iPhone 6 : une (r)évolution en marche

Dévoilé le 9 septembre dernier lors de la keynote de Tim Cook, l’iPhone 6 n’a pas marqué de rupture avec ses prédécesseurs, mais une continuité dans le (très) haut de gamme et des tendances technologiques pour le futur.

374 – Les tendances des smartphones aujourd’hui sont claires : orienter l’objet vers une concentration des utilisations en « virtualisant » les objets, offrir des moyens de communication plus performants, barder le smartphone de capteurs, prendre des photos ou filmer… bref, donner à l’appareil une destination qui a déjà fait son chemin et qui ne vous permettra désormais plus de vous en passer.

La keynote d’Apple est bien plus que la présentation du nouvel iPhone 6. En ayant refusé par le passé (récent) de faire des écrans plus grands en avançant une maniabilité amoindrie, Apple a signé le nouvel âge du smartphone. Il va devenir l’appareil incontournable de votre poche, partout, où que vous soyez.

Pourquoi Apple a-t-il cédé aux grands écrans ? Tout d’abord pour précéder le déclin des tablettes, mais pas seulement. La « praticité » de l’écran est devenue la pierre angulaire du smartphone. On visualise tout à travers lui. Le showrooming, (1) par exemple, est devenu un sport national. Tout allant toujours plus rapidement, il est plus aisé d’envoyer un sms, un mail, prendre une photo. On ne perd pas de temps ! La communication téléphonique est devenue presqu’obsolète. Et puis, l’air de rien, les bracelets, ces « watchs » qui, même si leurs ventes ne décollent pas, montrent le bout de leurs écrans, vont justement profiter de l’engouement de ces « grands » smartphones. Apple l’a bien compris en proposant sa Watch qui n’est finalement que la télécommande (grandement améliorée) du smartphone que vous avez dans votre poche et donc plus besoin de sortir votre écran 5,7 pouces. Lorsque vous marchez, une simple vision sur votre poignet suffira dans bien des cas. La première critique de l’AppleWatch est justement de ne pas être autonome, et c’est cette faiblesse qui va permettre aux utilisateurs de ne plus s’en passer et laisser loin d’être elle les watchs des concurrents.

Au-delà de l’iPhone 6 et de l’AppleWatch, la deuxième révolution se tient dans les applications, notamment le paiement par carte virtuelle et la santé.

Passbook

« La vision c’est de remplacer le portefeuille. Et le point de départ, ce sont les paiements ». Le sous-entendu d’Apple est d’en terminer avec le monde physique. Terminé les cartes de paiement, de crédit ou de vos magasins préférés, elles seront à terme dans votre smartphone. La fonctionnalité majeure du moment, c’est Apple Pay, le service de paiement, une application qui rassemble dans un portefeuille virtuel toutes les cartes de crédit et de paiement (Apple aurait déjà négocié des commissions avec les principales sociétés de crédit américaines… et aurait préparé le terrain en Chine avec China UnionPay, la porte ouverte du pays du soleil levant… on ne se refait pas).

La sécurité repose sur le système d’authentification biométrique touchID (pour rappel, des hackers avaient très facilement contourné la biométrie en falcifiant une empreinte digitale en septembre dernier…) et la technologie NFC (2) qui permet une utilisation avec des bornes de paiement.

Le monde de la santé (3)

Deux applications, Workout (un assistant sportif) et Activity (un compagnon du quotidien), sont en liaison directe avec l’application Health, véritable carnet de santé virtuel. Connecté à l’Apple Watch, vous aurez sur vous un véritable concentré technologique pour surveiller vos exploits sportifs ou tout simplement faire office de surveillance. Nous aurons l’occasion d’en reparler très prochainement, la santé prenant une place prépondérante dans le monde de la virtualité augmentée (ou pas) et les questions que l’on doit se poser aujourd’hui.

Conclusion

Le smartphone passe à la vitesse supérieure en prenant aujourd’hui sa véritable indépendance. Cette (r)évolution met au placard le bon vieux portable, la tablette, la montre, le paiement classique. Suite maintentant aux développeurs qui vont s’en donner à cœur joie pour nous trouver des besoins qui n’existent peut-être pas encore.

Pascal Wolff

(1) Les consommateurs recherchent des offres concurrentes via leur smartphone directement dans les magasins.
(2) Near-Field Communication. Technique de communication sans fil, lancée par Sony et Philips, qui permet l’échange d’informations entre périphériques très peu éloignés les uns des autres.
(3) Apple a déposé un brevet de capteur cardiaque il y a quelques mois.

 

Les caractéristiques de l’iPhone 6

Ecrans. iPhone 6 : 4,7 pouces. 1334×750 px.

iPhone 6 plus : 5,5 pouces. 1920×1080 px.

Processeur.
A8 avec architecture 64 bits (l’équivalent de 2 milliards de transistors…) aidé par un coprocesseur (M8) pour l’intégration des données santé.

Capacité. 16, 64, 128 Go.

Communication.
Compatible 4G sur vingt fréquences différentes, qui permet la prise en charge du VolTE (Voice over LTE) qui donne la possibilité de passer des appels d’une grand qualité sonore.
Le wifi n’est pas en reste avec une action trois fois plus rapide et permettra de passer des appels en « wifi-calling ».

Sécurité.
Touch ID. Le capteur d’empreintes a été optimisé pour une utilisation avec des applications tierces. Apple Pay (NFC) est la première destination de cette technologie.

Capteur.
8 mégapixels pour la photo. 1,2 mégapixels pour la caméra.

Batterie. iPhone 6 : 14h00 en communication 3G (données Apple).

iPhone 6 plus : 24h00 en communication 3G (données Apple).

Dimensions. iPhone 6 : 138,1 x 67 x 6,9 mm. 129 g.

iPhone 6 plus : 158,1 x 77,8 x 7,1 mm. 172 g.

Prix. iPhone 6 : 709 e (16 Go) – 819 e (64 Go) – 919 e (128 Go).

iPhone 6 plus : 809 e (16 Go) – 919 e (64 Go) – 1 019 e (128 Go).




Demain, vieux, pauvres et malades

Le titre  annonce  la couleur, et ce n’est pas le sous-titre intitulé « Comment échapper au crash sanitaire et social » qui va tempérer la première impression : le lecteur, en ouvrant ce livre, sait que le sujet est grave et ne va pas réellement, en cette rentrée morose, lui remonter le moral.

generisches buch 1374 – Effectivement, l’auteur, dans une première partie très étoffée, dresse le terrible constat, connu mais pas suffisamment reconnu, de la situation des personnes âgées dans notre pays, dans l’avenir mais déjà le présent : oui, l’espérance de vie s’allonge mais, en France comme ailleurs, les maladies chroniques qui ne tuent plus ou tuent moins rendent inéluctable le déclin de la vie sans incapacité chez les seniors ; oui, la solitude et la précarité augmentent chez les personnes âgées d’autant que, souvent, le coût de leur prise en charge explose ; non, les maisons de retraite, généralement hors de prix, ne sont pas le lieu de placement idyllique suggéré par l’entourage : nécessité le plus souvent par une perte d’autonomie, le placement en établissement, dont la multiplication est bien sûr une nécessité, est généralement vécu comme un abandon annonciateur, comme l’écrit l’auteur, de l’inéluctable « clap de fin ». D’ailleurs, comme il le répète, les vieux « se tuent aussi » et les comportements suicidaires, surtout après l’entrée en institution, pourraient devenir un vrai problème de société.

Toutes ces assertions sont bien sûr largement documentées et la bibliographie est solide.

Bref, comme le disait le Général de Gaulle (qui visait en fait le comportement du Maréchal Pétain), « la vieillesse est un naufrage » et, comme le chantait Jacques Brel, on en arrive à se demander s’il ne faut pas simplement se résigner à attendre la « pendule d’argent qui dit je vous attends » !

Eh bien non…

Après le constat, viennent les propositions et l’auteur, qui déclare en terminant que la vieillesse est un âge d’avenir, ne se veut pas pessimiste !

Après avoir rappelé quelques évidences telles que : « on n’attend pas l’avenir, on le prépare » ou « gouverner c’est prévoir », il égrène une série de propositions que son statut de médecin justifie selon lui de placer sur le seul terrain du concret et du réalisme.

Au-delà des solutions visant à développer l’économie du vieillissement et à regrouper l’ensemble des technologies et services dédiés aux personnes âgées (on parle désormais de silver économie – économie des tempes argentées), l’idée de modifier les politiques d’urbanisme est intéressante et bien détaillée : il s’agit entre autres de concevoir des logements spécifiques, sortes de « Papy Lift », situés à mi-chemin entre le chez-soi et la maison de retraite.

Le regroupement sous un guichet unique – pourquoi pas des maisons départementales d’orientation – des aidants familiaux et emplois et services à la personne âgée serait également innovant, mais la question de son financement n’est pas réellement abordée dans l’ouvrage.

Les deux dernières propositions sont plus classiques mais restent incontournables : le financement de l’assurance dépendance – le cinquième risque – esquissée dès 2004 par l’instauration de la journée de solidarité, qui figure toujours au programme de la plupart des politiques mais n’est pas encore résolu ; et le « bouclier sanitaire » destiné à plafonner le « restant à charge  ou RAC », qui correspond aux frais de santé résiduels, non remboursés aux assurés dont le montant augmente singulièrement chez les seniors ; ce bouclier consisterait à rembourser à 100 % les dépenses de santé de toute nature, une fois le plafond fixé de ce RAC atteint.

Certes, pour concrètes qu’elles soient, certaines des propositions relèvent encore du domaine de l’incantation, car elles se heurtent aux limites de la solidarité fixées par nos gouvernants en fonction de leurs critères politiques ou économiques.

Mais le Docteur Sauveur Boukris, auteur de cet ouvrage, connu du public notamment pour sa précédente publication « Médicaments génériques : la grande arnaque » a le mérite de poser les vraies questions ; en insistant sur le drame social et humain qui s ‘annonce inéluctable si rien n’est fait, il contribue largement au débat, et à ce titre, mérite notre considération et notre écoute.

Demain, vieux, pauvres et malades

Auteur : Sauveur Boukris

Editeur : Du Moment

Pagination : 224 pages

Prix public : 17,95 €




Une mosaïque carolingienne

374 – Pour la découvrir il faut vous rendre dans notre Val de Loire à Germiny-des-Prés,  un bourg voisin de l’abbaye de Fleury (Saint Benoit sur Loire) à une trentaine de kilomètres à l’Est d’Orléans.  Cette mosaïque dans un état de conservation exceptionnel et d’époque carolingienne est unique sur le sol français. Elle trône dans l’abside de l’église Saint Sauveur, un oratoire construit par Théodulf à la fin du VIIIe et au début du IXe siècle.

P29 Arch de l'Alliance 600

Théodulf

Théodulf, clerc d’origine espagnole, dont la famille noble et cultivée s’est réfugiée en Septimanie fuyant la contre offensive arabe, serait né vers 750-760 au sein du monde wisigoth (qui a joué un rôle capital dans sa formation culturelle). Après de brillantes  études à l’abbaye d’Aniane près de Saint Guilhem du Désert, il devient un des conseillers influents, un des meilleurs « Missi  Dominici » (1) de Charlemagne, un personnage attachant de la renaissance carolingienne. Evêque d’Orléans en 798, abbé, sans être moine, de l’abbaye de Fleury, il se fait construire un oratoire, entre 799 et 818, attenant à sa villa (ferme rurale) sur le domaine de Germiny-des-Prés, le bâtiment carolingien le mieux conservé après la chapelle d’Aix.

Il est sans doute l’un ou le rédacteur de « L’Opus Caroli régis contra synodum ou libri carolini ». Il a contribué avec Alcuin à la révision de la Vulgate, version latine de la Bible de Saint Jérôme, dont de nombreux exemplaires étaient devenus inutilisables du fait des fautes de copie. Grand intellectuel, poète, il veille à la formation religieuse du clergé de son diocèse. Selon les souhaits de Charlemagne, il organise l’enseignement à trois niveaux : les écoles paroissiales gratuites, les écoles épiscopales (niveau secondaire) et les écoles monastiques pour les cadres de l’Empire. A la mort de Charlemagne en 814 faussement accusé de complicité avec Bernard, le roi d’Italie soulevé contre l’empereur Louis le Débonnaire, il est enfermé en 818 dans un monastère près d’Angers ou il mourut en 821.

L’Oratoire de Théodulf

A l’origine, l’église est de dimension modeste, un plan centré formé d’un carré de 10 mètres de côté s’ouvrant sur 4 absides (Ouest dont l’emplacement est aujourd’hui indiqué par de grandes dalles, Nord, Sud et Est). Initialement l’abside Est était entourée de chaque côté par une absidiole (la « prothésis » au Nord pour la préparation de l’eucharistie, le diakonikon au Sud pour les vases sacrés et les vêtements liturgiques).  Les fouilles ont révélé l’existence d’un porche primitif à l’Ouest faisant suite à l’abside sous forme d’un couloir.

L’édifice s’étage autour de la tour centrale soutenue par quatre piliers. Les arcs doubleaux de la tour sont surmontés par une claire-voie puis par une fenêtre en plein cintre et enfin par  une fenêtre géminée. En fait Lisch, l’architecte restaurateur de la fin du XIXe siècle a supprimé la fenêtre géminée du clocher raccourcissant sa hauteur de plus de 3 mètres et les deux absidioles Nord et sud entourant l’abside Est.

Si au XVe, XVIe siècle l’abside Ouest a été détruite et remplacée par une nef  agrandie au XIXe, le plan de l’Oratoire est unique. Il faut chercher son origine en Arménie (église de Baragan, cathédrale d’Edjmiastsin, édifices dont le plan centré s’inscrit dans un cercle contrairement à celui de Germiny).  Peut-être faut-il évoquer l’influence d’églises wisigothiques aujourd’hui disparues ? Surprenant, il ne s’agit pas d’arcs en plein cintre comme on pourrait s’y attendre mais très légèrement outrepassés (en fer à cheval) typiquement wisigothiques.

La mosaïque de l’abside orientale 

Son iconographie ne connaît pas d’équivalent dans le monde carolingien. Au lieu de voir dans l’abside Est l’image d’un Christ Pantocrator, un Christ en gloire,  on trouve l’Arche d’Alliance (2). Ann Freeman et Paul Meyvaert, deux chercheurs américains de Harvard nous apportent une réponse. Il faut tout d’abord revenir sur le contexte de l’époque. En Orient, sous le règne de Léon III l’Isaurien (717-741) débute la période iconoclaste décrétant officiellement en 730, la lutte contre le culte des images. Constantin V (741-775) son fils suit une politique encore plus sévère, seule la représentation de la croix était autorisée. Le concile œcuménique de Nicée II en 787, réuni par Constantin II et sa mère Irène, rétablit le respect et la vénération des images sacrées. Dans la traduction latine faite à Rome fort mauvaise, il n’était question que « d’adoration » des images. Troublé, Charlemagne demande à Théodulf de préparer une réfutation théologique, l’Opus Caroli (791-793). Lues en sa présence, ses remarques furent notées dans les marges du manuscrit actuellement au Vatican (Vat. Lat. 7207). Devant le contexte politique, notamment l’approbation par le pape Eugène du texte du concile de Nicée II , l’opus Caroli est resté dans les archives royales (il était délicat de résister au pape). Ce texte est la clef pour comprendre le message symbolique de la mosaïque de Théodulf.

L’Arche d’Alliance est au centre, elle est surmontée de deux petits anges d’or, disposés de façon symétrique, au dessus et de chaque côté de l’Arche, se tiennent deux anges nettement plus grands. Les ailes des petits et des plus grands sont enchevêtrées et dans l’axe qui les sépare, une main descend d’un ciel étoilé. En dessous est placé une inscription : « Regarde et contemple le saint propitiatoire et ses chérubins. Et vois ici l’Arche de l’alliance divine. Devant ce spectacle efforce toi de toucher de tes prières le Maître du tonnerre ; et ne manque pas, je t’en prie, d’associer Théodulf à tes prières. »  Les grands anges symbolisent les peuples juif et chrétien (ange avec une auréole crucifère) qui à la fin des temps s’uniront dans le Christ.

L’Arche, proprement dite, représenterait Jésus Christ ; vide et ouverte elle contenait la verge (3) d’Aaron (signifiant que le Seigneur est à la fois roi et prêtre), les tables de la loi (l’Ancien et le Nouveau Testament), et la manne (4) (l’eucharistie). Les dessins réalisés avant la restauration de Théodore Chrétin et de Prosper Mérimée confirment cette interprétation (un linge paraît sortir de l’Arche).  L’Arche, vide de son contenu, met l’accent sur l’intervention de Dieu. Les quatre anges semblent tous la pointer vers le bas, mais également vers l’autel en dessous. En montrant l’autel en même temps du doigt, ils attirent l’attention de celui qui regarde l’Arche sur la réalité de la présence du Christ sur l’autel. Pour Théodulf l’Arche d’Alliance préfigure le Nouveau Testament, le Christ et l’eucharistie. Sous l’Arche est encore visible le Jourdain, symbole du baptême, voie vers le ciel pour toute la chrétienté. Quant à la main qui sort d’en haut entre les têtes des deux plus grands chérubins, il s’agit de la main du Sauveur car portant la cicatrice de la crucifixion.

Membre de l’entourage de Charlemagne, Théodulf na pas manqué de voir, lors de son séjour à Rome (hiver 800-801), les trois panneaux sur l’Arche d’Alliance (histoire de Josué) à Ste Marie Majeure et la mosaïque de l’abside de Saints Côme et Damien. L’influence est manifeste sur le dessin de l’arche et les gestes des anges.

Une image symbolique de la doctrine chrétienne

La mosaïque carolingienne de Germiny-des-Prés unique en son genre, est le reflet de la pensée iconophobe de Théodulf, révélée par la lecture de l’opus caroli : le Christ et la Vierge ne doivent pas être représentés.  L’essentiel de la doctrine chrétienne peut toutefois être figuré par des images symboliques : l’arche vide de l’Alliance prouve que le Nouveau Testament a remplacé l’Ancien ; la célébration de l’eucharistie qui se tient sur l’autel est désormais la réalité ; le chemin qui mène l’être humain au ciel passe par les eaux du baptême, inauguré par celui du Christ dans le Jourdain.

(1) Missi Dominici : les envoyés du Maître. Ces derniers apparaissent dès 780, choisis directement par le roi pour une mission d’inspection spéciale, mais c’est seulement en 802 que Charlemagne crée des zônes d’inspection, appelées missatica. Les missi doivent quatre fois par an recueillir les plaintes des administrés, juger en appel du tribunal comtal et sanctionner les fautes des administrateurs en faisant la promotion d’une nouvelle idée de la justice. 
(2) Arche d’Alliance : coffre en bois d’acacia qui contenait les Tables de la loi (les dix commanements) données à Moïse par Yahvé au mont Sinaï, aujourd’hui à Axoum (Ethiopie) 
(3) Verge : baguette divinatoire
(4) Manne : nourriture miraculeuse, qui, d’après la bible, tomba du ciel pour nourrir les hébreux dans le désert.

 

 

Bibliographie

[1] Père G. Rebeyrat. L’église de Germiny-des-Prés, fiche documentaire.

[2] G. Bührer-Thierry, Charles Mériaux. 481, la France avant la France, édition Belin. 2013

[3] Dom J-M. Berland. Val de Loire roman. 3e Edition Zodiaque, la nuit des temps.

[4] J. Hubert, J. Porcher, W.F. Volback. L’empire carolingien. Edition Gallimard univers des formes. 1968

[5] Germiny-des Prés : l’article de Paul Meyvaert (article le plus complet sur le sujet)

[6] http://jfbradu.free.fr/mosaiques/germigny/article-p-meyvaert.htm




Que pense le législateur sur les technologies connectées ?

La législation française sur les données personnelles est stricte, mais les textes législatifs, votés avant l’apparition des capteurs connectés, sont dépassés par ces nouvelles technologies.

La Cnil, qui a commencé à travailler sur la question, doit rendre ses conclusions en juillet, mais l’évolution de la loi ne devrait pas se faire dans un avenir proche.

Le fait que les données de santé soient détenues par des acteurs privés (et donc les créateurs d’applications qui peuvent avoir accès à ces informations) soulèvent bien sûr plusieurs questions éthiques, notamment sur les complémentaires santé qui pourront ajuster leurs tarifs en fonction du « profil » de l’assuré (ce qui existe déjà aux Etats-Unis).

Les assureurs s’intéressent de près à ces données médicales. Axa, par exemple, a récemment annoncé qu’il offrirait des capteurs PulseO2 à certains de ses clients, et que les utilisateurs qui enregistreraient le plus de pas bénéficieraient d’avantages financiers. Ce qui s’appelle marcher sur les pas de son assureur !




Et les autres trackers, où en sont-ils ?

Betterise, la start-up française lancera en septembre prochain une application (voir Le Cardiologue 372) qui sera plus productive grâce à son algorythme de gestion du comportement avec conseils et outils à la clé.

Withings Pulse, entreprise également française, propose un capteur santé (tracker), fitness et sommeil nommé Pulse O2. Le bracelet, qui arrive dans une nouvelle version avec connection iPhone et Android, est capable de mesurer, outre le rythme cardiaque, le niveau d’oxygène dans le sang via un capteur optoélectronique situé au dos de l’appareil (quid de la précision d’une telle mesure…). Le tout peut-être validé dans une application maître : Health Mate.

Shine de Misfit est un petit capteur qui a pour objectif de mesurer le mouvement de jour comme de nuit. Le capteur mesure l’activité physique aussi bien lors de votre footing mais également en natation, basket, tennis, vélo… Shine est aussi capable de monitorer votre sommeil et de détecter les phases de réveil, de sommeil et de sommeil profond. En gardant le bracelet 24h/24h, Shine détectera ce que vous faites (sic) et, grâce à l’application dédiée, vous saurez tout de votre journée.

UP24 de Jawbone. On touche là le beau et élégant design. La fonction première du bracelet est de compter les pas. Difficile d’évaluer la précision de la mesure, mais ce n’est pas forcément important dans la mesure ou si vous gardez le même bracelet, c’est l’idée de la progression qu’il faudra avoir en tête.




Les mastodontes de l’informatique font leur marché santé

Samsung, Apple, Google, les géants de la communication numérique, se mettent au diapason de la santé, un marché porteur qui est à un tournant depuis les premiers capteurs connectables qui ont fait leur apparition, en attendant l’iWatch de la firme à la pomme, pour la rentrée.

Samsung, tout d’abord, a présenté en « prime time » Simband, une montre connectée et bardée de capteurs pour recueillir – entre autres – le pouls ou le niveau d’oxygène, outre les habituelles mesures sur ce genre de système. 

Mais la firme coréenne va plus loin, à l’instar de Betterise (voir article sur les trackers), en ayant réalisé un important travail sur les sciences du comportement afin d’aider les utilisateurs et les acteurs de la médecine à mettre à profit ce flot d’informations.

Les données sont stockées via la plate-forme Sami, un service de base de données destiné à accueillir notamment les informations biométriques recueillies par son bracelet connecté.

La disponibilité de cette technologie est encore floue, Samsung ayant, semble-t-il, voulu griller la politesse à Apple.

Lors de sa récente conférence annuelle destinée aux développeurs, Apple a donc présenté HealthKit. Ce kit de santé, partie prenante d’iOs8, est une base de données « centralisée et sécurisée » qui accueillera les données des utilisateurs.

Pour l’instant, les fonctionnalités de HealthKit sont plutôt limitées, mais on peut s’attendre, avec l’arrivée tant attendue du bracelet connecté Apple et de l’iPhone 6 à la rentrée (avec un écran plus grand pour suivre l’évolution), d’un déploiement d’analyse et de stockage des données de santé qui pourront être facilement collectées et stockées par la firme à la pomme. Poids, RC, évolutions physique et sportive, tous les indicateurs donneront lieu à des statistiques dans un cloud sécurisé dont vous serez le seul à avoir accès (c’est le moins que l’on puisse faire), mais également en autorisant – si l’utilisateur le souhaite – l’accès à un tiers de tout ou partie de ces données. C’est d’ailleurs ce qui se passe aux Etats-Unis où des accords ont été signés entre Apple et certains hôpitaux partenaires qui pourront accéder directement aux données de leurs patients (avec accord de cer derniers, cela va de soi).

Enfin, Fit de Google. Après un essai manqué en 2012, la firme revient avec un service qui permettra de collecter les données liées à la santé de l’utilisateur (dépenses en calories, rythme cardiaque, pression sanguine…) puis de les analyser afin de dresser un bilan, le tout à partir d’un smartphone ou d’un bracelet connecté. Les données récoltées seront uniquement consultables à partir d’un site web.

En conclusion

Ces plates-formes ouvrent la porte à une nouvelle génération de logiciels de bien-être auxquels sont de plus en plus sensibles les « connectés », grâce à la prolifération des smartphones (mais pas seulement). De nombreuses applications dédiées à la course à pied ou à la gestion des cycles de sommeil existent déjà, mais la combinaison de multiples types de données permettra de créer des logiciels beaucoup plus évolués et performants.

Mais attention à ne pas se laisser griser par la technologie et de bien connaître les aléas des clouds où les grandes firmes, par un passé on ne peut plus récent (NSA), ne s’étaient pas montrées exemplaires sur la protection des données, surtout sur la santé, loin s’en faut.




Les vertus santé du chocolat

generisches buch 1Est-il vraiment opportun de parler de chocolat dans une revue cardiologique réputée promouvoir les règles hygiénodiététiques classiques, au moment où les autorités sanitaires de notre pays martèlent la nécessité de ne manger ni trop gras ni trop sucré ?
Et bien oui, en tout cas si l’on en croit l’ouvrage du docteur Robert, qui pare cet aliment millénaire de multiples vertus, et non des moindres puisqu’elles concernent notamment la sphère cardiovasculaire.

Médecin nutritionniste, le docteur Hervé Robert a enseigné longtemps à la faculté de médecine Paris XIII ; il fait partie de ceux qui ont le plus écrit sur le sujet, il est d’ailleurs, et ce n’est que justice, membre de l’Académie Française… du chocolat.

On n’a bien sûr pas attendu cet hommage passionné pour recommander et consommer, parfois sans modération, ce produit issu de la fève du cacao : déjà, les Mayas – qui pensaient qu’il avait été découvert par les dieux – utilisaient ses propriétés pour accompagner leur peuple tout au long des événements capitaux de leur vie comme la purification des enfants, le mariage et la mort. C’était d’ailleurs un produit de luxe qui servait de monnaie d’échange dans toute l’Amérique précolombienne.

En revanche, même si les Français sont 99 % à aimer le chocolat et 83 % à en manger au moins une fois par semaine, ils restent une majorité à ne voir en lui qu’une gourmandise consommée avec un sentiment de culpabilité, qui fait grossir, favorise les migraines, fait mal au foie et peut même devenir une véritable drogue.

Autant d’idées reçues, non étayées par des travaux sérieux, que cherche à combattre ce livre dont le sous-titre est « VRAI/FAUX sur cet aliment gourmand ».

Le chocolat reste avant tout un aliment plaisir

Vibrant plaidoyer pour le produit, l’ouvrage est construit sur le modèle didactique : divisé en quatre parties, il commence par l’élaboration du chocolat, puis aborde en détail sa composition nutritionnelle, avant d’insister, on s’en doute, sur les bienfaits santé de l’aliment ; le dernier chapitre qui se veut avant tout pratique précise les meilleures façons de bénéficier de ses effets protecteurs.
En fait, avec l’appui d’une bibliographie riche de plus de 250 publications, ce livre explique pourquoi le chocolat :

– fait baisser le cholestérol,
– diminue la pression artérielle,
– protège des maladies cardiovasculaires,
– peut et même doit être consommé par les diabétiques,
– n’est pas impliqué dans l’excès pondéral,
– et surtout est bénéfique pour le moral.

