfets. La mise en ordre selon la Cour des comptes ne s’arrête pas là. Pour harmoniser les pratiques, elle suggère de subordonner les majorations applicables aux actes médicaux effectués dans le cadre de la PDSA au respect par les associations de PDSA « d’un corps de règles garantissant l’homogénéité et la qualité de leur mode de régulation », de généraliser les protocoles de renvoi des patients entre les services d’urgences et les Maisons Médicales de Garde (MMG). Enfin, la Cour des Comptes invite les pouvoirs publics à « engager une action vigoureuse d’information et de sensibilisation du public aux nouveaux modes d’organisation de la DPS ».

Une étatisation du dispositif

Cette information du public sur l’utilisation de la PDS est sans doute la seule recommandation que pourraient approuver les professionnels. La CSMF rappelle en tout cas qu’elle le réclame « depuis de nombreuses années ». Pour le reste, la profession s’est étranglée de rage à la lecture du rapport de la Cour des Comptes. Le SML « ne décolère pas » et la CSMF dénonce des propositions dans lesquelles elle voit « une étatisation » du dispositif. Le ton de la confédération se fait très ironique pour s’étonner que « la Cour des Comptes découvre, avec plus d’une décennie de retard, que les médecins libéraux sont désormais rémunérés pour leurs gardes et astreintes et que celles-ci sont donc passées d’un coût nul en 2001 à un coût significatif ». Enfin, la CSMF voit derrière la préconisation de la Cour des Comptes d’intégrer le budget de la PDS dans une enveloppe régionale fermée le retour de l’idée d’un ORDAM et « la volonté d’engager une maîtrise purement comptable du dispositif ».

 




L’efficience au cœur du projet stratégique de la HAS

365 – Le programme de travail de la Haute Autorité de Santé pour les trois prochaines années tend à « une meilleure utilisation des fonds publics » et s’organise autour de trois mots-clés : efficience, qualité, sécurité.

Harousseau_CB14224
Jean-Jacques Harrousseau : « La HAS va rechercher l‘efficience dans ce contexte d’augmentation des dépenses de santé ». (©DR)

Il n’y avait aucun hasard dans le fait que la Haute Autorité de Santé présente son projet stratégique 2013-2016 deux jours après la remise officielle du rapport Cordier et la présentation par Marisol Touraine de la Stratégie Nationale de Santé (SNS), et le président de la HAS l’a souligné d’entrée. Avant de détailler la feuille de route de la HAS pour les trois ans à venir, Jean-Luc Harousseau a réaffirmé que cette institution bénéficiait de « deux atouts majeurs, une grande rigueur scientifique et une indépendance intellectuelle, une impartialité pour évaluer l’état de l’Art ». Il a bien entendu souligné également que l’action de la HAS s’exerçait dans « un contexte d’augmentation des dépenses de santé ». En conséquence, « nous avons considéré qu’il nous fallait maintenant rechercher l’efficience, a déclaré Jean-Luc Harousseau. Ce qui implique de renforcer notre expertise scientifique et d’être acteurs, avec les autres acteurs, de l’organisation et de la régulation des soins par l’efficience et la qualité. »
Pour remplir ce beau programme – qui n’est pas l’apanage de la seule HAS par les temps qui courent – cinq axes majeurs ont été définis. Le premier consiste pour la HAS à recentrer ses travaux sur les grands enjeux de santé publique. « Nous devons notamment répondre au besoin croissant d’indicateurs d’évaluation et de bases de données ouvertes à tous », a précisé son président. Le second axe concerne le développement de la dimension comparative dans l’évaluation des produits et technologies de santé pour lequel la HAS renforcera sa nouvelle mission d’évaluation économique et mènera sa réflexion conjointement avec le CEPS. « C’est le collège de la HAS qui décidera quels produits seront soumis à cette évaluation et c’est sa commission économique qui donnera l’avis d’efficience », a indiqué Jean-Luc Harousseau, soulignant qu’il ne s’agissait en aucun cas de mettre en œuvre « une politique de rationnement mais une meilleure utilisation des fonds publics ».

