L’ancien monde bouge encore

Deux chiffres permettent d’évaluer le véritable enjeu du PLFSS 2018 en cours de débat parlementaire : un peu plus de 250 millions d’économies attendues d’un parcours de soins rendu plus « efficient ». Et cela au prix d’un investissement dans un « Fonds pour l’innovation » doté de… 30 millions d’euros. Dont 10 millions seulement « à la main » des ARS !

Toute la contradiction de la commande gouvernementale se lit dans ce fossé entre l’objectif et les moyens. Dans n’importe quel autre secteur de l’économie, assigner une telle performance aux acteurs prêterait à sourire ; c’est pourtant bien celle que le Gouvernement Philippe assigne aux médecins dans le prochain exercice budgétaire.

La conséquence en est d’ores et déjà prévisible : hors de portée, l’assignation comptable ne sera pas atteinte et la Cour des comptes en rendra le corps médical responsable dans une prochaine livraison. La mécanique infernale de la stigmatisation vient de recevoir un nouvel élan.

Ceux qui attendaient une nouvelle posture du Gouvernement dans la gestion des questions de santé en seront pour leurs frais : l’ancien monde se porte bien dans les coulisses du pouvoir politique. Je veux parler des administrations centrales qui sont généralement à l’œuvre derrière ces chiffrages aveugles.

Le paradoxe, c’est que le discours politique est d’une autre nature : on a envie de croire à la sincérité de Mme Buzyn lorsqu’elle affirme dans un entretien récent à la revue Egora : « Le système de santé français n’est pas mauvais. Les médecins ont tous l’habitude de discuter entre eux, mais l’idée c’est de donner la possibilité, à travers des protocoles de coopération simplifiés, d’écrire et de mettre en avant l’exercice coordonné pour entrer dans une responsabilité territoriale. Le médecin isolé a un impact dans sa façon de prendre en charge les patients, et il est important d’avoir une vision territoriale de cela. »

La coordination à la bonne échelle du territoire : comment ne pas être d’accord ? Mais comment ne pas déplorer d’en lire la traduction comptable dans le seul texte qui vaille : la « feuille de route » budgétaire ?




Abandon du tiers-payant généralisé et obligatoire, une victoire syndicale !

L’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) avait été saisie par la ministre des solidarités et de la santé, Mme Agnès Buzyn, dLune mission sur l’évaluation de la généralisation du tiers-payant, afin d’expertiser la simplicité, la rapidité et la fiabilité du tiers-payant pour les professionnels de santé.

Ce rapport reprend très largement ce que nous nuavons jamais cessé de dire.

Il confirme que la pratique du tiers-payant est très diverse selon les professions. Les pharmaciens, les infirmiers, les centres de santé sont proches de 100 % quand les médecins généralistes et spécialistes (hors radiologues) sont autour de 40 % et les chirurgiens-dentistes moins de 25 %. Ces chiffres sont influencés par le poids des ALD et les règles juridiques de chaque profession. Mais il est aussi observé une forte disparité selon les territoires et selon les secteurs daexercice. Il se dégage dans chaque profession deux camps nettement opposés, deun côté celui qui pratique pas ou très peu le tiers-payant (entre 0 et 9 % des actes), de luautre celui où le tiers-payant est quasi généralisé (entre 90 et 100 % des actes).

Il estime que, en assurance obligatoire (AMO), la pratique du tiers-payant fonctionne de manière globalement satisfaisante, mais que le principal frein à son développement est principalement un problème de confiance. Pour laassurance complémentaire (AMC), le problème est technique, notamment pour l’identification des droits.

Il reconnaît aussi le caractère chronophage du tiers-payant, avec comme conséquence  un coût financier que laon fasse la gestion soit même ou, comme les pharmaciens, par le recours à des intermédiaires.

In fine la mission considère que, en AMO, la généralisation est un objectif techniquement réalisable à brève échéance sous réserve que soit mis en œuvre un accompagnement renforcé des professionnels de santé et que, en AMC, la généralisation nuest un objectif atteignable techniquement à compter de 2019 que pour certaines professions de santé. Et encore faudra-t-il développer de nouveaux outils informatiques, mettre en place un dispositif d’accompagnement renforcé des professionnels de santé et sans doute aussi des mesures incitatives.