Le lecteur qui chercherait dans ce livre de bonnes adresses plus ou moins secrètes de chocolatiers réputés ou artistes restera sur sa faim (!) et devra se reporter sur ses magazines culinaires habituels.

L’auteur en revanche n’est pas avare de conseils pour apprendre à acheter, conserver et surtout déguster le chocolat : une vraie dégustation passe par des étapes aussi précises et élaborées que celle d’un vin ou d’une bonne huile d’olive.

Le chocolat, comme le rappelle l’auteur, est avant tout un aliment plaisir et c’est tant mieux.

Hélas, la gourmandise reste dans le monde judéo-chrétien un pêché capital ; ne serait-il pas temps, comme le recommandait le regretté Lionel Poilâne, de lui substituer la gloutonnerie et d’en faire, pourquoi pas, une qualité ?

 

Les vertus santé du chocolat

Auteur : Hervé Robert

Editeur : Edp Sciences

Pagination : 204 pages

Prix public : 29,00 €




Le Gattamelata (Suite)

Suite de notre précédent numéro

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Visuel 1.

Reflétant l’image du héros militaire de l’antiquité, le condottiere en selle, jambes tendues, domine le spectateur. (Visuel 1) Il est habillé d’une armure, porte une épée sur le flanc gauche, tient un bâton de commandement dans la main droite levée dans un geste d’autorité. Il maintient avec fermeté les rênes de son cheval de la main gauche. La tête est légèrement penchée vers la gauche, les yeux regardent au loin avec orgueil et un certain dédain. Le cheval dans une position de repos, tourne la tête vers la gauche, la baissant légèrement en direction du sol. Le sabot de la patte avant gauche repose par son extrémité sur un boulet de canon. Une mise en scène élaborée pour montrer la supériorité et le pouvoir du personnage. 

Visuel 2.
Visuel 2.

L’armure n’est pas du XVe siècle, elle est une référence à l’antiquité. C’est la tenue militaire portée par les empereurs ou les généraux romains : la cuirasse en cuir rehaussée d’ornements métalliques, ornée d’une tête de méduse aillée, souligne l’anatomie du tronc. Le condottiere ne porte pas de casque. Outre la cuirasse protégeant la poitrine, des armatures métalliques couvrent les épaules, les coudes et les genoux ; il est chaussé de sandales évoquant les « caligae ». Autres images de l’antiquité romaine : Les rênes, la bride, l’armure sont agrémentées de petites phalères (1). Sont également sculptés des petits personnages masculins nus, des putti, parfois aillés. (Visuel 2)

Paradoxalement l’épée portée au flanc gauche est de son époque. De même, la selle, les étriers et les éperons à molettes qui n’apparaissent qu’à la fin du XIVe siècle.

 

Visuel 3.
Visuel 3.

Le visage (Visuel 3) est réaliste, Donatello s’est sans doute inspiré d’un masque mortuaire, une procédure habituelle à la Renaissance.   Les rides et les arcades sourcilières sont marquées, le menton volontaire, le regard absent, le Gattamelata semble absorbé par ses pensées. Le front est dégagé, les mèches de cheveux dispersés témoin d’un âge avancé. Ce portrait ressemble aux portraits des généraux romains vainqueurs de la fin de la république romaine.

Le piédestal sur lequel repose le Gattamelata mesure 7,77 m de haut soit environ deux fois la hauteur de la statue en bronze. Donatello a représenté en bas deux fausses portes (l’une fermée donnant sur la l’église et l’autre entrouverte sur la place) symbolisant le monde souterrain, en haut, deux reliefs. Deux anges montrent sur un relief son bouclier, sur l’autre son armure, son casque et son bouclier… Ces reliefs ont été au XIXe remplacés par des copies, les originaux se trouvant au musée de la basilique.

Une véritable prouesse technique 

Le registre comptable du banquier Giovanni Orsato est la seule source relative à la fonte du Gattamelata. Il indique qu’il fut fondu en plusieurs morceaux ; il détaille les quantités de cuivre et d’étain acheminées de Venise à Padoue. Les problèmes liés au poids inhérents aux statues équestres, accrus par le poids du bronze, l’échelle et certaines postures du cheval expliquent la raison pour laquelle Donatello glissa un boulet de canon sous l’antérieur gauche de la monture du Gattamelata

Les influences : la statue équestre de Marc Aurèle, le quadrige de Venise.

Visuel 4. Statue équestre de Marc Aurèle.
Visuel 4. Statue équestre de Marc Aurèle.

Donatello lors de son séjour à Rome a, probablement, vu la statue équestre de Marc Aurèle. (Visuel 4) Elle était lors de sa venue sans doute sur le forum. Elle ne fut érigée sur le capitole qu’en 1538 sur ordre du pape Paul III. Cette statuaire faisait l’admiration des artistes de l’époque, Filarete en fit une reproduction en petit (H 0,382, L 0,384, pr 0,20 m).

Lorsque l’on compare ces deux œuvres elles montrent incontestablement un grand nombre de points communs. Les deux cavaliers ont des attitudes très proches ; ils lèvent tous les deux le bras droit et tiennent les rênes de la main gauche. La posture des chevaux est très voisine, si ce n’est que l’un est au repos posant la patte antérieure gauche sur une sphère et l’autre à l’amble, l’un tourne la tête vers la gauche, l’autre vers la droite. La crinière, le toupet sur le sommet du crâne sont sculptés de façon identique. Quant au cavalier leur différence tient d’une part à leur tenue vestimentaire (l’un est manifestement un militaire, l’autre portant la toge est un personnage de haut rang) et d’autre part à leur portrait (l’empereur Marc Aurèle parait ouvert et intelligent, le Gattamelata semble refermé sur lui-même voir obtus). L’empereur fait un geste d’apaisement, le Gattamelata montre son autorité..

Visuel 5. Les chevaux de Saint-Marc.
Visuel 5. Les chevaux de Saint-Marc.

Padoue, sous domination de Venise en est peu éloigné. Donatello a certainement été en contact avec les chevaux du quadrige arrivé à Venise en 1204, suite à la prise de Constantinople (2) par les croisés. (Visuel 5) Cet important groupe sculpté en bronze doré a été placé sur la loggia de la Basilique entre 1253 et 1268, lors de la conception de la façade. La posture de l’un de chevaux est identique à celui du Gattamelata, une musculature puissante, la patte antérieure gauche levée, le sabot pointant vers le bas, la tête tournée vers la gauche, la bouche ouverte.

 

 

Visuel 6. Fresque de Paolo Uccelo.
Visuel 6. Fresque de Paolo Uccelo.

La fresque de Simone Martini du Condottière Guidoriccio da Fogliano dans la salle de la Mappemonde du palais public de Sienne a pu également influencer Donatello, de même que la fresque de Paolo Uccelo (en 1436) représentant le condottiere anglais, Sir John Hawkwood dans la cathédrale de Florence. (Visuel 6) Quant à la statue équestre en bronze de Nicolo III d’Este à Ferrare par les florentins Baroncelli et Antonio di Cristoforo elle est aujourd’hui disparue.

Conclusion 

La statue équestre du Gattamelata est le reflet de la place politique et du pouvoir acquis par les condottieri, ces soldats mercenaires au service des cités états et du pape. Donatello en résolvant les difficultés techniques nécessaires à la fonte de ce bronze monumental, a conçu une œuvre puissante renouant avec l’image idéalisée des héros de la Rome antique, tout en sculptant un portrait réaliste.

Le Gattamelata deviendra le prototype de toutes les figures de statues équestres ultérieures ; la statue équestre du Colleoni à Venise réalisé deux décennies plus tard par Andréa Verrocchio en est un exemple. Quant au monument équestre par Léonard de Vinci de Francesco Sforza qui devait être colossal, il ne verra jamais le jour, faute de financement, malgré l’exécution en argile du modèle et d’une fosse spéciale pour la fonte du bronze.

(1) Petite parure métallique, généralement circulaire, sur lesquelles était gravée ou ciselé quelque figure en relief.

(2) Il est admis que les chevaux se trouvaient au moment de la prise de Constantinople par les croisés sur l’hippodrome au cœur de la ville. Leur datation reste toujours l’objet de discussion, de l’époque de Lysippe (IVe siècle av. J-C) à celle de Constantin.




Vouvray demi-sec 2007

Selon la légende, le futur Saint-Martin ermite, puis évêque, aurait rapporté de Pannonie, un pied de vigne (du chenin ?), dont les moines développèrent ensuite la culture, qu’il planta au-dessus de l’abbaye de Marmoutier, qu’il avait créée en 372. Ainsi débute l’histoire du chenin, et de toutes ses déclinaisons, effervescent, sec, demi-sec, moelleux et liquoreux, avec ses succès et ses tragédies.

En effet, ce cépage, capable d’engendrer de grands vins, peut également produire des breuvages lourds ou abâtardis, si on ne soigne pas correctement la vigne en limitant sa vigueur, si on chaptalise le vin ou si on laisse opérer la malo-lactique qui fait chuter les acidités et cette sensation spécifique de « tranchant ». Divers écueils que sait éviter Philippe Foreau, un des maîtres du vignoble vouvrillon, au Clos Naudin.

Créé en 1910, par son grand-père, grâce à l’achat d’anciennes vignes, le Clos Naudin, dès cette époque, vendait directement son vin en bouteilles. Il s’étend actuellement sur 12 ha, exclusivement planté en chenin, situés en Premières Côtes, considérées par beaucoup pour donner les meilleurs crus, à flanc de coteaux dominant la Loire. Les sols, pour la plupart, sont composés d’argiles à silex riches en cailloux appelés ici « perruche ». Le sous-sol, c’est le fameux tuffeau du Turonien chargé en calcaire épais que les vignerons ont creusé, pour en faire leur cave et parfois leur habitation.

Le domaine pratique la sélection massale (1) pour les replantations, mais un tiers des vignes a plus de 40 ans. La culture de type bio ne comporte qu’un seul traitement phytosanitaire de synthèse, uniquement en cas de risque avant la fleur. Le désherbage se fait mécaniquement par labour et décavaillonnage évitant ainsi les herbicides. La lutte contre les parasites utilise la méthode de confusion sexuelle. Tout autre produit chimique, insecticide, engrais est banni. Les vignes plantées à 6 000 pieds/ha sont fortement taillées et ébourgeonnées, pour limiter les rendements à 35 hl/ha.

La production de vins demi-secs et moelleux bénéficie du climat océanique tempéré et de la douceur apportée par la Loire, mais nécessite certaines conditions favorables : automne sec et ensoleillé, vents forts soutenus, pour « sécher » le fruit, afin d’obtenir une maturation optimale du chenin et sa richesse en sucre, dont une partie ne pourra ainsi être fermentée. Ce sucre résiduel déterminera le classement en demi-sec (15 à 30 g), moelleux (30 à 50 g), liquoreux (plus de 50 g). Le botrytis, désiré en Anjou, n’est pas souhaité à Vouvray, en particulier par Foreau. La récolte, obligatoirement manuelle, par tries successives, parfois grain sur grain, permet de sélectionner les différentes cuvées en fonction de leur charge en sucre.

Les raisins sont pressurés pneumatiquement. La vinification naturelle grâce aux levures présentes sur la peau s’effectue en fûts de 300 litres, avec un maximum de 5 % de bois neuf, dans la splendide cave en tuffeau, dont la basse température permet une fermentation lente. L’élevage en fûts, avec un minimum de soufre, ne se prolonge pas au-delà de 6 mois, car le bois, selon Foreau, modifie la personnalité du chenin.

 

Une élégance remarquable

Avec sa robe éclatante jaune or parée de reflets topaze, ce vouvray demi-sec Clos Naudin 2007 est incroyable de densité et de richesse en bouche traduisant une superbe pureté de fruit. Des arômes d’agrumes, orange sanguine, pamplemousse rose, pomelo, rejoints par l’abricot, le chèvrefeuille, le coing et le massepain, envahissent le nez. En dépit de ses notes profondes douces amères de pépins de fruits, il atteste d’une élégance remarquable, et d’un équilibre presque parfait entre fruit et acidité. Cette acidité prégnante presque mordante, colonne vertébrale dirigeante des vins de Foreau, masque les 18 g de sucre résiduel, mais pas cette richesse exotique et cette complexité comparables à un pur-sang retenu dans son paddock. Sa longue finale se distingue par des notes minérales de craie, de gingembre et de douces fleurs d’une persistance proverbiale.

Oui, décidément, Philippe Foreau, gourmet passionné, sait transmettre dans ses vins le bonheur de les projeter dans l’espace qui leur revient : les grandes tables.

 

Un délice pour le cuisine thaï

Ce vin, grâce à son énergie et sa fraîcheur, sans excès de douceur, ses senteurs d’agrume et de coing, convient admirablement à la gastronomie et sublime la cuisine exotique sucrée-salée. Les poissons en sauce : sole à la crème, lotte à l’armoricaine, filets de cabillaud aux agrumes, une pastilla de pigeon ou mieux de poisson, la cuisine thaï, crevettes à l’aigre-douce, un ris de veau croustillant aux écrevisses selon Senderens, l’épouseront avec délice. J’ai un coup de cœur personnel avec deux préparations : le foie gras poêlé au coing et le canard à l’orange.

Bien que les vouvrays moelleux soient les plus adaptés aux desserts, ce demi-sec ne se déplaira pas en la compagnie d’une crème catalane, d’un gâteau aux poires ou d’un soufflé aux coings.

Philippe Foreau résume ainsi sa philosophie : « Boire du vin, au-delà de la gorgée avalée, c’est s’interroger sur les mystères de son goût, c’est comprendre son origine, son cépage, son terroir, c’est deviner les conditions climatiques qu’il a reçues ».

(1) Une technique qui permet de changer un pied de vigne tout en conservant une haute qualité de production, notamment lorsque le vignoble possède de très vieilles vignes de qualité.

 

Vouvray demi-sec 2007 – Domaine du Clos Naudin – 37210 Vouvray

 




Des outils pour vos patients – Le pilulier connecté

Un américain – AdhereTech – et un français – Medissimo – ont investi le créneau du pilulier connecté. Le concept est simple, si le patient ne prend pas sa pilule du jour, il sera rappelé à son bon souvenir et vos patients distraits vous en sauront gré.

AdhereTec1AdhereTech, la santé connectée

AdhereTech a imaginé une « smart pill bottle », autrement dit un petit flacon en plastique pour médicaments équipé de capteurs qui surveillent si le patient prend bien ses médicaments. Ce flacon vérifie le nombre de médicaments qu’il comporte et envoie les données en temps réel dans le cloud. Si le patient oublie de prendre sa dose de médicaments, un appel automatique ou un SMS lui rappelle de prendre leur dose prescrite habituelle.

L’intérêt principal est la configuration proche de zéro : pas de synchronisation ou de programmation. Cette petite machine se connecte comme un téléphone cellulaire. Les informations sont cryptées et les serveurs configurés pour des enregistrement anonymes, ce qui est le moins que l’on puisse faire…

 

Medissimo1Medissimo, le pilulier communiquant

Medissimo, a investit le même créneau qu’AdhereTech avec son pilulier communiquant. La start-up française a été récompensée en janvier dernier au CES de Las Vegas (1) pour son pilulier communiquant. Imedipac, c’est son nom, se présente sous la forme d’un semainier, avec des cases matin/midi/soir/coucher. Si l’utilisateur ne perce pas l’alvéole du lundi matin, Medissimo en est informé, et reçoit dans tous les cas l’heure de prise. Si une personne prend son traitement plus tard qu’elle ne le devrait, son médecin le saura à la fin du mois.

Imedipac se connecte à la plate-forme e-santé sécurisée de Medissimo. Le boîtier connecté est doté du GPRS, ce qui évite toute étape fastidieuse de configuration en wifi ou bluetooth (un bon point pour les allergiques à ces systèmes). Des signaux lumineux interpellent le patient lorsqu’il doit prendre un médicament. Imedipac permet aussi d’accompagner les patients lors de leurs voyages en se synchronisant automatiquement sur les fuseaux horaires. Lors d’une erreur de prise, plusieurs alvéoles se mettent à clignoter en association avec une alerte sonore. La plate-forme Medissimo en est informée, et si le patient l’a configuré sur l’espace web dédié, une alerte sera envoyée par email, SMS, et application mobile. Elle peut également déclencher une alerte téléphonique au patient, puis une alerte en cascade auprès du réseau d’aidants.

Imedipac devrait être commercialisé en fin d’année

 




Mots patients, mots passants

generisches buch 1C’est bien volontiers que nous nous faisons ici l’écho du dernier ouvrage publié par le Dr Robert Haïat.

On ne présente pas Robert Haïat à des cardiologues, tant est grande la notoriété de ses nombreux écrits sur les grandes études cliniques ou thérapeutiques et les recommandations en cardiologie.

Cardiologue, ancien chef de service de l’hôpital de Saint-Germain en Laye, Robert Haïat est aussi l’un des rédacteurs les plus éminents du Cardiologue, ses « Best of  des grands essais » sont attendus chaque année avec impatience par la population cardiologique, ils ont d’ailleurs valu à notre journal de recevoir le grand prix de la presse spécialisée en 2012.

Cette fois, l’auteur ne s’intéresse pas aux grandes innovations cliniques ou médicamenteuses  en médecine cardiovasculaire ; pour autant, on peut dire qu’il s’agit tout de même d’un livre « médical » puisqu’il concerne les patients.

En fait, Robert Haïat a réalisé ce que la plupart d’entre nous a rêvé de faire un jour ou l’autre au fil de ses consultations : il a soigneusement consigné les réflexions pertinentes ou moins pertinentes dont chacun peut être le témoin lors du « colloque singulier » qui fort heureusement permet encore au cardiologue clinicien de discuter avec son patient.

Comme il le précise très justement dans son avant-propos, « le huis clos d’un cabinet médical est souvent propice à la libération de la parole ».

Quelques exemples :

« Vous avez été soigné aux corticoïdes ? 

Non, docteur, aux Franciscaines »

Cela ne s’invente pas.

Ou encore :

« Ce jour-là, je n’avais pas la pêche pour aller à la chasse »

Et puis :

« Docteur, quand j’arrête de fumer, je grossis et quand je grossis je fume ; moi, vous le savez, c’est la graisse et le tabac ».

Et cette dernière qui a dû laisser l’auteur bien perplexe :

« Depuis que vous m’avez prescrit ce traitement, je n’ai plus eu d’arythmie ; mais, d’ailleurs, je n’en avais jamais eu auparavant ».

 

Au total, un florilège de phrases, expressions, réflexions plus cocasses les uns que les autres et parfois dépourvues de tout sens logique mais qui, ainsi que le souligne l’auteur, « n’ont pas toujours la légèreté qu’elles sembleraient avoir ».

A consommer sans modération.

 

Mots patients, mots passants

Auteur : Robert Haïat

Editeur : Editions Glyphe

Pagination : 120 pages

Prix public : 12,00 €




Château du Champ des Treilles 2011

vigneNe le celons pas, les prix des grands Bordeaux rejoignent actuellement la fantasmagorie ! Pour preuve : Angélus 2009 352 €, Cheval Blanc 2011 560 €, Lafitte 2011 572 €, Mouton 2010 791 €, Pétrus 2006 1 980 € ! Pas de méprise, ces prix hallucinants ne s’appliquent pas à une caisse de 6, mais à UNE bouteille ! Quel Français peut encore s’offrir de tels joyaux éphémères ? Certainement pas un cardiologue…

Heureusement, il est encore possible de déguster d’excellents « petits » Bordeaux aux alentours de 12 euros, tel le Champ des Treilles, beau domaine situé au sud de Sainte-Foy-la-Grande.

C’est en 1998 que, délaissant l’industrie agro-alimentaire, Corinne Comme reprend avec son époux, Jean-Michel, directeur technique du cru classé de Pauillac, Pontet-Canet, la petite exploitation familiale comptant maintenant 10 ha de vignes. La biodynamie s’est imposée à Corinne comme la meilleure solution pour le respect de la vie des sols, de la nature des cycles et de la santé des humains. C’est un retour au « bon sens » qui lui a permis de bannir tout geste inutile ou violent comme l’écimage, l’effeuillage ou les vendanges vertes. Ne cédant pas à la tentation du « tout-merlot », elle a aussi misé sur le petit verdot très à l’aise sur ses sols argilo-calcaires. Depuis 12 ans, l’accent est mis sur l’augmentation de densité de plantation, pour atteindre 10 000 pieds/ha en taille Guyot simple et double à l’instar des grands crus médocains que connaît bien Jean-Michel. Cette conduite, plus onéreuse, améliore la colonisation racinaire, la répartition des grappes et leur exposition au soleil. Le sol enherbé est labouré et décavaillonné, pour retourner la terre et éviter les herbicides.

L’agriculture biologique et biodynamique exclut évidemment tout intrant chimique. Si nécessaire, une fumure organique, des traitements à base de tisanes de plantes contribuent à améliorer la vie du sol.

Les raisins, récoltés manuellement à belle maturité en cagettes, passent sur la table de tri dès leur arrivée au chai. Les moûts fermentent spontanément en cuve inox grâce aux levures naturelles du raisin. Chaque parcelle est vinifiée séparément, les schémas de vinification étant adaptés à chaque terroir, afin d’exprimer au mieux leurs propres spécificités. Après la fin de la malo-lactique, le vin est soutiré et élevé 12 mois en fûts de chênes français. Comme à la vigne, toute action violente est bannie dans le chai, les extractions s’opérant tout en douceur. L’assemblage du Grand Vin du Champ des Treilles comporte 63 % de merlot,
20 % de cabernet franc, 9 % de cabernet sauvignon, 8 % de petit verdot.

Livré sur une robe brillante grenat sombre, paré de beaux reflets pourpres, ce Château des Treilles 2011 exhale au nez un bouquet aromatique intense très merlot de fruits noirs : cassis, mûre, griotte. Cette corbeille de fruits est soulignée par des flaveurs d’épices : cannelle, coriandre, menthe poivrée, de truffe et de réglisse qui se succèdent en une folle farandole. En bouche, la fraîcheur, la finesse, la douceur dominent avec beaucoup de suavité, de velouté grâce à une structure tannique fine, mais serrée sur un beau fil d’acidité. La finale est longue et persistante sur des notes de fruits noirs, auxquelles viennent s’ajouter des senteurs de terre chaude, de caillou frotté et de bois exotiques, en regrettant peut-être un peu de sécheresse terminale.

Ce vin encore jeune évoque les parfums d’une prairie en fin d’été, sur laquelle le crépuscule tombe doucement, qui se transforment dans un verger rempli de fruits pleins de couleurs, annonçant ainsi un beau potentiel de garde.

Avec sa finesse si particulière, ce vin de Sainte-Foy Bordeaux est un excellent compagnon pour une cuisine à son image délicate et raffinée. Un rumsteck saignant sauce Choron grosses pommes frites, une souris d’agneau confite aux épices douces, tagines de légumes, un carré de veau au soja, endives aux zestes d’orange amère lui feront fête, tout comme les classiques cèpes à la bordelaise. Je lui ai personnellement présenté une cuisse de pintade farcie qu’il a gaillardement escortée. De façon plus originale, il s’accordera avec certaines préparations marines : blanquette ou navarin de la mer, praires farcies, risotto de crevettes au curry.

N’acceptons pas la frénésie des prix des seigneurs bordelais et suivons Corinne C. qui aime ses vignes, et mieux leur fait confiance. Elles le lui rendent bien, engendrant des vins particuliers peut-être, mais sans maquillage, et qui laissent parler le terroir.

Château du Champ des Treilles 2011
Sainte-Foy Bordeaux 33220 Margueron



Votre nouvelle vie algorithmée

iPad BetteriseLa prévention est l’avenir de la médecine et du bien-être des hommes. C’est d’après ce simple constat que la start-up Betterise va prochainement lancer une application qui sera disponible sur le web et via des applications mobiles. L’un des fondateurs n’est autre que Michel Cymes, médecin et animateur de télévision.

 Notre vie quotidienne est constituée de multiples habitudes dont certaines portent atteinte à notre bien-être, sans que l’on en prenne vraiment conscience. Bettterise a pour vocation d’agir sur les petits gestes que nous reproduisons jour après jour pour réduire ceux qui pourraient être préjudiciables au bien-être, tout en sensibilisant et motivant au développement de ceux qui sont bénéfiques.

Grâce à son algorithme comportemental unique, Betterise adresse des conseils et des outils de manière ultrapersonnalisée en fonction du profil, des habitudes, des envies, des besoins…

Ce programme que nous n’avons pas encore essayé est extrêmement fourni. Hormis le classique carnet de notes pour relever toutes vos données, l’application mesure l’ensemble des données et interprète les comportements. Classiquement, un coach vous accompagne et conseille au quotidien (activité, nutrition, sommeil). L’algorithme gère également la gestion des humeurs et la prévention du stress. Il s’en prend également  à vos addictions afin de les réduire.

Enfin, un tableau de bord dédié vous permet de bien cerner ce qui va – et ne va pas – chez vous et d’y remédier.

Dans un premier temps, Betterise sera proposée aux entreprises afin de leur permettre, en améliorant la santé et le bien-être de leurs salariés, de lutter contre les phénomènes d’absentéisme et de présentéisme, d’augmenter leur productivité tout en améliorant leur image. Betterise est ainsi basée sur un modèle économique d’abonnement, pris en charge par chaque entreprise, par salarié et par an.




Le Gattamelata

La statue équestre en bronze du Gattamelata trône sur un piédestal, sur la piazza del Santo à Padoue devant la basilique de Saint Antoine. A l’origine, ce lieu entouré d’une enceinte était un cimetière, une œuvre de Donatello réalisée entre 1446 et 1450, en fait le monument funéraire du Condottiere Erasmo da Narmi appelé le Gattamelata. 

Donatello, un sculpteur de bronze reconnu

Donato Bardi, dit Donatello, né à Florence probablement en 1386/1387, fit ses premières armes dans l’atelier de Lorenzo Ghiberti (1) en participant à la réalisation des vantaux en bronze de la porte nord du Baptistère St Jean, un pendant à celles datant de 1336 de Nicolas Pisano.

Il est remarqué dès 1406, pour la qualité de ses travaux à la Cathédrale Santa Maria Del Fiore. Les sculptures des statues en marbre pour l’église d’Orsanmichele (2) (Saint Marc 1411-1413, Saint Georges,  la plus importante de ses œuvres de jeunesse, en 1416-1417) lui permettent d’accéder aux grands chantiers de la sculpture florentine. En 1423, pour une niche extérieure d’Orsanmichele, il conçoit sa première grande sculpture en bronze doré, le Saint-Louis de Toulouse (3). Lorenzo Ghiberti avait conçu, également pour Orsanmichele un Saint Jean Baptiste monumental, en bronze, dont la hauteur atteignait 2,55 m. Le Saint Louis de Toulouse  prouve le niveau technique auquel était parvenu Donatello dans l’art de la fonte du bronze. Réalisés en plusieurs morceaux ceux-ci après dorure ont été remontés en débutant par le bas de façon à ce que chaque partie se superpose à la précédente. Reconnu comme sculpteur de bronze, il reçoit de nombreuses commandes. Citons un monument funéraire pour l’antipape Jean XXIII alliant marbre et bronze doré (Il s’allie alors avec Michelozzo, un expert florentin de fonte du bronze), pour l’opéra del Duomo de Sienne le festin d’Hérode, la foi et, en 1430, le fameux  David nu placé au départ dans la cour du palais Medici Riccardi, aujourd’hui au musée du Bargello

Pour notre sujet, il est intéressant de noter qu’il fit alors un voyage à Rome en 1432-1433 où il n’a pas manqué de voir la fameuse statue équestre en bronze de Marc Aurèle.

