Les enfants incas sacrifiés du volcan Llullaillaco

357 – Christian Ziccarelli – Un volcan inactif

Le mont Llullaillaco est un volcan de 6 739 m localisé dans les Andes, à l’ouest de la province de Salta, le plus haut sommet servant de frontière entre le Chili et l’Argentine. Dès 1952, une expédition chilienne signale l’existence de ruines archéologiques. Une première fouille est réalisée par l’Autrichien Mathias Rebitsh en 1958, suivie en 1971 par celle du Dr Orlando Barvo. Le lieu du sacrifice est localisé en 1974, mais il faudra attendre 1999 pour qu’une expédition, sous la direction de l’anthropologue américain le Dr Johann Reinhard, situe puis exhume les corps et les biens des enfants de Llullaillaco.

Comprendre le rapport des Incas avec la nature

Pour les cultures américaines précolombiennes la nature était considérée comme sacrée, notamment pour les Incas, les montagnes étaient des divinités. Ils construisirent sur les sommets des structures, les sanctuaires des hauteurs, leur permettant d’accomplir leur rite.

Le volcan Llullaillaco a ainsi plusieurs sites reliés par un chemin allant jusqu’au sommet. A 6 730 mètres furent découvertes deux enceintes connues sous le nom de « huttes doubles », un mur semi-circulaire ou « paravent » et enfin un chemin conduisant à une plate-forme cérémoniale circulaire. A l’époque de l’arrivée des conquistadors, les Incas occupaient un large territoire s’étendant jusqu’au Nord de l’Argentine actuelle.

Les enfants de Llullaillaco

Pour leurs rituels et sacrifices, les Incas offraient ce qu’ils possédaient de mieux. La vie des enfants et leurs biens mortuaires constituaient la plus grande offrande. Ont été retrouvés une Petite Fille de six ans, la Demoiselle de quinze ans et un Petit Garçon d’environ 7 ans. Ils sont présentés en alternance dans des vitrines spéciales reproduisant les conditions climatiques de haute altitude.

Devant ces enfants sacrifiés, on reste sans voix, avec un sentiment d’effroi et d’incompréhension.

Le Petit Garçon de 7 ans a été trouvé assis sur une tunique de couleur grise, la tête orientée vers le soleil naissant, les yeux mi-clos. Un manteau brun et rouge couvre sa tête et la moitié de son corps. Il avait les cheveux courts, un bracelet en argent et une parure de plumes blanches soutenue par une corde en laine entourée autour de la tête. Les offrandes, liées au monde masculin, étaient des statuettes anthropomorphes masculines en or, en argent, vêtues de textiles, en miniature, des camélidés (jouant un rôle fondamental dans l’économie inca), un spondyle et des lance-pierres. Plusieurs éléments, dont la déformation de son crâne, les ornements céphaliques avec des plumes et des fleurs, sont le témoin de sa haute lignée.

La Petite Fille foudroyée de 6 ans a été trouvée assise, les jambes fléchies et la tête levée regardant en direction du sud-ouest. Elle était accompagnée d’objets à usage personnel liés au monde féminin, notamment des poteries (jarre, assiettes, plats ornithomorphes décorés de motifs géométriques…), d’un petit sac (Chuspa) tissé en laine de camélidés et de statuettes féminines en or ou en argent, vêtues de textiles miniatures, coiffées de plumes.

Un petit Kero (verre) en bois avec des motifs géométriques entaillés, produit dans tout l’empire inca, servait pour la libation de la chicha (alcool de maïs).

La Demoiselle avait environ une quinzaine d’années. Sur son visage, on trouve des traces de pigments rouges et elle avait des petits fragments de feuille de coca dans la bouche. Elle était probablement « une vierge du soleil » ou Aella, éduquée dans la maison des Elues, un lieu de privilège pour certaines femmes au temps des Incas. Elle était assise, les jambes repliées et croisées, les bras reposant sur son ventre, la tête penchée vers l’épaule droite, la face orientée au nord-est. Elle portait un manteau de couleur sable et sur son épaule droite un unku, un des vêtements les plus caractéristiques et prestigieux de l’empire inca. Comme pour les autres enfants des offrandes miniatures, liées au monde féminin étaient disposées autour d’elle.

La Capac hucha

La Capac hucha ou « obligation royale », qui a lieu lors du mois dédié à la récolte ou en l’honneur de la mort d’un empereur, est un des rituels les plus importants du calendrier inca. Les enfants de tous les villages de l’empire, voire ceux des dirigeants, choisis pour leur beauté et leur perfection physique, étaient envoyés à Cusco.

Les Incas se réunissaient sur la place principale face aux images du Dieu de la création (Viracocha) et d’autres divinités. Après le sacrifice d’animaux, les prêtres et l’empereur inca célébraient des mariages symboliques entre les enfants des deux sexes. Retournant dans leur village où ils étaient reçus et acclamés avec joie, ces enfant se dirigeaient en cortège en chantant vers le lieu des offrandes.

On donnait à boire de la chicha à l’enfant élu, habillé de ses plus beaux vêtements. Une fois endormi, il était enterré avec les offrandes. Ils rejoignaient les ancêtres qui observaient les villages du haut des montagnes. Leur vie offerte servait à assurer à l’empire santé et prospérité, mais aussi à renforcer l’énergie vitale du souverain.

Partant de Cusco, les enfants de Llullaillaco auraient accompli à pied les 1 600 kilomètres qui les séparaient du lieu programmé de leur mort. ■




Château de France 2006 – Pessac-Léognan – B. Thomassin 33850 Léognan

Les vignobles des Graves, les plus anciens du Bordelais, complantés depuis plus de 2 000 ans, furent particulièrement réputés, lorsque le mariage d’Aliénor d’Aquitaine avec Henri Plantagenet en 1154 livra cette province à la couronne britannique pendant trois siècles, ses vins étant exportés massivement et accueillis avec enthousiasme par les Anglais qui y restent toujours très attachés. L’Américain Thomas Jefferson classait, fin XVIIIe, les vins de Graves comme les meilleurs vins de Bordeaux. Mais cette appellation perdit progressivement cette renommée au profit du Médoc. Il faut reconnaître que l’étendue, la diversité et l’hétérogénéité du vignoble, produisant beaucoup de vins légers, sans grande complexité, nuisaient à sa réputation, si bien qu’en 1987, une aire de production Pessac- Léognan, regroupant les terroirs les plus prestigieux, a été délimitée, imposant, dans une optique qualitative, des règles plus strictes : rendements de 45 hl/ha par exemple.

Le nom de Graves caractérise les petits galets polis, charriés depuis le quaternaire par les glaciers et la Garonne depuis les Pyrénées.

Le Château de France est l’un des domaines les plus sudistes de la bande de Pessac-Léognan s’étendant depuis les faubourgs de Bordeaux sur la rive gauche de la Garonne. Il bénéficie d’une bonne exposition sur un des plus beaux coteaux de la terrasse de Léognan, d’un climat doux , protégé des intempéries de l’Atlantique par la forêt des Landes à l’ouest, mais recevant une hygrométrie régulière grâce à l’océan. Le terrain très graveleux repose sur un sous-sol d’argile, d’alios, de calcaires et de faluns.

Le nom prestigieux de Château de France vient, en fait modestement, de l’ancien lieu-dit : le tènement de France, sur lequel fut édifiée une maison de maître à la fin du XVIIe siècle. Cette propriété familiale de 40 hectares, acquise en 1971 par Bernard Thomassin qui, dès le début, entreprit une importante replantation, est, depuis 1996, gérée par son fils, Arnaud, qui poursuit énergiquement les travaux de rénovation des installations et la réorganisation des vignobles. Malheureusement, un incendie, il y a un an, a complètement détruit le chai de vinification, mais sa reconstruction va permettre de moderniser et d’optimiser celui-ci.

La viticulture, raisonnée sur une plantation de 5 à 7 000 pieds/hectare en taille guyot double et simple, d’âge moyen de 45 ans, n’omet pas effeuillage, éclaircissage et vendanges au vert, notamment pour le millésime 2006, dont les mois de juin et juillet furent particulièrement chauds, ce qui permet de limiter les rendements et de fortifier les grappes restantes.

La vendange est manuelle, le tri pendant la cueillette et sur table au chai rigoureux.

La fermentation alcoolique de 7 à 10 jours, suivie de 3 à 4 semaines de macération, s’effectue en cuve thermorégulée à 30-32°, où a également lieu la malo-lactique.

L’élevage en barriques, comportant 40 % de bois neuf, s’étend sur 12 à 14 mois. L’assemblage réunit 60 % de cabernet-sauvignon et 40 % de merlot. Pour finir : collage au blanc d’oeuf, filtration légère avant mise en bouteille.

Annoncé par une robe grenat foncée aux belles irisations violettes, ce Château de France 2006 exprime, à l’ouverture du flacon, une certaine réduction qui disparaît après aération, puis, très vite, le nez est envahi par des arômes typiques des grands Graves : terre calcinée, tabac, bois de cèdre avant qu’apparaissent des notes confiturées de cassis et fumées de réglisse. La bouche harmonieuse, friande, épicée : clou de girofle, muscade, garde fraîcheur et minéralité, les tanins bien présents, mais souples et soyeux, le boisé très prégnant pendant les premières années, mais maintenant bien intégré, aboutissent à un vin de plaisir, souriant, loin de l’austérité des seigneurs médocains ou libournais. Peut-on seulement regretter une finale un peu courte ?

Ce Pessac-Léognan a l’élégance et la suavité aptes à s’accommoder à bien des poissons : lamproie à la bordelaise poireaux confits, sandre au beurre rouge. Mais, comme nombre de Bordeaux, il épousera joyeusement le navarin et le carré d’agneau, l’entrecôte bordelaise aux sarments de vigne, le rôti de veau aux girolles, voire un oeuf cocotte à la truffe noire. Il accompagnera certains desserts : soupe de fruits rouges, miroir au cassis, mais il se hérissera devant le chocolat.

Ainsi, ce Château de France, à l’instar des Graves Pyrénéens doucement polis et arrondis par les siècles, glisse sur la langue et le palais comme une délicate et onctueuse caresse. ■(gallery)




Le labyrinthe de Chartres

356 – Christian Ziccarelli – Le Labyrinthe, tout un mythe _ Originellement, le Labyrinthe est le palais Crétois de Minos où était enfermé le Minotaure. Pour prouver ses droits sur le trône de la Crète dont il était devenu le roi, « Minos demanda aux dieux d’exaucer ses prières. Après avoir dédié un autel à Poséidon et fait tous les préparatifs pour le sacrifice, il demanda qu’un taureau sortît de la mer. Aussitôt un taureau d’un blanc éblouissant apparu, mais tellement impressionné par sa beauté, il l’envoya rejoindre ses propres troupeaux et en tua un autre à sa place ». Pour se venger Poséidon fit que Pasiphaé, la femme de Minos, s’éprit du taureau blanc, si bien qu’elle en eut un fils le fameux Minotaure. Pour éviter le scandale, Minos demanda à Dédale de construire une demeure d’où il ne pourrait jamais sortir, le Labyrinthe. Androgée, un des fils de Minos, alors qu’il se rendait à des jeux funèbres, fut tué dans une embuscade tendue par le roi d’Egée. En représailles Minos exigea que les Athéniens envoient sept jeunes gens et sept jeunes filles tous les neuf ans au Labyrinthe où le Minotaure, les attendait pour les dévorer. Thésée, devant la douleur des parents dont les enfants étaient susceptibles d’être tirés au sort, s’offrit volontairement, comme victime. Ariane la propre fille de Minos eut « le coup de foudre » pour Thésée. Dédale avait donné à Ariane un peloton de ficelle magique qui allait permettre à Thésée à la fois de se rendre au repaire secret du Minotaure pour le tuer, mais aussi de retrouver la sortie du Labyrinthe.

Octogonaux ou circulaires, la plupart des labyrinthes de nos cathédrales nous sont connus grâce à des dessins _ En fait, il s’agit de développer un seul chemin aussi long que possible qui part de l’extérieur et aboutit au centre. Celui de Chartres est constitué par des dalles claires en calcaire de Berchères larges de trente-quatre centimètres, que cloisonnent des bandes de pierre sombre (marbre bleu noir) de huit centimètres. La longueur du parcours est exactement de 261,50 m. A Lucques, on retrouve soigneusement gravé sur un pilier du porche roman de la cathédrale, un labyrinthe « en miniature » rigoureusement identique à celui de Chartres. En fait Le labyrinthe fait partie d’une longue tradition. Le plus ancien du monde chrétien est en Algérie, il date de 328. On le retrouve dans de nombreux manuscrits, ou sur des murs d’église aux quatre coins de l’Europe.

<doc1658|center>

Le dédale, la lieue, le chemin de Jérusalem _ Telles sont les trois autres désignations du labyrinthe. Dédale n’était autre que l’architecte de Minos à qui il avait demandé de construire le Labyrinthe pour cacher en son centre le Minotaure. La lieue correspond à une unité de longueur voisine de 4 km. A pied, il faut environ une heure pour parcourir cette distance. C’est le temps mis par les pèlerins qui le font, encore aujourd’hui, à genoux en récitant le Miserere. Le chemin de Jérusalem est plus énigmatique. Il pourrait être l’équivalent d’un pèlerinage en terre sainte. Le croyant, qui ne pouvait l’accomplir en réel, le parcourait en imagination jusqu’à ce qu’il arrive au centre, aux lieux saints. Il pouvait ainsi obtenir des indulgences.

L’origine de ce tracé peut être recherchée dans la civilisation crétoise, mais il est également possible que la société mégalithique l’ait introduit en Europe occidentale, car dans le musée de Dublin on peut admirer un magnifique labyrinthe mégalithique gravé dans la pierre. Pour le monde gréco-romain, c’est le déroulement de la vie, aboutissant au monde des morts, pour les chrétiens au contraire l’aboutissement, c’est le paradis.

<doc1659|center>

Sans tomber dans l’ésotérisme _ Gravés sur le sol, les labyrinthes sont la signature de confréries initiatiques de constructeurs, expliquant la présence de leurs noms. A Amiens, les portraits de l’évêque et des trois architectes sont incrustés dans la dalle centrale en marbre blanc.

A Chartres, il est curieux de constater que le diamètre du labyrinthe est à peu de chose près égal au diamètre de la rose occidentale. La distance du centre au mur de la façade est voisine de la distance du sol au centre de la rose. Une ligne imaginaire joignant le centre de la rose au centre du labyrinthe serait l’hypoténuse d’un triangle remarquable à la fois rectangle et isocèle…

On retrouve régulièrement les nombres 3 (symbolique de l’esprit), 4 (celui de la matière) et le chiffre 7 (le centre est en face des piles qui divisent les sept travées de la nef en 4+3, il y a également 4 travées dans le coeur et trois dans chaque bras du transept).

<doc1661|center>(gallery)




Coeur et anesthésie

356 – Qu’on en juge : les deux auteurs, Pierre Coriat et Yannick Le Manach, anesthésistes réanimateurs eux-mêmes, se sont entourés, pour rédiger ce traité, de pas moins de 95 rédacteurs, dont 70 anesthésistes-réanimateurs, plusieurs gériatres, des chirurgiens, des pharmacologues, et seulement 2 cardiologues ou du moins recensés comme tels.

A titre d’exemples, le chapitre sur les statines est rédigé par des anesthésistes- réanimateurs, comme celui qui concerne les antiarythmiques, ou même la place des examens complémentaires, ou (mieux encore) celui qui a trait aux techniques ultrasonores (pour parler clair à l’échographie cardiaque ou vasculaire) pour lesquelles l’auteur regrette fermement qu’elles soient vues comme « l’apanage » des cardiologues ou radiologues et demande que la formation à ces techniques soit intégrée au cursus de tout anesthésiste-réanimateur en formation, y compris (tant qu’on y est !) pour dépister d’éventuelles lésions suggérant une endocardite…

Voilà qui devrait faire plaisir au Syndicat des cardiologues qui désespère de voir aboutir un jour sa proposition de former des « sonographers », ou plus précisément de créer un métier de techniciens en cardiologie ; grâce aux anesthésistes, il devrait pouvoir bientôt disposer de collaborateurs efficaces.

Cela dit, l’ouvrage ne manque pas d’intérêt. Sans perdre de temps en introduction, préface ou préambule, on entre tout de suite dans le vif du sujet : les premiers chapitres abordent les modifications hémodynamiques de la période opératoire induites par l’anesthésie générale ou régionale, par la coeliochirurgie, et ses implications sur le monitorage circulatoire, le remplissage vasculaire et l’échographie.

Viennent ensuite les interactions entre médicaments cardiovasculaires et anesthésie : tous les produits ou presque sont abordés, y compris dans la prévention de la maladie thromboembolique veineuse. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’un chapitre entier est consacré à la réduction du risque de l’opéré par l’utilisation périopératoire de l’ivabradine, que l’auteur recommande d’utiliser sur des arguments sans doute fondés, mais qui lui sont personnels puisque, sauf erreur, ils ne semblent pas étayés par des études publiées ou une AMM adaptée.

Les chapitres suivants se veulent tout à fait pragmatiques et concernent l’évaluation préopératoire du risque cardiaque, avec un chapitre que le cardiologue clinicien étudiera d’un peu plus près puisqu’il s’intéresse aux indications de l’électrocardiogramme qui sont d’ailleurs abordées avec précision, sérieux et documentation exhaustive (49 références bibliographiques).

Les deux dernières parties de l’ouvrage sont particulièrement importantes, détaillant les pathologies et complications cardiaques de l’opéré ainsi que leur prise en charge. Il est même question du syndrome de Tako-Tsubo qui serait sur le point de devenir « la » nouvelle préoccupation de l’anesthésiste…

Alors, en définitive : à lire ? _ Oui, certainement, par les anesthésistes qui y puiseront une source importante d’informations théoriques et pratiques de qualité. Et par les cardiologues ? Sans doute aussi, même si certains chapitres sont susceptibles de leur donner quelques démangeaisons.

Coeur et anesthésie _ Auteurs : Pierre Coriat et Yannick Le Manach _ Editeur : Arnette _ Pagination : 846 pages _ Prix : Environ 75,00 €(gallery)




Château de la Tuilerie Eole Blanc 2008 – Costières de Nîmes – Chantal Comte 80900 Nîmes

Le Château de la Tuilerie est un domaine de 70 hectares, complanté pour seulement 10 % en blanc, sis sur la partie la plus ancienne de la formation géologique de la Costière constituée par plusieurs mètres d’alluvions caillouteuses drainées par le Rhône au quaternaire sur la marne argileuse du pliocène. Le sol est pauvre, acide, filtrant, recouvert de sable et galets roulés qui confèrent aux vins, finesse et élégance. Les sous-sols argileux font pousser des vignes, dont l’alimentation en eau et minéraux est limitée contribuant à la faiblesse des rendements et la production de grappes à petits grains, et ainsi de vins concentrés et aromatiques. L’exposition au nord, la ventilation par le mistral sont favorables au maintien d’une bonne acidité et à la synthèse des anthocyanes pour les rouges.

Au Château de la Tuilerie, enherbement, ébourgeonnage, effeuillage sur une taille en cordons de Royat entraînent des rendements très faibles : 20 hl/ha pour la cuvée Eole. L’agriculture est raisonnée limitant les intrants chimiques au strict nécessaire, mais Chantal Comte, l’experte propriétaire, se méfie beaucoup de la mode actuelle pour le bio, et notamment de l’utilisation de métaux lourds, tel le cuivre dans la bouillie bordelaise. La date de la récolte est scientifiquement déterminée par les degrés de maturité alcoolique, et surtout phénolique, et par la qualité des pépins. Les vendanges, là aussi au rebours des tendances actuelles, sont effectuées par une machine perfectionnée permettant un tri extrêmement sélectif des meilleurs raisins, si bien que la table de tri n’est presque jamais utilisée.

Pour la cuvée Eole Blanc, les différents lots, réceptionnés par gravité, sont pressurés pneumatiquement et ébourbés pendant 24 à 48 h à 10 °. La fermentation alcoolique s’opère en fûts neufs à température constante de 18 °, puis l’élevage s’étend pendant au minimum 1 an en barriques de chêne neuves de 220 litres avec un batonnage manuel régulier, pour remettre les lies en suspension et apporter gras et complexité. Les bouteilles, après collage et très légère filtration, mûrissent en cave pendant 6 mois avant commercialisation. La cuvée Eole Blanc n’est produite que dans les grands millésimes, où la qualité des raisins est impeccable, en très faible quantité, environ 4 000 bouteilles, ce qui justifie son prix élevé pour l’appellation. Elle résulte d’un assemblage savant, variable d’une année à l’autre, déterminé par la viticultrice, pour l’année 2008 : viognier 20 %, rolle 10 %, grenache blanc, clairette, roussanne, marsanne.

Son nom aérien rend hommage à Clément Ader, grand-oncle de Chantal Comte, pionnier de l’aviation, qui avait baptisé sa première machine volante Eole, dieu des vents dans la mythologie grecque, et ce n’est pas un hasard, si cette cuvée Eole prenait son envol en 1989, date anniversaire du centenaire de l’aviation !

Chantal Comte a réhabilité, par ce vin d’exception, classé en 2007 par la revue Decanter, parmi les 100 plus grands vins blancs du monde, une bouteille ancienne en verre noir fabriquée au 18e siècle, dénommée « arlésienne ».

Parée d’une robe limpide et brillante jaune or avec des reflets verts, cette cuvée Eole Blanc 2008 exhale de doux parfums de pamplemousse, de bergamotes et de fruits exotiques : ananas, mangue, fruit de la passion, avec quelques notes miellées. La bouche voluptueuse, séveuse, glycérinée exprime, sur une bonne acidité et fraîcheur, une attaque franche sur des notes de pêche blanche, de jasmin et de vanille se poursuivant avec des arômes de brioche toastée et d’épices sur une longueur interminable.

Surprenant à plus d’un titre, ce vin est d’une complexité défiant l’analyse organoleptique classique et, de plus, ses arômes et fragrances se modifi ent continuellement au cours de la dégustation et en fonction des mets proposés. Ainsi, les accords culinaires avec ce vin opulent, rond, mais complexe, peuvent prêter à controverse. Chantal Comte estime qu’il est le compagnon idéal des truffes, de la crème, des champignons et le recommande sur un carpaccio de foie gras, un homard grillé, une belle volaille fermière aux champignons des bois. Personnellement, je suis influencé par les flaveurs méditerranéennes de cet Eole Blanc qui respire les vacances et le marierai volontiers avec des coquilles Saint-Jacques à la provençale, des ravioles aux truffes, mais il ne sera pas heurté par un aïoli ou une bouillabaisse qu’au contraire, il caresse et enveloppe. Il épousera, sans hésitation, des fromages de chèvre affinés et tous desserts à base d’amande et de vanille : crème brûlée, galette des rois, pithiviers.

Mais laissons conclure Chantal Comte : « S’il est culture et mémoire, inventons le vin chaque jour ! S’il est fait d’amour, d’inquiétude et de soins attentifs, il est d’abord source de plaisir ! »




La chapelle Foujita – Reims

355 – Christian Ziccarelli – Une église à nef unique _ Il est vrai que l’extérieur de cette chapelle n’attire pas l‘oeil. Sa construction datant de 1965 est d’inspiration romane. En 1959, à la suite de la conversion de l’artiste au catholicisme et de son ambition à imiter les fresquistes de la Renaissance, son parrain René Lalou, président de la maison de champagne Mumm, lui offre la possibilité de réaliser son rêve : un ensemble religieux autonome. Les travaux débutent sous la direction de l’architecte Maurice Clauzier, les vitraux seront réalisés par le maître verrier Charles Marq, les ferronneries, les sculptures par Maxime Chiquet et Les Frères André. Tout a été conçu par l’artiste, jusqu’à la porte donnant sur la sacristie. Foujita, du mois de juin au mois d’août 1966, alors âgé de quatre-vingts ans, au crépuscule de sa vie, réalise avec une grande virtuosité, et pour la première fois de sa vie, une fresque de deux cents mètres carrés environ. La chapelle dédiée à Notre- Dame-de-la-Paix est bénie le 1er octobre 1966. René Lalou l’offre à la Ville de Reims le 16 octobre 1966. Tsuguharu Fujita et sa femme Marie-Madeleine Kimiyo y reposent ensemble depuis 2009.

Un décor original classique _ Le décor fut réalisé aux pinceaux et non à la brosse, rapidement sur un ciment spécial non sec. Les scènes de la vie du Christ sont disposées volontairement de façon non chronologique.

En entrant à droite on voit successivement, la Nativité, l’enfant Jésus éclairé par le rayon de l’Etoile, le portement de croix, la Cène dans la voûte en cul de four du transept droit et la Résurrection. Au fond de la nef dans l’abside centrale, se succèdent Dieu le Père en majesté, la Visitation, Notre-Dame-de- la-Paix (Kimiyo, sa femme, est représentée à genoux), puis à gauche, au-dessus de la porte de la Sacristie, la pêche miraculeuse, une curieuse Notre-Dame-des-Vendanges (dans un paysage où se dressent la Cathédrale de Reims et la Basilique Saint-Rémi) et les Sept Péchés Capitaux. Sur le mur de gauche, le Christ bénit les malades, puis on peut voir la Descente de Croix et le Baptême du Christ. Enfin, au-dessus de la porte d’entrée, la Crucifixion, la Vierge jeune mère est en blanc, la Vierge de douleur en noir. L’iconographie reprend celle de l’art occidental.

Foujita se représente et fait le portrait de René Lalou, le donateur, selon la tradition des artistes de la Renaissance. Cette fresque est surprenante à plus d’un titre. Foujita allie sa propre tradition picturale, privilégiant le trait, à celle de l’art sacré de l’Occident. Tel un rébus on y retrouve une multitude de petits détails « étranges parfois angoissants, des créatures hybrides, fauves et animales, rappelant peut-être Diego Rivera ou le Douanier Rousseau, des corps et des pendus calcinés, des monstres et des ossements suggérant pour certains observateurs de l’époque les horreurs nucléaires d’Hiroshima et de Nagasaki ». Les références à Bruegel, Botticelli, Dürer ne peuvent échapper à l’observateur et montrent à quel point Foujita recherchait avec obsession la synthèse entre le passé et le présent.