Dans la foulée de ce rapport la ministre a fait voter par le Parlement un amendement dans le cadre du PLFSS 2018 pour lever l’obligation d’appliquer le tiers-payant à compter du 30 novembre 2017. A  la place le Gouvernement remettra d’ici le 31 mars 2018 un rapport au Parlement détaillant les modalités de mise en œuvre du tiers-payant généralisable et ce après une large concertation.

Que retenir de tout cela ?

La victoire d’un combat syndical contre un tiers-payant généralisé et obligatoire, mortifère pour le caractère libéral de la médecine, chronophage, au coût non compensé et techniquement et administrativement irréaliste.

Un premier geste de la ministre pour rétablir la confiance avec les médecins libéraux, ce qui nea pas manqué de soulever laindignation de Marisol Touraine dont les échecs électoraux niont manifestement pas remis en cause son dogmatisme !

Et rester vigilants sur loévolution des travaux qui doivent conduire vers le tiers-payant généralisable et non obligatoire promis par le Président de la République.




La cardiologie en 10 leçons…

Et une réforme de plus que l’ancienne ministre ne nous aura pas épargnée en publiant même le dernier arrêté la veille du premier tour de l’élection présidentielle et en pleine contestation des acteurs concernés, internes, syndicats, collèges professionnels… ! Il fallait coûte que coûte mettre en place la réforme du 3e cycle des études médicales comme si c’était une urgence prioritaire pour le pays.

Plusieurs voies permettent aujourd’hui la qualification à une spécialité, celle du DES par le biais de l’internat, celle de la Commission ordinale de qualification pour les médecins déjà exerçant et qui veulent changer de spécialité, celle de la reconnaissance, automatique, d’un diplôme européen et enfin celle des autorisations ministérielles pour les diplômés étrangers hors Europe.

En cardiologie, 70 % des nouveaux qualifiés sont issus du DES et, à part égale pour les 30 % restants, de la voie européenne et de celle des autorisations ministérielles.

La réforme s’appuyait initialement sur un constat partagé de simplifier le cursus, d’assurer un meilleur suivi de l’étudiant, de décloisonner les spécialités et de s’appuyer sur de nouveaux outils pédagogiques apportés par les nouvelles technologies.

Mais comme bien souvent les priorités budgétaires ont pris le pas sur les considérations académiques.

L’augmentation du numerus clausus ces dernières années se traduit en effet par un afflux d’internes qu’il va être difficile de former et financer. Résultat, la dernière phase dite de consolidation ampute, de facto, d’une année la formation. Et tout laisse penser que cette phase, qui requiert d’avoir soutenu sa thèse, se substituera à l’assistanat dont il n’est pas prévu une augmentation significative des effectifs. Le clinicat quant à lui sera réservé aux quelques futurs hospitalo-universitaires. On comprend ainsi la grogne des internes qui ont depuis avril débuté un mouvement de grève.

Autre aberration, les différenciations des durées de formation selon les spécialités sorties du chapeau au dernier moment, alors que depuis 2014 il était imposé un cursus de 4 ans pour toutes les spécialités médicales. Et ce sans aucune transparence ni travaux d’évaluation des besoins et évolutions de chaque spécialité. Comment peut-on justifier qu’il faille 4 ans pour former un cardiologue ou un gastro-entérologue et 5 ans un pneumologue ?

Une surspécialisation pourra s’acquérir par le biais d’une option ou formation transversale mais nul ne sait combien d’étudiants (à noter que l’on ne parle plus d’interne ni d’internat mais étudiant et 3e cycle) pourront accéder à ces formations et sur quels critères ils seront choisis. En outre qui peut raisonnablement imaginer qu’un étudiant qui n’a, ou presque, jamais  mis les pieds dans une salle de cathétérisme puisse en une année devenir autonome dans les procédures interventionnelles ?