De 1443 à 1453, il effectue un long séjour à Padoue, où il exécute plusieurs œuvres pour la basilique de Saint-Antoine : un immense crucifix puis un ensemble appelé autel du Santo, également en bronze comptant en tout 29 sculptures et bas-reliefs dont le miracle de la mule (4). Parallèlement, il travaille à la conception de la statue équestre du Gattamelata, au moment où il est au faît de son art. Donatello meurt à Florence le 13 décembre 1466.

Gattamelata, le chat rusé, un condottiere

Erasmo da Narni dit le Gattamelata, né en 1370 à Narni en Ombrie, est mort le 16 janvier 1443 à Padoue. Il fut l’un des condottieri les plus célèbres, avec Francesco Sforza, Alfonse d’Este, Federico de Montefeltro. L’Italie, depuis 1200 environ, est un assemblage de villes-états indépendantes se faisant mutuellement la guerre pour la conquête ou la défense de leur territoire et de leurs prérogatives commerciales. Ces cités font régulièrement appel aux condottieri, chefs de soldats mercenaires, ainsi le Gattamelata a servi successivement le pape, Florence et Venise, lors de combats contre les Visconti de Milan.

Padoue, un grand lieu de pèlerinage

Padoue fut, à partir du siècle IV avant J.C., le plus important centre des Vénètes, puis l’une des villes les plus prospères de l’Empire Romain.  Entièrement détruite par les Lombards en 602, elle renaît progressivement de ses cendres et devient au XIIe siècle une libre commune.  Au cours du Moyen Age, Padoue devient un grand centre universitaire et de pèlerinage. Fondée depuis 1222, l’université de Padoue attire les étudiants de l’Europe entière. La basilique Saint-Antoine, construite entre 1232 et 1300 dans un style de transition romano-gothique, abrite le tombeau de Saint Antoine, un moine franciscain né en 1195 et mort à l’âge de 36 ans, objet d’une grande vénération.

Elle connut l’apogée de sa puissance politique grâce à la Seigneurie de la Famille Da Carrara (1338-1404), une période de grande prospérité économique et artistique. Sous  la domination de la république de Venise depuis 1405, elle reste malgré tout un grand centre artistique comme en témoigne notamment les œuvres conservées à l’intérieur de la basilique.

La Statue du Condottiere

La statue équestre du Gattamelata, une commande du fils de ce dernier, a été érigée en 1453.

Cette statue équestre colossale (H 340 x l 390) est la première œuvre en bronze de cette importance réalisée depuis celle de Marc Aurèle à Rome et le premier monument consacré à un condottiere. Une telle réalisation demande non seulement une somme d’argent considérable mais exige également une haute technicité dans l’art de la fonte.

Cette statue en ronde de bosse était située à l’origine dans un cimetière en plein air et destinée à être vue sur tous les angles. Si la hauteur du piédestal rend impossible de voir nombre de détails, le Gattamelata était visible de loin et s’imposait à tout pèlerin venant à la basilique Saint Antoine…

1/ Lorenzo Ghiberti (1378-1455) : Ghiberti remporte le concours organisé par la corporation des marchands en 1401 (sacrifice d’Isaac) pour la réalisation des vantaux  en bronze de la porte nord du baptistère Saint Jean ; cette date marque, par convention, le début de la Renaissance en Italie. Sept concurrents étaient en liste dont Brunelleschi. 
2/ Orsanmichele : l’église Orsanmichele (1337) était l’un des carrefours commerciaux religieux les plus importants de Florence, proche de la place du Palazzo Vecchio. 
3/ Saint-Louis de Toulouse (H 2,85, l 1,10, pr 0,80 m) : né en 1274 à Brignoles mort en 1297 à l’âge de 23ans, fils de Charles II d’Anjou et de Marie de Hongrie, ordonné évêque de Toulouse en 1296 et canonisé en 1317. 
4/ Le miracle de la mule montre la virtuosité de Donatello à manier la perspective mise en pratique par Brunelleschi dés 1420. La scène raconte un des miracles de Saint-Antoine de Padoue : en réponse à un hérétique l’ayant bravé en lui disant qu’il croirait en Dieu quand sa mule le ferait également, Antoine présenta à la bête une hostie qui la fait docilement s’agenouiller devant l’autel de l’église.
 
Bibliographie[1] Charles Avery. La sculpture florentine de la Renaissance. Livre de poche 1970.

[2] Marc Bormand, Béatrice Paolozzi Strozzi. Le printemps de la Renaissance, la sculpture et les arts à Florence 1400-1460 Catalogue d’exposition. Edition du Louvre 2013.

[3] Gaeta Bertela. Donatello Edition Beccoci. Firenze. 1984.

[4] Neville Rowley. Donatello. La Renaissance de la sculpture. Edition A propos. 2013.

[5] F. Bacou, F. Baratte et coll. Les Chevaux de St Marc. Le Petit Journal 1981.

[6] Richard Truner. La Renaissance à Florence. Flammarion « Tout l’art ». 1997.




Côtes du jura : Fleur de Marne-la-Bardette 2008

371 – Ouiller ou ne pas ouiller ? Telle est le dilemme shakespearien soulevé par la talentueuse nouvelle vague des vignerons jurassiens.

vinjura150pxPendant longtemps, les vins blancs secs du Jura étaient appréciés par un nombre restreint d’amateurs pour leurs originalité et typicité : élevés sous voile selon la méthode traditionnelle, où l’évaporation dans les fûts n’est pas compensée par rajout de vin (ouillage), afin d’éviter la persistance d’une bulle d’air provoquant la piqûre acétique, c’est-à-dire le vinaigre.

Or, dans le Jura, le vin, en particulier le cépage savagnin, se protège par la constitution d’une pellicule levurienne, le voile, qui permet une oxydation lente et progressive accentuant les arômes. L’expression majeure de cette vinification hétérodoxe est représentée par le vin jaune, où le savagnin, maturant plus de 6 ans en fût, acquiert ses saveurs inimitables de noix, de curry et de morille.

Et puis vint Jean-François Ganevat, vigneron à forte personnalité, militant pour l’abandon du voile, privilégiant les beaux chardonnays du sud du vignoble, prônant une vinification classique à la bourguignonne avec ouillage, une culture biologique, puis biodynamique, un élevage parcellaire…

D’abord sceptique

Comme nombre d’amateurs, j’étais sceptique (Le Cardiologue n° 309) avant de découvrir ses fabuleux vins, ainsi que, grâce à un ami cardio-œnologue dôlois, ceux plus accessibles et moins onéreux de son proche voisin de Rotalier, Alain Labet, qui utilise strictement les mêmes méthodes.

Alain Labet travaille maintenant avec son fils Julien qui gère la vinification et crée ses propres appellations sur un domaine né en 1974, actuellement de 13 hectares, avec une forte dominante de blancs de chardonnay. Les plus belles cuvées, regroupées sous le nom de Fleur de Marne, proviennent de vignes de plus de 60 ans issues d’anciennes sélections massales à l’époque où les clones n’existaient pas.

Cultivées sur des marnes, terres sédimentaires du Lias avec un socle calcaire du Bathonien, les meilleures vignes poussent en pente douce, exposées ouest à une altitude de 250 mètres. L’agriculture, strictement bio sur certaines parcelles, n’utilise quasi aucun produit chimique, ni engrais. Le travail est manuel : griffage pour désherber, labourage, taille Guyot classique courte, traitements biologiques.

Les vendanges manuelles en caissettes s’étendent sur 1 mois, avec un tri sévère sur pied et au chai. Le raisin non éraflé est pressé pneumatiquement, le jus débourbé au bout de 12 heures, puis remis en suspension pour une fermentation spontanée à partir des levures présentes naturellement dans la vigne, différentes d’une parcelle à l’autre qui donnent ainsi au vin sa personnalité et ses typicités aromatiques. Cela explique, chez les Labet, le dogme des cuvées parcellaires issues d’une seule vigne portant le nom du lieu-dit, où il est né.

Le vin est élevé sur lie en barriques, sans soutirage pendant 12 à 24 mois. Elles sont complétées chaque semaine, pour prévenir l’oxydation et interdire le voile. Le bois neuf est exclu. La mise en bouteille s’effectue, sans collage, ni filtration.

Habillée d’une robe or pâle limpide aux reflets verts, cette Fleur de Marne Bardette 2008 exprime une matière séveuse juvénile et une personnalité charnue épicée. Le nez est charmé par la délicatesse des fleurs de chèvrefeuille, d’aubépine, de camomille associée à la fraîcheur d’agrumes mûrs. La bouche, envahie par des arômes d’épices, poivre blanc, cumin et de fruits, pamplemousse et abricots confits en une richesse un peu échevelée, regorge de saveurs minérales tempérées par un plaisant gras et une fine acidité typiques du sol de marnes sur socle calcaire. La finale tendue et longue confirme la noblesse de ce chardonnay jurassien. Ce vin évoque d’innombrables fleurs délicates qui se balancent sous le doux soleil de l’automne, leurs pétales aux couleurs tendres tremblant et s’abandonnant sous le murmure de la brise.

Un grand vin de gastronomie

A l’évidence, ce chardonnay du Jura la Bardette, doté d’une minéralité tranchante qui titille les papilles, est un grand vin de gastronomie. Il dédaignera les classiques fromagers jurassiens, raclettes, fondues et autres tartiflettes, mais se complaira avec des plats plus élaborés : pavé de saumon sauce fumée au lard, lieu jaune moutarde à l’ancienne, barbue ou plus prosaïquement cabillaud au jus de carottes selon Piège, salade ou tartare de Saint-Jacques aux truffes, filets de perche à la hollandaise. Les poissons de rivière et de lac, les écrevisses lui feront la fête. Il accompagnera plaisamment de belles viandes blanches, telles une escalope de veau comtoise, une volaille crémée et truffée. Il s’accordera plus avec des fromages locaux doux : mont d’or, morbier qu’avec les vieux comtés ou beauforts qui, eux, se roulent de plaisir avec le savagnin.

A Alain Labet, la conclusion : à travers mes vins, je laisse s’exprimer la personnalité d’un cépage, d’un lieu, d’un sol, d’un terroir. Le vigneron n’est que l’interprète de cette partition écrite par la nature.

Jean Helen

Domaine Labet 39190 Rotalier

 




e-Santé ou m-Santé ?

e-Santé ou eHealth

Le terme d’e-Santé désigne tous les aspects numériques touchant de près ou de loin la santé. Cela correspond à du contenu numérique lié à la santé, appelé également la santé électronique ou télésanté.

Cela concerne des domaines comme la télémédecine, la prévention, le maintien à domicile, le suivi d’une maladie chronique à distance (diabète, hypertension, insuffisance cardiaque …), les dossiers médicaux électroniques ainsi que les applications et la domotique, en passant même par la création de textiles intelligents.

La e-santé apparaît de plus en plus comme la solution à mettre en place pour palier aux difficultés de notre système de soins qui est confronté aujourd’hui à plusieurs défis majeurs :

– vieillissement de la population,

– gestion de la dépendance,

– accès universel à une prise en charge de qualité,

– accroissement significatif des dépenses,

– explosion des maladies chroniques,

– évolution de la démographie médicale qui menace l’accès égalitaire aux soins.

 

m-Santé ou mHealth

Il s’agit de tous les services touchant de près ou de loin à la santé disponibles en permanence via un appareil mobile connecté à un réseau (smartphones ou tablettes).
En d’autres termes, on peut dire également que la m-Santé est l’e-Santé accessible avec un téléphone mobile ou un tablette.

La Fondation des Nations-Unies a organisé la définition de la m-Santé avec les six catégories d’applications dans le domaine de la santé mobile :

– éducation et sensibilisation,

– téléassistance,

– diagnostic et traitement de soutien,

– communication et formation pour les professionnels de santé,

– maladie et le suivi d’une épidémie,

– surveillance et la collecte de données à distance.

Pascal Wolff




Sacré monde « médiconnecté »

370 – Les applications médicales pour smartphones et autres tablettes sont aujourd’hui légions dans les circuits de distribution. Ces apps sont avant tout destinées au grand public, bien plus facile à convaincre que les professionnels de santé pour lesquelles des développements sont synonymes de coûts et de… professionnalisme.

L‘aventure de l’AppStore a commencé en juillet 2008 avec 500 applications et 10 millions de téléchargements le jour de son lancement. Cinq ans plus tard, Apple annoncait 900 000 apps pour plus de 50 milliards de téléchargements. Dans cette avalanche de chiffres vertigineux, la catégorie santé/médecine/bien-être (car on mélange tout dans les stores) propose un grand nombre d’applications gratuites (environ 45 %) et payantes (prix moyen de 7,57 euros) avec une palme pour iStutter – une application destinée à aider les bègues à surmonter leur handicap – pour la modique somme de 799,99 euros. Et la tendance n’est pas prête de s’arrêter car, selon le rapport Research2guidance (1), le pic des 500 millions d’utilisateurs devraient être atteint en 2015.

On ne compte plus les nouveautés concernant la rubrique santé/médecine/bien-être, mais quantité ne rime pas forcément avec qualité et ce mélange fourre-tout fait la joie des sociétés de développement, et le sérieux de ces applications mobiles santé sur les différents store laissent souvent à désirer, car mal catégorisées, non évaluées et rares sont celles qui peuvent apporter une aide incontestable à l’utilisateur. On peut en vrac trouver un lecteur de bandelettes urinaires, un guide d’infectiologie, une application d’examen de la peau, un « évaluateur » de psoriasis, un lecteur de glycémie, un oxymètre de pouls, un dépisteur de mélanomes et, le cinq étoiles : une application qui oriente vos rêves en laissant le smartphone dans votre lit pour vous aider à bien dormir (sic).

Mais face à ces développements de l’e- et de la m-santé (2), certains sites internet proposent des « dossiers Médecine » et d’autres des plates-formes d’évaluation. Mais, plus important pour les professionnels de santé, ce sont les initiatives de la FDA, de la NHS ou de Vidal en collaboration avec les CNOM que certaines applications sont en train de devenir de véritables dispositifs médicaux . Cette prise en main par de hautes instances médicales montrent l’importance que les applications auront demain dans notre vie. Elles deviendront incontournables dans le suivi thérapeutique, le maintien à domicile, le monitoring/coaching, la télémédecine, dans une perspective de meilleure efficacité des traitements et des soins, et de réduction des coûts de santé. Surtout si l’on estime que les professionnels de santé prescriront et conseilleront des applications mobiles à leurs patients en plus de leurs traitements d’ici quelques années (3).

Quant à Apple, elle développerait pour sa prochaine mise à jour une app dédiée à la santé sur iOs 8 appelée Healthbook. Cette application pourrait être connectée à un bracelet ou à la future iWatch. Nous en saurons plus en juin lors des traditionelles annonces de San Francisco.

Pascal Wolff

(1) Mobile Health Market Report 2013-2017 – research2guidance.com
(2) lemondedelaesante.wordpress.com
(3) http://buzz-esante.com



La Madone de Tarquinia de Filippo Lippi (1406-1469) et la parenté du génie

370 – La Galerie Nationale d’Art Ancien du palais Barberini à Rome permet d’admirer une Vierge à l’Enfant de Fra Filippo Lippi (v.1406-1469) qui meurt à Spolète, petite ville d’Ombrie au nord de Rome, le 8 octobre 1469 entouré de son fils âgé de 12 ans, Filippino Lippi (1457-1504), sans avoir eu le temps de terminer les peintures de l’abside de la cathédrale. Dix huit ans après sa mort, Filippino s’arrêta à Spolète pour mettre en place un monument sur la tombe de son père à la demande de Laurent le Magnifique (1449-1492) soulignant les liens étroits qui les unissaient aux Médicis, à la fois mécènes et protecteurs. 

Un orphelin de talent

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Filippo Lippi : autoportrait (détail). Dans Scènes de la vie de la Vierge, fresques de la cathédrale de Spolète.

Filippo di Tommaso Lippi serait né à Florence vers 1406 ; orphelin très tôt, c’est à l’âge de huit ans qu’il est confié au couvent de Santa Maria del Carmine (du Carmel) où il va peindre ses premières oeuvres. En 1421, il prononce ses vœux avec son ami Fra Diamante (v.1400-v.1485) qui sera son alter ego et assistant jusqu’à la fin de sa vie. C’est dans la chapelle Brancacci, située dans l’église Santa Maria del Carmine, que Filippo va être influencé par les derniers raffinements gothiques de Masolino (1383-1440) et les innovations de Masaccio (1401-1428).

En 1428, Filippo est nommé sous-prieur des Carmélites de Sienne où il pu s’imprégner des peintures de l’école siennoise. En 1432, il quitte le couvent sans quitter l’habit et en 1437, il peint sa première œuvre importante, le Retable Barbadori (Louvre) qui est l’un des premiers exemples de « Sainte Conversation » regroupant la Vierge, l’Enfant et les saints sur un seul panneau.

La Madone de Tarquinia

La Madone de Tarquinia
Filippo Lippi : La Madone de Tarquinia (1437).
Tempera sur bois, 151 x 66 cm.

Cette Vierge à l’Enfant est la première œuvre datée (1437) de l’artiste, dans un cartouche à la base du trône, et se situe à un tournant dans son évolution artistique, probablement sous l’influence de peintres flamands tels que Jan Van Eyck (1395-1441) qui, dès le début du XVe siècle, montrèrent des figures célestes dans un cadre domestique. Filippo Lippi a pu découvrir ces peintres lors d’un séjour à Padoue en 1434, dans l’entourage de Cosme de Médicis dit l’Ancien (1389-1464) temporairement exilé.

La Madone de Tarquinia (ou Corneto Tarquinia), découverte au XIXe siècle dans la petite ville de Corneto située dans la région du Latium, en Italie centrale, devenue Tarquinia en référence à son passé étrusque (Tarquin l’Ancien ayant été le premier roi d’origine étrusque de la Rome antique), y fut apportée par son commanditaire, Giovanni Vitelleschi, archevêque de Florence, pour son palais construit dans les années 1430 ; on y voit l’Enfant Jésus se précipiter sur sa mère dans un bel élan de tendresse, mais il est presque grotesque, erculeo Bambino, avec une grosse tête joufflue, un torse puissant et de larges membres, sur le modèle du putto « enfant potelé et nu » partout présent, le plus souvent avec deux ailes, dans l’art hellénistique et romain.

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Filippo Lippi : buste en habit de Carme dans la cathédrale de Spolète.
par Benedetto da Maiano (1442-1497).

Ceci est à rapprocher du petit Jésus potelé et impatient, dans l’Adoration des Mages sculpté par Nicola Pisano (1220-1278) sur la chaire du baptistère de Pise avec l’une des Vertus terrestres sous l’aspect d’un Hercule nu (1260), emprunté aux vestiges antiques. Assise sur un trône jaspé en éventail dans un style byzantin, la Madone, à la tristesse retenue, a des mains massives  et une tête presque ronde et aplatie, dans un style typique de Filippo Lippi ; les plis de sa robe sont à la fois souples et larges.

La scène se situe dans le cadre privé d’une chambre ouverte sur une cour que l’on entrevoit à travers un portail semi-ouvert à l’arrière avec des volets garnis de ferrures et un paysage visible par la fenêtre ouverte sur la gauche, de tradition nordique mais aussi siennoise situant les scènes de la vie de la Vierge au sein d’une pièce communiquant avec d’autres espaces.

En outre, le peintre impose un effet d’optique sous forme d’une impression de relief « écrasé » ou stiacciato inspiré de Donatello (1386-1466) avec une lumière rasante sur le tissu et les bijoux au sein d’une pénombre nuancée. Le naturalisme flamand est retrouvé dans le réalisme du livre de prières d’où pendent des signets, avant l’influence des couleurs claires et lumineuses de Fra Angelico (v.1400-1455) et avant que l’artiste prenne ses distances avec l’influence de Masaccio. Il en résulte une grande tendresse et une sensualité inhabituelle d’autant que c’est la première fois, dans la peinture italienne, que les saints personnages n’ont pas d’auréole et sont représentés dans une ambiance intime; ils sont résolument humains.

Une vie tumultueuse

En 1438 Filippo Lippi passe au service des Médicis ; en 1452, il commence les fresques de l’église Santo Stefano à Prato parmi lesquelles la Danse de Salomé lors du Festin d’Hérode est l’expression la plus vivante qu’il ait composée. Cette même année, Filippo d’un caractère impulsif, fut compromis dans une histoire de faux en écritures, mis en prison et condamné à l’estrapade.

En 1456, il est chapelain du couvent des religieuses de Santa Margherita à Prato où il va séduire une jeune religieuse qui lui sert de modèle, Lucrezia Buti née en 1435, dont il aura un fils, Filippino en 1457. Cette liaison scandaleuse fut divulguée par le tamburazione, fente par laquelle on glissait les dénonciations anonymes.

C’est Cosme de Médicis qui va lui sauver la vie en demandant sa grâce au pape Pie II Piccolomini (1405-1464) qui accepta de relever Filippo et Lucrezia de leurs vœux ; Cosme de Médicis excusait les fautes de l’homme par le génie du peintre et « ce moine en rupture de vœux qui émancipa la peinture religieuse » avait voulu rester moine malgré ses aventures et c’est sous l’habit blanc de sa congrégation que, après son époque « pratese » (1452-1466), il arrive à Spolète pour y peindre les fresques à la glorification de la Vierge de l’abside de la cathédrale. Filippo Lippi s’y représentera en compagnie de son jeune fils adolescent. Ces fresques, restées inachevées à sa mort, seront terminées par son fils et Fra Diamante.

L’inné et l’acquis du talent : les deux Lippi

Filippo Lippi était considéré de son vivant comme l’un des plus grands artistes florentins et fut le premier à se représenter parmi les personnages de ses peintures. A la fois maître habile et tyrannique, fabuleux coloriste sachant donner une remarquable vivacité à ses œuvres, Fra Filippo Lippi eut souvent des relations compliquées avec ses élèves parmi lesquels le plus prestigieux fut Sandro Botticelli (1445-1510) chez lequel Filippino Lippi fit son apprentissage avant d’être considéré à son tour et de son vivant, comme un peintre florentin éminent. Les œuvres de Filippino sont moins sereines que celles de son père, reflétant les années de répression artistique du prédicateur Savonarole (1452-1498).

A la mort de Filippino Lippi à l’âge de quarante six ans, « d’une très mauvaise fièvre et d’une angine », les ateliers d’artistes demeurèrent fermés lors des funérailles, ce qui n’était réservé qu’aux personnalités princières. « Le père était né vers 1406, le fils mourut en 1504. A travers leurs œuvres, on peut suivre la marche du grand siècle de la peinture florentine, de son aurore à son crépuscule » (Mengin).

Louis-François Garnier

Bibliographie

[1] Baxandall M. L’œil du Quattrocento. Gallimard 2013.
[2] Deimling B. La peinture des débuts de la Renaissance à Florence et en Italie centrale. in Renaissance italienne. Editions de La Martinière 1995.
[3] Le printemps de la Renaissance. La sculpture et les arts à Florence 1400-1460 Louvres éditions 2013. 
[4] Mengin U. Les deux Lippi. Librairie Plon 1932.
[5] Molinié A.S. Filippo Lippi, la peinture pour vocation. A Propos 2009.
[6] Panofsky E. La Renaissance et ses avant-courriers dans l’art d’Occident. Flammarion 2008.
[7] Paolucci A. Filippo Lippi. Art Dossier Giunti Editore 200.
[8] Toman R. et al. L’Art de la Renaissance italienne. Ullmann 2013.
[9] Vasari G. Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes. Commentaires d’André Chastel. Acte Sud 2005.
[10] Filippo et Filippino Lippi. La Renaissance à Prato. Silvana Editoriale 2009 et de façon romancée.
[11] S. Chauveau. La passion Lippi. Folio 2006.

Remerciements au Dr Philippe Rouesnel pour ses conseils érudits et au conservateur du musée Barberini pour sa bienveillante disponibilité.




Faugères : Domaine Saint-Antonin Magnoux 2010

Magnoux370 – Gros rouleurs de mécanique, potions « high-tech » généreuses à haut indice d’éthanol, tels étaient les reproches habituellement adressés aux vins rouges du Languedoc… Mais de jeunes viticulteurs talentueux, ainsi que nous l’avons déjà signalé (Le Cardiologue 312 et 334), ont totalement modifié ces jugements, en confectionnant des vins modernes privilégiant la finesse, l’élégance et la fraîcheur au détriment de la puissance brute, du punch et du degré alcoolique grâce à la prédominance des cépages rhodaniens, syrah, grenache sur les méditerranéens, carignan, cinsault.

Le domaine Saint-Antonin illustre parfaitement cette évolution signant, pour Parker, l’un des meilleurs vins du Sud de la France. Frédéric Albaret, après plusieurs années d’expériences viticoles à Châteauneuf et en Languedoc, prend la décision de créer « ex nihilo » son domaine en 1994 d’une superficie initiale de 14 ha, montée actuellement à 26 ha, dans l’aire d’appellation Faugères sur le terroir schisteux typique de la région qui apporte gourmandise et suavité aux vins. Après avoir, des années durant, cassé le schiste de ses propres mains, ce vigneron passionné voit sortir de terre, en 2000, un tout nouveau chai et une cave de stockage incrustés dans la colline. Les vignes, plantées en plateau, sont bien exposées, mais cependant relativement protégées de l’ensoleillement intense.

Frédéric Albaret procède à une viticulture entièrement naturelle certifiée bio depuis 2012, éliminant tout intrant chimique, gardant son sol bien vivant. La taille est en gobelet, sauf pour les syrahs en cordon de Royat. Les terres non désherbées sont labourées, un ébourgeonnage strict limite les rendements à 25 hl/ha, évite les vendanges au vert et aère les souches. Un léger effeuillage pendant l’été peut s’y associer.

Les vendanges manuelles en cagettes font l’objet d’un double tri sur table. Les raisins, sauf les mourvèdres, s’ils ont souffert de la chaleur, sont totalement éraflés, pressurés pneumatiquement et macèrent dans des cuves de 80 hl. La fermentation par levurage naturel s’étend sur 1 mois avec une extraction douce, sans sulfitage, grâce à un léger remontage journalier, pour humidifier le chapeau, sans pigeage, ni bâtonnage. L’élevage dure un an en foudres et demi-muids, puis une année supplémentaire en cuve avec un sulfitage minimal : légère filtration avant la mise en bouteilles, sans collage. L’assemblage varie selon les millésimes, pour le Magnoux 2010 : 70 % de syrah, 20 % de mourvèdre, 10 % de grenache.

Une invitation pour flâner au milieu de la garrigue

Parée d’une robe sombre rubis profond, aux reflets et disques pourpres limpides, aux larmes abondantes, cette cuvée Magnoux 2010 donne d’emblée l’impression de flâner dans la garrigue, puis de pénétrer doucement dans un jardin d’épices. Une profusion de fruits noirs, cassis, confiture de mûre, d’herbes de Provence, thym, origan, d’épices, cannelle, poivre noir, réglisse envahissent le nez. En bouche, ressortent, dans une richesse profonde et moëlleuse, des saveurs de viande rôtie, de noyaux de fruits, d’iode, de poussière minérale procurant une sensation douce-amère intense, mais avec beaucoup de fraîcheur qui masque parfaitement le 14,5 degré d’alcool. Les tanins, malgré la forte charpente, sont d’une grande finesse et le boisé fondu presqu’imperceptible. Sa longue finale tapisse le palais avec raffinement.