Suivant son troisième axe, la HAS s’attachera à renforcer l’impact de ses productions auprès des cibles concernées. Pour cela, elle souhaite collaborer davantage avec les professionnels de santé et avec les usagers pour l’élaboration de ses recommandations. Avec les premiers, la HAS souhaite notamment « construire avec eux des indicateurs de leur activité ».
Le quatrième axe concerne la contribution de la HAS à la construction  du parcours de santé, « un point majeur » selon Jean-Luc Harousseau. Cette contribution se traduira par la construction de référentiels pour l’organisation et la qualité des parcours, par l’élaboration de grilles d’évaluation de l’activité des groupements d’exercice pluridisciplinaire et par des travaux destinés à organiser la transition entre l’hôpital et la ville avec, notamment, un indicateur de synthèse de sortie d’hospitalisation introduit dans l’évaluation des établissements.

Plus de missions, moins de moyens

Enfin, le cinquième et dernier axe a trait au développement des approches centrées sur le patient pour lui garantir une meilleure qualité et une meilleure sécurité des soins. A ce sujet, Jean-Luc Harousseau a indiqué que la version 2014 de la certification sera introduite fin 2014, début 2015 et qu’elle comprendra notamment une nouvelle modalité de visite avec la technique du « patient traceur » qui permettra « d’aller vers une certification clinique » en observant « in vivo comment les critères de gestion des risques sont appliqués, comment les professionnels médecins et non médecins agissent auprès du patient, avec son consentement ».
Reste qu’avec une baisse de 8 % des ses moyens sur trois exercices et une baisse de 3 % de ses effectifs entre 2011 et 2013, on peut se demander comment la HAS pourra réaliser ce vaste programme. Jean-Luc Harousseau répond qu’il va s’agir « d’utiliser sur l’énorme réservoir d’expertise – 400 experts, dont 300 chefs de projet – de “pianoter” sur l’ensemble des ressources internes et de jouer en modes “équipes” et transversalité ». « Et nous serons attentifs à ce que, dans ce contexte, nos missions restent assumées avec nos moyens, précise-t-il. Mais il est bien évident que si cette augmentation de nos missions parallèlement à une baisse de nos moyens devait continuer, il y aurait un réel danger, ce dont nos partenaires financiers sont conscients. »




Coupe à libations JIAO

DSC04014
Hauteur : 27 cm • Largeur : 18 cm (Collection Meiyintang 12).

364 – Christian Ziccarelli – Une tradition ancestrale

L’origine de la métallurgie du bronze reste, en Chine, sujette à controverse. Une antique légende chinoise rapporte qu’au temps du souverain mythique Yu le Grand neuf bergers envoient du métal de leur province. Le souverain fait fondre neuf tripodes (forme emblématique des vases rituels en Chine), symboles de chacune des neuf provinces du royaume. Le bronze devient, pendant les deux millénaires qui ont précédé notre ère, un matériau de prédilection. Représentatifs du pouvoir et du culte, ces bronzes ont été retrouvés par milliers dans les tombes de l’aristocratie Shang et Zhou. Ainsi, 6 200 bronzes constituaient une partie du mobilier de la tombe du marquis Yi de Zeng (vers 433 av. J.-C.).

Des œuvres influencées par la céramique

Dans le Nord-Ouest de la Chine, à l’Est du Gansu, les archéologues ont découvert un couteau en bronze coulé dans un moule unique de pierre. Il appartient à la culture de Majiayao (3800 à 1900 avant J.-C.) riche par ses poteries peintes composées de motifs géométriques, spiralés ou zoomorphes. De tels témoignages sont rares avant le IIe millénaire avant J.-C., avant la dynastie des Shang. « Contrastant avec les balbutiements de leur technique, la maîtrise artistique des premiers fondeurs chinois ne connaît pas d’enfance ». Très influencées par les modèles néolithiques en argile, les œuvres s’imposent par leur force et leur perfection. Selon leur fonction, on distingue les récipients à eau, à boissons fermentées, à aliments. Chaque vase a son prototype en céramique et porte un nom traditionnel. Seules quelques différences stylistiques marquent la date de fabrication (début et fin de la dynastie Shang, époque des Zhou occidentaux, époque des Printemps et Automnes). Le motif de base est zoomorphe, mais deux modes s’affrontent : d’une part une représentation « réaliste », d’autre part une représentation frappante d’animaux mythiques. Au cours des siècles, les empereurs chinois les ont restaurés, collectionnés, vénérés.