Le bilan pour la cardiologie est redoutable. Elle se retrouve fortement dévalorisée par rapport à d’autres spécialités, elle devient même le parent pauvre de l’Europe avec la Bulgarie et la Lettonie alors qu’il faut 7 ans pour former un cardiologue au Royaume-Uni et en Norvège ! La formation est manifestement insuffisante pour acquérir les compétences requises pour un haut niveau de technicité. Elle enferme les futurs cardiologues dans des champs d’activité prédéfinis dont ils pourront difficilement s’échapper et le recrutement des équipes interventionnelles libérales est manifestement menacé.

Reforme bâclée, sans méthode, ni cohérence ni transparence, copie à reprendre !

Jean-Pierre Binon
Président du SNSMCV




Le triste bilan des années Touraine

Au terme d’un quinquennat à la tête du ministère de la Santé, un record de longévité à ce poste sous la Ve  République partagé avec Simone Veil, Marisol Touraine laissera un souvenir bien amer aux médecins.

Après la période noire de l’époque Bachelot obligeant même à un nettoyage de sa loi sous l’égide de Xavier Bertrand et Jean-Pierre Fourcade, nous pouvions espérer être sortis du totalitarisme étatique. Et de fait, les premiers pas de la nouvelle ministre étaient plutôt encourageants, signature du CAS malgré ses insuffisances et élaboration innovante de la stratégie nationale de santé même si elle était issue d’un débat pseudo-démocratique car largement biaisé par les ARS. Cette stratégie, axée sur la structuration des parcours de soins, le virage ambulatoire et la coordination interprofessionnelle, aurait pu déboucher sur une nouvelle dynamique favorable à la médecine de ville.

Mais, premier rendez-vous manqué, la loi de Santé tourne le dos à ce virage ambulatoire. Elle instaure le tout hôpital à travers le service public hospitalier et les GHT dont sont exclus les établissements privés, muselle la médecine de ville dans des MSP ou, mieux, des centres de santé et dans des communautés professionnelles locales sous tutelles des ARS. Elle nie la médecine libérale spécialisée de proximité pour ne concevoir la place des spécialistes qu’à l’hôpital. C’est d’ailleurs in extremis que les travaux de la commission coanimée par Jean-François Thébaut ont pu remettre dans le circuit les spécialistes au sein des communautés professionnelles territoriales de santé. Et cette loi porte le coup de grâce à la médecine libérale en instaurant le principe du tiers-payant généralisé obligatoire au nom du grand principe de l’accès aux soins pourtant nullement menacé pour cette raison.

Le deuxième rendez-vous manqué fut celui de la convention médicale dont les négociations pilotées par le ministère ont confirmé la dérive étatique. La déception est grande d’une convention qui n’apporte aucune mesure restructurante pour la médecine libérale, qui laisse de côté les médecins spécialistes, oublie largement la CCAM technique et pénalise les patients selon le secteur d’exercice du médecin. La convention ne sera d’ailleurs signée que par trois syndicats sur cinq
qui n’hésiteront pas à en attaquer immédiatement certaines dispositions !

Et pour parachever cette dérive étatique l’article 99 de la LFSS 2017 qui autorise le directeur de la CNAMTS à passer outre la négociation et imposer des baisses de tarifs, ce qu’il s’est empressé d’appliquer aux radiologues dès le mois de janvier. A qui le tour maintenant ?

Ces cinq années auront été une des pires périodes pour la médecine libérale. Dogmatisme, étatisme, discours antilibéral et hospitalo-centré auront été les lignes de conduite dominantes. La ministre s’est sciemment coupée de la représentation syndicale. Elle est restée sourde au défilé contre sa loi de 40 000 professionnels de santé dans les rues de Paris le 15 mars 2015. A trois jours du scrutin présidentiel, elle publie l’arrêté portant la réforme du troisième cycle des études médicales contre l’avis de la plupart des collèges nationaux professionnels et des internes en grève. Pas étonnant dès lors qu’un récent sondage lui confère  86 % d’opinions défavorables auprès des professionnels et  4 % d’avis positifs

Et ce pour quel résultat ? L’hôpital public ne se porte pas mieux, l’Assurance Maladie garde un déficit important, l’obligation d’adhérer à une complémentaire santé et l’encadrement des contrats responsables ont contraints beaucoup d’assurés à souscrire une surcomplémentaire, et  le malaise reste profond chez les médecins dont les conditions de travail se détériorent au fur et à mesure que leurs charges progressent.