Ce vin, par ses arômes de garrigue et de fruits noirs, convient parfaitement à un jambon de montagne ou un ballota espagnol accompagné d’une salade de tomates à l’huile d’olive. Grâce à ses notes sudistes, il épousera avec délice toutes les recettes traditionnelles du midi : lapin au thym, carré d’agneau au romarin et artichauts, caille à la tapenade, daube provençale. Servi frais, il accompagnera grillades, pièce de bœuf, poulet rôti, viandes blanches. Doté d’un très bon potentiel de garde, il pourra attendre 5 ou 6 ans, pour fêter un gibier à poil ou un faisan au raisin. Gardez un fond de verre pour un dessert au chocolat.

Il faut impérativement carafer ce vin, dont le moindre attrait n’est pas le remarquable rapport qualité/prix.

Laissons conclure Frédéric Albaret : « le premier talent du vigneron est de produire du vin qui se boit. Le plus important, en définitive, ce n’est pas l’appellation, mais la personnalité du vin et du vigneron qui est derrière ».

J. Helen

Faugères : Domaine  Saint-Antonin Magnoux 2010

Frédéric Albaret – 34480 Cabrerolles




Ils ont perdu la raison

370 – Il y a longtemps qu’on ne présente plus Jean de Kervasdoué : cet ingénieur agronome, économiste de la santé, ingénieur des ponts et des forêts, avait été nommé directeur des hôpitaux sous François Mitterrand et introduit à l’hôpital le PMSI, lui-même à l’origine de la tarification à l’activité.

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Auteur de nombreux ouvrages sur l’écologie politique et la santé, il exprime une vision volontiers critique de notre système de santé auquel il reproche, entre autres, son excès de centralisation et le manque d’autonomie de ses hôpitaux. Dans les prêcheurs de l’apocalypse, il dénonçait déjà les manipulations dont certains acteurs de l’écologie faisaient leur fonds de commerce et jouaient sur la peur du public pour bloquer certaines innovations.

L’erreur du principe de précaution

Avec ce livre « Ils ont perdu la raison », l’auteur va plus loin : homme de gauche, comme il se plait à le répéter, il reproche à sa famille politique (ce sont eux les « ils » du titre) d’avoir cessé de croire au progrès ; et s’il se laisse parfois emporter par la force de sa conviction, il faut reconnaître que sa lutte contre la pensée unique est solidement argumentée.

Très critique vis-à-vis du principe de précaution dont l’inscription dans la constitution lui paraît une grave erreur, il passe en revue, pour les combattre, les faux dangers qui servent à affoler les populations et surtout à refuser le progrès.

Citant des ONG, « aussi non gouvernementales que non scientifiques qui manipulent l’opinion avec l’appui de la presse » et des politiques qui légifèrent en se substituant aux experts, tels Mme Duflot qui affirme sans rire que les moteurs Diésel sont responsables de plus de 40 000 morts par an, soit plus que le tabac, l’auteur montre bien qu’il est au bord de l’exaspération.

Oui, affirme-t-il, les risques de la pollution atmosphérique ou de la pollution de l’eau sont nettement surestimés dans notre pays.

Non, à ses yeux, les OGM ne sont pas des poisons, ne serait-ce que parce qu’il en existe autant de variétés que de plantes sauvages qui ne sont pas toutes vénéneuses, et surtout parce que près d’un milliard d’êtres humains en consomme sans nuisance patente.

Oui, les pesticides peuvent être dangereux mais, conçus pour tuer des « pestes » qui ravagent les cultures et produisent des toxines autrement plus maléfiques, leur bilan, s’ils sont utilisés prudemment, est globalement positif.

Jean de Kervasdoué condamne également les idées reçues sur l’énergie nucléaire, non polluante et bénéfique, avant de terminer sur la santé, son domaine de prédilection. Rappelant que les connaissances doublent tous les trois ans et que plus de 700 000 articles sont publiés chaque année dans des revues à comité de lecture, il n’hésite pas à accuser les lenteurs de l’accès aux innovations aussi bien que la liberté de prescription, qu’il estime obsolète et dangereuse.

Bref, conclut-il, les politiques ont perdu la raison car ils ne croient plus à la force du raisonnement scientifique et de l’expérience, mais cherchent à plaire à l’opinion publique au lieu de rechercher l’intérêt général.

Un livre décapant, qui se lit volontiers d’une seule traite.

Yves Carat




Sacré monde « géoconnecté »

Googleglass
© Google

368-369 – Pascal Wolff – Depuis un an, 10  000 GoogleGlass, les lunettes de Google, circulent aux Etats-Unis aux yeux d’américains férus de nouvelles technologies. Malgré de nombreux problèmes de développement qui en auraient retardé sa sortie, la commercialisation devrait avoir lieu outre-Atlantique au premier semestre 2014 et en 2015 en Europe, si toutes les barrières techniques et juridiques sont levées.

La GoogleGlass au look pas franchement classique pour des lunettes, intègre un objectif, un haut-parleur, deux microphones, un accéléromètre, un gyroscope, un compas et des connexions bluetooth et wifi.

Le smartphone devenu obsolète

Avec GoogleGlass, votre smartphone restera dans votre poche. Au mieux, il pourra vous servir de relais si le wifi n’est pas présent là où vous êtes (d’où la connexion bluetooth), au pire, il vous servira de téléphone, comme au bon vieux temps.
Concrètement, l’utilisation de ces lunettes est simplissime, car elles vous obéissent à la parole :

– Dites « prendre une photo » et l’appareil obéi. Dites « prendre un film » et l’appareil filme. Et tout cela peut être directement partagé avec vos amis.

– Le guidage GPS est obtenu en surimpression sur votre lunette (ce que l’on appelle la réalité augmentée [1])

– Toutes les fonctions audio sont présentes avec enregistrement d’un message et l’envoi à un correspondant,

– S’informer sur un lieu, un objet, une personne (comme vous le feriez chez vous) ;

– Obtenir des informations ou une traduction instantanément…

Avec ses données GPS, GoogleGlass, en vous localisant constamment, n’a pas besoin de vous pour vérifier si le vol que vous allez prendre est à l’heure lorsque vous arrivez à l’aéroport, car il anticipe vos faits et gestes.

Bienvenue dans l’univers de Google

Les possibilités sont sans limites dans le monde semi-virtuel de Google, et c’est là où le bât blesse.

Tout d’abord parce que ces lunettes font une intrusion permanente dans des lieux publics en toute discrétion, et il y a de bonnes chances qu’un certain nombre de personnes vont se retrouver sur la toile à leur insu.

Ensuite parce que l’utilisateur ne va plus forcément faire la différence entre vie privée et vie réelle tellement la connexion entre les deux mondes va être très mince.

L’ombre de la NSA

Sans être paranoïaque, on peut aisément penser – vu l’approche des Américains et des cyber-connexions (l’ouverture entre la NSA et les grands groupes informatiques et du net) sur notre vie privée – qu’une utilisation quotidienne donnera à Google la possibilité de tout savoir de votre vie, de ce que vous faites, où vous allez, qui vous rencontrez, ce que vous dites, vos marques et produits préférés, celles et ceux que vous détestez, bref vos habitudes… Comment savoir, si vous avez vos lunettes en permanence sur vous (Google Glass pourra être équipée de monture pour vue ou de soleil) qu’un intru s’est glissé à votre insu et visualise tout ce que vous faites ?

La maîtrise de Picasa

Une fois sur le cloud, votre image « volée » sera digérée et intégrée par Google et ses immenses possibilités d’analyse. La reconnaissance faciale, par exemple, fait partie intégrante du monde virtuelle de Google+ qui ressemble plus à un système d’identification qu’à un réseau. De quoi faire frémir les moins sceptiques d’entre nous. Souvenez-vous de la sortie de Google Street View et des protestations qu’elle a engendrée et imaginez chaque personne portant des GoogleGlass engendrant une telle masse d’informations ? N’est-ce pas là une version de Big Brother plus belle (effrayante) que ce qu’on a pu imaginer jusque-là ? Ce n’est plus un gouvernement qui nous épie, c’est chacun de nous qui devient Big Brother.
Alors vous me direz, dès que je vois quelqu’un avec des lunettes, je tournerai la tête. Soit, mais Google prépare déjà le terrain des verres de contact avec puce intégrée. Dans un premier temps, ces lentilles ont été créées pour les diabétiques avec capteur, mais après, une fois que la miniaturisation sera maîtrisée…
Il faudra beaucoup de courage à nos politiciens pour faire de la transprence dans cette nouvelle technologie. Mais va-t’on réellement pouvoir définir un cadre législatif applicable ? Rien n’est moins sûr tant les enjeux et les intérêts sont importants.

L’impact sur la santé

Il y a un certain nombre de questions déjà présentes sur les smartphones qui concernent également l’impact des capteurs et autres antennes WiFi, GPS et Bluetooth. Egalement, quel impact sur la vue et les changements incessants d’accommodation de l’œil droit ? quel impact d’un effort asymétrique des yeux (et du cerveau) ? Des questions pour l’instant sans étude, sans recherche… et sans réponse.

(1) Google a racheté les brevets pour la réalité augmentée à la société taïwanaise Foxconn.

 




Prix Jean Di Matteo

Seance solennelle
Michel Corcilius, en présence du Pr Raymond Ardaillou, Secrétaire perpétuel de l’Académie nationale de médecine.

Notre confrère et ami, le Dr Michel Corcilius, a reçu le 17 décembre dernier le prix Jean Di Matteo traditionnellement décerné à un cardiologue par l’Académie Nationale de Médecine. Ce prix récompense l’ouvrage « Je vous parle du cœur » publié par Michel Corcilius aux éditions Quintessence-Ressources et santé, dont Le Cardiologue avait en son temps chaudement recommandé la lecture.

Toutes nos félicitations à l’heureux lauréat.

La rédaction.




Biostatistiques pour le clinicien

generisches buch 1368-369 – Yves Carat – L’innovation est la base des progrès de la Médecine. Pour autant, l’évaluation de ces innovations est capitale pour éviter de s’engager sur de fausses pistes, c’est-à-dire de réduire le temps où l’on croit faire bénéficier les patients d’un progrès médical alors qu’il n’en est rien. 

 Or, c’est l’analyse statistique qui conduit ces méthodes d’évaluation, indispensable pour les auteurs d’un travail afin de le réaliser avec toute la rigueur nécessaire, indispensable aussi aux lecteurs pour se faire une opinion critique vis-à-vis des publications toujours plus nombreuses qui les entourent et finissent par les submerger.
L’apprentissage de la lecture critique d’articles scientifiques est également l’un des objectifs de l’examen classant national en fin de deuxième cycle des études médicales.
Malheureusement, l’abord des statistiques n’est pas aisé pour un public de non-spécialistes, même pour la plupart des étudiants en médecine issus pourtant dans leur quasi-totalité d’un baccalauréat scientifique.
C’est l’ambition de cet ouvrage d’être accessible à toutes les catégories de lecteurs, en privilégiant la compréhension et l’intérêt des concepts plutôt que leur démonstration mathématique. Il a d’ailleurs l’originalité d’avoir été rédigé par un clinicien, le professeur Michel Huguier, chirurgien digestif, sous le « contrôle » d’un spécialiste, Pierre-Yves Boëlle,  professeur de biostatistiques et ingénieur civil des mines.

Le livre débute par une série de définitions et données fondamentales ; le lecteur qui, assez souvent, n’avait jusque-là en tête que la signification du « petit p » et son niveau pour juger de la significativité d’un essai clinique ou thérapeutique, va recevoir  une avalanche d’informations précises et bien exposées dont la compréhension lui paraîtra désormais indispensable à la bonne évaluation d’un essai : qu’est-ce au juste qu’une variable qualitative ou une variable quantitative ? Quelle est la différence entre « moyenne » et « médiane » et pourquoi privilégie-t-on  souvent la mesure de la seconde ? Quelle est la signification exacte de l’écart type, des variables censurées ? Comment mesure-t-on l’intervalle de confiance ? A quoi sert la loi de Poisson ? Etc., etc. Autant de précisions nécessaires pour qui veut pouvoir désormais disposer de ses propres critères de jugement.

L’ouvrage ensuite, et ce n’est pas la partie la moins intéressante, aborde les conditions de réalisation des essais randomisés, sans faire l’économie d’un chapitre sur les aspects éthiques, réglementaires ou le financement des grandes études, avec le problème, en fait récurrent, de l’indépendance des investigateurs et de l’objectivité scientifique.
Puis sont abordées, avec force détails, les études uni et multifactorielles, et l’intérêt de ces dernières pour répondre à des questions que ne peut, dans certains cas, pas résoudre un essai randomisé.
Les dernières parties sont consacrées aux outils diagnostiques et thérapeutiques, à l’estimation d’un pronostic, et à l’épidémiologie.

Par son accessibilité, sa clarté et – sans doute – son exhaustivité, ces « biostatistiques pour le clinicien » vont réconcilier les praticiens que nous sommes avec les mathématiques et sont à garder en permanence à portée de mains.

Auteurs : Michel Huguier, Pierre-Yves Boëlle
Editeur : Springer Verlag France
Prix public : 55,00 €
Pagination : 300 pages




La palette dite du Tribut Libyen

368-369 – Christian Ziccarelli – La palette à fard dite du Tribut Libyen ou palette des Villes date de la période de Nagada III A-B soit entre 3200 et 3100/3000 avant notre ère. Elle fait partie d’un de ces trésors méconnus par le grand public que recèle le musée du Caire. 

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Les premiers noms royaux. On voit apparaître la multiplication de symboles royaux, associant un ou deux faucons à un ensemble d’autres signes : rectangles décorés dans la partie basse de stries avec un pictogramme, le nom du roi, représentant du dieu faucon – Horus – sur terre.

La civilisation dite de Nagada, du nom d’un site de la Haute Egypte apparaît vers 3800 ans avant J.-C.. Elle est connue grâce au contenu luxueux des tombes témoin déjà d’une croyance dans l’au-delà et du haut degré atteint par l’artisanat.
On distingue trois époques en fonction du type de poterie. Nagada I (3800-3500 av. J.-C.), Nagada II (3500-3200 av. J.-C.) et la période de notre palette, Nagada III (3300-2700 av. J.-C.). Nagada III se divise en Nagada III A-B ou dynastie O (3200-3100/3000 av. J.-C.) et Nagada III C ou première dynastie (3100/3000-2700 av. J.-C.). Nagada III A-B voit l’apparition des premiers « Horus » et la question de l’unification des deux terres de la Haute (le Sud) et de la Basse Egypte (le Nord, le Delta du Nil), l’un des premiers grands états qu’ait connu l’humanité. La palette du Tribut Libyen en serait l’une des illustrations, elle atteste aussi de la naissance de l’écriture et est une évocation du serekh « standard » (voir encadré en fin de page).

 

 

 

 

 

 

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Tombe 100 à Hierakonpolis

De profonds bouleversements sociaux ont eu lieu entre Nagada II et la première dynastie, décrits pour la première fois en 1939 par Petrie, un archéologue britannique. Il avait constaté une véritable rupture marquée par une invasion en Haute Egypte de populations orientales. Les gravures rupestres retrouvées sur la tombe 100 à Hierakonpolis les montrent, sans soucis de réalisme, sur des bateaux à fond plat, chassant ou domptant les animaux sauvages. On découvre une des premières figurations d’un personnage dit le « maître des animaux sauvages » bien connu en Mésopotamie.

 

Vers 3100 avant notre ère, naissent de véritables centres politiques (Abydos, Hierakonpolis) avec l’assimilation progressive du Nord par le Sud dont le point d’aboutissement sera l’unification par le roi Narmer de la Haute et de la Basse Egypte. Pour découvrir la qualité et le luxe de leurs artisanats, il faut se rendre au Louvre pour admirer notamment le couteau de Gebel el-Arak et la palette historiée du roi Narmer.

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Palette du Tribut Libyen

Cette palette réalisée en grauwacke, une pierre noire extrêmement résistante, provient des mines du ouadi Hammamat situées dans le désert arabique entre le Nil et la mer Rouge. Une cuvette centrale servait à broyer les produits cosmétiques. Au cours du temps, elles ont perdu leur fonction utilitaire pour devenir des objets de commémoration ou de culte.
Sur l’une de ses faces au premier registre sont sculptés en bas reliefs des végétaux, puis dans les registres supérieurs une suite de chèvres, d’ânes, de béliers, de bœufs. Est-ce une liste de produits apportés par les vaincus ou une domination de l’homme sur la nature ?
La réponse n’est pas univoque. Les différentes palettes de la même époque sont la démonstration du roi victorieux de ses ennemis, mais aussi du roi dominant le chaos, la nature.
La face principale a été surtout étudiée, très riche sur le plan de l’iconographie. Témoin de la naissance de l’écriture, des premiers hiéroglyphes, elle évoque soit la domination des cités soit leur fondation et le futur serekh par la présence du faucon symbole du roi. Sept bas-reliefs montrent des enceintes crènelées qui enserrent une série de petits carrés et un ou plusieurs signes hiéroglyphiques, probablement des noms de villes (?). Au-dessus de ces enceintes figurent des animaux et des enseignes, pourvus à chaque fois d’une houe, le symbole par excellence en Egypte de la fondation d’une ville (creusement du sillon délimitant la cité). Sur le premier registre on peut observer la figuration d’un faucon « Horus », d’un scorpion et d’un lion, qui sont l’image du ou des rois vainqueurs.
Cette palette est bien l’émergence d’un fort pouvoir royal n’hésitant pas à recourir à la violence pour soumettre les cités. La forme particulière des enceintes rectangulaires aux angles arrondis est à rapprocher des découvertes archéologiques à Abydos et Hierakonpolis.

 

Les premiers hiéroglyphes (une représentation de l’objet via des pictogrammes), listes de comptes ou étiquettes de produits, inscrits sur des plaquettes d’ivoire, de bois ou de papyrus, sont apparus en même temps que la constitution du royaume unifiant Haute et Basse Egypte vers 3000 ans av. J.-C. Au cours du temps les hiéroglyphes vont devenir une écriture de plus en plus cursive, pour finalement avoir un pouvoir magique. Le hiératique apparaît vers 2500 av. J.-C., le démotique vers 700, 650 av. J.-C. En août 1799, lors de l’expédition de Napoléon en Egypte, en creusant des tranchées au fort Julien à Rosette, non loin de la bouche occidentale du Nil, on découvrit un bloc de basalte, dont la face antérieure était gravée de trois sortes d’écritures et de langues, la partie supérieure était écrite en hiéroglyphes, celle du milieu en démotique, celle en dessous en grec. La pierre de Rosette fut traduite par François Champollion en 1822 alors que depuis 300 ou 400 ap. J.-C. on ne savait plus lire les hiéroglyphes…

 

FauconLe serekh

Le serekh se présente comme un rectangle entourant le nom hiéroglyphique du roi, surmonté d’un faucon (symbole du Dieu Horus) et placé au-dessus de la façade du palais royal. Le rectangle pourrait figurer un plan de ce même palais. Ce qui accréditerait la thèse qui voit dans le serekh, à l’instar du cartouche, une protection du nom du roi, contre les forces négatives. Ils apparaissent incisés ou peints dès le début de Nagada III A-B parfois vides, parfois chargés d’un mot illisible.

 

 




Champagne Bonnaire Brut Tradition

368-369 – Jean Helen – S’il y a une activité qui ne connaît pas la crise, c’est celle des producteurs de champagne : leurs prix ont progressé entre 2005 et 2013 entre 27 et 108 % et leur nombre de cols de 100 à 380 millions entre 2001 et 2013. C’est pourquoi, afin d’agrémenter vos fêtes de fin d’année, je vous avais suggéré, les précédentes années, de remplacer les bulles de champagne par d’excellents effervescents : le Vouvray de Breton et le Limoux de Cavaillès.

champagneMais, sous la pression de certains de mes lecteurs, je vous propose de revenir cette année à des champagnes de récoltants manipulants (RM). Lors des différentes crises économiques, de nombreux négociants cessèrent d’acheter des raisins, si bien que les récoltants, devenant RM, apprirent un nouveau métier, celui de vinificateur, se démarquant de la production industrielle des maisons de négoce, pour renouer avec la recherche d’une expression vinicole artisanale plus typée. Effectivement, on découvre, parmi les plus 4500 RM, d’excellents champagnes à des tarifs très intéressants. Ainsi, outre Margaine (Le Cardiologue n° 327), un des meilleurs rapports qualité/prix, je peux vous conseiller, aux alentours de 15 euros départ cave, les flacons de J. Lallement à Verzenay, Lilbert-Fils grand cru blanc de blanc de Cramant, J.-L. Vergnon grand cru Conversation à Mesnil-sur-Oger,

P. Bertrand brut 1er cru à Cumières, Marin-Lasnier sur la Côte des Bar, etc.

Le blanc de blanc, le thème de prédilection de Jean-Louis Bonnaire

J’ai choisi de vous proposer un champagne, dans le même ordre de prix doux, illustrant parfaitement les qualités gustatives des bons RM : le brut tradition non millésimé de Bonnaire. Il s’agit de l’entrée de gamme de ce domaine créé en 1932. Contrairement à nombre de maisons de champagne, celle-ci ne pratique pas le négoce de raisin. Jean-Louis Bonnaire qui a récemment cédé les commandes à ses deux fils, Jean-Etienne et Jean-Emmanuel, possède 22 hectares de vignes, dont la plupart, du cépage chardonnay, s’épanouissent dans la terre sensuelle de Cramant au cœur de la Côte des Blancs. Il est ainsi le plus important propriétaire indépendant de cette appellation grand cru. Par la force des choses, le blanc de blancs, uniquement constitué de chardonnay, est son thème de prédilection, salué par l’un des plus grands experts mondiaux, Richard Juhlin.
La cuvée Brut Tradition est l’une des seules à ne pas être produite en blanc de blancs grand cru, mais assemblée avec les 2 autres cépages champenois : le pinot noir vient de Bouzy et le pinot meunier de l’Aisne, répartis à 30 % pour chacun avec tout de même 40 % de chardonnay grand cru.

Une culture raisonnée

La culture raisonnée du vignoble respecte la nature, le sol et les cépages. Le style Bonnaire, impulsé par Jean-Louis, repose sur un niveau de maturité optimale des raisins et de l’acidité qui garantit le bel équilibre des vins. L’intégrité des raisins est préservée par un pressurage doux et fractionné. La vinification à température basse dans des cuves en inox thermo-régulées du dernier cri comprend une fermentation malo-lactique complète. L’évolution des vins en cuve inox, puis sur lattes, s’étend sur 24 mois (la durée légale est de 12 mois).
Le dosage assez généreux en sucre à 9 g/l est à peine perceptible, ce qui devrait ravir les amateurs lassés des extrabruts trop raides, sans tomber dans la lourdeur d’un champagne trop dosé.
Le verre fait mirer une robe jaune pâle intense, d’une belle brillance, d’où les bulles se dégagent en fines cheminées, sans discontinuité et la mousse trace une écume hyperlégère.

Un Brut d’un équilibre remarquable

Ce Brut Tradition offre un fruité juvénile parfaitement joyeux, d’un équilibre remarquable. C’est l’harmonie qui prime en bouche doublée d’une élégance, d’une finesse et d’une légèreté au palais très appréciables. Aux arômes de fraise, de jasmin, de pamplemousse et de zeste de citron se mêle une note épicée, issue des 15 % de vins de réserve ajoutés à la production de l’année.
Ce travail tout en équilibre confère à ce champagne, une grande polyvalence : idéal pour un apéritif, il épousera une entrée, type gougères, rillettes de colin, saumon fumé avec crème fraîche ou à l’aneth, carpaccio de langoustines, mais sera aussi dégusté avec plaisir, en fin de soirée.
En somme, un champagne accessible à tous les niveaux, mesuré et harmonieux, oserais-je ajouter : sobre, procurant un plaisir simple et immédiat.
Le champagne est la culture de la distinction, aurait dit le PDG de la maison Ruinart. Voilà pourquoi le champagne reste probablement le compagnon indispensable de nos jours !

Champagne Bonnaire Brut Tradition – 51530 Cramant

 




Cœur et travail ou comment concilier maladie cardiaque et activité professionnelle. 2e édition

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367 – Salué comme il se doit par Le Cardiologue à sa sortie en 2012, l’ouvrage « cœur et travail » fait aujourd’hui l’objet d’une nouvelle édition.

Rédigé comme le précédent sous la direction du Dr Bernard Pierre, l’ouvrage mérite à nouveau qu’on parle de lui car il fourmille d’informations inédites et précieuses pour tous les lecteurs désireux d’approfondir leurs connaissances en matière de droit du travail au service des patients.
Les relations entre praticien soignant et médecin du travail sont impératives, peut-être plus encore en pathologie cardiovasculaire, et c’est toute l’originalité de cet ouvrage de mettre en lumière et en situation le rôle de chacun.
Ce livre réunit en effet médecins du travail et cardiologues autour des grandes pathologies cardiaques et vasculaires, abordées de façon claire et didactique tout au long des chapitres successifs.

Des nouvelles rubriques très intéressantes

Le plan de l’ouvrage n’est pas modifié : les auteurs décrivent les différentes situations pathologiques, le moyen de (parfois) les prévenir – c’est toute la place de la consultation dite préventive –, la gestion de la reprise du travail, de la question souvent épineuse du maintien à l’emploi, et le suivi des patients dans leur phase « chronique ». Les différentes pathologies sont illustrées de plusieurs cas cliniques qui soulignent bien la difficulté de la lutte contre la désinsertion professionnelle, et la nécessaire coopération multidisciplinaire, encore plus justifiée chez ce type de patients.
Mais l’intérêt, pour ceux qui ont déjà lu le livre initial, réside dans ses nouvelles rubriques. Parmi les nouveautés présentes dans cette deuxième édition, citons la très intéressante partie qui traite de l’imputabilité des accidents cardiovasculaires au travail, rédigée par un juriste spécialisé en droit du travail ; citons aussi le chapitre « drogues sociales et activité professionnelle » dans lequel Jean Gauthier, cardiologue et expert auprès de l’agence française de lutte contre le dopage, nous dresse un panorama exhaustif de la consommation des substances toxiques, de leur retentissement sur l’activité professionnelle mais aussi sur le rôle – encore plus difficile, on s’en doute, dans ces cas précis – du médecin du travail ; citons également la thématique autour de la place de l’équipe paramédicale en réadaptation dans la reprise du travail après un événement cardiovasculaire.
Cette nouvelle édition mise à jour et considérablement enrichie (près de cent pages supplémentaires) bénéficie, comme la première, de l’expérience et de la compétence des nombreux experts dont Bernard Pierre a su encore une fois s’entourer. Sans nul doute, le succès éditorial sera – à nouveau – au rendez-vous.

Auteurs : Sous la direction du Pr Bernard Pierre – collectif
Editeur : Frison-Roche
Prix public : 49,00 €
Pagination : 387 pages

Sommaire

I – Prendre en charge les urgences cardiovasculaires

II – Prévenir et dépister les maladies cardiovasculaires

III – Mettre en place une prise en charge psychosociale

IV – Reprendre une activité professionnelle

V – Suivre un patient stabilisé

VI – Situations particulières et leur prise en charge




La Dame d’Auxerre

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Statuette féminine dite «Dame d’Auxerre ». © Musée du Louvre

367 – La Dame d’Auxerre est un des chefs d’œuvre de l’art grec archaïque conservé au Musée du Louvre. Une sculpture de petite dimension (75 cm) remontant entre 640 et 620 avant notre ère, donc à l’époque dite archaïque.