Léonard Foujita (1886-1968) _ Né au Japon, à Tokyo, fils du général Fujita de l’état major impérial, ancien élève de l’Ecole des Beaux-Arts de Tokyo, Tsuguharu Fujita arrive à Paris en 1913. Très rapidement, il devient célèbre, fréquente les artistes de l’Ecole de Paris à Montparnasse (Modigliani, Soutine, Zadkine, Rivera…). Peu connu des Français, il est pourtant l’une des figures marquantes de l’entre-deux-guerres et de ses années folles. Il fréquente le Louvre, s’imprègne de l’art européen, mais reste très attaché à sa culture nippone qui transparaît en permanence dans sa peinture. Dès 1921, il est renommé pour ses tableaux de nus féminins (« Youki, déesse de la neige »). Le Cercle Interallié et la Maison du Japon lui passent commande, il expose en 1928 à la Galerie Bernheim, puis au musée du Jeu de Paume, deux diptyques intitulés « Combats » et « Grande Composition » qui firent sensation. Il découvre dans la décennie suivante les fresques murales de Diego Rivera en Amérique Latine et s’inscrit dans la grande tradition historique. Il se réinstalle au Japon où il reste jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. De retour en France en 1950, il se consacre désormais à l’art sacré européen et notamment il illustre, pour l’éditeur Foret, l’Apocalypse de Saint-Jean avec Dali, Fini, Mathieu Zadkine, Trémois. Le 18 juin 1959 visitant la basilique Saint-Rémi avec son ami Georges Prades (ancien vice-président du Conseil municipal de Paris), transfiguré, il décide de devenir chrétien, mais souhaite être baptisé dans la cathédrale de Reims. Ce voeu sera accompli en novembre de la même année en présence d’une foule de journalistes et de photographes. Il prend le prénom de Léonard en référence à Léonard de Vinci dont il est un grand admirateur. Les dernières années de sa vie sont consacrées à la peinture religieuse, multipliant les madones, pour réaliser le chef-d’oeuvre monumental que nous pouvons admirer à la chapelle Notre- Dame-de-la-Paix à Reims. Foujita est également célèbre pour ses dessins et tableaux de chats qui l’ont accompagné durant toute son activité. Il s’éteint à Zurich le 29 janvier 1968. Outre Reims, vous pouvez le découvrir à Villiers- le-Bâcle où se trouve sa maison atelier aux confins des départements de l’Essonne et des Yvelines. ■




Cœur et travail, ou comment concilier maladie cardiaque et activité professionnelle

355 – Quatre présidents de sociétés savantes ont assuré la préface de l’ouvrage dont le sous-titre « Comment concilier maladie cardiaque et activité professionnelle ? » affiche clairement la volonté des auteurs de s’insérer dans le concret.

De fait, ce livre fourmille d’informations inhabituelles, voire insolites, mais toujours pertinentes, qui améliorent notre culture générale tout en débouchant sur des applications éminemment pratiques :  Connaissez-vous par exemple « l’hypnose contemporaine » dans laquelle l’hypnothérapeute (eh oui !) « conduit le patient vers ses ressources intérieures engrammées dans sa mémoire » ? Savez-vous bien ce qu’est l’EMDR, cette technique qui consiste à faire « revivre au patient victime d’un événement traumatique la scène qui est l’origine de sa souffrance » ? Cela permettrait notamment au cardiologue de traiter le syndrome de stress post-traumatique après une chirurgie cardiaque ou un séjour en réanimation. _ Comment considérez-vous le « coping », ce processus d’adaptation qui permet d’affronter plus sereinement les situations à risque lors de la reprise du travail ?

La faute à l’employeur. Et, last but not least, que penser de la faute inexcusable de l’employeur ? Ce n’est pas un concept fumeux ! Cette faute peut être engagée dès que l’on démontre que l’employeur n’a pas eu conscience du danger encouru par l’un de ses salariés et n’a pas engagé de mesure propre à faire face au risque. C’est ainsi qu’un IDM dont a été victime le rédacteur en chef d’une société de presse (bigre !), lourdement surchargé par son activité professionnelle, a été reconnu comme accident du travail.

Les différentes situations rencontrées. Pour autant cet ouvrage n’a rien de décousu ; il est construit de façon très didactique en plusieurs parties qui abordent les différentes situations rencontrées en pathologie cardiovasculaire.

Le premier thème traite des urgences CV survenues pendant l’activité professionnelle, en soulignant à chaque fois le rôle du médecin du travail qui se doit d’assurer le premier contact médical pour administrer les premiers soins et orienter le patient.

Le chapitre consacré à « la mort subite en entreprise » est à cet égard exemplaire : l’arrêt cardiocirculatoire, rare mais toujours possible sur le lieu du travail, implique évidemment une parfaite connaissance de la chaîne de survie par le médecin du travail ; de même, le rôle et les devoirs de l’entreprise y sont précisés, le Code du travail lui assignant une obligation de sécurité de résultat (matériel de premier secours, défibrillateur et autres).

Les deux parties suivantes traitent du dépistage des pathologies cardiovasculaires par la médecine du travail, de leur prévention et de l’installation d’une prise en charge psychosociale en insistant sur l’importance de la relation stress, coeur et travail.

La partie du cardiologue. Le cardiologue se sentira plus particulièrement concerné par les parties qui traitent de la reprise de l’activité professionnelle du patient cardiaque, avec les aspects légaux qui visent à déterminer l’aptitude, l’inaptitude, la notion de handicap et de pénibilité.

Il trouvera également une source d’informations essentielles sur les chapitres consacrés aux situations particulières du travail à la chaleur, au froid, en altitude ou exposé aux rayonnements électromagnétiques.

En somme, cet ouvrage pourrait rapidement devenir incontournable pour tous ceux qu’intéresse la collaboration indispensable entre le cardiologue et le médecin du travail dans toutes les situations de prévention cardiovasculaire dans le monde du travail comme de reprise d’une activité professionnelle après un accident cardiaque.

A lire… et à conserver dans sa bibliothèque. ■

Cœur et travail _ Auteurs : Bernard Pierre – collectif _ Editeur : Frison-Roche _ Caractéristiques : 387 pages _ Prix : 44,00 €




Imagerie médicale : les pétaoctets dans le nuage

355 – En 2008, l’ARH d’Ile-de-France ouvrait une nouvelle ère dans l’e-santé et la transmission de données en lançant un cloud computing ([Le cloud computing, qui se trouve dans tous les secteurs d’activités, est un concept qui consiste à déporter sur des serveurs distants des stockages et des traitements informatiques traditionnellement localisés sur des serveurs locaux ou sur le poste de l’utilisateur.)]. Mettant à la disposition des différents intervenants, qu’ils soient à l’hôpital, en établissements de santé ou en cabinet de ville, un gigantesque archivage, appelé RSF (Région Sans Film) ou Cloud- PACS ([PACS : Picture Archiving and Communication System, système d’information permettant de traiter et interpréter les images médicales numériques.)], l’ARH répondait à la dématérialisation de l’imagerie médicale. Les médecins devront s’habituer à ne plus réclamer de clichés, mais de les consulter sur écran.

Cette architecture « machine to machine » transmet directement les images dans le cloud et permet de consulter dans un colossal stockage d’imagerie numérique. Et nous voici directement en pleine ère du pétaoctet ([1 pétaoctet = 1 024 téraoctets. 1 téraoctet = 1024 gigaoctets.)], une quantité d’informations qu’il va falloir – et savoir – traiter quotidiennement (Google traite plus de 20 pétaoctets de données par jour) alors qu’on estime à environ 50 pétaoctets la capacité nécessaire à contenir l’intégralité des écrits de l’humanité depuis sa création.

Du pétaoctet au smartphone _ Ce développement numérique poursuit naturellement sa route des terminaux informatiques traditionnels (ordinateur de bureau ou portable) vers les smartphones et autres tablettes. Les professionnels de santé portent un intérêt grandissant pour ces outils, et l’on sait qu’ils vont jouer un grand rôle dans l’avenir. Certaines applications transforment l’iPad en terminal d’imagerie médicale, une révolution dans un secteur particulièrement réglementé. La Food and Drug Administration (FDA) a homologué ([L’homologation se limite à une utilisation hors diagnostic.)] plusieurs applications pour iPad et iPhone, et ce grâce aux nouveaux écrans Rétina qui permettent de se rapprocher des écrans plus sophistiqués, mais avec une facilité déconcertante. ■

LES CHIFFRES

_ ■ 16 500 IRM par semaine sont réalisés dans les hôpitaux les plus importants. _ ■ Une IRM du cerveau représente environ 4 go de données. _ ■ Une IRM 3D pèse environ 16 go de données. _ ■ 700 pétaoctets sont potentiellement à stocker toutes les semaines.

AirStrip Cardiology _ Air Strip Cardiology est une application qui permet de contrôler l’état cardiaque de votre patient directement sur votre iPhone ou iPad de manière quasi instantanée. Un monitoring distance en quelque sorte. _ En plus de proposer la lecture de l’ECG, l’app garde en mémoire l’historique permettant une prise de décision clinique. Elle permet également d’observer fi nement les diagrammes et prendre des mesures. De cette manière des différences infimes mais importantes peuvent être repérées. Cette application a reçu le certificat CE l’autorisation de commercialisation dans la Communauté européenne.

Médicaments 2012 _ Pour ceux qui n’ont pas encore le Vidal dans leur poche ou qui sont réfractaire à payer les 29,99 euros annuels pour se le procurer, il existe une alternative intéressante établie sur la base de données de l’Afssaps et de l’EMA. _ D’une ergonomie simple et intuitive, elle présente le Résumé des Caractéristiques des Produits, les équivalents référents/génériques, la recherche d’interactions médicamenteuses, et différents outils adaptés. L’application ne propose pas de parapharmacie ni de recherche par indication.(gallery)




Domaine Gourt De Mautens Rasteau 2006 – Jérôme Bressy 84110 Rasteau

Je ne peux qu’approuver, ce Gourt de Mautens 2006 est certainement le vin le plus enthousiasmant que j’ai pu déguster depuis le début de cette année, alors que le 2007, honoré par Bettane et Desseauve, s’annonce encore meilleur.

Jérôme Bressy a pris en main le domaine familial, où, jusqu’alors, la vendange était livrée à la cave coopérative, en 1996 à l’âge de 23 ans avec, d’emblée, une obsession : réaliser le plus grand vin possible. Son parcours a été ponctué d’essais, d’erreurs, de changements, de virages. Il est parfois allé trop loin dans la maturité de ses raisins, mais il a persévéré dans son projet, pour produire, dès 2005, des vins de haute qualité affirmant la grandeur et l’originalité du terroir Rasteau méconnu, mais si qualitatif.

Effectivement, ses vignes sur sols d’argiles rouges avec alluvions de Riss et de marnes argilo- calcaires, possédant la capacité de stocker l’humidité et permettant une bonne régulation hydrique, bénéficient d’une belle exposition solaire, plantées en terrasses et coteaux. Les résurgences qui apparaissent après les pluies, sont ainsi à l’origine du nom du domaine : Gourt, trou d’eau, Mautens, par mauvais temps.

Mais Jérôme Bressy a très vite compris que tout commençait par le travail dans la vigne : cultures biologique certifiée, et biodynamique depuis 2008, aucun produit chimique, proscription de tout désherbant, insecticide, pesticide, etc., traitements par tisanes de plantes, poudres de roche, décoctions de soufre à dose infinitésimale. Les vignes sont enherbées, labourées à la charrue, elles portent 3 à 6 grappes par plant en taille gobelet. Les travaux d’ébourgeonnage, d’éclaircissage, de démamage, sans rognage, conduits selon les caractéristiques de chaque pied, limitent drastiquement les rendements de 10 à 15 hl/ha.

Sur la plupart des parcelles, les différents cépages sont plantés en « foule » ; c’est-à-dire mélangés, choix de J. Bressy, pour pouvoir cueillir les raisins à la maturité optimale, non pas en fonction du cépage, mais du terroir et c’est le talent du vigneron qui détermine sur l’observation des pulpes, peaux et pépins, quelle vigne est prête, en allant le plus loin possible dans la maturité des raisins, pour gommer le caractère rustique des tannins inhérents au terroir marneux.

Les vendanges manuelles en caissettes ajourées permettent déjà une sélection sévère à la cueillette, tout ce qui n’est pas digne, je le jette (J. Bressy), complétée par un tri grain par grain sur table à la cuverie.

Jérôme Bressy a fait le choix de ne produire qu’un seul cru grâce à un assemblage savant de 70 % de grenache, 15 % de carignan, tous deux produit par des vignes de 50 à 90 ans d’âge, et de 15 % de mourvèdre, syrah, counoise, vaccarèse. La vinification, en lots séparés, selon les terroirs mariant les différents cépages, des grappes éraflées pour le 2006 (mais non pour les millésimes suivants), bénéficie d’un levurage indigène avec un très léger sulfitage. La macération a lieu en petite cuve de bois pendant 18 jours, après un pressurage pneumatique doux, seuls, les 1ers jus sont gardés. L’élevage sur lies, sans soutirage, s’opère en fonction des lots, soit en foudre de 15 hl, soit en demi-muid de 600 l et, pour certains, en cuve pendant une 1ère phase de 15 mois avant d’être assemblés pour un 2e affinage en cuve béton de 20 mois. L’élevage est donc particulièrement long sur près de 3 ans avant la mise en bouteille par gravité, sans filtration, ni collage. Une attention toute particulière est apportée aux bouchons en fleur de liège.

Ce remarquable Gourt de Mautens 2006 est un monument. Annoncé par une robe velours cramoisi, ce vin aux jambages gras exprime un ample et doux nez de pruneau, de chocolat noir, de kirsch confituré et d’herbes de Provence rôties. Ces imposantes senteurs sont suivies en bouche d’une puissance et d’une richesse superbes, ainsi que d’une profondeur et d’une intensité somptueuses. Une étrange sensation de plénitude envahit la bouche mêlant les nuances d’un bouquet aromatique finement épicé avec des impressions tactiles, veloutées, étonnamment diversifiées.

Ce très grand vin peut se suffire à lui-même et se déguster seul avec quelques brins de Saint-Nectaire.

Mais il s’appréciera aussi bien avec des plats méditerranéens : grillades aux herbes, pintade aux olives, pastilla de pigeon, qu’avec la grande cuisine : tournedos Rossini, lièvre à la royale. A Noël, une oie ou un chapon l’accompagneront avec enthousiasme.

Dès ses débuts, Jérôme Bressy avait cette ambition, « construire vraiment un vin avec une personnalité encore plus affirmée, avec une profondeur, une texture de tannins d’une grande noblesse, une grande longueur, une palette d’arômes très large : le plus grand vin possible » ! Indéniablement, il a atteint son but à moins de 40 ans… ■




Nouveauté : iPhone 5, sans révolution

354 – Qu’elle est loin la keynote de Steve Jobs lors de la Macworld conference 2007 et la découverte d’un appareil qui allait « réinventer le téléphone ». Tout comme l’iPhone 4S qui avait déçu les attentes, le nouvel iPhone 5 ne restera probablement pas dans les mémoires. Aucune révolution technologique malgré un marketing inégalé dans l’industrie avec un seul modèle en vente (contrairement à Samsung qui propose plusieurs modèles). Si ce n’était Apple, on pourrait être satisfait, mais la fi rme à la pomme nous avait habitués à mieux. Le design n’évolue pas, seules quelques particularités font avancer l’appareil à petits pas, et puis c’est tout. Pas de quoi pavoiser donc malgré une puissance accrue (processeur, autonomie, wifi ), un écran légèrement plus grand et un poids revu à la baisse.

Mais on ne le répétera jamais assez, ce qui fait la force d’un iPhone, c’est tout d’abord sa partie développement, applications et OS. En effet, en ayant misé dès le départ sur les développeurs, Apple a su faire de son smartphone un terminal à part entière, indépendant et particulièrement effi cace tant le nombre des applications est important et dont certaines sont très professionnelles dans tous les secteurs d’activités. ■

iPhone pèse 45 % du chiffre d’affaires d’Apple et génère à lui seul 60 % des profi ts de l’entreprise. En 2012, les analystes de J.-P. Morgan estiment qu’Apple devrait vendre 130 millions d’iPhone, et même 170 millions en 2013. Cette année-là, le smartphone vedette de la firme californienne représentera plus de 100 milliards de dollars de revenus pour son concepteur ! (Source : Les Echos)

(gallery)




LifeWatch V : le smart(phone) du futur aujourd’hui

354 – Grâce à l’apparition des smartphones puis à leurs développements rapides, ce sont près de 300 000 applications pour mobiles qui ont été développées avec près de 11 milliards de téléchargements. En 2011, les investissements liés à des projets de santé dématérialisés étaient de 356 millions d’euros.

Côté matériel, par contre, c’est plutôt le désert. Une société de développement médicale israélienne ferait presque figure de « révolutionnaire » avec LifeWatch V, le premier smartphone médical (fonctionnant sous Androïd, mais ressemblant furieusement à un iPhone) qui permet d’effectuer toute une gamme d’analyses généralement opérées en laboratoires. Grâce à plusieurs capteurs intégrés, il est possible de mesurer jusqu’à 7 indicateurs différents : rythme cardiaque, température corporelle, électrocardiogramme, taux de sucre dans le sang, taux d’oxygène, pourcentage de graisses et tension. Malades chroniques (diabétiques…) ou simples utilisateurs pourront suivre leur état de santé d’un simple coup d’oeil.

Les informations relevées seront alors stockées dans un mémoire (Cloud dédié) qui permettra leur suivi. L’utilisateur pourra partager ses résultats avec son médecin.

Plusieurs applications médicales seront également disponibles, par exemple les rappels de prises de médicaments, la présentation de plusieurs menus « spécial régime » ou encore le suivi d’une activité sportive.

Sa mise sur le marché est prévue fin 2012 au prix de 500 à 700 dollars et un abonnement de 10 à 30 dollars par mois pour les services médicaux en ligne.

A l’heure des réductions budgétaires, les avantages de ce smartphone peuvent devenir essentiels tant ils remplacent plusieurs appareils en usage quotidien. ■

||(gallery)




Judith et Holopherne – Artémisia Gentileschi

354 – Christian Ziccarelli – Artémisia Gentileschi, une femme libre et anticonformiste _ En 1916, un historien d’art italien, Roberto Longhi, grand spécialiste du Caravage, nous fait redécouvrir cette artiste majeure du Seicento « la seule femme en Italie qui ait su ce qu’est la peinture, ce que sont les couleurs, les mélanges et autres notions fondamentales… ».

Très recherchées à son époque, les peintures d’Artémisia sont tombées en désuétude au XVIIIe et au XIXe, il faut attendre 1991 pour qu’une première exposition lui soit consacrée à la Casa Buonerroti à Florence. Il y a peu, le musée Maillol à Paris nous présentait une soixantaine de ses oeuvres, notamment Judith et Holopherne , un tableau d’une rare violence.

Un destin stupéfiant ! _ Fille et élève d’Orazio Gentileschi, Artémisia est née en 1593, elle est l’aînée de quatre enfants. Entre la piazza del Popolo et la piazza di Spagna, l’un des coupe-gorge les plus redoutables d’Europe, sculpteurs et peintres de l’Europe entière se retrouvent dans les mêmes tavernes, déambulent en groupes armés, se querellent. Orazio côtoie Michelangelo Merisi dit le Caravage, Carlo Saraceni de Venise. Veuf, Il cache et cloître chez lui Artémisia qui lui prépare ses toiles, brosse ses fonds et termine ses tableaux.

<doc1604|center>

De grande beauté, à 17 ans, elle succomba à la rapacité du collaborateur de son père Agostino Tassi qui la viola. Le scandale éclate en 1612, l’affaire est portée à la cour pontificale, Orazio demande vengeance et réclame justice, il appelle ce viol « mon assassinat ». A l’époque, qu’Artémisia se soit donnée librement ou non importe peu, le déshonneur d’une fille signifiait la mort sociale du père et la fin de toute sa lignée…

Le pape demande une procédure exemplaire, elle doit prouver sa virginité au moment où Agostino l’a forcée. Tout Rome vient témoigner, on la torture en broyant, dans les cordes de la « Sybille », les phalanges de ses mains peintres. Durant les neuf mois du procès, elle ne change pas un mot de sa déposition « c’est vrai, c’est vrai… ».

Finalement, elle eut gain de cause. Une telle épreuve restera gravée dans sa mémoire et influencera toutes ses oeuvres… Elle quitte Rome pour Florence, elle épouse le peintre florentin Pierantonio Stattiesi, pouvant de ce fait continuer à exercer son activité. Elle travaille alors pour le Grand Duc de Toscane, Cosme II de Médicis, devient l’amie du petit- neveu de Michel Ange (Michelangelo le Jeune) et intègre à 23 ans la prestigieuse Accademia Del Disegno qui, pour la première fois de son histoire, accueille une femme.

Couverte de dettes, elle revient à Rome en 1620, affrontant l’hostilité de son père, car elle représente pour lui une nouvelle rivale, gagne Venise en 1627, puis se fixe à Naples où elle s’impose par la force de son art. La date exacte de sa mort reste une énigme, sans doute en 1654, de même que le lieu de son inhumation, l’identification de sa pierre tombale en l’église San Giovanni Dei Fiorentini à Naples demeurant problématique.

Le livre de Judith… _ Judith « la judéenne » ou son équivalent « la juive » est l’une des épouses hittites d’Esaü. Elle est, en fait, surtout célèbre parce que ce nom est celui de l’héroïne du « livre de Judith » figurant uniquement dans la bible « deutérocanonique ». Judith apparaît au second acte du livre, c’est une veuve exemplaire qui vit à Béthulie, belle, riche et vertueuse, estimée de tous.

L’armée assyrienne conduite par Holopherne a mis le siège devant Béthulie, ville frontière de la Judée. Le blocus affame les assiégés, le peuple élu de Dieu, un sacrilège qui demande vengeance. Judith, descendante de la tribu du patriarche Siméon, réclame l’approbation et l’assistance divine pour abattre le coupable. S’il tombe sous les coups d’une simple femme tous sauront que la libération d’Israël n’aura pu venir que de son Dieu.

Sortant de Béthulie, se parant comme pour une fête, resplendissante de beauté, elle marche avec sa servante vers les avant-postes ennemis. Sous le charme et la flatterie, Holopherne est convaincu qu’elle est prête à le seconder dans son entreprise. Au bout de quelques jours, son hôte la croyant sienne, l’invite sous sa tente.

Buvant du vin plus que de raison, ses officiers se retirant discrètement pour les laisser en tête à tête, Holopherne s’écroule sur son lit et s’endort profondément… Judith, saisissant le sabre glissé sous le chevet, coupe le cou du dormeur. Suivie de sa servante, elle porte la tête d’Holopherne dans son sac, quitte le camp des Assyriens pour gagner les portes de Béthulie.

<doc1603|center>

Une scène d’une rare violence… _ Peint à Florence, vers 1512-1514, Judith et Holopherne est d’une composition étonnante. Judith, aidée de sa servante arcboutée sur le thorax d’Holopherne qui tente de se défendre, tranche le cou du général assyrien.

L’enchevêtrement des membres pâles, éclairés par une lumière venue de la gauche accentue le caractère dramatique de la lutte. Aucune autre femme avant elle n’avait peint avec une telle énergie et une telle colère, une féroce impassibilité proche du sadisme. Difficile de ne pas y voir l’image du viol qu’elle vient de subir. Cette chambre ensanglantée évoque la description donnée par Artémisia lors de son procès. Ses peintures ultérieures seront souvent le témoin de ce traumatisme qu’elle venait de subir.

L’influence du Caravage ne fait aucun doute. Quelques années auparavant il avait peint la même scène privilégiant également cet instant le plus violent où Judith décapite Holopherne. ■(gallery)




La Joconde révélée

354 – La Joconde, nul ne le conteste, est le tableau le plus connu et le plus visité de la planète ; c’est dire s’il a été regardé, étudié, photographié, radiographié des centaines et des centaines de fois par les plus éminents spécialistes venus d’horizons divers et variés à tel point qu’on jurerait de bonne foi en avoir percé définitivement le mystère, si mystère il y avait.

Autoportrait travesti de l’auteur pour certains, effigie de Saint Jean- Baptiste pour d’autres, la Joconde paraissait finalement bien identifiée : son modèle n’était autre que Monna (contraction de Madonna qui signifie Madame) Lisa del Giocondo, jeune épouse d’un marchand de soie florentin qui avait commandé ce portrait au peintre avec lequel il était lié. On croyait l’affaire entendue. _ Pas si sûr…

<doc1600|center>

C’est là qu’intervient Thierry Gallier. Ce directeur artistique de presse n’a, comme il se plait à le souligner, aucune formation d’expert en peinture du XVIe siècle.

Passionné comme bien d’autres par la Joconde, il a voulu en afficher face à lui une reproduction, juste au-dessus de son bureau, simplement pour la contempler au quotidien.

C’e st un an avant la publication de son ouvrage qu’il fit les découvertes qu’il va relater dans ce livre.

Intrigué par certaines bizarreries du tableau que, selon lui, le génie universel qu’était Léonard de Vinci ne pouvait avoir introduites que sciemment, il se met à réfléchir sur la probabilité d’une signification cachée, non encore trouvée par tous les exégètes de l’oeuvre.

La révélation

Et c’est un vendredi soir, à 23 heures précises, que l’auteur déclare avoir fait une première constatation : en arrière du tableau, il découvrit qu’existaient non pas un, mais deux paysages différents et décalés dont la signification lui échappait, mais cette première anomalie allait, nous dit-il, déclencher toutes ses recherches.

La révélation lui vint lorsqu’il eut l’idée de séparer en deux le fameux visage, d’abord avec sa main masquant alternativement la moitié gauche et droite de la face, puis plus directement en découpant à la verticale une autre photo du tableau par une ligne passant par l’arête du nez. Aucun doute ! Pour Thierry Gallier, il ne s’agit pas de la même femme, ou plutôt c’est la même, mais à deux âges différents, la Monna Lisa de droite (à droite dans le tableau) étant plus jeune, plus fière, plus « conquérante » que celle de la moitié gauche qui semble abattue et amaigrie !

Bon, c’est déjà intéressant.

Mais après ??

Les suite et fin de la révélation se poursuivent toute la nuit et la journée du lendemain, au cours desquelles l’auteur, faisant pivoter le tableau dans tous les sens, parvient à en décrypter les images et les sens cachés.

Bizarre ? Pourtant, on peut admettre que sa démonstration se tient, même si les conclusions qu’il en tire peuvent à juste titre laisser perplexe. Le tableau représenterait, sous forme codée, mais intégralement représentées grâce au fameux sfumato – cet effet vaporeux que maîtrise si bien le peintre – toutes les étapes du mythe d’Isis et Osiris, mythe particulièrement cher à Léonard qui aurait fait, pour diverses raisons, un voyage en Egypte.

Mais alors, finalement, question suprême : qui est donc réellement cette Joconde, cette femme dont Léonard de Vinci ne voulut jamais se séparer, ne la cédant qu’à la toute fin de sa vie (ou après sa mort, rien n’est démontré) au roi François 1er, qui était son protecteur et son ami ?

