DPC : l’Etat organise la pénurie

Pour boucler le budget 2014 de l’OGDPC, l’Assurance Maladie remet au pot et jusqu’à la fin de l’année : un seul programme sera payé aux professionnels qui n’ont pas encore rempli leur obligation de DPC.

375 – En avril dernier, des estimations avaient montré très clairement que le budget de 166 millions d’euros de cette année pour le Développement Professionnel Continu (DPC) des professionnels libéraux s’avèrerait nettement insuffisant compte tenu d’une montée en charge des adhésions au dispositif plus rapide que prévu.

Face à cette menace de cessation de paiement pour l’Organisme de Gestion du DPC (OCDPC), et pour « assurer une meilleure régulation budgétaire », le Gouvernement a trouvé une parade qui ne lui coûtera rien et qui a pris la forme d’un décret paru le 13 octobre dernier. Ce texte, instaurant la suppression de l’automaticité de la prise en charge des programmes de DPC suivis par les libéraux de santé, indique que l’OGDPC « concourt au financement des programmes de DPC », cette formulation se substituant à celle de l’article R4021 du Code de la santé publique qui stipulait que ces programmes était « pris en charge » par l’OGDPC. Une petite nuance de texte qui fait une grande différence ! Réuni  le 16 octobre dernier, le conseil de gestion de l’OGDPC a entériné cette décision ministérielle et édicté les nouvelles règles.

Pour les professionnels qui se sont inscrits avant le 17 octobre à un ou plusieurs programmes de DPC, rien ne change et ils « seront bien pris en charge pour l’ensemble de leurs inscriptions dans la limite de leur enveloppe annuelle » (3 700 euros). Mais pour ceux qui ont déjà suivi un programme cette année, c’est terminé, ils ne peuvent en suivre un autre d’ici à la fin de l’année ou, s’ils le font, ce sera à leurs frais. Quant aux professionnels libéraux qui n’en n’ont encore suivi aucun cette année, l’OGDPC ne prendra en charge que « la première inscription réalisée à un programme de DPC débutant en 2014, « afin de permettre à chaque professionnel de santé qui le souhaite de répondre à son obligation » de suivre au moins un programme de DPPC annuel, indique l’OGDPC.

Le conseil de gestion de l’OGDPC a par ailleurs voté une augmentation de 13 millions d’euros du budget 2014 consacré au DPC des libéraux, 10 millions venant de l’Assurance Maladie et 3 millions étant pris sur la partie « gestion administrative » du budget de l’OGDPC et redéployés du fait d’économies réalisées. « En n’autorisant plus qu’un seul programme pris en charge d’ici à la fin de l’année, le déficit se trouve réduit de moitié, commente Eric Perchicot, président du SNSMCV. Avec, en plus, la rectification de 13 millions votée par le conseil de gestion, le budget 2014 de l’OGDPC sera ainsi tenu. »

« Sur un budget de 166 millions d’euros pour l’ensemble des professionnels libéraux en 2014, 120 millions étaient théoriquement dédiés aux médecins, explique Eric Perchicot. Et en réalité, cette enveloppe actuelle dédiée aux médecins était suffisante à ce stade. Mais compte tenu de la fongibilité des enveloppes, les médecins payent pour les dépassements des pharmaciens et des infirmiers qui ont explosé leur enveloppe. La montée en charge du système a été plus rapide que prévue, dès lors il est vite apparu que le budget serait insuffisant. » Et il y a peu de chance que le budget 2015 du DPC des libéraux –qui n’a pas encore adopté- soit adéquat.

Autant dire que les syndicats n’ont pas apprécié ces changements imposés dans le dispositif DPC. Dans un communiqué commun, la CSMF, MG France, la FMF et le SML exigent « l’ouverture d’une concertation immédiate, promise depuis des mois pour faire évoluer le dispositif, sur les bases des propositions constructives faites par les professionnels de santé en s’appuyant sur les standards européens des besoins de formation » et appellent « tous les professionnels de santé à s’élever fermement contre la destruction programmée de leur dispositif de formation ».

Une concertation, pilotée par le ministère de la santé, devrait s’ouvrir en novembre, qui devrait durer plusieurs mois, selon Monique Weber, la directrice générale de l’OGDPC. Plusieurs pistes pourraient être explorées. Outre la limitation du nombre de programmes suivis chaque année par les professionnels et la réduction du coût de formation, dans une logique de forfait, il pourrait être également envisagé de privilégier les programmes qui conduisent le plus à améliorer la qualité et la sécurité des soins.

Mais on pourrait aussi réfléchir à l’instauration d’ « équivalents de DPC », c’est-à-dire des actions de formations qui pourraient permettre aux professionnels de remplir leur obligation de DPC sans impliquer le financement par l’OGDPC. Reste à en définir les critères d’acceptabilité ! L’industrie pharmaceutique en sera-t-elle exclue ? « On va repartir comme avant, avec, à côté du DPC, de la FMC soutenue par l’industrie pharmaceutique, estime Eric Perchicot. Une solution qui, n’en déplaise à certains, n’inféode pas les médecins aux laboratoires, qui leur laissent une complète autonomie dans le choix et le traitement des thèmes. »