Une découverte rocambolesque

Cette statue était utilisée comme décor d’opérette, le concierge du théâtre d’Auxerre l’ayant acquise en 1895. Disposée dans les réserves du musée local, elle est finalement repérée par Maxime Collignon, archéologue, un grand spécialiste l’art grec. En 1897, elle intègre le musée du Louvre en échange d’un tableau d’Henri Harpignies (1819-1916), peintre de l’Ecole de Barbizon. Par contre, nous n’avons aucun document sur son origine et sa présence à Auxerre.

Le contexte historique

Il est de nouveau favorable à l’apparition d’une sculpture monumentale. Les cités états (la ville et son territoire adjacent) sont une réalité, le pouvoir politique est aux mains de l’aristocratie. Athènes, Sparte, Corinthe sont de grandes métropoles. L’iliade et l’Odyssé sont les livres « de chevet » de l’élite. Apprise par cœur, l’œuvre d’Homère était la base de l’éducation des Grecs. La Théogonie d’Hésiode, poète de Béotie vers le VIIe siècle avant notre ère, raconte dans un long poème, les origines du monde et des dieux. La religion, la mythologie impactent chaque acte de la vie quotidienne de la cité et des individus.

Une stricte frontalité, une représentation hiératique

La Dame d’Auxerre, œuvre majeure de l’art dédalique archaïque, est une des rares sculptures de cette époque reculée où la Grèce venait d’émerger d’une période qualifiée par les historiens de « Dark Age ». C’est une sculpture en calcaire gris jaunâtre, de petite taille, en parfait état, seuls manquent le nez et le côté gauche du visage.
Debout sur un socle quadrangulaire, le bras gauche tombe verticalement le long du corps, le bras droit est replié sur la poitrine. Couverte par une sorte de pèlerine retombant sur les épaules, elle est vêtue d’une longue robe étroite, une ceinture à large boucle enserrant la taille. Le haut de la poitrine laisse apparaître son anatomie. Les pieds nus et joints, dépassent du bas de la robe. Le dos de la statue a fait l’objet d’une grande attention de la part de l’artiste, une ronde-bosse pouvant être vue de tout côté.
Caractéristique de l’art dédalique, le visage en U est souligné par un léger sourire, le nez est épais, la bouche charnue, au-dessus d’un menton saillant. La chevelure parfaitement symétrique tombe de chaque côté du visage sur les épaules, en boucles striées horizontalement, évocatrice des perruques de l’Egypte. Le front est bas, les deux paupières ourlées contiennent un globe oculaire assez aplati. Les mains, avec de longs doigts, sont disproportionnées, sans doute de façon conventionnelle.
La robe est incisée par une large bande médiane avec des carrés inscrits. Des traces de couleur rouge sur le buste sont le témoin qu’elle était peinte de couleurs vives. 

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Statue en marbre avec dédidace de Nicandre de Naxos 640 av J.-C. © Musée Archéologique national d’Athènes

« C’est probablement en Grèce que le style dédalique naît et connaît un développement rapide avant de se répandre dans le Péloponnèse, où Corinthe, Argos et Sparte constituent les principaux centres de production jusqu’à la fin du VIIe siècle ». Une origine qui a la faveur actuelle des historiens d’art, du fait de la matière (calcaire crétois) et des œuvres très proches artistiquement retrouvées à Dedros, à Gortyne, Printas en Crète. Une ressemblance encore plus frappante avec la statue en marbre dédiée à Artémis par Nicandré retrouvée à Naxos et aujourd’hui au musée archéologique d’Athènes.
Quant à l’image représentée, elle reste hypothétique. Le geste rituel du bras droit replié sur le sein droit, évoque le geste d’adoration des déesses de la fécondité en particulier de l’Astarté syrienne. Ce serait un ex-voto offert à cette déesse.

Bibliographie

[1] L’art grec, Roland Martin. Encyclopédies d’aujourd’hui, La Photothèque. 1994
Histoire de l’art antique : l’art grec, Be [2] rnard Holtzmann, Alain Pasquier. Petits manuels de l’école du Louvre. 2011. Réimpression de l’édition de 1998.
[3] Mer Egée Grèce des Iles. Catalogue exposition 1979. Editions de la Réunion des Musées Nationaux. 
[4] Naissance de l’Art Grec, Pierre Demargne. L’univers des Formes. 1985.
 

L’art dédalique du nom de Dédale, artiste mythique, marque le passage de la petite statuaire géométrique aux premières manifestations de la grande sculpture. Diodore de Sicile nous apprend que cet artiste de grande renommée vivait à Athènes. « Il excellait dans la fabrication de statue, un inventeur de bien des techniques qui firent progresser son art ; la légende rapporte que toutes les statues faites de sa main étaient tout à fait semblables à des êtres vivants ; elles conservaient si bien toutes les dispositions du corps naturel que l’image faite par lui pouvait recevoir un souffle de vie ». Selon André Chastel « belle définition des progrès réalisés dans la période suivante, qui a crée la grande statuaire avec les types célèbres du couros et de la coré ». En fait une notion, inventée au début du XXe siècle pour qualifier les créations plastiques du VIIe siècle av. J.-C.

 

 

Chronologie

– Age du bronze (ca 3250-1100) Disparition du système palatial mycénien (1200). Abandon de l’usage de l’écriture. Très peu de nécropoles.

– Age du fer : Proto-géométrique : 1050-900, Géométrique : 900-720/700.
Période sans documentation « The Dark Ages ».

– Époque archaïque :

700/720 – 490 (fin de la 1ère guerre médique), 480 (fin de la seconde guerre médique – ou 479 – l’année véritable de la fin des guerres médiques)
720-600 : période orientalisante.
Réorganisation de la Grèce avec l’apparition des cités qui marque l’éclosion de la période archaïque. Renouveau artistique.

– Époque classique (479-338 ou 323) : âge d’or de l’art grec.
Apogée de la cité d’Athènes autour du stratège Périclès. La période classique s’achève à la mort d’Alexandre, en 323.

– Époque hellénistique (323-146 ou 31).




Après l’œnologie, la biérologie

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© Fotolia

367 – Vincent Blanchard – A l’instar des concours d’œnologie, la dégustation à l’aveugle fait bien évidemment partie des épreuves. Mais pas seulement. Pour décrocher le titre tant convoité, tous les jeunes biérologues doivent réaliser des tests d’association mets-bières mais aussi proposer une recette de cocktail de bières. A l’issue d’une journée complète passée à déguster blondes, brunes et autres blanches – toutes artisanales –, c’est un jeune homme de 23 ans qui décroche la palme. Antoine Vidal est le nouveau meilleur biérologue de l’année 2013, un titre décerné tous les ans depuis 2005.

L’intérêt des bières artisanales

Car la biérologie est un phénomène récent qui va de pair avec l’intérêt croissant de la population pour les bières artisanales. « Les mentalités sont en train d’évoluer et les gens apprécient désormais déguster une bonne bière, pas une bière industrielle sans saveur », note Antoine Vidal. Lui aussi participe de ce mouvement. Comme un œnologue, il maîtrise les étapes de fabrication de la bière. Et comme un sommelier, il est capable d’accorder un plat avec une bière particulière. Et ainsi d’orienter les amateurs pour leur faire découvrir autre chose. Dans un pays tourné davantage vers la culture vinicole que brassicole, le chemin est encore long. « Mais il y a un vrai intérêt pour la bière artisanale depuis quelques années », poursuit-il.

Pour preuve, le nombre de brasseries artisanales explose. De 293 en 2008, il en existe désormais près de 500, dont 84 nouvelles en une année, selon le très sérieux Annuaire des brasseries françaises publié chaque année. La France possède désormais une solide base autour du houblon. Les brasseurs artisanaux prennent de plus en plus de poids par rapport aux géants industriels qui ont longtemps dominé voire écrasé le marché. « Nous nous sommes regroupés avec trois autres brasseurs pour mettre nos moyens en commun, améliorer la qualité de nos produits et faciliter les livraisons en France », explique Vivien Remond, un jeune brasseur de 23 ans, qui produit la Sainte Cru en Alsace. En dix-huit mois, il est passé d’un brassin tous les dix jours à deux brassins par semaine. Il entend bien poursuivre sa croissance en multipliant par deux sa production dès l’année prochaine.

L’éducation de l’amateur

Mais son développement et celui des 500 brasseurs artisanaux français passent aussi par l’éducation de la population, trop habituée à associer un vin rouge avec une viande ou un vin liquoreux avec du fois gras. « Le travail des biérologues est important dans ce sens car nous sommes là pour expliquer comment se déguste une bière avec quel plat on peut l’associer suivant la typicité de ses saveurs », poursuit Antoine Vidal. L’univers de la bière s’apprend aussi depuis peu à l’université où les formations se multiplient comme à Nancy ou à La Rochelle. « Toutes ces avancées vont dans le bon sens », note-t-il.

Tout juste diplômé en restauration, lui a décidé de promouvoir les bières françaises autrement. Il vient de participer au lancement de MaBièreBox avec deux jeunes entrepreneurs. Tous les mois, il propose à ses abonnés de les former en leur envoyant un coffret de bières artisanales qu’il a lui-même sélectionnées. Une idée simple et originale pour combiner plaisir de la bière et éducation du plus grand nombre. Un pas de plus pour faire reconnaître son breuvage de prédilection et redonner ses lettres de noblesse à un produit trop longtemps sous-estimé.




Sacré monde dématérialisé

367 – Après les tumultueuses révélations de Snowden sur les pratiques de la NSA, la liste s’allonge sur les pratiques des entreprises de blogs, réseaux sociaux et en règle générale, tout ce qui touche de près ou de loin, à vos données personnelles dans vos ordinateurs et autres tablettes. Mais les plus touchés ne sont pas forcément ce à qui l’on pensent…

Twitter a récemment acquis MoPub (1), une startup spécialisée dans la publicité sur les supports mobiles. Avec cette acquisition, Twitter voudrait utiliser les données de sa plate-forme de messagerie pour augmenter ses revenus. La manière est somme toute très simple et devient un peu habituelle aujourd’hui : utiliser les données des tweets et les personnes que les utilisateurs suivent en ciblant les annonces publicitaires. Point noir : l’utilisation des données liées à l’identité des abonnés et contacts pourraient poser problème, mais à en croire l’investissement de 305 millions de dollars pour l’achat de MoPub, certaines solutions devraient déjà circuler…

Apple ne fait pas non plus dans la dentelle. Critiquée pour ses portes ouvertes à la NSA, elle a tenté de rassurer ses clients à propos des données liées à Map, Siri, Facetime et iMessage qui bénéficiaient d’un encryptage digne de ce nom et ne pouvaient être interceptées. Et bien tout cela est tombé en lambeaux à la dernière conférence des hackers à Kuala Lumpur (2) ou un rapport de sécurité a révélé qu’Apple est capable de contourner le chiffrement des messages échangés. Ce qui est particulièrement préoccupant également sont les données utilisateurs iCloud qui peuvent être téléchargés à distance avec de simples requêtes, sans que l’utilisateur n’en soit averti. Des essais ont été réalisés en ce sens par des hackers et révélés au grand jour. La démarche n’a pas été transmise à Apple qui ne considère pas cela comme un bug… à bon entendeur.

LG est également au cœur d’un vrai scandale. Depuis quelques années, la firme coréenne propose des téléviseurs connectés, les Smart TV. A partir des boîtiers de connection de ces téléviseurs, le fabricant récupère les informations privées des utilisateurs et, ce qui est vraiment choquant, même si vous désactivez cette option, les données sont quand même transmises. LG a reconnu les faits et annonce travailler sur une mise à jour du firmware.

Le Gouvernement français n’est pas en reste avec l’adoption le 10 décembre de la loi sur la programmation militaire et de son controversé article 13 qui permettra à l’Etat d’accéder aux données informatiques des citoyens sans demander l’avis d’un juge. L’exécutif va remplacer le judiciaire et la boîte de Pandore qui va avec.

Adobe, le créateur du pdf, a reconnu avoir été victime d’un piratage avec près de 3 millions de données bancaires de ses utilisateurs début octobre. Mais le mieux est à venir fin octobre avec l’interception de 38 millions de comptes actifs. Pas sûr qu’un simple changement de mot de passe rassure l’internaute (3).

Google, par la voix de son futurologue (et l’un des pères fondateurs d’internet), Vinton Cerf, a récemment déclaré que sur le web « la vie privée sera anormale » et qu’il y aura « une difficulté croissante pour y parvenir ». L’imbrication de plus en plus importante d’internet dans notre existence va-t-elle détruire notre vie privée ? On peut le penser quand on sait que Google a déposé un brevet en ce sens (4) avec un logiciel censé réagir à votre place sur les réseaux sociaux. Simple, il vous propose des suggestions d’actions et de réponses qui devront être validées par l’auteur… Ouf ! On a encore le droit d’appuyer sur la souris.

G20. Version sécurité, le G20 est un véritable gruyère. Retour en 2011 où les pirates n’ont eu aucun mal à rentrer dans un grand nombre d’ordinateurs des hauts fonctionnaires présents sur place. Les machines des représentants du Portugal, de la République tchèque, de la Bulgarie, de la Hongrie et de la Lettonie ont été infectées. Il suffisait de promettre une photo de Carla Bruni nue et c’est un cheval de Troie qui semblerait venu de Chine qu’ils ont reçu à la place… C’est rassurant de voir que l’homme n’est pas une machine. (5)

Paypal est en phase de test avec une technologie (Beacon) qui vous fait payer n’importe où n’importe quoi sans sortir quoi que ce soit. « Les gens adorent faire du shopping mais personne n’aime payer », dixit David Marfcu, le président de Paypal. Il suffit de vous approcher de la caisse et la machine vous reconnaît et votre photo apparaît (sic). Vous pouvez ainsi quitter la boutique en toute tranquillité. En somme, des achats en toute transparence qui susciteront à n’en pas douter des achats compulsifs.

Alors, toujours envie de donner votre vie à votre smartphone ?

Sources :
(1) Financial Times
(2) Conférences Hack in the Box
(3) Adobe
(4) Atelier.net
(5) Comment ça marche.net

 




Riesling Sommerberg « E » 2009 – Domaine Albert Boxler

72photo366 – Jean Helen – « Austérité vibratoire verticale », « plénitude sphérique », « puissance tellurique », tels sont quelques qualificatifs choisis par d’éminents œnologues (Le Rouge et le Blanc), pour décrire la minéralité des vins ! On est dans la pensée, l’imaginaire, car le langage trop formaté ou la métaphore décrivent difficilement et incomplètement ces sensations tactiles et leurs représentations minérales, à tel point que, si la minéralité est intégrée par les vignerons : « la minéralité n’a pas d’odeur, elle se goûte », elle est déniée par certains spécialistes qui préfèrent les termes de salinité, sapidité, verticalité, pierrosité.

A mon humble avis, la minéralité d’un vin ne se décrit pas, elle se ressent et, à l’évidence, vous éprouverez cette sensation en dégustant les magnifiques Rieslings de Jean Boxler, tout particulièrement dans son grand cru Sommerberg. Jean Boxler, à la tête, depuis 1996, d’un domaine vieux de 4 siècles, a succédé à son grand-père Albert, puis à son père Jean-Marc, producteurs très scrupuleux et grandement exigeants. Quoique réservé, c’est un vrai passionné qui devient intarissable, lorsqu’il parle de ses chers terroirs et de son obsession à garder leur spécificité, possédant 13,5 hectares avec 2 grands crus, Brand et Sommerberg, c’est sur cette 2e parcelle que le Riesling trouve terroir d’exception, pour exprimer toute sa noblesse minérale.

Le Sommerberg (colline de l’été) est un coteau aux pentes abruptes au pied des Trois Epis à une altitude de 270 à 400 m. Le sol homogène, composé de granit et micas érodés, riche en éléments minéraux, bénéficie d’une exposition superbe, sud, sud-est. Les pieds de vigne, pour la plupart anciens (moyenne de 60 ans pour le domaine Boxler), puisent en profondeur l’humidité salvatrice lors des années de forte chaleur, car la pluviométrie est limitée. Jean Boxler exerce sur 4 hectares, dont certaines parcelles (E et D) sont parmi les plus hautes et où le travail est, dit-il, « héroïque ». Le fort dénivelé, jusqu’à 45 °, quasi sans terrasses, exige un labourage et un désherbage au treuil ou chenillard, lorsque c’est possible, mais le plus souvent manuel. Les sols, travaillés depuis longtemps sur le mode bio, sont très peu traités : en situation de coteaux, peu de risque de mauvaise pourriture, donc pas d’insecticides, pas de cuivre, car peu de mildiou, un peu de soufre pour l’oïdium. Les vignes, plantées entre 6 et 8 000 pieds/ha en taille Guyot simple, ne sont pas enherbées, pour ne pas concurrencer la vigne sur ces sols pauvres. Les rendements moyens : 30 hl/ha sont très faibles, en sachant que l’AOC autorise 50 à 60, malgré l’absence d’écimage, de rognage, de vendange au vert ; « on n’impose rien au pied de vigne, s’il y a trop de raisin dans une parcelle, on déclassera cette récolte ».

Les vendanges, déterminées sur la maturité de chaque parcelle, sont manuelles en seaux avec un tri sévère à la vigne et au chai. Le raisin entier, mis immédiatement en cuve, est pressé pneumatiquement lentement, pour extraire les moûts tout en finesse. Après un débourbage statique, la fermentation lente sur leurs levures indigènes en foudres s’étend sur 2 à 5 mois, sans recherche de la malo-lactique à température de la cave. L’élevage sur lie en foudre, sans bâtonnage, sans soufrage, dure 11 mois. La mise en bouteille ne comporte ni collage, ni filtration.

Mais la grande philosophie de Jean Boxler est la vinification parcelle par parcelle (et même micro-parcelles), sans nécessairement les assembler, de façon à préserver les spécificités et typicités de chaque terroir.

Un vin fascinant d’une grande précision

Le Riesling grand cru Sommerberg « E » (pour la parcelle Eckberg) est un vin fascinant, d’une couleur intense jaune or pale aux reflets verts, brillante et profonde. Les notes de citron vert, de pamplemousse et de poussières minérales de son nez introduisent une bouche d’une richesse et d’une matière dense saline superlatives, aux profondes saveurs d’amande fraîche, de pêche et d’agrumes onctueux. Le miel citronné et la noix de muscade soulignent la finale persistante somptueuse, mais rafraîchissante sur de beaux amers.

Ce Sommerberg, taillé au laser (ou tendu comme un string pour les jeunes…), d’une précision pure, longiligne, cristalline, laisse une persistance de saveurs qui amènent à comprendre le concept de minéralité.

Evitons de lui proposer les mets traditionnels de l’Alsace gourmande, même s’il les escorterait vaillamment, choucroute, baeckeofe, schiffele et autres wädele, car il s’agit d’un grand vin méritant des plats de haute gastronomie. En premier lieu, les poissons et crustacés, tels que proposés sur les cartes des (nombreux) étoilés alsaciens : terrine de sandre aux coquilles St-Jacques et mousseline de homard, tronçon de turbot rôti à l’os crémeuse au cep et poêlée d’asperges vertes, filets de sole à la crème ou à la nage d’écrevisses, fricassée de homard et pâtes larges au basilic, fleurette de queue de langoustine au safran et coriandre fraîche. Il câlinera la fameuse mousseline de grenouille de Paul Haeberlin. Dans un registre plus simple, il fera merveille avec des poissons de rivière : truite au bleu, brochet beurre blanc ou une volaille crémée.

Attention, les tarifs de ces magnifiques vins sont élevés, de plus, le Sommerberg « E », ci-décrit, est quasi introuvable du fait de sa rareté, car réservé à une clientèle fidèle, mais le Sommerberg classique, presqu’aussi délectable, est disponible, si on anticipe la réservation.

Pour conclure sur cette minéralité, il n’est pas étonnant que Jean Boxler, quand il nous déclare : « la minéralité, je la ressens rien qu’en regardant certaines parcelles de mes vignes », rejoigne Paul Claudel : « qui a mordu la terre, en conserve le goût entre les dents ».

• Riesling Sommerberg « E » 2009 – Domaine Albert Boxler – 68230 Niedermorschwihr




Zoé, la branchée et connectée

365 – Une fois n’est pas coutume, laissons de côté nos tablettes pour découvrir la révolution française qui aurait pu être une voiture revisitée façon apple.

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(©Renault)

La Zoé, vous l’avez peut-être déjà vu dans les rues de votre ville, telle « un ange qui passe » (selon la formule de Renault), dans un son digne des films de science-fiction (1). Les premiers tours de roues faites à son volant nous font passer pour des novices de la route à chercher des repères qui ne sont plus là. Pas de vibration, un silence qui impressionne… et déroute. Devant soi, une platine version iPad et un compteur version soucoupe volante. On ne parle plus consommation en litre, mais en kilowatt. Le flux d’énergie devient presqu’une obsession : anticiper le réseau routier, géographier le terrain, localiser les bornes… On ne conduit plus une voiture, on pilote un « ORNI » (2). Les détracteurs vous parleront autonomie, liberté, vitesse. Vous, vous parlerez zénitude, silence, accélération, émission de CO2. Car la Zoé a son terrain de jeu : la ville (même si sa longueur est plus importante qu’une Clio et qu’il manque une vraie banquette rabattable). Déguisée en citadine, c’est une merveille qui rivalise d’habileté avec les petites voitures et d’accélération avec les grosses cylindrées… un vrai karting électrique qui se faufile partout avec un couple de 220 Nm dont on n’a pas l’habitude sur ce genre d’engin. Elle vous emmènera à allure soutenue durant 120 à 130 km avant de chercher une borne salvatrice qui vous fera revenir… ou continuer. L’ombre de la borne de recharge Toutes les personnes que nous avons croisées nous diront la même chose : « Vous allez jusqu’ou avec ? ». La peur de la Zoé est là : s’arrêter subitement sur le côté de la route sans énergie, même en sachant que Renault a prévu le coût du rapatriement gratuit, ça galvanise l’angoisse. Bien sûr qu’elle ne vous donnera pas l’idée de partir en vacances, même si certains l’ont déjà fait. C’est en seconde voiture qu’elle excelle dans notre vie de tous les jours… avec une nécessaire borne de recharge chez soi (3). Alors Zoé ? ou pas Zoé ? La Renault Zoé est – pour l’instant – la meilleure des citadines électriques. Elle apporte tous les avantages de la technologie actuelle avec une absence totale de bruit ou de vibration qui incite à conduire Zen et à jouer le jeu de la douceur avec l’accélérateur pour augmenter son champ d’action, surtout dans les bouchons où elle est la Reine (elle ne consomme rien à l’arrêt). L’autonomie est un enjeu crucial pour le développement du véhicule électrique. Avec une borne à la maison, votre vie d’automobiliste ordinaire ne souffrira d’aucune contrainte tant que vous restez dans une utilisation urbaine ou péri-urbaine.. Reste que les grands espaces ne sont pas encore pour elle, même si une révolution du développement des batteries est prévue dans les années à venir. Pascal Wolff

(1) Jusqu’à 30 km/h, La Renault Zoé émet un son particulier pour prévenir les personnes susceptibles de se trouver sur la chaussée (piétons, cyclistes…), mais peu de personnes entendent vraiment ce bruit, et il vaut mieux être extrêmement prudent en milieu urbain.
(2) Objet Roulant Non Identifié.
(3) Nous avons atteint les 140 km avec une autonomie restante de 7 km, mais il vaut mieux prévoir une borne de recharge dès les 20 km restants.

 

Bienvenue chez K 2000

Renault a axé sa communication autour de sa tablette R-Link (1) qui est intégralement relié au réseau mobile grâce à une connexion de type Edge (une connexion 3G n’est pour l’instant pas envisagée). Plusieurs applications y sont intégrées, dont la navigation TomTom Z.E. Live qui permet – entre autres – de visualiser le rayon d’action correspondant à l’autonomie du véhicule et sa capacité à l’atteindre et de gérer ainsi sa consommation énergétique. Le R-Store donne accès à un catalogue assez complet, mais les applications les plus intéressantes sont payantes. Sans cette tablette tactile, la Zoé n’aurait pas l’aura dont elle peut se prévaloir, car elle en est la pièce maîtresse. Tout le monde y trouve son compte, mais gare à la conduite, car on a une sacrée tendance à passer son temps à regarder l’écran plutôt que la route…  Enfin, il y a un certain nombre de bugs qui gâchent la fête, un bluetooth et une prise Usb bien châtouilleux, ainsi qu’une lenteur parfois désespérante des applications (due en partie au edge). Des mises à jour sont faites régulièrement (et sans manipulation de votre part). Espérons qu’elles viendront à bout de ces désagréments.

(1) R-Link a été consacré meilleur système embarqué par une étude indépendante devant les ténors du marché tels l’Audi Connect ou le ConnectedDrive de BMW.

 

La technologique

La récupération d‘énergie. Le freinage récupératif emmagasine l’énergie cinétique à la décélération et au freinage. Le moteur se transforme en un système de dynamo particulièrement efficace pour vous faire économiser de nombreux kilowatts. Climatisation/chauffage. La pompe à chaleur fonctionne comme une climatisation réversible pour rafraîchir ou réchauffer l’habitacle. Un principe nettement moins énergivore que les équipements traditionnels. Les pneus. La Zoé est le premier véhicule à être chaussé de pneus à haute efficacité énergétique lui permettant d’accroître son autonomie. Le chargeur. Il s’adapte à la puissance d’énergie disponible à la prise jusqu’à 43 kW (jusqu’à 80 % de sa batterie en 30 min). Le particulier peut se faire installer des bornes d’une puissance de 3 kW à 7 kW (6 à 9 heures de recharge).




Cardiologie pédiatrique pratique : du fœtus à l’adulte

365 – C’est un lieu commun de dire que la cardiologie pédiatrique s’est profondément modifiée ces dernières décennies : dans un premier temps, le développement de la chirurgie a justifié l’individualisation de la cardiologie pédiatrique en tant que discipline spécifique ; plus tard, l’essor de l’échocardiographie a permis de détecter et traiter les cardiopathies congénitales de plus en plus tôt  et d’étendre la cardiologie infantile jusqu’au fœtus.

generisches buch 1Cette spécialité dans la spécialité, qu’elle soit cardiologique ou pédiatrique, est en fait assez peu enseignée et du coup souvent ignorée, ce qui est d’autant plus regrettable que les malformations cardiaques sont fréquentes et le plus souvent curables, à condition que leur prise en charge soit précoce et adaptée.

C’est dire l’intérêt d’un tel écrit dans lequel les auteurs abordent tous les aspects de la question.

L’ouvrage peut globalement se scinder en trois parties

La première, intitulée tout bonnement « cardiologie pédiatrique », passe en revue les différentes méthodes d’exploration et décrit les différentes cardiopathies congénitales de façon exhaustive et claire, grâce à un texte simple et direct et de très nombreux schémas faciles à déchiffrer, ce qui n’est pas toujours le cas dans cette pathologie aux circuits souvent compliqués.