Il appartiendra au nouveau ministre de rompre ce cycle infernal, de construire un système coordonné où chaque acteur sera dans son vrai rôle et à sa juste valorisation et, surtout, de rétablir la confiance avec des médecins  qui connaissent leur métier et sont conscients de ses enjeux sociétaux.




Besoin d’un nouveau souffle

Nous allons être appelés à élire le nouveau Président de la République. Jamais cette élection majeure de la Ve République ne se sera déroulée dans un contexte aussi mouvant qu’incertain.

À l’étranger les électeurs se sont ingéniés à démentir tous les sondages. En Grande-Bretagne le Brexit s’est imposé, aux États-Unis l’élection de Donald Trump paraissait improbable tout comme en Italie le départ de Matteo Renzi. Et pourtant tout cela est arrivé.

En France, pour la première fois, un président sortant n’est plus en capacité de se présenter. Les élections primaires ont, elles, sorti de l’échiquier un ancien président et deux anciens premiers ministres. Les affaires viennent perturber le déroulement de l’élection et creusent le fossé entre la nation et ses élus.

Comment s’étonner de cette situation après trente ans de promesses non tenues par nos élus, un état qui se désagrège moralement et financièrement, et de plus en plus de Français en situation précaire.

Peut-on déceler un sursaut à la lecture des programmes des candidats dans le domaine de la santé ?

Certes les approches se différencient sur plusieurs points. Rationnement des dépenses hospitalières contre relance des recrutements et des investissements, création d’une armée de médecins généralistes fonctionnaires contre maintien d’une médecine libérale, un secteur 2 préservé, encadré ou aboli, les complémentaires santé refondées ou dissoutes, le tiers-payant  généralisé supprimé, maintenu, ou même généralisable pour un candidat !

Tous se rejoignent pour rembourser à 100 % lunettes, soins dentaires et prothèses auditives sans d’ailleurs préciser le financement et les conditions de prise en charge.

Tous veulent des MSP, certes plus ou moins étatisées selon la sensibilité politique, ainsi élevées en nouveau dogme de l’organisation de la médecine sans ne s’être jamais posé la question de leur modèle économique, leur impact sur les territoires et leur efficience quand on sait qu’elles réduisent le recours aux médecins spécialistes et qu’il s’agit là d’un facteur de dégradation du système de soins.

Enfin force est de constater que les lois Bachelot et Touraine ne sont pas remises en cause et qu’on a du mal à voir la médecine libérale, dans toutes ses composantes généralistes et spécialistes, placée au cœur de l’organisation du système de santé dans les territoires aux côtés d’établissements de santé recentrés sur leurs missions d’excellence.

Manifestement si certaines mesures sont intéressantes nous sommes loin de ce virage qui permettra à notre pays riche de créativité et d’initiatives locales innovantes, en médecine comme ailleurs de se libérer de son carcan étatique.

Le prochain président aura la lourde responsabilité de rétablir la confiance et de libérer les énergies, de laisser le pays respirer…




Numéro 400

Ce numéro du Cardiologue revêt une forte valeur symbolique puisqu’il porte le numéro 400. C’est le 1er mars 1965  que notre syndicat,  fondé en 1949 sous la présidence du Professeur Camille Lian, publie le 1er numéro de son journal officiel, Le Cardiologue

Depuis, la revue a continuellement paru, initialement à un rythme trimestriel puis mensuel.