La réponse, passionnante, il vous faudra la trouver tout à la fin du livre de Thierry Gallier que je ne saurais trop vous recommander d’acquérir sans tarder.

Bonne rentrée et bonne lecture.

(gallery)




Gewurztraminer « Vendanges Tardives » Grand Cru Zinnkoepfle 2007 – Schlegel Boeglin 68250 Westhalten

Et il est vrai que ce lieu-dit Zinnkoepflé s’épanouit et rayonne sur la « Vallée Noble » de Soulzmatt, ses sommets étant protégés pour leurs faunes et flores méditerranéenne et caspienne. Le terroir marno-calcarogréseux sur une colline pentue orientée plein sud, bénéficiant d’un ensoleillement optimal, d’une faible pluviométrie, d’une protection des vents du nord par le Petit et le Grand Ballon Vosgien, produit de magnifiques vins fi ns et élégants, où le Gewurztraminer a trouvé terre d’élection.

Ayant succédé à son père depuis une vingtaine d’années, Jean-Luc Schlegel pratique une agriculture raisonnée avec le minimum d’intrants chimiques, une fertilisation limitée à de ponctuels apports de composts végétaux. La vigne est enherbée un rang sur deux, avec une taille assez courte en double guyot, un ébourgeonnage et, si besoin, une vendange au vert limitent les rendements.

La vendange est manuelle (obligatoire pour l’appellation vendange tardive) en caissettes. Les raisins surmaturés et botrytisés destinés aux vendanges tardives sont récoltés plus d’un mois après le début des vendanges.

Le pressurage pneumatique par paliers successifs s’effectue pendant 5 à 6 heures sur raisins entiers. La macération en cuves inox thermorégulées nécessite un levurage exogène sélectionné par un laboratoire local. Un double débourbage élimine les débris de rafle. L’élevage en cuve sur lies fines, sans bâtonnage, s’étend sur une dizaine de mois avec 2 ou 3 soutirages, évitant la malolactique. L’ajout de soufre, inévitable pour les vins en surmaturation, est limité. L’élevage se prolonge encore 18 mois en bouteille.

Jean-Luc Schlegel, petit producteur discret et modeste, est injustement méconnu par rapport aux ténors de l’appellation Zinnkoepflé, tel le tonitruant Seppi Landmann, mais je considère qu’il élabore un des meilleurs Gewurztraminer d’Alsace, en particulier en vendanges tardives, lorsque le millésime, comme en 2007, s’y prête. Le Zinnkoepflé VT 2007 Schlegel Boeglin, paré d’une robe jaune or, brillante et éclatante aux jambages gras et épais, développe une finesse et une élégance qui frisent la perfection. Une envolée florale de rose, de pivoine, de fleur d’acacia, fruitée de litchi, de coing, envahit le nez. En bouche, des arômes multiples rivalisent entre eux, veloutés, suaves, pulpeux, caressants et tendres, d’où émergent toujours le litchi, le fruit de la passion, l’abricot confi t rehaussés par des notes mystérieuses d’épices d’orient et de cannelle. La belle acidité de ce vin atténue, en les masquant délicatement grâce à sa fraîcheur, les 80 g/l de sucre résiduel.

L’harmonie subjugue, la caudalie interminable impressionne _ Je reconnais, sans hésitation, le Gewurztraminer du domaine grâce à la prééminence des arômes de litchi, à tel point que le père de Jean-Luc, la première fois où il a goutté ce fruit, s’est écrié : pourquoi l’a-t-on fait mariner dans du Gewurztraminer ? !

Les accords culinaires avec ce nectar sont nombreux et souvent somptueux. A l’apéritif, il accompagne, sans difficulté, les mélanges salés, sucrés, mais sa richesse risque de rendre squelettiques les vins ultérieurs. Il est un compagnon classique du foie gras, bien que les puristes alsaciens lui préfèrent le Pinot Gris. Dans cette région, on a l’habitude de le déguster avec du gibier, notamment le chevreuil aux airelles, mais les épousailles grandioses vont survenir avec une sole ou des quenelles de brochet sauce homardine, des coquilles Saint- Jacques marinées, copeaux de foie gras, émulsion à l’huile d’olive, une blanquette d’agneau, kefta au citron confi t et coriandre fraîche du Crocodile à Strasbourg. Il se complait avec la cuisine chinoise, la plus relevée et épicée, sechouanaise.

Il équilibre, par son acidité, le sucre du dessert, lui donne verticalité et relief : croustillant de pêche à la vanille, mousse aux fruits de la passion ou, plus rustiquement, tarte aux quetsches ou aux poires.

Mais l’accord parfait se fera avec le munster, la rencontre des deux violences, celle du munster fermier et celle de ce vin puissant, se fond en une belle douceur finale. Le Gewurz renforce le côté floral du munster qui, de son côté, rehausse le bouquet du vin. L’explosion est inattendue, l’accord détonnant…

« Last but not the least », les tarifs, pratiqués par le domaine, sont à l’instar de ses vins, d’une douceur angélique. ■




Terre Inconnue Sylvie 2006 – Vin de table S. Creus 34400 Saint-Sériès

Robert Creus, chimiste de formation, ancien bourlingueur, a toujours été un grand dégustateur, connu sur les forums internet pour ses avis très tranchés. C’est en 1996 qu’il se lance dans l’aventure « Terre Inconnue », dans son esprit : joyau à protéger (n’était-ce pas prémonitoire de la série télévisée « Terra Nova » ?), lorsqu’il achète quelques ares de vieux carignans qu’il complètera progressivement par le grenache, la syrah et, plus récemment, tempranillo et serine (cépage rare ancestral de la syrah). Il est maintenant propriétaire d’un petit vignoble de 4 ha morcelé autour de Saint-Sériès au nord de Lunel dans l’Hérault.

Un phalanstère familial _ Le travail s’effectue en famille avec l’aide de ses parents et, en particulier, de Lucien, son père, qui cultive méticuleusement les vignes avec une ferveur de jardinier, ce qui permet à Robert de continuer à travailler à temps partiel à la chambre de commerce du Languedoc. Ce phalanstère familial s’exprime dans la dénomination des cuvées : Los Abuelos, les grands-parents en espagnol, Sylvie du nom de son épouse.

Robert Creus, refusant tout carcan administratif, commercialise tous ses vins sous la simple appellation « vin de table français », mais il faut reconnaître que ses grandes cuvées : Leonie pur carignan, Los Abuelos 100 % grenache, et Sylvie 50 % syrah, 50 % serine ne peuvent prétendre à la classification AOC-Languedoc.

La vigne pousse sur un terroir argilo-calcaire recouvert, sur certains sites, de galets roulés comme à Châteauneuf. La viticulture est raisonnée, mais les Creus refusent les contraintes Bio, désherbant et traitant chimiquement, lorsque cela leur apparaît justifié, une vendange au vert est habituellement effectuée limitant les rendements, généralement à 20, 25 hl/ha et, de façon drastique, à 10 hl/ha pour la cuvée Sylvie. La date des vendanges est soigneusement déterminée par Robert sur la maturité des raisins, et plus encore des pépins, lorsqu’il croque un goût de noix. La récolte, évidemment manuelle, est faite en petites cagettes, pour éviter l’écrasement des grains.

Les grappes, éraflées à 70 %, bénéficient d’un léger sulfitage à la réception. La fermentation par parcelles est longue sur 4 semaines avec remontage manuel, pigeage léger, mouillage quotidien du chapeau.

A la mise en barriques, vins de presse et de jus sont assemblés, l’élevage avec 30 à 50 % de bois neuf pour la cuvée Sylvie est long : 18 à 24 mois, sans soutirage. La mise en bouteille au grès du patron s’opère, sans collage, ni filtration.

Une explosion de saveurs _ Parée d’une robe grenat légèrement trouble du fait de l’absence de filtration, cette « Terre Inconnue Sylvie 2006 », pur syrah et serine, est explosive : des parfums de fleurs dominées par la violette, de cassis, d’épices : poivre blanc, noix de muscade, submergent le nez. La bouche riche, glycérinée, soyeuse exprime des arômes prégnants de cacao et de jus de viande accompagnés par des tanins crayeux serrés, mais d’une finesse voluptueuse. La finale chaleureuse, liée au degré alcoolique, reste fraîche, minérale avec une caudalie impressionnante. Ce vin hors norme, monstre de puissance emballé dans un écrin de taffetas, pourrait, à mon avis, être comparé au mythique Côte-Rôtie La Turque…

En accord avec le Languedoc _ La richesse et l’exubérance de ce vin pourraient faire craindre des alliances difficiles avec les mets, mais délicieuse surprise, il va, au contraire, s’adapter et s’accorder avec de nombreuses préparations et, en premier lieu, la grande cuisine languedocienne : daube gardianne, côte de sanglier aux poires, tripes languedociennes, cassoulet aux fèves. Un faisan Souvaroff aux truffes et foie gras, un lièvre en saupiquet l’épouseront avec délice.

Grâce à ces plats, si le fruité et la structure de Sylvie restent marqués, ses tanins semblent plus fondus, son caractère généreux a tendance à s’effacer, sa composante cacao devient moins imposante.

Mais, plus rustiquement, un poulet aux herbes de Provence, un lapin aux olives, un navarin d’agneau lui feront fête.

Laissons conclure Robert Creus : « à force de critiquer les vins des autres, il me fallait réaliser le mien ». Effectivement, l’essai est un coup de maître et échappe à toute critique. ■

(gallery)




Les Apps de l’été

353 – Vidal du voyageur

Avant de faire ses valises pour se retrouver sous les tropiques ou dans la jungle d’Amérique du Sud jouer les explorateurs du bout du monde, les mêmes questions, récurrentes, se posent : « Ai-je besoin de me faire vacciner pour aller dans mon pays de destination ? » et si oui, « De quel vaccin ai-je besoin ? ». Si certaines maladies sont bien connues, telles la dengue, la fièvre jaune ou la maladie de Lyme, d’autres, plus rares, peuvent échapper à notre vigilance.

Cette application ne se contente pas de préciser de quel(s) vaccin(s) nous avons besoin, elle explique par continent les vaccins recommandés, les problèmes liés au climat et aux transports, les maladies transmises par l’eau, les aliments ou les insectes, etc.

Les vaccins sont répertoriés dans différentes fi ches avec une explication claire et concise, avec la vaccination classique de nos pays, et celles du voyage.

Un répertoire particulier est attribué au paludisme avec les médicaments prescrits dans ce cas là et les conseils comme, par exemple, la protection vis-à-vis des insectes.

Enfin, un dernier répertoire présente par fiche les différentes maladies répertoriées dans les régions du monde : Causes ; Vecteurs ; Répartition géographique ; Saisons ; Symptômes ; Traitements ; Prévention ; Actualités.

Cette application est indispensable pour le voyageur itinérant, néophyte ou pas, médecin ou pas. Elle peut servir de mémo au médecin ou simplement renseigner rapidement le grand public, avant ou après le départ. Application très ergonomique et pratique à utiliser.

Enfin, grâce au GPS, l’App nous guide vers le centre de vaccination le plus proche. Pratique !

Vidal du voyageur _ Version : 1.2 _ Langue : français _ Matériel : iPhone, iPod touch, iPad _ Système : iOS 4.0 _ Editeur : Vidal _ Gratuit

MedEquiv

Réservée aux professionnels de Santé, cette application permet de trouver facilement les équivalences d’un médicament parmi environ 190 000 spécialités référencées dans trente pays. Si vous avez une envie de vous expatrier ou de soigner un patient étranger, MedEquiv pourra vous aider rapidement, la navigation étant simplissime et utilisable hors connexion, ce qui n’est pas toujours le cas dans ce monde connecté.

L’interface est disponible en quatre langues et l’affichage des produits en quatorze langues différentes, mais seulement limité comme cité plus haut, à seulement trente pays.

Les produits peuvent être recherchés par classe ACT, voie d’administration et forme galénique.

Une mention moyenne pour le prix (9,99 euros) pour une application utilisée de façon périodique.

MedEquiv _ Version : 1.0 _ Langue : français, anglais, espagnol, portuguais _ Matériel : iPhone, iPod touch, iPad _ Système : iOS 3.0 + _ Editeur : Vidal _ 9,99 €




La chimère d’Arezzo

353 – Christian Ziccarelli – Un chef d’oeuvre de l’art animalier _ Impressionnante par sa taille, elle fut mise au jour, dans la partie haute de la cité d’Arezzo, en 1553. Datant du Ve siècle avant J-C, la queue inexistante lors de sa découverte est une invention de son restaurateur Benvenuto Cellini. Le monstre, blessé à une patte, garde la tête haute face à l’ennemi qui l’a frappé et dont on peut supposer qu’il s’agissait de Bellérophon, monté sur son cheval Pégase. On retrouve, en effet, ce thème sur un miroir gravé provenant de Préneste et conservé à la Villa Giulia à Rome. De même tradition que la célèbre Louve du Capitole nourrissant les fondateurs de Rome, Romulus et Remus, mais antérieure d’un tiers de siècle, la chimère, d’influence hellénistique, associe réalisme et idéalisme. Par son dynamisme contenu, le jeu tendu des muscles parfaitement modelé, le hérissement de la crinière, la torsion du cou et la férocité de son expression, elle est l’un des plus beaux spécimens de l’art animalier mondial… Ce bronze de qualité exceptionnelle prouve qu’Arezzo fut un centre célèbre de production métallurgique, déjà organisé sur un mode industriel. La cité n’a-t-elle pas fourni au IVe siècle avant J-C, selon Tite Live, des armes et des outils pour l’expédition de Scipion l’Africain !

Les étrusques un peuple fascinant _ Dès la Renaissance, les Etrusques, anciens habitants des collines de Toscane, ont passionné les chercheurs attirés par le mystère de ce peuple aux origines obscures et à la langue énigmatique. Grâce aux recherches de ces quarante dernières années, cette civilisation, à laquelle les Romains empruntèrent tant, est de mieux en mieux connue. Dès l’Antiquité, Hérodote et Denys d’Halicarnasse, historiens grecs respectivement du Ve et du Ier siècles av. J-C, ont été les premiers à opposer à quatre siècles de distance deux thèses différentes sur l’origine des Etrusques. Pour Hérodote il venait de la Lydie en Asie Mineure, pour Denys, c’était des autochtones. « C’est un petit livre de M. Pallotino, l’un des meilleurs connaisseurs de la civilisation étrusque, paru à Rome en 1947, l’origine degli etruschi qui a apporté une petite révolution dans le monde des étruscologues ». Ayant écarté les origines septentrionales (Nicolas Fréret au XVIIIe) et orientales, il proposait une théorie d’autochtonie « relative » qui semble, aujourd’hui, emporter la majorité des suffrages. Quant à la langue, elle ne ressemble à aucune autre. Si l’on sait la lire, les mots gardent encore leur secret.

Un peu d’histoire _ Au cours du IIe millénaire arrivent en Italie, les Indo-Européens. Vers l’an 1000 av. J-C se développe la civilisation villanovienne (de Villanova près de Bologne) en Italie du Nord et en Italie Centrale, notamment à Tarquinia et à Vulci. Au VIIIe siècle av. J-C apparaissent les Etrusques. Pour les partisans de l’autochtonie, les Villanoviens, proto-étrusques, ont mis au point un nouveau système d’écriture. Grâce à un développement constant, ils sont « devenus » les Etrusques. Pour les partisans de la thèse orientale, un contingent « plus civilisé », venant de Lydie, sous la conduite de Thyrennos, en se mêlant aux Villanoviens, les « barbares », a donné naissance à la civilisation étrusque. Dès le VIIe siècle av. J-C leur développement est remarquable. Une intense activité commerciale apparaît en Méditerranée, soutenue par la richesse procurée par les mines de fer et de cuivre (en particulier sur l’Ile d’Ischia). L’Etrurie exporte sa propre céramique « le buchero », une céramique noire caractéristique. Au VIe siècle av. J-C, l’Etrurie devient une grande puissance, les Etrusques occupent le Latium (les Tarquins, originaires de Caere, seront rois de Rome), gagnent le Nord vers la plaine du Pô, s’installent en Corse. Les villes se fédèrent en décapole. Mais dès le Ve siècle av. J-C, la décadence s’installe, Rome prend Veies en 406, c’est le début de la puissance romaine, dès le milieu du IIIe siècle av. J-C, l’Etrurie devient une province romaine.

Les bronziers étrusques La civilisation étrusque n’était pas encore morte que, déjà dans la Rome d’Auguste, les petits bronzes étrusques étaient recherchés par les amateurs d’antiquités. Il est vrai qu’ils étaient exportés dès le VIIe siècle av. J-C. dans toute l’Europe et même à Athènes en pleine période classique, au milieu du Ve siècle av. J-C. Les Etrusques ne manquaient pas de cuivre très présent sur leur territoire, ni d’étain provenant en majorité des îles Cassitérides (les îles de « l’étain » au Nord-Ouest de l’Espagne et en Cornouaille).

Pour la fabrication des statues, ils pratiquaient la fonte « pleine », le bronze en fusion coulant dans un moule réfractaire et la fonte « creuse », par laquelle on ménageait à l’intérieur du moule un noyau dur qui permettait d’obtenir une oeuvre creuse à l’intérieur. Cette dernière technique fut utilisée pour la Chimère d’Arezzo, qui résulte de l’assemblage de plusieurs morceaux ensuite soudés. ■

(gallery)




L’esthétique au masculin – Connaître et choisir les traitements efficaces

353 – Dans ce numéro, Le Cardiologue confirme, s’il en était besoin, qu’il se veut l’apôtre de la parité : après un cahier FMC dédié à la femme hypertendue, voici que l’on vous propose une rubrique consacrée à « l’esthétique au masculin ». Certes, il ne s’agit pas d’un traité de cardiologie, mais les cardiologues ont aussi le droit de se distraire, également celui, si nécessaire, de soigner leur apparence.

Le sous-titre de l’ouvrage « connaître et choisir les traitements efficaces » annonce la couleur dès la première page, voulant signifier qu’il ne s’agit pas d’une quelconque publication de cosmétologie, dont on peut retrouver des extraits plus ou moins croustillants dans les magazines people, mais d’un livre aux prétentions scientifiques solides, qui, certes, s’adresse à un vaste public, masculin de préférence, mais aussi médical ou paramédical.

D’ailleurs, le Docteur Catherine de Goursac, qui en est l’auteur, est installée depuis plus de 25 ans comme médecin esthétique à Paris, avec à son actif de nombreuses publications scientifiques sur le sujet et plusieurs ouvrages grand public consacrés à l’esthétique, la médecine anti-âge et la dermonutrition.

En introduction, l’auteur rappelle l’essor ininterrompu de la médecine et de la chirurgie esthétique chez l’homme depuis le début du siècle, avec pour conséquence l’explosion du « marché de la beauté » qui connaît une croissance de plus de 90 % en 10 ans aux Etats-Unis, avec des prévisions tablant sur une progression annuelle de 11 % jusqu’en 2014.

Et, comme on l’imagine, les enjeux fi nanciers sont colossaux ; 2 chiffres peuvent en donner une idée, le marché des soins cosmétiques pesait 11 milliards de dollars en 2010, et 336 000 injections de toxine botulique ont été réalisées chez l’homme la même année.

Mais, répétons-le, il s’agit avant tout d’un ouvrage scientifique.

Après avoir rappelé, dans un chapitre fort bien illustré et didactique, les particularités de la peau masculine, notamment à cause du rasage, Catherine de Goursac aborde les différentes « pathologies » qui peuvent amener les sujets masculins à consulter le ou la spécialiste de l’esthétique.

L’auteur commence par traiter tout ce qui touche au visage, affections cutanées, cernes, teints « brouillés » mais aussi vieillissement et ses différentes manifestations, essentiellement les rides ; chaque pathologie se voit proposer différentes modalités de prise en charge, de la solution cosmétique à la solution médecine esthétique, en allant jusqu’à la chirurgie proprement dite, lifting, lipolyse ou lipofilling.

L’ouvrage traite ensuite de l’aspect « poils et cheveux » donnant aux passages quelques recettes qui semblent avisées type « cinq conseils malins pour un rasage en douceur » ou « comment savoir si l’on perd trop de cheveux », avec là aussi les solutions évoquées précédemment, cosmétiques, médicales ou chirurgicales. Quant aux préconisations hygiénodiététiques, elles sont systématiquement abordées pour chacune des pathologies.

Mais la partie la plus développée, on pouvait s’en douter, concerne le poids et la silhouette : les différents régimes alimentaires sont passés en revue, détaillés avec leurs avantages, leurs inconvénients et leurs spécifi cités masculines. Et comme ailleurs, les solutions médecine et chirurgie esthétique prennent toute leur part.

En fait, et c’est bien là l’essentiel, Catherine de Goursac veut nous apprendre à vieillir en beauté.

Quoi de plus naturel ?

Un seul petit regret _ Impossible en lisant ce livre de savoir, même de loin, ce qu’il nous en coûterait si d’aventure nous étions tentés par l’une des techniques décrites au fil des chapitres. ■

(gallery)




Le Grand Blanc 2009 Vin de France – Henri Milan 13210 Saint-Rémy-de-Provence

Henri Milan reprit le domaine familial en 1986 et, d’emblée, il choisit de vinifier en respect total avec la nature, fasciné par les vins de Bourgogne, on compare d’ailleurs souvent ses blancs avec les grandes côtes de Beaune. Ses rencontres avec Claude Bourguignon, microbiologiste des sols qui remarqua immédiatement le potentiel exceptionnel des terroirs du domaine et l’amena à la biodynamie, puis avec Eloi Dürrbach, le maître de Trevallon, l’incitèrent à créer des vins originaux et complexes tendant toujours vers l’excellence, où l’harmonie des cépages assemblés par terroirs donnent une finesse et un grain incomparables.

Le rebelle de l’AOC

Mais ce « presque » notaire est un rebelle qui refuse rapidement de se plier aux règles contraignantes et, selon lui, uniformisantes de l’AOC « Baux de Provence », pour faire déclasser toute sa production en « Vin de France », son Grand Blanc du fait de la présence du cépage roussanne ne pouvant d’ailleurs prétendre à l’AOC. Ainsi, dit-il, je peux garder ma liberté et mon libre arbitre.

Le domaine Milan est issu de la rencontre d’une montagne, les Alpilles, et d’un climat particulier propice à une originalité de terroirs due à l’influence méditerranéenne tempérée par une fraîcheur relative grâce à sa situation sur le flanc nord de la montagne permettant des vins plus fi ns, plus fruités, moins solaires que sur le versant sud.

Les vignes, plantées sur des argiles et éboulis calcaires avec un sous-sol de marnes bleues, sont cultivées en biologique éliminant tout intrant chimique, et font l’objet de soins méticuleux avec ébourgeonnage, effeuillage. Les vendanges sont 100 % manuelles. Les raisins non égrappés sont pressurés directement, les fermentations et macérations débutent en cuves pendant 3 à 6 semaines, puis le jus est écoulé en barriques en pleine fermentation par un système de pompe à galets asymétriques, sans levurage exogène, ni sulfitage. L’élevage, pour les blancs, dure 1 an en barriques de 228 litres, puis 1 an en cuves. Une pincée de SO2 est intégrée après la malo-lactique ; mise en bouteille, sans collage, ni filtration.

Le Grand Blanc 2009 résulte d’un assemblage savant de grenache blanc (30 %), chardonnay (30 %), roussanne (20 %), rolle et muscat à petits grains avec un rendement de 40 hl/ha. Paré d’une robe jaune or laiton, dense, un peu trouble liée à l’absence de filtration, ce vin surprend d’emblée par ses arômes de pêche, abricot avec une pointe d’agrume amer, pamplemousse, mandarine, puis des notes d’amande, de frangipane, de verveine et lavande vous subjuguent et vous transportent dans la Méditerranée de la garrigue et des cigales. Après une attaque franche, il inonde le palais d’une belle matière structurée, ronde, gourmande, maîtrisée par une acidité parfaitement intégrée. La finale longue, longue est fraîche, bien enrobée de saveurs sudistes, et d’un fond de tilleul et menthol multipliant les arômes, sans les opposer.

A l’évidence, ce vin encore jeune doit être carafé au moins 1 heure avant le service.

Les accords avec ce vin très riche et aromatique sont très variés, si l’on en croit les spécialistes. A l’évidence, les poissons et crustacés l’adoreront et en tout honneur : la bouillabaisse qui, avec l’iode des poissons, les tomates, les oignons, la rouille, désarçonne nombre de vins blancs ou rosés ; mais la puissance aromatique et l’acidité du Grand Blanc civilisera et flattera le plat réalisant un accord quasi parfait. Les « fans » du Grand Blanc nous proposent d’autres épousailles étonnantes, voire décoiffantes : une omelette aux oursins, un tacos au foie gras, un pot au feu de thon au beurre d’anchois, un risotto Italia au basilic et crème mozzarella, accord du restaurant NoLita à Paris, un poulet aux écrevisses, et, selon la proposition d’Henri Milan lui-même, une grosse volaille fermière peau caramélisée à l’amanite des Césars ou aux ceps.

A la sortie de cette vague de froid hivernal, remontons-nous le moral avec ce grand vin méditerranéen annonciateur du beau temps et écoutons Henri Milan : « mes vins parlent au corps et à l’âme avant de parler à la raison de ceux qui les dégustent ». ■(gallery)




Tanagra – les figurines d’Athènes

352 – Christian Ziccarelli – Un succès fantastique _ Dès les années 1870, ces statuettes en terre cuite colorée, très vite pillées par les fouilleurs professionnels, ont inondé le marché, suite à leur découverte fortuite dans les 8 à 10 000 tombes aux alentours de l’antique cité. Dès lors elles ne cessèrent d’attirer savants et collectionneurs, tant leurs sujets étaient variés et représentatifs d’une époque. Elles ont suscité un engouement extraordinaire, lors de leur révélation au public à l’Exposition Universelle de Paris en 1878. Le Louvre fut le premier musée européen à les accueillir. Ainsi la danseuse Titeux, terre cuite attique du IVe siècle avant J.-C, découverte en 1846, allait connaître un très large succès. Devenues objets de décoration, ces statues vont être une source d’inspiration pour beaucoup d’artistes de la fin du XIXe, Jean Léon Gérôme (huile sur toile : Sculpturae Vitam insufflat Pictura), Théodore Deck (la danseuse Titeux), Camille Claudel, Raoul Larche avec son fameux bronze de la Loïe Fuller((*) Mary-Louise Fuller, dite Loïe Fuller (1852-1929) est une danseuse américaine célèbre pour ses chorégraphies consistant essentiellement à créer des jeux de lumière en mouvement en faisant danser de grands voiles de soie autour d’elle.), Maillol. De nombreux faux virent le jour pour satisfaire le goût des amateurs. Seules des analyses des pigments et la thermoluminescence permettent de les distinguer des oeuvres authentiques.