La deuxième partie est surtout consacrée à l’échocardiographie TM initialement, et progressivement enrichie du doppler continu, pulsé, couleur et enfin du tridimensionnel ; la cardiologie fœtale fait l’objet d’un développement particulièrement intéressant et accessible, faisant bien comprendre l’intérêt majeur qu’il y a à dépister avant la naissance les cardiopathies complexes, ne serait-ce que pour individualiser la prise en charge ou, quand c’est possible, rassurer les familles en cas d’antécédents graves.

Dans un dernier chapitre, les auteurs s’attachent à rappeler qu’il se trouve de plus en plus d’adultes porteurs de cardiopathies congénitales opérées mais non guéries, posant au contraire des problèmes spécifiques, le plus souvent liés à leurs interventions. Plus de 80 % des enfants naissant aujourd’hui avec une cardiopathie congénitale atteindront l’âge adulte, et l’on peut déplorer (comme on pourra le lire un peu plus loin à la rubrique « dernières nouvelles ») qu’il n’existe pas en France, à une exception près, de structure dédiée à ces patients.

L’iconographie, remarquable comme on l’a dit plus haut, est enrichie d’une imagerie abondante et détaillée consultable sur internet.
Les auteurs, Alain Batisse, Laurent Fermont et Marilyne Lévy, sont cardiopédiatres et exercent à Paris.
Cet ouvrage s’adresse à tous ceux qui peuvent être confrontés à ces situations dans leur pratique quotidienne, internes, cardiologues, pédiatres, obstétriciens, bref, il est à mettre entre toutes les mains.

Auteurs : Alain Batisse, Laurent Fermont, Marilyne Lévy
Editeur : Doin
Prix : environ 48,00 €
Pagination : 330 pages



Terrazas De Los Andes Malbec Reserva 2010 – Mendoza – Argentina

Les Argentins se plaisent à raconter qu’ils vénèrent 3 dieux : le tango, Evita Peron et Maradona. Un récent voyage dans ce pays magnifique m’a également permis d’apprécier 2 demi-dieux épicuriens : l’inégalable viande de bœuf et leurs puissants vins rouges.

La remarquable progression qualitative des vins argentins depuis 20 ans est expliquée par divers facteurs : l’arrivée d’investisseurs et œnologues du monde entier, la rénovation et la création de bodegas (caves), la plantation de la vigne à des altitudes de plus en plus élevées, en moyenne 1 000 mètres jusqu’à 3 000 dans la province de Salta ! A de telles hauteurs, les températures sont suffisamment basses, la nuit, pour permettre des cépages rouges aux arômes intenses et à la couleur profonde.
La région de Mendoza est incontestablement la vedette de la viticulture argentine grâce au cépage emblématique malbec introduit au XIXe siècle à partir de plants bordelais. Le goût des malbecs argentins est fort différent de celui des vignobles cadurciens, d’autant qu’il s’est adapté au climat de l’hémisphère sud, avec des baies plus petites et plus denses.
Terrazas de Los Andes, créée en 1999 dans la région de Mendoza sur le haut plateau de Lujan de Cuyo par la bodega Chandon, spécialiste des vins effervescents, filiale de LVMH, s’est développée sur un vignoble implanté fin XIXe siècle sur une série de terrasses à une altitude variant de 800 à 1 500 mètres. La région bénéficie d’atouts importants pour la viticulture. Sise au pied de la Cordillère des Andes, dont les hautes cimes stoppent les vents humides du Pacifique, elle réalise une oasis de verdure au sein d’un désert semi-aride. Malgré une latitude quasi tropicale, l’altitude procure des hivers froids favorisant la dormance de la vigne, un soleil intense, avec un air sec, dans la journée, des nuits froides avec des amplitudes thermiques importantes. Le problème est la sécheresse, car l’eau peut devenir rare, du fait de la faiblesse des précipitations, si bien que de nombreux vignobles sont irrigués. Terrazas utilise le système traditionnel indien d’inondations par canalisations alimentées par la fonte des neiges.
Les maladies de la vigne étant rares grâce à l’air froid des montagnes, nombreuses vignes sont franches de pied, non greffées, en particulier pour Terrazas sur la parcelle de Las Compuestes. Le soleil intense stimule la photosynthèse et favorise la maturation naturelle des phénols.
La bodega Terrazas de Los Andes a optimisé l’implantation des cépages, chacun, trouvant à une altitude différente, l’expression du maximum de ses qualités, le malbec étant implanté à plus de 1 000 mètres sur un sol sableux, alluvionnaire et graveleux.
Les vignes, plantées à une densité de 5 500 pieds/ha en taille Guyot, sont marcottées, les manquants étant vite remplacés, pour obtenir un âge moyen élevé. Les vendanges, manuelles avec un double tri sélectif, se déroulent tardivement vers la 2e ou 3e semaine d’avril après une longue maturation des baies durant 75 jours (45 en moyenne dans le Bordelais).

Un cheval prestigieux

La bodega dispose d’une grande winery moderne, mais dont les murs et colonnes de brique gardent un certain charme suranné. Sa réputation n’est plus à faire, d’autant que le propriétaire LVMH a largement répandu en France, ses meilleures productions. La marque a établi avec Pierre Lurton de Cheval Blanc, une association donnant naissance à un vin argentin prestigieux : Cheval des Andes plus fougueux et plus coloré que son cousin libournais.
La vinification, assurée par Roberto De la Motta, passe par une macération en cuves avec pigeage manuel s’étendant sur 3 semaines, un élevage durant 12 mois avec soutirage tous les 3 mois, en barriques de chêne pour 80 % d’origine française avec 30 % de bois neuf.
Le Malbec Reserva 2010 Terrazas de Los Andes, habillé d’une robe sombre grenat foncée avec quelques nuances de pourpre, est un vin complexe, long en bouche, riche et crémeux, sans lourdeur malgré ses 14,5°.
Le nez est envahi par les fruits noirs, cassis, myrtille, les épices douces, muscade, paprika, le graphite, avec des touches boisées de vanille et chocolat. La bouche ressent une légère sucrosité aux arômes de prunes et pruneaux, avant que n’apparaissent des notes plus typiques du malbec, réglisse et violette. On est charmé par l’intensité du fruit, la suavité et le velouté des tanins. La finale, toute en longueur entre puissance et raffinement, retrouve une pointe d’acidité équilibrant le fruité.
Ce Malbec se confirme être le compagnon idéal des belles grillades de bœuf bien saignantes, vuelta y vuelta, fierté des Argentins, tel le baby beaf (500 à 800 g/personne tout de même !), mais aussi entrecôtes, côtes de bœuf, T-bone, bavettes, etc., qu’elles soient cuites classiquement sur gril ou barbecue ou selon la technique « al asador », en position verticale. Ce vin, par son intensité aromatique, épousera avec plaisir les autres classiques de la gastronomie argentine : en entrée, empanadas à la viande, puis choripanes (saucisses), chiporro (agneau patagon), carrés d’agneau sauce chimichurri. Il ne se déplaira pas en compagnie d’un fromage à pâte dure : comté, beaufort, tommes diverses.
La beauté des paysages, la richesse culturelle de Buenos-Aires, la musique de Carlos Gardel, l’accueil chaleureux des Argentins (si on ne parle pas de foot), le parfait mariage du bœuf et du malbec ne peuvent que nous faire clamer : Hasta luego ! Vaya Argentina ! n




Coupe à libations JIAO

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Hauteur : 27 cm • Largeur : 18 cm (Collection Meiyintang 12).

364 – Christian Ziccarelli – Une tradition ancestrale

L’origine de la métallurgie du bronze reste, en Chine, sujette à controverse. Une antique légende chinoise rapporte qu’au temps du souverain mythique Yu le Grand neuf bergers envoient du métal de leur province. Le souverain fait fondre neuf tripodes (forme emblématique des vases rituels en Chine), symboles de chacune des neuf provinces du royaume. Le bronze devient, pendant les deux millénaires qui ont précédé notre ère, un matériau de prédilection. Représentatifs du pouvoir et du culte, ces bronzes ont été retrouvés par milliers dans les tombes de l’aristocratie Shang et Zhou. Ainsi, 6 200 bronzes constituaient une partie du mobilier de la tombe du marquis Yi de Zeng (vers 433 av. J.-C.).

Des œuvres influencées par la céramique

Dans le Nord-Ouest de la Chine, à l’Est du Gansu, les archéologues ont découvert un couteau en bronze coulé dans un moule unique de pierre. Il appartient à la culture de Majiayao (3800 à 1900 avant J.-C.) riche par ses poteries peintes composées de motifs géométriques, spiralés ou zoomorphes. De tels témoignages sont rares avant le IIe millénaire avant J.-C., avant la dynastie des Shang. « Contrastant avec les balbutiements de leur technique, la maîtrise artistique des premiers fondeurs chinois ne connaît pas d’enfance ». Très influencées par les modèles néolithiques en argile, les œuvres s’imposent par leur force et leur perfection. Selon leur fonction, on distingue les récipients à eau, à boissons fermentées, à aliments. Chaque vase a son prototype en céramique et porte un nom traditionnel. Seules quelques différences stylistiques marquent la date de fabrication (début et fin de la dynastie Shang, époque des Zhou occidentaux, époque des Printemps et Automnes). Le motif de base est zoomorphe, mais deux modes s’affrontent : d’une part une représentation « réaliste », d’autre part une représentation frappante d’animaux mythiques. Au cours des siècles, les empereurs chinois les ont restaurés, collectionnés, vénérés.

Une coupe à boissons fermentées

La coupe objet de notre analyse est une coupe à libation, un vase à boissons fermentées (pour cuisiner ou réchauffer le vin). Elle est en règle associée à d’autres coupes à libation, mais également à des récipients pour les offrandes de mets (tels les ding) et les ustensiles à eau comme les pan pour les ablutions. Ces récipients servaient lors des grandes cérémonies rituelles réunissant les prêtres devins qui communiquaient avec les esprits des ancêtres royaux. Déposés sur l’autel ils étaient le témoin de la puissance de la dynastie, le souverain étant le lien entre la terre et le ciel.
La coupe date de la dynastie des Shang, de la période d’Anyang soit du XIIe-XIe siècle avant notre ère. C’est un objet tripode traditionnel. L’ornementation dérivée de la ciselure de jade est le reflet de mythes hérités du monde chamanique néolithique. Les masques animaliers taotie (symbole de la cupidité ?), avec ses yeux globuleux et sa mâchoire supérieure féroce, occupent la panse du vase et le couvercle. La tête vue de face évoque celle d’un buffle. Une inscription parfaitement visible est une marque de clan. Sous les Zhou (vers 1050 av. J.-C.), les récipients à aliments (pour la cuisson ou la conservation des viandes) deviennent prépondérants, puis, à partir du milieu des Printemps et des Automnes, ce seront les objets liés aux ablutions.

Un travail d’atelier

Les fouilles archéologiques ont permis de découvrir un atelier de bronzier à Houma au Shanxi. Plus de 30 000 fragments de modèles ont été exhumés, montrant une organisation remarquable du travail, chaque atelier étant spécialisé soit pour la production de vases, soit d’instruments de musiques, etc.
Le bronze est un alliage de cuivre et d’étain, pour ces vases la composition moyenne serait de 80 % de cuivre pour 13 % d’étain, avec 7 % de plomb. Les patines dépendent de l’oxydation du cuivre et varient selon le degré d’humidité de l’enfouissement. Les bronziers Shang ont adopté la méthode du moule à sections. Les différents éléments sont ensuite assemblés. La finition est obtenue par abrasion afin de polir la surface et de rendre nets les détails.

Bibliographie

[1] Art et archéologie : la Chine du néolithique à la fin des Cinq Dynasties (960 de notre ère). Danielle Elisseeff, Paris, École du Louvre, Éditions de la Réunion des Musées Nationaux (Manuels de l’École du Louvre), 2008, 381 p.
[2] Trésors de la Chine ancienne. Bronzes rituels de la collection Meiyintang. Musée des arts asiatiques Guimet. Edition Mare et Martin 2013 
[3] L’art chinois Mary Tregéar. L’univers de l’art. 1991
[4] Aux origines de la civilisation chinoise. Les dossiers Archéologie et histoire n° 91. Février 1985

 

Les Shang

On ne connaît de cette dynastie que les 3 derniers siècles de son existence. Elle s’étend sur le cours moyen et inférieur du fleuve Jaune. La capitale du milieu du XIVe siècle av. J.-C. se trouve à Anyang. Elle comprend de très vastes palais en bois et en torchis sur une semelle de pierre. A cette époque apparaissent les cultes divinatoires, l’écriture, l’art animalier. L’importance de la religion, le culte des rois défunts (tombes grandioses) et les sacrifices humains (culte funéraire ou consécration des bâtiments) caractérisent cette civilisation.

 

Chronologie de l’âge du bronze en Chine

– Dynastie mythique des Xia : XXI-XVIe siècle avant notre ère.
– Dynastie des Shang : vers 1600-vers 1050 avant notre ère (période d’Anyang : vers 1300-vers 1050 avant notre ère).
– Dynastie des Zhou occidentaux : vers 1050-771 avant notre ère.
– Dynastie des Zhou orientaux : 770-256 avant notre ère (période du royaume des combattants : 475-221 avant notre ère).




Jurançon, Domaine de Souch – Cuvée Marie Kattalin 2006 Yvonne Hegoburu

Jean Helen – Royal, le Jurançon est entré dans l’histoire lors du baptême du futur Henri IV, dont les lèvres auraient été humectées de quelques gouttes de ce vin.

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Les vignes de Jurançon perchées sur les contreforts pyrénéens aux coteaux très pentus, interdisant la mécanisation, reçoivent du sud le vent d’Espagne et de l’ouest celui de l’Océan Atlantique, bénéficiant de la protection du Pic du Midi d’Ossau. Elles poussent sur les poudingues, roches détritiques modelées par l’érosion, recouverts localement de formations d’argiles, graviers et galets qui permettent aux racines des ceps de s’infiltrer profondément et d’assurer leur alimentation hydrique.

Les cépages traditionnels, gros et petit manseng, courbu, lauzet produisent d’excellents blancs secs, mais surtout de remarquables liquoreux souvent comparés aux Sauternes. Mais, différence notoire, ces vins ne sont pas botrytisés, car la pourriture noble, non recherchée peut même être délétère. Les grains des mansengs ont une peau épaisse qui permet de retarder leur cueillette jusqu›à novembre, voire fin décembre pour les vendanges tardives, afin de concentrer le sucre par la technique du passerillage, où sont lentement déshydratées les baies par le soleil et le vent chaud du sud, le foehn. Cela impose des vendanges par tries successives des grappes, pour obtenir leur pleine maturité avant toute pourriture, et limite drastiquement les rendements aux alentours de 20 hl/ha pour le domaine de Souch.

 

Une vie commencée à 60 ans !

Yvonne Hégoburu, débordante d’une générosité qu’on retrouve dans ses vins, gère ce domaine avec une énergie et une passion exceptionnelles. Maintenant octogénaire, elle n’a commencé sa vie de vigneronne qu’à 60 ans, au décès de son mari que la maladie avait empêché de débuter l’exploitation de la propriété qu’ils avaient achetée.

Elle travaille sur un petit domaine de 7 hectares certifié agriculture bio, très orienté vers la biodynamie. Les sols sont gardés enherbés et labourés de façon traditionnelle. La plante et son environnement sont dynamisés par projection, à petites quantités, de préparations naturelles, types silice, ortie, achillée, assemblées de façon complexe, administrées en fonction du cycle des astres. Rien n’altère l’authenticité du terroir, ni désherbants, ni pesticides. En fin de maturation, des filets protègent les vignes contre la voracité des oiseaux.

Les vendanges manuelles par tries successives sont acheminées au chai dans des caissettes. Les raisins non égrappés sont pressés dans l’heure qui suit la cueillette et macèrent à basse température avant le débourbage. La fermentation alcoolique à température constante en barrique de chêne est arrêtée par sulfitage, pour garder environ 80 g de sucre résiduel pour la cuvée Marie Kattalin, dont l’élevage en barrique dure 18 mois. Les cuvées ne sont, ni levurées, ni acidifiées, ni flash-pasteurisées. Légère filtration, pas de collage avant la mise en bouteille.

 

Une longueur en bouche incroyablement persistante

Habillé d’une robe or franc, limpide et brillante avec quelques irisations vertes, ce Jurançon Marie Kattalin 2006, 100 % petit manseng, exhale des parfums opulents de fruits exotiques, ananas, mangue, fruit de la passion, végétales de verveine, vite sublimés par la truffe blanche. La bouche est envahie d’arômes de miel, de cannelle, de citron confit. La longueur harmonieuse, minérale est incroyablement persistante.

Ce vin d’une concentration, mais aussi d’une finesse et d’une pureté superlatives, sans aucune lourdeur, garde toujours une pointe d’acidité qui lui confère sa grandeur. Comme l’a bien analysé une de mes convives : «cela commence par une avalanche de douceurs et se termine par des flots de fraîcheur».

Le mariage de ce nectar avec la gastronomie doit éviter certains classiques du Jurançon : en apéritif, il écraserait tout autre vin lui succédant, les accords avec les cuisines exotiques, type sucré – salé, seront bancals, car le vin occuperait trop le devant de la scène. Incontestablement, le bel accord se fera avec une terrine ou un aspic de foie gras, son acidité tempère et allonge le foie, tout en conservant son caractère onctueux. Je serai plus réservé concernant les foies gras poêlés. Ensuite, il accompagnera, à l’instar des Sauternes, les fromages à pâte persillée : roquefort, fourme d’Ambert, etc, mais aussi un brebis des Pyrénées, type Ossau-Iraty, accompagné de confiture de cerise noire.

C’est surtout un merveilleux vin de dessert, il met en valeur une tarte aux mangues, un gâteau basque, des cannelés bordelais, une galette des rois, il divinise l’ananas rôti ou flambé, la mandarine givrée et yuzu acidulé.

Yvonne Hégoburu avait intitulé, en mémoire de son mari, une de ses cuvées : « Pour René ». Peut-elle lui rendre plus bel hommage qu’en façonnant ses magnifiques vins moëlleux qui n’ont aucun équivalent en puissance et originalité d’expression. n

Jurançon, Domaine de Souch – Cuvée Marie Kattalin 2006 Yvonne Hegoburu – 64110 Laroin



Les lipides – nutrition et santé

364 – Yves Carat – Paraphrasant Woody Allen, l’auteur aurait pu appeler ce livre «  Tout ce que vous voulez savoir sur les lipides sans oser le demander » ; aucun doute en effet, cet ouvrage de Claude Leray, qui tranche agréablement avec d’autres écrits récents sur la même thématique est une véritable encyclopédie sur la question.

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Pour le médecin, le cardiologue, voire surtout le grand public, le mot « lipides» évoque avant tout un risque accru de maladies cardiovasculaires ou, a minima, une dépense énergétique excessive.

En fait, le lecteur, étonné, va puiser dans ce remarquable document des informations exhaustives sur tout ce qui concerne les graisses, pas seulement ses aspects négatifs en pathologie humaine, mais aussi et presque surtout la preuve de leur importance incontournable, fondamentale même dans les mécanismes cellulaires et la nutrition.

Il apprendra par exemple que les lipides, dont la connaissance s’est limitée jusqu’au XVIIIe siècle à la notion d’huile d’olive, doivent leur classification actuelle à un grand chimiste français Michel-Eugène Chevreul qui, en 1823, a réparti les corps gras en six groupes et a établi le premier que leur structure générale était une combinaison de glycérols et d’acides gras.

Il saura, entre autres, que le record de production mondiale en matière de graisses concerne l’huile de palme avec 46 millions de tonnes (3 millions seulement pour l’huile d’olive), cette huile dont le Gouvernement français, l’accusant de favoriser la déforestation et l’obésité,  envisageait un temps de surtaxer l’importation avant de faire marche arrière ; chaque Français en consomme tout de même 4,5 kg par an, le produit le plus consommé chez nous étant l’huile de colza avec 13,5 kg par an et par habitant soit près de dix fois plus que l’huile d’olive !

L’auteur insiste également sur l’évolution de la nutrition et des régimes alimentaires, rappelant que le régime dit paléolithique, reconstitué en 1998 par le Pr Eaton, spécialiste incontesté de la paléonutrition, basé sur la suppression des produits laitiers et des céréales, est aujourd’hui recommandé par des nutritionnistes de renom.

La nature des apports lipidiques alimentaires et leur métabolisme sont des données plus connues. La notion d’ANC (apports nutritionnels conseillés) l’est un peu moins de même que l’estimation de la consommation réelle de lipides dans la population, imprécise notamment en raison du succès commercial grandissant de plats préparés riches en graisses dites cachées ; a priori, cette consommation serait supérieure d’un quart aux recommandations internationales, d’ailleurs corrélée à l’augmentation récente du surpoids chez l’adulte comme chez l’enfant. Il semblerait établi que les lipides représentent aujourd’hui 37 à 40 % de l’apport énergétique dont 63 % proviennent de graisses animales. Cela cadre encore une fois avec la constatation d’une obésité même dans les régions méditerranéennes, jusque là moins concernées par ces habitudes alimentaires.

Bien entendu, l’auteur ne s’en tient pas à la description du comportement nutritionnel : après une revue exhaustive de la provenance alimentaire de tous les lipides, et de la contenance précise en graisses de tous les aliments, il en vient à traiter ce qui est pour nous médecins l’essentiel, les rapports entre lipides et santé. Ce chapitre qui fait à lui seul plus de 150 pages passe absolument tout en revue, étudiant les rapports potentiels de toutes les graisses actuellement recensées et de toutes les pathologies ayant fait l’objet d’études sérieuses, cancers et maladies cardiovasculaires en tête, mais aussi maladies du système nerveux, déclin cognitif, démences, troubles de la vision, maladies inflammatoires et immunitaires, etc., etc.

Au total, c’est un véritable monument, indispensable à tous ceux qui ont envie de comprendre en détail non seulement les rapports entre lipides et pathologie, mais aussi les besoins avérés ou éventuels de l’organisme en divers acides gras, stérols et vitamines.

Claude Leray est docteur es sciences et directeur de recherche au CNRS

A mettre, le plus vite possible, entre toutes les mains.




Saint-Jean Baptiste du Liget

364 – Christian Ziccarelli – A quelques lieues de Loches, au milieu des bois se trouve un joyau de l’art roman Plantagenêt, l’ensemble peint de la chapelle Saint-Jean-du-Liget. Ses fresques ont fait l’objet d’une étude approfondie lors du congrès archéologique de Tours en 1948.

 

DSC02165Un peu d’histoire… 

Le Liget est surtout connu par sa chartreuse dont la charte de « fondation », établie par Henri II Plantagenêt, roi d’Angleterre et comte d’Anjou, remonte à 1178, en expiation du meurtre perpétré sur son ordre de Saint Thomas Becket, archevêque de Canterbury. Ensemble de ruines imposantes siégeant au fond d’une vallée et dominées par un portail monumental du XVIIIe siècle. En fait notre propos, aujourd’hui, concerne une simple chapelle située à une centaine de mètres à l’Ouest de la Chartreuse. Son origine reste floue et toujours l’objet de débats. Les archives font état d’une donation perpétuelle aux frères chartreux vers 1163, sur demande d’Henri II Plantagenêt, d’un endroit appelé « Ligetus » par l’abbé Hervé de l’abbaye bénédictine du Saint-Sauveur de Villeloin, fondée dans les environs de Loches vers 850. Des moines bénédictins souhaitant vivre une vie érémitique plus sévère s’établirent d’abord à cet endroit et seraient à l’origine de la construction de cette chapelle et de sa décoration picturale (vers 1176-1183). Quand on connaît « l’austérité de vie et le souci de virginité totale de l’esprit et des sens, condition et atmosphère d’une contemplation plus pure » on peut en effet douter que les frères chartreux soient à l’origine de cette ornementation. Devenu trop exiguë pour l’exercice de leur culte, ils construiront dans la vallée proche l’église principale du monastère. La dédicace à Saint Jean Baptiste a été faite par l‘évêque de Paris, Eudes de Sully de 1196 à 1208.

 

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Un monument circulaire rappelant le Saint Sépulcre de Jérusalem

Inscrite sur les listes des Monuments historiques dès 1867, elle a fait l’objet d’une vaste restauration extérieure et intérieure en 2007. La chapelle est aujourd’hui réduite au chœur, la nef s’étant effondrée à une date indéterminée.

Tout l’intérêt réside dans les fresques d’une haute valeur artistique. Les scènes se répartissent en panneaux, dont le plus célèbre est la dormition de la vierge. Le premier panneau en entrant représente Jessé brandissant de la main droite un rameau, « radix Jesse », d’où sortira sa descendance. La vierge se dresse en manière de tronc d’où « émerge » le Christ. Juste au dessus un cercle délimite le ciel d’où plongent sept colombes représentant les sept dons du Saint Esprit.

En face est représentée une Nativité selon l’iconographie romane traditionnelle. La Vierge est étendue, Joseph à sa droite, l’Enfant Jésus couché dans le même sens que sa mère, sous le regard bienveillant de l’âne et du bœuf. Sur le panneau suivant une Présentation au temple met en scène la Vierge. Elle tend l’enfant Jésus au vieillard Siméon, les bras couverts d’un voile, une lampe, symbole de la présence divine brûle sur l’autel. Après vient la descente de Croix, Joseph d’Arimathie maintient le corps du Christ pendant que Nicodème retire le clou de sa main gauche. La Vierge mettant le bras droit du Christ tendrement contre sa joue. Le panneau de la résurrection est conforme au récit évangélique, les saintes femmes s’approchent du tombeau vide, l’ange leur annonce que Jésus est ressuscité. Enfin la dormition de la Vierge, les onze apôtres (nommés en lettres blanches sur fond vert) assistent à la mort de la vierge couronnée, étendue sur sa couche, calme et majestueuse. Le visage d’une grande perfection reflète une profonde quiétude. Jean, qui est penché au pied du lit, tient un livre ouvert où est écrit un titre commençant par Beatus. Des anges recueillent l’âme nue de la Vierge en miniature transmise par Jésus.

Dans les embrasures des fenêtres, sont peintes des représentations des Saints (diacres et martyrs, saints abbés et évêques, les Apôtres) et du Christ Pantokrator. L’Apocalypse occupait la coupole aujourd’hui détruite.

Le thème majeur est celui de « l’Incarnation rédemptrice, Dieu s’insère dans une généalogie humaine. Par l’entremise de la Vierge, Dieu s’incarne tel un rameau dans l’arbre de Jessé, d’où naît le Christ ».

Quant à leur datation, elle reste controversée. Pour la plupart des historiens les fresques dateraient de la fin de la deuxième moitié du XIIe siècle.

 

DSC02157 La Dormition de la Vierge, une iconographie d’origine orientale

Aucun personnage du Nouveau Testament ne doit plus à la légende que la Vierge. L’Evangile la laisse à peine entrevoir. Dès les premiers siècles, des textes apocryphes racontèrent sa vie, de son enfance à sa mort et charmèrent le Moyen Age. Le culte de la Vierge qui grandit au XIIe siècle s’épanouît au XIIIe. Les apôtres, qui étaient alors dispersés dans le monde pour y prêcher l’évangile, se sentirent soudain emportés par une force mystérieuse et se trouvèrent réunis dans la chambre de Marie. Marie étendue sur son lit attendait la mort. A la troisième heure Jésus apparut accompagné d’une multitude d’anges. Un dialogue s’engagea entre la mère et le fils « Viens, dit Jésus, Toi que j’ai élue et je te placerai sur mon trône, car j’ai désiré ta beauté » Et Marie répondit « Je viens car il est écrit de moi que je ferai ta volonté » Et ainsi l’âme de Marie sortit de son corps et s’envola dans les bras de son fils. Cette scène d’origine orientale est représentée par les Byzantins dès le XIe siècle. Les apôtres sont rangés autour du lit où repose le corps de la Vierge, Jésus tenant dans ses bras l’âme de sa mère sous la figure d’un petit enfant.