Le Cardiologue est la seule revue cardiologique à la fois revue socioprofessionnelle et scientifique. Cette bivalence lui donne toute son originalité et son intérêt en offrant aux cardiologues une information non seulement de qualité mais aussi la plus complète et précise possible sur tous les aspects de leur métier.

Dans les pages socioprofessionnelles Le Cardiologue apporte informations et éclairages sur tout ce qui fait l’actualité du moment dans le monde de la santé, en sollicitant des interviews des experts des sujets concernés.

Chaque numéro inclut  aussi un cahier FMC, les deux premiers numéros de l’année étant plus particulièrement consacrés aux best of des grandes études et communications des congrès américains et européens.

Nous avons tenu à poursuivre la rubrique de Vincent Guillot  sur les problèmes de nomenclature. Cela nous a paru primordial car les règles des cotations demeurent complexes et les contrôles des caisses toujours prégnants.

Au fil du temps la revue s’est aussi ouverte sur l’extérieur en s’enrichissant de rubriques sur les nouvelles technologies, la culture et les arts, sans oublier les plaisirs gustatifs à travers sa page oenologique.

À l’heure d’un monde connecté, il a été fait le choix de garder une édition papier classique à côté de numéros uniquement numériques. Mais, modernité oblige, l’ensemble des publications est consultable sur notre site internet www.lecardiologue.com, et ce in extenso pour tous les abonnés.

Le Cardiologue se félicite de ne jamais quitter dans les études sur les audiences de lecture  les  trois premiers rangs chez les médecins libéraux ou mixtes et il est au premier rang des mensuels en 2016. Qu’en soient  vivement remerciés et félicités ses collaborateurs, ses rédacteurs et ses lecteurs.

La publication d’un journal a un coût que les recettes publicitaires ne suffisent plus aujourd’hui à couvrir, son financement repose aujourd’hui essentiellement sur les abonnés.

C’est grâce à vous et à votre confiance renouvelée chaque année que nous continuerons cette belle aventure débutée il y a 52 ans et fidèle aux vœux de son fondateur d’un journal « œuvre de l’ensemble des cardiologues » et reflet « de la forme la plus représentative et la plus vraie de ce qui est notre activité professionnelle ».




Elections…

L’assemblée générale de notre syndicat qui s’est tenue le 28 janvier a procédé au renouvellement de son Conseil d’Administration d’où sont issus nouveaux Bureau et président. Hommage appuyé a été rendu à l’équipe sortante et à son président, Eric Perchicot. C’est un double choix qui a été fait : celui du changement avec l’arrivée de jeunes cardiologues et de la continuité avec celles et ceux qui en poursuivant leur engagement nous apportent leur expérience. La nouvelle équipe aura pour tâche de défendre et promouvoir les cardiologues et la cardiologie ; elle devra aussi préparer la cardiologie de demain, une cardiologie dans un exercice regroupé, une cardiologie de l’urgence et du chronique, toujours ouverte sur les nouvelles technologies.

D’autres élections se profilent, présidentielles puis législatives. Ce doit être l’occasion d’un grand débat démocratique, explicatif sur la situation du pays et l’exposé clair des réponses apportées par les différents candidats pour que les citoyens puissent faire un choix éclairé au moment du vote.

Le pays va mal, le chômage est au plus haut, de plus en plus de personnes passent sous le seuil de pauvreté, le commerce extérieur est déficitaire, la dette s’alourdit chaque mois avec la menace de la remontée des taux d’intérêts qui rendra son remboursement de plus en plus difficile.