A l’origine, Athènes… _ La tradition de la terre cuite en Béotie est millénaire. De l’époque mycénienne (XIV-XIIe siècle avant J.-C), à l’époque géométrique (VIII-VIe siècle avant J.-C) puis classique cette région n’a cessé de produire des objets en terre cuite. Toutefois, les premières statuettes de Tanagra, à l’origine d’un nouveau style, ne sont pas nées en Béotie (où plus tard elles seront imitées), mais à Athènes vers 340/350 avant J.-C. Représentant tout d’abord des acteurs de la Comédie, des personnages familiers de la vie quotidienne, les ateliers de l’Agora commencèrent à orner leurs vases de reliefs de plus en plus exubérants, pour se transformer en fi gurines indépendantes en rond de bosse, les «prétanagréennes ». Les premières danseuses entourées de voiles apparaissent, la danseuse Titeux en étant le plus bel exemple. Si la grande statuaire n’est pas étrangère à cette innovation, ces petites statuettes sont d’une grande variété iconographique dominée par la représentation de la femme drapée d’un tissu léger aux plis très travaillés, laissant deviner les formes délicates.

Les Tanagréennes, le mythe d’une certaine beauté féminine (La Tanagréenne est considérée, selon le mot d’Édouard Papet, comme « la Parisienne de l’Antiquité ». « Ne trouvez-vous pas une infi nité de ressemblances, écrit un chroniqueur de l’Exposition universelle, entre cette jeune hétaïre et la Parisienne de nos jours (…). Une Parisienne désavouerait-elle ces gestes coquets et ces draperies qui modèlent le corps en le cachant ? »)… _ Venues d’Athènes, elles seront reproduites par milliers par les artisans de Tanagra pour une destination avant tout funéraire. Parfois retrouvées brisées intentionnellement sans que l’on sache pourquoi, elles sont surtout en argile beige rosé. Les femmes drapées, côtoient des éphèbes, des enfants, des divinités (Dionysos et ses ménades) et des sujets variés issus du théâtre. Deux statues antiques (le portrait du poète tragique Sophocle et la « grande Herculanaise » attribuée à Praxitèle) sont à l’origine des deux types les plus diffusés dans le monde méditerranéen, la Dame en bleu (à l’himation doré à la feuille) et la Sophocléenne. Les vêtements sont le refl et de la mode de l’époque. Le chiton est une tunique en lin, voire en soie sauvage ; cousu, il est maintenu sous la poitrine souvent par une large ceinture rouge. L’himation est le manteau que portent les femmes pour sortir. Les accessoires sont variables : l’éventail, le cécryphale, foulard de tête, la tholia en forme de chapeau pointu protégeant du soleil.

Une diffusion rapide, des questions en suspens… _ Au moment et après les conquêtes d’Alexandre, de Grèce elles vont gagner, la Sicile (Syracuse), la Crête, Chypre, l’Asie Mineure (Cnide, Halicarnasse, Smyrne, Myrina, sites caractérisés par des productions de grande qualité) pour fi nalement disparaître vers 200 avant J.-C.

Toutefois, un certain nombre de questions sont toujours sans réponse. Comment expliquer l’émergence de ces nouveaux types de petites sculptures, vraisemblablement à tort perçues comme les premiers objets décoratifs de l’art antique ? Quelle était en réalité leur fonction ? Au-delà de Tanagra et de la Béotie, comment expliquer l’extraordinaire diffusion de ces statuettes sur les traces d’Alexandre le Grand ? ■

_ _

_ _(gallery)




Manuel d’échocardiographie Clinique

352 – Avec ce pavé de plus de 800 pages, Ariel Cohen et Pascal Guéret nous ont sans doute livré la nouvelle bible en matière d’échocardiographie.

Comme l’indiquent les auteurs dans leur avant-propos, « l’ambition du manuel est de permettre aux praticiens de mettre à jour leurs connaissances pour tout ce qui concerne les applications ultrasonores et l’exploration des principales cardiopathies ».

Vaste programme, rempli dans 59 chapitres, répartis en 11 sections, coordonnées par les 2 auteurs sus-cités et d’autres échocardiographistes prestigieux dont Geneviève Derumeaux et Raymond Roudaut.

Innovation particulièrement intéressante, les auteurs ont inclus, dans un DVD joint à l’ouvrage, plus de 550 vidéos permettant au lecteur d’associer à la lecture de tel ou tel chapitre la visualisation des boucles soigneusement sélectionnées.

Ce manuel obéit manifestement à un plan rigoureusement didactique. La première partie est consacrée aux principes fondamentaux de l’échographie, abordant la dynamique des fl uides, la physique des ultrasons, le doppler tissulaire, l’échographie de contraste et l’échographie 3 D.

Puis sont abordées dans une série de chapitres les pathologies cardiovasculaires successives, de l’exploration du coeur droit aux valvulopathies en passant par les pathologies du myocarde, du péricarde et les cardiopathies ischémiques.

Suivent plusieurs sections qui concernent les situations rencontrées en médecine interne, telles l’insuffi – sance rénale, les chimiothérapies et bien d’autres tout aussi importantes. Le manuel se termine par une cinquantaine de pages consacrées aux cardiopathies congénitales de l’adulte.

Pour aborder avec toute l’expertise nécessaire ces domaines de la cardiologie aussi variés, A. Cohen et P. Guéret se sont entourés d’une pléiade de collaborateurs éminents, par exemple Claire Dauphin, Ghislaine Deklunder, Delphine Detaint, Lamya Drissi, Bruno Gallet, Marielle Scherrer-Crosbie, David Van Craeynest, et tant et tant d’autres impossibles à citer mais tout aussi reconnus.

Inutile de préciser que cet ouvrage monumental s’adresse, comme le souhaitent les auteurs, à un très large public « cardiologues, urgentistes, réanimateurs, anesthésistes »

Félicitations à nos deux amis pour ce travail gigantesque A posséder absolument dans sa bibliothèque. ■

(gallery)




Cahors : Château de Gaudou, Réserve de Caillau 2006 – Durou et Fils 46700 Gaudou

Ce vin aux tanins accrocheurs avait la réputation d’être rocailleux, de « rouler les R » à l’instar des habitants, breuvage des mousquetaires et des rugbymen, mais, début des années 1980, une nouvelle génération de viticulteurs a repris les choses en main, définissant le style d’un Cahors moderne, vigoureux, mais aussi racé et élégant.

Les vignes poussent le long du Lot sur des sols alluvionnaires de graves et sur des grèzes composées d’éboulis calcaires aménagés en terrasse, surplombés par l’exigeant plateau calcaire moins fertile. Elles bénéficient d’un climat océanique, mais aussi soumis aux influences méditerranéennes avec une faible pluviométrie ; le vent d’autan souffle un air chaud et sec qui accompagne les baies jusqu’à leur pleine maturité, la rivière jouant le rôle de régulateur thermique et hydrique. Le plateau calcaire subit des températures plus contrastées permettant des vins plus fi ns que sur les terrasses.

Les vignes du Château de Gaudou, s’étendant sur 35 hectares, plantées sur les troisièmes terrasses les plus élevées, ensoleillées sud, sud-ouest et sur le plateau, bénéficient des meilleurs terroirs. C’est au XVIIIe siècle que Louis Durou s’installe au lieu-dit Gaudou comme vigneron. Depuis le nouveau millénaire, Fabrice Durou, digne héritier de la lignée, incarne le renouveau de l’appellation, restant fi dèle au savoir-faire de ses aïeux, mais en le teintant de modernité.

La viticulture raisonnée évite les intrants chimiques, la vigne est enherbée, l’ébourgeonnage, l’effeuillage et une vendange verte préservent la qualité et limitent les rendements. La récolte de la Réserve de Caillau est purement manuelle avec égrenage, complétée sur la table de tri, pour sélectionner les meilleurs raisins, ce qui aboutit pour cette cuvée 100 % malbec à des rendements étonnamment faibles de 20 hl/ha sur une aire de production très limitée sur 1 hectare. La vinification des raisins frais et entiers est traditionnelle, précédée par une macération en cuve à température contrôlée. Le pigeage régulier est résolument manuel. Le vin est ensuite mis en barrique pour la malo-lactique et l’élevage en fûts de chêne neufs sur lies dure 22 mois. Soutirages et transferts se font par gravité.

Une incroyable structure pour un vin magnifique

Dans le verre, ce Château de Gaudou Réserve de Caillau 2006 reflète une robe très foncée jus de cassis aux reflets violacés. Il délivre des arômes exubérants de fruits noirs, mûre confiturée, cassis, vanille, clou de girofle avec, en rétro olfaction, des notes de cacao, truffes, champignons, jus de viande. La bouche est construite sur une magnifique densité, puissante, précise et raffinée, une fraîcheur mentholée, où le poivre blanc et la cardamome rejoignent la palette aromatique. Les tanins restent gras et soyeux. La finale aux notes de réglisse et de violette confirme l’incroyable structure de ce vin magnifique. A l’opposé des Cahors virils classiques, ce vin révèle une harmonie aristocratique et rappelle l’adage du rugby : « un sport de brutes joué par des gentlemen ».

Les accords mets-vins seront particulièrement riches avec ce flacon. Si les Cahors épousent facilement la roborative cuisine du sud-ouest : magrets, aiguillettes de canard, confits et autres cassoulets, il serait préférable de laisser ces accords aux autres cuvées du Château de Gaudou : Grande Lignée et Renaissance, certes délectables, mais moins racées que la Réserve de Caillau. A elle, les plats à base de champignons et truffes : omelette aux truffes, cèpes à la sarladaise, tourte de cailles aux truffes, rôti de boeuf aux champignons. Elle accueillera avec enthousiasme daube de boeuf, gigot de 7 heures, alouette aux châtaignes. Mais elle s’épanouira avec les grands gibiers : faisan Souvaroff, palombe rôtie, civet de lièvre, côtes de sanglier aux poires. L’accord exceptionnel que j’ai pu réaliser à Noël, fût avec une gigue de chevreuil sauce poivrade : les deux goûts sauvages, celui du vin et celui du plat, s’additionnent, pour faire naître une synthèse merveilleuse, le vin semble moins viandé, prend du gras et de la rondeur, le chevreuil plus moelleux et structuré. La finale aromatique du vin gagne encore en épices et poivre.

Boire l’excellence jusqu’à la lie est le credo de Fabrice Durou, comment ne pas y souscrire ! ■




La Dilettante Vouvray brut, Catherine et Pierre Breton – Les Galichets 37140 Restigne

Les vins effervescents français les plus connus, en dehors du Champagne, sont les Crémants de Loire, Bourgogne, Alsace, la Clairette de Die, la Blanquette de Limoux. On distingue, en fonction de leur concentration en CO2, de façon croissante, les vins perlants, pétillants, puis mousseux.

La vinification des vins effervescents utilise schématiquement quatre méthodes : – la gazéification : injection brutale de CO2 liquéfié dans le vin sec ou moelleux, soit en bouteille, soit en cuve close. Les vins obtenus par cette méthode ont une mousse éphémère à grosses bulles, par lesquelles le gaz s’échappe rapidement ; – la méthode en cuve close amène à rajouter du sucre et des levures au vin sous pression, afin d’obtenir une deuxième fermentation. Le CO2 se dissout dans le vin et permet la formation des bulles. Utilisée pour le cidre et les « Sekt » allemands ; – la méthode rurale ou ancestrale : la fermentation est ralentie par refroidissement dans la cuve, repart et s’achève dans la bouteille. Les résultats en termes d’effervescence sont très irréguliers et le vin n’est pas limpide. Utilisée pour la Clairette de Die et certaines Blanquettes de Limoux ; – la méthode champenoise ou traditionnelle (Voir Cardiologue n ° 327) : après sa fermentation alcoolique, le vin tranquille est mis en bouteilles, où sont ajoutés du sucre et des levures (liqueur de tirage). Les bouteilles sont fermées hermétiquement et une deuxième fermentation démarre produisant du CO2 enfermé et dissout sous pression. A l’ouverture de la bouteille, les molécules de gaz se détendent selon la loi de Mariotte, et passent à l’état gazeux, pour produire les bulles.

Le Chenin blanc, magnifique cépage ligurien, se prête parfaitement à cette méthode. Les arômes fruités sont sublimés par l’effervescence, un long vieillissement en cave avant commercialisation lui apporte finesse et élégance.

Pierre Breton est une personnalité exemplaire de la Touraine, chantre de la culture biologique et maintenant biodynamique, figure de proue d’une génération de jeunes viticulteurs dynamiques et novateurs, il a acquis une réputation internationale grâce à ses Bourgueil, denses, intenses, superbement fruités.

Mais son épouse, Catherine, qui l’assiste expertement, a aussi son jardin secret à Vouvray, où elle possède avec son frère un domaine à Vernou sur Brenne produisant de magnifiques Chenin sur des terroirs en coteaux pierreux composés de substrats de tuffeau et de sols d’argile à silex, dits perruches. Quoiqu’elle ne bénéficie pas encore de l’appellation Bio, elle observe, à l’instar de son mari, les mêmes règles : pas d’engrais chimiques, de désherbants, rendements limités, récoltes manuelles, sulfitage infinitésimal. Le vin tranquille pur Chenin est obtenu par pression lente des raisins, puis passage en cuve du jus pour la fermentation par un levurage indigène naturel. Sans attendre la malo-lactique, le vin est mis en bouteille après ajout de sucre et levure pour la deuxième fermentation, remuage classique, élevage long de 1 an ó sur lattes, dégorgement, pour éliminer le dépôt de levures mortes, compensation par une liqueur de dosage : vin et sucre à 1 g/l, ce qui le ferait classer en Champagne dans les extra-bruts.

Cette Dilettante Vouvray Brut qui n’en a que le nom, car Catherine Breton est une grande professionnelle, mire une robe claire, jaune paille, où dansent des bulles fines, aériennes et persistantes. Le nez très typé Chenin exprime des arômes de pomme verte, de fleur de pêcher, de pamplemousse.

La bouche fraîche, élégante dévoile des saveurs de giroflée, de coing, de fruits secs avec une petite note lactée. Certes, l’ensemble manque un peu de corps et de gras, mais il reste éminemment agréable, vif et désaltérant.

Cette Dilettante effervescente est, à l’évidence, un vin d’apéritif digeste qui ne chargera, ni l’appétence, ni l’estomac. Il pourra accompagner l’ensemble d’un cocktail composé de réductions salées. Il ne se déplaira pas en compagnie de fritures de petits poissons ou de tout produit de la mer avec une sauce au beurre blanc. Son côté lacté pourra probablement le marier avec une panacotta aux fruits ou un fromage blanc au coulis de fruits jaunes.

Crise économique, dette grecque, effondrement des marchés financiers, du CAC 40, foin du Champagne ! Vive la rigueur, si on peut se consoler et passer agréablement les fêtes avec cet excellent crémant de Vouvray… ■




Smartphone et tablette : les nouveaux outils de la pratique médicale

351 – Les chiffres impressionneraient presque si l’objet n’était pas si courant. Imaginez un smartphone il y a seulement trois ou quatre ans. Une ascension fulgurante, grâce à la poussée notamment de l’iPhone et de l’engouement des développeurs d’Apps, a réussi à détrôner le simple téléphone portable de nos grand-mères. La nouvelle génération dite « Y » (comprenez avec les écouteurs) en a pris son parti avec les réseaux sociaux, et autres jeux. Mais au-delà de l’institutionnalisation du grand public, la professionnalisation de cet appareil avec son écran pourtant si petit a réussi à s’imposer de façon exponentielle pour atteindre aujourd’hui des chiffres records.

Selon le baromètre de l’Observatoire des « usages numériques en santé » ([Créé par Vidal, , spécialiste de l’information de référence sur les produits de santé et des services d’aide à la prescription, en association avec le Conseil National de l’Ordre des Médecins)], 94 % des médecins utiliseraient leur smartphone qui serait en passe de devenir « un véritable outil de gestion de leur agenda professionnel (dans un contexte où le nombre de secrétaire est en baisse). » Le dictaphone ne serait pas en reste avec 37 % d’utilisateurs (pratique, on l’a toujours sur soi).

La tablette, le nouvel outil _ La tablette est également de plus en plus populaire dans le secteur médical avec 28 % d’utilisateurs (37 % des utilisateurs de smartphones ont une tablette). Selon une étude réalisée par Manhattan Research ([http://manhattanresearch.com)], les médecins passeraient un quart de leur temps à la recherche d’information et la consultation d’articles, le visionnage de vidéos et l’éducation thérapeutique du patient. Selon une autre étude menée par l’université de médecine de Chicago, 90 % des internes ont utilisé quotidiennement leurs tablettes, 78 % se sont sentis plus efficaces et 68 % ont déclaré réduire les retards dans le processus de soins. Une connexion au serveur de l’hôpital leur a permis un meilleur échange d’informations, une prise en charge de 5 % supérieure et une transmission de dossiers de 8 % supplémentaires. ■

T2A – Tarifs MCO 2012 _ Cette nouvelle application fait suite à la T2A tarifs MCO basée sur les tarifs 2011. Elle présente les tarifs versés aux hôpitaux ou cliniques concernant la prise en charge ou le séjour des patients. Les tarifs sont accessibles par le numéro GHM, GHS ou une caractéristique de la prestation ou de l’hospitalisation. Les données reprises sont celles des arrêtés fi xant les éléments tarifaires des établissements de santé et complétées avec les grandes caractéristiques des GHM en 2010, telles que publiées par l’ATIH, décrites pour chacun des types d’établissements (CHU, CH, CLCC, Cliniques…). Application indispensable et facile d’utilisation pour comprendre et optimiser les facturations à l’hôpital ou en clinique.

T2A tarifs MCO 2012 _ Sortie : 28 mars 2012 _ Version : 3.0 _ Taille : 1,5 Mo _ Editeur : Ruben Belogic-Fernandez _ Langue : français, anglais _ Gratuit

(gallery)




1492, Salvador Dali

351 – Christian Ziccarelli – 1492, une glorification de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb _ Commanditée par Huntington Hartford pour sa galerie d’art moderne à New York, Salvador Dali l’a peinte de 1958 à 1959, chez lui à Port Lligat au nord de Cadaqués. C’est une immense toile de 4,10 m sur 2,65 m. Tirée par un jeune éphèbe, la Santa Maria aborde en terre inconnue. Employant une technique résolument moderne de photogravure, l’image du « Christ en croix », tel qu’il l’a peint en 1951 (aujourd’hui au musée de Glasgow), semble renaître au milieu des hallebardes des soldats espagnols. Le larron à la gauche du Christ est bien visible. Dali explique que c’est en 1950 qu’il eut « cette vision cosmique » : « Dans mon rêve, il s’agissait du noyau de l’atome. Ce noyau a pour moi une signification métaphysique. Il représente l’unité de l’univers, le Christ ». C’est non seulement la conquête de l’Amérique qui est annoncée, mais aussi le triomphe de la religion sur le paganisme. Le jeune homme, porte-étendard foulant le premier le sol américain, n’est autre que Christophe Colomb (repère 1).

L’image de la Vierge est un portrait de Gala (repère 2), Dali s’est également représenté sous l’aspect d’un moine à genoux brandissant un crucifix (repère 3). Ils sont accueillis par un évêque reconnaissable à sa crosse.

Hors de doute, il s’agit de Saint Narcisse (San Narciso), évêque et patron de la ville de Gérone, dont le tombeau oeuvre de Jean (Jean de Tournai ?) a été retrouvé dans l’ex-collégiale Saint-Félix (San Feliu) située hors les murs (repère 4). L’évangélisation de l’Amérique est en marche, mais elle ne se fera pas sans difficultés, des morts parsèmeront son avancée, les croix plantées dans le sol en sont le témoignage. Les faisceaux de lances qui par dizaines occupent la majeure partie de la droite du tableau sont une référence à Diego Rodriguez de Silva y Velasquez (1599-1660), dont Dali est un grand admirateur (repère 5). Elle évoque « La Reddition de Breda », ville hollandaise tombée entre les mains des Espagnols au printemps 1625. Les étendards portent les armes des provinces de l’Espagne. Le drapeau de la Catalogne([Les Barres catalanes forment l’un des plus anciens drapeaux d’Europe, dont l’origine demeure légendaire et remonte au IXe siècle. Au cours d’un combat contre les Normands, l’Empereur franc Louis le Pieux demanda à son vassal le comte de Barcelone Guifred el Pelut de lui venir en aide avec son armée. Après un rude combat qui vit la victoire franque, le comte de Barcelone fut gravement blessé. L’empereur franc, pour immortaliser la bravoure du comte catalan, trempa sa main dans le sang de son vassal et marqua de ses doigts le bouclier, faisant 4 traces rouges. Ces armes héraldiques deviendront par la suite celles des comtes catalans et seront mises en bannière en bureles et non pas en pal.)] est parfaitement reconnaissable au premier plan porté par un homme nu et de dos (repère 6).

Tout en haut du tableau à la verticale du mat de la nef, à peine esquissés, Isabelle la Catholique et Ferdinand d’Aragon reçoivent Christophe Colomb en présence de Saint Salvador. Enfin une pietà couronne l’ensemble. Ces multiples références à la Catalogne prennent leur source à une vieille tradition selon laquelle Christophe Colomb n’était pas un marin génois, mais un juif de Gérone… Dali, dont on connaît l’attachement à sa Catalogne natale, ne pouvait que s’en inspirer ! En fait, c’est un tableau d’histoire glorifiant sa patrie. « Cette synthèse que Dali s’efforce désormais d’effectuer entre les grandes leçons du passé et le siècle de progrès scientifique dans lequel il vit, apparaît en permanence d’oeuvre en oeuvre » ([Dali, The painting of Salvador Dali. Edition du musée de St. Petersburg (Floride). Rober S. Lubar 2003 _ Dali, l’oeuvre peint. Robert Descharnes, Gilles Néret. Editions France Loisirs 2001.)]

Pour réaliser ce chef-d’oeuvre, en moins de six mois, il se fait assister par le peintre Isidor Bea (à son service depuis 1955). Le modèle de Christophe Colomb est Christos Zoas, jeune homme de descendance grecque rencontré par le couple Gala-Dali en 1956 à New York. Il sert également de modèle pour les trois porte-bannières que nous pouvons voir sur le tableau à droite.

Un sens de la provocation inégalé _ Dali a beaucoup peint, a beaucoup parlé. Provocateur, d’une ironie déconcertante, il ne cessera au cours de sa vie de jouer avec les mots. Combien de fois n’a-t-on pas crié « il est fou ». Mais quel génie ! La découverte de sa peinture révèle un fi n coloriste, mais, aussi, un grand maître du dessin. Il a une imagination stupéfiante, il est fréquent de se dire, comment a-t-il pu concevoir une telle toile ? Sa curiosité est insatiable, que vous aimiez ou non sa peinture, il ne laisse pas indifférent.

Une grande figure de la peinture du XXe siècle _ Né le 13 mai 1904, à Cadaqués de Don Salvador Dali Y Cusi, notaire et de Dona Filipa Domenech, Dali fera en permanence référence à son lieu natal, à sa chère plaine de l’Ampuran. Ce sera toujours pour lui le plus beau paysage du monde, avec la côte catalane du cap Creus à l’Estartitt avec Cadaqués au milieu. En 1910, à 6 ans il peint son premier tableau, une vue des environs de Figueras. A dix ans il découvre les Impressionnistes, à quatorze il est subjugué par les peintres « pompiers » notamment Mariano Fortuny, puis par le cubisme. Après avoir étudié les beaux-arts à Madrid, d’abord influencé par le futurisme, Salvador Dal?’intéresse très vite au mouvement surréaliste. Il lui donne une forme graphique totalement originale, fruit de son imagination débordante et influencée par la psychanalyse. En 1929 il expose à Paris. Il rencontre la jeune Russe Helena Diakonova, Gala, qui est alors la femme de son ami Paul Eluard, un poète surréaliste. Dali les invite à Cadaqués.

Pendant ce court séjour, Gala et Dal?’éprennent l’un de l’autre et Gala prend une décision ferme : « Nous ne nous séparerons plus ». Pendant la Seconde Guerre mondiale Gala et Dali quittent l’Europe et vont s’installer en Virginie. L’explosion de la bombe atomique à Hiroshima marque le début de la période « nucléaire » ou « atomique » de Dali, nous sommes en 1945. A la fin de la guerre, il aborde les grands thèmes de la tradition occidentale, puis en 1949 le religieux fait irruption dans son oeuvre. En 1958 et 1959 il s’intéresse aux peintres du passé et notamment à l’oeuvre de Velasquez. L’histoire et la science deviennent la thématique centrale d’une bonne part de ses oeuvres, de grand format pour la plupart. Il peint alors certaines de ses toiles les plus célèbres : Christ de Saint- Jean de la Croix, Galathée aux sphères, Corpus Hypercubus, La découverte de l’Amérique par Christophe Colomb et La Cène. En 1964, il publie Journal d’un génie. En septembre, une grande rétrospective de Dali a lieu à Tokyo. L’année suivante, il publiera des Métamorphoses érotiques, qui est l’un des sommets de la méthode paranoïaque critique. Puis il fait des affi ches publicitaires pour Perrier et pour les chocolats Lanvin. Puis Dali s’intéresse à l’holographie, sa dernière passion fut la peinture stéréoscopique. Il meurt le 23 janvier 1989. ■(gallery)




Pratique de la défibrillation cardiaque implantable

351 – Précis et didactique, le livre ne fait pas l’économie d’un historique bien documenté qui rappelle les bases de la compréhension de la mort subite et de la fibrillation ventriculaire dont la connaissance remonte à la fi n du XIXe siècle, et du concept de défibrillation externe qui ne trouva sa première application chez l’homme qu’en 1947 ; il fallut attendre encore de longues années pour que le docteur Michel Mirowski, dont la vie si romanesque pourrait faire l’objet d’un film, arrive à persuader la communauté scientifique de la validité de ses remarquables recherches sur la défibrillation interne et réalise sa première implantation humaine (le 4 février 1980 à Baltimore).

La première partie de l’ouvrage est consacrée comme il se doit aux indications de l’implantation, séparées de façon pédagogique en prévention primaire et secondaire sur la base des recommandations françaises et de toutes les études qui en sont à l’origine, aux bases physiques et principes de fonctionnement, ainsi qu’aux modalités de la procédure d’implantation.

Sont ensuite détaillées de façon très précise les conditions matérielles et techniques du contrôle de défibrillateur et du programme de suivi, puis sont envisagés de façon exhaustive, pour chacun des cinq constructeurs, les différents marqueurs d’événements, dont la mise à disposition est fortement souhaitable selon les auteurs lors de toute consultation de contrôle de ces appareils.