 

Bibliographie

[1] La chapelle Saint-Jean du Liget. Christophe Meunier, éditions Hugues de Chivre. 2011 
[2] Touraine Romane, 3e édition, la nuit des temps. Edition Zodiaque, 1957.

 

Le mot fresque dérive de l’italien « fresco », frais. Connu depuis la plus haute antiquité, elle se compose de trois éléments : 

L’arricio est un crépi à base d’un mélange de chaux, de sable et d’eau que l’on applique sur un support de pierre ou de brique, d’une épaisseur d’environ un centimètre.

L’intonaco supporte l’ensemble de la fresque, il est composé d’une pâte faite de sable fin, de poudre de marbre ou de très fine pouzzolane, de chaux et d’eau. Il passe de l’état d’hydrate de calcium à celui de carbonate de chaux formant une pellicule résistante assurant la cohésion des pigments mélangés à un liant.

– Les couleurs doivent être obligatoirement déposées sur l’intonaco humide et donc frais, prenant leur ton définitif au bout de quelques mois. Les contours des images à réaliser sont le plus souvent dessinés à l’ocre rouge. Lors de la restauration des fresques, on a découvert le Sinopia. Ce dessin préparatoire, avec ébauche de couleur, est appliqué sur l’arricio avec de la terre rouge de Sinope, puis sur l’intonaco.

La technique a fresco exige de maîtriser les surfaces à peindre dans un laps de temps donné, elles sont divisées en fonction des zones accessibles par un échafaudage (pontate) et exécutables au cours d’une journée (giornate).




iPhone 5 : la face cachée

364 – Pascal Wolff – Déjà très perplexe devant le « premier » iPhone 5, nous attendions les nouveaux annoncés avec beaucoup de circonspection : un « low cost » et une version haut de gamme. Comme à l’accoutumée, c’est Tim Cook en personne qui a fait les présentations ce 10 septembre en balayant les rumeurs – qui ne manquaient pas – pour nous faire découvrir les deux modèles iPhone 5, l’un dénommé 5c et l’autre, 5s.

L’événement promettait, selon Apple, d’ « éclairer la journée de tout le monde », avec « non seulement une vue sur l’avenir, mais une inspiration pour l’avenir… ». En fait d’inspiration, elle n’était pas franchement au rendez-vous, l’esprit Steve Jobs et de sa capacité à promouvoir le design, la recherche et le développement étant visiblement bien loin.

 

Le lowcost façon Apple

Selon les rumeurs donc, la firme de Cuppertino devait sortir un lowcost pour s’ouvrir vers de nouveaux marchés – les pays émergents – tel la Chine (où son chiffre d’affaires a reculé de 14 %), le Brésil ou l’Inde. Nous avons donc été dans un premier temps surpris de voir que le 5c n’avait de lowcost que le nom avec un prix de départ de 599,00 euros en 16 Go (1), ce qui montre à quel point Apple continue de vouloir privilégier ses marges plutôt que de vendre ses téléphones en quantité.

Les premières réactions chinoises n’ont d’ailleurs pas tardées, jugeant le produit trop cher (le 5c atteignant 520,00 euros), là où les smartphones à 75,00 euros abondent le marché intérieur. Au Japon, par contre, il fallait faire jusqu’à un kilomètre de queue ce 20 septembre pour que le consommateur reparte avec son iPhone tout neuf sans débourser un Yen, l’appareil étant facturé chaque mois durant deux ans grâce à une ristourne sur les services.

 

Les dessous de l’affaire

Vu de notre œil exercé aux nouvelles technologies, les nouveautés de l’iPhone 5 sont à l’intérieur. Tout d’abord par un nouvel iOS, qui devient bien plus épuré (voir encadré sur le skeuoporphisme ci-dessous), ensuite par une technologie (nouvelle sur un smartphone) qui va changer nos habitudes dans les années à venir : l’identification par empreintes digitales. Cet accès One-touch, disponible uniquement sur le 5s (2), offre de belles perspectives : plus besoin de code(s) et de logins devenus particulièrement rébarbatifs de nos jours (moi, j’ai acheté un calepin papier pour tous les retenir… et vous ?). Le seul hic, c’est qu’il a fallu moins de deux jours après la sortie du 5s pour que l’une des principales organisations des hackhers en Europe vienne à bout du mécanisme de reconnaissance des empreintes digitales…

Toujours sur le 5s, Apple a dévoilé un nouveau coprocesseur : le M7. Conçu spécifiquement pour mesurer les données de mouvement de l’accéléromètre, du gyroscope et de la boussole, ce coprocesseur déleste la charge de traitement de la puce A7. L’industrie des technologies de remise en forme est déjà sur les rangs sur ce nouveau capteur d’activité, mais de nouvelles méthodes de suivi des données sur les patients et la santé vont bientôt apparaître.

En conclusion, Apple donne un – léger – coup de frais à sa technologique, même si le fan n’y trouve plus vraiment son compte, ces nouveautés ayant un goût de « pré-existant », car il est bien loin le temps où le maître Jobs tenait de façon magistrale les rênes d’Apple et de sa contention à nous préparer « une inspiration pour l’avenir », un peu comme si à chaque fois qu’il officiait, c’était le Père Noël qui arrivait avec ses nouveautés venues de nulle part. n

(1) iPhone 5c : de 599,00 euros en 16 Go à 699,00 euros en 32 Go.
(2) iPhone 5s : de 699,00 euros en 16 Go à 899,00 euros en 64 Go.

 

Le skeuomorphisme, quésako ?

Le mot n’existe pas dans la langue française, mais il est vient du terme anglais « skeuomorphism » pour désigner des éléments d’interface informatique faisant le parallèle avec le monde physique (par exemple des textures : cuir, papier, bois) dans le but de donner des repères facilement accessibles à l’utilisateur, notamment aux malvoyants. L’interface mobile d’Apple, réputée pour être la plus adaptée aux handicapés visuels, est sur le point de disparaître avec l’iOS7. Par ce changement, Apple cherche à lutter contre la concurrence d’autres systèmes, Microsoft et Android de Google, qui bénéficient d’un design plus épuré.

Cette redirection majeure de l’interface n’est pas sans conséquences pour les utilisateurs malvoyants, les plus sensibles à ces changements.




Côtes de Bourg 2009 « Les 3 Petiotes »

362-363 – Jean Helen – J’avais, dans Le Cardiologue 310, vanté le Château Martinat que m’avait fait découvrir, dans le Bourgeais, où il avait pris sa retraite, un excellent ami gastro-œnologue rémois. En retour, je lui avais conseillé de s’intéresser au domaine des 3 Petiotes sis à moins de 200 m de sa propriété, choix qui s’est avéré fort judicieux !

VinL’aventure des 3 Petiotes est celle de la reconversion d’une jeune cadre bancaire dynamique, désireuse d’échapper à un travail monotone et peu valorisant, pour se laisser guider par le plaisir du goût, de la convivialité, de l’amour du vin et par le labeur et les tribulations incessantes qu’il nécessite, ce qu’elle raconte avec beaucoup d’humour dans son blog jonglant entre les enfants, les aléas climatiques, les contraintes de la culture bio, les trahisons du matériel.

Valérie Godelu, passée dans sa jeunesse par la Lorraine, puis le Beaujolais, où elle apprit à apprécier le vin, prépara sa reconversion depuis une dizaine d’années, en consacrant avec son mari tous ses congés à une formation viti-vin à Beaune. Puis les hasards de leur vie professionnelle les amenant à Bordeaux, elle tomba sous le charme des Côtes de Bourg, où elle réussit à acquérir, en 2008, 3 parcelles d’un total de 3 hectares entre Prignac et Tauriac qui n’intéressaient guère les locaux, car les rangs de vigne, séparés d’à peine 1,50 m, interdisaient le travail mécanique. C’était décidé ! Valérie Godelu abandonne alors son métier pour celui de vigneronne, son mari conservant son travail, pour « faire bouillir la marmite », mais l’assistant, ses soirées et week-ends, dans le travail de la vigne.

La qualité du sol argilo-sableux renforcé en profondeur par des argiles bleues et rouges, des petites concentrations de latérite possédant de bonnes réserves hydriques, l’orientation idéale pour l’ensoleillement des vignes nord-sud promettaient de belles possibilités très vite concrétisées.

Le nom surprenant du domaine, les 3 Petiotes, est venu de la naissance des 3 fillettes du couple qui s’harmonise avec les 3 parcelles du domaine complantées respectivement de malbec, merlot, et cabernet, âgées de plus de 35 ans.

D’emblée, Valérie choisit l’agriculture biologique actuellement en cours de certification. « J’ai pris l’option de faire un vin le plus naturel possible, je ne rajoute aucun intrant chimique autre que le soufre avec grande parcimonie, afin d’obtenir un vin digeste », souligne-t-elle. Les vignes sont cultivées, sans pesticides ni engrais de synthèse, l’herbe est tondue entre les pieds au rotofil, le sol retourné en surface 1 à 2 fois/an. La taille Guyot double a été adoptée, pour étaler les grappes. Effeuillage en août, pour mieux exposer les grappes au soleil, travaux en vert limitent drastiquement les rendements à 25 hl/ha.

En 2012, après quelques galères dans des locaux éloignés et exigus, un chai tout neuf est sorti de terre qui optimise le travail de vinification.

Les vendanges sont manuelles en cagettes. Un double tri à la récolte, puis au chai est effectué sur des raisins égrappés à la main. Les fermentations alcooliques et malo-lactiques s’enclenchent dans la foulée, sans sulfitage, ni levurage exogène. L’élevage sur lies avec bâtonnage régulier s’étend sur 12 mois en barriques anciennes. La mise en bouteille ne comporte ni collage ni filtration.

Ces 3 Petiotes 2009 résultent d’un assemblage inhabituel de 40 % de malbec, 35 % de merlot, le reste de cabernet essentiellement franc. Paré d’une robe grenat foncé aux reflets violacés, ce vin exhale immédiatement des senteurs de liqueur de cassis, de pruneaux et d’épices dominées par le poivre noir, puis, très rapidement, apparaissent des arômes plus sudistes de fruits rouges, de kirsch, de menthe. La bouche est fruitée, gourmande, veloutée exprimant une matière dense, équilibrée, où l’on retrouve, à nouveau, des notes de pruneaux, de poivre, de réglisse, les tanins cependant restent encore un peu vifs. La finale laisse une belle impression fraîche et salivante.

Cette bouteille, très atypique pour un Bordeaux, ne peut que séduire par son côté fruité et épicé lié au malbec, mais aussi par son prix particulièrement doux !

Ce vin joyeux, rempli d’énergie s’accordera avec de nombreux mets. Il épousera une grillade de bœuf ou une brochette d’agneau, surtout si elles sont cuites aux sarments de vigne, un boudin noir aux pommes, une cannette rôtie. Valérie le recommande avec sa recette fétiche, encornets à la joue de bœuf, mais aussi avec des desserts chocolatés : bavaroise au chocolat et fraise, moelleux au chocolat.

Le fourmillement de projets des Godelu : cuvée « en attendant Suzie » comportant 70 % de malbec, une autre 100 % cabernet franc, un moelleux de merlot
botrytisé ( !), son référencement dans le livre « des vins qui ont de la gueule » permettent d’affirmer que les Petiotes sont en passe de devenir grandes…

Côtes de Bourg 2009 « Les 3 Petiotes »
Valerie Godelu 33710 Tauriac
 



La Madone de Vyšehrad

362-363 – Christian Ziccarelli – Louis-François Garnier – Le couvent Saint-Agnès, l’un des plus ancien (1240) édifice gothique de Prague conserve La Madone de Vyšehrad, une Madone d’Humilité dont l’origine thématique est apparue à la suite de la Peste noire de 1348.

CultureDes Primitifs italiens à l’art médiéval en Bohème

Au Duecento, l’art primitif italien sous les pinceaux du peintre florentin Cimabue (v.1240-1302) et du siennois Duccio di Buoninsegna (1260-1318) va s’affranchir de la tradition byzantine. Leurs contemporains, les sculpteurs gothiques pisans, Nicola (v.1220-1278) et son fils Giovanni (v.1248-1317) Pisano, vont  exercer une influence durable sur les artistes siennois de leur époque, en créant un art infiniment plus réaliste et raffiné que leurs prédécesseurs (chaire du baptistère et de la cathédrale de Pise). En 1348, la Peste noire (bubonique) tua la moitié de la population de Sienne et, en cinq ans, le tiers de la population européenne. Cette redoutable épidémie, considérée en son temps comme une punition divine,  incita à faire pénitence et à la création de tableaux plus humains parmi lesquels des Madones d’Humilité comme celle que peignit en 1353 Bartolo di Fredi (v.1330-1410) dans son atelier de Sienne. Cette double influence de l’art byzantin et des sculptures gothiques, si vivantes, va s’exprimer chez Simone Martini (v.1284-1344), élève probable de Duccio et considéré comme ayant la gamme d’émotions la plus large de tous les Primitifs italiens. Quittant Sienne, au milieu des années 1330, pour Avignon devenu « Capitale de la Chrétienté » depuis l’exil du pape en 1309, il y passera les dix dernières années de sa vie . La large diffusion de son œuvre, en particulier de ses Vierges d’Humilité, est à l’origine d’une grande part de la peinture européenne. Ce nouveau type de Madone se répandit rapidement en Europe incluant la Bohème où la présence  du maître italien Tommaso da Modena, vers 1350,  a contribué à transmettre l’influence de Giotto (1267-1337) de sorte qu’il est très probable que les artistes furent alors influencés par les Primitifs italiens au sein de l’art gothique international, impliquant de nombreux pays entre 1380 et environ 1450.

La Vierge d’Humilité

La  Vierge d’Humilité  est une innovation si remarquable qu’elle n’a pu être conçue que par un grand maître parmi les Primitifs italiens bien qu’on considère qu’elle résulte d’une transformation de la  Vierge à l’Enfant . Il y a tout lieu de penser que ce peintre novateur est Simone Martini même si le prototype initial ne nous est pas parvenu, car l’une des premières  représentations est probablement de Lippo Memmi, beau-frère de Simone Martini, et avec lequel il peignit l’Annonciation (1333) pour la cathédrale de Sienne, avec un retentissement considérable, puisqu’elle fut reprise jusqu’au XVe siècle.

La  Vierge d’Humilité  n’est plus la Vierge en Majesté issue des icones byzantines ; elle descend de son trône pour s’asseoir sur le sol et devenir ainsi plus accessible, avec humilité, comme ceci figure dans la première représentation connue (1346) de Bartolomeo de Canogli sous la forme d’une Vierge à l’Enfant assise sur un coussin plat posé sur le sol (Musée National de Palerme) ; l’Enfant Jésus attire le sein de sa mère vers sa bouche tout en détournant la tête pour regarder le spectateur. Plusieurs autres peintures montrent ainsi l’Enfant Jésus à demi-nu, recouvert d’une draperie en partie transparente avec un pan d’étoffe qui tombe sous son corps selon une « langueur sentimentale » typiquement siennoise qui disparaîtra avec les peintres florentins inspirés de Bernardo Daddi (1290-1348), dans l’esprit de Giotto ; la Vierge est alors assise plus droite et les plis tombant du lange sont supprimés.

Les modifications apportées à l’image de la  Vierge d’Humilité  nous viennent de Toscane. A Sienne, berceau du modèle, l’apparition de décors intérieurs est le fait des frères Lorenzetti, tous deux mort de la peste la même année, (Pietro v.1280-1348 et Ambrogio v.1290-1348), conformément à leur conception de « l’Art né dans la ville ». A Florence, l’Enfant s’éloigne de sa mère dont il ne peut atteindre le sein qu’en tendant les bras et une plus grande distance s’installe avec le spectateur. Certains artistes peindront une Vierge en rupture avec le modèle original puisqu’elle va de nouveau s’élever, assise très haut sur un coussin au-dessus du sol, parfois sur des nuages, aboutissant à une  version céleste  reprise par les grands peintres de la Renaissance tels que Fra Angelico, Raphaël ou Titien, évoluant ensuite vers des variantes comme la Vierge au jardin  ou le sol se couvre de fleurs, puis la  Vierge aux rosiers.

La Madone de Vyšehrad

La Madone de Vyšehrad, « château en hauteur », porte le nom d’une colline mythique de Prague et fut peinte après 1350 dans l’entourage du Maître de Vyšší Brod, artiste anonyme qui est l’auteur de 9 tableaux d’un retable dispersé représentant des scènes de l’Enfance du Christ et de la Passion, et provenant du prieuré cistercien de Vyšší Brod, anciennement dénommé en allemand : Hohenfurth en Bohème du sud. La Madone est assise sur une pelouse fleurie symbolisant le jardin d’Eden ; elle est représentée avec son manteau bleu (ce qui n’a pas toujours été le cas puisqu’il faut attendre le XIIe siècle pour que cette couleur s’impose) et sa tête, avec quelques mèches blondes dépassant du manteau, est entourée d’un nimbe de rayons dorés surmontés de douze étoiles d’or selon la technique de la feuille d’or et a tempera, c’est à dire selon une  peinture basée sur un liant à émulsion (œuf). Ces étoiles et le croissant de lune au pied de la Vierge  évoquent le chapitre 12 du Livre de l’Apocalypse  attribué à Jean l’Evangéliste quand il décrit ses visions surnaturelles: «  Un grand prodige parut aussi dans le ciel. Une femme revêtue du soleil, qui a la lune sous ses pieds, et sur sa tête une couronne de douze étoiles ». La Vierge tient sur ses genoux, de ses mains effilées, l’Enfant Jésus dont la tête blonde est également  entourée d’un nimbe de rayons dorés et qui semble téter en s’agrippant au sein de sa mère, mais la poitrine de la Vierge n’est que suggérée par un pan du manteau. La Vierge  regarde dans le vide, évoquant l’intuition maternelle du destin particulier de son fils alors que l’Enfant détourne sa tête  pour nous regarder avec acuité ; son corps est en grande partie recouvert d’un brocart, étoffe de soie dorée rehaussée de dessins circulaires, et dont un pan retombe négligemment laissant paraître  deux petons qui s’agiteraient presque sous nos yeux.

Une homogénéité remarquable

Dans l’Art du XIVe siècle, des exemples italiens, français, espagnols mais aussi bohémiens réalisent un thème d’une grande homogénéité sous l’influence initiale de Simone Martini, amplifiée par une vénération particulière pour la Vierge d’Humilité. Ceci témoigne du caractère humaniste de l’Art du début du Trecento italien et l’attitude de l’Enfant Jésus, qui cherche notre regard par un mouvement de contorsion ou contrapposto,  est considérée comme l’une des innovations les plus remarquables du Trecento italien.  Il en résulte une grande empathie de la part du spectateur vis-à-vis de l’amour de cette humble madone pour son jeune enfant, de telle sorte que, au-delà du tableau de dévotion, il s’y rapporte une symbolique universelle.

Bibliographie

[1] T. Hyman. La Peinture siennoise. Thames & Hudson 2007
[2] M. Meiss. La peinture à Florence et à Sienne après la Peste noire. Hazan 2013
[3] N. Laneyrie-Dagen. Le métier d’artiste. Dans l’intimité des ateliers. Larousse 2012
[4] J.A Crowe, G.B. Cavalcaselle, A. Jameson. Les Primitifs italiens. Parkstone international 2011
[5] M. Pastoureau. Bleu Histoire d’une couleur. Points 2006

Remerciements à Sylvie et Christian Neel pour leur amicale collaboration et à Marie-Eglé de Rouvroy, documentaliste à Famille chrétienne




Techniques d’échographie cardiaque

362-363 – Yves Carat – Chacun sait que l’échographie cardiaque, devenue depuis longtemps l’outil clinique indispensable d’exploration non invasive du cœur, est en perpétuelle innovation, ce qui rend sa maîtrise de plus en plus complexe et difficile en pratique quotidienne.

LivreC’est tout le mérite du livre de Christophe Klimczak (1), préfacé par le Pr Albert Hagège, de proposer un panorama complet des techniques ultrasonores et d’en faciliter la « prise en main ».

L’auteur, cardiologue et praticien hospitalier, est bien connu des spécialistes en imagerie cardiaque qui ont déjà pu apprécier ses autres écrits consacrés à l’échographie cardiaque transthoracique et transœsophagienne.

Le présent ouvrage, richement illustré de plus de 250 schémas et figures, est clair et didactique ; pour autant, il s’adresse avant tout aux échographistes confirmés qui y puiseront une mine d’informations et de précieuses mises au point.

 

Un ouvrage parfaitement documenté

Ce livre est un document à la fois synthétique et très fouillé sur toutes les techniques échocardiographiques actuellement disponibles par voie transthoracique et transœsophagienne allant des aspects les plus classiques jusqu’aux  systèmes d’exploration de demain.

Pour les aspects classiques, l’échographie bidimensionnelle transthoracique, de repos et de stress, et l’écho transœsophagienne sont largement abordées dans deux chapitres, notamment sur tout ce qu’il faut savoir en pratique quotidienne.

Quant aux techniques modernes, l’ouvrage aborde successivement :

le doppler tissulaire myocardique, l’une des plus anciennes techniques « modernes », dont les bases physiques, les limitations  et les applications cliniques sont clairement exprimées.

Le color Kinetic imaging, particulièrement bien exposé.

La déformation myocardique, qui s’est installée lentement dans la pratique quotidienne, mais qui devient aujourd’hui l’un des outils incontournables de l’appréciation de la contractilité ventriculaire gauche. Le concept des différents types de strain est particulièrement bien présenté, tant pour les cardiologues débutants que pour les échographistes confirmés

L’échographie tridimensionnelle en temps réel, transthoracique et transoesophagienne, fait l’objet de deux vastes chapitres, détaillant les principes physiques des sondes 3D comme les différentes modalités techniques d’exploitation des images et leurs applications actuelles et futures.

L’ouvrage est à ce point complet qu’il aborde également des domaines un peu plus confidentiels (pour l’instant) tels l’échographie transthoracique du flux coronaire, les différentes techniques d’écho intracoronaire ou le « vector flow mapping ».

Au total, ce document remarquable, agrémenté d’une imposante bibliographie, pourrait devenir l’ouvrage de référence, après correction des quelques coquilles qui en gênent un tout petit peu la lecture.

A acquérir sans tarder.

(1) Christophe Klimczak est cardiologue, praticien hospitalier des hôpitaux de l’AP de Paris (Charles-Foix à Ivry-sur-Seine, Émile-Roux à Limeil-Brévannes) – Groupements hospitaliers universitaires.

 

Je vous parle du cœur

 

Auteur : Christophe Klimczak

 

Editeur : Elsevier-Masson

 

Pagination : 327 pages

 

Prix public : 55,00 €

 




Apple et les professionnels de la Santé

362-363 – Pascal Wolff – Apple a décidé de créer une catégorie appelée « Apps pour les professionnels de santé ». Une bonne idée pour se repérer dans le dédale des applications dites de « Santé ». Par contre, on ne sait pas qui fait office des attributions des catégories professionnelles, car il manque un certain nombre d’applications de santé dites « sérieuses » qui ne sont pas présentes et qui seraient les bienvenues ici. Cette rubrique étant très récente, laissons le temps à Apple de faire ses mises à jour.

Cette catégorie se différencie en sept sous-catégories :

– Apps de référence

– Medical Education Apps

– DMP et apps pour le suivi des patients

– Apps pour les soins infirmiers

– Apps d’imagerie

– Patient education Apps

– Santé

Dernier point, et ô combien important. Vous ne trouvez pas cette rubrique dans l’iTunes Store. J’ai eu beau fouiller, impossible de m’y rendre. Voici donc le sésame pour y avoir accès :

https://itunes.apple.com/WebObjects/MZStore.woa/wa/viewMultiRoom?cc=us&fcId=459947050




Les Apps du mois

362-363 – Pascal Wolff –

Instant Heart Rate

Instant Heart Rate est une application originale développée sous Android et iOs qui permet de mesurer le rythme cardiaque grâce à la caméra et au flash de son smartphone en positionnant le doigt directement sur le capteur CCD. L’application se base sur un brevet de plus de trente ans qui permet de mesurer la saturation en oxygène présente dans le sang à chaque battement du cœur. Cette richesse en oxygène provoque un léger changement de couleur de la peau que la caméra analyse pour calculer la fréquence cardiaque. Cette app a été classée la meilleure santé & app de remise en forme sur mobile Premier Awards 2011

Caractéristiques

Mesure du pouls
Graphique PPG en temps réel 
Continu ou mode Auto-Stop 
Zones de fréquence cardiaque 
Stockage des données avec export pour les utilisateurs enregistrés 
Partage sur Twitter et Facebook si vous voulez en faire profiter vos amis…

 

CardioSmart Explorer

Belle application que nous vous proposons là, car vous pourrez montrer à votre patient de façon ludique les problèmes posés par un traitement et les options proposées en utilisant des graphiques cardiaques en 3D, animés ou pas. Les images sont superbes et les animations saisissantes. Elles ont également le mérite de démystifier et de rendre plus humain ce que le patient ne voit guère et font partie de son imaginaire. Vous pouvez ainsi explorer la structure d’un cœur battant en 3D en le faisant pivoter sur lui-même ou montrer la manipulation d’un stent. Il y a toute une série d’animations et de médias interactifs à consulter avec des manipulations qui montrent à votre patient les interventions chirurgicales éventuelles. Evidemment, cette app n’est qu’un support informatif et a tout d’abord été conçue pour le rapport cardiologue/patient.

 

Virtual Heart

Toujours dans l’animation cardiaque, une application qui permettant de visualiser le cœur et d’en comprendre les mécanismes, notamment une animation du courant électrique. Vous pourrez même régler la fréquence cardiaque jusqu’à 180. Ce cœur virtuel a été créé par la société Xvivo, spécialisée dans la réalisation d’animations médicales et travaillant pour des sociétés comme Medtronicks ou Merck, pour le compte du musée des sciences et de l’industrie de Chicago. Intéressant à montrer, mais on regrettera que cette application n’aille pas plus loin dans sa démonstration visuelle.

 




Crémant de Limoux Brut Résilience 2008 (Alain Cavaillès 11300 Magrie)

Dès 1531, les moines de l’abbaye de Saint- Hilaire, à quelques kilomètres de Limoux, s’aperçurent que le vin blanc qu’ils avaient mis en bouteilles bouchées de liège, formaient des bulles : la Blanquette de Limoux venait de naître et est donc considérée comme un des plus anciens vins mousseux, puisque, n’en déplaise aux Champenois, il semble démontré qu’à la suite d’un pèlerinage dans cette abbaye bénédictine, fin XVIe siècle, Dom Pérignon expérimenta à Hautvillers sur les vins de Champagne la méthode limouxine.

Le vignoble de Limoux, sub-division du vignoble languedocien, à l’ouest des Corbières, présente une combinaison de terres argilocalcaires caillouteuses, influencées par la Méditerranée et les Pyrénées, procurant un ensoleillement important et une pluviométrie suffi sante. Ce climat est résolument favorable à la production de blancs réputés. Mais ce vignoble a la particularité unique dans le Languedoc de produire des vins effervescents qui conjuguent Blanquette et Crémant de Limoux.