Une coupe à boissons fermentées

La coupe objet de notre analyse est une coupe à libation, un vase à boissons fermentées (pour cuisiner ou réchauffer le vin). Elle est en règle associée à d’autres coupes à libation, mais également à des récipients pour les offrandes de mets (tels les ding) et les ustensiles à eau comme les pan pour les ablutions. Ces récipients servaient lors des grandes cérémonies rituelles réunissant les prêtres devins qui communiquaient avec les esprits des ancêtres royaux. Déposés sur l’autel ils étaient le témoin de la puissance de la dynastie, le souverain étant le lien entre la terre et le ciel.
La coupe date de la dynastie des Shang, de la période d’Anyang soit du XIIe-XIe siècle avant notre ère. C’est un objet tripode traditionnel. L’ornementation dérivée de la ciselure de jade est le reflet de mythes hérités du monde chamanique néolithique. Les masques animaliers taotie (symbole de la cupidité ?), avec ses yeux globuleux et sa mâchoire supérieure féroce, occupent la panse du vase et le couvercle. La tête vue de face évoque celle d’un buffle. Une inscription parfaitement visible est une marque de clan. Sous les Zhou (vers 1050 av. J.-C.), les récipients à aliments (pour la cuisson ou la conservation des viandes) deviennent prépondérants, puis, à partir du milieu des Printemps et des Automnes, ce seront les objets liés aux ablutions.

Un travail d’atelier

Les fouilles archéologiques ont permis de découvrir un atelier de bronzier à Houma au Shanxi. Plus de 30 000 fragments de modèles ont été exhumés, montrant une organisation remarquable du travail, chaque atelier étant spécialisé soit pour la production de vases, soit d’instruments de musiques, etc.
Le bronze est un alliage de cuivre et d’étain, pour ces vases la composition moyenne serait de 80 % de cuivre pour 13 % d’étain, avec 7 % de plomb. Les patines dépendent de l’oxydation du cuivre et varient selon le degré d’humidité de l’enfouissement. Les bronziers Shang ont adopté la méthode du moule à sections. Les différents éléments sont ensuite assemblés. La finition est obtenue par abrasion afin de polir la surface et de rendre nets les détails.

Bibliographie

[1] Art et archéologie : la Chine du néolithique à la fin des Cinq Dynasties (960 de notre ère). Danielle Elisseeff, Paris, École du Louvre, Éditions de la Réunion des Musées Nationaux (Manuels de l’École du Louvre), 2008, 381 p.
[2] Trésors de la Chine ancienne. Bronzes rituels de la collection Meiyintang. Musée des arts asiatiques Guimet. Edition Mare et Martin 2013 
[3] L’art chinois Mary Tregéar. L’univers de l’art. 1991
[4] Aux origines de la civilisation chinoise. Les dossiers Archéologie et histoire n° 91. Février 1985

 

Les Shang

On ne connaît de cette dynastie que les 3 derniers siècles de son existence. Elle s’étend sur le cours moyen et inférieur du fleuve Jaune. La capitale du milieu du XIVe siècle av. J.-C. se trouve à Anyang. Elle comprend de très vastes palais en bois et en torchis sur une semelle de pierre. A cette époque apparaissent les cultes divinatoires, l’écriture, l’art animalier. L’importance de la religion, le culte des rois défunts (tombes grandioses) et les sacrifices humains (culte funéraire ou consécration des bâtiments) caractérisent cette civilisation.

 

Chronologie de l’âge du bronze en Chine

– Dynastie mythique des Xia : XXI-XVIe siècle avant notre ère.
– Dynastie des Shang : vers 1600-vers 1050 avant notre ère (période d’Anyang : vers 1300-vers 1050 avant notre ère).
– Dynastie des Zhou occidentaux : vers 1050-771 avant notre ère.
– Dynastie des Zhou orientaux : 770-256 avant notre ère (période du royaume des combattants : 475-221 avant notre ère).




Les grandes études… quelques années après

La lecture est réservée à nos abonnés.

Pour lire cet article, vous devez vous connecter