Une présentation conviviale _ Mais la véritable originalité de l’ouvrage commence au chapitre 8, avec la présentation d’un atlas de 58 cas cliniques – 58 tracés – qui exposent en situation réelle les différents problèmes auxquels doivent éventuellement faire face les cardiologues confrontés à la pratique de la défibrillation interne.

Cette présentation particulièrement conviviale, puisqu’à chaque ECG font face l’interprétation et les commentaires, reste très didactique avec un regroupement des tracés par thèmes et une sélection de tracés de chaque marque de défibrillateur.

Wilhelm Fisher, Stéphane Garrigue, Philippe Ritter, Sylvain Reuter et Pierre Bordachar ont cosigné la rédaction de cet ouvrage, qui met une fois de plus à l’honneur, s’il en était besoin, la cardiologie bordelaise, et qui est sans nul doute destiné à demeurer pour longtemps la référence pour tous les utilisateurs de la technique. ■

SOMMAIRE _ Pratique de la défibrillation cardiaque implantable _ 1. Historique _ 2. Indications _ 3. Bases physiques _ 4. Principes de fonctionnement _ 5. Implantation d’un défibrillateur implantable _ 6. Comment effectuer le contrôle ? _ 7. Les marqueurs d’événements _ 8. Défibrillateurs implantables : atlas _ 9. Conseils pratiques destinés aux patients _ 10. Annexes : Algorithmes de discrimination

_ FICHE DÉTAILLÉE _ Auteurs : Pierre Bordachar, Wilhelm Fischer, Stéphane Garrigue, Sylvain Reuter, Philippe Ritter _ Editeur : Springer _ ISBN : 2817802829 _ Parution : mars 2012 _ Caractéristiques : 280 pages – Format 16×24 cm _ Prix : 65,00 €(gallery)




La santé et le sens de l’humain : Santé, Egalité, Solidarité

350 – On connaît bien Jean-François Mattéi, ancien Ministre de la Santé, professeur de génétique médicale, membre de l’Académie nationale de médecine, ancien ministre de la santé et actuel président de la Croix-Rouge française. C’est à l’occasion de la publication de son dernier ouvrage intitulé « humaniser la vie » qu’il rencontra Claude Dreux, ancien Président de l’Académie nationale de pharmacie, professeur émérite de biochimie, membre de l’Académie nationale de médecine et président du comité d’éducation sanitaire et sociale de l’Ordre des pharmaciens.

Tous deux envisagèrent de concevoir ce livre dans l’espoir que, selon la jolie formule utilisée par Claude Dreux, « l’humanisation de la santé participe à humaniser la vie ».

Ce dernier dresse un constat particulièrement sévère : les progrès scientifiques et technologiques souvent mal maîtrisés deviennent peu à peu une fi n en soi aux dépens du sens de l’humain et de la nécessité de replacer l’individu au centre des préoccupations des soignants, sans renier pour autant les progrès des sciences biomédicales, qui ont tant fait pour la progression de la santé depuis 50 ans.

Jean-François Mattéi n’est pas en reste, qui, dans son introduction, dénonce la déshumanisation de la médecine, en partie liée aux « servitudes techniques » où le « savoir- faire remplace de plus en plus le savoir tout court », mais aussi aux servitudes économiques où la recherche de l’efficience entraîne la médecine « sur les rivages de la maîtrise comptable ».

L’enseignement de l’humanisme aux futurs professionnels de santé _ Pour illustrer leur démonstration, les auteurs ont fait appel à plusieurs personnalités éminentes, connues pour leur approche plus humaniste de la santé, qui formulent au fi l des chapitres une série de recommandations sur les réformes nécessaires, à l’intention des décideurs de notre pays.

Plusieurs thèmes majeurs alimentent leur réflexion.

L’enseignement de l’humanisme aux futurs professionnels de santé, certes en principe déjà dispensé dans les 33 facultés de médecine, doit être abondamment remanié, en modifiant notamment les critères de sélection des futurs médecins, et insistant lors des stages hospitaliers sur les pratiques d’humanisme et de bientraitance des patients.

Il en est de même de l’éducation pour la santé à l’école, où tout reste à faire ou presque, selon les auteurs, notamment sur la connaissance des facteurs influençant la santé, ou la lutte contre les comportements à risque tels le tabac, l’alcool, la suralimentation…

L’un des chapitres les plus emblématiques est sans doute celui qu’a rédigé le Pr Pierre Bégué, sur la vaccination : alors que le bénéfice individuel et collectif des vaccins n’est pas réellement contestable (prévention de la maladie pour la personne vaccinée et diminution ou élimination de la maladie grâce à la généralisation de la protection), la contestation face aux risques connus ou supposés des vaccinations est toujours aussi vive. Là aussi, pour l’auteur, l’information commence à l’école tout autant qu’auprès des médecins et des médias.

Les grands débats de société _ Les autres sujets abordés sont autant de grands débats de société qui touchent à des thèmes aussi primordiaux que sont la prise en compte de la douleur, l’amélioration du niveau des connaissances des troubles mentaux et des toxicomanies, la lutte contre les inégalités sociales de santé, et bien d’autres tout aussi passionnants.

Ce sont les deux auteurs eux-mêmes qui reprennent la plume en fi n d’ouvrage pour dresser une synthèse des recommandations proposées au fi l des chapitres et plaider à nouveau sur la nécessaire réconciliation entre le sanitaire et le social.

On ne saurait trop recommander ce livre à tous ceux qui s’élèvent contre la dérive technocratique de notre système de santé et qui regrettent que nos établissements de soins et parfois nos confrères centrent parfois leur activité sur la maladie plus que sur le malade. ■

(gallery)




Arc et Senans, une manufacture royale du XVIIe siècle

350 – Christian Ziccarelli – Claude-Nicolas Ledoux _ Claude-Nicolas Ledoux, fils de Claude Ledoux, marchand et de Françoise Dominot, naît à Dormans, dans la Marne le 27 mars 1736. Il fait ses études à Paris. Passionné de dessin, il suit les cours d’architecture enseignés par Jacques-François Blondel, et reçoit les conseils de François Trouard, grand admirateur de Palladio, qui avait une prédilection pour les ordres grecs en les adaptant pour créer une architecture originale. Ledoux est l’auteur de nombreuses oeuvres, mais rares sont celles qui sont parvenues jusqu’à nous, citons outre la saline d’Arc et Senans, le château de Benouville, les bâtiments subsistants de l’enceinte de Paris (les colonnes du bureau d’octroi, place de la Nation ; la rotonde de Monceau ; la rotonde de Reuilly ; l’octroi de la Villette…), qui étaient une barrière fiscale et douanière voulue par la Ferme Générale. Il fut un architecte particulièrement inventif, en avance sur son temps.

Il travaille les perspectives avec une utilisation intensive de maquettes. Le nombre d’or pour les proportions entre les pleins et les vides, les colonnes et les entrecolonnements, donne à ses projets des qualités d’invention inédites pour son époque. Pour parfaire son éducation, il voyage de 1769 à 1771 et devient membre de l’Académie en 1773 grâce à la protection de Madame de Pompadour. A la révolution, il cherche désespérément des protections, considéré comme suspect par le tribunal révolutionnaire, il est incarcéré puis finalement libéré sous le Directoire. Il publie un premier volume sur « l’architecture » en 1804, mais il faudra attendre 1847 pour que l’ensemble de ses écrits et plans soit enfin publié en deux volumes (l’architecture de C-N. Ledoux), sa mort étant survenue le 18 novembre 1806.

La saline d’Arc et Senans _ Située dans le département du Doubs en Franche-Comté, entre Besançon et Dole, la saline d’Arc et Senans est un témoignage unique dans l’architecture industrielle. Destinée à la production de sel, elle fut construite entre 1775 et 1779 par un architecte de génie. A l’époque, beaucoup d’écrivains, de philosophes et d’artistes rêvaient d’une cité « idéale » alliant esthétique et bonheur de vivre en son sein. Claude-Nicolas Ledoux, recevant le titre d’inspecteur aux salines de Lorraine et de Franche- Comté en 1771, reprend à son compte cette idée. Il décide que « son usine serait accouplée à une ville d’une conception nouvelle qui intègrerait dans une même harmonie le travail des hommes, mais aussi leur vie sociale et familiale ». Des édifices monumentaux sont disposés en demi cercle. Au centre la maison du directeur est conçue comme un temple classique précédé d’un péristyle imposant. De son lieu d’habitation, il pouvait ainsi brasser d’un seul regard l’ensemble du lieu. « … Il faut tout voir, tout entendre, il faut que l’ouvrier ne puisse se soustraire à la surveillance de ses chefs par la faveur d’un pilier… »( Claude-Nicolas Ledoux : Rapport joint à « ses vues et perspectives »)

<doc1510|center>

Sur les côtés du portail d’entrée sont disposés l’atelier des tonneliers, des maréchaux et diverses habitations pour les berniers (ouvriers du sel), chacun ayant une grande chambre avec cheminée et un petit lopin de terre. Tous les bâtiments sont séparés les uns des autres pour éviter la propagation des incendies. La maison du directeur est en forme de temple dorique, précédé d’un péristyle imposant. Une esthétique originale où les seuls éléments décoratifs sont des urnes disposées sur les façades d’où ruisselle le sel, se figeant comme un morceau de glace. Cette architecture colossale et magnifique(« Claude-Nicolas Ledoux dans son aspiration à rendre les hommes meilleurs et plus heureux, prévoyait dans son projet, non seulement l’installation d’un marché, de bains, de terrains de jeu pour les enfants, mais aussi une maison des plaisirs, sorte de temple phalloïde où seraient étalés les excès de vices pour mieux les fustiger » (1).) est très inspirée de Palladio et de Piranèse. Produire le sel _ L’eau salifère, « la saumure », parcourt deux canaux parallèles dits « saumoducs », faits de troncs de sapin évidés dits « bourneaux » sur une distance de 24 km de Salins (val d’Armour) à Arc et Senans. Emboîtés les uns dans les autres, cerclés par des frettes en fer pour assurer leur solidité, ces canaux restaient toutefois d’une étanchéité toute relative nécessitant de fréquents remplacements. Arrivées dans le bâtiment de graduation, les eaux salifères subissent une première évaporation dans des gouttières. Le sel est ensuite recueilli dans un grand réservoir où il est acheminé vers les bernes (bâtiments des sels). On procède au dessèchement de la saumure dans des poêles par réduction de l’eau durant environ 48 heures. Les cristaux de sel sont ensuite transportés dans un autre bâtiment pour un ultime séchage et être mis en forme soit en grains, soit en pains). Ne l’oublions pas, le sel avait à cette époque une importance capitale, il permettait aux populations de garder les denrées alimentaires et ainsi de se nourrir pour l’hiver. Le roi disposait d’un droit monopole et prélevait sur sa vente un impôt « la gabelle ».

Quand le sel devient symbole _ Dès le début de la civilisation, le sel passa pour une substance mystérieuse dotée de pouvoirs surnaturels. C’est à l’aide du sel extrait des eaux primordiales, barattées par sa lance, qu’Izanagi (divinité masculine japonaise) constitua la première île « centrale » : l’Onogorojima. La vertu purifi catrice et protectrice du sel est utilisée dans la vie courante nippone où sa récolte fait l’objet d’un important rituel. En Egypte, on le répandait à poignées autour d’une place assiégée pour attiser la soif chez les défenseurs. A Sodome et Gomorrhe, pour avoir bafoué son serment, l’épouse de Loth fut changée en statue de sel. Il symbolise aussi l’incorruptibilité, « Le Lévitique » (2,13) fait allusion au sel qui doit accompagner les oblations, en tant que sel de « l’alliance », tout sacrifi ce doit en être pourvu. Consommer ensemble le pain et le sel signifi e, pour les Sémites, une amitié indestructible. Il est, aussi, évoqué dans la liturgie baptismale, comme « sel de la sagesse » et par là même le symbole de la nourriture spirituelle.

Chez les Hébreux toute victime devait être consacrée par le sel. Dans l’Antiquité quand un hôte accueillait un visiteur, il lui offrait sur le seuil de sa demeure un morceau de pain et une pincée de sel en signe de bienvenue. L’absence de sel sur la table des Romains est non seulement une faute de goût, mais aussi un signe de mauvais présage. En Franche-Comté, après les relevailles, les mamans allaient présenter leur nouveau-né à leur voisine. Celles-ci offraient à l’enfant un oeuf signe de santé, une pincée de sel symbole de sagesse. En Bresse, lors de la nuit de la Saint-Jean, les filles jetaient une pincée de sel dans le brasier. S’il se mettait à crépiter, elles étaient assurées de trouver un mari dans l’année. En Franche-Comté et dans le Jura Suisse, le soir de Noël, on disposait sur une table douze parts d’oignon saupoudrées de sel. Les portions sur lesquelles le sel avait fondu indiquaient le mois de l’année où le temps serait pluvieux. On raconte qu’à l’époque de Bernard Palissy, les épouses insatisfaites salaient dans l’ombre complice des alcôves, leurs maris impuissants au bon endroit pour leur redonner vigueur. La salière renversée est considérée comme un signe de malédiction, ce que n’a pas manqué de peindre Léonard de Vinci dans sa célèbre Cène de Milan.




Tous à vos tablettes ! La nouvelle révolution de l’informatique

350 – Le grand atout d’Apple, et de son défunt Président Steve Jobs, c’est ce don d’être visionnaire. La firme à la pomme a su anticiper, grâce à son approche marketing basée sur l’innovation, les besoins des utilisateurs, et imposer ses produits dans notre vie de tous les jours. Souvenez-vous de l’Apple II, premier ordinateur personnel produit en grande série qui a su révolutionner à sa façon l’informatique grand public. Puis sont venus l’iPod, l’iPhone, l’iPad.

L’iPad, dernier-né des réflexions de Cupertino, pourrait donner un sérieux lifting dans les années à venir à l’ordinateur tel que nous le connaissons aujourd’hui. Bien sûr, nous n’en sommes qu’aux versions 2 ou 3, mais les puissances augmentent, les mémoires prennent de l’essor et la communication fait fi de la 3G pour passer à la 4G (La 4G installée dans l’iPad3 fait grand bruit. Les Etats-Unis et l’Europe n’ayant pas les mêmes bandes de fréquence, l’iPad3 tel qu’il est actuellement n’est pas compatible avec les bandes qui seront déployées en France. La prise en charge devrait se faire par une mise à jour. Des précisions seront apportées prochainement.).

L’ère du numérique bat son plein, grâce d’une certaine façon à Apple qui a su créer nos besoins, et donner aux récalcitrants de l’informatique, l’occasion (enfi n) de toucher à la haute sphère d’internet.

Une copie des années 1990

Car ce qui se passe dans le marché des tablettes aujourd’hui n’est qu’une copie de ce nous avons vécu depuis les années 1990. Le PC de bureau réservé aux sociétés a investi nos domiciles, et les tablettes vont à leur tour se charger d’envahir nos maisons.

Car les tablettes nous proposent de nouveaux usages, à l’instar des smartphones qui servent bien plus à se servir des applications qu’à téléphoner. L’immense avantage des tablettes est simplement la mobilité, l’ergonomie et la récupération aisée des informations. On retrouve en quelque sorte les concepteurs qui ont voulu créer l’informatique facile pour les incultes du clavier, ceux qui n’auraient jamais cru un jour pouvoir surfer. Et tout cela va bien plus loin, car ils pourront également regarder avec aisance leurs albums photos, piloter leur écran de télévision, voir la météo ou la Bourse, lire des revues en les téléchargeant directement, etc., et ceci avec une facilité déconcertante.

Le réveil des dinosaures

Apple a finalement réveillé tout le monde depuis la sortie de sa première tablette (on pourrait d’ailleurs pousser la réflexion en se disant que la première tablette était l’iPhone lui-même). Les autres constructeurs se sont engouffrés dans la brèche, avec plus ou moins de bonheur et d’innovations ; les éditeurs de jeux, de livres, de musique, ont également suivi, car le marché est gigantesque. Le futur est à leurs pieds. Libération des contraintes d’impression et de distribution, rapidité de mise en place, l’information devient bien plus rapide et change la donne du monde tel qu’on le vit actuellement.

Alors ces tablettes, me direz-vous ? que valent-elles comparées aux ordinateurs portables ou de bureau ? La réponse n’a pas franchement de valeur, car tout dépend de l’usage dont vous allez en faire. Pour les fonctions de base que sont le mail, la consultation de sites, la lecture de vidéo, le visionnage de photos… la tablette est parfaitement adaptée (c’est-à-dire l’usage courant). Elle vous suit partout, est solide, ne subit pas les contraintes physiques des disques durs, a un système dédié et stable. En la connectant à vos propres appareils personnels (télévision, chaîne hifi , instruments de musique…) via wifi ou Airplay ([Airplay est le système de communication sans fil d’Apple.)] (Denon, entre autres, communique via Airplay), votre tablette devient la source principale de votre maison. Ne manquent plus que la chaudière ou l’alarme (mais ça existe déjà chez Somfy) et vous voilà devant une domotique personnalisée et extrêmement puissante.

La force est avec elle

La force de la tablette est qu’elle peut convenir à tous les membres d’une même famille, chacun ayant ses propres applications. Dès le mois prochain, nous vous proposerons un tableau des différentes marques afi n de vous repérer dans ce qui commence à devenir une pléthore de matériel et d’applications.

Les applications

Les constructeurs, Apple en tête, ont pris les devants de la scène en proposant leurs applications via leur propre store (Apple-Store, Android Market, Archos Appslib, etc.). Il faudra faire attention à l’offre, car vous dépendrez d’elle pour le futur de votre usage. Archos par exemple, en voulant créer sa structure, a eu bien du mal à générer du fl ux de qualité au départ, malgré l’appel fait aux développeurs. Apple, toujours elle, caracole en tête avec un nombre impressionnant d’Apps. Elle a l’immense avantage d’avoir été la première (toujours cette idéologie de la vision du futur) à avoir créé l’AppleStore pour un certain… iPhone. ■

(gallery)




Les cépages oubliés : Gamay de Bouze 2010 – Henry et Jean-Sébastien Marionnet 41230 Soings-en-Sologne

«Le cercle des cépages disparus », ainsi pourrait s’intituler la quête d’Henry Marionnet, vigneron déterminé, releveur de défi s depuis plus de 30 ans, chantre de l’expérimentation et de l’innovation dans la viticulture tourangelle.

Sa passion pour la recherche bachique et l’amour qu’il porte à ses vignes, l’ont amené tour à tour à prôner les cultures franches de pied, sans porte-greffe : Vinifera, les vinifi cations en macération non soufrée : Première Vendange, et la résurrection de cépages oubliés en Touraine : le côt, malbec des bordelais, le romorantin (voir Le Cardiologue 339), dont il produit une cuvée à partir de vignes préphylloxériques de plus de 150 ans : Provinage à se damner et le Gamay de Bouze, objet de cet article. Henry Marionnet qui a laissé progressivement son fi ls, Jean-Sébastien, prendre les commandes, exerce sur le territoire de la Charmoise, aux confi ns de Touraine et Sologne, bien nommée grâce à cette douceur ligérienne chantée par Du Bellay.

Ses vignes plantées sur des sols argilosiliceux, dites « perruches » de 60 hectares, situées sur les terres les plus hautes entre la Loire et le Cher, bénéfi cient d’un climat continental privilégié, protecteur contre le gel, particulièrement propice au mûrissement des Gamay et Sauvignon.

Des vins d’un fruité sans pareil

Henry Marionnet accorde une importance extrême à la qualité de ses vignes cultivées selon les principes de la lutte raisonnée évitant les apports chimiques. Un ébourgeonnage et une vendange verte en août limitent les rendements en association avec un effeuillage optimisant le développement des pigments et tanins. Les grappes sont vendangées à la main et rigoureusement sélectionnées lors de la cueillette, ce qui permet un transport très rapide vers la cuverie, sans passer par une table de tri. La récolte est ainsi placée dans des caissettes peu profondes évitant l’écrasement des grains et le risque d’oxydation.

Les raisins non égrappés, non foulés, non pressurés sont fermentés dans des cuves inox saturées de gaz carbonique à température contrôlée de 30°. Dans cet environnement, sans oxygène, la fermentation s’effectue sur des raisins entiers, sans recours au SO2, sans levurage et sans chaptalisation (si le millésime le permet). Après décuvage et pressurage, les fermentations alcooliques et malolactiques se terminent rapidement. Les deux jus de presse et de goutte sont assemblés. La mise en bouteille est réalisée au bout de 4 à 5 mois. Cette méthode originale imaginée par Henry Marionnet, dite « macération carbonique intracellulaire » permet des vins d’un fruité sans pareil. Ainsi, Henry Marionnet produit une gamme de vins rouges de Gamay à jus blanc fruité, frais, plus accomplie et certainement plus naturel que la plupart de ceux du Beaujolais. Mais il s’est passionné pour le Gamay de Bouze, Gamay à jus rouge, dit « teinturier », cépage d’origine bourguignonne cultivé à la fi n du XVIIIe siècle à Bouze-lès-Beaune, ayant connu un grand succès dans la vallée du Cher avant son rejet de l’appellation Touraine par l’INAO début 1980. Alors que cette variété avait pratiquement disparu, H. Marionnet a pu en retrouver par hasard une parcelle, pour la ressusciter, mais il ne peut la commercialiser que sous l’appellation « Vin du pays de Loir et Cher ».

Un vin spectaculaire d’autrefois

La robe de ce Gamay de Bouze 2010 d’emblée impressionne : foncée, presque encre avec des reflets violacés. Ce vin dense exhale des arômes de fruits noirs : cassis, mûre, myrtille avec une petite note de réduction de sous bois. On redécouvre un vin spectaculaire d’autrefois avec sa force et son élégance. Ses tanins très présents, mais ronds et harmonieux, offrent une densité et une structure impressionnantes et ne se comparent à aucun autre Gamay existant. Le palais est envahi par des notes fraîches, pures et harmonieuses de fruits noirs, de violette avec une finale vive, épicée et poivrée.

Ce vin complexe permet des mariages contrastés. Délaissant les charcuteries tourangelles, il s’accordera mieux avec des viandes en sauce, du lapin sous toutes ses formes : au romarin, à la moutarde, en gibelotte, pourquoi pas avec un petit gibier : caille farcie, faisan à la vigneronne. Une épaule de veau farcie, un petit salé aux lentilles arrondiront ses tanins. Il s’épanouira sans contestation avec une tarte aux raisins ou un clafoutis aux cerises. Ce vin jeune et fringant doit être servi frais 12° à 13°. Il aurait une très longue garde, d’après les Marionnet, mais, dès maintenant, il est délectable et proposé à un prix particulièrement sympathique (moins de 10 euros).

Sous une apparence « paysanne », anobli par la force et la justesse du fruit, ce vin prouve qu’un cépage mal aimé, puis oublié et presque disparu peut être transcendé par le talent d’un grand vigneron. ■(gallery)




Vin de Savoie : Chignin Bergeron 2007 – Domaine Louis Magnin 73800 Arbin

S’il est vignoble qui pâtit d’un manque de considération, c’est bien le savoyard : les autochtones ne sont pas gens de communication, l’essentiel de la production, jusqu’à peu, étant consommé sur place par les nombreux touristes assoiffés après le ski, et surtout le vignoble de Savoie avec ses 22 cépages, est un véritable casse-tête, même pour l’amateur le plus averti. Citons, en rouge : la Mondeuse dérivée de la Syrah donnant de beaux vins tanniques à la vigueur poivrée, en blanc l’Altesse ou Roussette, pouvant produire des vins de garde d’une complexité inouïe, le Bergeron, variante locale de la Roussanne rhodanienne, offrant des vins incisifs, opulents, complexes, la Jacquère, blanc rafraîchissant aux notes délicates, floracées, herbacées, le Gringet, variante locale du Savagnin jurassien, la Mollette donnant les vins effervescents de Seyssel et de Bugey, les Chasselas, Chardonnay, Mondeuse blanche, Malvoisie, etc. !

Un patchwork de parcelles _ Pour « complexifier » : si l’appellation Chignin Bergeron est le fief du Bergeron, alias Roussanne, le terroir Chignin est celui de l’Altesse alias Roussette. Comment s’y retrouver !

Le vignoble de Savoie est un patchwork de parcelles isolées s’égrenant du lac Léman jusqu’au sud de Chambéry, les différentes aires de vignoble se développant dans d’étroites vallées aux pentes escarpées bordant de petits lacs dominés par les majestueux sommets alpins. Si la Savoie offre une délicieuse palette de vins blancs et rouges croquants, rafraîchissants, peu onéreux, mais finalement assez simples, certains viticulteurs ont pris le parti de tirer la production vers le haut, le domaine Louis et Béatrice Magnin étant indéniablement l’une des figures emblématiques.

Proche des combes de Savoie, adossé au versant sud du massif des Bauges, à une altitude de 250 m, exposé sud, sud-est, en face de la chaîne de Bellecombe, ce petit vignoble familial de 8 hectares est planté sur des éboulis argilocalcaires, bénéficiant d’un microclimat méditerranéen, idéal pour la pleine maturité des raisins.

Les Magnin ont opté, depuis plusieurs années, pour une agriculture biologique et biodynamique, intrants naturels : tisanes de plante, poudre d’argile, bouse de corne avec soufre et cuivre à doses infinitésimales. La densité des ceps en taille guyot simple est de 8 500/ha. La vendange, par tries successives, souvent en légère surmaturité, est purement manuelle. Le pressurage pneumatique doux et long est effectué après un débourbage statique ; le moût est mis en cuve inox pour la fermentation alcoolique, sans malo-lactique. L’élevage en cuves sur lies fines dure 12 à 15 mois. Le bois est proscrit. Parée d’une limpide robe vieil or, ce Chignin Bergeron 2007 développe au nez des arômes miellés, anisés et fl oraux, acacia, tilleul, avec une légère pointe oxydative. La bouche est élégante, pulpeuse, dense, profonde avec du gras et une longue finale. Frais, il affiche une tension minérale acidulée plutôt qu’acide, la palette gustative complexe mêle de façon déconcertante : abricot, amande, fruits confits, poire compotée.

Un air hivernal _ Les blancs de Savoie, dans les restaurants d’altitude, escortent gaillardement les robustes mets alpins à base de fromage : fondue, raclette valaisanne, tartiflette au reblochon, ainsi que leurs goûteuses charcuteries. Mais dans ces situations, il faut privilégier des vins très jeunes, rafraîchissants, acides, peu « alcooleux », tels la Jacquère ou le Chasselas de Ripaille. Le Chignin Bergeron plus complexe, fi n et opulent, mérite « mieux » et, en fait, se mariera idéalement avec des poissons de lac ou de rivière : fi lets de perche, truite aux amandes, omble chevalier meunière (s’il n’est pas d’élevage !), féra à la thononaise, lavaret aux câpres. Intruse de la mer : la lotte façon Orloff garnie de fromage blanc et de tranches de lard offrira un accord délectable.