La Blanquette doit sa typicité au cépage mauzac (Blanquet en occitan qui illustre les petites pointes blanches sur les feuilles de la vigne) et qui constitue jusqu’à 90 % du vin. Elle est, le plus souvent, élaborée selon la méthode traditionnelle champenoise, où l’ajout d’une liqueur de tirage provoque une deuxième fermentation dans le flacon (voir Le Cardiologue n° 327) ; mais les mêmes viticulteurs proposent, en parallèle, des Blanquettes de Limoux méthode ancestrale, où la fermentation est ralentie par refroidissement dans la cuve et repart de façon naturelle dans la bouteille ; ces vins titrent péniblement 7 ° d’alcool.

De la noblesse dans les cépages _ Le Crémant, lui, privilégie les cépages nobles : Chardonnay, Chenin qui ne peuvent dépasser 90 % de l’assemblage, pour la cuvée Résilience d’Alain Cavaillès : 50 % de chardonnay, 40 % de chenin, 10 % de pinot noir. Il est élaboré selon la méthode champenoise. Son vieillissement dure au mois 15 mois, alors que la Blanquette peut être commercialisée au bout de 9 mois. A noter que la cuvée Résilience est très faiblement dosée à 4 g de sucre : ce qui la classerait en Champagne dans les extra-bruts.

Alain Cavaillès est installé depuis 1996 dans la vallée de Magrie au coeur du terroir d’Autan considéré comme l’excellence de l’appellation. Les vignes, au départ épuisées, ont été revigorées par l’agriculture biologique, avec l’obsession de conserver le sol en vie par labourage et apport de matières organiques. Les vendanges sont manuelles en caissettes de 30 kg. La dénomination de sa cuvée vedette Résilience illustre parfaitement sa philosophie : « capacité d’un écosystème à retrouver un fonctionnement normal, après avoir subi des attaques et des dommages ». Mais le vigneron outrepasse largement la nouvelle réglementation européenne sur les vins bio : « Pas d’agriculture bio sans vinification bio, réduction des doses de sulfites, pas de collages agressifs, filtration uniquement si nécessaire, pas d’utilisation systématique du froid, vinification en plein air, pour que le vin suive le cycle naturel des saisons », clame-t-il.

D’une brillante robe jaune pâle, rehaussée de reflets dorés, ce Crémant Résilience dévoile des bulles abondantes très fines, teintées d’élégance. Il exprime des arômes de fleurs blanches, aubépine, chèvrefeuille, de fruits délicats, mandarine, pêche blanche, associés à de subtiles notes de toast grillé signant le cépage chardonnay. La bouche nerveuse et minérale est bien équilibrée. Peut-être pourrait- on regretter un certain manque d’ampleur et de longueur.

Sa vivacité et sa fraîcheur, sa faible sucrosité en font typiquement un vin d’apéritif, ouvrant celui-ci, sans empâter la bouche, ni charger la digestion. Il concurrencera, ainsi, nombre de champagnes de modeste qualité. Il se dégustera avec des petits toasts salés, des réductions à base de poissons fumés, et notamment du saumon cru ou mariné. Il peut aussi accompagner, de façon originale, des poissons grillés, mais, au contraire des champagnes de gastronomie, je ne conseillerai pas de le servir pendant tout un repas.

Un vin, conclut Alain Cavaillès, est plus qu’un liquide « sympa » à consommer, il a un potentiel évocateur, il est en simultané vecteur d’émotion et de mémoire. ■

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Je vous parle du cœur

361 – « Ou même du fond du cœur », comme l’écrit dans sa préface le Professeur Chauvin, qui connaît bien le Docteur Corcilius pour l’avoir côtoyé dans son service de cardiologie à Strasbourg, rendant ainsi un hommage appuyé aux qualités humaines de l’auteur.
Michel Corcilius, cardiologue libéral, a d’abord exercé en Alsace, avant de se laisser tenter par le soleil de la Méditerranée et de se fixer dans le Var à la Seyne-sur-mer.
La rédaction du Cardiologue le connaît bien, pour lui avoir confié la rédaction de plusieurs articles, tâche dont il s’est toujours acquitté avec ponctualité et talent.

Michel Corcilius a donc choisi de « parler du cœur » au grand public, aux « non-initiés » rebutés par le langage abscons trop souvent rencontré dans les ouvrages destinés à des lecteurs non médicaux.

Comme le précise l’auteur dans son avant-propos, il s’agit d’un livre « à vocation pédagogique » qui se veut « facilement abordable et compréhensible pour tout le monde ».

Le premier chapitre précise l’importance de la cardiologie et la place centrale que tient le cœur dans le monde médical et celui du grand public.

Puis vient la description précise et documentée des symptômes et facteurs de risque, qui utilise certes des termes adaptés, mais ne fait l’impasse sur aucune explication approfondie ; c’est ainsi, par exemple, que le lecteur attentif du chapitre sur les troubles du rythme et de la conduction en saura plus sur la question que bien des cliniciens, avec un regard désormais averti sur les différents types de tachycardies et les indications respectives du stimulateur cardiaque comme du défibrillateur.

Sont ensuite passées en revue les principales pathologies, coronaropathie évidemment, hypertension artérielle, valvulopathies, et leur aboutissement naturel encore trop souvent rencontré qu’est l’insuffisance cardiaque.

Ce chapitre sur l’insuffisance cardiaque est particulièrement pertinent, car, outre l’étude clinique et thérapeutique de la pathologie, il fourmille de détails pratiques, de « recettes » utiles à la vie quotidienne de l’insuffisant cardiaque qui vont du choix de l’eau minérale la plus appropriée à l’activité physique et éventuellement sportive, en passant par les voyages et l’activité sexuelle.

Mais le meilleur est presque pour la fin dans un chapitre intitulé « croyances et certitudes », dans lequel l’auteur tord le cou à un certain nombre d’idées reçues, de la pression artérielle qui augmenterait « normalement » avec l’âge aux bienfaits ou méfaits du sel, du café, du tabac, de la margarine ou même du cholestérol ; notons à ce sujet qu’il est réconfortant qu’un ouvrage à destination des patients n’emboîte pas le pas aux affabulations récentes hautement médiatisées et confirme la nécessité de combattre l’hypercholestérolémie du cardiaque par un traitement médicamenteux.

Bravo à Michel Corcilius pour cet ouvrage plaisant, facile à lire et particulièrement adapté à l’éducation thérapeutique qu’il nous est fortement recommandé de faire à nos patients.

 

Le Dr Michel Corcilius, diplômé de la faculté de médecine de Strasbourg, s’est installé comme cardiologue libéral ed’abord en Alsace puis, depuis 2005, à la Seyne-sur-Mer (Var). Ancien pigiste au journal d’information médicale Le Cardiologue, puis correspondant sur les ondes Bleu Alsace de 2002 à 2005, il est actuellement membre de la Société Française de Cardiologie et de l’association médico-chirurgicale « Les Rencontres de cœur », tout en poursuivant son activité libérale.

 

Je vous parle du cœur

Auteur : Michel Corcilius

Editeur : Quintessence – Ressources & Santé

Pagination : 256 pages

Prix public : 20,00 €




Marcillac, Domaine du Cros Vieilles Vignes 2009 (Philippe Teulier 12390 Goutrens)

Des années de misères ont façonné les hommes et l’histoire des vignes de Marcillac. Développé par l’abbaye de Conques au Xe siècle, pratiquement détruit par le phylloxera, replanté dans l’entre-deux-guerres, pour atteindre 3 000 ha, puis bouleversé par le grand gel de 1956 et la crise liée à la fermeture des mines de Decazeville, le vignoble avait quasi disparu, réduit à une cinquantaine d’hectares, mais il a pu renaître grâce au travail et à l’opiniâtreté d’une coopérative dynamique et d’une poignée de vignerons indépendants. Cette résurrection fut permise par le réaménagement du vignoble en privilégiant un cépage original, le fer servadou (« qui se conserve » en occitan), dénommé mansois dans l’aveyronnais ou braucol dans le gaillacois, qui donne toute sa typicité à l’appellation. De plus, les hommes ont façonné des terrasses, les faïsses, sur les coteaux très pentus, pour faciliter le rude travail à la vigne, si bien que le Marcillac a été reconnu AOC en 1990 au rebours des autres appellations aveyronnaises : vins de Conques, d’Entraygues, du Fel et d’Estaing (sans Giscard).

Le vignoble de Marcillac, couvrant actuellement moins de 200 ha à une vingtaine de kilomètres de Rodez, bénéficie d’un climat contrasté : hivers très rigoureux dans cette zone de semi-montagne, étés très chauds et ensoleillés grâce à l’influence méditerranéenne. Il se développe sur des coteaux abrupts formant un cirque naturel orienté plein sud autour de la vallée de l’Ady, réalisant ainsi un microclimat très propice au développement de la vigne.

Une culture raisonnée _ En 1982, Philippe Teulier a pris en main le domaine familial du Cros, pour le faire passer progressivement de 3 à 26 ha par location ou achat de vignes âgées sur les meilleurs terroirs, complantées sur des éboulis calcaires et des rougiers (argiles violacées) permiens en sous-sol.

Maintenant secondé par son fils Julien, il pratique une culture raisonnée, traitant très peu, car le fer servadou est bien résistant aux maladies cryptogamiques. Les talus et entre-rangs sont enherbés, entretenus et tondus régulièrement. Ebourgeonnage, taillage, écimage, vendanges au vert limitent les rendements aux alentours de 45 hl/ha. Les raisins, cueillis à bonne maturité manuellement en caissettes, égrappés, sont pressurés par gravité, pour une macération lente de cinq semaines en cuves inox thermorégulées avec une extraction douce par pigeages du chapeau, remontages et délestages.

L’élevage en vieux foudres de plus de 30 ans s’étend sur 18 mois. La mise en bouteille, précédée de très légers collage et filtration, s’effectue au bout de 2 ans.

Habillé d’une robe sombre, pourpre foncé, ce Marcillac Domaine du Cros Vieilles Vignes 2009, 100 % fer servadou, produit par des vignes soixantenaires, est un vin de charme et de plaisir. Succèdent à d’agréables senteurs de fruits rouges, framboise, groseille et de cassis, d’importants arômes d’épices : clou de girofle, noix muscade, surtout poivre qui rappellent fortement la Syrah. La bouche est charnue avec une dominante de fruits noirs ; on apprécie une trame affinée, des tanins fondus et souples, loin de l’image caricaturale collant aux vins de Marcillac, rustiques aux tanins accrocheurs. La finale est concentrée, fraîche, sapide, mentholée. Ce vin très aromatique équilibre parfaitement bouquets et tanins.

Un équilibre qui épouse la cuisine régionale _ Les accords gustatifs avec ce Marcillac sont riches : viandes rouges, grillades de porc, en vieillissant gibiers à poils, telle une épaule de chevreuil aux airelles. Mais il ne faut surtout pas résister au plaisir de lui faire épouser la belle cuisine régionale : petits gris sauce persillade, aligot saucisses, salades de gésiers confits ou de lentilles aux lardons, et surtout tripous, où il résiste bien à la forte saveur de la tripe, ses tanins s’adoucissant et son grain se fondant. J’ai expérimenté un remarquable accord avec un boudin aux deux pommes : la minéralité du vin affronte le gras du boudin, et son fruité dompte l’acidité de la pomme fruit. Ce Marcillac ne se déplaira pas en fin de repas avec les fromages locaux : fourmes, cantal, laguiole, salers.

Messieurs les restaurateurs aveyronnais qui Pilotez de nombreuses et remarquables brasseries parisiennes, qu’attendez-vous pour promouvoir cet excellent vin, dont les prix sont angéliquement doux ?

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Coteaux du Languedoc Blanc Lune Blanche 2010 (Daniel Le Conte des Floris – 34120 Pézenas)

Mais force était de reconnaître que les blancs ne suivaient pas la même progression, certains vignerons affirmant « ex abrupto » qu’il y fait trop chaud et sec, pour produire de bons vins blancs. Cet a priori est battu en brèche par quelques producteurs qui, innovant dans les terroirs et les cépages, peaufinent de magnifiques cuvées, l’une des stars étant actuellement, selon moi, Daniel Le Conte des Floris.

Personnalité attachante, étonnante, fils d’un patron de médecine interne de Besançon, dont l’épouse est également fille d’un chef de service de cardiologie (l’immense Le Dantec pour ceux qui l’ont connu), Daniel Le Conte des Floris a traversé plusieurs vies, avant de trouver son épanouissement dans la viticulture. Diplômé des Mines de Paris, tour à tour, producteur à France Culture, responsable du Centre National du Cinéma, embauché ensuite par la Revue du Vin de France, dont il devint en six ans rédacteur en chef, il décida, ne pouvant plus supporter la vie parisienne, d’assumer pleinement sa passion pour le vin et, après une formation en oenologie à Beaune, parvint à acquérir, en 2000, un certain nombre de parcelles morcelées autour de Pézenas sur un total de 7 hectares.

Daniel, d’emblée, affirme ses fortes convictions : agriculture biologique, maintenant certifiée Ecocert, spécificité des terroirs adaptés à chaque cépage, afin que chaque vin exprime son identité marquée du sceau de la terre, interventionnisme réduit au minimum aussi bien à la vigne qu’à la cave.

Ainsi, il propose des vins racés, frais, d’une grande finesse, non dénués de minéralité et de profondeur. Si ses rouges sont excellents, ses blancs sont réellement magnifiques : Lune Rousse relancée grâce à la complantation de nouveaux pieds de roussanne, Arès et ma préférée, Lune Blanche.

Sur des sols schisteux et argilo-gréseux, cette petite exploitation, plantée peu serrée à 5 000 pieds/ha en taille Gobelet pour Lune Blanche, limite les rendements à 20 hl/ha. La culture, selon les règles biologiques, évite tout produit chimique en dehors d’un peu de soufre, pour lutter contre l’oïdium. Le vigneron ébourgeonne peu, laboure et débroussaille entre les rangs. La vendange, dont la date est décidée sur des analyses physicochimiques, et surtout sur la dégustation des baies, est manuelle en petites cagettes, avec un tri expert lors du ramassage.

Un cépage méconnu _ Pressurage manuel vertical, macération directe en fût avec décantage et débourbage sur 36 h, pas de levurage, sauf exception, élevage en fût pendant un an, puis six mois en cuve inox pour les blancs qui, en 2010, ont été collés et filtrés.

Les vins blancs sont élaborés autour d’un cépage méconnu, bien que magnifiquement adapté au climat : le carignan blanc, dont l’acidité naturelle permet de pousser la maturité. La cuvée Lune Blanche 2010 est composée exclusivement de carignan blanc issu de vignes soixantenaires.

Un magnifique vin charpenté et aromatique _ Annoncée par une robe brillante, jaune or pâle, cette Lune Blanche, aux jambages gras, délivre des arômes complexes, épicés, fruités, où le nez est d’emblée envahi par des senteurs de melon, abricot, pamplemousse, puis des fragrances oxydatives de pomme et de noix, ce qui n’est pas l’effet du hasard, le vigneron reconnaissant jouer, durant l’élevage, avec l’oxydation, en limitant le soufre, pour accroître la dimension minérale et compenser le manque d’acidité de son vin. La bouche est ample, opulente, ronde, marquée d’entrée par des saveurs bourguignonnes d’amande et de brioche, puis affluent des notes exotiques de coing et de fruit de la passion.

D’une longueur grisante, ce magnifique vin charpenté, gras, aromatique, mais demeurant frais et digeste, au grand potentiel de garde, se positionne, malgré sa jeunesse, pour la grande gastronomie.

Des accords riches et variés _ C’est pourquoi les accords avec ce flacon seront riches et variés : en premier, les poissons nobles en sauce, mais aussi noix de Saint- Jacques au poivre blanc, tartare de truite ou de thon à l’huile d’olive, ris de veau poché aux chanterelles. J’ai été émerveillé par sa rencontre avec une barbue au jus de carottes et moutarde à l’ancienne selon Piège, mitonnée par mon épouse. Alain Senderens propose un mariage surprenant avec un filet de canette, figues fraîches et raisin blond, car la marinade imprime au filet une subtilité aromatique que bercent la richesse et les parfums de la Lune Blanche. Pourquoi ne pas réserver les dernières gouttes à un gorgonzola ?

Daniel Le Conte des Floris aime à souligner qu’« il nous a fallu apprendre à désapprendre, car la réalité du Languedoc n’est pas celle des autres vignobles français », mais cet homme intelligent a su très vite s’adapter et il a toute chance avec ses vins blancs de marquer l’histoire du vignoble languedocien. Quelle magnifique reconversion pour l’ancien journaliste ! ■




L’éducation thérapeutique du patient cardiaque

359-360 – Comme le souligne fort justement le Pr Thomas dans sa préface, si Monsieur Jourdain avait été médecin, il aurait fait de l’éducation thérapeutique sans le savoir. Comme la grande majorité des praticiens, les cardiologues ont l’impression voire la conviction de ne pas avoir attendu que soit inscrite dans la loi HPST de 2009 cette désormais fameuse « Education Thérapeutique du Patient (ETP) » pour en faire bénéficier leurs malades à chacune de leurs consultations.
Et pourtant…

Sans devenir un nouveau métier ni trop compliquer notre tâche au quotidien déjà suffisamment remplie par les obligations administratives de tous ordres, il nous faut reconnaître que cette ETP, en cardiologie comme ailleurs, nécessite d’assimiler des compétences nouvelles, voire de suivre une FMC spécifique pour acquérir le savoir-faire nécessaire à sa véritable mise en œuvre.

C’est ce que propose cet ouvrage, dirigé par Bruno Pavy, cardiologue spécialisé en réadaptation cardiovasculaire, qui s’est entouré de médecins, cardiologues pour la plupart, professionnels de santé, et même patients tel le regretté Jean-Claude Boulmer, qui dirigeait l’association « Alliance du Cœur » et ne ménageait pas sa peine pour faciliter les rapports entre médecins et malades, dans un esprit toujours constructif et serein.

L’ouvrage, très documenté, obéit à la construction la plus classique, abordant successivement les différentes situations qui nécessitent de recourir à l’ETP.

En fait, le patient cardiaque en a besoin à pratiquement tous les stades, aigu ou chronique, de ses maladies et la première situation décrite dans le livre est celle de l’éducation thérapeutique aux urgences cardiovasculaires. C’est vrai que l’identification des accès douloureux et les moyens d’y faire face rapidement font partie des tout premiers messages à transmettre pour aider le patient à acquérir ou améliorer son « savoir-faire » ou « savoir-agir ».

L’ETP du patient hospitalisé en cardiologie est un autre élément essentiel, notamment les hospitalisations pour insuffisance cardiaque, particulièrement d’actualité au moment de l’installation du programme PRADO par l’Assurance Maladie. Les auteurs préconisent au décours de la décompensation cardiaque des séances individuelles, préférables aux séances collectives pour raisons d’organisation, et recommandent de les faire pratiquer par des équipes multiprofessionnelles formées à l’ETP, cardiologue, infirmière, kiné, diététicien, attachées ou non au service hospitalier.

Mais c’est durant son séjour en centre de réadaptation que le patient bénéficiera sans doute le plus de l’ETP, car la durée du contact avec les professionnels de santé est propice à la délivrance de messages pertinents sur les situations à risque, la reconnaissance de symptômes d’alerte, le mode de vie ou le contrôle des facteurs de risque.

Naturellement, comme tout processus médical, cette ETP doit être évaluée. Le docteur Pavy propose à cet effet différents programmes, grilles d‘évaluation, voire aide ou contrôle extérieurs, gages d’indépendance et de succès.

Et bien évidemment, c’est au sein du cabinet médical, lorsque se déroule le « colloque singulier », que peut et doit se développer l’enseignement, individuel certes, mais élargi autant que possible au conjoint ou à « la personne de confiance ». Encore faut-il parvenir à dégager le temps nécessaire à la fin d’une consultation déjà chargée ; c’est pourquoi certains commencent à réfléchir à la réalisation de cette ETP au sein de séances dédiées ; mais il faudrait surmonter bien des difficultés techniques et financières. C’est là que l’implication des malades prend tout son sens et que les associations de patients ont un grand rôle à jouer.

Rappeler que la maladie chronique ne va jamais disparaître, remettre le patient au cœur du système en lui permettant d’accueillir des compétences sur sa pathologie, tels sont les principaux objectifs de cet ouvrage qui devrait intéresser médecins traitants, cardiologues et tous les professionnels de santé concernés.

L’éducation thérapeutique du patient cardiaque

Auteur : Bruno Pavy

Editeur : Frison Roche

Pagination : 248 pages

Prix public : 39,00 €




Mieux vivre avec l’apnée du sommeil

358 – Construit comme un traité médical classique, l’ouvrage en suit le plan habituel : définition du Syndrome d’Apnée du Sommeil (SAS), physiopathologie, facteurs de risque précèdent les étapes de son diagnostic, l’énoncé de ses effets métaboliques et ses répercussions sur l’appareil cardiovasculaire, avant d’aborder, en détail, la partie consacrée au traitement.

Ce faisant, l’auteur assène parfois quelques affirmations dont le niveau de preuve peut laisser perplexe. C’est ainsi que l’apnée du sommeil serait la conséquence d’un mode de vie sédentaire, que le stress professionnel ou familial se traduirait par « une difficulté à respirer », ce qui reste à démontrer ; de même certains conseils thérapeutiques (une heure de marche rapide quotidienne, apprendre à jouer de la trompette (!), etc.), dont l’efficacité risque d’être en plus toute relative, ne sont pas à la portée de tous.

Qu’importe…

Au-delà de quelques approximations et petits parti pris, le livre fourmille d’encouragements et de recettes qui aideront le patient à accepter cette maladie ; plus précisément, elles lui feront prendre conscience de la nécessité d’accepter les contraintes d’un traitement prolongé ; car la difficulté de cette affection réside d’abord dans cette prise de conscience : au début du moins, c’est plus le ronflement qui fatigue le ou la conjoint(e) que la somnolence diurne qui fatigue le patient.

A cet égard sont particulièrement utiles les explications, pas trop techniques, que l’auteur énonce avec soin pour faire comprendre combien le SAS peut être pernicieux, sans pour autant être une maladie bénigne.

La partie thérapeutique est fort bien étayée, énonçant les diverses interventions chirurgicales possibles, les soins adjuvants, insistant naturellement sur le traitement princeps qu’est la ventilation en pression positive continue. Ce qui est intéressant et utile, c’est que l’auteur insiste à juste titre sur les difficultés d’acceptation de la technique par le patient, ses principales causes et, de son point de vue, les moyens d’y remédier.

Au passage, certains conseils, tel celui de faire tenir au patient lui-même le masque en s’endormant pour éviter la gêne de la fixation, manquent de réalisme ; mais dans l’ensemble, les « recettes » sont claires et astucieuses et contribueront sans nul doute à améliorer singulièrement l’observance.

Mais au-delà du catalogue complet et argumenté des possibilités thérapeutiques et de leurs indications, l’originalité de l’ouvrage tient à cette foule de détails pratiques qui rendront service au patient comme au médecin soucieux d’être efficace dans sa démarche d’éducation thérapeutique. Tous les cas de figure ou presque y sont abordés, de l’équipement minimum indispensable au patient qui voyage à la composition des repas du sujet en surpoids, en passant par les recommandations habituelles, mais bien argumentées sur le rôle de l’activité physique et la nécessité de l’arrêt du tabac.

Plus inattendu encore est ce chapitre sur « l’environnement du soir » où l’auteur aborde de façon presque touchante la préparation de la nuit et les rituels du coucher avant lequel « l’apnéique » est invité, dans une chambre aménagée avec attention, à la relaxation au moyen de techniques diverses et variées dont le training autogène éventuellement associé à l’écoute de la musique classique.

« Le sommeil est pour l’ensemble de l’homme ce que le remontage est à la pendule » ! Cette phrase de Schopenhauer, l’auteur la reprend à son compte pour bien rappeler en terminant combien sont cruciales les fonctions du sommeil dont la perturbation peut dérégler de ce fait tout l’organisme y compris souvent le psychisme.

C’est dire quelle importance il faut accorder à améliorer ce sommeil, source de réconciliation avec soi-même et au-delà de lutte contre la violence et le ressentiment !

Le cardiologue, de plus en plus confronté à l’apnée du sommeil pour peu qu’il s’y intéresse et pense à la rechercher, ne pourra se contenter de ce livre pour faire le tour de la question ; en revanche, l’ouvrage lui sera fort utile pour prodiguer à son patient tous les conseils avisés qu’il aurait quelque difficulté à se rappeler de son propre chef ; en fait, le plus simple, c’est qu’il le montre à ses patients en leur conseillant de l’acquérir. ■

Mieux vivre avec l’apnée du sommeil

Auteur : Michel d’Anielo
Editeur : Grancher
Pagination : 163 pages
Prix public : 15,00 €




Le nouveau dessin du paysage informatique

357 – Depuis la sortie des premières tablettes, la technique a considérablement évoluée : processeurs plus rapides, mémoires plus importantes, définition des écrans nettement meilleures (notamment pour la dernière génération de l’iPad). Il ne fallait que l’engouement des développeurs qui n’a pas d’égal pour lancer un produit qui n’existait pas il y a seulement… trois ans. Le premier iPad a été annoncé début 2010 par Steve Jobs ([Conférence de presse le 17 janvier 2010 au Yerba Buena Center for the Arts de San Francisco)], trois ans après le premier iPhone. Nous avions déjà annoncé il y a à peine un an que la tablette allait entrer à tous les étages de notre vie. Passe-partout informatique par excellence, la tablette se faufile aussi bien dans les milieux professionnels qu’à la maison, et c’est là toute la force de cette machine. Elle fait tout, tout de suite, et aussi bien, sinon mieux qu’un portable.

Il fait tout… _ L’un des domaines de prédilection de la tablette est sans conteste la lecture. Lire des articles de presse ou consulter ses mails, réserver ses vacances, « skyper » ou partager ses photos, chacun se crée une fonction pour cet objet, confortablement installé au fond de son canapé.

Car c’est là sa seconde force, il nous suit partout cet ustensile. Ou plutôt non, c’est plutôt nous qui le suivons ou le cherchons partout. Car le bougre, il sait y faire : télécommande de télévision, de chauffage ou d’alarme. Il vous permet également d’écouter de la musique, de regarder des films… Vous viviez comment avant 2010 ?

…et pour tout le monde _ La force d’Apple a été de créer un outil capable de plaire à tout le monde, et de servir à tout le monde. Petits et grands y trouverons leur compte, leurs applications, leurs envies. Alors tout naturellement, l’ordinateur portable perd du terrain (tableau ci-dessus), tout comme celui-ci à supplanté le desktop qui prônait fièrement à côté de votre bureau ou sous votre écran, c’était selon. Au lancement de l’iPad, les fabricants de PC ont d’abord considéré qu’il s’agissait de l’émergence d’un nouveau marché en cantonnant la tablette à la consultation de contenu, réservant la partie plus « noble » de l’informatique, la création de contenu, aux PC. Il n’aura fallu que quelques mois pour bousculer ces certitudes. En 2012, ce sont 208 millions d’ordinateurs portables qui seront vendus contre 121 millions de tablettes, en majorité des iPads ([NPD DisplaySearch Quarterly Mobile PC Shipment and Forecast Report.)]. Mais dans cinq ans, le marché des tablettes générera un chiffre d’affaires de 416 millions d’euros contre « seulement » 393 millions d’euros pour celui des PC portables. Le tour est ainsi bouclé, car les différences techniques entre les tablettes et les ordinateurs portables s’effaceront au fil des ans. ■

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