La santé ne peut être exclue du débat comme ce fut malheureusement le cas lors des élections précédentes. N’en déplaise à notre ministre, les comptes restent déficitaires avec une dette de près de 150 milliards d’euros qui s’alourdit chaque année et à laquelle se rajoutent 3 milliards d’intérêts d’emprunt. Pouvons-nous laisser une telle facture à nos enfants sans risquer un conflit entre génération ? Pire encore ce déficit n’empêche pas une dégradation du système. L’accès aux soins devient une vraie préoccupation pour une frange de plus en plus large de la population qui vit l’angoisse de ne plus trouver de médecins ; la situation financière des établissements hospitaliers publics et privés est tendue et les médecins sont sous une pression qui les détourne de leur métier. Nous ne pouvons faire l’impasse sur des questions aussi cruciales que les sources de financement, la part entre assurance obligatoire et complémentaire, l’équilibre entre système public et libéral, l’organisation des soins avec une réponse graduée sur les territoires entre médecine générale et de spécialité et le maintien d’une offre hospitalière structurée et équilibrée entre ses différentes composantes. Il faudra bien trancher entre deux approches opposées, celle, qui progresse actuellement, d’un système entièrement sous la coupe de l’Etat et celle qui laisse la part à l’initiative individuelle, la liberté d’entreprendre, dans un cadre négocié.

Ce débat, nous sommes prêts à le porter, ce serait une grave erreur de l’enterrer au risque de lendemains douloureux.

Jean-Pierre Binon

Président du SNSMCV




Fin de partie

« Le changement est dans l’ADN de l’Amérique » a proclamé Barak Obama dans son discours d’adieu à Chicago, discours où il affirme son optimisme pour l’avenir du pays qu’il estime avoir transformé positivement.

En France le quinquennat s’achève. François Hollande en annonçant qu’il ne briguerait pas un second mandat a fait, lui aussi, le panégyrique de son action, bilan qu’aucun des prétendants socialistes à l’investiture, pourtant pour la plupart anciens ministres, ne semble souhaiter défendre.

Fin de partie probable pour Marisol Touraine, fidèle parmi les fidèles, qui aura réussi le tour de force d’être ministre des affaires sociales de la santé et du droit des femmes pendant tout le quinquennat, fait unique sous la Ve République. Que l’on apprécie ou pas ses convictions et ses méthodes, ses décisions auront dans les années qui viennent un impact profond sur le paysage de la santé. Elle aura réussi par la création des groupements hospitaliers de territoires (GHT) à faire fondre le nombre d’hôpitaux du pays, les plus petites structures étant amenées, de fait, progressivement à disparaître sans qu’elle ait eu à affronter la fronde des élus locaux. Les GHT ont l’ambition, clairement affichée dans la loi de modernisation du système de santé publié en janvier 2016, de structurer l’offre de soins dans les territoires et pas seulement en ce qui concerne l’hospitalisation.

La même loi s’est attaquée au chantier de l’organisation des pratiques ambulatoires avec la création des équipes de soins primaires (ESP), des communautés territoriales de professionnels de santé (CPTS) et des plates-formes d’appui (PTA).

Les textes règlementaires sur ces modèles d’organisation ont été publiés au Journal Officiel ces dernières semaines. Ils sont suffisamment vagues pour laisser aux Professionnels de Santé dans les territoires, quelle que soit leur forme d’organisation actuelle, la liberté de leur mise en œuvre. Ce sont toujours les individus qui font la réussite d’un projet quelle que soit la qualité de la structure imaginée sur le papier.

Madame Touraine restera l’égerie du tiers-payant obligatoire, envers et contre tout, stigmate d’un dogmatisme quasi mystique. La raison ne peut que se briser sur le mur de l’idéologie qui peut se révéler une infirmité dans les relation sociales.

Dans Fin de Partie, la pièce de Samuel Beckett, les différents protagonistes, dans une atmosphère apocalyptique de fin du monde, sont des handicapés de la vie. Nous ne sommes bien sûrs pas dans les extrémités décrites par Beckett quoique… De notre ADN semblent avoir disparu les gènes du changement chers au Président des Etats-Unis. Conservatisme et individualisme sont deux infirmités, à chacun les siennes me direz-vous, qui peuvent participer à la disparition de la pratique libérale des métiers de la santé. Fin de partie ? 2017 nous le révèlera peut-être.

Fin de partie en tout cas pour votre serviteur, qui, lui aussi en fin de mandat, transmettra le relais à son successeur à la fin de ce mois avec l’intime conviction que le pire n’est jamais sûr et que la fatalité n’existe pas.

Eric Perchicot

Président du SNSMCV