Alors, installons-nous à Chamonix, Courchevel ou tout simplement à la maison, ouvrons ce beau flacon de Chignin Bergeron en apéritif avec quelques copeaux de tomme ou comté, préparons, avec évidemment l’aide de notre experte compagne, un beau poisson de lac, pour terminer la bouteille. C’est le bonheur hivernal assuré !… ■

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération

(gallery)




Numerus Clausus : pourquoi la France va manquer de médecins

349 – Le docteur Daniel Wallach, qui a commencé ses études de médecine en 1965, n’a pas eu lui-même à se frotter à ce Numerus Clausus dont il raconte l’histoire. L’ouvrage, préfacé par Gérard Kouchner, directeur de la publication du Quotidien du Médecin, utilise comme seule source bibliographique ce même journal, né en 1971, la même année que le NC instauré alors pour limiter le nombre des futurs médecins.

A partir de là, le pays, qui formait dans les années 1960 environ 8 000 praticiens par an, a autoritairement décidé d’en abaisser régulièrement le nombre jusqu’à un « plancher » de 3 500 pendant plusieurs années.

L’auteur a choisi de scinder son ouvrage en trois parties

L’essentiel du livre est consacré à l’histoire de ce NC qu’il appelle « la planification de la pénurie médicale » ; on aura vite compris que Daniel Wallach est absolument opposé à cette réforme. Liée à l’origine au nombre de postes d’étudiants hospitaliers et plus précisément au nombre de lits présents dans les hôpitaux universitaires, cette mesure, selon lui, ne pouvait qu’aboutir à un déséquilibre puisque l’indexation d’un besoin croissant de médecins à une quantité décroissante de lits ne peut que « mener dans le mur ».

Aux yeux de l’auteur, ce NC revêt en outre un aspect idéologique (certes nié par les autorités de l’époque qui en faisaient une réforme purement technique) et devient rapidement une faute morale, « empêchant à de très nombreux étudiants d’accéder à une profession et une culture que le plus grand nombre s’accorde à placer en haut de l’échelle des valeurs ».

Daniel Wallach aborde ensuite les effets de la réforme du troisième cycle, mise en place dans les années 1980 dans le but apparent de valoriser la médecine générale. De fait, l’avènement de l’internat qualifiant et la suppression des CES vont avoir pour effet de réduire de façon conséquente le nombre des futurs spécialistes ; réforme d’importance qui modifia radicalement le statut de l’interne, transformant du jour au lendemain un jeune médecin hospitalier en étudiant du troisième cycle ; et cela sans revalorisation effective du médecin généraliste : on se souvient par exemple de l’époque des « Canada dry », terme peu flatteur utilisé par certains pour désigner, à leur vif mécontentement, les étudiants nommés internes sans avoir passé le concours. La troisième partie très intéressante également vise à décrire le pouvoir médical dans les hôpitaux, et les différentes formes de mandarinat. Système féodal pour l’auteur, le mandarinat subsiste, ayant résisté aux différentes tentatives de ministres successifs tels Jack Ralite, Michèle Barzach en passant par Georgina Dufoix (que les cardiologues ont eu à fréquenter et à combattre), et bien d’autres.

En conclusion

Ce livre, fort bien documenté même s’il ne se réfère qu’à une seule source (mais quoi de mieux qu’un quotidien spécialisé pour raconter au jour le jour les événements de la profession), se lit facilement tant le style de l’auteur est précis et incisif ; il pourrait devenir un des ouvrages de référence pour tous ceux, médecins ou non, qui s’intéressent à la démographie médicale et, au-delà, à la politique de santé des quarante dernières années ■

(gallery)




Le Code de Hammurabi

349 – Christian Ziccarelli – Le contexte historique _ Nous sommes en 1792 avant Jésus Christ, à Babylone, sur les rives d’un bras secondaire de l’Euphrate, Hammurabi le VIe roi de la 1ère dynastie de Babylone monte sur le trône. Il l’occupera pendant un long règne de 43 ans. Incontestablement, il est la figure la plus connue de l’histoire mésopotamienne de la première moitié du IIe millénaire par l’étendue de ses conquêtes et la promulgation de son code. Doué d’un grand sens politique, Hammurabi parvint à unifier sous son sceptre une Mésopotamie profondément divisée et déchirée par des luttes sanglantes depuis près de trois siècles. Il impose non seulement la suprématie de Babylone sur la plupart des cités du Nord de la Basse Mésopotamie, mais il réussit aussi à se dégager de la pressante tutelle de l’empereur d’Elam, en Iran du Sud-Ouest. De simple bourgade, Babylone va devenir au fi l des ans, la ville au centre du monde supplantant ses rivales Ur, Uruk, Nippur, Assur, Mari…

<doc1475|center>

De Sippar au Louvre… _ La stèle fut érigée, sans toutefois exclure l’hypothèse de sa présence à Babylone, dans une grande ville de Babylonie, peut-être à Sippar, située au nord de la capitale. C’était un centre oraculaire, la cité sainte du dieu soleil, Samas, aussi dieu de la justice. Au milieu du XIIe siècle, Shutruk-Nahhunté Ier, roi d’Ansan et de Suse, souverain du pays d’Elam (Iran), pilla les trésors de l’art mésopotamien et les emporta à Suse, notamment la stèle du Code et l’installa dans une grande cour associée aux temples majeurs. Finalement elle fut redécouverte, en 1901, par la Délégation en Perse à Suse, dirigée par Jacques de Morgan, sur le « Tell de la Citadelle ». « Cet important monument (…) gisait, brisé en trois morceaux, au milieu des décombres de toutes sortes qui remplissaient une petite chambre à douze mètres environ du niveau primitif du Tell. C’est sans doute au moment de la prise de Suse par Assurbanipal (d’Assyrie, en 646 av. J.-C.) qu’il aura été précipité dans cette sorte de cave, les vainqueurs le trouvant trop lourd pour l’emporter à Ninive. La brisure n’était pas volontaire (…) les trois fragments s’agençaient presque parfaitement, sans lacune importante »([ Jacques de Morgan)]. La stèle arriva au Louvre où elle se trouve aujourd’hui, après un passage par Mascate, et un voyage en mer sur le vaisseau Jean-Bart.

<doc1476|center>

Le texte de loi _ Une longue tradition a précédé le Code d’Hammurabi. Dés l’époque des dynasties archaïques, au milieu du IIIe millénaire av. J.-C., les souverains promulguaient des édits pour régulariser les prix et enrayer l’injustice sociale, notamment le Code d’Ur-Namma(Ur-Namma, a été roi d’Ur de 2112 à 2095 av. J.-C. selon la chronologie moyenne, de 2047 à 2030 selon la chronologie basse. La datation de son règne est très approximative. Il fut l’auteur du plus ancien code juridique connu) celui de Lipit-Istar(Lipit-Ištar est le cinquième roi de la Ire dynastie d’Isin. Son règne est situé vers 1934-1924 av. J.-C.). La stèle est presqu’entièrement couverte d’un texte gravé avec art et disposé de façon archaïsante, une lecture verticale et de droite à gauche. Il manque les sept colonnes inférieures effacées par Sutruk-Nahhunte Ier. Dès le 15 septembre 1902, le père Jean-Vincent Scheil publie sa traduction dans le volume IV des « Mémoires de la Délégation en Perse ». Après un long prologue historique dans lequel le monarque chante son investiture, ses propres louanges, et énumère les oeuvres pieuses accomplies dans les différentes villes du royaume, viennent au moins deux cent quatre-vingts articles de lois. Une phrase au conditionnel annonce un problème de droit ou d’ordre social, elle est suivie d’une réponse au futur, sous forme de sanction pour le fauteur de trouble ou de règlement d’une situation sociale particulière. « Si un notable crève un oeil d’un autre notable, on lui crèvera un oeil, s’il crève un oeil d’un homme du peuple, il pèsera une mine d’argent (500 g) ». Les thèmes sont disposés dans un ordre assez déroutant : punitions pour faux témoignages, vol et recel, lois relatives au travail, à la propriété, au commerce, mariage, divorce, héritage, adoption, statuts des femmes vouées aux temples, châtiment des blessures infligées aux personnes physiques selon la catégorie sociale des individus, problèmes juridiques liés à l’agriculture ; taux des salaires et locations, enfin achat d’esclave en Babylonie, à l’étranger… Un long épilogue invite l’opprimé impliqué dans un procès à se faire lire la stèle « pour qu’il voit son cas, que son coeur se dilate ». Les termes « loi et tribunal » n’existent pas, la justice est publique et se rend aux portes des palais et des temples. Il n’y a pas d’avocat, mais les deux parties doivent fournir des preuves écrites et, à défaut, des témoins. En l’absence de preuve suffisante, on recourt au serment par le dieu, voire à l’ordalie !

Hammurabi devant le dieu Samas _ A la partie supérieure de la stèle figure cette scène sculptée, légitimant la souveraineté d’Hammurabi et les décisions de justice gravées en dessous. Une tiare à quatre rangs de cornes le coiffant, une longue barbe couvrant sa poitrine, une robe à volants, les pieds reposant sur un piédestal, deux rayons lumineux jaillissant derrière ses épaules, permettent d’identifier le personnage assis sur un trône, au dieu solaire Samas. Tout comme le soleil disperse les ténèbres, Samas expose en pleine lumière le mal et l’injustice. Il tient dans sa main un bâton et un cercle, insignes du pouvoir qu’il transmet à Hammurabi, debout devant lui, un bras droit levé en signe de respect et d’écoute. Comme le dieu, le roi porte des bijoux (bracelet, torque) sans doute des talismans de pierres magiques ayant une influence favorable pour contrecarrer les mauvais plans d’un éventuel adversaire. Selon une inscription gravée sur la stèle, nous sommes en présence du propre portait du roi. Le Louvre possède une tête royale en diorite sculptée en ronde de bosse qui pourrait être une autre représentation de ce grand homme d’Etat. ■

<doc1477|center>(gallery)




iPad3 : La chasse est ouverte

349 – Apple est une société extraordinaire. A chaque lancement de produit, la firme à la pomme fait le buzz sur la toile. Pas besoin de plan de communication, pas besoin de campagne publicitaire, les internautes remplacent toutes les agences de publicité. Et si vous n’êtes pas au courant, il y a forcément quelqu’un qui va vous en parler.

En mars 2011 sortait tout juste l’iPad2. Pratiquement un an après, jour pour jour, Apple nous sort une nouvelle version de son produit phare. Alors cet iPad3 ? Vaut-il vraiment la peine qu’on parle de la première tablette de l’ère Tim Cook ([Tim Cook est le successeur de Steve Jobs à la tête d’Apple depuis le mois d’août dernier.)] ou mieux vaut-il jouer les autistes et passer notre chemin ?

Un meilleur rendu _ Tout d’abord l’écran qui, a priori (nous ne parlerons qu’au conditionnel vu que nous n’en sommes qu’au stade des rumeurs, ne fussent-elles bien avancées), aurait une résolution nettement supérieure avec une taille identique à la version 2. Le nouvel écran « Retina Display » passerait d’une résolution de 1 024 x 768 ppp ([ppp : pixels par pouce)] à 2 048 x 1 536 ppp – tout simplement le double – et devrait satisfaire les plus exigeants. On pense aux joueurs, mais pas seulement. Le grand public que nous sommes tous devrait se réjouir d’une haute défi nition pour un meilleur visionnage des fi lms et des programmes de télévision. Sur ce point d’ailleurs, des rumeurs persistantes ont fait leur apparition sur l’Apple TV3. Apple bouclerait ainsi son ultra-projet numérique : achat de musique, achat de vidéos, tout cela dans la plus grande transparence puisque tout est lié via wifi et depuis quelque temps par airplay qui, soit dit en passant, est repris par de grands constructeurs – comme Denon par exemple qui l’a incorporé dans ses amplificateurs home-studio de dernières générations.

Quant aux professionnels, l’iPad devient pour le coup un formidable outil d’imagerie grâce à son « Retina Display ». Les détails deviendront bien plus nets, et chacun pourra apprécier à sa plus juste valeur les images reçues par l’iPad3. Les développeurs vont d’ailleurs retravailler leurs applications en ce sens.

Une meilleure vue _ Concernant le capteur, celui aurait une résolution de 5Mpx ou 8 Mpx selon les rumeurs. En tout cas supérieur à la qualité déplorable de « l’appareil photo » de l’iPad2.

Un meilleur coeur _ La puce aura autant de différence entre un iPhone3 qu’un iPhone 4S. Plus de rapidité, plus de performances (ça, on s’en serait douté), le processeur – dénommé pour l’instant AX5 (photo) selon les sources, ou A6 – devrait donner un certain embonpoint à la tablette dans le sens de l’épaisseur, à moins que le processeur ne soit gravé en 28 ou 32 nm au lieu des 45 nm actuels. Il est également possible qu’un processeur quadcore fasse son apparition, comme le souffle la rumeur depuis longtemps.

Une meilleure communication _ L’iPad3 devrait être doté d’une connexion 4G (avec la technologie Long Term Evolution) qui devrait permettre de surfer sur l’Internet haut débit mobile.

Et la 3D ? _ iPhone et iPad devraient intégrer rapidement la technologie 3D en utilisant des capteurs de mouvement et de reconnaissance faciale. Apple semble avoir déposé un brevet en ce sens.

En conclusion _ Certains experts entendaient bien que les tablettes allaient à terme remplacer les ordinateurs portables, et l’iPad 3 ouvre à grand vent cette brèche. Tout faire avec une tablette, tel est le credo des constructeurs aujourd’hui, et d’Apple en particulier. Rendez- vous le 7 mars ! ■

|Les tablettes aujourd’hui| |Quarante millions d’iPad (versions 1 et 2 confondues) ont été vendus dans le monde et ont ainsi généré 25,3 milliards de dollars de chiffre d’affaires.

Samsung, Sony, ou la tablette française Archos entre autres, n’ont pas réussi à convaincre les consommateurs malgré leurs atouts respectifs. Apple a toujours un train d’avance et bénéficie d’une grande notoriété de fabrication et de solution logicielles grâce à ses APPs qui font sa force, tout comme l’iPhone.

La compétition s’annonce malgré tout plus rude avec l’arrivée des tablettes low-cost. Google notamment devrait sortir une tablette à environ 200 dollars avec son système d’exploitation Android (livré dans de nombreux smartphones, il a mis fin à la suprématie de l’iPhone(Aujourd’hui, plus d’un smartphone sur deux vendus aux États-Unis est équipé d’Android)) devrait faire la différence avec ses concurrents. C’est le consommateur qui va y gagner.|




Une hydrie cinéraire macédonienne

348 – Christian Ziccarelli – Un chef d’oeuvre hellénistique _ Cette hydrie cinéraire, du dernier quart du IVe siècle avant Jésus Christ, à vernis noir et décor polychrome avec couvercle en plomb, représente un combat avec les amazones. La nuance des tons, le sens du volume, un équilibre savant de lignes entrecroisées obliques et le rendu du mouvement font de ce vase un chef d’oeuvre de la peinture hellénistique. Elle provient d’une tombe d’Amphipolis, creusée à même le sol, un remarquable exemple montrant l’importance de la polychromie en Macédoine. Depuis une vingtaine d’années, cette région fait l’objet de découvertes surprenantes sur le plan artistique. Elles ont bousculé notre approche historique de ces royaumes du nord de la Grèce. Des fresques multicolores décorent les murs des sépultures royales, où l’on a découvert multiples accessoires en or rivalisant de beauté (couronnes, bijoux, masques, etc.).

Un peu d’histoire… _ Nous sommes à la fi n du Ve siècle, les Téménides, descendants du roi d’Argos Téménos, conquièrent au fil des années la Macédoine. Pour le Grec du Sud, cette région, au-delà de l’Olympe, ne peut être qu’une contrée peuplée de barbares. Grande erreur, au cours du siècle suivant, sa suprématie devient considérable, notamment grâce à Philippe le Grand. En otage à Thèbes, il apprend l’art militaire et la rhétorique. Démosthène, avec une clairvoyance acérée, annonce dans « Les philippiques » l’ambition de Philippe, montrant en lui le liquidateur du monde des cités, le futur maître de la Grèce. Son fi ls, Alexandre instruit par Aristote « a créé pour ses successeurs une nouvelle façon de rassembler les hommes et de gouverner les communautés : c’est l’état moderne avec son prince » (4). Vainqueur de l’armée perse commandée par Darius en personne, Alexandre gagne l’Égypte en 332, franchit l’Indus et meurt en pleine jeunesse, à Babylone, d’un accès de fièvre. Ses généraux le firent embaumer, se disputèrent son corps, finalement dérobé par Ptolémée. Un sarcophage en marbre, connu comme la « tombe d’Alexandre » se trouve au musée archéologique d’Istanbul. Mais à ce jour le lieu de sa sépulture reste une grande énigme de l’histoire.

Le mythe des Amazones _ Les Amazones étaient les filles d’Arès par la Naïade Harmonie. Pour d’autres récits, Aphrodite où encore la fille d’Arès, Otréré, serait leur mère. Elles vivaient au bord du fleuve Amazone, portant aujourd’hui le nom du fils de Lysippe, Tanaïs. En déclarant son amour de la guerre et son mépris du mariage Lysippe offensa Aphrodite, celle-ci, pour se venger, fi t que Tanaïs tombât amoureux de sa mère. Pour éviter une passion incestueuse, il se jeta dans le fleuve qui porte son nom et se noya. Lysippe quitta le pays et conduisit ses filles non loin des côtes de la mer noire, dans une plaine proche du fleuve Thermodon. Elles fondèrent trois cités, gouvernées par Hippolyte, Antiope et Mélanippe. Les Amazones ne reconnaissaient de filiation que par la mère, les hommes étaient astreints aux tâches domestiques tandis que les femmes combattaient. On brisait les bras et les jambes des enfants mâles afin de les rendre inaptes à la guerre. Elles ne respectaient ni la justice, ni la pudeur, elles étaient célèbres pour leur nature guerrière. Armées d’arcs de bronze, de boucliers en forme de demi-lune, de haches, elles furent les premières à utiliser la cavalerie. En fait, elles symbolisent les femmes tueuses d’hommes, voulant se substituer et rivaliser avec eux en les combattant. A l’extrême elles expriment le refus de la féminité.

Plusieurs héros grecs eurent à affronter leurs reines _ Bellérophon combattît les belliqueux Solymes et leurs alliées, les Amazones, il vainquit les uns et les autres en volant au-dessus d’eux, hors de la portée de leurs flèches ou en leur lançant sur la tête de grosses pierres. Le neuvième des travaux d’Héraclès fut d’apporter à la fille d’Eurysthée, Admété, la ceinture d’Or d’Arès, que portait Hippolyte. Thésée prit part à une expédition victorieuse contre les Amazones et reçut comme part du butin Antiope. Sa soeur, Orithe jura de se venger de Thésée. Elle s’allia aux Scythes et marcha sur Athènes. Après 4 mois de durs combats les Amazones firent des propositions de paix, chassées d’Attique, elles se fi xèrent en Scythie. Après leur défaite, après avoir traversé la Thrace, les Amazones fondèrent le sanctuaire d’Artémis (déesse de la chasse, aussi associée à la lune) à Ephèse. Selon un autre récit elles s’y réfugièrent une première fois en fuyant Dionysos et une seconde fois après qu’Héraclès eut défait la reine Hippolyte. Achille, lors de la guerre de Troie, transperça d’un coup de lance le corps de Penthésilée, une reine des Amazones, tomba amoureux de son cadavre, saisi de nécrophilie, il s’unit à elle morte. Thalestris, la reine des Amazones d’Albanie, était d’une beauté et en même temps d’une force de corps surprenante, son ambition était d’avoir un enfant d’Alexandre le Grand. Le roi aisément gagné par cette proposition donna treize jours à Thalestris, après lesquels il la renvoya chargée de magnifiques présents.

Quand le mythe approche la réalité historique _ La légende des Amazones, se retrouve dans toute la littérature antique, depuis Homère, jusqu’à la fi n de l’Empire Romain, soit près de 13 siècles. « Amazones » pourrait venir de a-mazon, « sans seins » parce qu’on croyait qu’elles se desséchaient un sein, afin de mieux tirer à l’arc. En fait, il s’agit plutôt d’un mot arménien, signifiant « femme de la lune ». Sur les rives orientales de la mer Noire, les prêtresses d’un culte voué à la déesse-Lune, portaient des armes. Il y aurait eu aussi, des prêtresses armées à Ephèse et dans toutes les cités où existaient des tombes d’Amazones. Le Bosphore Cimmérien – la Crimée – aurait été le siège du culte barbare d’Artémis pratiqués par les Tauriens où la prêtresse tuait des victimes mâles. Une première approche historique revient à Jeannine Davis-Kimball, lorsqu’en fouillant en 1994 des Kurgans ou tumulus, à la frontière entre la Russie et le Kazakhstan, elle a découvert des tombes de femmes guerrières, enterrées avec leurs armes entre 600 et 200 avant J.-C.. Or c’est précisément dans cette région barbare, au Nord du Pont Euxin et du lac Méotide (l’actuelle mer d’Azov) que les Grecs situaient le territoire de ces femmes guerrières. L’énigme reste entière. ■

(gallery)




Deux hommes, deux exils, deux humanismes

348 – « Coeur ouvert », Elie Wiesel (Flammarion)

Elie Wiesel est né en 1928, en Roumanie. Il y a passé une enfance simple et heureuse. Ã 15 ans, il est déporté avec sa famille par les nazis à Auschwitz- Birkenau. Il y perdra d’abord sa mère et sa soeur, puis restera en captivité aux côtés de son père qui décédera dans ses bras lors de l’enfer du dernier transfert de Buna à Buchenwald. Il a décrit ce drame avec la puissance poignante « d’une expérience qui dépasse l’entendement » dans son premier ouvrage « La Nuit » (1958). Il y est revenu ensuite dans le premier tome de ses mémoires « Tous les fleuves vont à la mer » (1994). Arrivé en France en 1945, faute de comprendre le français, il se joindra à la file des « apatrides » au lieu de celle des demandeurs de nationalité française. Il restera donc en France une dizaine d’années sans nationalité avant de devenir en 1963, citoyen américain. Son oeuvre littéraire, philosophique et théologique extraordinaire lui vaudra le prix Nobel en 1986. A 82 ans, il est victime d’un syndrome coronarien aigu nécessitant des pontages en urgence. Le choc de cette annonce brutale l’amène à refaire le bilan d’une existence et d’une mission qu’il retrace après un heureux dénouement dans ce court ouvrage d’une richesse philosophique et humaniste exceptionnelle. ■

_ ■ Élie Wiesel _ Parution : novembre 2011 _ Prix : 10,00 €

« Trois passeports pour un seul homme », _ Armand Bénacerraf (l’Harmattan)

Armand Bénacerraf est né à Casablanca en 1932. Fils d’une famille aisée qui avait fait fortune au Venezuela, il sera frappé, lui aussi, dans son enfance par le décès de son père. Puis il fera des études médicales et cardiologiques en France auprès des plus grands maîtres de l’époque comme le professeur Pierre Soulié. Titulaire de deux passeports, marocain et vénézuélien, c’est au Maroc qu’il choisira tout naturellement de s’installer. Par idéalisme, il se plaisait avec humour à rappeler qu’il était « un juif ayant épousé une chrétienne et allant vivre dans un pays musulman ». Il deviendra chef de service et professeur de cardiologie à l’hôpital Averroès. Ses qualités professionnelles et pédagogiques en feront rapidement la notoriété cardiologique du Maroc.

Mais les répercussions antisionistes de la guerre des Six Jours le contraindront à quitter son pays natal et à rejoindre la France dont il obtint la nationalité en 1969.

Après quelques années d’installation à Sarcelles, son enthousiasme et son énergie lui permirent de créer le centre cardiologique du Nord à Saint-Denis avec deux complices, pourtant tellement différents, Bernard Morin et Paul Charlier. Ils fondent ainsi le premier établissement cardiologique privé, d’un niveau rivalisant avec les plus grands services de CHU, qui a formé plusieurs générations de jeunes cardiologues aux techniques cardiologiques innovantes, tout en alliant rigueur scientifique et éthique.

Tous ceux qui ont pu bénéficier de l’enseignement d’Armand B. (Fernand pour son beau-père et Ahmed lors de son bref passage sous les drapeaux marocains !) conserveront toute leur vie professionnelle un esprit critique et une manière d’aligner les éléments de la discussion rigoureuse qu’il avait lui-même hérité de son maitre Marcel Legrain ; tout comme ils ont appris de lui « que l’appartenance ne s’exprime pas dans le communautarisme, mais comme un élément d’une entité où les racines peuvent s’épanouir sans s’exclure dans l’identité de chacun ».

■ Armand Bénacerraf _ Parution : octobre 2011 _ Format : 204 pages – 18,05 €(gallery)




Le monastère de Ki

347 – Christian Ziccarelli – Tout proche du Tibet et du Ladakh, il est le plus grand monastère bouddhiste tibétain de cette grandiose vallée, dominée par des pics de plus de 6 000 m aux neiges éternelles. En fait cette région faisait partie du Tibet occidental. Les villages accrochés à flanc de montage en ont gardé, encore aujourd’hui, toutes les caractéristiques architecturales.

Le monastère est une véritable ville où chacun a un rôle et des attributions. Traditionnellement chaque famille tibétaine s’enorgueillissait d’avoir un fils ou une fille dévoué(e) à la doctrine, d’autant que le couvent garantissait au moins une écuelle de tsampa (farine d’orge) par jour ! Les pauvres servaient d’assistants à ceux qui avaient eu la chance de pouvoir faire des études.

