Les dindons de la farce ?

C’est la question que peuvent légitimement se poser les médecins spécialistes libéraux en observant la tournure que prend l’examen du projet de loi de santé à l’Assemblée Nationale. Le Gouvernement a introduit, en plusieurs temps, une pluie d’amendements à son projet de loi, présenté initialement en juin puis adopté en conseil des ministres en octobre 2014. Ce cas de figure exceptionnel montre à quel point ce projet de loi a été mal conçu.

Le Gouvernement essaye maintenant de briser l’isolement total dans lequel il se trouve, et le rejet unanime de sa loi par la totalité des syndicats représentant le corps médical libéral. Son objectif évident est de séduire la médecine générale dans la volonté de rompre l’unité syndicale. Pour ce faire, promesse est faite aux médecins généralistes que le virage ambulatoire se fera en les « affirmant comme pivot des équipes de soins de proximité ». Tous les dispositifs de soins et d’accompagnement des malades seront placés sous la « responsabilité du médecin traitant, qui sera seul en position de déclencher la coordination des soignants autour d’une plate-forme territoriale ». Dans le même esprit est envisagé un renforcement de l’articulation entre médecine de ville et hôpital avec la possibilité par des médecins hospitaliers d’exercer en libéral hors les murs de l’hôpital.

Ce montage, bricolé dans l’urgence, occulte complètement plus de la moitié du corps médical libéral, en faisant disparaître aux oubliettes toutes les spécialités autres que médecine générale.

Stop ! Non à un replâtrage dans l’urgence.

Nous réaffirmons notre adhésion à l’ambition de la stratégie nationale de santé du virage ambulatoire de la prise en charge de la santé et de l’optimisation de l’offre de soins, mais celles-ci méritent une réflexion sereine pour déboucher sur un projet équilibré, entre le premier recours où aucun médecin de terrain ne conteste le rôle central du médecin traitant, la médecine spécialisée ambulatoire qui en est  la suite naturelle et, enfin, l’échelon de l’hospitalisation.

Pour atteindre cet objectif, le rejet de la version actuelle du projet de loi par le Parlement est indispensable, pour donner le temps nécessaire à une réécriture raisonnée de l’ensemble du texte.

Nous appelons l’ensemble des organisations syndicales à ne pas être dupes des manœuvres actuelles du ministère de la santé et à rester unis dans l’intérêt de la population et de la mise sur pied d’une coordination des soins ambulatoires efficiente.

Docteur Eric Perchicot,

Président