Le bouddhisme tibétain ou bouddhisme lamaïque naquit au Tibet, mais se répandit dans tout le Haut Himalaya et dans les régions voisines du Haut Plateau tibétain. Le bouddhisme arriva au Tibet au VIIe siècle, sous l’influence de Songtsen Gampo (mort en 650). A l’époque la religion la plus populaire était le Bön, une sorte de chamanisme, pratiquée encore aujourd’hui par une minorité. Plusieurs écoles de sensibilité différentes ont émergé au cours des siècles, sous l’influence de grand maîtres. Padmasambhava, connu sous le Guru Rimpoché (755-804) un sage indien appelé à la cour du roi, est l’objet d’une grande vénération par l’école des Nying-ma-pa (secte de bonnet rouge, les anciens) et considéré comme un second Bouddha. Atiça, après avoir reçu l’enseignement de Naropa, arriva au Tibet en 1040 où il mourût en 1064. Il restaura l’ordre monastique et établit des différences entre les écoles du bouddhisme lamaïque. Brog-mi fonda l’école des Sa-kya-pa dont les monastères sont particulièrement actifs au Tibet. Tson-gkha-pa fonda en 1409 l’école des Ge-lugs-pa (les vertueux, les bonnets jaunes) aujourd’hui courant majoritaire. « La caractéristique la plus étrange du bouddhisme tibétain, qui lui a valu le surnom de lamaïsme et qui le distingue nettement des autres traditions, est son système de lamas réincarnés : les hauts dignitaires religieux sont chargés de retrouver les réincarnations des lamas importants – il y en a plus d’un millier dans tout l’Himalaya – afin de les réinstaller à la tête de leurs monastères. » (1) Dans le bouddhisme lamaïque la pratique des rites occupe une place importante. Le sens du mot « rite » varie selon les textes auxquels on le rattache comme les textes du Vinaya. Cette diversité entraîne donc pour ce mot une multitude de significations. Le Bouddhisme tantrique, connu sous le nom de mantrayana (voie des invocations) et de vajrayana (voie du diamant ou de la foudre) en est une. Il est une manifestation particulière de l’âme indienne, de son art et de sa religion. D’une approche difficile, tant il est multiple de par ses pratiques et croyances, toutes orientées vers la pratique méditative, une culture de l’extase centrée sur une vision sexuée du cosmos. Un de ses rituels le plus connu est celui de la fabrication du mandala qui permet à l’individu de se transcender soi-même et de transcender le monde. Il s’inspire de recueils de textes, les tantras décrivant une foule de divinités et prescrivant les invocations magiques, et les sutras regroupant tous les sermons et discours de Sakyamuni. Leur fonction consiste à indiquer une autre voie pour atteindre la « bouddhéité », la libération finale, le nirvana.

Sa construction répond _ à une hiérarchie typique sur trois niveaux

Comme tous les monastères tibétains il est précédé par le mur de man (drivé de mantra « Om mani padme hum » ([Om mani padme hum : Cette mantra gravée sur chacune des pierres du mur de mane (à contourner par la gauche) est une offrande personnelle. Elle représente la compassion et la grâce de tous les bouddhas et bodhisattvas et invoque plus particulièrement la bénédiction d’Avalokiteshvara, le Bouddha de la Compassion. Avalokitésvara est une manifestation du Bouddha et son mantra est considéré comme l’essence de la compassion du Bouddha pour tous les êtres.)] gravé sur chaque pierre et composant un mur), les chortens (forme tibétaine du stupa bouddhique) et les moulins à prières, cylindres que tourne chaque fidèle en entrant dans le monastère.

Le duskhang (hall d’assemblée) couvert de thangkas([Thangka : est une peinture religieuse sur toile de dimension variable depuis les thangkas portatives que l’on peut enrouler et dérouler grâce à deux baguettes, jusqu’aux thangkas monumentales que l’on déroule le long d’un rocher ou d’un mur. Elles représentent le plus souvent un yantra (symbole diagrammatique : cosmogramme, mandala…), une ou des divinités et sont destinées à la méditation )], est le lieu de la puja (prière psalmodiée pendant des heures interrompue par la cérémonie du thé au beurre de yak salé et rance) où se rassemble la Sangha (communauté monastique, le troisième joyau précieux du bouddhisme après Bouddha, le maître, et Darhma, la doctrine). Les fidèles déposent sur une table leurs offrandes, notamment les torma (gâteaux sacrificiels) à base de farine et de beurre. Au fond de la salle trônent des sculptures en bois ou en bronze représentant les divinités et, sur un autel, la drilbu (clochette), le dorje (foudre diamant) et le kartrika (couperet). Dans les gonkhangs (temple des protecteurs) sont conservés les éléments du mobilier liturgique : tambours, masques, tentures et bannières le plus souvent suspendus, cornes et dagues rituelles, etc. Plusieurs lhakhangs ou chapelles sont dédiées à une divinité.

Une bibliothèque double contient des livres de grande valeur artistique, datant de plusieurs siècles. Toutes les salles sont recouvertes de fresques obéissant à des règles canoniques fixes, représentant gardiens et divinités. Elles sont éclairées par des petites ouvertures de fenêtres d’où l’importance des lampes au beurre de yak, le plus souvent remplacées aujourd’hui par des lampes à huile. Enfin les cuisines, des pièces d’entrepôts et les cellules des moines sont réparties sur les différents niveaux.

Il n’est pas rare dans l’une des cours d’assister à une disputation, l’art du débat. Une confrontation où deux participants s’affrontent, sous l’oeil du maître et qui peut durer des heures. Le plus faible acculé, reconnaissant alors la supériorité de son adversaire, se prosterne à ses pieds en signe de respect.

La fête annuelle du monastère est l’occasion d’un grand rassemblement. Les villageois, se parant de leurs plus beaux atours, viennent assister aux danses traditionnelles rythmées par les longues vibrations graves et profondes des dung-chen (cornes de bois de 4 m de long, toujours utilisées au minimum par deux). ■




Les dernières du web et de l’iPhone

347 – Mediclick _ A notre connaissance, c’est la première option mobilité absolue d’un logiciel de gestion de cabinet. Il s’agit de la déclinaison adaptée iPhone et iPad du logiciel Mediclick Studio 5.

Cette application permet de transformer votre iPhone ou votre tablette iPad en dossier médical nomade au chevet des patients à portée de main pour accéder en toute sécurité à l’intégralité de leur dossier mais aussi pour créer un nouveau dossier ou une nouvelle consultation. Les données sont hébergées chez le médecin. L’accès sécurisé se fait par protocole HTTP(s), SSL et les identifiants Médiclick via le 3G ou le wifi . Toutes les fonctionnalités y sont reproduites comme par exemple l’agenda ou le listing des correspondants. Qui plus est les fonctionnalités propres du dispositif permet la géolocalisation du patient ou l’utilisation d’une base de médicament. ■

Webzine de la HAS _ La Haute Autorité de Santé poursuit le relooking de sa communication on-line. Après les Reco2clics, voici l’ouverture de son webzine qui est un portail d’accueil de toutes ses productions en ligne. En un clic vous pouvez découvrir, accéder et vous abonner à toutes les news-letters avec leurs dernières mises à jour.

Data.gouv.fr _ « Where does my money go ? » à l’instar de grandes métropoles nord américaines comme la ville de Chicago mais aussi de ville française plus modeste comme Nantes, l’Etat a décidé de jouer la transparence des données en mode open-source.

Le site www.data.gouv.fr , développé par etalab, met à disposition de tous, journalistes, économistes, étudiants ou simples citoyens, les données chiffrées des activités de l’Etat (budget), des impôts (annuaires fi scaux), de la sécurité routière de la qualité de l’air ou des dépenses d’Assurance Maladie par exemple.

Bref, toutes les données numériques qui dormaient cachées ou non dans les ordinateurs des institutions. Ces données sont importables en formats standards word ou excel donc récupérables et traitables. Voilà un bel exemple de transparence même si l’analyse des tableaux s’avère assez rébarbative pour le non-initié.

Gageons que les journalistes sauront exploiter cette mine de données (352 000 jeux de données publiques à ce jour) ! ■(gallery)




Pacemakers et défibrillateurs implantables pour les Nuls

347 – Michel Chauvin est professeur de cardiologie à la Faculté de Médecine de Strasbourg et chef de service et responsable du centre de compétence « troubles du rythme » au CHU de Strasbourg. Il est spécialisé en rythmologie interventionnelle et stimulation depuis plus de vingt-cinq ans. Il a été président du groupe de stimulation cardiaque de la Société Française de Cardiologie.

L’implantation d’un appareil de stimulation ou de défibrillation automatique cardiaque est devenue un geste thérapeutique fréquent, ainsi plus de 66 000 stimulateurs et 11 500 défibrillateurs sont implantés chaque année en France, ce qui fait une fi le active de plusieurs centaines de milliers de patients que les médecins et les cardiologues sont amenés à consulter quasi quotidiennement dans leurs cabinets.

Au fur et à mesure du temps ces appareils sont devenus de plus en plus sophistiqués avec des fonctions qui peuvent parfois laisser perplexes les cardiologues cliniciens non rythmologues les plus chevronnés. Quels sont les modes de fonctionnement

? Comment se passe l’implantation ? Quelle est la durée de vie des piles ? Comment surveiller un stimulateur ? Quels sont les signes d’alerte de dysfonctionnement ? Quelles précautions au quotidien à la maison, au sport, en voyage ou en ou en cas d’intervention ? Qu’est-ce que le télésuivi ?

Autant de questions auxquelles cet ouvrage apporte des réponses claires, précises et intelligibles tant par les médecins cardiologues ou non que par les patients. L’auteur termine son propos par dix idées préconçues : – les stimulateurs, c’est fait pour les personnes âgées ; – avec un stimulateur ou un DAI ; je ne peux pas m’exposer au soleil ; – si je touche quelqu’un qui reçoit un choc de son DAI, je peux m’électrocuter ou avoir un accident cardiaque ; – il existe des stimulateurs avec des piles atomiques ; – un stimulateur ou un DAI peuvent être rejetés par l’organisme ; – si on m’implante, je ne dois pas le déclarer ni à mon employeur ni au médecin du travail ; – la proximité d’une ligne à haute tension peut perturber le fonctionnement de mon appareil ; – un stimulateur ou un DAI protège contre un infarctus ; – quand on est mort, le stimulateur continue de faire battre le coeur ; – la survenue des troubles du rythme est infl uencée par les phases de la lune.

Si vous ne connaissez pas les réponses, un conseil : lisez ce livre ! ■

Pr Michel Chauvin _ www.pourlesnuls.fr _ FIRST Editions 2011 _ Prix : distribué par la société Sorin Group France(gallery)




Dépassez-vous les 5 000 pas journaliers ?

336 – Parmi les six applications disponibles sur l’Appstore, la rédaction a sélectionné « Le Podomètre », version qui semble être la seule à fonctionner en tache de fond, en utilisant la capacité multitâche de iOS4.

Cette application transforme votre iPhone ou votre iPod touch en podomètre permanent, permettant de comptabiliser vos pas, d’en déduire la distance parcourue, totale ou par session, en tache de fond, permettant ainsi d’écouter de la musique ou de répondre au téléphone ! Destinée à la marche ou à la course à pied, elle ravira les plus sportifs d’entre nous. La calibration de cette petite merveille doit être réalisée scrupuleusement si vous n’êtes pas en mode GPS, car la précision en serait très aléatoire.

La fonction GPS, justement, permet de calculer plus précisément les distances parcourues, c’est important par exemple pour des courses d’orientation ou dans le cas d’exercices réguliers. Mais attention, celui-ci réduit considérablement la durée de fonctionnement de la batterie. La fonction chronomètre permet de calculer des moyennes et le paramétrage morphologique en déduit les consommations caloriques.

Pour les marcheurs, ce podomètre est réellement efficace d’autant plus que son prix est de loin le moins cher des podomètres du marché. Une application qui vous permettra peut-être, tout comme pour vos patients, de dépasser les fatidiques 5 000 pas par jour. ■

Les apps

| | |Le podomètre| |Mise à jour : 3 août 2010| |Version : 2.8 – 1 Mo – nécessite iOS4 ou ultérieur| |Editeur : Luminant Software| |0,79 €| |Remarque : supporte la lecture de la musique| |Steps-Podomètre personnel| |Mise à jour : 9 septembre 2009| |Version : 1.5.1| |1,59 €| |Remarque : Ne fonctionne pas si l’iPhone se met en veille. Résultats semble-t-il fantaisistes.| | Gratuit Podomètre personnel| |Mise à jour : 27 juillet 2010| |Version : 1.3.5| |Gratuit| |Remarque : Ne garde pas d’historique.| |All in Pedometer Fitness| |Mise à jour : 27 juillet 2010| |Version : 1.3.5| |1,59 €| |Remarque : L’application ne fonctionne pas pour l’instant en arrière-plan.| |Joggy Steps| |Mise à jour : 13 août 2010| |Version : 1.2.2| |1,59 €| |Remarque : Synchronisation de la voix optimisée.| |Podomètre – mon meilleur ami| |Mise à jour : 9 octobre 2009| |Version : 1.0.2| |0,79 €| |Remarque : On ne peut pas écouter de la musique durant l’application.|

_ _

Combien de pas par jour sont-ils nécessaires ?(Tudor-Locke, C et Bassett, D.R. (2004). How many steps/day are enough? Preliminary pedometer indices for public health. Sports Medicine, 34(1) : 1-8.)

|- 5 000 pas et moins : mode de vie sédentaire.| |- Entre 5 000 et 7 499 pas : mode de vie faiblement actif ; ce nombre représente l’activité journalière, mais ne tient pas compte des sports et des activités physiques pratiquées pour le loisir.| |- Entre 7 500 et 9 999 pas : mode de vie modérément actif ; ce nombre englobe l’activité journalière et les activités physiques pratiquées pour le loisir.| |- 10 000 pas et plus : mode de vie actif.| |- Autour de 12 500 pas : mode de vie très actif.|(gallery)




La Tour de Babel de Peter Bruegel l’Ancien

346 – Christian Ziccarelli – Peter Bruegel l’Ancien (1525-1569) _ On ne connaît pas exactement la date, ni son lieu de naissance (probablement Breda). C’est en 1551 que le nom de « Peter Brueghel » apparaît pour la première fois, lors de sa réception comme maître à la guilde de Saint Luc à Anvers. Les nouveaux maîtres ayant entre 21 et 26 ans, il pourrait être né entre 1525 et 1530, soit environ 50 ans avant Rubens, 80 ans avant Rembrandt. Il aurait fait son apprentissage à Anvers chez le peintre Pieter Coeck van Aelst à Anvers. En 1552, il effectue un voyage en Italie (Rome). De retour à Anvers en 1556, il dessine des planches pour l’atelier de gravure de Hieronymus Cock, dont les sept Péchés capitaux. En 1559 il grave les Vertus et ne signe plus Brueghel, mais Bruegel. En 1562 il peint la chute des anges rebelles, le suicide de Saül. En 1563, il est à Bruxelles ; en 1565 il consacre une série de tableaux sur les mois et, en 1568, il peint la chute des aveugles, la Pie sur le gibet, la perfidie du monde, les mendiants, la Tempête. Il meurt le 5 septembre 1569. Il eut deux fils, Peter Bruegel dit « le Jeune » ou Bruegel d’Enfer, et Jean Bruegel, dit Bruegel de Velours.

Le mythe de la Tour de Babel _ Dans la plaine de Shinéar, au sud de l’Irak, le roi Nemrod, personnage biblique du livre de la Genèse, et son peuple avaient entrepris la construction d’une tour qui devait atteindre les cieux. Il fut le fondateur et le roi du Premier Empire existant après le déluge ([En accord avec l’opinion juive traditionnelle. Josèphe écrivit : « [Nimrud) promet de défendre (les hommes) contre une seconde punition de Dieu qui veut inonder la terre : il construira une tour assez haute pour que les eaux ne puissent s’élever jusqu’à elle et il vengera même la mort de leurs pères. Le peuple était tout disposé à suivre les avis de (Nimrod), considérant l’obéissance à Dieu comme une servitude ; ils se mirent à édifier la tour (…) ; elle s’éleva plus vite qu’on eût supposé. » – Antiquités judaïques, I, 114, 115 (IV, 2, 3). _ On sait depuis 1862, année où George Smith du British Museum découvrit et déchiffra la tablette IX de l’épopée babylonienne de Gilgamesh, que le déluge n’est pas une création hébraïque. Mais on s’aperçut plus tard que le mythe babylonien lui-même avait une origine sumérienne. La preuve en fut faite par la découverte d’un fragment de tablette trouvé à l’University Museum de Philadelphie, parmi les collections de Nippur (KRAMER, l’histoire commence à Sumer Champs, Flammarion avril 1994).). Dans la révélation biblique, la Tour de Babel est devenue l’oeuvre de l’orgueil de l’homme qui veut se hisser à la hauteur de la divinité et, sur le plan collectif, de la cité qui se dresse contre Dieu. Yahvé crée alors la diversité des langues et disperse les hommes sur la terre, ce qui empêche ces derniers de s’entendre et de poursuivre leur entreprise. Ils laissent un ouvrage inachevé. L’humanité est condamnée à l’incompréhension.

Les reconstitutions de la Tour de Babel inspirées par le texte de la Genèse ou le récit d’Hérodote(« La muraille dont je viens de parler est la cuirasse de la ville. A l’intérieur court une autre muraille, qui n’est guère moins puissante que la première, mais plus étroite. Et dans chacune des deux parties de la ville, il y avait un groupe central fortifi é ; dans l’une, la résidence royale entourée d’une enceinte large et étroite ; dans l’autre, le sanctuaire aux portes d’airain de Zeus Bélos ; ce sanctuaire existait encore de mon temps ; il forme un carré, de deux stades sur toutes ses faces. Au milieu du sanctuaire est bâtie une tour massive, longue et large d’un stade ; sur cette tour se dresse une autre tour, sur celle-ci de nouveau une autre, jusqu’à huit tours. La rampe qui est montée est construite extérieurement, en spirale autour de toutes les tours… Dans la dernière tour, il y a un grand temple » (Hérodote Livre I, 181).) reflètent la démesure de l’homme. La Tour de Babel, la porte du ciel, n’est autre que l’immortalisation de la Ziggurat Babylonien, construit sous le règne de Nabuchodonosor II (605-562 av. J.-C.) dont le but était de rétablir par un artifice l’axe primordial rompu et de s’élever par lui jusqu’au séjour des Dieux([« Je m’appliquerai à élever Etermenanki, la ziggurat de Babylone, pour faire rivaliser son sommet avec le ciel…, j’érigerai sa base sur une hauteur de trente coudées…, un temple haut, une chapelle sainte, j’érigerai pour Marduk, mon seigneur, au dernier étage, avec art. » Inscriptions de fondation (Nabuchodonosor))]. La Tour reliait les différents plans de l’univers : la terre, le ciel et le monde inférieur, souterrain, où se trouvent les enfers. Babylone se voulait le centre du monde cosmique et terrestre. Le nom de la Ziggurat Etemenanki « maison, fondement du ciel et de la terre », s’ajoutant à la certitude des Babyloniens que Babylone, cité sainte, avait son prototype dans le ciel explique en partie cette notion de démesure et d’orgueil transmise par la légende ».

Un peu d’histoire _ Pour comprendre le message de la Tour de Babel, il faut situer le contexte historique. Philippe II d’Espagne, farouche catholique, ne pouvait tolérer les mouvements protestants, en particulier calvinistes, de ses provinces du Nord, les Pays-Bas. Il envoya le Duc d’Albe. Il s’ensuivit une répression sanglante qui aboutit à la séparation en deux blocs, la (future) Belgique catholique au sud et les Pays-Bas protestants au nord. Anvers est alors, le centre économique et financier du monde occidental depuis la découverte de l’Amérique et d’une voie maritime contournant l’Afrique. De nombreux marchands étrangers avaient investi le port d’Anvers et le rapide essor de la ville désorientait ses habitants et créèrent des problèmes de compréhension. Catholiques, calvinistes, anabaptistes, musulmans se côtoyaient et accentuaient ce sentiment d’incertitude, de perte d’unité.

La Tour de Babel (1563) _ La Tour occupe tout le centre de la composition et écrase par son ampleur les humains et la ville dont les constructions apparaissent minuscules. Pas de point de fuite unique, l’oeil est d’emblée attiré par cette architecture hors du commun qui surpasse les nuages. Elle est en construction, au bord d’un paysage côtier ou affluent des embarcations transportant les énormes blocs de pierre nécessaires à son édification. Les hommes s’affairent, notamment autour de machines de levage particulièrement sophistiquées, représentées avec soins. Une immense grue apparaît sur l’une des rampes. A l’intérieur de la roue avant, trois hommes s’emploient à la faire tourner permettant de soulever un énorme bloc de pierre. Des échelles et des échafaudages se dressent un peu partout. Les cabanes de chantier où travaille chaque corps de métier sont conformes à celle de l’époque.

Bruegel situe la Tour dans un cadre contemporain, il s’en tient à son environnement, la ville qui s’étend au pied de l’édifice ne peut être qu’Anvers ! Au premier plan, Nemrod inspecte le travail des tailleurs de pierre. Si le dessin architectural est précis, les galeries superposées, voutées en berceau, ne mènent à rien. Absurdité de l’homme qui se veut rivaliser avec les Dieux. Une architecture symbolique et utopique, nécessairement vouée à l’échec. Quel était le message de Peter Bruegel ? Est-ce une évocation de la perte d’unité de la chrétienté, les problèmes religieux secouant toute l’Europe ? Est-ce une condamnation de Philippe II dont l’intervention a entraîné la séparation des Pays-Bas et son absence d’intégration à l’Espagne ? Est-ce un avertissement au développement colossal d’Anvers, au risque de devenir une seconde Babylone ? ■(gallery)




Les indispensables pour iPod et iPad

346 – Medicalc Pro _ La rédaction vous présente la mise à jour et la mise au format iPad de cette application qui permet par rapport à la version de base (Medicalc) des options de partage et sauvegarde des résultats des différentes formules ainsi que des différentes variables. Les résultats peuvent être imprimés (airPrint) ou adressés par mail. Plus de 200 formules, scores et classification sont disponibles, y compris les plus récents : BMI – CHA2DS2Vasc – DFG/MDRD – Euroscore – Grace – HAS-BLED – HEMORR2HAGES pour n’en citer que quelques-uns. _ Bref une application indispensable pour tous les médecins qui utilisent régulièrement les indicateurs « scorés ». ■

Medicalc Pro _ Mise à jour : 18 octobre 2011 _ Version : 2.4.3 _ Taille : 8,9 Mo _ Editeur : Mathias Tschopp

Thésorimed _ Thésorimed est maintenant directement utilisable sur iPhone et iPad à l’aide d’applications spécifiques disponibles sur AppStore. Thesorimed® est la base publique d’information sur tous les médicaments commercialisés en France, développé par le GIE-SIPS, qui a pour mission de développer et diffuser des bases de données sur les produits de santé commercialisés en France. C’est une base indépendante de l’industrie financée par les abonnements des utilisateurs, la CNAMTS, la MSA et le RSI.

Vous y trouverez référencés les médicaments disposant d’une AMM (nationale ou européenne), d’une ATU nominative, d’une ATU de cohorte, certaines préparations hospitalières et produits sous autorisation d’importation. Les avis et les fiches de la Commission de Transparence y sont reproduits. L’information diffusée par Thesorimed est également accessible au grand public, notamment au travers d’un site internet de consultation libre. www.giesips.org

Vous y retrouverez : – L’information synthétique sur les médicaments commercialisés en France, – Une rubrique biométrie avec de nombreuses données consultables, et le calcul de paramètres individuels (pour adultes et enfants) – Une rubrique biologie permettant de consulter des données de biologie générale, ainsi que l’accès à un convertisseur d’unités (du système international en unités usuelles et inversement) ou une rubrique spécifi que femme enceinte. _ Mais il s’agit d’un accès limité à 9 consultations gratuites de médicaments. Ensuite, il est possible d’acheter un accès illimité pour 4,99 €. ■

Thésorimed _ Mise à jour : 7 octobre 2011 _ Version : 1 _ Taille : 215 Mo _ Editeur : Christian Trotobas

(gallery)




100 recettes pour soigner votre cœur

346 – Ce livre est bien plus qu’un simple livre de recettes de cuisine du fait de sa construction en deux parties.

La première partie rappelle au lecteur, patient, de manière simple et concrète, l’essentiel des notions diététiques et de prévention à ce jour validées, sans négliger les valeurs hygiéniques que sont l’arrêt du tabac et la reprise d’une activité physique régulière. Plusieurs pages sont notamment consacrées aux matières grasses avec une simplicité non réductrice qui permettra sûrement au lecteur de mieux comprendre les pièges des publicités plus ou moins mensongères dans ce domaine.

La seconde partie est consacrée à décrire à une bonne centaine de recettes, très appétissantes, de réalisation le plus souvent simple et bien expliquée. Bien qu’originaire de Provence le chef fait la part belle à certains produits du Sud-Ouest comme le foie gras à consommer avec modération malgré l’enthousiasme de son collègue et sûrement ami, le célèbre chef d’Auch André Daguin, vantant largement leur richesse en Oméga 9 !

Voilà de quoi ravir le palais des cardiaques gastronomes qui ne veulent pas sombrer dans un défaitisme culinaire, véritable porte d’entrée à un syndrome dépressif !

Enfin cerise sur le gâteau, le modeste prix de cet ouvrage le met à la portée de la plupart des bourses. ■

■ Dr Bruno Fontanet, cardiologue Alain Béchis maître-cuisinier Edition La Taillanderie – 9,90 €




Une tête de caractère de Franz-Xavier Messerschmidt

345 – Christian Ziccarelli – Franz-Xavier Messerschmidt (1736-1783) _ Il naît en 1736 dans un milieu modeste d’artisans, à Wiesensteig (Jura Souabe). Il reçoit une première formation à Munich, dans l’atelier de son oncle Johann-Baptist Staub, sculpteur à la cour. Le 4 novembre 1755, il s’inscrit à l’Académie des Beaux-Arts de Vienne, où il acquiert une grande maîtrise de la sculpture. Après la réalisation des portraits sculptés de la famille régnante (dont celui de l’impératrice Marie-Thérèse), il gagne Rome au début de l’année 1765, où il partage son temps entre l’étude des antiques et l’anatomie. Suite à la mort inattendue de l’empereur François 1er, il est rappelé à Vienne pour exécuter son effigie. C’est alors une période faste, sculptant des oeuvres religieuses, les premiers bustes des ses amis et ceux de personnalités influentes. Une rupture se produit dans sa vie à partir de 1771, il n’a plus aucune commande, sa situation financière devient rapidement intenable. Souffrant de troubles mentaux, il ne sera pas nommé à la tête de l’Académie. De retour dans sa ville natale (1777), il retrouve un certain crédit auprès de ses contemporains et réalise plusieurs portraits en buste. Toutefois son entourage le considère comme un « drôle d’homme ». Il meurt d’une pneumonie en 1783, à l’âge de 47 ans.

Les « Kopfstücke » _ Dès 1771, il commence à sculpter ces « têtes » mystérieuses et expressives qui fascinent et interpellent l’observateur. Ni signées, ni datées, elles ne sont pas destinées à être vendues. Une lithographie sur papier, insérée dans le journal « Der Adler » a joué un rôle fondamental pour la reconstitution de cet ensemble. Des quarante-neuf têtes brièvement décrites, trente-huit sont aujourd’hui répertoriées. L’éditeur et homme de lettres berlinois, Freidrich Nicolai (1733- 1811) relate sa rencontre avec Messerschmidt : « Toutes ses têtes étaient des autoportraits. Il regardait toutes les trente secondes dans le miroir et faisait, avec la plus grande précision, la grimace dont il avait besoin… ». L’artiste les aurait conçues comme des effigies effrayantes capables de tenir à distance les esprits qui le persécutaient moralement et physiquement. En fait le mystère de ces visages convulsés reste entier. « C’est moins un panorama des passions, où un hémicycle de la bêtise humaine comme les bustes de Daumier, qu’une répétition, une variation sur un type unique de visages contractés, aux yeux clos, aux bouches effacées ou transformées en becs tendus, vers un objet de convoitise, têtes enfoncées sur leur torse ou juchées sur des cous aux tendons crispés »( Les stupéfiantes têtes de Messerschmidt. Jean-Louis GAILLEMIN. Grande Galerie, le Journal du Louvre n°14, déc./Janv./fév. 2010-2011). Ces têtes sont uniques. Regardées comme des spécimens de foire, elles ont été vendues aux enchères et dispersées en 1889. Leur redécouverte ne date que du début du XXe siècle. Celles qui sont restées à Vienne ont fasciné les artistes de la Sécession et les psychanalystes. Exécutées en métal (alliage à base d’étain et de plomb) ou en albâtre tacheté assez grossier, ces têtes, exclusivement masculines et correspondant à différents âges, sont strictement frontales et surmontent l’amorce d’un simple buste.

L’Homme qui bâille (1771-1781) (Franz-Xavier Messerschmidt (1736-1783). Catalogue de l’exposition du musée du Louvre. Janvier 2011 : 162-167.) _ Freidrich Nicolai vit cette tête chez Messerschmidt en juin 1781. Considéré comme un autoportrait bâillant, c’est une oeuvre en étain portant le n°5. Elle fait partie d’un ensemble constitué de têtes de vieillard grassouillettes ayant des caractéristiques voisines. Il s’agit d’une grosse tête rasée. La bouche, grande ouverte, laisse apparaître l’insertion de la langue et les dents, avec un grand soin dans les détails. On ne voit du cou que de grandes rides. Le nez est froncé, les paupières sont fermées, le coin des yeux est formé de plis descendant jusqu’aux joues.

Certains critiques ont vu dans cette représentation plutôt une réaction à une souffrance extrême, comme un cri. Messerschmidt avait certainement eu connaissance des travaux sur l’expression des passions, base de l’enseignement académique. « Toute une série de représentations similaires sont empruntées à l’histoire de l’art et la rapproche en outre de modèles figurant dans les traités de physiognomonie de Parsons et de Le Brun. »( Franz-Xavier Messerschmidt (1736-1783). Catalogue de l’exposition du musée du Louvre. Janvier 2011 : 162-167.) ■(gallery)




Les réseaux sociaux : utilité ou simple phénomène pour jeunes ?

345 – Twitter _ Ce réseau est là pour partager de l’information ou coup de coeur en temps réel avec des abonnés. L’information mise en ligne ressemble à une suite de textos (SMS (SMS : Short Message Service)]) car vous êtes limité à 140 caractères. Ce réseau est davantage utilisé en France par les politiques et les journalistes. En vous abonnant au fil des actualités, vous recevrez les dernières nouvelles d’un journal ou ce que votre politique est en train de faire, vous aurez ainsi toutes les informations en direct. L’intérêt de cet outil est qu’une information intéressante que vous avez reçue peut être redirigée à ceux qui sont abonnés à votre fil d’actualités, qui eux-mêmes peuvent la rediriger (exemple : Le 20 minutes, Xavier Bertrand, Mutuelles de Santé, UMESPE…). En cardiologie, vous pourrez suivre Institutcardio (Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa au Canada).

■ [www.twitter.com

Facebook _ Indéniablement le réseau le plus important du monde avec 15 millions d’abonnés en France. L’idée principale de ce réseau était de proposer une plate-forme de partage d’informations et d’outils de communication. Avant Facebook, les gens mettaient d’un côté sur le net leurs photos, et de l’autre, utilisaient des outils comme MSN pour chater en direct. Facebook a permis d’avoir ces deux outils en un, puis s’est développé à l’image de l’iPhone avec l’Apple Store, ainsi vous pouvez ajouter des applications gratuites ou payantes sur Facebook. Au fil des années, Facebook s’est professionnalisé. Parallèlement aux informations ou photos personnelles mises en ligne par les internautes, les grandes entreprises ont créé leur propre page sur Facebook pour faire des annonces différentes qu’une pub dans un journal (Ducati : 644 000 fans, Dior : 5 millions de fans, Michael Jackson : plus de 40 millions de fans…). Le monde de la Santé n’est pas en reste et des pages de journaux scientifiques sont apparues comme Science, UMESPE, Fédération Française de Cardiologie, American College of Cardiology, Journal of Invasive Cardiology , European Society of Cardiology, American College of Cardiology …

www.facebook.fr

A noter _ Lorsque l’on surfe sur des sites de réseaux sociaux, il est primordial de vérifier, voire de modifier les paramètres de confidentialité sélectionnés. Il ne faut pas confondre le personnel et le professionnel. Le 20 mai 2010, La Revue du praticien a effectué un sondage auprès des jeunes étudiants parisiens (entre la seconde et la sixième année). Parmi les 636 personnes ayant répondu, 87 % ont un profil Facebook. La plupart des sondés sont assez transparents sur leurs informations personnelles (identité, études…), même si celles-ci ne sont pas forcément accessibles à tous. 55 % refuseraient, automatiquement, l’invitation d’un patient à entrer dans son réseau d’amis, mais 44 % verraient au cas par cas. _ L’Ordre des Médecins a récemment rappelé qu’un praticien ne doit pas s’engager dans des relations amicales avec ses patients, ceci pour des raisons éthiques et déontologiques. ■

Le décès de Steve Jobs a provoqué un flot ininterrompu de réactions sur les réseaux sociaux Twitter et Facebook où les fans ont rendu hommage à « l’incroyable créateur » qu’était le cofondateur d’Apple.

(gallery)




Les inégalités de santé dans les territoires français : état des lieux et voies de progrès

345 – Emmanuel Vigneron part du constat que l’analyse des indicateurs qui ont permis de classer la France comme l’un des pays dont les habitants connaissent la meilleure santé (durée de vie, mortalité évitable, accès au système de soins), masque des inégalités très fortes, parfois plus fortes que dans d’autres pays. « Pire, certaines de ces inégalités se creusent », démontre-t-il : ainsi les écarts extrêmes d’espérance de vie en France dans les régions et les départements augmentent actuellement. Passant de 7,2 ans pour les hommes et 5,5 ans pour les femmes en 1954 à respectivement 5,7 ans et 3,2 ans en 1999, ils sont remontés à 6,3 ans et 3,9 ans en 2010, alors même que la durée de vie moyenne continue de croître, 70 ans en 1958, 80 ans en 2004 et 81,2 ans en 2010. Ces variations sont encore plus amples à l’échelle des bassins d’emploi ou des communes, voire des quartiers dans certaines villes.

De nombreux exemples viennent démontrer et parfois expliquer ces faits. Ainsi la « Relégation des périphéries ». L’analyse cardiographique des indices de mortalité de la Bretagne (Cartes ci-dessous) est visuellement évidente que ce soit pour la mortalité globale, celle liée aux cancers des voies aérodigestives ou celle liée aux maladies cardiovasculaires.

Ainsi, au cours de ce passionnant travail, l’auteur analysera les données et en formulera vingt-six propositions tant au niveau local que régional et national. Toutes ces propositions ont été élaborées avec un groupe de travail constitué des personnalités impliquées ou d’expertise reconnue : experts scientifiques, usagers et patients, praticiens, administrateurs, élus locaux et nationaux.

Ces propositions sont parfois très conceptuelles, mais souvent concrètes et directement applicables, exemples à l’appui. Elles ont toutes comme finalité de préserver ou d’améliorer l’accès aux soins. Lui-même à l’origine du concept de territoire de santé, l’auteur revient dans sa vingt-sixième et dernière proposition sur la nécessité de redéfinir les dimensions de ces territoires dont la définition réglementaire est souvent trop vaste pour être adaptée aux besoins locaux réels. « En d’autres termes, il faut resserrer les mailles des territoires de santé pour faire vivre la démocratie sanitaire et assurer un engagement actif des professionnels et des élus… ». Les échelles de ces territoires doivent être à géométrie variable en fonction des besoins locaux, allant du niveau communal pour une maison de santé de soins primaires au niveau cantonal et parfois départemental pour l’accès à la médecine spécialisée ambulatoire, jusqu’au niveau régional, voire interrégional et parfois transfrontalier comme le programme de coopération franco-belge de la Grande Thiérache. Mais ce maillage ne doit pas par aboutir à un hospitalocentrisme absolu articulant toute la chaîne de soins autour du seul CHU régional, mais au contraire à une juste répartition des ressources humaines et fi nancières au service des patients et usagers.

Ce travail et cet ouvrage ont été soutenus institutionnellement par les laboratoires sanofi-aventis. ■

———————– Les inégalités de santé dans les territoires français – Etat des lieux et voies de progrès _ Emmanuel Vigneron _ Elsevier Masson, Mai 2011 _ 224 pages _ Prix : environ 30 euros

Sommaire – Question d’échelle : quand les moyennes masquent l’éventail des situations. – Portraits sanitaires du XXIe siècle en France. – Différenciation des territoires et inégalités sociales de santé. – Des portes d’accès aux soins à maintenir ouvertes. – Des équipements qui s’éloignent.(gallery)




Chenas 2009 Paola et Rémi Benon 71570 La Chapelle-de-Guinchay

L’appellation Chenas cultivée sur 250 hectares, la plus petite des 10 crus du Beaujolais, est située entre Moulin-à-Vent et Juliénas, si bien que ce vin est plutôt classé dans les Beaujolais corsés, puissants et charpentés que dans ceux soyeux et délicats, tels le Fleurie ou le Saint-Amour. Cependant, les méthodes de vinification de la famille Benon procurent à ce vin, une finesse et un velouté assez particuliers et originaux.

Je vous avais révélé, dans Le Cardiologue n° 318, mon vigneron préféré de Morgon, Roger Thévenet, auquel je suis fidèle depuis plus de 25 ans ; dans la même veine, je vous invite à découvrir une production, à laquelle ma belle-famille était attachée depuis plus de 50 ans et que j’ai immédiatement adoptée.

Rémi Benon a dû reprendre en 1982, à l’âge de 16 ans, à la suite du décès précoce et brutal de son père, l’exploitation familiale, pour la maintenir à un haut niveau qualitatif dans les appellations Saint-Amour, Juliénas et Chenas, vers lequel va mon inclination.

Les vignes sises sur Chenas et la Chapelle-de-Guinchay sont cultivées sur un terrain granitique traversé par des filons argileux, de la façon la plus naturelle possible, utilisant le minimum d’herbicides et de produits chimiques. Elles sont plantées serrées, 10 000 pieds/hectares, avec une taille Guyot simple, et enherbées. Un ébourgeonnage sévère est effectué et, si nécessaire, une vendange au vert permettant des rendements faibles pour la région de 40 à 45 hl/ha. Les vendanges sont, comme dans tous les bons domaines de l’appellation, purement manuelles, afin de conserver intacts les raisins, totalement éraflés, avant la mise en cuve.

Une macération à la bourguignonne

Contrairement à la plupart des vignerons du Beaujolais qui pratiquent une macération semi- carbonique, Rémi Benon procède à une macération sur 10 à 12 jours en cuve ouverte, à la bourguignonne, le chapeau protégé par une grille en bois, à une température de 20 °, sans pigeage, le levurage étant naturel. L’élevage est réalisé dans des cuves en acier émaillé, sans aucune utilisation de bois, pendant 9 mois. Le sulfitage est léger, la cuvée 2009, ci-présentée, n’a pas été chaptalisée. Il faut souligner que ce millésime 2009 fût, en Beaujolais, une réussite historique grâce à une météo idéale et un état sanitaire parfait de la vigne.

Ce Chenas 2009, quoiqu’encore un peu jeune et que l’on pourra facilement attendre 4 à 5 ans, est un vin à la robe rubis teintée de grenat gourmand, friand, rond d’une belle longueur. D’emblée, de puissants parfums de pivoine et de violette vous enchantent, escortés en bouche par d’envoûtants arômes de fruits rouges : cerise craquante, framboise, groseille. Les tanins soyeux, intégrés par une acidité parfaite, établissent belle harmonie et parfaite structure.

Ce Chenas, comme les autres crus du Beaujolais, escortera gaillardement charcuteries, cochonnailles, jambons persillés, terrines et rillons. Il s’accordera mieux encore avec un assortiment de tapas et jambons crus, une tarte ou une tourte aux lardons. Certains gastronomes lui réservent tout particulièrement une salade composée d’avocats et tomates-cerise au cumin, une purée de potiron aux oeufs brouillés et ciboulette, une brochette de poulet mariné au paprika. En vieillissant, ce Chenas se complaira avec un pigeon ou un petit gibier à plumes.

La frénésie médiatique planétaire pour le Beaujolais Nouveau étant (heureusement) en train de retomber, il n’est que temps de s’intéresser aux vrais et bons Beaujolais, comme ce Chenas qui, de plus, est proposé à des tarifs d’une douceur angélique.(gallery)




Cour-Cheverny Cuvée François 1er 2004 – Domaine des Huards – Michel Gendrier

Inscrit dans le patrimoine, au même titre que les magnifiques châteaux de Chambord et de Cheverny tout proches, le Romorantin, cépage unique des vins de Cour-Cheverny, mérite indéniablement d’être découvert et apprécié. Grâce à lui, la petite histoire oenologique et la grande histoire de France se rejoignent, lorsque, en 1519, François 1er fit venir de Bourgogne, 80 000 plants d’un cépage probablement issu du croisement d’un pinot avec du gouaix blanc, pour les cultiver autour de sa résidence, le Clos de Beaune, où il projetait de construire un château. Il en avait confié les plans à Léonard de Vinci, alors retraité au Clos Lucé, qui imagina, non seulement un palais grandiose, mais aussi une ville conçue sur l’eau avec un système de canaux et de moulins : une nouvelle Rome. La mort de Léonard de Vinci mit un terme à ce projet, la ville prit néanmoins le nom de Romorantin et François 1er choisit… Chambord, ce dont nul ne se plaindra !

Des vins originaux d’une remarquable personnalité

Le cépage ainsi transplanté, lui aussi baptisé Romorantin, se révéla particulièrement adapté aux terres argilo-silico-calcaires entourant la petite ville de Cour-Cheverny qui obtint, en 1993, une AOC spécifique.

Les vignes sont fragiles, vulnérables au vent, car les brins sont très cassants, les raisins à peau fine éclatent facilement et restent sensibles à la pourriture et à la coulure. Ce cépage blanc très productif, doté d’une acidité naturelle élevée, se récolte en octobre à la fin des vendanges. Il génère des vins originaux d’une remarquable personnalité, le domaine des Huards, dirigé par Jocelyne et Michel Gendrier, représentant l’une des figures emblématiques de ce vin solognot du Loir-et-Cher.

Le domaine mène une viticulture biodynamique n’utilisant aucun produit de synthèse, aucun désherbant, ni substance chimique, les sols sont labourés, les pulvérisations de bouillie bordelaise, de souffre à doses infinitésimales conservent le potentiel naturel des terroirs et la vie microbiologique des sols. Une taille sévère permet des rendements raisonnables (45 à 50 hl/ha) sur une surface de 8 hectares pour le Cour-Cheverny, alors que les lois d’appellation autorisent 60 hl/ha.

La vinification opère un pressurage doux suivi d’un débourbage statique. Seules, les levures indigènes présentes naturellement agissent pour la fermentation entre 18 et 20°, à la fi n de laquelle le soutirage est réalisé. La cuvée François 1er, issue de vieilles vignes de 60 ans d’âge moyen, bénéficie pour deux tiers d’un pressurage direct et pour un tiers d’une macération pelliculaire de 15 heures, puis d’un élevage en cuve inox de 6 mois sur lies fines. Le bois est proscrit.

Une palette aromatique étendue et complexe

La dégustation de ce Cour-Cheverny 2004 cuvée François 1er est, pour le moins, surprenante. La robe est légèrement dorée ; à l’ouverture, il apparaît fermé, rétracté avec des nuances de chèvrefeuille, mais il va très vite s’épanouir, surtout si, comme cela est hautement recommandé, vous le carafez. Au nez apparaissent des flaveurs mentholées, d’herbe sèche, de fleur de pissenlit et de cire d’abeille. En bouche, l’attaque est onctueuse, puis le vin explose avec une forte minéralité et un festival aromatique de beurre doux, d’angélique, de noix verte et de fruits exotiques. L’équilibre entre finesse tactile et puissance, de même que la persistance fraîche, minérale, racée, sont impressionnants.

Décidément, ce vin n’est à nul autre comparable, car, au cours de la dégustation, j’ai de prime abord évoqué un Chardonnay, puis un petit Manseng, pour conclure finalement à un croisement entre Chenin et Riesling ! Ce vin, doté d’une palette aromatique étendue et complexe, permettra des accords mets – vins variés et subtils. Il épousera, avec allégresse, poissons et viandes fumés, coquilles Saint-Jacques, surtout aiguisées par quelques pincées de truffes. Son onctuosité et sa minéralité se marieront voluptueusement avec un brochet au beurre blanc, une poularde sauce Albufera, un veau fermier à la crème. Il ne repoussera pas les fromages à pâte molle : Vacherin d’Abondance, Pont-l’Evêque, reblochon avec une tendresse particulière pour le Brillat-Savarin.

De plus, les tarifs de ce Cour-Cheverny cuvée François 1er sont aussi doux que l’est cet élixir. Grâce soit rendue à ces artisans courageux et doués qui, en pérennisant le cépage Romorantin, le gravent dans la mémoire viticole. ■

|| |Le Château de Cheverny a servi de modèle à Hergé pour le « Château de Moulinsart » du Capitaine Haddock, auquel il avait simplement enlevé les deux ailes extrêmes du vrai Château.|(gallery)




Côtes du Marmandais Clos Baquey 2006 – Elian Da Ros 47250 Cocumont

Plus tout à fait Bordeaux, pas encore vraiment Sud-Ouest, les Côtes du Marmandais, situées à cheval sur la Garonne, dans le Lot-et-Garonne, produisaient, dans un certain anonymat, des vins essentiellement replantés en cépages rouges Bordelais depuis le grand gel de 1956. Une campagne d’arrachage, provoquée par la mévente, a limité la superficie du vignoble à 1 000 hectares en 2009. Mais vint Elian Da Ros au physique d’acteur de cinéma italien, dont la famille, originaire d’un village de Vénétie, immigrée depuis deux générations, se partageait entre cultures maraîchères, céréalières et élevage, mais ne négligeait pas de vinifier, pour leur usage personnel, quelques arpents. Ainsi, son père Antoine avait complanté des ceps de très vieilles sélections massales de cabernet et merlot.

Dès l’âge de 8 ans, Elian Da Ros frémit d’une passion pour le vin. Après des études au lycée agricole, l’obtention d’un BTS viti-oeno à Montpellier, il fit ses classes après un bref passage chez Didier Dagueneau, pendant plus de cinq ans chez le grand Léonard Humbrecht, figure mythique du vignoble alsacien. De retour au pays en 1997, il reprit les quelques hectares familiaux, pour les agrandir progressivement en englobant les plus beaux terroirs de Cocumont (pas de plaisanterie douteuse, cocut en gascon signifie coucou !), pour atteindre actuellement 21 hectares. Son domaine sur la rive gauche de la Garonne, à quelques encablures des Côtes de Graves, est remarquablement situé sur des terres riches argilocalcaires (pour le Clos Baquey) ou argilograveleuses, bénéficiant de belles conditions climatiques à tendance océanique grâce au vent d’autan qui vient lécher les rives de la Garonne.

Elian Da Ros, traumatisé par le décès de son père d’une leucémie attribuée aux produits phytosanitaires, se convertit immédiatement au bio, certifié Agrocert en 2003, bannissant tout produit chimique remplacé par des composts organiques, et opta pour la biodynamie dès 2002. Il pratique, sur ses vignes, une taille Guyot avec un enherbement naturel un rang sur deux et un ébourgeonnage sévère. Lors des vendanges, les raisins sont totalement égrappés, récoltés manuellement, pressurés pneumatiquement. Chaque cépage est vinifié à part avec pigeage en début de fermentation, puis macération lente avec extraction très douce, la fermentation alcoolique en cuves de ciment dure 10 à 20 jours, l’élevage est réalisé en foudres et barriques de chêne pendant 24 mois pour le Clos Baquey. L’assemblage des différents cépages a lieu avant la mise en bouteille, sans collage, ni filtration. Le sulfitage est réduit au minimum. Elian Da Ros produit différentes cuvées aux noms poétiques : « Chante-Coucou », « Sua sponte », « le vin est une fête », mais sa cuvée vedette est le Clos Baquey provenant d’une seule parcelle de 5 hectares, assemblage de 1/3 de merlot, 1/3 de cabernet franc, 15 % de cabernet sauvignon et 20 % d’abouriou. En effet, il a ressuscité ce cépage rebelle, précoce, très réducteur et sensible à l’oxydation qu’il a su dompter par une macération carbonique. C’est probablement l’abouriou qui procure l’originalité de ses vins rouges grâce à sa robustesse, mais aussi ses touches fl orales et épicées.

Ce Clos Baquey 2006, à l’ouverture, m’est apparu décevant, fermé avec un peu d’acidité volatile, et ce n’est qu’après une longue aération le lendemain que j’ai pu apprécier sa concentration, son opulence et sa richesse. Le verre mire une robe pourpre et noire, légèrement trouble du fait de l’absence de filtration. Le nez dévoile de doux parfums de fruits noirs : cassis, sureau, mûre, puis affluent des arômes spécifiques de Da Ros, et probablement du cépage abouriou : zestes d’orange, cacao, épices et piments doux sur un fond délicatement boisé. La matière dense et suave, avec des tanins fermes, mais bien mûrs, tapisse la bouche dans un ensemble équilibré, où les fruits noirs, la cannelle, la vanille explosent et amènent une finale longue, tendue et prometteuse.

Ce Clos Baquey, par sa richesse et sa complexité, épousera de nombreux plats à base de viande ou de volailles. Il escortera galamment : viandes grillées, brochettes diverses, entrecôte marchand de vin, mais il s’épanouira mieux encore avec des préparations plus complexes : train de côtes accompagné de cèpes, caneton de Challans aux navets, faisan aux raisins, magret de canard en aigre douce sur une poêlée de champignons. Accord presque parfait : le carré de porc au boudin noir de Ducasse.

Afin d’éviter ma déception initiale et l’apprécier à sa haute valeur, il faut impérativement carafer plusieurs heures, voire 24 heures à l’avance, ce Clos Baquey 2006.

La qualité de ce magnifique flacon reflète celles d’un homme fier, passionné, perfectionniste qui réussit ainsi à traduire sa sensibilité et ses vibrations les plus intimes dans son vin. ■(gallery)




Champagne Roland Sage 1990 – 51530 Chouilly

Roland Sage est décédé il y a deux ans. C’était un ami, aussi ma proposition de célébrer, avec des bulles, les fêtes de fin d’année va être teintée de tristesse.

à la tête d’une petite production à Chouilly, village emblématique de la Côte des Blancs, Roland Sage produisait exclusivement, en millésimé, du grand cru blanc de blanc de Chardonnay.

Il a toujours refusé la publicité, l’inscription dans les guides oenologiques et, en fait, s’occupait peu du côté commercial de son entreprise, car il avait toujours entretenu un vaste réseau d’amitié lui permettant de vendre, sans difficulté, sa belle production, notamment dans le milieu médical. Avouons qu’il était efficacement aidé par son frère Roger, cadre d’un grand laboratoire pharmaceutique, avec lequel nombre de cardiologues maintenant un peu âgés avaient sympathisé, notamment en tant que co-organisateur avec le regretté Roger Wittlin, des dynamiques et exotiques séminaires d’échocardiographie dans les années 1980. Roger Sage ne manquait jamais d’amener à une époque, maintenant malheureusement obsolète, où les relations avec l’industrie pharmaceutique étaient empreintes d’amitié et de convivialité, les flacons de son frère Roland lors de toute réunion médicale…

La recette secrète des Maisons Sage

L’élaboration du Champagne Roland Sage était parfaitement classique avec quelques particularités : outre la grande qualité des raisins des terroirs Grands Crus de la Côte des Blancs, Roland Sage pratiquait un remuage et un dégorgement manuels jusque dans les années 2000, et surtout il utilisait une liqueur de dosage selon une recette secrète des Maisons Sage – Champion permettant un brut faiblement dosé à 10 g/l. En outre, les millésimés vieillissaient plus de quatre ans dans ses belles caves crayeuses.

Roland Sage était un bon vivant, un épicurien dans toute l’acception du terme et je le verrai toujours, lors du mariage de sa nièce, sabrer un nombre incroyable de ses très vieux flacons et, à chaque flûte, nous affirmer d’une lippe gourmande « ça, c’est du vin ! ».

Ce Brut Sage 1990, malgré son âge canonique pour un Champagne, présente une corpulence étonnante et une vigueur primesautière. Les bulles s’égrènent toujours aussi nombreuses et pétillantes que celles d’un jeunot de quelques années. En bouche, déferlent des arômes d’agrumes citronnés, de fleur blanche, de noix fraîche, à peine teintés d’un léger nez d’oxydation, champignon et gibier. Roland Sage a certainement signé avec ce millésime magnifique, l’une de ses plus grandes réussites. Ce splendide flacon, malheureusement le dernier de ma cave, fut dégusté en apéritif lors d’une récente fête familiale, mais je regrette de ne pas lui avoir offert un plat de prestige, tel un turbot au champagne ou un croustillant de bar au foie gras…

Le Champagne Roland Sage a disparu depuis le décès de son propriétaire, mais son neveu, avec lequel il collaborait depuis de nombreuses années, garde sous le label Roland Champion, une qualité très proche, notamment pour les millésimés, de celle que Roland Sage avait atteinte et ses vins sont hautement recommandables.

Par ailleurs, je vous rappelle l’excellent rapport qualité/prix du Margaine Spécial Club (voir Le Cardiologue 327) ou, si vous cherchez le haut de gamme, je vous conseille fortement le Billecart Salmon Brut réserve, élu meilleur Brut du monde par Decanter, qui honorera splendidement toutes vos fêtes. Roland, où que tu sois, nous continuerons à célébrer le culte de l’amitié grâce aux bulles de Champagne en ayant toujours une pensée pour toi… ■

(gallery)